CHAPITRE 2 :
LA CONTRIBUTION DES OPERATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DE
L'ONU A UNE AMELIORATION LEGERE DE LA SITUATION DES DROITS DE
L'HOMME
Pendant des années, le tableau des OMP fût
complètement noir du fait d'un courant d'opinion qui estima que le
maintien de la paix, à la suite des conflits Rwandais, Bosnien, Somalien
était un échec296. Aujourd'hui les OMP n'ont
été ni supprimées, ni dépassées, ce qui
témoigne de leur grande importance. La réflexion de Dennis C.
Jeff paraît juste lorsqu'il écrit « on peut se demander
si (...) le maintien de la paix même lorsqu'il se solde par un
échec, est pire que l'absence totale de maintien de la paix
»297. À l'ONU, l'on répond qu' « on
se sait pas ce qui se serait passé si l'on n'avait pas été
là »298. L'échec des OMP provient du fait
que celles-ci ont souvent des mandats très ambitieux et difficilement
réalisables. Il faut néanmoins reconnaître que, si les OMP
n'atteignent pas les résultats escomptés, leurs bienfaits ne
sauraient être écartés. Ainsi, dans le domaine des droits
de l'homme les OMP contribuent à une amélioration
légère et non négligeable de la situation des droits de
l'homme. Ceci à travers leur apport dans la protection des droits de
l'homme (section 1) et à travers leur promotion remarquable dans le
même domaine (section 2).
SECTION 1 : L'APPORT DES OMP DANS LA PROTECTION DES
DROITS DE L'HOMME
Dans le domaine de la protection des droits de l'homme, les
OMP accomplissent des tâches salutaires, même si celles-ci ne
satisfont pas souvent les attentes dans ce domaine. Le déploiement des
OMP dans une zone de conflit a pour effet positif la diminution de
l'intensité des violations des droits de l'homme (paragraphe 1), et
l'amélioration de la situation humanitaire (paragraphe 2).
296 Saadia Touval, « why the UN fails », Foreign
affairs, volume73 number 5, 1994, p.44-57; Tardy (T), « Le
discrédit du maintien de la paix onusien », Cahiers Raoul
Dandurand, Montréal, 2000
297 Jett (C), why the peace keeping fails, Palgrave, 2001, p.2
298 Entrevue confidentielle réalisée par Jocelyn
Coulon, Nations Unies, New York, 4 août 2008
111
PARAGRAPHE 1 : LA DIMINUTION DE L'INTENSITE DES
VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME
Le déploiement d'une OMP a pour effet de diminuer
l'intensité des violations des droits de l'homme, ceci en raison de la
présence militaire en zone de conflit (A), et à travers les
activités de DDR (désarmement, démobilisation et
réinsertion) (B).
A- La présence Onusienne : un facteur de
réduction des violations des droits de l'homme
La présence des OMP sur le terrain des conflits a
indubitablement un effet positif sur la situation des droits de l'homme,
fusse-t-il moindre. Selon Virginia Fortna, la présence d'une OMP sur le
terrain des conflits fait une grande différence et produit en
général des effets positifs. L'auteure note comme effet positif,
la réduction de nouvelles agressions, la prévention de l'escalade
de la violence, la fourniture de dividendes de la paix, la réduction de
l'incertitude et de la peur299. En un mot, puisque les violations
des droits de l'homme sont souvent dues à la précarité de
la situation sécuritaire, les évolutions de la situation
sécuritaire à travers la présence des OMP,
entraînent également une évolution de la situation des
droits de l'homme. Nous présenterons donc les différentes
stratégies militaires des OMP qui entrainent la réduction des
violations des droits de l'homme (1) et leur mise en oeuvre par ces
opérations (2).
1- L'effet dissuasif des stratégies militaires
des OMP sur le terrain des conflits
La présence militaire des OMP sur le terrain des
conflits revêt une importance capitale en ce qui concerne la protection
des civils et par conséquent les droits de l'homme. Comme le projet du
concept de DOMP/DAM le souligne, « Les opérations de maintien
de la paix sont généralement la seule entité
internationale chargée d'assumer un rôle direct de protection
contre la violence civile. À cet égard elles ont une
responsabilité unique parmi les acteurs de la protection
»300 . À cause de cette
299 Page Fortna (V), Does peacekeeping work? shaping
belligerents, choices after civil war, Princeton University Press,
Princeton, 2008, p.2
300 Draft, DPKO/DFS, operational concept, paragraphe 16
112
responsabilité, les OMP mettent sur pied des
stratégies pour lutter contre la violence, cause première des
graves violations des droits de l'homme.
L'exploitation de la puissance militaire pour protéger
les populations civiles se fait sur les plans stratégique,
opérationnel et tactique.
Sur le plan stratégique, quatre approches permettent
d'arrêter les massacres : la dissuasion, la contrainte, la
défensive et l'offensive. La dissuasion consiste à manipuler le
comportement des cibles (ici les groupes armés perpétrant des
massacres). Il s'agit pour les OMP de fixer des interdictions aux bandes
armées et leur présenter les risques qui sont assorties à
leur enfreinte. La contrainte quant à elle renvoie à l'usage de
la menace ou d'une force limitée pour convaincre son adversaire à
agir d'une façon précise généralement à une
date butoir possible301. La contrainte permet de compléter la
dissuasion.
La défensive et l'offensive sont des méthodes
utilisées lorsque la dissuasion et la contrainte n'ont pas produit
d'effets. Ces deux méthodes diffèrent de la dissuasion et de la
contrainte dans la mesure où elles ne tiennent pas compte du
consentement des cibles. En ce qui concerne la protection des civils, la
défensive a pour ambition de sauver des victimes, tandis que l'offensive
a pour ambition de causer la défaite des adversaires. Il est très
rare que les OMP utilisent la méthode offensive car « il est
plus facile de protéger les éventuelles victimes de la
violence...qu'il ne l'est de vaincre les responsables
»302.
Sur le plan opérationnel, le manuel du projet MARO
(opération d'intervention en cas de massacre), identifie plusieurs
approches militaires pour les opérations de protection. Il s'agit de
:
? Contrôler et sécuriser une vaste région
au moyen d'unités dispersées sur le terrain (saturation).
? Accorder la priorité au contrôle des lieux
clés-choisis et expansion progressive vers d'autres zones (tâche
d'huile).
? Créer une zone tampon entre les victimes et les auteurs
de massacres (séparation).
301 Shelling (T.C), Arms and influence, New Haven,CT, Yale
University Press, 1966
302 Seybolt (T-B), Humanitarian military intervention: the
conditions for success and failure, Oxford University press, 2007,
p.218
·
113
Sécuriser les camps de personnes
déplacées et autres zones à haute densité de
populations vulnérables (zones sécurisées).
· Frapper ou isoler les responsables aux moyens de
blocus (endiguement)
· Attaquer les dirigeants et les forces des responsables
pour les empêcher de continuer les massacres (vaincre les coupables).
Sur le plan tactique, il existe de nombreuses tâches
militaires qui permettent de mettre en oeuvre la protection des civils. Ces
tâches ont été expérimentées dans le cadre
des opérations de paix africaines. Nous allons présenter celles
qui permettent une cessation ou une diminution des violations des droits de
l'homme. Il s'agit :
· de contraindre les auteurs des massacres.
· d'opérations d'endiguement et de fouilles des
bases des groupes armés.
· d'Intervention en cas de crise.
· d'Installation des bases dans les zones
d'insécurité des civils
· d'Installation de gardes.
· de patrouilles/observations/surveillances dans les
camps des personnes vulnérables.
· de suppression de barricade et de postes de
contrôle illicites sur les routes des civils.
· de missions de sensibilisation des groupes
armés.
· d'établissement de zones
sécurisées et maintien de la sécurité à
l'intérieur de celles-ci.
· de séparer les combattants de non
combattants.
Telles sont donc les stratégies militaires à
partir desquelles la présence des OMP diminue les violations des droits
de l'homme. Nous partons maintenant montrer comment les OMP les ont mis en
oeuvre.
2- La mise en oeuvre des stratégies
militaires par les OMP
Dans leur déploiement, même si les OMP
n'appliquent pas à la lettre les stratégies militaires que nous
venons de présenter, elles mettent néanmoins en pratique
certaines d'entre elles. Nous allons présenter au cas par cas comment la
présence des OMP a eu un effet positif sur la situation des droits de
l'homme.
114
? Le conflit au Libéria
Le Libéria est l'un des pays pour lesquels la
présence onusienne a eu un effet positif sur la situation
sécuritaire dans l'ensemble et par ricochet sur la situation des droits
de l'homme. Dans les rapports du SGNU sur la MINUL, nous pouvons nous rendre
compte comment ce dernier présente l'apport positif de la MINUL au
Libéria. À partir de 2006, le SGNU se dit satisfait de la
situation sécuritaire stable au Libéria. Même en 2009,
c'est le même constat établi sur la situation sécuritaire
dans ce pays. Ces rapports présentent les actions de la MINUL sur le
terrain des conflits. La MINUL est intervenue par exemple pour réprimer
de violents troubles impliquant les ex-combattants dans les localités de
Nimba, Grand Cape Mount, Grand Dede. Ainsi, dans un rapport de
2009303, le SGNU estime que sur le plan sécuritaire,
« le Libéria est resté dans l'ensemble stable depuis le
déploiement de la MINUL en 2003 ». Ce rapport poursuit en
relevant que l'effet dissuasif de la MINUL a empêché des
hostilités, qui auraient pu être causées par les
contentieux et courants politiques. Ainsi, les autorités
Libériennes et les dirigeants de la MINUL ont estimé que la
mission devait encore rester dans le pays, en se retirant progressivement. La
stabilité apportée par cette mission sur le plan
sécuritaire a des effets positifs sur la situation des droits de
l'homme. Avec le déploiement de la MINUL, les violations des droits de
l'homme dues aux violences ont considérablement diminué puisque
l'action de la mission dans ce domaine s'est focalisée sur la promotion
dans ce domaine.
? Le conflit Ivoirien
Dans le cadre du conflit Ivoirien, l'ONUCI a été
d'un apport considérable en ce qui concerne la situation des droits de
l'homme. Dans le 16ème rapport du SGNU sur la mission (avril
2008), il est constaté que la situation sur le plan sécuritaire
est stable dans le pays. Des rapports de la section droits de l'homme de
l'ONUCI présente des actions qui ont contribué à la
protection des droits de l'homme sur le terrain. Ainsi, le rapport N2 5
(janvier-avril 2006) montre comment les forces de l'ONUCI ont reçu des
populations qui se trouvaient dans une menace imminente de violence physique.
Ces personnes étaient au nombre de 300 et l'ONUCI leur a permis de se
réfugier dans ses installations. Dans le rapport N2 6 de la même
année, il est mentionné que l'ONUCI a accordé une
303 Rapport spécial du secrétaire
Général sur la MINUL, 10 juin 2009
115
protection à une trentaine de personnes qui se
trouvaient dans la menace de leur intégrité physique. Le
29ème rapport du SGNU sur la mission présente des
patrouilles exercées par la police de l'ONUCI afin d'apporter des
conditions de sécurité304. Même si des cas de
violation des droits de l'homme continuent d'être signalés en
Côte d'Ivoire, il faut reconnaitre que la présence Onusienne a eu
pour effet de diminuer leur intensité.
? Le conflit à l'est du Tchad et au nord de la RCA
Dans le conflit se déroulant à l'est du Tchad et
au nord de la RCA, la MINURCAT a été d'un apport sur le plan
sécuritaire et celui des droits de l'homme. Dans le rapport du SGNU
datant d'octobre 2009 sur la situation à l'est du Tchad, Il se
déclare satisfait des conditions de sécurité stables
instaurées par la présence de Nations Unies. Cette
stabilité a été le fait des patrouilles conjointes de la
police de la MMINURCAT et de la police du gouvernement tchadien. En ce qui
concerne la région de Vakaga, la sécurité y a
régné en raison des patrouilles effectuées par
l'opération à Birao et dans ses alentours afin de protéger
la population contre les attaques et d'aider les populations
civiles305. La MINURCAT a mené plusieurs activités
militaires dans la région de l'est du Tchad et du nord de la RCA
à tel point que l'ONU a estimé que la mission pouvait
déjà se retirer. Sur le plan des droits de l'homme, la
stabilité sur le plan sécuritaire a permis une diminution des
violations massives des droits de l'homme dues aux hostilités.
L'inquiétude de la division des droits de l'homme de la MINURCAT
résidait au moment où la mission se retirait sur les violences
sexuelles qui n'arrivaient pas à cesser.
? Le conflit en RDC
La situation des droits de l'homme en RDC est la plus
préoccupante de toutes les missions de paix déployées sur
le continent Africain. L'ONU a été face à des
difficultés énormes dans la mise en oeuvre de ses
différents mandats. Il faut reconnaitre que néanmoins les
différentes missions de l'ONU en RDC ont accompli des actes salutaires
pour les populations.
304 29e Rapport du SGNU sur l'ONUCI
305 Rapport du SGNU sur la MINURCAT, Octobre 2009
116
La MONUC a eu à faire usage de la méthode
offensive pour protéger les civils. En novembre 2006, les troupes de la
MONUC ont vaincu les forces de Laurent Nkunda en employant infanterie et
hélicoptères et tuant entre 200 à 400 hommes de ces
troupes par l'entremise. L'intervention de la MONUC dans le domaine des droits
de l'homme se heurte à une étude d'ensemble de la situation des
droits de l'homme. En effet il est important de souligner que les
opérations de maintien de la paix ne peuvent protéger toute la
population.
La MONUSCO aussi a agi dans le sens de protéger la
population contre les atrocités des conflits, surtout que l'essentiel de
son mandat reposait sur la protection des civils. Le rapport du SGNU de janvier
2012 présente ces différentes activités menées par
la composante militaire de la MONUSCO. Cette mission a conduit 10
opérations militaires, dont trois conjointement avec les FARDC (forces
armées de la République Démocratique du Congo), visant
à dissuader les groupes armés à reprendre leurs
activités et à renforcer la protection des civils, notamment dans
les Kivus. Dans la province orientale, la MONUSCO a également
lancé une opération unilatérale et trois conjointes dont
une de celles-ci était dénommée « l'opération
saint Nicolas », dans le but de protéger les civils durant la
période de noël (Décembre 2011). Elle a également
intensifié les patrouilles pendant cette période.
D'une manière générale, la perception des
missions Onusiennes en RDC se résument en « amour-haine
»306. Mais de nombreux congolais disent se sentir en
sécurité avec la présence Onusienne307.
Après avoir montré comment la présence militaire des OMP
permet d'améliorer la situation des droits de l'homme, nous allons
présenter les activités de DDR comme facteur entrainant la
réduction de l'intensité des violations des droits de l'homme.
306 Zeebroek (Z), « La mission des Nations Unies au
Congo. Le laboratoire de paix introuvable », op.cit, p. 23
307 BERCI International, « peacekeeping operations in the
Democratic Republic of Congo: The perception of the population »
étude externe menée à la demande de la Peacekeeping best
practices section (PBPS) des Nations Unies, novembre 2005, 20 pages
117
B- Les activités de DDR comme facteur de
réduction des violations des droits de l'homme.
Les opérations de DDR (désarmement,
démobilisation et réinsertion) effectuées par les OMP
marquent une fois de plus la différence de philosophie entre les OMP de
première et de deuxième génération. Dans les
opérations de deuxième génération qui sont celles
majoritaires depuis 1990, la finalité est d'agir « sur les
éléments structurels de la violence armée dans les
conflits internes c'est-à-dire sur l'ensemble d'incitations à
continuer la violence »308. Le rapport Brahimi
chargé d'étudier les OMP dans leur ensemble proposa alors
d'intégrer dans celles-ci un volet chargé du DDR. Ce n'est que
depuis le début des années 2000 que les OMP ont dans leur mandat
le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des
combattants. Ce volet est important dans la protection des droits de l'homme
dans la mesure où il permet de réduire les violations des droits
de l'homme en s'attaquant au canal par lequel la violence est produite à
savoir la puissance militaire. Dans les opérations de DDR le
désarmement permet la réduction des violations des droits de
l'homme car il permet de réduire l'intensité de la violence (1),
tandis que la démobilisation et la réinsertion permettent de
déstabiliser les groupes armés dans les conflits (2).
1- Le désarment comme facteur de
réduction de la violence
Le désarmement fait partie aujourd'hui des
éléments clés du maintien de la paix en ce que «
une des missions les plus courantes confiées aux forces militaires
agissant dans le cadre de l'ONU consiste à désarmer les factions,
tribus ou armées rivales »309. Le
désarmement correspond en dehors des activités de maintien de la
paix, à la diminution du volume absolu du nombre d'armes, puissance de
feu et des armements des États310. Dans le cadre des
activités des OMP, l'ONU définit le désarmement comme
« la collecte, le contrôle et l'enlèvement des armes de
petit calibre, des munitions, des explosifs, des armes lourdes et
légères des combattants et souvent de la population
308 King (CH), « Ending civil wars » in Adelphi Papers,
301, p.13
309 Loridon (M), « Maintien ou rétablissement de
la paix : la phase cruciale du désarmement des belligérants
» in Smouts (M-C), L'ONU et la guerre : la diplomatie Kaki, Ed
Complexes, Bruxelles, 1994, p.363
310 Nguyen Quoc Dinh, Daillier (P), Pellet (A), Droit
International Public, 6e édition, LGDJ, Paris, 1999,
p.975
118
civile »311. Dans ce sens
donné par les Nations unies, le désarmement a un objectif
sécuritaire à savoir « parvenir à une
stabilisation de la situation par l'organisation d'une suspension, parfois
uniquement temporaire, des hostilités, en application d'une tierce ou
d'un cessez-le-feu, et d'empêcher leur résurgence soudaine.
L'objectif est alors de geler momentanément et temporairement un conflit
donné ou d'en contenir la violence dans certaines limites
»312. Les armes étant considérées
comme le vecteur matériel de la violence, le désarmement permet
de réduire la violence des bandes armées et par là de
réduire leur capacité à violer les droits de l'homme.
Rappelons que les armes sont les instruments à partir desquels les
groupes armés commettent les atrocités pendant les conflits. En
désarment ces bandes armées, les OMP permettent de réduire
les violations des droits de l'homme. En effet désarmer les groupes
armés a pour effet de fragiliser leur puissance militaire et donc de
diminuer leurs capacités opérationnelles de recourir à la
force. Les OMP ont donc agit dans plusieurs conflits à travers leurs
opérations de désarmement.
Au Libéria, la MINUL était chargée
à travers la résolution 1509 du CS, de maintenir la paix et de
mettre en oeuvre le programme de DDR. En ce qui concerne le désarmement
des groupes armés, la MINUL est intervenue de façon efficace et
cela se vérifie à travers des chiffres. En 2004 uniquement, cette
opération a récupéré 20 000 armes appartenant aux
groupes armés, ce qui a eu un impact positif sur la situation
sécuritaire du pays, puisque le Libéria est passé à
la phase de sécurité IV et la situation sécuritaire est
demeurée calme313. En 2005, la MINUL a collecté et
détruit 748 armes, 1390 engins non explosés, 99 980 munitions et
11 790 pièces diverses. En outre, cette mission a collecté et
détruit des armes et munitions résiduelles remises volontairement
ou découvertes à l'occasion des perquisitions. Ces
opérations de désarment ont fait du programme de DDR au
Libéria, une réussite en raison de la situation stable du pays
avec la présence des Casques bleus. Cette stabilité
sécuritaire due en partie aux opérations de désarmement
est d'un apport significatif en ce qui concerne les droits de l'homme. Car
en
311 DDR in peace operations, a retrospective, United Nations,
Department of peacekeeping operations, office of rule of law and security
institutions, DDR section, p.4
312 Mamadou Yaya Diallo, Les Nations Unies et la lutte
contre la prolifération des armes légères et de petit
calibre : défis, enjeux et perspectives, Thèse de doctorat
de droit public nouveau régime, Université de Reims Champagne
Ardenne, 2009, p.203
313 4e Rapport du SGNU sur la MINUL, par.50
119
l'absence des violences, les violations des droits de l'homme
sont considérablement réduites.
En Sierra Leone, le désarmement effectué par la
MINUSIL a été l'un des plus réussis par les OMP. En 2002,
date à laquelle prenait fin le désarmement en Sierra Leone, 26
000 armes ont été collectés, entrainant ainsi une
stabilité de la situation sur le pan de la sécurité.
En RDC, les OMP que sont la MONUC et la MONUSCO ont
participé chacune lors de leur déploiement au désarmement
des bandes armées. De décembre 2004 à mars 2005, 3856
combattants (y compris 2210 enfants) ont été
désarmés par les forces Onusiennes et 1 197 armes ont
été collectées. En février 2005, la MONUC a
effectué une opération de bouclage et de perquisition à
Ariwara et désarmé 116 soldats des forces armées du peuple
congolais (FAPC). Le même mois, les casques bleus ont arrêté
30 miliciens du FNI et confisqué des armes dans le village de Datule. Au
mois de juin de la même année, 15 607 combattants de divers
groupes armés, dont 4395 enfants ont été
désarmés et 6200 armes ont été collectées.
En novembre de la même année, 1000 membres des milices se sont
rendus à la MONUC et ont remis 223 armes et pièces de munitions.
En matière de désarmement, les OMP pratiquent une autre forme
d'activité qui consiste au déminage. En effet la
sécurité des populations continue souvent d'être
menacée par le reste d'explosifs et les dépôts de
munitions, ainsi les OMP en RDC ont déminé de grandes
étendues afin de sécuriser la vie des populations. Le 10 novembre
2009, 7471 mètres carrés de terrain ont été
déminés et remis aux autorités et aux collectivités
locales à Motondo (Katanga) pour les projets agricoles qui devraient
intéresser 2000 personnes314. Les forces de la MONUSCO sont
également intervenues dans les activités de déminage. Le
28 novembre 2011, les forces de cette opération ont enlevé des
restes d'explosif de guerre après une attaque menée contre des
hommes armés contre un dépôt de munitions des FARDC
à Lubumbashi.
En RCA, le mandat de la MINURCAT lui conférait
également des missions dans le cadre du désarmement. Ici, cette
mission a consisté essentiellement aux activités de
déminage. En octobre 2009, tel que mentionne le rapport du SGNU sur
cette mission, la MINURCAT a détruit des engins non explosés pour
un total de 69, répartis de la manière
314 30e rapport du SGNU sur la MONUC, 2009.
120
suivante,19 au nord, 30 au centre et 20 au sud. Jusqu'au
retrait de cette mission en 2010, elle a mené des actions de
déminage, en concourant ainsi à la sécurité des
populations. Nous pouvons donc constater avec les activités de
désarmement des OMP, que celles-ci participent dans leur
déploiement à la réduction de la violence dans les zones
de conflit. Toute chose qui permet de réduire les violations des droits
de l'homme.
2- La démobilisation et la
réinsertion des combattants comme facteur de réduction de la
violence
La démobilisation et la réinsertion sont deux
activités du programme de DDR qui permettent de réduire la
violence dans les zones de conflit. La démobilisation consiste à
fragiliser les groupes armés en diminuant leurs effectifs et en les
désorganisant. Quant à la réinsertion, elle constitue
l'assistance offerte aux combattants démobilisés afin de leur
permettre de mener convenablement leur vie en dehors des groupes armés.
Cette activité consiste dans l'octroi des biens de première
nécessité aux combattants tels que la nourriture, les
vêtements afin de leur permettre de retrouver une vie normale. Les OMP en
Afrique ont mené plusieurs actions en ce qui concerne la
démobilisation et la réinsertion, ce qui a permis de
réduire la violence et de diminuer l'intensité des violations des
droits de l'homme.
Au Libéria, la Présidente a officiellement mis
fin au programme de DDR le 15 juillet 2009. Au total, en moins de cinq ans,
près de 101 000 combattants ont été
démobilisés dont 20 200 femmes, 9 000 garçons et 2 700
filles. En plus, des ex-combattants ont été engagés dans
des projets de développement des infrastructures avec le soutien de la
Banque mondiale et du PNUD. Ces actions ont permis de stabiliser la situation
au Libéria et de permettre une amélioration de la situation des
droits de l'homme.
En RDC également, les programmes de DDR ont
été menés et même si la violence n'a pas
réellement diminué, il faut reconnaitre que ces actions ont
néanmoins empêché que la situation ne devienne plus grave.
De 1999 à 2006 l'on assisté à la démobilisation de
près de 39 000 combattants parmi lesquels des Rwandais, ougandais,
burundais et zimbabwéens. En 2009, la MONUC a rapatrié plus de 4
000 ex combattants et leur famille de l'est de la RDC au Rwanda. Avec l'appui
de la MONUC, le programme national de DDR a traité plus de 13 600 cas,
dont 8080 combattants qui ont été intégrés
121
dans les forces armées nationales (FARDC) et 5 530 qui
ont été démobilisés. Les programmes de DDR se
poursuivent en RDC, car ces tâches font partie du mandat de la
MONUSCO.
Au Sud Soudan, un processus de DDR a été
lancé en 2009, et en décembre de la même année, 180
000 ex combattants et membres de groupes à besoins spéciaux
avaient été démobilisés dans cinq sites
différents avec l'assistance de la MINUS. Tous les candidats ici avaient
reçu une aide à la réinsertion, comprenant sommes
d'argent, des articles non périssables et des coupons pour rations
alimentaires du PAM pour une période de 3 mois.
D'après le plan stratégique de DDR du Soudan, il
est prévu une démobilisation de 180000 soldats en 3 ans avec
l'aide de la MINUS.
En Sierra Léone, la démobilisation et la
réinsertion étaient menées par le comité national
pour le désarmement, la démobilisation et la réinsertion
avec l'appui de la MINUSIL. Ce programme a pris fin en janvier 2002 avec la fin
du mandat de la MINUSIL. On a dénombré au total 72 490
belligérants démobilisés dans ce pays, ce qui a permis la
stabilisation sur le plan de la sécurité et aussi en ce qui
concerne les droits de l'homme.
Pour ce qui est de la Côte d'Ivoire, le processus de DDR
s'est effectué en plusieurs phases. Le fait le plus marquant de ce
projet ici est les 1000 microprojets financés par l'ONUCI et
destinés à la réinsertion des ex-combattants afin de
favoriser un environnement sécuritaire stable.
Les programmes de DDR accomplis par les OMP permettent donc de
réduire la violence dans les pays en conflit et de baisser
l'intensité des violations des droits de l'homme. À travers le
DDR, « le déclin de la violence, tant dans son ampleur que dans
son intensité, a entrainé la réduction du nombre de pertes
en vies humaines et d'autres victimes de guerre : réfugiés,
personnes déplacées dans leur propre pays, enfants
122
soldats »315. Nous partons maintenant
montrer comment à travers l'aide humanitaire les OMP participent
à la protection des droits de l'homme.
PARAGRAPHE 2 : LA CONTRIBUTION DES OMP A LA PROTECTION
DES DROITS DE L'HOMME A TRAVERS L'AIDE HUMANITAIRE
Comme nous l'avons démontré dans des
développements de la première partie, l'aide humanitaire permet
de protéger les droits de l'homme. Ainsi, en permettant le bon
déroulement des opérations d'aide humanitaire, les OMP
participent à la protection des droits de l'homme. Dans le cadre de
l'action humanitaire, les OMP facilitent l'acheminement de l'aide (A) et
concourent au bon déroulement des opérations d'aide humanitaire
(B).
A- La facilitation de l'acheminement de l'aide
Dans le domaine de l'aide humanitaire, l'acheminement de cette
aide occupe une place importante, car à travers elle, les populations
peuvent bénéficier des soins de santé ou des biens de
première nécessité. Les OMP interviennent dans cette
opération par la sécurisation des convois humanitaires (1) et par
le transport de l'aide (2).
1- La sécurisation des convois
humanitaires
Les OMP interviennent dans la sécurisation des convois
humanitaires afin que les populations vulnérables puissent
bénéficier de l'aide. Cette sécurisation se manifeste par
des escortes effectuées par les OMP afin que l'aide puisse parvenir aux
populations sans entraves. Cette action permet de protéger les droits
des populations, car à travers l'aide, celles-ci ont droit aux biens de
première nécessité qui protège la dignité de
la personne humaine.
En RDC, la MONUC a permis grâce à ses actions
militaires de protéger les convois d'aide humanitaire. D'avril à
mai 2002, elle a protégé un convoi de six bateaux humanitaires
sur le fleuve Congo, transportant 1700 tonnes de denrées et autres
produits
315 Mamadou Yaya Diallo, Les Nations Unies et la lutte
contre la prolifération des armes légères et de petit
calibre : défis, enjeux et perspectives, Thèse de doctorat
de droit public nouveau régime, op.cit, p.217
123
humanitaires. De juillet à octobre 2003, cette mission
a escorté dans la région d'Ituri, des agents humanitaires afin de
fournir de l'aide à Bunia. De même, de novembre 2003 à mars
2004, cette opération a fourni une protection militaire pour
l'acheminement d'importantes fournitures humanitaires à Tubimbi
(Sud-Kivu), secteur qui était largement inaccessible aux agents
humanitaires depuis le début du conflit. Dans le Sud-Kivu, la MONUC a
fourni l'escorte aux agents humanitaires et aux organisations non
gouvernementales et a aidé à enrayer la multiplication des
entraves aux opérations humanitaires316. Pendant cette
période de juillet à septembre 2008, l'accès humanitaire
dans les deux Kivu s'est amélioré de sorte qu'une assistance a pu
être apportée aux populations vulnérables et aux
populations déplacées.
Au Tchad, la MINURCAT a également participé
à la protection des convois humanitaires. À la mi-décembre
2008, les opérations d'aide humanitaire ont été
entravées dans la région de Sila à cause des
belligérants. Suite à la sécurisation des convois, les
organismes humanitaires ont repris leurs activités en janvier 2009 et
ont pu accéder au camp des réfugiés d'Am Nabak qui
comptait 16 000 réfugiés. Dans la région du Salamat (sud
du Tchad), la MINURCAT a apporté la sécurité aux
organisations humanitaires pour leur faciliter l'accès aux zones
éloignées. De janvier à avril 2010, la mission a
effectué en moyenne 250 missions d'escorte humanitaire par
mois317. En ce qui concerne la protection des convois humanitaires,
il faut dire que cette opération est présente dans les conflits
où la situation humanitaire est inquiétante. C'est la raison pour
laquelle les cas des OMP en RDC, RCA et au Tchad ont été
présentés.
2- Le transport de l'aide
humanitaire
À côté de la sécurisation des
convois d'aide humanitaire, les OMP elles-mêmes participent au transport
de l'aide humanitaire et ceci comme le démontrent les opérations
déployées en RDC et en RCA.
La MONUC est l'opération qui s'est le plus
manifestée dans cette entreprise. Du 31 juillet au 31 août 2001,
elle a mené une opération désignée « Bateau de
la paix » dans laquelle elle a transporté 600 tonnes de fournitures
médicales de Kinshasa à Mongalu (province de l'équateur)
et ramenant 900 tonnes de maïs pour être distribuées à
Kinshasa.
316 26e Rapport du SGNU sur la MONUC
317 Rapport du SGNU sur la MINURCAT, 30 avril 2010
124
De décembre 2002 à février 2003, les
spécialistes des affaires humanitaires de cette mission ont
effectué 25 missions avec des partenaires dans lesquelles la MONUC a
transporté 30 tonnes de fournitures humanitaires. Il faut reconnaitre
que dans bien des cas, la MONUC s'est investie dans l'acheminement de l'aide
humanitaire à travers le transport de celle-ci. Un autre fait est qu'en
dehors du transport de l'aide proprement dite, cette mission a fourni un
soutien logistique aux différentes organisations humanitaires afin que
celles-ci puissent acheminer l'aide. Ce soutien se matérialisait en
fournitures d'hélicoptères et de voitures appartenant à la
mission.
De même à l'est du Tchad, la MINURCAT a fourni un
appui logistique aux organisations humanitaires. Dans le rapport du SGNU du 1er
décembre 2010, il est mentionné que cette mission a fourni un
appui logistique aux opérations humanitaires et a facilité
par-là l'acheminement de 10 tonnes d'aide humanitaire aux
déplacés de Loboutique. Une assistance analogue a
été fournie aux missions d'évaluation humanitaires
déployées à Mongoro, Kerfi, Am Timam, et des cargaisons
humanitaires ont pu être envoyées dans des zones qui
étaient jusque-là accessibles que par hélicoptères.
À travers ces interventions dans le transport de l'aide humanitaire, il
ne fait aucun doute que les OMP participent à la protection des droits
de l'homme, car elles permettent aux populations vulnérables de
bénéficier des biens de subsistance.
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