1
SIGLES ET ABREVIATIONS
AC : Avis Consultatif
AFDI : Annuaire Français de Droit
International
AIEA : Agence internationale de l'énergie
atomique
BM : Banque Mondiale
CERDIA : Centre d'Etudes, de Recherche et de
Documentation
sur les Institutions Africaines
CIJ : Cour Internationale de Justice
CJCE : Cour de Justice de la Communauté
Européenne
CPJI : Cour Permanente de Justice
Internationale
CS : Conseil de Sécurité
FMI : Fonds Monétaire International
FUNU : Force d'Urgence des Nations-Unies
IMCO : Organisation Internationale Consultative
de la
Navigation Maritime
LGDJ : Librairie Générale de Droit
et de Jurisprudence
MARC : Modes Alternatifs de Règlement des
Différends
OI : Organisation Internationale
OIT : Organisation International du Travail
OMS : Organisation Mondiale de la
Santé
ONUC : Opération des Nations-Unies au
Congo
ONU : Organisation des Nations-Unies
OSCE : Organisation pour la
Sécurité et la Coopération en
Europe
RADIC : Revue Africaine de Droit International
et Comparé
2
RBSJA : Revue Béninoise des Sciences
Juridiques et
Administratives
Rec. CIJ : Recueil de la Cour Internationale
de Justice
SDN : Société des Nations
TAOIT : Tribunal Administratif de
l'Organisation International
du Travail
TANU : Tribunal Administratif des
Nations-Unies
TPIY : Tribunal Pénal International
pour l'ex-Yougoslavie
UNESCO : Organisation des Nations-Unies pour
l'Education et la
Culture
UPU : Union Postale Universelle
URSS : Union des Républiques
Socialistes et Soviétiques
USA : United States of America
3
SOMMAIRE
INTRODUCTION 07
PREMIERE PARTIE : UNE FONCTION CONTRIBUTIVE ..
13
CHAPITRE I : CONTRIBUTION AU DEVELOPPEMENT DU
DROIT
INTERNATIONAL CLASSIQUE
|
14
|
Section I : Contribution au développement du droit
international général 14
Section 2 : Contribution au développement du droit des
organisations internationales... 25
CHAPITRE II : CONTRIBUTION AU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE
LA SECURITE INTERNATIONALES
37
..............................................................
Section I : La pacification de la société
internationale . 37
Section 2 : La paix et la sécurité internationales
dans la jurisprudence de la Cour 44
DEUXIEME PARTIE : UNE FONCTION REVALORISABLE
55
CHAPITRE I : LES LIMITES DE LA FONCTION CONSULTATIVE
56
Section I : Une saisine moins généreuse 56
73
Section 2 : Une fonction consultative ombragée 64
CHAPITRE II : LA NECESSITE DE LA REVALORISATION DE
LA
FONCTION CONSULTATIVE
Section I : Les pistes de la revalorisation .. 73
Section 2 : Une réforme incertaine 80
CONCLUSION . 87
4
INTRODUCTION
5
La Cour Internationale de Justice (CIJ) dont le siège
se trouve au Palais de la Paix, à La Haye (Pays-Bas)1,
héritière de la défunte Cour Permanente de Justice
Internationale (CPJI)2, occupe, contrairement à cette
dernière, une place non négligeable dans le système
général des Nations-Unies plus particulièrement dans le
rôle fondamental du règlement pacifique des différends. En
effet, la CIJ, bâtie sur les fonts baptismaux depuis 1946, est le fruit
d'un vaste courant de réformes et de modernisation du système
international vis-à-vis des fluctuations nouvelles qu'a connu et
connaît encore la société internationale depuis la fin de
la seconde guerre mondiale3. Sa mission consiste à
régler conformément au droit international les différends
d'ordre juridique qui lui sont soumis par les Etats et donner des avis
consultatifs sur les questions juridiques que peuvent lui poser les organes ou
institutions autorisés à le faire4.
Continuité dans la rupture ou rupture dans la
continuité, il est souvent malaisé de prendre position quand il
s'agit de faire une étude comparée entre les deux plus grandes
institutions judiciaires étant surtout entendu que le remplacement de la
CPJI n'est en aucune façon synonyme de son désaveu ou de son
échec5.
La première position consiste à déceler
une certaine continuité entre les deux institutions judiciaires. Cette
continuité s'observe sur plusieurs plans. D'abord, s'agissant du
fonctionnement de la CIJ, l'article 92 de la Charte des Nations-Unies dispose
qu' « elle fonctionne strictement sur la base du statut de la Cour
Permanente de Justice Internationale ».En effet, la nouvelle Cour de
justice fonctionne strictement selon le modèle qu'a connu sa
devancière ; qu'il s'agisse de sa composition, de sa compétence
ou de la procédure suivie. Ensuite, comme pour la CPJI, la CIJ est une
institution permanente
1 Pour l'histoire, c'est dans ce palais, sous
l'initiative de Sa Majesté Wilhelmine, qu'a été tenue la
première conférence de la paix en 1899. Cette conférence
déboucha sur l'adoption d'un Traité qui prévoyait entre
autres, l'établissement, à La Haye, d'une cour permanente
d'arbitrage.
2 La Cour Permanente de Justice Internationale
créée depuis 1922 est l'aboutissement d'un processus
enclenché par la SDN (Société Des Nations). En effet,
selon l'article 14 de son statut « le conseil est chargé de
proposer un projet de la CPJI et de le soumettre aux membres de la
Société ». Le comité de juristes mis en
place à cet effet (10 membres) prépara un avant-projet qui fut
examiné par le Conseil le 28 octobre 1920 puis par l'Assemblée le
13 décembre 1920.
3 Pour plus de détails, cf. BENDJAOUI (M.), in
RADIC, « La place de la Cour internationale de justice dans le
système général de maintien de la paix institué par
la Charte des Nations Unies », septembre 1996, n°4, p. 542.
4Article 96 de la Charte des NU.
5 En effet, le remplacement de la CPJI se justifie
fondamentalement par des raisons d'ordre technique et politique, Cf. NGUYEN
QUOC DINH, DAILLIER (P.), PELLE (A.), Droit international public,
Paris, LGDJ, 2002, p. 525.
6
différente des autres institutions judiciaires à
caractère éphémère ou ad' hoc. L'avantage de ce
caractère permanent est qu'il permet de construire une certaine
constance de la jurisprudence6. On peut dès lors affirmer que
la CIJ a hérité d'une part belle du capital juridique de la
CPJI7.
La discontinuité, ensuite, est largement
évidente. D'abord, la CIJ, aux termes respectivement des articles 7 et
92 de la Charte des Nations-Unies, est d'abord un organe principal de
l'Organisation des Nations-Unies (ONU) et ensuite l'organe judiciaire principal
du système onusien. L'analyse montre clairement que, contrairement
à la CPJI qui n'était pas un organe de la SDN, la CIJ est
foncièrement attachée à l'ONU. Intégrée
pleinement à l'organisation et au fonctionnement des Nations-Unies, la
nouvelle Cour de justice se voit, en principe, aux côtés de
l'institution mère appelée à la réalisation de
l'objectif primordial du maintien de la paix. Ensuite, linéairement, la
politique judiciaire8 n'est strictement pas la même que celle
rencontrée dans le cadre de la CIJ. On justifie cela très souvent
par l'environnement juridico-institutionnel propre à chacune d'elle.
La création de la CIJ a suscité tant d'espoir
dans l'échafaudage d'un monde nouveau. Il est, en effet, peu opportun de
s'attarder sur les débats préliminaires qui ont
présidé à sa création. La toile de fond
était incontestablement « la création d'une
société internationale entièrement nouvelle, en
évolution constante vers le progrès, plus juste, plus
égalitaire, plus universelle, dont les membres devaient oeuvrer
activement et collectivement à l'avènement d'une paix
complète et durable »9. Cette paix était
justement la finalité de la création de la CIJ organe principal
et surtout comme organe judiciaire principal de l'ONU. Il n'est pas superflu de
relever que comme tel, la Cour est considérée comme un rouage
essentiel non seulement du mécanisme de règlement pacifique des
différends mis au point par la Charte, mais aussi du système
général du maintien de la paix.
6 Dans cette optique disait le professeur HEMBRO
(E). « Lorsqu'on a songé à constituer la CIJ, une
juridiction de caractère permanent, une des idées directrices a
été le souci d'assurer, par cette permanence même, la
constitution d'une jurisprudence, c'est-à-dire d'un corps de
décisions doté d'une certaine unité ». HEMBRO (E.),
la jurisprudence de la CIJ, Leyden, 1952, p. V.
7Cf. ARECHAGA (E. J.), « Commentaire de
l'article 92 de la charte des Nations Unies » in, COT (P.) et PELLET (A.),
Charte des Nations unies commentaire article par article, ECONOMICA,
Paris, 1991, p.349.
8 La politique judiciaire résume
l'activité d'une Cour de justice. On retrouve pour l'essentiel les
fonctions législatives des juges, la position des juges, la technique
d'interprétation des textes, la jurisprudence etc. Cf KOLB (Robert),
Interprétation et création du droit international, Esquise
d'une herméneutique juridique moderne pour le droit public,
Bruylant, Bruxelles, 2006, p. 342 - 345.
9 Propos du Président de la CIJ, BENDJAOUI
(M.) lors de la cérémonie marquant les 50 ans de la cour en 1990
in RADIC, op. cit., p. 542.
7
Pour parvenir aux côtés des Nations-Unies
à préserver la paix mondiale, la Cour dispose de certaines
compétences aussi bien en matière contentieuse qu'en
matière consultative. Alors qu'en matière contentieuse, la Cour
est habilitée à trancher sur la base du droit international
général les différends entre Etats, en matière
consultative, la saisine de la Cour est l'apanage de certaines entités
seulement des Nations-Unies. En cette dernière matière, la
compétence de la Cour est strictement liée en ce qu'elle ne peut
répondre qu'aux questions qui lui sont posées par les organes et
institutions de l'Organisation.
La fonction consultative de la CIJ est encadrée par
l'article 96 de la Charte des Nations-Unies et par l'article 65 et suivants de
son statut situé dans le chapitre IV intitulé « Avis
consultatifs ». Si certains s'obstinent à admettre la conciliation
possible de la fonction consultative d'une Cour avec sa vocation d'origine
judiciaire10, il ne fait pas de doute qu'entre les deux fonctions,
il n'existe aucune dichotomie. Bien au contraire, l'avis consultatif contribue,
d'ailleurs efficacement, bien sûr, prononcé sur la base du droit
international, à résoudre, freiner une situation susceptible de
mettre en mal la paix mondiale. Cette pratique innovante existait
déjà dans certaines juridictions anglo-saxonnes et à la
Cour suprême des Etats-Unis d'Amérique notamment au
Massachussetts11.
Le régime juridique des avis consultatifs est
caractérisé par le fait qu'ils sont dépourvus, en
principe, d'une force obligatoire ; leur portée est non contraignante.
N'étant pas un acte juridictionnel et ne possédant pas une force
obligatoire, l'avis consultatif s'analyse non comme une décision mais
comme une opinion de la Cour destinée à éclairer l'organe
qui la consulte12. Il appartient à l'institution ou à
l'organe international qui en fait la demande de décider par les moyens
qui lui sont propres de la suite à réserver à ces avis.
10 Certains auteurs ont émis des
réserves quant aux effets de la fonction consultative sur
l'intégrité judiciaire de la Cour. Si celle-ci prononçait
de simples opinions dont il serait loisible de ne tenir aucun compte, elle
risque de statuer prématurément en donnant son avis sur une
affaire qui pourrait ultérieurement lui être soumise par voie
contentieuse. Aussi, la Cour ne court-elle pas le risque de se transformer par
le biais des avis consultatifs en un conseiller juridique des organes de l'ONU
?
11 Créée depuis 1692, outre sa
compétence en matière d'Appel, la Cour suprême de
Massachussetts rend des avis sur demande du Gouverneur et de la Cour
générale sur diverses questions légales.
12 Il s'agit là d'un principe qui n'est pas
sans exceptions ; voir à cet effet, AC de la CPJI de 1923 sur les
décrets de nationalité, série B, n°4 entre la France
et le Royaume Uni ; AC de la CIJ du 23 octobre 1959 sur les jugements du
Tribunal Administratif de l'Organisation Internationale du Travail (TAOIT) sur
requête de l'UNESCO. L'acte constitutif de certaines organisations
prévoit que les avis que la Cour émettra sur les questions
juridiques qu'elles lui soumettront auront une portée obligatoire. Voir
aussi la Convention sur les privilèges et immunités des NU ;
Convention sur les privilèges et immunités des institutions
spécialisées des NU ; l'accord de siège entre l'ONU et les
USA.
8
A la lumière de l'intérêt incontestable
qu'offrent les avis consultatifs de la Cour dans le cadre de la sauvegarde de
la paix universelle par la promotion et le respect du droit international, il
est opportun de mener des réflexions sur sa revalorisation face à
une société mondiale quasiment instable.
La fonction consultative de la CIJ joue-t-elle le rôle
qu'ont voulu lui confier les rédacteurs de la Charte eu égard
à son sous-utilisation actuelle ? Il semble que cette sous-utilisation
est en partie inhérente à l'organisation même de la Cour
notamment du point de vue de sa compétence et de la procédure
à suivre. Il ressort inévitablement que la Cour ne fait pas
preuve d'une grande générosité en matière de la
compétence à la saisir. Comment expliquer par ailleurs
l'hésitation des organes et institutions à saisir la Cour par
voie consultative malgré l'autorisation qui leur est accordée ?
Le caractère permanent de la Cour offre l'avantage de consolidation de
sa jurisprudence. A l'analyse de cette jurisprudence, peut-on affirmer que la
Cour par le biais des avis contribue d'une part, à la consolidation de
la paix et de la sécurité internationales, et d'autre part,
à l'édification du droit international ?
Il s'agit, somme toute, de se prononcer sur l'enjeu actuel de
la réforme de la Cour notamment en matière consultative face aux
exigences nouvelles qu'imposent les relations entre acteurs de la
société internationale. L'une des idées essentielles
serait sans nul doute la « décentralisation » de la
compétence à saisir la Cour en matière consultative.
L'inclusion d'autres acteurs dont le rôle au plan régional ou
même local est déterminant, constituerait une réelle
avancée.
Le travail n'a pas pour ambition de faire une étude
exhaustive de la fonction consultative de la Cour vu les difficultés que
cela représente mais de partir de simples constatations et analyse des
avis rendus par la Cour pour, d'une part, relever les apports et d'autre part,
faire ressortir les dysfonctionnements et proposer des pistes de
réflexion pour la revalorisation d'une fonction si importante.
La fonction consultative, il est vrai, ne suscite pas un grand
intérêt au point d'attirer l'attention des chercheurs. On en veut
pour preuve la rareté des études et ouvrages dédiés
au sujet. Les raisons sont entre autres le caractère non contraignant
des avis et sa très moindre sollicitation. Mais, ceci ne doit en aucun
cas mettre en sourdine l'intérêt qui s'y attache. Il est double.
D'abord, d'un point de vue institutionnel, l'organisation et le fonctionnement
de la
9
Cour en matière consultative permet de faire ressortir
les limites inhérentes à la Charte de l'ONU et au Statuts de la
Cour qui délimitent sa compétence. Sur un plan purement juridique
ensuite, la jurisprudence de la Cour en matière consultative, l'attitude
des juges et le droit appliqué sans omettre l'attitude des organisations
et des Etats vis-à-vis des avis de la CIJ, permettent de revenir sur les
points saillants de la fonction consultative de la CIJ à savoir la
sauvegarde de la paix mondiale par le canal de sa diplomatie
préventive13 et l'évolution du droit international.
L'étude sur le thème « Réflexions
sur la fonction consultative de la Cour internationale de justice » sera
abordée sous deux axes. Après avoir relevé les
contributions de la fonction consultative de la Cour dans le premier axe
(Première partie), nous analyserons dans le second, la
nécessité de sa revalorisation (Deuxième partie).
13 Selon l'ex Secrétaire
Général de l'ONU GHALI (B. B) (1992-1996), « La
démocratie préventive a pour objet d'éviter que les
différends ne surgissent entre partie, d'empêcher qu'un
différend existant ne se transforme en conflits ouvert et, si un conflit
éclate, de faire en sorte qu'il s'étende le moins possible »
cf. Agenda pour la Paix, New-York, 1992.
10
PREMIERE PARTIE
UNE FONCTION CONTRIBUTIVE
Les débats préliminaires qui ont prévalu
à San Francisco font croire que c'est de haute lutte que la fonction
consultative de la CIJ a obtenu droit de cité dans la Charte des
Nations-Unies. La Cour, organe principal des Nations-Unies a toujours
considéré que sa mission était d'aider l'organisation dans
la réalisation des objectifs qu'elle s'est donnés à savoir
la sauvegarde de la paix par la soumission sans réserve au droit
international par tous les Etats membres.
La paix mondiale ne serait qu'un leurre si au sein de la
Communauté internationale il existe des Etats qui se situent dans des
zones de « non droit » au détriment d'autres Etats. La loi de
la jungle se renforcerait davantage s'il n'existe au sein de cette
Communauté internationale d'autorité ou d'organe habilité
à dire et faire respecter la règle de droit.
L'étude de la jurisprudence de la Cour en
matière consultative laisse apparaître une contribution
significative en matière de la consolidation du droit international
classique (Chapitre I) et de la sauvegarde de la paix universelle (Chapitre
2).
11
CHAPITRE I : CONTRIBUTION AU DEVELOPPEMENT DU
DROIT INTERNATIONAL CLASSIQUE
« Hors de l'empire du droit, l'humanité ne peut
atteindre ni la paix, ni la liberté, ni la sécurité qui
lui permettront de poursuivre le développement d'une
société civilisée »14.
La primauté du droit international15 doit un
devoir de gratitude aux avis de la CIJ. Les contributions des avis au
développement du droit international ont été
considérables en matière du droit international
général (Section 1) et en matière du droit des
organisations internationales (Section 2).
Section I : Contribution au droit international
général
La politique judiciaire de la Cour aux lendemains des
soubresauts mondiaux est empreinte d'une bonne dose du droit humanitaire et du
respect des droits de l'homme (Paragraphe 1). Le droit des traités par
ailleurs, a connu sous l'impulsion des avis de la Cour, guidés par les
vertus de paix, des avancées considérables (Paragraphe 2).
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