MEMOIRE DE STAGE
LE DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL COMME
OUTIL DE PERFORMANCE SOCIO-ECONOMIQUE
COMMENT AMELIORER CES INSTANCES DE
DISCUSSION ET MOBILISER LES ACTEURS ?
Travail réalisé par Maxime Moreau Sous la
direction de Patrice Braconnier
Master 2 Droit et Développement de l'Economie Sociale et
Solidaire Université de Poitiers
2012 - 2013
2
Table des matières
Introduction 6
Partie A : Développement du dialogue social
territorial et du CISTE 9
Chapitre 1 : De la décentralisation à
l'émergence du dialogue social territorial 9
1.1 De la centralisation à la décentralisation
9
1.1.a L'Etat français centralisateur 9
1.1.b La déconcentration administrative 10
1.1.c La décentralisation politique 11
1.2 Une reconnaissance du local permettant l'émergence du
DST 12
1.2.a La mise en place de moyens pour les territoires 12
1.2.b Des demandes de dialogue et de démocratie au niveau
local 13
1.2.c De nouveaux lieux de régulation économique et
sociale sur les territoires 14
1.2.d La création de lieux de dialogue social territorial
15
Chapitre 2 : Le CISTE, un acteur du dialogue social
territorial en Poitou-Charentes 16
2.1 Création du CISTE dans le processus de
décentralisation 16
2.1.a Création du CISTE 16
2.1.b L'évolution du CISTE et de ses actions 16
2.1.c Un acteur né de la décentralisation :
l'exemple du financement 17
2.2 Un acteur du dialogue social territorial en Poitou-Charentes
18
2.2.a Périmètre d'action 19
2.2.b Objet général et missions 19
2.2.c Méthode et outils 20
2.2.d Actions du CISTE (2012-2013) 20
2.3 Une association paritaire régionale de
l'économie sociale et solidaire 21
2.3.a Les instances de discussion et de décision 21
2.3.b Le paritarisme 24
2.3.c Le respect de valeurs et principes de l'économie
sociale et solidaire 25
Partie B : Définitions et enjeux propres au
dialogue social territorial 28
Chapitre 1 : Eléments de définition
28
1.1 Le dialogue social 28
1.1.a Dialogue social national et d'entreprise 29
1.1.b Dialogue social sectoriel et intersectoriel 29
1.2 Le dialogue civil 30
1.3 Le dialogue territorial ou sociétal 30
1.4 Le dialogue social territorial 30
1.4.a La définition du CESE 30
1.4.b Les précisions de la commission mixte CESER -
Conseil Régional Poitou-Charentes 32
1.5 Schéma récapitulatif 33
Chapitre 2 :
L'hétérogénéité du dialogue social
territorial 34
2.1 Les acteurs : trois cercles distincts 34
2.1.a Le 1er cercle : partenaires sociaux 35
2.1.b Le 2e cercle : partenaires sociaux, Etat et/ou
collectivités territoriales 35
2.1.c Le 3e cercle : partenaires sociaux, Etat et/ou
collectivités territoriales et société civile 36
2.1.d Plusieurs niveaux de participation des acteurs 37
2.1.e Schéma récapitulatif 38
2.2 Les objectifs et missions 38
2.2.a Les champs d'intervention 38
2.2.b Une logique d'extension de droits sociaux 39
3
2.2.c Une logique de projet 39
2.3 Le périmètre : le territoire pertinent 40
2.3.a Qu'est-ce que le territoire ? 40
2.3.b Typologie du territoire 40
2.3.c Retenir le territoire pertinent, une priorité dans
le DST 41
2.4 Dialogue social territorial formel et informel 42
2.4.a Dialogue social territorial formel 42
2.4.b Dialogue social territorial informel 43
Chapitre 3 : Le dialogue social territorial comme outil
de performance socio-économique 44
3.1 La notion de confiance primordiale pour un dialogue social
territorial de qualité 44
3.1.a Le conflit dans la relation entre partenaires sociaux 44
3.1.b Dépasser les clivages pour construire une vision
commune 45
3.1.c L'importance du temps pour la reconnaissance entre parties
prenantes 45
3.1.d Comment entretenir un dialogue de qualité ? 46
3.2 Comment crédibiliser les expériences de DST ?
46
3.2.a La surabondance de lieux de dialogue social territorial
47
3.2.b Un cadre juridique aux contours flous 48
Chapitre 4 : L'appropriation syndicale des lieux de
dialogue social territorial 50
4.1 Forces 50
4.1.a Un changement de méthode de travail 50
4.1.b Le développement d'un savoir-faire syndical
empirique 51
4.2 Faiblesses 51
4.2.a Le manque de moyens humains et financiers 51
4.2.b Une coordination trop faible des organisations syndicales
52
4.2.c La remise en cause de la légitimité des
syndicats 53
4.3 Menaces 53
4.3.a L'implication syndicale freinée par l'abondance des
lieux de DST 54
4.3.b Le flou entourant le dialogue social territorial 54
4.4 Opportunités 55
4.4.a Le territoire pour renforcer la légitimité
des syndicats 55
4.4.b Un meilleur impact des syndicats sur l'action publique dans
les territoires 56
4.5 Perspectives 56
Partie C : Evaluation de stage 59
Chapitre 1 : Assumer mes responsabilités et
travailler en autonomie sur mes missions 59
Chapitre 2 : La difficulté de mobiliser les
mandatés 59
Chapitre 3 : La volonté de travailler en
équipe 60
Chapitre 4 : Adaptation rapide et compréhension de
l'environnement 60
Chapitre 5 : Un renforcement de mes capacités
d'expression écrite et orale 61
Partie D : Références
62
Chapitre 1 : Annexes 62
1.1 Annexe n°1 : Typologie des acteurs 62
1.2 Annexe n°2 : Principaux lieux de dialogue social
territorial 63
1.3 Annexe n°3 : Grille d'analyse du dialogue social
territorial 64
1.4 Annexe n°4 : Questionnaire sur les structures de
dialogue social territorial 65
Chapitre 2 : Bibliographie 67
Chapitre 3 : Webographie 68
Chapitre 4 : Lexique 69
4
Remerciements
Je tiens à remercier l'ensemble des membres du CISTE
pour m'avoir donné l'opportunité de faire ce stage.
Merci à Bernard Giret, mon tuteur de stage et
président du CISTE pour ses encouragements et son ouverture.
Un merci tout particulier à Martine, directrice du
CISTE, qui m'a fait confiance, m'a soutenu et m'a laissé une grande
liberté dans mon travail.
A Laure pour son concours précieux pour défendre
le projet d'avis et pour nos discussions animées.
A Nathalie et Pamela, d'avoir partagé leur bureau et
les pauses café. Merci
A Patrice Braconnier pour m'avoir ouvert les portes
jusque-là obscures du DST, via le CISTE et le DU DST, et pour ses
conseils dans la construction de ce mémoire.
A Gilles Caire pour son soutien infaillible et ses conseils
tout au long de l'année.
A l'ensemble de la promo du master 2 DDESS qui m'a fait vivre
une aventure humaine exceptionnelle et m'a redonné le goût pour
les études.
Un grand merci à Tac pour nos discussions constructives
et son soutien lors du mois complet passé à l'écriture de
ce mémoire.
Enfin un grand merci à mes parents, mes frères
et soeurs, pour m'avoir toujours encouragé dans mes projets de vie et
d'études.
5
Préface
Précisions de vocabulaire.
Lorsque nous parlerons d'organisation syndicale ou de
syndicat, nous parlerons uniquement des syndicats interprofessionnels. Si nous
parlons des syndicats de branche, cela sera précisé.
Autre précision. Dans le jargon syndical, une
organisation syndicale défend et représente les employés
tandis qu'une organisation patronale défend et représente les
employeurs. Nous prenons le parti de qualifier d'organisation syndicale ou de
syndicat l'ensemble des groupes représentant employés et
employeurs. Pour nous, parler des organisations syndicales revient à
parler des partenaires sociaux.
Pour être clair dans le vocabulaire que nous adopterons,
nous parlerons d'organisation syndicale d'employé ou d'organisation
syndicale patronale afin d'éviter toute confusion.
Bien que l'utilisation de sigle ne soit pas très
pédagogique, j'ai choisi de largement les utiliser afin de ne pas
surcharger le corps de texte du mémoire.
Pour ne pas avoir à chercher la signification de chaque
acronyme, un lexique se trouve en toute dernière page de mémoire.
Il est conseillé de le détacher pour l'avoir sous les yeux et
faciliter la lecture de ce mémoire.
6
Introduction
Dans le cadre de mon Master 2 Droit et Développement de
l'Economie Sociale et Solidaire à l'Université de Poitiers, j'ai
commencé un stage de 4 mois et demi au CISTE (Carrefour de l'Innovation
Sociale du Travail et de l'Emploi). Cette expérience
débutée mi-mai 2013 m'a permis de découvrir une forme
assez récente de dialogue sur les territoires dont je ne savais que peu
de choses : Le Dialogue Social Territorial (DST), dont le CISTE est un acteur
majeur en Poitou-Charentes.
Mon cursus universitaire, et notamment mon passage à
l'Institut d'Etudes Politiques de Rennes, m'a beaucoup sensibilisé aux
questions du renforcement des liens entres les élus et leurs
électeurs, de rapprochement des politiques publiques1 aux
besoins exprimés par les citoyens, de construction et d'expression de
l'intérêt général. A travers les enseignements dont
j'ai bénéficié, j'ai pu mesurer la transformation de
l'action publique depuis 30 ans et le tournant de l'acte premier de la
décentralisation. De plus en plus se développent sur les
territoires diverses entreprises que nous pouvons qualifier de
gouvernance2 sur les territoires. Elles visent à mieux faire
émerger les besoins et l'intérêt commun des acteurs
composants un territoire. C'est ainsi que se sont multipliées les
expressions liées à ces initiatives : dialogue territorial,
dialogue civil, dialogue sociétal, dialogue citoyen, démocratie
locale, démocratie directe, démocratie participative, etc
3 . Plus que la consultation, certaines initiatives impliquent
directement les acteurs d'un territoire lorsqu'ils co-construisent,
décident et mettent en application leurs décisions. Ces
expériences marquent en tout cas la volonté de (re)créer
du lien entre les différents acteurs socio-économiques d'un
territoire.
Les initiatives de DST vont dans ce sens et concernent elles
aussi une multitude d'acteurs. Syndicats4, représentants de
l'Etat et des collectivités territoriales, élus, associations,
citoyens, et autres peuvent être amenés à dialoguer au sein
d'une instance de DST si le projet et/ou la thématique les concernent.
Une rapide analyse mot à mot de l'expression « DST » met en
évidence cette même volonté de mise en lien des individus
et organisations sur un territoire défini. L'étymologie du mot
« dialogue »5 renvoie à la discussion entre
acteurs. L'adjectif « social » isolé est quant à lui
« relatif à la vie des hommes en société
»6. Enfin, l'adjectif territorial sera ici
interprété comme une subdivision du territoire national.
Mes missions de stage m'ont immédiatement
immergé dans le champ du DST. Elles consistaient d'une part en une
série de réunions et d'entretiens avec des mandatés
d'organisations syndicales pour juger de la qualité de certains lieux de
DST où siègent ces mêmes syndicats. J'ai d'autre part
effectué des recherches afin de mieux cerner et définir le
1 « Interventions d'une autorité investie de
puissace publique et de légitimité gouvernementale sur un domaine
spécifique de la société ou territoire (Grawitz, Leca et
Thoenig, 1985 dans Dictionnaire des politiques publique / sous la
direction de Laurie BOUSSAGUET, Sophie JACQUOT et Pauline Ravinet (dir.) -
3e édition actualisée et augmentée - Paris :
Presses de Sciences Po, 2010, collection Références)
2 Globalement, la notion de gouvernance peut
être entendue comme « l'interaction d'une pluralité d'acteurs
gouvernants qui ne sont pas tous étatiques ni même publics (Leca,
1996, dans Dictionnaire des politiques publique / sous la direction de
Laurie BOUSSAGUET, Sophie JACQUOT et Pauline Ravinet (dir.) - 3e
édition actualisée et augmentée - Paris : Presses de
Sciences Po, 2010, collection Références)
3 Nous clarifierons certaines de ces
définitions dans la Partie B
4 D'après le Bureau International du Travail
(BIT), un syndicat est une « organisation de travailleurs,
dépassant d'ordinaire les limites d'une entreprise et établie
dans le but de protéger ou d'améliorer, à travers une
action collective, le statut économique et social de ses membres ».
Il s'agit dans notre cas des syndicats d'employeurs et de salariés que
l'on peut regrouper sous la mention de partenaires sociaux.
5 Du grec Dialoge : « entretien entre
deux ou plusieurs personnes » (
http://www.cnrtl.fr)
6
http://www.cnrtl.fr
7
DST. En effet, ce concept est aujourd'hui mal identifié
et regroupe divers lieux de dialogue qui semblent, à première
vue, ne rien avoir en commun dans leur composition, leur fonctionnement ou les
objectifs qu'ils se fixent7. Un autre objectif important lors de mon
stage était de formuler des pistes de recherche sur le champ du DST.
Malgré les limites dont m'ont fait part les
syndicalistes, j'ai pu ressentir globalement une certaine forme d'enthousiasme
et d'engouement pour ce concept nouveau pour moi. J'ai eu l'occasion en mai
2013 d'assister à la conférence sociale régionale sur
l'emploi en Poitou-Charentes présidée par Mme
Ségolène Royale. J'avais été frappé de voir
à quel point l'expression même de DST revenait souvent de la part
des élus et à quel point elle suscitait des promesses. Un
deuxième élément plus concret est la récente
délibération relative au développement du DST par la
commission mixte CESER8 - Région rendue publique en
Février 20139. Ce document met en avant la
nécessité de lever les freins au développement du DST et
de s'appuyer sur ses forces pour en pérenniser les initiatives.
Ainsi, le DST est potentiellement vu comme un outil de
performance socio-économique à la lecture de nombreux rapports et
travaux scientifiques. S'il est perfectionné, il doit apporter des
réponses innovantes et pertinentes sur des questions directement ou
indirectement liées au travail 10 et à l'emploi 11 :
Santé au travail, formation professionnelle, travail saisonnier,
chômage, gestion prévisionnelle des emplois et des
compétences, etc. Il doit permettre la coordination des actions sur un
territoire défini pour plus d'efficacité.
Mais quelle est la réalité des espoirs
fondés sur ces initiatives de DST. En premier lieu, qu'est-ce que le DST
précisément ? Cette forme de dialogue peut-elle s'avérer
être un réel outil de performance socio-économique ?
Est-elle à même de prendre en compte certaines
spécificités des territoires ? Peut-elle apporter de meilleures
réponses à des demandes et besoins locaux ? Le DST peut-il
contribuer à mieux formuler l'intérêt général
sur des territoires donnés ? Les lieux de DST peuvent-ils introduire une
nouvelle manière de construire et de mettre en oeuvre les politiques
publiques sur les territoires ? Le DST n'est-il pas simplement une application
du dialogue social 12 au niveau infra-national qui ne concernerait
que les partenaires sociaux ? Quels sont les freins et dysfonctionnement du DST
que l'on peut identifier ? Quelles pratiques et quels modes de fonctionnement
semblent être efficaces ?
7 Pour ne citer que des lieux plutôt connus,
Maisons de l'Emploi, Conseils de Développement, Instances Paritaires
Régionales de Pôle Emploi, Conseil Economique Social et
Environnemental Régional ou encore Caisse d'Allocations Familiales sont
autant de structures qui sont souvent incluses dans le même champ du DST
malgré des différences entre elles assez conséquentes.
8 Conseil Economique Social et Environnemental
Régional
9
http://www.poitou-charentes.fr/files/assemblee_regionale/arretes/2013-02-15-session/2013CR001.pdf
10 D'après le BIT, le travail est «
l'ensemble des activités humaines, rémunérées ou
non, produisant les biens et services d'une économie ou bien fournissant
les moyens d'existence nécessaires aux collectivités et aux
individus ». Ces activités produisent des impacts sur
l'environnement extérieur et donc sur la société.
11 L'emploi peut désigner la place que l'on
occupe dans la société afin d'y réaliser un travail, en
échange d'une rétribution. On suppose alors que l'emploi d'un
individu conditionne en partie sa position sociale. L'emploi n'est pas neutre
car il influence la relation qu'a un individu avec la société par
le biais de l'activité qu'il occupe.
12 D'après le BIT le dialogue social inclut
« toutes formes de négociation, de consultation ou d'échange
d'informations entre représentants des gouvernements, des employeurs et
des travailleurs sur des questions d'intérêt commun liées
à la politique économique et sociale ».
8
A travers ma mission de stage et mes recherches en
parallèle, j'ai tenté de comprendre si le DST relevait d'une
nouvelle forme de dialogue sur les territoires, en quoi il pouvait être
singulier et comment pouvait-il apporter une plus-value.
Nous tenterons de répondre à cet engouement pour
les expériences de DST et leur multiplication en répondant
à la question suivante : Comment améliorer le fonctionnement de
ces instances de discussion et mobiliser les acteurs ?
Nous verrons que bien qu'elles soient très
hétérogènes, les initiatives de DST peuvent constituer un
cadre pertinent pour répondre à des questions d'emploi et de
travail sur des territoires, à condition d'en améliorer le
fonctionnement. Les expériences de DST font face à certains
dysfonctionnements mais elles contiennent indéniablement des forces sur
lesquelles s'appuyer.
Une première partie sera consacrée à
l'inscription du CISTE comme lieux de DST dans le contexte de
décentralisation et de développement du dialogue social
territorial. Dans un second temps, nous définirons le DST pour en
comprendre son caractère protéiforme. Ces éléments
de définition serviront de base à la proposition de pistes de
recherche sur des enjeux intimement liés au développement du DST.
Nous aborderons les notions de confiance et de crédibilité du DST
pour apprécier l'adaptation des partenaires sociaux dans ces nouveaux
lieux de dialogue.
9
Partie A : DEVELOPPEMENT DU DIALOGUE SOCIAL
TERRITORIAL ET DU CISTE
La France a été historiquement un Etat
très centralisateur. La seconde moitié du XXe
siècle a été marquée par un processus de
décentralisation et la reconnaissance de niveaux infranationaux comme
territoires pertinents de construction et de mise en place de certaines
politiques publiques. Nous verrons que c'est ce contexte qui a permis au CISTE
de naître et de développer ses actions de dialogue social
territorial en Poitou-Charentes.
Chapitre 1 : DE LA DECENTRALISATION A L'EMERGENCE DU
DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL
Nous verrons ici comment L'Etat français très
centralisateur s'est progressivement déchargé de certaines de ses
prérogatives pour faire coexister à ses côtés des
logiques de déconcentration administrative et de décentralisation
politique. Nous verrons que cette évolution a transformé l'action
publique car l'échelon national n'est plus le seul niveau pertinent
d'intervention. Ce processus a permis la territorialisation de l'action
publique menant à l'émergence du DST.
1.1 DE LA CENTRALISATION A LA DECENTRALISATION
1.1.a L'ETAT FRANÇAIS CENTRALISATEUR
L'Etat français, par opposition à des Etats
fédéraux comme l'Allemagne, est depuis la Révolution de
1789 un Etat unitaire c'est-à-dire une seule et même organisation
politique et juridique. Il est jusqu'en 1982 un Etat très
centralisateur.
« La centralisation consiste à réunir
tous les moyens d'action en un centre unique : l'Etat est en situation de
« monopole » »13.
On peut considérer que la monarchie française a
initié cet effort de centralisation pour consolider l'unité de la
nation française qui n'est alors « qu'un agrégat
inconstitué de peuples désunis » depuis le
Moyen-âge, d'après Mirabeau. Ces peuples ne sont pas
traités de manière égale. Ils ne disposent pas des
mêmes droits et libertés. D'autres inconvénients, tels que
l'inefficacité des services administratifs et l'éloignement de
l'Ile de France par rapport à la province, sont inhérents
à cette absence de centralisation et freinent le développement du
pays. Colbert tentera d'unifier le territoire français mais la
centralisation sera largement incomplète à l'aube de la
Révolution Française.
Le changement radical généré par la
Révolution va poser les bases de nouvelles fondations à
l'édifice social français et placer sur un même pied
d'égalité les différents territoires qui composent la
nation. Le découpage administratif du pays est clarifié avec
notamment la création du département, « conçu comme
une division du territoire et non comme une nouvelle collectivité
»14 qui disposerait d'un certain degré d'autonomie par
rapport à l'Etat. Le découpage en départements, districts
et cantons est mis en place sur tout le territoire pour
13
http://www.droit-constitutionnel.net
14 Loi du 22 décembre 1789 (source :
http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/decentralisation.asp)
10
faciliter l'exercice de l'autorité d'Etat. C'est lors de
la Révolution que le Français sera largement imposé car
une langue commune est vue comme nécessaire à l'unité de
la nation.
Ainsi, la Constitution du 3 septembre 1791 proclame que :
« Le Royaume est un et indivisible », marquant la victoire
des Jacobins, tenants d'une République unitaire15.
Le système de centralisation sera le modèle qui
prévaudra en France pour quasiment 200 ans de plus. Il sera
renforcé par le lancement d'un processus de déconcentration
administrative.
1.1.b LA DECONCENTRATION ADMINISTRATIVE
La déconcentration administrative amorcée
à la fin du XIXe siècle va prolonger la centralisation. On peut
considérer qu'elle en est une modalité puisque les services
déconcentrés de l'Etat ne jouissent que d'une
délégation de compétence sur des subdivisions du
territoire national.
Les représentants locaux sont nommés et
révocables par l'Etat. Ils font l'objet de contrôles
hiérarchiques et ne disposent que de peu de marge de manoeuvre en dehors
de la ligne fixée par l'Etat. La déconcentration ne consiste pas
en un transfert de compétences vers les territoires. L'image d'Odilon
Barrot est parlante lorsqu'il parle du « [...] même marteau qui
frappe, mais on a juste raccourci le manche ».
En effet, « la déconcentration est un
processus d'aménagement de l'État unitaire qui consiste à
implanter dans des circonscriptions locales administratives des
autorités administratives représentant l'État. Ces
autorités sont dépourvues de toute autonomie et de la
personnalité morale »16.
L'objectif n'est pas ici le transfert de compétence
mais d'aboutir à une meilleur efficacité de l'administration sur
les territoires. C'est-à-dire de mieux exercer la volonté de
l'Etat de deux façons. En luttant contre l'engorgement de
l'administration centralisée qui ralentit l'application des
décisions publiques. En rapprochant l'administration des
administrés pour plus d'efficacité. Ce deuxième objectif
va quelque peu initier une démarche de prise en compte des
données et des besoins locaux pour une meilleure application des
décisions publiques.
Napoléon Bonaparte poursuivra l'effort d'unification et
de centralisation à travers la déconcentration administrative.
Les différents découpages territoriaux (départements,
communes et cantons) sont biens un moyen de représentation de l'Etat au
plus proche des citoyens. La création des préfets17 et
le rôle des maires18 indiquent bien que ces derniers sont des
fonctionnaires d'Etat détachés dans les subdivisions
administratives du territoire national.
Mise à part une exception, une loi instituant
l'élection du maire par le conseil municipal et reconnaissant son
autorité19, l'hyperpuissance de l'Etat ne sera pas
infléchie au cours du XIXe et du début du
XXe siècle.
Malgré ces efforts, la déconcentration
administrative qui accompagne la centralisation ne semble pas suffisante tant
apparaissent des inégalités de développement entre la
capitale et les
15 Par opposition aux Girondins, partisans de la
décentralisation.
16
http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/collectivites-territoriales/principes-collectivites-territoriales/qu-est-ce-que-deconcentration.html
17 Le rôle des préfets de
département est créé par la loi du 28 pluviôse de
l'an VIII (17 février 1800). Ces préfets sont «
nommés et révoqués par le Premier Consul, puis par
l'Empereur » (
http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/decentralisation.asp).
18 Loi du 18 juillet 1837 qui précise que le
maire est un représentant de l'Etat.
19 Loi du 5 avril 1884
11
autres départements20. Une véritable
politique visant une meilleure répartition des activités sera
mise en place. Elle vise à inciter les entrepreneurs à
s'implanter en province.
Cette politique d'aménagement du territoire sera
renforcée lors de la période 1954 - 1968 avec la construction des
régions destinées à redynamiser l'économie des
territoires. En premier lieu, 21 régions économiques de programme
seront créées21 puis renforcées22.
En 1964 sont créés les préfets de
région23. Cette politique de renforcement des régions
est fortement impulsée par De Gaulle qui déclare que «
l'évolution générale porte, en effet, notre pays vers un
équilibre nouveau. L'effort multiséculaire de centralisation, qui
fut longtemps nécessaire à notre pays pour réaliser et
maintenir son unité malgré les divergences des provinces qui lui
étaient successivement rattachées, ne s'impose plus
désormais. Au contraire, ce sont les activités régionales
qui apparaissent comme les ressorts de sa puissance économique de
demain24 ».
Ces réformes ne suffisent pas tant grandit en France
une demande de rapprochement entre la construction des décisions
publiques et les besoins ou intérêts spécifiques des
citoyens sur leur lieu de vie. En 1976, le rapport « Vivre
ensemble25 » écrit par Olivier Guichard dénonce
la « dépossession légale et administrative » par
l'Etat, d'activités qui devraient relever de la compétence de
collectivités ou d'acteurs locaux : « Ainsi pris, l'Etat n'a
souvent ni le temps ni le recul suffisant pour jouer le jeu que la
collectivité attend de lui : surveiller les grands équilibres,
poser les règles de la vie en société, en contrôler
le respect. En revanche, il s'est substitué au rôle normal des
collectivités locales. »
Ainsi à la fin des années 1970, les
représentants des autorités déconcentrées sur les
territoires ne sont pas élus mais nommés par l'Etat. Les maires
sont la seule exception. Il faudra attendre 1982 et une véritable
volonté politique de décentralisation pour que se modifient
profondément les rapports entre l'Etat, les collectivités
territoriales et les acteurs socio-économiques des territoires
(régions, départements, communes, etc.).
1.1.c LA DECENTRALISATION POLITIQUE
Au contraire de la déconcentration administrative, qui
n'est qu'un déplacement de l'autorité de l'Etat sur les
territoires, la décentralisation politique consiste en un
véritable transfert de compétences de l'Etat vers les
collectivités territoriales. Ce mouvement a marqué un tournant
qui a permis de reconnaitre les spécificités et les acteurs des
territoires.
« La décentralisation est un processus
d'aménagement de l'État unitaire qui consiste à
transférer des compétences administratives de l'État vers
des entités (ou des collectivités) locales distinctes de lui.
»26
Le virage de la décentralisation est amorcé par
la promulgation, le 2 mars 1982, de la « loi relative aux droits et
libertés des communes, des départements et des régions
». Cet Acte 1 de la décentralisation va opérer de profonds
changements. Les régions deviennent des collectivités
territoriales à part entière puisqu'elles sont dotées d'un
conseil élu par suffrage universel. La tutelle administrative est
remplacée par un contrôle a posteriori ce qui permet des gains
d'autonomie et de libertés pour les collectivités
territoriales.
20 Le géographe Jean-François Gravier
utilisera l'expression de « Paris et le désert français
»
21 Par décret du 30 juin 1955
22 Décret du 7 janvier 1959
23 Décret du 14 mars 1964
24 Déclaration de De Gaulle le 24 mars 1968
à Lyon
25
http://www.senat.fr/rap/r99-447-1/r99-447-13.html
26
http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/collectivites-territoriales/principes-collectivites-territoriales/qu-est-ce-que-decentralisation.html
12
Ce tournant politique opéré sera par la suite
renforcé. L'Acte 2 de la décentralisation, intitulé «
loi constitutionnelle relative à l'organisation
décentralisée de la République », est
promulgué le 28 mars 2003. Les collectivités territoriales se
voient transférer de nouvelles compétences en termes de
développement économique, les infrastructures, la formation et
l'enseignement. Désormais, elles disposent d'une autonomie, de
ressources propres (impôts) et de subventions leur permettant de soutenir
des projets avec un contrôle juridictionnel a posteriori de l'Etat.
Le processus de décentralisation permet donc une plus
grande autonomie des collectivités territoriales. La mise en place
d'outils de développement va définitivement installer la
reconnaissance des échelons infranationaux comme territoires pertinents
d'intervention en matière de politiques publiques.
1.2 UNE RECONNAISSANCE DU LOCAL PERMETTANT L'EMERGENCE
DU DST
1.2.a LA MISE EN PLACE DE MOYENS POUR LES TERRITOIRES
La décentralisation va être accompagnée
par la mise en place d'outils de développement spécifiques sur
les territoires. Grâce à cela, les collectivités vont
réellement pouvoir mener de nombreuses et diverses expériences de
gouvernance sur les territoires. Ces expériences vont impliquer à
la fois les acteurs publics et privés sur des questions
socio-économiques (aménagement du territoire, mobilité et
transport, culture, santé, etc.).
Le territoire est donc un espace privilégié de
débat et de mise en oeuvre d'actions répondant à des
stratégies de développement économique et social. La
proximité est reconnue car elle doit permettre une meilleure
connaissance des problématiques locales. Elle doit également
faciliter la co-construction des projets par les acteurs.
De nouvelles lois, de nouveaux instruments budgétaires
et dispositifs sont mis en place vont accentuer la création de
nombreuses initiatives de dialogue sur les territoires infranationaux. L'Union
Européenne, à travers les objectifs de Göteborg (2001) et de
Lisbonne (2006), jouera un rôle très important en mettant
également des moyens financiers pour renforcer l'attractivité des
territoires27, via les fonds FSE28.
Les collectivités territoriales vont disposer de moyens
leur permettant d'élaborer leurs politiques publiques concernant
l'aménagement du territoire et le développement
économique. Parmi les dispositifs donnant aux régions les moyens
de leur autonomie, nous pouvons mentionner :
- Les CPER 29 : Ces contrats pluriannuels permettent la
mutualisation de moyens financiers (Etat, collectivités territoriales et
Union Européenne) pour soutenir les projets de développement et
d'aménagement du territoire au niveau régional,
interrégional et infrarégional.
- Les SRDE30 : ils permettent à la
région de coordonner le développement de son territoire sur la
base d'un diagnostic partagé de la situation économique
régionale. Il fixe des objectifs à atteindre et des moyens pour y
parvenir.
27 Décisions du Conseil de l'Europe du 20
février 2006 et du 6 octobre 2006 relatives « aux orientations
stratégiques de la Communauté pour le développement rural
» et « aux orientations stratégiques communautaires en
matière de cohésion ».
28 Fonds Sociaux Européens.
29 Loi du 29 juillet 1982 faisant suite à
l'Acte 1 de la décentralisation.
30 Loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative
aux libertés et responsabilités locales.
13
- Les SCOT31 : Il est globalement le pendant du
SRDE au niveau d'un territoire urbain et périurbain sur la
définition d'une stratégie d'aménagement et de
développement économique local.
D'autres dispositifs existent (Contrats de
développement, SRADDT, politique des pays, etc.) et consacrent donc
cette nécessité de penser et de développer les politiques
publiques aux plus près des acteurs impactés. La création
et la mise en place de ces moyens ont directement participé à
l'émergence de lieux de dialogue social territorial.
1.2.b DES DEMANDES DE DIALOGUE ET DE DEMOCRATIE AU NIVEAU
LOCAL
Dans le même temps, de nombreux lieux et
expériences de dialogue regroupant divers acteurs d'un territoire voient
le jour. Une certaine remise en cause du système de
représentation s'est accompagnée de nouvelles demandes de
dialogue et de démocratie qui se traduisent par la création
d'arènes de dialogue et de décision nouvelles.
On peut définir de façon générale
la démocratie comme le « pouvoir au peuple »32. Le
peuple est alors la seule source légitime du pouvoir. Reste que cette
définition est plutôt vague et sujette à
interprétation.
La Révolution Française de 1789 et l'actuelle Ve
République ont consacré la définition de la
démocratie à travers le système de la
représentation. Cette conception de la démocratie est largement
inspirée de la pensée développée par Montesquieu.
En résumé, le peuple est apte à élire des
représentants capables de définir l'intérêt
général et de décider de l'action publique, mais il n'est
pas apte à gouverner lui-même. D'après Montesquieu,
« [..] le grand avantage des représentants c'est qu'ils sont
capables de discuter les affaires. Le peuple lui n'y est pas du tout
préparé [..] » 33 . Dans ce cas, le peuple gouverne de
manière indirecte. Le représentant élu est un
intermédiaire permettant d'atteindre l'intérêt
général.
Une autre conception de la démocratie, incarnée
par Jean-Jacques Rousseau, donne un sens différent : le peuple doit
être responsable, il gouverne directement ce qui justifie le recours
à la démocratie directe. Il n'y a donc pas lieu à
désigner des représentants puisque personne ne peut
décider pour le peuple.
Cette différence de conception de l'idéal
démocratique est résumée par l'abbé Sieyès
en ces termes : « Les citoyens peuvent donner leur confiance à
quelques-uns d'entre eux. Sans aliéner leurs droits, ils en commentent
l'exercice. C'est pour l'utilité commune qu'ils se nomment des
représentations bien plus capables qu'eux-mêmes de connaitre
l'intérêt général, et d'interpréter à
cet égard leur propre volonté. [..] L'autre manière
d'exercer son droit à la formation de la loi est de concourir
soi-même immédiatement à la faire. Ce concours
immédiat est ce qui caractérise la véritable
démocratie. Le concours médiat désigne le gouvernement
représentatif. La différence entre ces deux systèmes
politiques est énorme. »34
Les conceptions de la représentation de Montesquieu et
celle de la démocratie directe de Rousseau ne doivent cependant pas
être vues comme concurrentes, mais comme des idéaux
complémentaires. On constate, depuis une trentaine d'années, que
le législateur « rééquilibre
31 Loi de solidarité et renouvellement urbain
(SRU) du 13 décembre 2000.
32 Le terme de « démocratie »
renvoie au terme grec ancien de « dêmokratía »,
où « dêmos » signifie le « peuple » et «
kratos » signifie le « pouvoir ».
33 (DE) MONTESQUIEU Charles, L'esprit des lois,
livre XI, chap. 6.
34 SIEYES Emmanuel Joseph, Dire de
l'abbé Sieyès sur la question du veto royal à la
séance du 7 septembre 1789, Imprimeur de l'Assemblée
Nationale, Paris. p. 14.
14
la balance » pour introduire un peu plus cette conception
Rousseauiste dans notre modèle de démocratie.
C'est ainsi que naissent en France, à partir des
années 1960, les premières expériences locales
d'autogestion c'est-à-dire d'écoute et de prise en compte des
besoins des citoyens pour faire émerger des solutions collectives
acceptables par tous. C'est le cas du développement des Groupes d'Action
Municipaux (Roux, 2011). La logique est donc d'impliquer les différentes
composantes de la société au niveau local pour sortir de logiques
verticales qui ne garantissent pas toujours la prise en compte des
intérêts divers des acteurs privés ou publics.
De nombreux lieux de dialogue institutionnalisé voient
également le jour. Ils naissent de la volonté des
collectivités territoriales et de l'Etat déconcentré. Ils
visent une meilleure insertion des politiques publiques aux
éléments socio-économiques sur les territoires.
1.2.c DE NOUVEAUX LIEUX DE REGULATION ECONOMIQUE ET SOCIALE
SUR LES TERRITOIRES
La décentralisation accompagnée des nouvelles
demandes de dialogue au niveau local va faire émerger un processus de
territorialisation. C'est ainsi qu'une multiplicité de lieux de dialogue
institutionnalisé sont créés et avec eux le principe de
gouvernance des territoires qui prend son plein essor.
La gouvernance peut être définie comme «
l'ensemble des règles et des processus collectifs, formalisés ou
non, par lequel les acteurs concernés participent à la
décision et à la mise en oeuvre des actions publiques. Ces
règles et ces processus, comme les décisions qui en
découlent, sont le résultat d'une négociation constante
entre les multiples acteurs impliqués. Cette négociation, en plus
d'orienter les décisions et les actions, facilite le partage de la
responsabilité entre l'ensemble des acteurs impliqués,
possédant chacun une certaine forme de pouvoir. »35
Le développement des pratiques de gouvernance dans les
territoires est intimement lié au processus de transfert de
compétences de l'Etat vers les collectivités locales. Quand la
déconcentration n'était que l'application de décisions
hiérarchiques, avec en haut de la pyramide l'Etat, la
décentralisation contient une dimension d'élaboration plus ou
moins partagée des politiques publiques aux différents
échelons. L'étape suivante est le processus de territorialisation
que décrit Jacques Perrat (2007). Pour lui, la territorialisation
transforme l'action publique pour la placer sur le « mode de la
gouvernance ». Des « lieux stabilisés » de dialogue et de
concertation entre les acteurs d'un territoire sont consacrés. Ils
doivent permettre d'aider les décideurs publics dans la construction des
politiques locales en prenant en compte divers avis d'acteurs publics et/ou
privés du territoire en question (Jacques Perrat, 2007).
Si le développement de la gouvernance vise à une
meilleure prise en compte des besoins et intérêts locaux, ce mode
de gouvernement est ambigu pour plusieurs raisons. Les lieux
institutionnalisés de gouvernance sur les territoires posent question
quant à leur composition et notamment sur la
représentativité des personnes morales ou physiques qui y
siègent. La gouvernance sur les territoires peut également
être considérée comme un outil de communication permettant
d'accroître l'acceptabilité des politiques publiques, le pouvoir
de décision restant souvent entre les mains des seuls élus.
Il n'empêche que se développent de nouveaux modes
de régulation socio-économique avec le développement de la
gouvernance sur les territoires. La territorialisation n'induit « pas
35 Cahier de recherche en politiques appliquées
Vol. IV, Numéro 3, Automne 2012
15
seulement un changement d'échelle mais aussi un
changement de nature de l'intervention et de la coordination des acteurs
concernés » (Perrat, 2007).
La création de ces lieux de dialogue dans les
territoires englobe les instances de DST dont l'émergence est
directement liée à ce développement des pratiques de
gouvernance sur les territoires.
1.2.d LA CREATION DE LIEUX DE DIALOGUE SOCIAL
TERRITORIAL
Le dialogue social territorial va s'implanter et se
développer petit à petit. Il participe à une
volonté des décideurs publics et des acteurs de la
société au sens large de créer des lieux de dialogue
favorisant eux aussi la construction des politiques publiques sur les
territoires.
Dans son rapport « Réalité et avenir du
dialogue social territorial36 », le CESE37 met ainsi
en avant « une volonté propre des acteurs territoriaux » et la
« territorialisation des politiques publiques » impulsée par
la décentralisation comme éléments explicatifs du
développement du DST en France. Un autre aspect n'est pas anodin dans
cette évolution. Le dialogue social d'entreprise et la
négociation collective entre les partenaires sociaux sont
réaffirmés : « le développement du dialogue social
territorial n'aurait sans doute pas pris une telle importance sans celui du
dialogue social de façon générale, dont la place dans la
régulation et la réglementation des rapports sociaux a
été renforcée, sous l'impulsion des partenaires sociaux et
des pouvoirs publics. »
Le champ des politiques publiques locales s'élargit et
est accompagné par la création de « nouvelles formes
stabilisées du dialogue social » (Perrat, 2009). Ils abordent des
questions d'emploi et de travail et parfois des enjeux plus larges comme le
développement économique et l'aménagement des territoires.
Ces lieux marquent leur différence par la présence
systématique des partenaires sociaux en leur sein38.
Ce sont l'ensemble de ces évolutions -
déconcentration, décentralisation, développement de la
gouvernance sur les territoires et volonté de renforcer le dialogue
social - qui ont créé un contexte favorable à la
création du CISTE, association paritaire de DST.
36 Publié le 07 juillet 2009.
37 Conseil Economique, Social et Environnemental.
38 La présence des partenaires sociaux n'est
pas forcément requises dans tous les lieux de dialogue dans les
territoires (dialogue civil, dialogue sociétal, dialogue territorial,
etc.). Nous reviendrons sur cette particularité dans la
2ème Partie.
16
Chapitre 2 : LE CISTE, UN ACTEUR DU DIALOGUE SOCIAL
TERRITORIAL EN POITOU-CHARENTES
Nous verrons dans ce chapitre que le CISTE, comme le champ du
DST en général, est directement né du processus de
décentralisation. Nous préciserons ici pourquoi le CISTE est
considéré comme un acteur de dialogue en Poitou-Charentes. Nous
insisterons également sur ses modalités de gouvernance et de
décision qui font de cette association paritaire une structure de
l'ESS.
2.1 CREATION DU CISTE DANS LE PROCESSUS DE
DECENTRALISATION
Le processus de décentralisation a créé
les conditions d'émergence du CISTE. La reconnaissance du niveau
régional ou local comme territoire pertinent d'intervention a permis au
CISTE de s'assurer des soutiens publics importants et nécessaires pour
son développement.
2.1.a CREATION DU CISTE
Le CISTE (Carrefour de l'Innovation Sociale du Travail et de
l'Emploi) est une association loi 190139 créée en juin
2000. Sa création fut doublement impulsée par Jean-Pierre
Raffarin et France Joubert, respectivement Président du Conseil
Régional du Poitou-Charentes et Secrétaire Régional CFDT
de l'époque. La Région Poitou-Charentes appuyait les initiatives
de DST sur son territoire, c'est pourquoi le CISTE fut inscrit dans le Contrat
de Plan Etat/Région à titre expérimental.
6 organisations syndicales de salariés ont
participé à la création du CISTE (UNSA, CFDT, CFE CGC,
CFTC, CGT et FO). Du côté des organisations patronales, l'UPAR, la
CGPME, la FRSEA et le MEDEF étaient présent à la naissance
du CISTE. Il est à noter que la CRES Poitou-Charentes a
été associée elle aussi à la création du
CISTE, en tant que représentant de l'économie sociale et
solidaire, et a été remplacée par l'USGERES en 2007.
2.1.b L'EVOLUTION DU CISTE ET DE SES ACTIONS
L'objet premier du CISTE est de pouvoir rassembler ces acteurs
sur un même lieu pour développer et renforcer le DST. Autrement
dit, le CISTE doit être un « facilitateur » et un animateur du
DST en Poitou-Charentes en imaginant et en mettant en place des projets
expérimentaux et innovants.
En 13 ans d'existence, le CISTE a progressivement
modifié son champ et ses modalités d'actions. On peut
considérer que les premières années d'activité ont
permis au CISTE de s'approprier le DST dans toute sa complexité, d'en
saisir les enjeux et d'initier cette démarche en Poitou-Charentes. Cette
première étape s'est concrétisée par des travaux
d'analyse, l'organisation de journées d'échanges, le pilotage de
projets européens et la construction d'un réseau de
partenaires.
Dans un deuxième temps, le CISTE a créé
plusieurs commissions de travail pour formaliser des pistes d'action sur
diverses thématiques (Sécurisation des parcours professionnels,
égalité
39 Loi du 1er juillet 1901 relative au contrat
d'association dont l'article premier stipule que « l'association est la
convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d'une
façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un
but autre que de partager des bénéfices ». (Source :
http://www.legifrance.gouv.fr)
17
professionnelle femmes/hommes, travail saisonnier, dialogue
social TPE/PME et artisanat, formation au Dialogue Social Territorial).
Depuis 2009, le CISTE a pu réaliser certains projets,
suite aux travaux en commissions, en les mettant en application à titre
expérimental en Poitou-Charentes. Le développement du CISTE a
également été marqué par la création de
l'IDST en collaboration avec l'Université de Poitiers. Le CISTE a enfin
créé un Observatoire Régional du Dialogue Social pour
appuyer ses travaux d'analyse et de réflexion.
2.1.c UN ACTEUR NE DE LA DECENTRALISATION : L'EXEMPLE DU
FINANCEMENT
Le CISTE ne se crée que peu de ressources propres. Il
dépend essentiellement de financements publics par la signature de
conventions lui permettant de réaliser des actions et projets.
Depuis sa création, le CISTE a été
principalement soutenu par le Conseil Régional de Poitou-Charentes et
l'Etat via la DIRECCTE. Ces deux soutiens représentaient près de
60% des 300 000 € de budget annuel du CISTE pour 2012.
La création du CISTE a été directement
impactée par la mise en place des Contrat de Plan Etat-Région,
devenus nouvellement Contrat de Projets (CPER), dont nous avons fait mention
sur le processus de décentralisation. Puisque que le niveau
régional est reconnu comme territoire pertinent d'intervention, le CISTE
a pu s'inscrire dans le CPER de 2000 - 2006, puis dans celui couvrant la
période 2007 - 2013.
Cette inscription dans les CPER marque bien la reconnaissance
par les pouvoirs publics de la compétence et du rôle du CISTE au
niveau régional. La sortie d'une logique de centralisation absolue et la
reconnaissance de niveaux infranationaux comme territoires pertinents
d'intervention ont été des facteurs primordiaux à la
création du CISTE.
Depuis 2009, le CISTE se voit attribuer des financements
européens via les fonds FSE. Au départ le FSE ne finançait
que des projets ponctuels du CISTE pour aujourd'hui financer l'ensemble des
actions. Si bien que ces subventions européennes composent plus du tiers
du budget du CISTE.
Outre les financements publics, le CISTE perçoit une
cotisation annuelle de chacune des organisations membres.
Depuis 2008, le CISTE s'est attiré le soutien de
partenaires privés. Aujourd'hui, Harmonie Mutualité et AGEFOS PME
soutiennent le CISTE. De plus, l'Université de Poitiers soutient
l'association avec notamment la création de l'Institut du Dialogue
Social Territorial.
Répartition des ressources du CISTE selon
leur provenance (budget prévisionnel 2013)
DIRECCTE
Conseil Régional
Fonds européens
Autres partenariats
Cotisations des membres
<1%
37%
4%
31%
28%
18
La grande majorité des dépenses du CISTE
concerne les charges de personnel (68%). Pour le reste, le CISTE dépense
28 % de son budget dans les achats et services extérieurs. Cela concerne
principalement les déplacements pour les missions et les locations de
matériel.
Répartition des dépenses du CISTE
par poste (budget prévisionnel 2013)
Charges de personnel
Achats et services extérieurs
Impôts et taxes
Charges financières
Dotation aux amortissements
28%
2% 1% 1%
68%
Nous avons pu retracer brièvement l'historique du CISTE
reconnu comme un acteur du DST en Poitou-Charentes. Nous allons maintenant
préciser la nature de l'action du CISTE dans ce domaine.
2.2 UN ACTEUR DU DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL EN
POITOU-CHARENTES
19
2.2.a PERIMETRE D'ACTION
Le CISTE intervient essentiellement sur la région
Poitou-Charentes.
Les thèmes traités par le CISTE, principalement
travail et emploi, sont des sujets complexes qui dépassent le cadre
régional mais le CISTE s'appuie sur les spécificités
locales pour des actions en direction des partenaires sociaux de la
région. Cela n'empêche pas les acteurs du CISTE de « regarder
ailleurs », de s'inspirer d'expériences situées sur d'autres
régions ou d'intégrer des travaux de recherche plus globaux pour
affiner leurs actions en Poitou-Charentes.
En retour, le CISTE communique assez largement vers les autres
territoires en intervenant dans des colloques liés au DST ou en
présentant leurs actions à diverses institutions
intéressées.
Le CISTE bénéficie donc de la reconnaissance du
niveau régional comme territoire pertinent de dialogue social, et plus
particulièrement sur l'emploi et le travail.
2.2.b OBJET GENERAL ET MISSIONS
« L'association a pour objet de fédérer
et animer le débat régional autour des évolutions et
démarches relatives aux nouvelles formes d'emploi et des relations au
travail, d'organiser une fonction de veille et d'analyse pluridisciplinaire des
pratiques professionnelles, d'inciter à l'innovation sociale en mettant
en oeuvre des méthodologies d'actions centrées sur le partenariat
et reposant sur les réseaux, structures et organisations existantes
territoriales ou professionnelles. »40
Le CISTE a donc une double dimension. Il est un acteur
construisant des projets expérimentaux et les mettant en oeuvre. Ces
projets sont construits par les partenaires sociaux et selon les cas d'autres
acteurs peuvent être invités. Les salariés viennent
accompagner la mise en oeuvre des projets. Ces actions sont utiles aux
partenaires sociaux du CISTE et doivent apporter une plus-value
économique et sociale sur le territoire picto-charentais.
Ces projets sont de plusieurs natures :
- La réflexion et l'accompagnement de projet sur des
problématiques économiques et sociales.
- L'information et la formation au dialogue social
territorial. Un point important est le transfert des connaissances et
expériences positives vers d'autres utilisateurs potentiels.
- L'expérimentation et innovation
- L'organisation d'évènements ponctuels
- L'analyse des enjeux propres au territoire par des
enquêtes quantitatives et qualitatives.
Le CISTE a une vocation opérationnelle visible, mais un
second aspect n'est pas à négliger.
Le CISTE est aussi un lieu de rencontre des partenaires
sociaux qui doivent dépasser leurs clivages pour co-construire ces
projets. Ainsi, le CISTE est un lieu important de reconnaissance et de dialogue
pour les syndicats. C'est à cette condition que les travaux du CISTE
peuvent être efficaces sur l'identification des problématiques et
la construction de solutions envisageables par le débat et
l'échange d'idées.
40 Article 2 des statuts du CISTE
20
2.2.c METHODE ET OUTILS
Le CISTE a une méthode assez précise pour mener
ses projets. La question du collectif et de la co-construction s'avère
au coeur de la méthode souvent employée.
Le CISTE constitue pour chaque projet un groupe de travail.
Ces groupes de travail sont à géométrie variable et ne
vont pas rassembler les mêmes acteurs selon le sujet traité, le
territoire du projet, etc. Il s'agit alors de mobiliser des membres des
organisations syndicales du CISTE ainsi que des personnes extérieures
impactées par le sujet (collectivités, élus, experts,
etc.) et identifiées.
Le groupe de travail doit ensuite établir un diagnostic
de la situation, recenser les initiatives intéressantes pour pouvoir
échanger sur les solutions envisageables, afin de faire le tri selon la
plus-value qu'elles apportent. Il s'agit alors d'analyser collectivement les
contraintes et les avantages engendrés par les solutions afin de faire
un choix.
Le CISTE doit ensuite servir de « déclic » au
projet. Il doit le lancer et participer à sa mise en place pour ensuite
le laisser vivre en toute indépendance. C'est en cela que le CISTE est
un accompagnateur ou facilitateur. Il met à disposition des acteurs ses
ressources pour initier ou appuyer des initiatives.
Ainsi, le CISTE transfère les solutions ou
expériences positives aux acteurs concernés par le projet. Il
peut également communiquer ses résultats et expliquer ses
démarches auprès d'acteurs situés hors du
Poitou-Charentes.
2.2.d ACTIONS DU CISTE (2012-2013)
Nous reviendrons ici brièvement sur les actions
menées par le CISTE en 2012 et sur les projets en cours pour 2013 afin
d'illustrer la diversité des thèmes et questions que traitent
cette association. Dans une certaine mesure, ces projets représentent
bien la pluralité des sujets attenants au DST.
Nous ne dresserons pas une liste exhaustive pour ne pas
être trop long, mettant simplement en avant quelques projets pour saisir
la diversité des projets du CISTE
? SAISONNIER
Dans le but de concilier vie professionnelle et familiale, une
enquête du CISTE menée sur la zone « Cap au Sud » de
Poitiers a fait émerger des besoins en termes de crèche
interentreprises. Suite à ces travaux, le CISTE a été
sollicité pour participer à un nouveau comité de pilotage
sur une autre zone du territoire.
Un projet est mené avec la Communauté
d'Agglomération et la Maison de l'Emploi de La Rochelle sur l'emploi
saisonnier. Il a pour but de réfléchir à
l'opportunité de créer un lieu expérimental d'accueil des
travailleurs saisonniers. Un réseau d'acteurs a été
constitué avec notamment le travail d'un étudiant du
Diplôme d'Université DST sur ce sujet.
? DIALOGUE SOCIAL TPE/PME ET ARTISANAT
La nouvelle Zone République de Poitiers a fait
émerger des besoins que le CISTE a pu identifier. Il s'avère que
la création d'une crèche est souhaitée par les
salariés travaillant sur cette zone. Le CISTE participe au comité
de pilotage qui étudie les conditions de création de cette
crèche inter-entreprises.
Sur la santé au travail, le CISTE a mobilisé un
réseau d'acteurs en pays Mellois sur la question de la prévention
des risques professionnels. En 2013, 3 ateliers viseront permettre
21
aux entreprises de créer leur Document Unique,
d'établir un diagnostic sur les risques professionnels et de
réduire les risques de TMS (Troubles Musculo-Squelettiques).
Le CISTE souhaite initier une démarche de
sensibilisation sur les risques professionnels vers les structures de l'ESS sur
le département de la Charente.
? L'IDST
L'Institut du Dialogue Social Territorial, créé
en 2010, est une association paritaire où siègent d'une part des
membres du CISTE, et d'autre part des représentants de
l'Université de Poitiers. Cette association a pour but de
développer le DST et d'encourager des initiatives allant dans ce sens.
Il s'appuie sur l'expertise du CISTE complétée par la dimension
recherche apportée par l'Université.
L'activité de l'IDST a été marquée
par l'organisation de la 2ème session de DU DST sur
l'année 2012 - 2013. Elle avait pour objet de former des militants CFDT
et CGT au DST. Le CISTE a appuyé l'IDST sur la recherche de financement,
l'organisation et la synthèse des journées de formation.
Les actions de l'IDST se sont également
concrétisées par des interventions sur le sujet de DST.
L'association a ainsi organisé les 2èmes Rencontres du DST en
octobre 2012 à Poitiers afin de réfléchir et
d'échanger sur ce thème encore nouveau
? L'ORDS
L'Observatoire Régional du Dialogue Social est une
action du CISTE et non pas une association supplémentaire. L'ORDS a
été créé en 2010 comme un outil de d'accompagnement
de projet et d'analyse du dialogue social territorial.
Un premier axe concerne le dialogue social en entreprise. A ce
titre, l'ORDS a mené une campagne de sensibilisation sur les
élections professionnelles dans les TPE. Un travail d'analyse et de
sensibilisation sur l'égalité professionnelle femmes-hommes est
en cours, de même que sur la perte d'emploi chez les seniors.
Un deuxième axe traite du dialogue social sur le
territoire picto-charentais. Un travail de recensement des structures de DST de
la région a été mené jusqu'à la
création d'un annuaire. C'est à partir de ce travail que ma
mission de stage au CISTE a été menée. Il s'agissait
d'apprécier l'implication des partenaires sociaux du CISTE dans ces
lieux de DST et d'analyser le fonctionnement de ces lieux en termes de
qualité du dialogue, de qualité des travaux produits et d'impact
sur la conduite des politiques publiques en Poitou-Charentes.
2.3 UNE ASSOCIATION PARITAIRE REGIONALE DE L'ECONOMIE
SOCIALE ET SOLIDAIRE
2.3.a LES INSTANCES DE DISCUSSION ET DE DECISION
? L'ASSEMBLEE GENERALE
Une Assemblée Générale (AG) a lieu tous
les 2 ans. Les représentants des organisations syndicales titulaires et
suppléants du CISTE y sont désignés.
? LE CONSEIL D'ADMINISTRATION
Le CISTE est composé d'un Conseil d'Administration.
C'est l'instance décisionnelle de la structure qui peut s'appuyer sur
des propositions formulées par le bureau.
22
Ainsi, l'article 4 des statuts de l'association stipule que
« Le Conseil d'Administration décidera des axes de travail et
des modalités d'opérationnalisation ou d'expérimentation
du CISTE. Il pourra s'appuyer sur les avis et travaux du Comité
d'Orientation ». Par ailleurs, le CA désigne le bureau.
La composition du CA a connu plusieurs évolutions avec
notamment le retrait de certaines organisations syndicales. Ne sont plus
présentes au CA :
- Le MEDEF - La FRSEA - FO
- La CFTC
En 2013, l'USGERES a changé de statuts et a adopté
une nouvelle dénomination (UDES). Dès lors en 2013, on retrouve
au CA 3 organisations patronales dans un premier collège :
- La CGPME - L'UDES - L'UPAR
Et 4 organisations salariales dans l'autre collège :
- La CFDT
- La CFE CGC
- La CGT - L'UNSA
? LE BUREAU
Le CA désigne le bureau qui est composé de :
- Un président et un vice-président de
l'association - Un secrétaire et un vice-secrétaire
- Un trésorier et un vice-trésorier
Suite au CA de juillet 2013, la présidence autrefois
assurée par la CGPME l'est aujourd'hui par la CFDT.
Chaque mandat a une durée de 2 ans. Un point important
dans la désignation du bureau est l'obligation d'alternance qui est
fixé dans les statuts de l'association41. Le bureau a pour
rôle d'informer et de proposer des orientations stratégiques au
Conseil d'Administration.
Par exemple, si pendant un premier mandat la présidence
du CISTE est assurée par un représentant du collège
employeurs et la vice-présidence par un représentant du
collège salarié, le second mandat verra automatiquement un
représentant du collège salarié à la
présidence et un représentant du collège employeur
à la vice-présidence.
Ce fonctionnement est similaire pour les autres mandats du
CISTE.
41 Article 9 : Fonctionnement. « Chaque
fonction est exercée alternativement par un représentant des
organisations d'employeurs et de salariés ».
23
? LE COMITE D'ORIENTATION
Le CISTE dépendant en grande partie de financements
publics, un Comité d'Orientation a été créé.
Il est composé du CA et de représentants de l'Etat et de la
Région. Son rôle est d'évaluer les actions et d'être
force de propositions sur la réalisation des projets. Ses avis sont
ensuite débattus lors des CA.
? LES COMMISSIONS DE TRAVAIL
Pour faire vivre la structure et la dynamique d'innovation
voulue lors de la création du CISTE, pour la bonne réalisation
des projets et actions décidés par le CA, des commissions de
travail sont ponctuellement mises en place. Leur composition varie selon les
projets et les thématiques abordées. On y retrouve des
élus du CISTE ainsi que certains acteurs socio-économiques
concernés par le projet en question.
A ce jour, quatre commissions de travail ou comités de
pilotage (COPIL) sont actifs. Ils portent sur les actions suivantes :
- Le travail saisonnier
- Le dialogue social dans les Très Petites Entreprises
(TPE) et Petites et Moyennes
Entreprises (PME)
- Les projets de l'ORDS
- L'IDST
? L'EQUIPE SALARIEE
Pour mener à bien ses actions et accompagner
l'investissement des membres du CA, le CISTE emploie une équipe de
quatre personnes. Une directrice, 2 une chargées de projet, et une
secrétaire comptable. C'est cette équipe salariée que j'ai
intégré en qualité de stagiaire.
? ORGANIGRAMME
24
Organigramme du CISTE42
2.3.b LE PARITARISME
Le CISTE a la particularité d'être une
association paritaire. Une association paritaire est une structure « qui
réunit en nombre égal des représentants de deux parties
».
L'article 5 des statuts du CISTE assure le paritarisme :
« L'Assemblée Générale est composée
:
- De deux délégués par organisation
syndicale de salariés,
- D'un nombre égal de délégués
représentants le collège employeur. »
Dans le cas du CISTE, il y a 4 organisations de
salariés contre 3 organisations patronales. Mais le paritarisme est
assuré par la constitution de deux collèges43 au poids
égal. Pour assurer le paritarisme, le collège employeur se
partage 4 mandats de titulaires et 4 mandats de suppléants. Le
collège employeur s'est mis d'accord pour que la CGPME dispose de 2
titulaires et 2 suppléants.
Il est à noter que chaque organisation syndicale,
quelle que soit son poids au niveau national ou régional, dispose de 2
sièges au CA c'est-à-dire d'un titulaire et d'un
suppléant.
Le paritarisme est également affirmé par
l'alternance (tous les deux ans) obligatoire de la composition du bureau comme
évoqué plus haut.
Les mandatés sont désignés par
l'organisation qu'ils représentent.
Les décisions sont prises à la
majorité44 des membres présents lors des
assemblées.
42 Source :
http://ciste-pc.com
43 Un collège salarié et un
collège employeur.
44 La moitié des voix plus une voix.
25
Ces règles permettent ainsi un équilibre entre
syndicats de salariés et d'employeurs. Chaque collège disposant
de 50% des voix, aucun collège n'est en position d'imposer ses vues. On
comprend dès lors l'importance du dialogue et du débat dans la
construction des projets pour arriver à des formes de consensus. En
effet, aucun projet ne peut être validé en CA si les partenaires
sociaux campent sur des clivages et formes d'opposition dogmatiques.
Le paritarisme est un aspect fondamental du dialogue social
territorial pour les raisons que nous venons d'évoquer.
2.3.c LE RESPECT DE VALEURS ET PRINCIPES DE L'ECONOMIE
SOCIALE ET SOLIDAIRE
L'économie sociale et solidaire regroupe les
associations, coopératives, mutuelles et fondations. Le CISTE
étant une association, on peut considérer qu'il fait
légalement partie de l'économie sociale et solidaire.
Néanmoins, il nous apparaît plus
intéressant de confronter le fonctionnement et les actions du CISTE aux
valeurs et principes de l'économie sociale et solidaire. Cette
démarche nous permettra de mieux apprécier la proximité du
CISTE avec les objectifs poursuivis par l'économie sociale et
solidaire.
En reprenant une à une les 6 valeurs de
l'économie sociale et solidaire mises en avant par le CNCRES45
et en les confrontant avec le fonctionnement et les actions du CISTE, on
peut estimer que ce dernier adopte des pratiques qui le placent pleinement dans
le champ de l'économie sociale et solidaire.
? LES FEMMES ET LES HOMMES SONT AU COEUR DE L'ECONOMIE
ET EN CONSTITUENT LA
FINALITE
L'objectif du CISTE est de mettre en place des projets qui
créent du lien entre différents acteurs d'un territoire. Il
s'agit donc de les mettre autour d'une table pour leur permettre dialoguer et
mener des actions co-construites et partagées. Le CISTE établit
alors des passerelles.
Les projets ne visent jamais à générer
des profits. Ils visent le progrès social en cherchant des solutions
garantissant une meilleure intégration de l'homme dans son environnement
socio-économique. Des actions de sensibilisation sur les questions de
santé au travail ou d'égalité professionnelle
femmes-hommes dans l'entreprise illustrent cette primauté de la personne
et de l'objet social sur le capital.
? L'ADHESION AUX PROJETS ET AUX STRUCTURES EST OUVERTE
ET VOLONTAIRE.
L'adhésion à l'association CISTE est
complètement ouverte et volontaire. En effet, les partenaires sociaux ne
sont pas contraints d'être membre du CA du CISTE. Pour preuve, certains
syndicats ont quitté librement l'association. A contrario, d'autres
organisations syndicales y ont fait leur entrée dès lors qu'ils
ont manifesté leur intérêt. Les élus du CISTE
peuvent librement intégrer les commissions de travail en fonction de
leurs compétences et de leur intérêt pour les
thématiques abordées.
Au niveau des projets, le CISTE essaye un maximum de s'attirer
des alliés, des acteurs-ressource pour pouvoir construire et porter les
actions. Le CISTE n'a pas le pouvoir d'imposer ses projets ce qui suppose
l'adhésion volontaire des acteurs. Il tente également de
45 Source :
http://www.cncres.org
26
ne pas inscrire ses actions en concurrence avec d'autres
structures, privilégiant la logique de complémentarité.
? LA GESTION EST DEMOCRATIQUE
On peut considérer que la gestion est
démocratique au sein du CISTE car des instances collectives de
décision sont en place comme évoqué
précédemment dans les statuts (AG, CA, comité
d'orientation et commissions de travail). C'est pendant le CA où
siègent l'ensemble des élus du CISTE que se prennent les
décisions stratégiques et grandes orientations. De plus, le
bureau est élu par le CA.
Chaque organisation syndicale dispose d'un titulaire et d'un
suppléant au sein du CA. Le principe « d'une personne, une voix
» est respecté pour chaque membre du CA. La présidence
respecte l'alternance entre les deux collèges mis en place.
Un CA a lieu tous les deux mois, une AG par an et des groupes
de travail (comité de pilotage), où chacun peut faire entendre sa
voix à condition de s'intéresser au projet et s'impliquer. Ils ne
le font pas tous.
? LA LUCRATIVITE EST LIMITEE :
Le CISTE comporte dans ces statuts la mention de «
non-lucrativité ».
Le CISTE ne réalise quasiment pas d'excédent. Si
c'est le cas, ceux-ci sont réinvestis dans le développement de
l'association notamment sur du renouvellement de matériel
obsolète. Il n'y a pas de redistribution des excédents entre les
élus ou salariés du CISTE.
Au contraire, le CISTE souffre d'un problème
récurrent dans bon nombre d'associations. Il existe un décalage
systématique entre la mise en oeuvre des projets et le versement des
fonds publics. Le CISTE engage des dépenses qui ne seront couvertes que
plusieurs mois après. Le CISTE ne disposant pas de fonds de roulement,
la structure se retrouve automatiquement en déficit pendant une partie
de l'année, ce qui engendre des charges financières importantes
(agios). Celles-ci se sont élevées à plus de 4200€
pour l'année 2012.
? LA GESTION EST AUTONOME ET INDEPENDANTE DES POUVOIRS DES
PUBLIQUES, LA
COOPERATION Y EST DEVELOPPEE
Les statuts doivent garantir l'autonomie et
l'indépendance du CISTE. Comme les seuls partenaires sociaux
siègent au CA, les pouvoirs publiques n'ont en théorie pas de
pouvoir de décision sur les choix opérés par le CISTE.
Dans les faits, on peut considérer que le
l'indépendance du CISTE n'est pas aussi infaillible. Le CISTE fait face
aux mêmes problèmes que nombre d'associations en France. Le
développement des appels à projets et la nécessité
d'y répondre « dans les clous » afin d'obtenir des
financements est un point de vigilance concernant la liberté
d'initiative du CISTE et sa capacité à mettre en place ses
propres projets. De plus, comme le CISTE dépend essentiellement de
financements publics, la Région et l'Etat ont de fait leur mot à
dire sur les orientations stratégiques retenues.
On peut également s'inquiéter du fait que le
CISTE doive produire de plus en plus de justificatifs auprès de la
Région, de l'Etat et surtout du FSE pour obtenir le versement des sommes
convenues. Beaucoup d'énergie est déployée de la part des
salariés dans la production de ces justificatifs au détriment de
la mise en oeuvre des projets ce qui constitue un effet pervers non
négligeable.
La coopération est développée car le
CISTE essaye de travailler en complémentarité avec d'autres
structures sur les questions de travail et d'emploi. Malgré cette
volonté, le CISTE
27
peut parfois mener des actions en doublon par rapport à
d'autres structures. C'est par exemple le cas sur l'action de sensibilisation
au nouveau dispositif du « contrat de génération » dont
des formations avaient été préalablement dispensées
par la CGT et l'ARACT notamment.
? LES PRINCIPES DE SOLIDARITE ET DE RESPONSABILITE GUIDENT LA
MISE NE PLACE
DES ACTIONS.
Le CISTE inscrit ses actions dans une optique de
progrès humain et social. Ses actions visent à créer de la
synergie et du lien entre différents acteurs d'un territoire en
dépassant les clivages traditionnels. En ce sens, le CISTE poursuit un
objectif de solidarité et de cohésion sur les territoires.
On peut également considérer que les
interventions du CISTE sur les domaines du travail et de l'emploi visent
à trouver des solutions à certains dysfonctionnements ou
externalités négatives produites par l'activité
économique des hommes. Ainsi, les actions du CISTE poursuivent le
principe de solidarité.
On peut citer par exemple les actions menées par le
CISTE sur les TMS qui visaient à prévenir sur les risques
inhérents à certaines activités professionnelles.
28
Partie B : DEFINITIONS ET ENJEUX PROPRES AU
DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL
Le DST est aujourd'hui mal identifié en France. Dans la
foison d'expressions et d'initiatives se réclamant du dialogue dans les
territoires, il nous est apparu nécessaire de s'arrêter sur la
définition de ces différents concepts pour clarifier les choses.
Ces précisions nous permettront de définir en quoi le DST est une
forme spécifique de dialogue sur les territoires malgré
l'hétérogénéité des initiatives qui le
composent. Ces initiatives font face à des enjeux particuliers. Ces
enjeux nous permettront de dégager des pistes de recherche pour cerner
le fonctionnement, les forces et les faiblesses du DST et des acteurs qui s'y
impliquent.
Chapitre 1 : ELEMENTS DE DEFINITION
Avec le processus de décentralisation se sont
développées de nombreux lieux ou démarches de dialogue au
niveau des territoires. Dans ces lieux de dialogue, on peut retrouver une
grande diversité d'acteurs : élus, organisations syndicales,
représentants de l'Etat, des collectivités locales, associations,
représentants de citoyens, etc.
Pour éviter toute confusion, nous définirons ces
différents concepts ou l'on retrouve le mot « dialogue » suivi
d'un ou plusieurs adjectifs précisant la démarche entreprise.
Perrat p.336 : Négociation collective normative, gestion
paritaire, information, concertation, construction de diagnostic
partagé, co-construction de projets, dialogue avec la
société civile...
1.1 LE DIALOGUE SOCIAL
Le Conseil Economique et Social explique dans un rapport qu'il
est très difficile de définir le dialogue social tant celui-ci
peut être entendu de diverses manières46.
Néanmoins, nous pouvons reprendre les texte de
l'Organisation Internationale du Travail qui définit le dialogue social
comme le « dispositif qui inclut toutes formes de négociation, de
consultation ou simplement d'échange d'informations entre
représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs sur
des questions d'intérêt commun liées à la politique
économique et sociale »47.
Le dialogue social s'exprime principalement par de la
négociation sur les questions d'emploi, de travail, de droits des
salariés et des entreprises. Il est caractérisé par la
production de
46 WALTER Jean-Louis, Réalité et
avenir du dialogue social territorial, Rapport du Conseil Economique,
Social et Environnemental, La Documentation Française, 2009. Pour le
CESE, le dialogue social « ne désigne, a priori, ni une forme
identifiée, ni un niveau précis (information, consultation,
concertation, négociation), chacun peut y mettre le contenu qu'il
souhaite, avec les questions de méthode et tous les risques de
malentendus que cela induit quant au degré d'implication des
interlocuteurs dans la décision. »
47 Site de l'OIT :
http://www.ilo.org
29
normes. Il peut concerner les partenaires sociaux
seuls48, ou les partenaires sociaux plus des représentants du
gouvernement49.
A partir de cette définition, nous pouvons procéder
à deux découpages sur le dialogue social.
1.1.a DIALOGUE SOCIAL NATIONAL ET D'ENTREPRISE
Le dialogue social au niveau national a pour objet les grandes
négociations collectives entre les syndicats d'employeurs et de
salariés jugés représentatifs. Les représentants du
gouvernement doivent faciliter et orienter les négociations en fonction
des orientations stratégiques choisies sur l'emploi et le travail.
Les syndicats de salariés représentatifs au
niveau national sont la CGT, la CFDT, la CGT-FO, la CFE-CGC et la
CFTC50. Du côté patronal, le MEDEF, la CGPME et l'UPA
participent à ces négociations. Ils se manifestent par la
signature d'accords collectifs nationaux ou de branche.
Cette forme de négociation peut également avoir
lieu au niveau régional et poursuit une logique assez similaire, des
représentants de l'Etat en région pouvant être
associés au processus de négociation.
Le dialogue social eu niveau de l'entreprise est
différent. Les acteurs sont d'une part les employés de
l'entreprise qui négocient seuls s'ils ne sont pas
représentés, par l'intermédiaire de leur
délégué du personnel 51, ou par
l'intermédiaire des délégués syndicaux
52. Côté patronal, c'est le chef d'entreprise qui
négocie avec l'appui de l'organisation syndicale patronale pour laquelle
il est éventuellement adhérent.
1.1.b DIALOGUE SOCIAL SECTORIEL ET INTERSECTORIEL
Une seconde distinction peut être opérée.
Le dialogue social peut être intersectoriel et se manifester par la
signature d'accords qui concernent l'ensemble des secteurs d'activité
professionnelle. On retrouve les mêmes organisations syndicales
représentatives qu'au niveau national.
Le dialogue social peut être sectoriel et se manifester
par la signature d'accords de branche qui ne concernent que le secteur
d'activité en question. Ce sont les organisations syndicales
représentatives de la branche qui négocient.
Dans les deux cas, l'Etat peut venir accompagner les
négociations.
Un principe fondamental de la Constitution vient
préciser l'application de ces différents niveaux. En effet, le
« principe de faveur 53 » dispose que « lorsque deux normes
sont applicables à une même relation de travail, il faut, en
principe, retenir la plus favorable aux salariés. »
Pour schématiser, nous considérerons dans ce
travail que le dialogue social concerne la négociation entre partenaires
sociaux. Bien que le gouvernement puisse être partie prenante des
négociations, ce sont bien les organisations salariales et patronales
qui doivent s'accorder
48 Dialogue social bipartite.
49 Dialogue social tripartite.
50 Site du ministère du Travail, de
l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue Social (
http://travail-emploi.gouv.fr/).
Dépêche du 29 mars 2013. Pour être représentatives au
niveau national, les organisations syndicales de salariés doivent
obtenir au moins 10% des suffrages aux élections professionnelles.
51 Entreprises de plus de 10 salariés.
52 Entreprises de plus de 50 salariés.
53 Article 34 de la Constitution.
30
en définitive sur la production de certaines normes de
travail et d'emploi. Ainsi, le pouvoir de décision revient aux
partenaires sociaux.
1.2 LE DIALOGUE CIVIL
Selon la Conférence Permanente des Coordinations
Associatives (CPCA), le dialogue civil caractérise les «
échanges entre les représentants de l'Etat, les
collectivités territoriales et les représentants du secteur
associatif ».
Les associations ont ici un rôle de consultation et
doivent exprimer les divers intérêts des citoyens sur des
questions très larges de société.
Lorsque les citoyens ont un véritable pouvoir de
décision, le dialogue civil passe à un niveau supérieur de
participation. On est alors dans le champ de la démocratie participative
et locale.
1.3 LE DIALOGUE TERRITORIAL OU SOCIETAL
Le dialogue territorial ou sociétal qualifie les «
pratiques de concertation et de médiation environnementale,
attachées à la résolution de conflits, à
l'élaboration d'accords ou à la mise en place de processus
participatifs portant sur la gestion du territoire et sur l'environnement
»54.
Ces pratiques se caractérisent par la mise en place de
lieux de participation, de concertation voire de négociation. L'objectif
est de faire émerger des solutions collectives après que chaque
participant ait pu exprimer ses besoins, attentes, craintes ou propositions.
Dans le meilleur des cas, l'objectif est donc de croiser les
intérêts particuliers des parties prenantes pour faire
émerger un intérêt partagé ou vision commune.
On retrouve les questions d'emploi, de travail et plus
généralement de développement économique et social
local dans les lieux de dialogue territorial. D'autres sujets
privilégiés sont l'aménagement du territoire, les conflits
d'usages et les questions environnementales (la gestion de l'eau, la
préservation de la biodiversité, la gestion d'espaces naturels,
la maîtrise des pollutions et nuisances55).
Les acteurs du dialogue territorial varient en fonction des
problématiques abordées et de la volonté de
collectivités territoriales qui mettent souvent en place ces processus
de dialogue territorial. On peut y retrouver divers acteurs publics et
privés tels que les élus, institutionnels, acteurs
socio-économiques, des représentants de la société
civile ou des associations de citoyens. Les partenaires sociaux peuvent y
être présents, mais nous le verrons, à la différence
du dialogue social territorial, leur présence n'est pas
systématique.
1.4 LE DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL
Le dialogue social territorial a fait l'objet de travaux
visant à mieux en cerner les contours. Nous nous appuierons sur les avis
rendus par le CESE et la commission mixte Conseil Régional - CESER
Poitou-Charentes qui ont pour dénominateur commun de placer les
partenaires sociaux au centre du dialogue et de la décision.
1.4.a LA DEFINITION DU CESE
Une première définition retenue est celle du CESE
dans son rapport de 2009 sur le DST.
54 http://www.larousse.fr/
55
http://www.geyser.asso.fr/dialogueterritorial.php
31
Pour le CESE, le DST est « l'ensemble des
différentes formes d'échanges, de consultation, de concertation,
voire de négociation (négociation collective entre partenaires
sociaux et autres formes de négociation entre les différents
acteurs pouvant aboutir à des engagements contractuels), au niveau d'un
territoire donné . ·
- Au sein desquelles les partenaires sociaux sont
nécessairement parties prenantes, et qui peuvent en outre regrouper les
pouvoirs publics (collectivités territoriales et État
déconcentré) ainsi que d'autres acteurs de la
société civile tels que les associations ;
- Qui portent sur des questions relatives au travail et
à l'emploi, pouvant être élargies à leurs
implications économiques, sociales et environnementales. »
Au regard de cette définition, la seule
différence que l'on peut constater entre le dialogue social territorial
et le dialogue territorial est que dans le premier cas, la présence des
organisations syndicales patronales et de salariés est
nécessaire.
Malgré cette précision, il est vrai que la
frontière peut s'avérer extrêmement floue entre ces deux
formes de dialogue. On peut considérer que certains lieux de dialogue
relèvent à la fois du dialogue territorial et du dialogue social
territorial à la vue de ces deux définitions. L'Agence
Rhône-Alpes pour la valorisation de l'innovation sociale et
l'amélioration des conditions de travail56 tout de même
dégagé certains critères de différenciation :
« Si . ·
- Les questions abordées concernent en premier lieu
le travail (ses conditions de réalisation, son évolution, les
problèmes rencontrés dans le cadre du travail),
- Les acteurs sont réunis autour des partenaires
sociaux dont l'objectif est de se concerter, voire de négocier et que
les décisions relèvent des seuls partenaires sociaux,
Alors l'instance relève du dialogue social
territorial. À l'inverse, si . ·
- Les thèmes traitent de questions qui touchent le
travail dans son environnement et parmi lesquelles le travail est
présent mais de manière secondaire (l'emploi, la formation, les
déplacements, le logement...),
- Les partenaires sociaux sont associés à
d'autres avec voix consultative et les décisions appartiennent à
l'État ou aux collectivités territoriales,
On peut qualifier l'instance de dialogue sociétal ou
territorial »57.
On relève par conséquent que dans le dialogue
social territorial, les partenaires sociaux ont un pouvoir de décision
total, comme dans les instances paritaires, ou un pouvoir de décision
partagé avec d'autres acteurs.
La décentralisation et la territorialisation de
l'action publique ont fait émerger de nombreuses instances de dialogue.
Un nouveau mode de coordination des acteurs est né et est
identifié sous le terme de « gouvernance du territoire ».
D'après Gilly et Pecqueur, la gouvernance du
56 « ARAVIS est une association paritaire
gérée par un conseil d'administration composé
d'organisations patronales et d'organisations syndicales de salariés.
Elle a pour mission d'aider les entreprises dans leurs projets de
modernisation, afin d'améliorer la situation des salariés et
l'efficacité des entreprises. Elle fait partie du réseau
ANACT-ARACT ». (
http://www.aravis.aract.fr/)
57 Belin Carine, Charvet Alain, Sasso Marie-Odile,
Brisson Dominique, « Dialogue territorial, la place des partenaires
sociaux », ARAVIS, décembre 2005
32
territoire décrit « à un moment
donné une structure composée par différents acteurs et
institutions permettant d'apprécier les règles et les routines
qui donnent sa spécificité au lieu, vis-à-vis des autres
lieux et du système productif national qui l'englobe
»58.
Nous pouvons considérer que le dialogue civil, le dialogue
territorial et désormais le dialogue social territorial sont des
structures de gouvernance territoriale, c'est-à-dire « des
structures d'action collective par lesquelles sont « organisés
» des espaces d'action, où sont construits et
perpétués les ordres locaux grâce auxquels les acteurs
parviennent à stabiliser au moins provisoirement leurs
négociations et leurs interactions stratégiques. »
1.4.b LES PRECISIONS DE LA COMMISSION MIXTE CESER - CONSEIL
REGIONAL POITOU-CHARENTES
La commission mixte CESER - Conseil Régional
Poitou-Charentes nous apporte des précisions dans sa
délibération de 201359.
Elle précise trois points importants :
- « Il n'existe pas de modèle unique de
dialogue social territorial, mais des spécificités à
chaque échelon territorial qui doivent être prises en
compte.
- Le périmètre du territoire et la nature
des acteurs impliqués dépendent du projet et des thèmes
traités.
- A côté des instances existantes,
émergent des instances ad hoc. Il n'y a donc pas uniformité, mais
adéquation : un thème/structure/un territoire/des acteurs
».
Ces éléments nous indiquent que le dialogue
social territorial est à géométrie variable tant du point
de vue de son modèle, de son périmètre d'intervention, de
la nature des acteurs impliqués, etc.
Nous allons voir dans un deuxième chapitre, la
pluralité des formes que peuvent prendre les lieux de dialogue social
territorial. Ils ne sont pas seulement une reproduction du dialogue social sur
les territoires comme on peut se l'imaginer. Le dialogue social territorial
implique souvent un changement de méthode dans la relation entre
partenaires sociaux et avec les autres acteurs privés et publics du
territoire.
58 BORIES-AZEAU Isabelle, LOUBES Isabelle, Les
maisons de l'emploi, un dispositif en faveur d'une gestion territoriale des
ressources humaines ?
59 Commission mixte CESER - Conseil Régional
Poitou-Charentes, Développement du dialogue social territorial,
session du 4 au 11 février 2013.
33
1.5 SCHEMA RECAPITULATIF
34
Chapitre 2 : L'HETEROGENEITE DU DIALOGUE SOCIAL
TERRITORIAL
Pour aller plus loin dans la définition du DST, nous
pouvons reprendre unes à unes les caractéristiques majeures de
cette forme de dialogue sur les territoires. Nous verrons qu'il est difficile
de définir le DST comme un tout cohérent et homogène tant
les initiatives sont diverses. Une grande
hétérogénéité caractérise le champ du
DST sur le plan des acteurs impliqués, des objectifs visés, du
périmètre d'intervention retenu et du caractère formel ou
informel de ces lieux.
2.1 LES ACTEURS : TROIS CERCLES DISTINCTS
Un acteur est une personne physique ou morale qui participe au
processus de décision, d'une politique publique par exemple. Il a des
visées stratégiques c'est-à-dire qu'il apporte ses
représentations dans le processus de décision. Ces visées
stratégiques n'ont pas la même portée selon les processus,
les structures ou les acteurs présents60. Autrement dit,
elles peuvent avoir une portée minimale voire maximale sur la
construction de la décision finale.
Pour cerner qui sont les acteurs du DST, nous pouvons nous
appuyer sur le rapport du CESE qui a largement travaillé sur cette
question. Le CESE distingue trois cercles de DST allant des seuls partenaires
sociaux à une vision plus large incluant d'autres acteurs du
territoire.
60 Voir l'annexe n°1 : Typologie des acteurs
35
Ainsi, la composition d'un lieu de DST est à
géométrie variable en fonction du projet et du territoire
d'intervention. Cette composition peut également évoluer au fur
et à mesure de l'avancement du projet.
2.1.a LE 1ER CERCLE : PARTENAIRES SOCIAUX
Le premier cercle de DST retenu par le CESE concerne les seuls
partenaires sociaux. Les organisations syndicales de salariés et
d'employeurs qui se réunissent à des niveaux infranationaux
traitent principalement des questions d'emploi, de travail, de formation
professionnelle et de santé au travail.
Ce dialogue peut alors appartenir au champ de la
négociation collective. Il se manifeste alors par la signature de
conventions collectives applicables sur les territoires définis et non
au niveau national.
On retrouve principalement des commissions dans ce premier
cercle de dialogue et elles ont toutes la particularité d'être
paritaires. Comme dans le cas du CISTE, qui a la particularité
d'être une association, chaque organisation syndicale est
considérée comme pesant le même poids quel que soit son
score aux élections professionnelles. La parité est en outre
respectée par la création d'un collège employeurs et d'un
collège salariés qui pèsent le même nombre de
mandats dans la structure.
On peut considérer que chaque organisation syndicale
peut prendre part aux initiatives de DST du 1er cercle. Dans les
faits, toutes ne montrent pas le même intérêt. On peut
considérer qu'en Poitou-Charentes, et pour des raisons
différentes, le Medef et la CGT-FO ne reconnaissent pas les territoires
(régions, départements, communes, etc.) comme des lieux
pertinents de dialogue social. Le Medef et la CGT-FO ont par exemple
quitté le CISTE après quelques années.
Du côté des organisations salariales,
siéger dans des lieux de DST peut permettre de développer la
coopération entre syndicats de salariés. L'organisation par
collège leur permet de travailler conjointement et de trouver des points
de consensus à présenter au patronat.
Du côté des organisations patronales, la CGPME et
l'UPAR ont tout intérêt à participer aux lieux de DST. En
effet, au niveau national, le Medef est l'interlocuteur
privilégié de l'Etat étant donné son poids
politique. Il est historiquement vu comme le représentant quasi unique
et légitime de tous les entrepreneurs de France61. Ainsi, la
CGPME, l'UPAR et l'UDES trouvent un intérêt à participer au
DST car ces organisations peuvent exposer et défendre les
intérêts bien particuliers des membres qu'ils représentent
(respectivement des chefs d'entreprises de petites et moyennes entreprises, de
l'artisanat et de l'économie sociale et solidaire), ce qui est bien plus
difficile sur le plan national. Ces organisations tentent d'asseoir leur
représentativité et leur légitimité face à
la superpuissance du Medef.
2.1.b LE 2E CERCLE : PARTENAIRES SOCIAUX, ETAT ET/OU
COLLECTIVITES TERRITORIALES
Le 2e cercle du DST identifié par le CESE
regroupe les partenaires sociaux (1er cercle) auxquels se rajoutent
des représentants de l'Etat, des collectivités territoriales
et/ou d'autres institutions liées aux questions du travail et de
l'emploi.
61 Le Medef, créé en 1998, est
l'héritier du Conseil national du patronat français (CNPF). Le
CNPF fut créé en 1945 suite à une demande de l'Etat
souhaitant disposer d'un interlocuteur unique représentant l'ensemble du
patronat français.
36
L'Etat déconcentré peut être
représenté par le préfet de région ou les chambres
consulaires notamment. Mais on retrouve souvent l'Etat dans les lieux de DST
via la DIRECCTE. Cela est dû au fait que certaines initiatives de DST
rentrent pleinement dans les missions fixées à la DIRECCTE qui
peut les financer. Entre autres :
- La DIRECCTE est chargée du contrôle et de
l'application des règles en droit du travail. Des structures de DST
comme l'ARACT 62 s'attaquent directement aux questions de respect
des conditions de sécurité au travail ou d'ergonomie des postes,
par exemple.
- La DIRECCTE a également une mission de soutien au
développement économique local. Ce mandat très large lui
permet de soutenir, par exemple, des Maisons de l'Emploi ou Comités de
Bassin d'Emplois qui cherchent à développer l'activité de
zones particulières.
- Une dernière mission est le renforcement de la
coopération avec les collectivités territoriales sur les
questions de formation, d'apprentissage ou d'orientation. Ce lien se fait
notamment en Poitou-Charentes dans le CCREFP qui détermine le Programme
Régional de Formation.
Les collectivités territoriales participent à ce
2e cercle de DST. La région Poitou-Charentes est
attachée au développement du DST sur son territoire et elle
finance certaines de ces initiatives. Cela traduit la reconnaissance des
apports et réflexions que peuvent exprimer les partenaires sociaux sur
les questions d'emploi et de travail. Ainsi, la région Poitou-Charentes
voit un intérêt direct dans le fait de consulter les partenaires
sociaux et de soutenir les instances de dialogue qui permettent ces
échanges.
Enfin, en fonction des thèmes abordés et des
projets, ce 2e cercle peut intégrer diverses structures et
institutions traitants de problématiques économiques et sociales.
Ces structures peuvent apporter leur expertise et des ressources sur leur
domaine de compétence particulier. Par exemple Pôle Emploi qui
peut mettre à profit ses analyses statistiques sur la situation de
l'Emploi dans la région à disposition des commissions
départementales pour l'insertion et l'emploi.
2.1.c LE 3E CERCLE : PARTENAIRES SOCIAUX, ETAT ET/OU
COLLECTIVITES TERRITORIALES ET SOCIETE CIVILE
Le 3e cercle comprend le 2e cercle plus
la catégorie assez floue des représentants de la
société civile.
L'Union Européenne définit la
société civile comme étant « le domaine de la vie
sociale civile organisée qui est volontaire, largement autosuffisant et
autonome de l'État ». Cette définition nous semble assez
vague. Dans le cadre de ce mémoire, nous pouvons caractériser la
société civile comme des personnes physiques ou morales
censés représenter la diversité des individus et de leurs
intérêts évoluant sur un territoire donné.
Ce concept de représentation de la
société civile est extrêmement complexe et suscite des
critiques tant il semble difficile de parvenir à une juste
représentation des intérêts des individus composant un
territoire. Représenter la société civile est un
véritable enjeu, comme le montrent les expériences de
démocratie locale et participative, car en filigrane se trouve l'espoir
de dégager au mieux l'intérêt général des
composantes d'un territoire.
Une des solutions envisagée pour représenter au
mieux la société civile est d'intégrer dans les lieux de
DST des associations qui doivent symboliser les différents
intérêts sur un territoire.
62 Agence Régionale pour l'Amélioration
des Conditions de Travail
37
Ainsi les CESER sont constitués d'un collège «
société civile » ou « vie collective » souvent
composés d'associations (écologiques, sportives, de
solidarité, d'usagers, etc.).
2.1.d PLUSIEURS NIVEAUX DE PARTICIPATION DES ACTEURS
Concernant les acteurs, il convient enfin de différencier
leur rôle ou leur niveau d'intégration dans les instances de
dialogue social territorial. On distingue là aussi une diversité
de situation.
Selon les instances de dialogue social territorial, la
participation des différentes parties prenantes est
échelonnée.
? L'INFORMATION
Le premier niveau est celui de l'information. Pour
résumer, des collectivités territoriales ou des services
déconcentrés de l'Etat « mettent au courant » les
acteurs participants sur la mise en oeuvre de politiques publiques
territoriales. Ainsi, de nombreuses instances considérées comme
relevant du dialogue social territorial, car des acteurs comme les partenaires
sociaux y siègent, ne sont en fait que des lieux d'information. Les
partenaires sociaux et autres parties prenantes ne sont là que pour
« entendre » les actions qui vont être engagées sans
pouvoir de négociation ou de discussion.
Les différents entretiens menées avec des
mandatés d'organisations syndicales siégeant dans des structures
qualifiées de dialogue social territorial ont exprimé le fait que
nombre de ces structures limitent leur participation au niveau de
l'information. C'est le cas, par exemple, du CAEN où le recteur
d'académie présente les grandes orientations en matière
scolaire sans que les partenaires sociaux puissent exprimer leur avis.
Néanmoins, certains de ces lieux sont importants pour suivre les
orientations majeures des politiques publiques territoriales.
? LA CONSULTATION
Certains lieux de dialogue social territorial relèvent
d'avantage de la consultation. Ce niveau signifie généralement
que les collectivités territoriales ou l'Etat confrontent les
orientations stratégiques ou politiques choisies aux acteurs du
dialogue. Ces derniers sont alors chargés d'évaluer la
pertinence, la cohérence ou la solidité du projet. Le
résultat en est la production d'avis. Ces avis n'ont pas de
réelle portée juridique car ils sont très souvent non
contraignants. C'est-à-dire qu'un avis invalidant une politique
territoriale peut tout à fait rester lettre morte. Cette aide à
la décision peut n'avoir aucun impact au moment de la mise en place de
la politique publique. Tout dépend de la volonté du ou des
décideurs.
Nous pouvons citer ici les CESER et en particulier celui du
Poitou-Charentes. Même s'il y a un véritable travail de
construction de diagnostics partagés et de préconisations sur les
politiques publiques régionales à mettre e place, les CESER ne
produisent que des avis non-contraignants. Le Conseil Régional n'est
alors pas tenu par la loi de suivre ces préconisations63.
? LA CONCERTATION
Un troisième niveau de participation des acteurs est la
concertation. Ce mode de participation associe les acteurs concernés par
à un projet à l'élaboration des solutions à mettre
en oeuvre. Ces solutions ne restent pas au stade de l'avis, elles sont
effectivement retenues et mises en
63 Il est à noter que cette situation est
renforcée par le fait que le Conseil Régional de
Poitou-Charentes, qui est à gauche, peut voir le CESER comme un frein
à ses projets puisque la présidence de ce dernier est
assurée par le collège employeur et le Medef en particulier.
38
place. Ici, les acteurs du projet ne sont pas simplement
consultés. Ils ont un certain pouvoir de décision sur la
réponse retenue face à la problématique.
? LA COORDINATION
Enfin, la forme la plus aboutie de participation des acteurs
est la coordination. Elle suppose l'implication collective des acteurs
concernés par le projet. Dans ce cas, les parties prenantes ne
s'arrêtent pas à la co-construction en amont. Ils participent en
aval à la mise en place et au suivi des projets qu'ils ont co-construit.
Les acteurs sont alors maîtres de leurs projets puisqu'ils
co-construisent, décident et peuvent faire évoluer leurs
réponses en fonction des résultats atteints ou non.
Il est parfois difficile de cerner la limite entre la
concertation et la coordination. En effet, comment juger ou commence
l'implication effective des acteurs dans la mise en place d'un projet, qui plus
est lorsque chacun d'entre eux tient un rôle différent ?
Néanmoins nous pouvons citer quelques exemples situés entre la
concertation et la coordination. Certaines MDE et CBE sont des lieux où
les acteurs socio-économiques d'un territoire parviennent à
élaborer des solutions dépassants les intérêts
particuliers pour viser un intérêt supérieur et jugé
bénéfique pour le territoire et ses habitants.
De même, le pouvoir de décision au CISTE est
intégralement remis dans les mains de son CA c'est-à-dire des
partenaires sociaux. Ceux-ci peuvent choisir d'intégrer d'autres acteurs
(institutions, experts, collectivités, représentants
d'associations ou de citoyens, etc.) impactés par un projet et choisir
le mode de la co-construction. La décision peut se faire de
manière collective et les acteurs peuvent s'impliquer directement dans
la mise en place des projets.
2.1.e SCHEMA RECAPITULATIF
Pour chaque projet de DST, on se demande quels sont les
acteurs légitimes qui doivent être intégrés au
processus. Des paramètres variables tels que les thèmes
traités, les formes de l'action ou du territoire impliquent une
très grande diversité d'acteurs dans les lieux de DST. Un
deuxième point marquant
l'hétérogénéité du DST tient aux objectifs
et missions.
2.2 LES OBJECTIFS ET MISSIONS
Un second paramètre nous permet de mieux définir
le DST et d'en mesurer l'hétérogénéité. Il
existe une grande variété dans les sujets traités par le
DST. De plus, deux logiques se développent parallèlement pour
répondre aux enjeux auxquelles ces structures de DST souhaitent apporter
des solutions.
2.2.a LES CHAMPS D'INTERVENTION
Les initiatives de DST traitent également de sujets
très variés. Les dénominateurs communs sont les conditions
de travail au sens large. Ces questions sont celles abordées dans la
négociation collective traditionnelle. Parmi celles-ci, nous pouvons
citer la santé et sécurité au travail, la formation
professionnelle, l'égalité professionnelle, etc.
On retrouve dans le DST, des thèmes liés
à l'emploi et plus particulièrement au marché du travail.
Ces sujets relèvent traditionnellement de l'action publique via les
services déconcentrés de l'Etat et les collectivités
locales. On peut notamment citer la mobilité, l'employabilité ou
le travail au noir.
Enfin dans bon nombre de lieux de DST, des enjeux absents de
la négociation classique sont traités. Ils sont liés au
développement économique et à l'organisation de la
cité sont aussi
39
abordés. Ce sont entre autres la GPEC territoriale et
la sécurisation des parcours professionnels, l'aménagement du
territoire.
Pour traiter ces thèmes, deux types de logiques ont
été observées.
2.2.b UNE LOGIQUE D'EXTENSION DE DROITS SOCIAUX
Pour Annette Jobert, dans plusieurs cas, « le dialogue
social territorial se situe davantage dans une logique d'extension des droits.
Il a en effet comme objectif, soit de faire bénéficier les
salariés des petites entreprises et entreprises artisanales de droits
sociaux (prévoyance, chèques restaurant, comités
d'hygiène et de sécurité) dont ils étaient
privés faute de conventions collectives ou d'accords d'entreprise, soit
de compléter les conventions nationales, soit de permettre l'application
d'une loi comme celle sur les 35 heures »64.
On est ici sur une forme de « négociation sociale
territorialisée » (Jobert, POUR) où l'initiative vient des
partenaires sociaux qui sont les seuls acteurs représentés. Cette
seconde logique permet l'extension de droits sociaux à certains types de
salariés peu avantagés et mal couverts par l'action syndicale.
Par exemple, l'obligation de création d'un comité d'entreprise
(CE) n'intervient que pour les entreprises de plus de 50 salariés. Les
salariés jouissent alors de certains avantages culturels, sociaux et
économiques. Les salariés des TPE et PME sont exclus de ce
système ce qui pose un problème non négligeable
d'attractivité des métiers par rapport à ceux
exercés dans de grosses entreprises.
Pour remédier à ce problème, une
structure de DST a été créée en Poitou-Charentes.
L'association paritaire Viv'Arti a été pensée comme un
sorte de super CE pour les salariés de l'artisanat. Ce comité
d'oeuvres sociale vise à rendre accessible de nombreuses
activités de culture, de loisir ou de sport au monde de l'artisanat.
Cette logique de mutualisation des moyens et des énergies
bénéficie aux chefs d'entreprise de l'artisanat car elle renforce
l'attractivité de leur secteur, et aux salariés qui disposent
d'avantages au même titre que dans les grandes entreprises.
2.2.c UNE LOGIQUE DE PROJET
Une deuxième logique se retrouve dans les lieux de DST.
La logique de projet regroupe souvent une pluralité d'acteurs publics et
privés et les partenaires sociaux ne sont qu'un acteur du dialogue parmi
d'autres. L'initiative est souvent le fait de l'Etat ou de collectivités
territoriales.
On a ainsi assisté depuis l'acte 1 de la
décentralisation à une multiplication de lieux de dialogue
s'inscrivant dans cette logique de projet. Ils consistent souvent en des
commissions chargées d'établir des diagnostics. Ils produisent
également des avis, souvent non contraignants, sur les orientations
à donner en matière de politiques publiques sur les territoires.
Enfin ils mettent en place des actions destinées à sensibiliser
où à répondre à des besoins identifiés.
La diversité des sujets traités y est beaucoup
plus importante que dans la 1ere logique car on sort des thèmes
classiques de la négociation collective. Nous pouvons citer par exemple
MDE et CBE qui regroupent les acteurs socio-économiques essentiels d'un
bassin de vie ou d'emploi. L'objectif est bien de traiter directement ou
indirectement du développement économique et social lorsqu'il
s'agit de renforcer l'attractivité et la compétitivoté des
entreprises du bassin, ou de mener des actions coordonnées pour
évaluer et prévoir les besoins en main d'oeuvre et les
compétences nécessaires.
64 JOBERT Annette, Enjeux et dynamique du dialogue
social territorial, POUR, n° 192, décembre 2006.
40
2.3 LE PERIMETRE : LE TERRITOIRE PERTINENT
Il n'existe pas de territoire type pour définir le DST.
Au contraire, la définition du territoire d'intervention varie selon les
structures de DST. Le territoire d'intervention est intimement lié par
le projet du lieu de DST.
2.3.a QU'EST-CE QUE LE TERRITOIRE ?
Le territoire est un construit social. Il est un espace au
croisement de la géographie, de l'organisation des hommes ou de la
décentralisation et peut être interprété de diverses
manières. Nous pouvons retenir deux acceptations de la notion de
territoire.
La première définit le territoire comme une
« subdivision d'un pays sur laquelle s'exerce une autorité ou une
juridiction particulière » 65 . Le territoire est vu dans ce cas
comme un découpage juridique ou administratif. C'est avec la
déconcentration et la décentralisation qu'ont été
formalisés des territoires de ce type (régions,
départements, cantons, etc.).
Une deuxième définition présente le
territoire comme une « étendue de terre, plus ou moins nettement
délimitée, qui présente généralement une
certaine unité, un caractère particulier66 ». Ce
qui nous intéresse ici est le terme « d'unité » qui ne
s'interprète pas seulement sous l'angle de la
géographie67. Il renvoi également aux hommes qui
composent ce territoire et donc à la question de la proximité et
à la reconnaissance de ses semblables sur un espace de vie commun. En
effet, le territoire n'est pas seulement le fruit d'un découpage parfois
arbitraire. Il peut être plus diffus lorsqu'il est un lieu de vie, un
lieu porteur d'une identité culturelle ou un lieu porteur de
spécificités socio-économiques.
2.3.b TYPOLOGIE DU TERRITOIRE
Le territoire est donc construit par un ou des facteurs
d'homogénéité qui déterminent son
périmètre. On peut alors dresser la typologie des
territoires68 suivante. Elle représente la diversité
des territoires retenus dans les expériences de DST.
Nous tenterons d'illustrer chaque type de territoire par une
ou des structures de DST69. Ces exemples sont à prendre avec
précaution tant il s'avère compliqué de placer certains
lieux de DST dans un seul type de territoire. Ainsi, plutôt que de parler
de découpage en territoires, Annette Jobert préfère
utiliser l'expression « d'agencement territorial » (Annette Jobert,
2006).
? LE TERRITOIRE ADMINISTRATIF ET POLITIQUE
« Déterminé par les structures
administratives : communes, départements, régions... Il peut
regrouper plusieurs communes, plusieurs départements ou plusieurs
régions. Il s'appuie sur les découpages institutionnalisés
et ne remet pas en cause l'organisation traditionnelle ou officielle.
»
65
http://www.cnrtl.fr/definition/territoire
66
http://www.cnrtl.fr/definition/territoire
67 L'unité d'un territoire peut être
le fait de barrières naturelles que constituent les montagnes, les
fleuves, les mers, etc.
68 Cette typologie apparaît sur le site
internet
http://www.dialoguesocialterritorial.fr
dont nous citerons les définitions.
69 Nous nous appuierons sur l'annuaire du DST
créé par le CISTE via l'ORDS :
http://www.ciste-pc.com/fr-6-annuaire-du-dst.html
41
C'est le cas pour de nombreux lieux de DST. Nous pouvons en
citer quelques-uns, plus ou moins identifiés, ayant pour
périmètre d'intervention :
- La région : Les CESER, ARACT, COPIRE, IPR, ARS, etc.
- Le département : Les CAF, les associations de
médecine du travail, les commissions départementales de
l'insertion et de l'emploi, les maisons départementales des personnes
handicapées, etc.
- L'intercommunalité : Les conseils de
développement comme celui du Grand Poitiers notamment.
? LE TERRITOIRE IDENTITAIRE
« Déterminé par des communautés
de vie et des processus d'identification basés sur divers facteurs :
cultures et sous-cultures, normes, règles, aspirations... Il se
définit également par l'existence de ce qu'on peut appeler une
« conscience territoriale », c'est-à-dire un sentiment
d'appartenance commune à un bassin de vie ou un ensemble communautaire.
»
Nous pouvons dans ce cas citer l'exemple des conseils de
développement des pays. Ce type de territoire définit plus
particulièrement des initiatives de démocratie locale ou
participative que l'on retrouve également dans le territoire
sociétal.
? LE TERRITOIRE SOCIETAL
« C'est un bassin de vie, un espace de
mobilité, défini également par ses infrastructures et un
ensemble de pratiques sociales. Moins institutionnalisé que le
territoire administratif, moins formel que le territoire
socio-économique, il est également déterminé par
des pratiques culturelles mais, à la différence du territoire
identitaire, ne s'appuie pas sur un sentiment d'appartenance. »
Certains services de santé au travail peuvent
symboliser cette prise en compte du territoire sociétal comme
périmètre d'intervention.
? LE TERRITOIRE SOCIO-ECONOMIQUE
« Déterminé par le bassin d'emploi, les
zones d'activité, les clusters d'entreprises ou pôles de
compétitivité. Il se définit par son niveau
d'attractivité financière et sociale, par les investissements
réalisés, par ses infrastructures, son niveau de formation
générale, l'ensemble des compétences mobilisables...
»
Les cas le plus emblématique de ce type de territoire sont
les CBE et MDE.
? LE TERRITOIRE DE PROJET
« Déterminé par un projet, il s'agit de ce
qu'on peut appeler un territoire « ad hoc » dans la mesure où
ses contours sont déterminés par un projet, des acteurs, des
problématiques spécifiques... »
On peut citer ici non pas une structure mais la façon dont
sont pensés et construits les projets du CISTE. A chaque fois, le
territoire retenu dépend des problématiques
abordées70. Il est mouvant car il peut évoluer en
même temps que se construit le projet et que des acteurs « entrent
ou sortent ». Ce que l'on peut illustrer par la formule de territoires de
projet « à géométrie et durée variable »
(Perrat, 2009).
2.3.c RETENIR LE TERRITOIRE PERTINENT, UNE PRIORITE DANS LE
DST
70 Voir en annexe une liste plus large de
structures de DST : Annexe n°2 : Principaux lieux de dialogue social
territorial.
42
Le choix du territoire d'intervention est une condition sine qua
non de la réussite du DST.
Face à la diversité des périmètres
possibles, il convient de cerner qui sont les acteurs légitimes à
impliquer dans le projet. Cela revient à se poser la question suivante :
quel échelon de territoire est le plus pertinent pour traiter l'enjeu
retenu ? Or face à la multiplicité des territoires possibles et
évoqués plus haut, le territoire pertinent doit émerger en
fonction des objectifs du projet et des acteurs jugés nécessaire
à l'accomplissement de l'action collective. Cet enjeu est important car
il doit permettre au projet d'être cohérent et de cimenter
l'action des divers acteurs impliqués dans la durée. En effet,
d'après Annette Jobert, « le territoire est défini par la
nature et les objectifs des projets, les acteurs qui les portent et l'action
collective qu'ils déploient pour les faire aboutir » (Jobert
2009).
C'est pourquoi dans les projets de DST, certains territoires
d'intervention correspondent à des découpages classiques
(région, département, commune, etc.). Globalement, ces lieux de
DST sont conduits par le haut. On est ici dans une logique « Top-Down
».
Mais d'autres structures de DST définissent des
périmètres spécifiques en fonction des objectifs à
atteindre, de la population touchée, des acteurs impliqués, des
compétences et connaissances locales, etc. Dans ce cas, on est sur une
logique « Bottom-Up » où le territoire défini prend
sens suite à un « bricolage institutionnel » des partenaires
du projet (Jobert, 2009).
Le DST est donc hétérogène car le
périmètre d'action retenu est très variable. Il est
étroitement lié au caractère formel ou informel que
peuvent prendre ces formes de dialogue.
2.4 DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL FORMEL ET INFORMEL
Un dernier critère nous permet de différencier
les initiatives de DST et d'en cerner la grande
hétérogénéité. Les lieux de DST peuvent
être formels, c'est-à-dire créés par des lois et
obligatoires dans tous les territoires, ou informels quand ils sont
créés par la volonté d'acteurs au niveau local sans
qu'existe cet impératif juridique.
2.4.a DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL FORMEL
Le DST formel rassemble les institutions à
caractère obligatoire. Elles sont créées par la loi. Ces
institutions sont présentes de manière identique dans les
subdivisions du territoire national comme dans les régions et les
départements.
Ces lieux accompagnent principalement l'élaboration des
politiques publiques pour lesquelles les collectivités territoriales ont
compétence. Les sujets abordés sont très divers. Voici
quelques exemples en fonction des thématiques
- Emploi et formation: Instances Paritaires Régionales
(IPR), COPIRE, CCREFP, etc.
- Santé et sécurité au travail : ARACT,
ORST, Plan Régional de Santé au Travail (PRST), etc.
- Protection sociale : CARSAT, CAF, CPAM, MSA, etc.
- Développement économique et aménagement
du territoire : CESER, SRDE, Conseils de Développement, etc.
Les structures formelles ont les mêmes objectifs et ont
en théorie le même fonctionnement même si ce dernier peut en
pratique varier d'un territoire à l'autre. Par exemple, en
Poitou-Charentes deux commissions accompagnent principalement
l'élaboration des politiques de
43
formation de la région71. Alors que le
CCREFP participe directement à l'élaboration des politiques de
formation, la COPIRE qui a également cette compétence
d'après la loi est beaucoup plus en retrait en Poitou-Charentes. Le
rôle et l'activité de ces deux institutions sont inversés
dans d'autres régions.
2.4.b DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL INFORMEL
Les initiatives de dialogue social territorial informel ne
sont pas créées par obligation législative. Elles naissent
de la volonté de plusieurs acteurs qui définissent
eux-mêmes les objectifs, règles et les modes de fonctionnement de
la structure. Elles supposent au départ une volonté politique,
comme lorsque des collectivités territoriales créent des lieux de
DST, ou celle d'un groupe d'acteurs capables de porter la structure.
Les structures de dialogue social territorial informel peuvent
s'appuyer sur des dispositifs législatifs si besoin. Ils sont bien moins
nombreux que les lieux de dialogue formels.
On peut citer quelques exemples de lieux informels ou ad-hoc
créés en France :
- Le CISTE dont nous avons déjà décrit
l'action
- Les Espaces Régionaux de Dialogue Social dans l'ESS
mis en place en Bretagne et en Rhône-Alpes. Ces lieux de dialogue sont
nés de la volonté des organisations d'employeurs de l'ESS, des
organisations syndicales de salariés et de la CRESS qui offre son appui
pour dans l'animation de l'espace.
- Les Conférences de financeurs de la formation. Elles
existent dans plusieurs régions (Poitou-Charentes, Ile-de-France,
Nord-Pas-de-Calais, etc.). Elles réunissent les OPCA, les chambres
consulaires et les Régions pour mettre en place des projets par la
mutualisation des financements.
- Les Agences Régionales de la Formation Tout au Long
de la Vie (ARFTLV). Ces groupements d'intérêt public (Etat,
Région, OPCA, chambres consulaires, etc.) mettent en commun l'ensemble
des dispositifs d'emploi et de formation pour produire des analyses des
mutations économiques.
Ainsi, on ne peut parler du dialogue social territorial comme
un tout homogène. Les acteurs impliqués, les objectifs à
atteindre, les territoires d'intervention retenus ou le cadre de la
création des lieux de DST sont à géométrie variable
en fonction des projets72.
C'est pourquoi il est difficile de parler du DST tant il
recouvre des situations et des enjeux variés. Nous essaierons
néanmoins de dégager dans la partie suivante trois
thématiques qui peuvent faire l'objet de recherches plus
poussées
71 Il s'agit principalement du Contrat de Plan
Régional de Développement des Formations (CPRDF) institué
par la loi du 24 novembre 2009 et qui est établi pour la période
2011-2015.
72 Cette
hétérogénéité est résumée dans
l'annexe n°3 : Grille d'analyse du dialogue social territorial.
44
Chapitre 3 : LE DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL COMME OUTIL
DE PERFORMANCE SOCIO-ECONOMIQUE
L'intérêt du dialogue social territorial est
aujourd'hui affirmé dans deux nombreux travaux comme ceux du CESE et du
CESER Poitou-Charentes. Annette Jobert met en avant un quadruple
intérêt du dialogue social territorial (Jobert 2006) :
La décentralisation et la création de lieux de
dialogue social territorial a permis aux syndicats et aux associations
représentants la société civile «
d'accéder à ces nouveaux lieux de décisions afin de peser
sur leur contenu. »
Le dialogue social territorial permet de mieux mobiliser et
faire coopérer les divers acteurs privés et publics. Les parties
prenantes sont impliquées sur les thèmes qui les concernent et
sur des modes d'action nouveaux. Il doit en ressortir une meilleure
construction des politiques de travail, d'emploi et de développement
local en général, plus ancrées sur les ressources
disponibles et les besoins exprimés sur un territoire.
Un autre intérêt déjà
évoqué est la réalisation de projets visant à
étendre des droits sociaux à des catégories de
salariés jusque-là non couverts par les accords collectifs
interprofessionnels et de branche.
Enfin, aujourd'hui les modèles d'entreprise se sont
transformés avec le développement de la sous-traitance, de la
flexibilité et autres changements touchant l'emploi et le travail. Il en
résulte que « les collectifs de travail sont de plus en plus
difficilement saisis par les formes classiques de représentation et de
négociation », ce à quoi le dialogue social territorial
peut trouver des réponses en tenant compte de ces
spécificités grâce à des projets de
proximité.
Le développement du dialogue social territorial tend
alors à renouveler les formes de régulation économiques et
sociales. Nous avons choisi dans cette partie de traiter certains enjeux et
conditions de réussite de cette régulation. Trois axes ont retenu
notre attention :
- La notion de confiance qui est primordiale pour un dialogue
social territorial productif et durable.
- Nous verrons que le dialogue social territorial doit gagner
en crédibilité afin de prendre toute sa place et de jouer
pleinement son rôle de régulation socio-économique.
- L'efficacité du DST est intimement liée
à l'implication des partenaires sociaux. Nous ferons un zoom sur
l'adaptation des syndicats à ces nouveaux lieux de gouvernance sur les
territoires.
Nous expliquerons pourquoi ces enjeux sont importants et
peuvent faire l'objet de recherches plus poussées visant à
perfectionner les expériences de dialogue social territorial.
3.1 LA NOTION DE CONFIANCE PRIMORDIALE POUR UN
DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL DE QUALITE
Nous aborderons ici la question de la confiance entre les
parties prenantes du dialogue social territorial. Nous montrerons en quoi la
confiance est primordiale et pourquoi elle peut être difficile à
atteindre. Elle doit permettre la co-construction de projets qui
intègrent alors l'ensemble des intérêts particuliers.
3.1.a LE CONFLIT DANS LA RELATION ENTRE PARTENAIRES
SOCIAUX
45
Nous l'avons vu dans la définition du dialogue social
territorial, les partenaires sociaux siègent dans l'ensemble de ces
instances. Or, historiquement, la relation entre les organisations syndicales
d'employeurs et de salariés est basée sur des oppositions
idéologiques très fortes et sur le mode de la revendication. Dans
les négociations d'entreprises ou les grands accords nationaux, la
négociation peut facilement engendrer des conflits entre les deux
parties. De plus, les organisations patronales entre elles, et encore plus les
organisations de salariés, expriment souvent des positions
différentes. Ces organisations ne partagent pas la même histoire,
culture ou pratiques.
Pour être efficaces, les lieux de dialogue social
territorial supposent de dépasser certaines idées-reçues
et oppositions de principe entre partenaires sociaux. Dès lors, le
conflit n'a pas sa place car il peut « bloquer » les lieux de
dialogue social territorial. Il est alors nécessaire de dépasser
certains clivages pour permettre la construction de visions communes aux
parties prenantes.
3.1.b DEPASSER LES CLIVAGES POUR CONSTRUIRE UNE VISION
COMMUNE
Dépasser les clivages n'est pas chose aisée car
le développement du dialogue social territorial a amené de
nouvelles méthodes de travail auxquelles les partenaires sociaux doivent
s'adapter. Cette adaptation est nécessaire pour un dialogue de
qualité qui doit permettre de co-construire un intérêt
commun.
Etant donné la grande divergence des
intérêts qui peuvent être exprimés, il est
nécessaire en premier lieu d'établir un véritable
diagnostic partagé. Cette première phase doit poser les bases du
dialogue en construisant un socle commun de connaissances (diagnostic du
contexte socio-économique, anticipation des mutations, identification
des problèmes à résoudre, etc.).
Le CESE met en avant que les lieux de dialogue social
territorial « favorisent la connaissance réciproque des
acteurs. » Il est avéré que « ces rencontres
entre acteurs permettent de dépasser certaines postures, facilitent les
relations de confiance et peuvent favoriser ensuite la conclusion d'engagements
contractuels dans des cadres définis. » En effet, les parties
prenantes doivent s'accorder sur un objet commun pour pouvoir avancer. Annette
Jobert met en avant que le cadre moins institutionnalisé du dialogue
social territorial, par rapport au dialogue social classique, « permet
de dépasser certaines postures et peut favoriser la conclusion
d'engagements contractuels » (Jobert, 2008).
Jacques Perrat poursuit dans ce sens en expliquant que la
reconnaissance entre les hommes permet ainsi à des «
arrangements territoriaux » de voir le jour, ce qui serait impossible
sur une échelle plus large (Perrat, 2009). Ainsi, la dimension
personnelle que prennent les échanges et le développement d'une
certaine empathie sont fondamentales. La permanence des hommes et des femmes
dans les lieux de dialogue et la fréquence de leurs échanges
favorisent le développement de cette empathie
La reconnaissance qui permet de dépasser les clivages
et de construire une vision commune est un processus qui suppose une forte
volonté des acteurs. Elle est également conditionnée par
le facteur temps qui est essentiel pour que les relations créées
soient fructueuses.
3.1.c L'IMPORTANCE DU TEMPS POUR LA RECONNAISSANCE ENTRE
PARTIES PRENANTES
Pour que les parties prenantes collaborent et co-construisent
leurs projets, établir des diagnostics partagés ne suffit. Du
temps est nécessaire à la création d'un climat de
confiance et pour permettre la réalisation d'apprentissages communs.
46
Le temps est nécessaire pour créer un climat de
confiance entre les parties prenantes qui comme nous l'avons
évoqués, peuvent ne pas partager les mêmes méthodes
de travail, cultures, pratiques, etc. D'après Annette Jobert, la
confiance « a tendance à se renforcer en même temps que
se consolide la démarche territoriale et que les acteurs apprennent
à mieux se connaître et à se respecter » (Jobert,
2006).
Pour agir efficacement, du temps est nécessaire pour
que les parties prenantes réalisent des apprentissages communs. Ces
apprentissages portent sur des méthodes de travail, des codes communs
à adopter, sur la communication entre autres.
Le temps nécessaire à la construction des
projets de dialogue social territorial peut interpeller voir inquiéter.
Il est nécessaire d'admettre que les premiers résultats peuvent
prendre plusieurs années avant de voir le jour. L'efficacité du
dialogue social territorial est donc en partie conditionnée au temps. Un
enjeu important est alors de pérenniser ces lieux de dialogue dans le
temps afin de permettre aux acteurs de se faire confiance et d'agir
collectivement. Cela suppose de trouver de fortes volonté individuelles,
collectives ou politiques afin de porter et de « faire vivre » ces
lieux de dialogue.
On remarque que sans cette volonté, certains lieux de
dialogue prennent le risque de devenir des instances ou un consensus mou se
crée en permanence, ce qui ne débouche pas sur des actions
novatrices et ayant des impacts forts et positifs sur les territoires.
3.1.d COMMENT ENTRETENIR UN DIALOGUE DE QUALITE ?
Dans le cadre de ma mission de stage, les réunions et
entretiens que j'ai réalisé avec des mandatés
d'organisations syndicales siégeant dans des structures de dialogue
social territorial ont fait émerger la pauvreté du dialogue dans
certaines instances.
Nous entendons ici par pauvreté le fait que les parties
prenantes, pour éviter le conflit ou lorsqu'elles ne pensent pas avoir
assez de poids dans la décision finale, rentrent dans une logique de
non-discussion, de non-argumentation où les projets sont
réalisés à minima. Personne ne prend de position
tranchée qui pourrait s'opposer aux convictions d'autres participants.
On aboutit alors à des lieux faussement qualifiés de dialogue
social territorial ou les discussions n'aboutissent qu'à des «
consensus mous ».
Comment faire en sorte que le dialogue soit constructif et
n'aboutisse pas à des formes de consensus mou où les acteurs sont
au final peu impliqués ?
Comment créer et entretenir une culture débat et
de l'argumentation qui doit permettre transformation des intérêts
particuliers et l'émergence de solutions efficaces et admises par
l'ensemble des acteurs ?
Comment développer la confiance entre participants de
telle sorte que ceux-ci puissent exprimer clairement leurs divergences, en
débattre et trouver des points d'accord ?
Créer un lien de confiance entre les acteurs du
dialogue social territorial est la condition sine qua non pour parvenir
à la construction d'une vision commune et décloisonner les
acteurs. Du temps et une certaine vigilance sont nécessaires pour
créer des projets efficaces économiquement et socialement,
confirmant l'adage populaire disant que « nous sommes riches de nos
différences. »
3.2 COMMENT CREDIBILISER LES EXPERIENCES DE DST ?
Nous venons de le voir, certains lieux de dialogue social
territorial aboutissent à des consensus mous et donc à peu de
production. Cela menace la crédibilité de ces instances et du
47
dialogue social territorial en général. De plus,
cette forme de dialogue étant nouvelle, elle suscite des doutes et des
interrogations. Nous verrons que la surabondance des structures de dialogue
social territorial et la fragilité de leur portée juridique sont
des freins à lever pour crédibiliser ces instances de
dialogue.
3.2.a LA SURABONDANCE DE LIEUX DE DIALOGUE SOCIAL
TERRITORIAL
Un premier élément menaçant la
crédibilité du DST est la surabondance de ses lieux dialogue.
Certains lieux sont inactifs et les compétences peuvent se superposer ce
qui entraine un manque de clarté sur les missions de chacun.
? DES LIEUX « PRODUCTIFS » ET RECONNUS AUX STRUCTURES
« FANTOMATIQUES »
L'annuaire du dialogue social territorial73 de
l'ORDS a clairement montré la grande quantité de structures de
dialogue social territorial. Nous avons déjà montré la
grande hétérogénéité de ces lieux de
dialogue. Il en va de même concernant l'efficacité et la
production issue de ces instances. Certaines sont de véritables lieux de
co-construction de solutions à des problématiques
identifiées, quand d'autres structures existent légalement mais
sont « fantomatiques » car personne ne vient participer aux
réunions ou car la production est très faible.
Ma mission de stage m'a amené à récolter
l'avis des partenaires sociaux du CISTE sur des structures identifiées.
Un constat s'impose : il y a trop de structures de dialogue social territorial
et les organisations syndicales sont débordées. Elles ne
disposent pas des moyens humains nécessaires pour siéger dans
chaque structure et s'y impliquer.
Jacques Perrat pointe ainsi le « maquis institutionnel
» qui menace la crédibilité du DST (Perrat, 2009). Il
apparaît dès lors nécessaire de réaliser un
véritable état des lieux de ces instances de dialogue dans les
territoires afin de démêler l'enchevêtrement de ces lieux et
de clarifier leurs compétences. Tout en sachant que d'un territoire
à un autre, une même structure peut exercer des missions
différentes dans les faits.
? CLARIFIER ET MIEUX ARTICULER LES COMPETENCES DES STRUCTURES
Il apparaît que certains lieux de DST traitent des
mêmes sujets, sans que ceux-ci travaillent en
complémentarité. Il y a donc véritablement matière
à clarifier les compétences et l'articulation des instances de
DST entre elles. On peut penser qu'il est possible d'opérer des
regroupements.
Ainsi, d'après le CESE, la décentralisation et
la territorialisation de l'action publique ont engendré « une
multiplication de structures, voire un empilement parfois qualifié de
« millefeuille », nuit à l'efficacité du dialogue
social territorial. On constate ainsi un nombre important d'instances, tant au
niveau régional (COPIRE, ORST, CCREFP, CRE, OREF...) que
départemental ou local (CDI, CLD, CBE...), et de façon plus
marquée dans le deuxième cercle associant partenaires sociaux et
pouvoirs publics. »
Le CESE préconise ainsi d'adopter une nouvelle ligne de
conduite des politiques publiques. Il est nécessaire de veiller à
ce que chaque politique trouve en face d'elle « ni pléthore ni
absence d'instance de dialogue social territorial »74. Les
CESER pourraient alors veiller à appliquer cette résolution en se
voyant confié la mission « d'ensemblier et d'appui transversal
au dialogue social territorial. »
73 Près de 400 lieux de dialogue social
territorial ont été recensés en Poitou-Charentes :
http://ciste-pc.com/fr-6-annuaire-du-dst.html?PHPSESSID=4202f6a2b61c5553c8988f37a9f9e4ac
74 WALTER Jean-Louis, réalité et
avenir du dialogue social territorial, Notes d'Iéna, n° 344, 6
juillet 2009.
48
3.2.b UN CADRE JURIDIQUE AUX CONTOURS FLOUS
Un second problème soulevé dans de nombreux
travaux concerne la faiblesse du cadre juridique entourant le dialogue social
territorial.
? LA FAIBLE PORTEE JURIDIQUE DU DIALOGUE SOCIAL
TERRITORIAL
Premièrement, il existe une certaine méfiance
à l'égard du DST car celui, contrairement à la
négociation classique, peut produire des actes dont la portée et
l'impact restent floues.
Dans de nombreux lieux de DST formels, les projets se
manifestent sous la forme de chartes, d'avis, de positions ou
déclarations communes, d'engagements réciproques, etc. Il est
difficile de mesurer l'impact de ces actions sur les politiques publiques
territoriales. Néanmoins, il est certain que le DST ne produit que peu
d'accords au sens classique du dialogue social. Annette Jobert oppose la «
soft-law » produite par le DST, aux règlementations applicables de
la négociation classique (Jobert, 2009). En effet, les actions de DST ne
revêtent quasiment jamais un caractère contraignant.
Il peut donc y avoir de la part des partenaires sociaux,
acteurs centraux dans DST, une méfiance compréhensible. Les
partenaires sociaux eux-mêmes posent la question de la
crédibilité du DST.
? QUELLE ARTICULATION AVEC LES FORMES CLASSIQUES
DE NEGOCIATION ?
La Commission mixte CESER - Conseil Régional
Poitou-Charentes pose également la question de l'articulation entre les
projets de DST et les dispositions normatives conventionnelles qui peuvent
exister au niveau national ou au niveau des branches.
Il existe un risque de possibles inégalités et
de distorsions des garanties et des droits accordés aux salariés
par la négociation classique. Jacques Perrat résume cette crainte
en marquant que « l'extension du dialogue social territorial
participerait ainsi à un mouvement général tendant
à l'affaiblissement du droit du travail prenant sa source dans la loi et
les conventions collectives et, de manière plus générale,
à un mouvement de contractualisation de la société. Sa
promotion, notamment par les instances européennes [...] [avec la
décentralisation de la négociation collective dans les
entreprises] contribuerait à une fragmentation de la négociation
source de renforcement des inégalités » (Perrat,
2009).
Cette crainte est à nuancer vu les expériences
observées. De plus, des lois particulières protègent les
salariés en France. C'est le cas du « principe de faveur » qui
ne déroge qu'au principe de la subsidiarité que lorsqu'il permet
la signature d'accords plus favorables aux salariés. Il n'empêche
que le développement du dialogue social territorial implique de
réexaminer les liens entre les accords de « l'institutionnel
dur75 » et ceux émergeants de « l'institutionnel
mou ».
Ainsi, un champ de recherche peut concerner cette question de
la crédibilité qui peut se décliner comme suit :
Comment clarifier les compétences des institutions de
DST ? Quels regroupements opérer pour que le « millefeuille »
se réduise ?
Comment permettre aux structures de DST de produire plus
d'impact sur les politiques publiques ? Comment créer un cadre juridique
protecteur qui permettra la mise en place de projets bénéfiques
aux territoires et aux salariés en particulier ?
75 La négociation classique
49
Une autre série de questions peut également
concerner la crédibilité des acteurs du DST et plus
particulièrement les syndicats qui sont au coeur de ces dispositifs.
Comment affirmer la légitimité des syndicats et des
représentants de la société civile entre autres à
contribuer à l'élaboration de projets impactant les politiques
d'emploi, de travail et de développement éco local ? Comment
accompagner les acteurs du DST pour leur permettre d'agir efficacement ?
50
Chapitre 4 : L'APPROPRIATION SYNDICALE DES LIEUX DE
DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL
Le développement du DST suscite un véritable
enjeu pour les organisations syndicales. Ces dernières ont
déjà investi ces lieux de régulation économique et
sociale qui semblent prendre une ampleur stratégique importante. Mais
leur adaptation est source de difficultés en même temps qu'elle
ouvre des perspectives.
Nous tenterons d'analyser les points clés de
l'adaptation des partenaires sociaux aux lieux de DST. Pour cela, nous
utiliserons la méthode EMOFF76. L'analyse suivante est le
fruit d'une trentaine de réunions collectives et entretiens individuels
ainsi que de la lecture de travaux écrits.
Ces observations ne se basent que sur les organisations du
CISTE. En effet, il m'était difficile de parler du Medef, de la CGT-FO
ou de la CFTC car je n'ai rencontré aucun mandaté de ces
organisations.
4.1 FORCES
Le développement des lieux de DST a bousculé les
pratiques et le rôle traditionnel des syndicats qui ont su s'adapter en
partie aux nouvelles méthodes proposées. Il en a
découlé le développement d'un véritable
savoir-faire syndical dans les lieux de DST.
4.1.a UN CHANGEMENT DE METHODE DE TRAVAIL
Nous l'avons vu, les lieux de DST sont en
général bien plus pacifiés que peut l'être la
négociation collective au niveau national 77 ou dans
l'entreprise. Cela crée pour les organisations syndicales un rapport
nouveau entre elles qui implique un changement de leurs méthodes de
travail.
Là ou dans la négociation collective le conflit
peut tenir une place importante, les lieux de DST établissent des
relations différentes entre partenaires sociaux. On passe d'une logique
de confrontation et de revendication à tendance conflictuelle à
celle d'un dialogue et de la construction commune de projets. Il apparaît
que les organisations syndicales tendent à dépasser les clivages
traditionnels employeurs - employés pour parvenir à des formes de
consensus qui permettent de réaliser les missions assignées dans
les lieux de DST.
Le temps est nécessaire à l'établissement
de rapports de confiance entre partenaires sociaux. Les hommes ont dans ce cas
une place prépondérante par leur capacité à
accepter autrui. Cela est nécessaire pour des organisations et des
hommes qui n'ont pas la même histoire, qui n'ont pas les mêmes
convictions, les mêmes pratiques ou la même culture. Là
où la « distance institutionnelle78 » est forte,
les lieux de DST renforcent la « proximité
institutionnelle79 » des partenaires sociaux car ceux-ci sont
capables de compromis et de changer leurs méthodes de travail (Perrat
2009).
La volonté des hommes et de leurs organisations de
créer un dialogue sain et fructueux ne suffirait pas cependant. Les
partenaires sociaux ont également su investir les lieux de DST par le
développement d'un ensemble de savoir-faire.
76 Environnement, Menaces, Opportunités, Forces
et Faiblesses.
77 Accords collectifs et négociations de
branche.
78 La proximité institutionnelle est induite
par les différences d'intérêt et de pouvoir.
79 La proximité institutionnelle est le fait de
se reconnaître comme appartenant au même système de
règles, se faire confiance quant au respect de ces règles.
51
4.1.b LE DEVELOPPEMENT D'UN SAVOIR-FAIRE SYNDICAL
EMPIRIQUE
Une deuxième force des organisations syndicales
montrant leur adaptation au DST est le développement d'un savoir-faire
syndical empirique.
On peut considérer que les syndicats n'étaient
pas réellement préparés à l'émergence du
DST. Ils ont dû investir ces lieux stratégiques d'orientation des
politiques d'emploi et de travail sur les territoires. En plus de changer leurs
méthodes de travail, les partenaires sociaux, devant la
complexité des sujets traités, ont développé par la
pratique un véritable savoir-faire : connaissance des données
socio-économiques de leur territoire, des ressources, des enjeux
dépassants les seuls domaines de l'emploi et du travail, etc.
Là encore, la question du temps est primordiale puisque
des mandatés n'ayant pas une connaissance parfaite des sujets
traités, parviennent petit à petit à renforcer leur
connaissance des dossiers et à « s'auto-former ». La
pérennité des lieux de DST et la possibilité pour des
mandatés de siéger dans la durée au sein d'un même
lieu est donc un véritable enjeu d'efficacité des structures de
DST.
Il est important de noter que les organisations syndicales
permettent à leurs mandatés de ce former sur des questions ou
méthodes spécifiques, en appui du développement de leur
savoir-faire empirique. A ce titre, l'expérience menée
conjointement par le l'IDST et l'Université de Poitiers est
intéressante. Intitulé « former les militants CFDT et CGT au
dialogue social territorial », ce diplôme d'université vise
à répondre à un véritable déficit de
formation des mandatés d'organisations syndicales face au
développement de ce nouveau champ de régulation économique
et sociale. Il constitue notamment un apport méthodologique important
(connaissance du territoire, élaboration d'un diagnostic, prospective,
travail en réseau, évaluation, etc.) pour permettre aux
mandatés la conduite de projet dans un environnement multi acteurs et
complexe.
Malgré cette capacité des organisations à
se mobiliser et à s'adapter à ces nouveaux lieux de DST, des
faiblesses internes peuvent freiner leur implication dans ces lieux et leur
efficacité.
4.2 FAIBLESSES
On peut cerner trois faiblesses des partenaires sociaux dans
leur intégration aux lieux de DST. Les syndicats font face à un
cruel manque de moyens humains et financiers. Leur organisation interne est
complexe ce qui produit un manque de lien entre les mandatés des
structures de DST. Enfin, les syndicats ont connu un déclin de leur
influence qui pose aujourd'hui la question de leur
représentativité et de leur légitimité à
participer à ces formes de régulation dans les territoires.
4.2.a LE MANQUE DE MOYENS HUMAINS ET FINANCIERS
Les organisations syndicales souffrent d'un manque de moyens
humains et financiers pour siéger efficacement dans les lieux de DST.
Cela ne leur permet pas toujours d'agir efficacement.
Sur la nécessité de développer des
compétences et d'acquérir des méthodes, comme
évoqué précédemment, il n'est pas toujours
évident pour tous les mandatés de disposer de formations ou
autres outils pour renforcer leurs capacités et leur
compréhension de la complexité du DST. Pour des permanents
syndicaux, cela est possible. Mais pour des mandatés
délégués d'entreprise qui n'exercent pas leur
activité syndicale à plein temps, il est beaucoup plus difficile
de disposer du temps nécessaire pour siéger dans les lieux de
dialogue et réaliser les
52
travaux et projets. Il n'est pas non plus évident de
disposer des outils facilitant la compréhension des
problématiques et enjeux. On touche là aux limites du
bénévolat.
Du côté des moyens financiers, les instances de
DST défraient en général les mandatés pour ce qui
est de leurs déplacements. En revanche, il n'existe que peu de
structures de DST qui valorisent le temps syndical passé en leur sein.
Les mandatés ne sont pas non plus protégés par un statut
juridique lorsqu'ils siègent dans ces lieux de dialogue. Cela pose
problème pour les mandatés d'organisations de salariés
puisque leur employeur n'est pas indemnisé. Du point de vue financier,
seules quelques structures comme les CAF ou les CESER versent une indemnisation
à chaque présence des mandatés aux réunions.
Or la multiplication des lieux de DST nécessite la
mobilisation de plus en plus de mandatés pour pouvoir s'occuper «
sérieusement » des problématiques abordées
80. Le manque de moyens pousse donc les organisations à
sélectionner les instances de DST qu'elles considèrent comme
utiles. Cela menace la crédibilité du DST en
général.
Les difficultés internes des syndicats ne touchent pas
seulement à la question des moyens mais également à leur
organisation interne et à la coordination des mandatés.
4.2.b UNE COORDINATION TROP FAIBLE DES ORGANISATIONS
SYNDICALES
Devant la pléthore de structures de DST et compte tenu
de leurs moyens limités, les organisations syndicales peinent à
coordonner les actions et le message porté par leurs mandatés.
Cela pose un problème de crédibilité et
d'efficacité de l'action syndicale.
Premièrement, les organisations syndicales peuvent
s'avérer être des systèmes très complexes. Ils ont
à la fois une dimension horizontale. Un même syndicat
interprofessionnel va regrouper plusieurs branches représentant des
secteurs particuliers (métallurgie, bâtiment, hôtellerie et
restauration, etc.). Ces syndicats de branche représentent autant
d'intérêts particuliers qu'il est difficile de défendre de
façon commune au niveau interprofessionnel. D'un point de vue vertical,
les organisations syndicales ne sont pas toujours et complètement
territorialisée. Ces difficultés d'organisation ne facilitent pas
la coordination des mandatés envoyés dans les structures de
DST.
Il en découle un manque de consolidation des travaux et
des positions prises dans les lieux de DST. La définition du mandat en
lui-même pose problème car il est difficile pour les
mandatés de prendre position au nom de leur organisation à chaque
nouvelle actualité ou problématique. On observe parfois une forme
d'isolement des mandatés qui doivent à la fois parler au nom de
leur organisation et infléchir leur position pour favoriser le
consensus. C'est donc la définition même du mandat qui est
fragilisée en raison de ce manque de communication et de circulation de
l'information en interne des syndicats. Il n'est pas rare que deux structures
de DST traitent des mêmes thématiques. Parfois les sujets se
recoupent81. A cause du manque de coordination, un syndicat peut
exprimer deux positions différentes dans les deux instances de DST. Si
l'organisation y envoie deux mandatés différents, le manque de
coordination peut leur faire exprimer de positions syndicales
différentes.
Un troisième point noir de ce manque d'animation dans
les syndicats est la dispersion de l'action des militants. Or, nous l'avons
exposé, les moyens humains sont limités en nombre.
80 En épluchant la liste des mandatés
d'organisations syndicales, il n'est pas rare de voir une même personne
siéger dans plus de 5 structures de DST. Cela pose la question de leur
implication effective dans ces structures.
81 On peut prendre par exemple la COPIRE et le
CCREFP en Poitou-Charentes qui abordent les mêmes questions de formation
et d'emploi. Toutes deux rendent des avis non contraignants sur les sujets
traités. Seule la composition de ces deux instances diffère, mais
les partenaires sociaux siègent dans les deux.
53
Si les forces ne sont pas concentrées dans certaines
structures de DST identifiées comme des lieux stratégiques, les
organisations n'ont qu'une action « diluée » où les
mandatés ne peuvent s'investir avec force dans les projets et le
dialogue proposé.
Ces problèmes de communication et de coordination qui
peuvent empêcher de parler d'une seule voix posent également un
problème de crédibilité pour les syndicats.
4.2.c LA REMISE EN CAUSE DE LA LEGITIMITE DES SYNDICATS
Certaines voix expriment le manque de légitimité
des syndicats pour parler au nom des employés et des employeurs dans les
structures de DST.
L'érosion constante des effectifs syndicaux et une
participation de plus en plus faible aux élections professionnelles
entrainent une remise en cause de la légitimité des organisations
de salariés. Puisque celles-ci regroupent de moins en moins de militants
et vue la faible participation aux élections professionnelles, certaines
voix, du côté patronal principalement, expriment le fait que les
organisations syndicales de salariés ne représentent plus
grand-chose ce qui ne les rend pas légitimes pour faire du dialogue
social, encore moins dans les territoires. Le manque de moyens et de
coordination renforcent cette remise en cause du rôle que peuvent jouer
les syndicats de salariés dans le DST, malgré leur
compétence sur les questions d'emplois et de travail.
Du côté des organisations d'employeurs, la
principale faiblesse qui induit un problème de légitimité
se trouve dans l'opposition du Medef à toute forme de DST. La CGPME et
l'UPAR s'impliquent dans les initiatives de DST mais leur
légitimité est remise en cause étant donnée
l'hyperpuissance du Medef qui représente historiquement l'ensemble des
patrons de France. La situation décrite par Jacques Perrat en
Rhône-Alpes est assez révélatrice de ce qu'il se passe dans
d'autres régions :
« Jusqu'à une période récente,
le patronat (ou plutôt le MEDEF car les organisations de PME et de
l'artisanat sont moins catégoriques) s'est montré assez hostile
à la mise en place des commissions paritaires (interprofessionnelles ou
professionnelles)à un niveau régional, départemental ou
local - commissions prévues par les « lois Auroux » de 1982 et
réactivées par la « loi Fillon » du 4 mai 2004 - et il
leur préférait des instances plus informelles du genre «
comités de pilotage » » (Perrat, 2009).
Ces faiblesses entrainent une certaine remise en cause de la
légitimité de la présence des partenaires sociaux dans
toute forme de dialogue sur les territoires.
Une implication efficace des syndicats dans le DST ne
dépendra pas seulement de la réduction des faiblesses que nous
venons de lister. L'environnement extérieur est à prendre en
compte. Le développement rapide du DST pourrait affaiblir les syndicats
de même qu'il contient en lui des opportunités qui pourraient
renforcer la reconnaissance et l'impact des syndicats en France.
4.3 MENACES
Le développement du DST implique deux menaces
principales qui freinent l'implication des syndicats dans ces instances de
dialogue. D'une part, la surabondance des structures de DST qui pose des
problèmes de crédibilité. D'autre part, le risque de voir
le DST, à la portée parfois floue, prendre trop d'importance par
rapport à la négociation collective traditionnelle qui produit
les normes reconnues de travail et d'emploi.
54
4.3.a L'IMPLICATION SYNDICALE FREINEE PAR L'ABONDANCE DES
LIEUX DE DST
La surabondance des lieux de DST freine l'implication des
syndicats.
Nous l'avons déjà évoqué, les
organisations syndicales manquent de moyens et assurent difficilement le
partage des travaux des mandatés dans les lieux de DST. Ainsi, les
syndicats peinent à valoriser le travail fait dans ces structures de
DST. En priorité, le risque est de voir la base des militants des
organisations ne pas comprendre l'intérêt de siéger et de
s'investir dans ces lieux. Il peut alors s'opérer une scission entre les
mandatés qui ont des responsabilités au niveau régional et
départemental82. C'est ainsi que le CESE dans son rapport sur
le DST met en garde contre la tendance à opposer la négociation
de branche et l'interprofessionnel territorial. Ce que Jacques Perrat
complète lorsqu'il exprime que ces projets de dialogue sur les
territoires posent «de réels problèmes de
redéfinition des responsabilités et des légitimités
et instaure une coupure grandissante entre ceux qui, au niveau régional,
doivent se faire porteurs de projets de développement et ceux qui, dans
l'entreprise, doivent gérer au quotidien les restructurations et les
plans sociaux »83.
La pléthore d'instances territoriales est
également pointée du doigt par le CESE car elle crée un
millefeuille d'institutions dont les compétences se recoupent. Ce manque
de clarté ne joue pas en la faveur d'une crédibilisation du DST.
Même si le dialogue social est un principe réaffirmé par
les récents gouvernements et que l'échelon infranational est
reconnu, il semble nécessaire d'éclaircir les compétences
et missions des structures afin de valoriser l'action syndicale en ces
lieux.
4.3.b LE FLOU ENTOURANT LE DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL
Un deuxième risque pour les syndicats peut les freiner
à s'engager. Le DST a une portée floue qui pourrait fragiliser le
rôle des syndicats dans la production de règles et de normes.
Le DST bouscule le rôle traditionnel des syndicats qui
est celui du dialogue social classique. Il se manifeste par la signature
d'accords collectifs et de normes. Or, le DST fait apparaître un autre
mode de travail pour d'autres finalités. Il en ressort que les syndicats
sont amenés à à adopter des positions assez fragiles dans
les structures de DST. Cette fragilité se manifeste par les fruits du
DST, que sont les chartes, avis, positions communes, ou engagements
réciproques, dont la consistance juridique et l'impact sur les
politiques publiques sont parfois très flous.
Les travaux issus des lieux de DST produisent de la norme bien
plus informelle. Cela entraine une certaine méfiance de la part des
organisations syndicales, surtout si le DST vient empiéter sur la
négociation collective traditionnelle. Pour Jacques Perrat, cette
montée des « arrangements » implique la
nécessité de clarifier les compétences des structures de
DST et de les articuler avec les formes classiques de négociation
collective. Le rapport du CESE pointe ainsi la faiblesse du cadre juridique
entourant les lieux de DST. Cette insécurité contribue à
freiner l'engagement des partenaires sociaux.
De plus, la volonté même d'intégrer les
partenaires sociaux de manière effective dans les projets de DST n'est
pas garantie. Ainsi, Annette Jobert pointe le fait que la participation des
syndicats « se limite (souvent) à la phase de diagnostic de la
situation, les capacités
82 Ce sont souvent les permanents et les
mandatés des union régionales et départementales qui
représentent leur organisations dans les structures de DST.
83 Jacques Perrat (2007), « Appropriation
syndicale des enjeux territoriaux : la question nodale du rapport
firme/territoire », La Revue de l'IRES, n°54, 2007.
55
d'expertise et plus largement les ressources
(financières et autres) étant inégalement réparties
au sein du territoire » (Jobert, 2009).
Ainsi, les menaces pesant sur la crédibilité du
DST peuvent placer les partenaires sociaux sur une pente savonneuse. Il
n'empêche que ce nouveau type de dialogue entre organisations
d'employeurs et de salariés est porteur de promesse car il pourrait bien
renforcer, à termes, le poids et l'impact dans les systèmes de
régulation socio-économique en France et sur les territoires.
4.4 OPPORTUNITES
Le développement du DST est générateur
d'opportunités pour les partenaires sociaux. Ceux-ci pourraient inverser
la tendance et gagner en reconnaissance et en poids. Cela permettrait aux
syndicats d'avoir un meilleur impact sur la construction et la conduite de
l'action publique sur les territoires.
4.4.a LE TERRITOIRE POUR RENFORCER LA LEGITIMITE DES
SYNDICATS
S'impliquer de manière forte dans le DST pourrait
permettre une plus grande reconnaissance des partenaires sociaux. Ils
pourraient être plus facilement vus comme des acteurs légitimes de
la construction de règles, de normes et d'action publique sur les
territoires.
Même si la place des partenaires sociaux et l'importance
du dialogue social est réaffirmé par les gouvernements
successifs, les organisations syndicales de salariés se trouvent dans
une trajectoire de déclin depuis la Seconde Guerre Mondiale. Ce
déclin est notamment marqué par la baisse très importante
du nombre d'employés syndiqués en France 84 . Face aux
superstructures que sont devenus les syndicats sur le plan national,
l'implication dans le dialogue sur le territoire pourrait permettre d'attirer
de potentiels militants. En traitant de problématiques concrètes
et en intégrant les spécificités locales, la
proximité peut-elle être un levier de communication des syndicats
pour inverser la tendance globale de baisse du nombre d'adhérents ?
Du côté patronal, le DST constitue une
opportunité certaine pour la CGPME ou l'UPA. Ces deux organisations sont
jugées représentatives au niveau national. Malgré tout,
leur influence sur les négociations collectives nationales est largement
affaiblie par la superpuissance du Medef. En investissant les échelons
locaux, et le Medef ne reconnaissant globalement pas ces échelons comme
des territoires pertinents de dialogue social, la CGPME et l'UPA pourraient
mieux s'ancrer dans les systèmes de régulation, asseoir une
reconnaissance et une légitimité toujours imparfaite aujourd'hui.
Ces deux organisations pourraient affirmer auprès des pouvoirs publics
la spécificité des employeurs (patrons de TPE/PME et artisans)
qu'elles représentent.
Pour des syndicats non représentatifs, l'enjeu du DST
est également primordial. C'est le cas pour l'UDES qui représente
l'économie sociale et solidaire. Du côté patronal, si la
spécificité des employeurs de TPE/PME et des artisans est
reconnue, les employeurs de l'ESS ne sont pas intégrés aux
négociations collectives. Ainsi, le DST offre pour les dirigeants de
l'ESS une opportunité d'affirmer eux aussi, à travers des
syndicats comme l'UDES, leur spécificité et de participer
à la régulation socio-économique sur les territoires. A ce
titre, certaines régions ont pris de l'avance, en témoigne la
création de deux « Espace Régional de Dialogue Social »
(ERDS) sur le champ de l'ESS, en Bretagne85 et en
Rhône-Alpes86. Elles regroupent de façon
84 Moins d'un employé sur 10 est membre d'un
syndicat actuellement.
85 La création de l'ERDS rentre dans la
Stratégie Régionale de Développement de l'ESS pour la
période 20122016. Voir le document de présentation de l'ERDS en
Bretagne intitulé « Vers un dialogue social territorial pour
56
paritaire des représentants d'employeurs de l'ESS
(l'UDES et l'UNIFED) d'une part, et des syndicats de salariés pour le
deuxième collège.
4.4.b UN MEILLEUR IMPACT DES SYNDICATS SUR L'ACTION
PUBLIQUE DANS LES TERRITOIRES
La territorialisation des politiques publiques et
l'émergence du DST doit également constituer pour les syndicats
un moyen d'augmenter leur impact sur le développement des
territoires.
Le DST ayant le vent en poupe, il semble opportun pour les
partenaires sociaux de s'investir pleinement dans certains lieux de dialogue.
Les syndicats de salariés peuvent y construire des positions communes et
dépasser leurs oppositions pour afficher avec force certaines
convictions face au patronat et aux décideurs publics. De même,
sur des sujets particuliers, organisations salariales et patronales parviennent
à dépasser leurs clivages pour mener des actions
coordonnées, dépassant ainsi certains clivages
idéologiques traditionnels. La question du temps nécessaire
à l'établissement de relations apaisées entre les hommes
est ici au centre.
On peut notamment citer l'exemple de la création de
Viv'Arti en Poitou-Charentes. Cette structure paritaire en développement
permet l'extension d'avantages économiques, sociaux ou culturels aux
salariés des TPE/PME et de l'artisanat. Sur ce projet spécifique,
les partenaires sociaux des deux camps sont parvenus à des accords
à force de dialogue et de concession pour créer cette structure
qui bénéficie à la fois aux employeurs comme aux
salariés. Aujourd'hui cette structure est reconnue pour son
succès si bien que son concept a été dupliqué dans
d'autres régions comme en Bretagne.
Aujourd'hui, il apparaît que des initiatives de DST sont
très à même de couvrir les besoins d'employeurs et
d'employés « oubliés » et pas assez
protégés par la négociation collective traditionnelle. Les
partenaires sociaux sont au centre de ce type d'initiatives ce qui renforce
à la fois leur crédibilité car ils sont perçus
comme capables de co-construire. Ce type de projet a bien un impact réel
sur les territoires puisqu'il « apparaît que la territorialisation
du diagnostic des problèmes et de la recherche de leur solution peut
être, pour les salariés, porteuse tout à la fois d'atouts,
en mobilisant des « acteurs de proximité » pour combler des
manques ou pour innover en matière de normes sociales. » (Perrat,
2009)
4.5 PERSPECTIVES
Le diagnostic dressé ici n'est pas exhaustif. Il
résume tout de même une partie des enjeux de l'implication des
syndicats dans les lieux de DST. En somme, le CESE dans son rapport sur le DST
résume bien les choses :
« Le développement du dialogue social au
niveau des territoires se heurte également à un certain nombre de
problèmes d'ordre institutionnel ou structurel, relevant aussi bien de
l'organisation interne des différents acteurs territoriaux,
privés et publics, de leur représentativité et de leur
légitimité à agir, que de la multiplication des instances
de dialogue sans répartition claire de leur rôle et de
l'insuffisance des ressources humaines qui en résulte. Se pose
également la question de la compétence des acteurs au regard de
sujets à la
l'économie sociale et solidaire en Bretagne :
http://www.essbretagne.org/images/stories/documents/Diagsocterr.pdf
86 Cette initiative s'est concrétisée
par la signature en 2011 d'une première « Charte du dialogue social
territorial en économie sociale et solidaire en Rhône-Alpes »
signée par l'UDES, UNIFED, la CGT, la CFDT, la CFTC, la CFE-CGC et
l'UNSA.
57
fois plus divers et plus complexes, qui renvoie à
celle des moyens du dialogue social territorial. » 87
Ainsi, quelques pistes de réflexions s'offrent à
nous pour améliorer l'investissement des organisations syndicales dans
les structures de DST.
En premier lieu, comment peut-on accompagner les syndicats
dans le développement du DST ? Quels instruments ou moyens peuvent
être mis à leur disposition afin de combler certaines de leurs
difficultés matérielles à s'investir dans les lieux de DST
? Il est nécessaire d'appuyer les syndicats, sur des questions
financières et d'offre de formation notamment pour garantir
l'implication des mandatés.
Mais les syndicats doivent également effectuer leur
propre révolution pour poursuivre leur adaptation à ces nouvelles
méthodes de régulation économique et sociale. Ainsi, une
série de question doit faire débat dans les organisations. Quels
changements internes doivent opérer les syndicats pour améliorer
leur coordination et renforcer leur position dans les lieux de DST ? Comment
mutualiser les expériences et assurer la crédibilité de
leurs actions ?
Enfin, un point déjà soulevé dans la
Partie 2 concerne la crédibilité du DST en général.
Comment renforcer l'impact et la crédibilité des travaux des
partenaires sociaux dans les lieux de DST ? Les avis, diagnostics, ou prises de
position communes des partenaires sociaux peuvent-elles avoir un
caractère contraignant pour les décideurs publics ? Comment
définir un cadre juridique qui donne de la valeur aux projets des
partenaires sociaux sans altérer leur capacité d'innovation ?
Il semble donc important de clarifier certains aspects du DST
et définir des règles de gouvernance et de transparence si l'on
veut tirer parti de l'énergie que les partenaires sociaux semblent
disposés à investir dans ces nouveaux lieux de
régulation.
87 WALTER Jean-Louis, Réalité et
avenir du dialogue social territorial, Rapport du Conseil Economique,
Social et Environnemental, La Documentation Française, 2009.
58
Conclusion
Le dialogue social territorial a pu émerger grâce
au processus de déconcentration administrative et de
décentralisation politique qui a entrainé une territorialisation
des politiques publiques. En plus de cette reconnaissance du niveau local, le
dialogue social est un principe qui a été réaffirmé
par les gouvernements successifs en France. La création d'instruments de
gouvernance sur les territoires a permis l'émergence de ces lieux dont
les frontières sont difficiles à cerner et qui sont
marqués par une très grande
hétérogénéité.
En effet, le développement soudain du dialogue social
territorial a conduit à une grande diversité de dispositifs et de
pratiques. On a ainsi pu mesurer dans une deuxième partie qu'en fonction
des projets (emploi, travail, ou développement socio-économique
du territoire), les dispositifs de dialogue social territorial changent de
forme. Les acteurs, les missions, les territoires d'intervention et le cadre de
la création de ces lieux varient fortement en fonction des projets
construits.
Le développement du dialogue social territorial pose
des enjeux très forts concernant le développement
socio-économiques des territoires. Nous avons mis en avant certaines de
ces problématiques qui doivent être traitées avec
considération. La notion de confiance est primordiale pour un dialogue
social territorial de qualité et efficace. Elle suppose de fortes
volontés collectives et individuelles.
Deuxièmement, nous avons vu que pèse aujourd'hui
sur le dialogue social territorial des menaces sur sa
crédibilité. Il semble important de clarifier certains aspects
notamment sur les compétences des structures, l'articulation entre elles
et avec les formes plus classiques de régulation
socio-économiques. Des bases juridiques plus solides sont à poser
pour renforcer la crédibilité du DST.
Enfin, les syndicats étant omniprésents dans ces
instances, il semble important qu'ils se donnent les moyens humains et
économiques et qu'ils soient accompagnés pour mieux s'impliquer
dans les projets de DST dont les potentiels avantages sont largement
soulignés par le rapport du CESE entre autres.
59
Partie C : EVALUATION DE STAGE
J'ai essayé dans cette partie de cerner les
compétences que j'ai mises en action dans mon stage et celles que j'ai
développées. Néanmoins, il m'est difficile d'être
objectif puisque au moment de l'écriture de ce mémoire, mon stage
n'a commencé que 3 mois plus tôt et qu'il me reste 1 mois et demi
de travail. J'ai tout de même dégagé 5 grandes
compétences que je pense avoir développé au cours de mon
stage.
Chapitre 1 : ASSUMER MES RESPONSABILITES ET
TRAVAILLER EN AUTONOMIE SUR MES MISSIONS
Ma mission de stage la plus concrète consistait
à récolter l'avis des partenaires sociaux du CISTE sur les lieux
de dialogue social territorial de Poitou-Charentes dans lesquels ils
siègent. Pour réaliser ce projet, j'ai essayé de mettre en
place des méthodes de travail pour m'organiser et produire un travail
d'analyse le plus juste possible.
J'ai tenté de prioriser mon action en étapes
à réaliser afin d'agir efficacement. J'ai ainsi
créé un questionnaire88 qui m'a servi de trame lors
des réunions et des entretiens individuels. J'ai globalement posé
les mêmes questions aux mandatés d'organisations syndicales. J'ai
tenté autant que possible de ne pas influencer leur réponse en
leur posant des questions orientées. Ce questionnaire n'a pas pour
autant « cadenassé » les entretiens. Il m'a au contraire
permis de dévier parfois en abordant des sujets, toujours en lien avec
le DST, qui tenaient à coeur des mandatés interrogés.
C'est ainsi que je me suis intéressé aux freins de l'implication
syndicale dans les lieux de DST.
J'ai ensuite essayé de comparer les observations que je
pouvais faire aux réunions et pendant les interviews avec certains
écrits de chercheurs ou experts sur le sujet du DST. Cela m'a permis de
renforcer ma compréhension des enjeux propres au DST et d'affiner la
justesse de mes analyses.
Même si l'avis n'est pas encore rédigé (Il
le sera fin septembre, à l'issue de mon stage), je pense avoir
assumé mes responsabilités sur la durée et j'ai su tirer
parti des difficultés rencontrées pour faire évoluer le
projet. Ces difficultés étaient largement liées à
la mobilisation des mandatés des organisations du CISTE.
Chapitre 2 : LA DIFFICULTE DE MOBILISER LES
MANDATES
Pour permettre la construction de l'avis sur les structures de
DST, je devais mobiliser des mandatés d'organisations syndicales afin de
récolter leur position sur les structures étudiées.
Il n'a pas été facile de mobiliser les
mandatés. J'ai dû m'organiser et être tenace pour contacter
les personnes et surtout les relancer plusieurs fois afin qu'elles apportent
leur pierre au projet.
88 Voir l'annexe n°4 : Questionnaire sur les
structures de dialogue social territorial
60
Après un taux de participation aux réunions
parfois décevant, nous avons dû revoir notre stratégie de
mobilisation. Il apparaissait que peu de lien était fait en interne des
organisations du CISTE et que l'information sur les réunions
programmées étaient assez mal passées, malgré mes
relances. J'ai donc identifié des personnes clefs pour m'entretenir avec
elles. Ces mandatés étaient intéressants à
contacter car ils siégeaient dans plusieurs structures de DST à
la fois.
Pour ne pas me perdre, j'ai construit un tableau de bord de
suivi des réunions et entretiens. Cela me permettait d'avoir en temps
réel une photographie de la participation des organisations du CISTE au
projet d'avis sur les structures de DST.
Dernièrement, afin d'étoffer l'avis que
j'écrirai et pour voir comment se passe le dialogue social territorial
dans d'autres régions, j'ai contacté les CRESS Bretagne et
Rhône-Alpes qui ont développé toutes deux une plateforme de
DST qui regroupe les organisations syndicales représentatives de l'ESS
et les organisations de salariés. Des rencontres sont prévues
pour début septembre.
Chapitre 3 : LA VOLONTE DE TRAVAILLER EN EQUIPE
Je me suis efforcé de communiquer avec mes
collègues afin de comprendre l'environnement et le projet. J'ai ensuite
pu légitimement proposer des méthodes ou des idées sur mon
projet afin de le mettre en oeuvre. J'ai donc essayé de prendre des
initiatives et d'en discuter avec mes collègues pour améliorer
mes idées et les mettre en oeuvre.
J'ai ainsi proposé une méthodologie d'entretien
pour les réunions, avec la création d'un questionnaire
notamment.
J'ai pris l'initiative de donner ma vision sur la construction
de l'avis en lui-même : Comment structurer l'avis ? Que mettre dedans ?
Comment appuyer les positions des syndicats par certains travaux
théoriques ? Cela m'a conduit à l'écriture d'une trame qui
a été validée par le président du CISTE. J'ai
proposé que cette trame retravaillée fasse l'objet, fin
septembre, d'une rencontre avec les partenaires sociaux du CISTE afin qu'ils
dégagent, sur la base de ce document, des réflexions ou pistes
d'action pour améliorer leur implication dans les lieux de DST.
J'ai essayé de transmettre à mes
collègues certaines des méthodes ou des outils, informatiques
notamment, que je maîtrise. Ma participation au DU DST a
été pourvoyeuse de ressources pour moi et j'ai essayé de
transmettre mes apprentissages au CISTE.
Chapitre 4 : ADAPTATION RAPIDE ET COMPREHENSION DE
L'ENVIRONNEMENT
Je pense avoir développé une capacité
d'adaptation et de compréhension de l'environnement du CISTE et du DST
en général. Je ne connaissais à peu près rien sur
le DST. De plus, mon histoire et celle de ma famille ne m'a jamais fait toucher
de près au monde syndical que je ne connaissais qu'à travers
certains cours dispensés à l'IEP et via la lecture de la presse
nationale. J'ai pu découvrir ces deux mondes qui m'ont
intéressé.
61
Mais en seulement trois mois de stage, il m'est toujours
difficile de cerner certains enjeux, d'identifier le rôle de certaines
structures de même que comprendre des problématiques très
techniques tournant autour du travail et de l'emploi.
Je crois en revanche avoir su m'adapter aux codes
régnants dans le monde syndical en adoptant notamment leur vocabulaire
parfois très spécifique.
Chapitre 5 : UN RENFORCEMENT DE MES CAPACITES
D'EXPRESSION ECRITE ET ORALE
Enfin, ce stage a été pour moi l'occasion de
développer mes capacités d'expression.
Je n'ai jamais pris l'habitude de parler en public et le
master m'avait déjà permis de remédier à ce
défaut pour me sentir beaucoup plus à l'aise. J'ai eu l'occasion
au CISTE devant des personnes « impressionnantes » tels que des
secrétaires régionaux d'organisations syndicales. Je me suis
efforcé de défendre mon travail et d'argumenter pour pouvoir
construire avec eux le projet d'avis sur les structures. J'ai proposé
des méthodes de travail et essayé de tempérer leurs
demandes lorsqu'elles étaient irréalisables étant
donnés les moyens dont je disposais.
J'ai surtout du combattre ma phobie du téléphone
pour mobiliser les mandatés des organisations ! Il m'a fallu argumenter,
négocier et persévérer pour décrocher certains
entretiens.
Je me suis particulièrement appliqué sur
l'expression écrite pour rendre intelligible mes écrits. J'ai par
exemple rédigé deux compte-rendus de sessions du DU DST portant
sur des interventions intellectuellement complexes. Je me suis efforcé
de reformuler pour m'approprier ces interventions et leurs concepts.
Partie D : REFERENCES
Chapitre 1 : ANNEXES
1.1 ANNEXE N°1 : TYPOLOGIE DES ACTEURS
62
Source : http://www.dialoguesocialterritorial.fr/
1.2 ANNEXE N°2 : PRINCIPAUX LIEUX DE DIALOGUE
SOCIAL TERRITORIAL
Source : http://www.dialoguesocialterritorial.fr/
63
64
1.3 ANNEXE N°3 : GRILLE D'ANALYSE DU DIALOGUE
SOCIAL TERRITORIAL
Source : http://www.dialoguesocialterritorial.fr/
65
1.4 ANNEXE N°4 : QUESTIONNAIRE SUR LES STRUCTURES
DE DIALOGUE SOCIAL TERRITORIAL
Avis 2013 sur les structures de DST
VI
66
67
Chapitre 2 : BIBLIOGRAPHIE
BELIN Carine, CHARVET Alain, SASSO Marie-Odile, BRISSON
Dominique, Dialogue territorial, la place des partenaires sociaux,
ARAVIS, décembre 2005.
BORIES-AZEAU Isabelle, LOUBES Isabelle, les maisons de
l'emploi, un dispositif en faveur d'une gestion territoriale des ressources
humaines ?
BOUSSAGUET Laurie, JACQUOT Sophie et RAVINET Pauline (dir.),
Dictionnaire des politiques publiques - 3e édition
actualisée et augmentée - Paris : Presses de Sciences Po, 2010,
collection Références.
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL, Dialogue social.
Discussion récurrente en vertu de la Déclaration de l'OIT sur la
justice sociale pour une mondialisation équitable.
Conférence internationale du Travail 102e session, 2013.
Commission mixte CESER - Conseil Régional
Poitou-Charentes, Développement du dialogue social territorial,
session du 4 au 11 février 2013.
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synthèse. Note de synthèse, septembre 2007.
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France ? Esprit, 2009/1 Janvier, p. 125-137.
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perspective comparative. Le politique et la dynamique des relations
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PERRAT Jacques, Appropriation syndicale des enjeux
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et les ambiguïtés de la proximité, Géographie,
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PIOTET Françoise, La CGT, une anarchie (plus ou
moins) organisée ?, Politix, 2009/1 n° 85, p. 9-30.
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la participation s'est laissée endormir, pourquoi elle doit reprendre le
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WALTER Jean-Louis, réalité et avenir du
dialogue social territorial, Notes d'Iéna, n° 344, 6 juillet
2009.
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dialogue social territorial, Rapport du Conseil Economique, Social et
Environnemental, La Documentation Française, 2009.
WARTELLE Brigitte, PINON Fadéla, HEBERT
Sébastien, Réaliser un état des lieux et outiller le
dialogue social territorial, IRES, Rapport final de novembre 2012.
68
Chapitre 3 : WEBOGRAPHIE
Assemblée nationale :
http://www.assemblee-nationale.fr/
Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales :
http://www.cnrtl.fr
CISTE : http://www.ciste-pc.com/
Collectivités locales :
http://www.collectivites-locales.gouv.fr/
Dialogue social territorial, ingénierie d'action :
http://www.dialoguesocialterritorial.fr/
Organisation Internationale du Travail :
http://www.ilo.org
Sénat : http://www.senat.fr/
Thésaurus Bureau International du Travail :
http://www.ilo.org/thesaurus/defaultfr.asp
69
Chapitre 4 : LEXIQUE
BIT : Bureau International du Travail
CFDT : Confédération
Française Démocratique du Travail (syndicat de
salariés)
CFE CGC : Confédération
Française de l'Encadrement - Confédération
Générale des Cadres (syndicat de salariés)
CFTC : Confédération
Française des Travailleurs Chrétiens
CGPME : Confédération
Générale du Patronat des Petites et Moyennes Entreprises
(syndicat d'employeurs)
CGT : Confédération
Générale du Travail (syndicat de salariés)
CISTE : Carrefour de l'Innovation Sociale du
Travail et de l'Emploi
CNCRES : Conseil National des Chambres
Régionales de l'Economie Sociale CRES : Chambre
Régionale de l'Economie Sociale (aujourd'hui CRESS)
DIRECCTE : Direction Régionale des
Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de
l'Emploi
DST : Dialogue Social Territorial
FO : Force Ouvrière (syndicat de
salariés)
FRSEA : Fédération
Régionale des Syndicats d'Exploitants Agricoles (syndicat
d'employeurs)
FSE : Fonds Social Européen
MEDEF : Mouvement des Entreprises de France
(syndicat d'employeurs) PME : Petites et Moyennes
Entreprises
UDES : Union des Employeurs de l'Économie
Sociale et Solidaire (syndicat d'employeurs, anciennement USGERES)
UNIFED : Union des fédérations et
syndicats nationaux d'employeurs sans but lucratif du secteur sanitaire,
médico-social et social
UNSA : Union Nationale des Syndicats Autonomes
(syndicat de salariés) UPAR : Union Professionnelle
Artisanale Régionale (syndicat d'employeurs)
USGERES : Union de Syndicats et Groupements
d'Employeurs Représentatifs dans l'Economie Sociale (syndicat
d'employeurs, aujourd'hui UDES)
TMS : Troubles Musculo-Squelettiques TPE
: Très Petites Entreprises
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