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L'amnistie en RDC. Analyse du cadre juridique et son impact sur le processus de paix

( Télécharger le fichier original )
par Norbert-lebon BWIRA NDAGANO
Université catholique de Bukavu RDC - Licence en droit 2012
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE CATHOLIQUE DE BUKAVU

B.P. 285 BUKAVU

FACULTE DE DROIT

L'AMNISTIE EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

Analyse du cadre juridique et son impact sur le processus de paix

Mémoire présenté en vue de l'obtention du diplôme de licence en Droit dans l'option Droit privé et Judiciaire.

Par : BWIRA NDAGANO Norbert Lebon

Directeur : Prof. Doc. MOISE CIFENDE KACIKO

Rapporteur : Adolphe KILOMBA SUMAILI

EPIGRAPHE

"Je fais une chose." SAINT PAUL.

"La seule sagesse de la vie est la concentration ; le seul mal est la dissipation ; et il importe peu que nos dissipations soient grossières ou relevées... Tout ce qui nous enlève un jouet ou une illusion et nous renvoie au travail fructueux est bon pour nous." EMERSON.

"Plus je vis, plus je suis profondément convaincu que ce qui fait la différence entre un homme et un autre, entre le faible et le puissant, entre l'intelligent et l'insignifiant, c'est l'énergie, une détermination invincible, une décision prise et maintenue jusqu'à la victoire ou la mort. " Fowell BUXTON.

BWIRA NDAGANO Norbert-Lebon

IN MEMORIAM


A notre mère et grand-mère MURHESA SAKINA et notre grand frère LEBON BWIRA 1er que la mort nous ont arraché si tôt dans des circonstances où nous avions le plus besoin de vous, que le tout puissant vous comble de ses grâces dans son royaume.

Que vos âmes reposent en paix

BWIRA NDAGANO Norbert-Lebon

DEDICACE

A mes très chers parents papa NDAGANO MAURICE et maman EUGENIE KAMWELE dont l'appui, le soutien, les conseils, sous toutes leurs formes, n'avaient jamais cessé de me précéder et de m'accompagner pour mener à bon port ce travail ;

A la grande famille NDAGANO ;

A mes frères et soeurs ;

A mes oncles et tentes ;

A tous mes amis, mes camarades étudiants de la faculté de Droit de l'UCB 2012-2013 ;

A celle que le destin me réserve comme épouse.

BWIRA NDAGANO Norbert-Lebon

REMERCIEMENTS

Ce travail n'aurait pu se réaliser sans l'aide précieuse du bon DIEU qui a toujours été un soutien inconditionnel pour moi et qui m'a guidé dans toutes mes voies.

Au-delà de la tradition, et sans aucune complaisance, mes premiers remerciements s'adressent à mon directeur de mémoire, le Professeur Moise CIFENDE KACIKO et mon rapporteur le Chef de Travaux Adolphe KILOMBA SUMAILI. Leurs grandes expériences d'enseignement et de recherche, leurs disponibilités et leurs conseils précieux ont été autant d'encouragements. Qu'ils puissent trouver ici l'expression de ma profonde gratitude et celle de mon admiration sincère.

Je tiens également à remercier mes parents, Papa NDAGANO MAURICE et Maman EUGENIE KAMWELE, d'avoir été, au long de ces années, une source inépuisable et indispensable de force et d'inspiration, et de m'avoir accordé sans relâche leur soutien.

Je tiens à témoigner également ma reconnaissance :

A tout le corps académique de l'UCB pour ma formation intellectuelle. Que tous ceux qui ont contribué à cette formation depuis notre jeune âge trouvent ici l'expression de notre gratitude.

A toute la grande famille NDAGANO ;

A mes amis et camarades étudiants.

BWIRA NDAGANO Norbert-Lebon

SIGLES ET ABREVIATIONS

Al : Alinéa

Art. : Article

BERCI : Bureau d'Études, de Recherche et de Consulting International

BIEPD : Bureau International d'Études pour la Paix et le Développement

CENI : Commission Électorale Nationale Indépendante

CIRGL : Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs

CNDP : Congrès National pour la Défense du Peuple Congolais

CNS : Conférence Nationale Souveraine

Ed : éditions

FARDC : Forces Armées de la République Démocratique du Congo

FDLR : Forces Démocratiques de Libération du Rwanda

IDPGL : Institut pour la Dynamique de la Paix dans les Pays des Grands Lacs

IFES: International Foundation for Electoral Systems

J.O : Journal officiel

M23 : Mouvement du 23 décembre

MLC : Mouvement des Libérations du Congo

MONUSCO : Mission d'Observation des Nations-Unies pour la Sécurité au Congo

MPR : Mouvement Populaire de la Révolution

NDI : National Democratic Institute

OL : Ordonnance loi

ONG : Organisation Non Gouvernementale

ONU : Organisation des Nations Unies

OUA : Organisation de l'Unité Africaine

P : Page

PP : Pages

RCD : Rassemblement Congolais pour la Démocratie

RDC : République Démocratique du Congo

VOL : Volume

RCD/ML : Rassemblement Congolais pour la démocratie Mouvement de la libération

RCD/N : Rassemblement Congolais pour la démocratie Nord

I. PROBLEMATIQUE

La chute du mur de Berlin, la fin de la guerre froide, les ajustements structurels et d'adoption de nouveaux modes de gestion ou bonne gouvernance, les diverses pressions extérieures, la libéralisation des régimes de l'Est, cela, aux années quatre-vingt-dix, s'est concrétisée par des tenues de conférences nationales. Celles-ci, dans les Etats africains qui les ont organisées, ont accouché d'une souris. C'était suite au difficile passage de la dictature à une bonne gouvernance. Les mouvements sociopolitiques qui s'ensuivirent n'ont pas su intégrer la quasi-totalité des systèmes politiques africains.

La République Démocratique du Congo n'en est pas épargnée. Les rebellions successives dans le Kivu ressemblent à l'histoire des frères ennemis. Depuis l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) en 1996 jusqu'au Mouvement du 23-Mars (M23) en 2012, ce sont souvent des anciens compagnons d'armes qui se sont retournés les uns contre les autres pour se faire la guerre. Un cycle infernal de violences qui a duré près de deux décennies, entraînant la mort de près de huit millions de personnes. Autrement dit, un des conflits les plus meurtriers depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

Dans cette perspective au cours de la dernière décennie, la République Démocratique du Congo, en général, le Nord et le Sud Kivu, en particulier, ont été victimes des guerres d'agression, des rébellions qui ont fait des violations massives des droits de l'homme. Par ailleurs, le droit international impose aux Etats de poursuivre les crimes graves tels que le génocide, les crimes de guerre, et les crimes contre l'humanité. La commission d'une infraction trouble l'ordre social ; il faut donc punir le coupable. Ainsi donc la violation d'une norme sociale entraine la conséquence d'une poursuite de l'auteur de cette violation qui va aboutir à une sanction ou une peine ; bref une condamnation.

A cet effet, la peine peut s'éteindre directement par l'effacement de la condamnation qui lui servait de support 1(*)

De cela, le Droit connaît d'institution d'effacement d'une condamnation ; dans ces différentes institutions, nous allons plus nous pencher sur l'amnistie qui est une mesure de clémence ayant pour effet d'enlever rétroactivement à certains faits leurs caractères délictueux.

Pour consolider la paix fragile ou la démocratie naissante, la RDC a décidé de recourir à l'amnistie. Dans un tel contexte, l'amnistie est prise pour empêcher que les actes commis sous les contraintes de la guerre ou de tensions politiques ne soient poursuivis.

L'amnistie intervient donc pour faire disparaître l'élément légal de l'infraction. En effet, lorsqu'elle est accordée, l'amnistie revêt un caractère spécial : elle précise le type d'infraction ou type d'individus auxquels elle va profiter.

De tous les faits infractionnels, certains sont amnistiables ; d'autres ne le sont pas. Ainsi donc, les faits amnistiables sont les infractions politiques et les infractions de droit commun.

Eu égard à ce qui précède, il nous semble important de se poser quelques questions :

· Qu'entendre par l'amnistie en droit ? Quel rapport existe-t-il entre l'amnistie et d'autres notions voisines comme la grâce présidentielle, la prescription, l'abrogation d'une loi pénale et la réhabilitation ?

· Quelle expérience la RDC a-t-elle de l'amnistie ? Comment les différentes lois intervenues ont-elles contribué à consolider la paix souvent fragile dans ce pays ?

II. HYPOTHESES

Ø L'amnistie serait une mesure de clémence relevant de la compétence du pouvoir législatif dont bénéficieraient les criminels dans le but d'effacer rétroactivement le caractère infractionnel de leurs actes ou faits punis par la loi. Elle se rapprocherait d'autres notions voisines par le fait que toutes mettraient les auteurs des crimes à l'abri soit des poursuites, soit de l'exécution de la peine soit en remettant le criminel dans la situation légale et, si possible, sociale qu'il aurait perdu suite à une juste condamnation.

Ø La RDC dispose d'une riche expérience en matière de pratique d'amnistie comme instrument de recherche de la paix et de l'apaisement social. En ce qui concerne sa contribution dans la restauration de la paix en RDC, le débat reste ouvert car cela semble à ce jour moins évident.

III. INTERET DU SUJET

Ce travail présente un intérêt incontestable aussi bien sur le plan scientifique que sur le plan pédagogique. Il en est de même sur le plan social.

Sur le plan scientifique, cette étude nous amènera à faire une analyse de différentes lois d'amnisties qui ont été prises dans l'histoire législative de la RDC afin de voir à quel degré elles ont atteint leurs objectifs de consolider la paix. Nous tenterons dans une certaine mesure à faire des propositions concrètes afin que ceux qui ont déjà bénéficié de l'amnistie ne puissent encore recommencer les faits dont ils avaient été pardonnés dans le passé.

Sur le plan pédagogique, ce travail nous permettra d'approfondir les notions déjà acquises dans différentes branches du Droit, particulièrement le Droit pénal et le droit international lorsqu'il s'agit des crimes non amnistiables.

Sur le plan social par contre, cette étude trouvera sa pertinence et revêtira un intérêt indéniable car les rebelles bien qu'ayant bénéficié dans le passé du pardon de leurs faits infractionnels, commettent encore de nouvelles exactions dans l'espoir de bénéficier encore de l'amnistie, qui sera à notre avis une récompense de l'impunité.

IV. METHODOLOGIE

Pour mener à bien notre étude et de manière la plus rigoureuse possible, il sera impérieux d'adopter une démarche méthodologique bien appropriée. A cet effet, nous ferons usage des méthodes juridiques et la méthode sociologique.

La méthode juridique dans sa variante exégétique nous servira dans l'analyse et l'interprétation des textes juridiques mis à notre disposition, en l'occurrence ceux qui réglementent l'amnistie dans notre pays.

La méthode sociologique nous permettra de placer le sujet dans son contexte social afin de dégager l'effectivité et l'efficacité de différentes lois d'amnistie prises en RDC.

Pour appuyer ces méthodes, nous allons faire recours, dans ce travail, à la technique documentaire qui nous permettra de rabâcher les opinions des auteurs de droit sur les différentes questions que soulève la problématique du présent travail.

V. DELIMITATION DU SUJET

Dans le cadre de notre étude, nous nous limiterons à analyser l'amnistie comme moyen d'effacement d'une condamnation dans l'histoire législative de la RDC, les faits infractionnels couverts et non couverts par les différentes lois d'amnistie intervenues dans l'histoire législative de la RDC et son impact dans la consolidation de la paix. Dans le temps nous partirons du 20 Aout 1996 jusqu'à la date de promulgation de loi d'amnistie devant être accordée aux rebelles du M-23.

VI. SUBDIVISION SOMMAIRE

Hormis l'introduction et la conclusion, notre travail comprend deux chapitres qui parlent respectivement sur les notions générales de l'amnistie en droit (chapitre I.) et bilan et perspectives de la pratique d'amnistie en droit congolais (chapitre II).

CHAPITRE I. L'AMNISTIE EN DROIT CONGOLAIS

Nulle part réglementée, l'amnistie est un acte par lequel le pouvoir législatif, se fondant sur de raison politique générale, décide éventuellement l'effacement des condamnations prononcées. L'amnistie ne porte normalement pas atteinte au droit à l'indemnisation des victimes de l'infraction.2(*)

L'amnistie, on le sait, dépouille rétroactivement certains faits de leur caractère délictueux. Elle peut d'abord intervenir avant que la décision soit devenue irrévocable et entraine en ce cas des effets puissants : elle constitue en effet un obstacle à la qualification du fait. Elle peut aussi intervenir après que la condamnation soit devenue irrévocable. Ses effets sont alors moins énergiques : elle n'est qu'un obstacle partiel à l'exécution de la condamnation, une cause incomplète d'extinction de la sanction.3(*)

Ainsi donc, le concept « amnistie » vient du grec « amnestia »(privation) et « mnêstis» (souvenir) il s'agit ici d'un acte du pouvoir législatif prescrivant l'oubli officiel d'une ou plusieurs catégories d'infractions et annulant leurs conséquences pénales4(*)

L'amnistie est l'une des causes de l'impunité chez l'auteur de l'infraction. L'amnistie est une notion rependue au monde, et ce, à cause de son caractère libérateur. Cela signifie qu'étant accordée à un criminel, l'amnistie le libère de toute poursuite pénale si celles-ci avaient déjà été déclenchées, ainsi il n'exécute pas la peine lui infligée si le procès a été terminé. Aussi, si les poursuites pénales ne sont pas encore déclenchées, elles ne peuvent plus être engagées. Les faits ont bel et bien eu lieu mais ils sont censés n'avoir jamais été commis ou n'avoir été incriminés par la loi si bien qu'ils ont fait l'objet des poursuites et, ou même si leurs auteurs ont été condamnés.

Section 1. GENESE DE L'AMNISTIE

 Historiquement, l'amnistie était à l'origine du caractère « réel » c'est-à-dire qu'elle était dispensée en considération, non de la qualité et des mérites d'un délinquant, mais seulement en raison de la nature des infractions et de l'époque ou elles avaient été commises.

Ce pendant cette institution a évolué et à travers de nombreuses lois, à revêtir souvent un caractère « personnel » c'est-à-dire qu'au lieu qu'elle concerne telle infraction ou telle catégorie des personnes, telles que les anciens rebelles, les femmes5(*)

L'Amnistie a généralement pour objet d'apaiser les passions et les esprits après une crise politique. Comme son nom l'indique elle est une loi de l'oubli.

§1. NOTION ET CARACTERE DE L'AMNISTIE

L'amnistie est une mesure législative exceptionnelle qui dépouille rétroactivement de leur caractère délictueux certains faits6(*)

En guise de définition, l'amnistie peut être présentée comme une mesure d'oubli, une manifestation d'un pardon, consistant à retirer le caractère d'infraction à certains faits commis dans le passé. Ce qui était infraction ne l'est plus, comme si l'élément légal de l'infraction venait à disparaître, en sorte que la peine qui s'y attachait cesse de recevoir exécution et condamnation qui lui servait d'assises est réputée n'avoir jamais existé.7(*)

1°Objet de l'amnistie

L'Amnistie a généralement pour objet d'apaiser les passions et les esprits après une crise politique. Comme son nom l'indique elle est une loi de l'oubli (du grec a, privatif et mnaomai qui veut dire ; je me souviens).8(*)

C'est en effet, mettre les auteurs des infractions à l'abri des réactions des victimes de ladite crise au cours de laquelle, plusieurs atrocités ont été commises et ont entraîné beaucoup des dommages aux tiers. Les faits ont bel et bien eu lieu et constituaient des infractions, ils ne sont pas effacés, mais par l'amnistie, ils cessent d`être des infractions ; car ils sont considérés ; par la volonté du législateur, comme n'ayant jamais été commis. Car la société décide de les couvrir du voile du pardon et de le faire sombrer dans l'oubli.

En effet, non seulement comme la prescription et la grâce, l'amnistie dispose de l'exécution de la peine, arrête immédiatement les poursuites déjà déclenchées mais, elle supprime rétroactivement les caractères infractionnels des faits reprochés. Certes, il est à noter que l'amnistie n'obéit pas à un régime politique. Chaque loi d'amnistie qui du reste, est d'application immédiate et d'interprétation stricte, détermine son régime propre. Seules des circonstances peuvent être relevées quant au domaine d'application. Il convient essentiellement de remarquer que l'amnistie ne joue pas en principe à l'égard des mesures de sûreté9(*).

2° Caractère de l'Amnistie

L'amnistie étant une oeuvre du parlement, a comme caractère de ne plus considérer un fait jadis infractionnel en raison d'une réconciliation.

Ainsi donc, l'amnistie est considérée pour certains auteurs comme une loi qui assure l'impunité aux responsables des atrocités. L'amnistie est un prix lourd à payer pour ceux qui ont souffert parce qu'elle laisse impuni les auteurs des infractions ayant causé préjudice à autrui.

§2. LES CONDITIONS D'AMNISTIE

Contrairement aux lois relatives aux faits justificatifs qui disposent pour l'avenir, les lois d'amnistie ne sauraient effacer que les infractions passées.

Toutes les lois d'amnistie fixent en effet une date limite pour leur application ; cela étant, les conditions de l'amnistie ne sont pas toujours identiques.

Autrefois, l'amnistie n'était accordée que par le législateur lui-même et seulement pour certaines infractions précises ; elle peut aujourd'hui, être également donnée en fonction d'une qualité du délinquant ou de son comportement par les autorités autres que le législateur, qui joue un certain rôle.

On est ainsi amené à distinguer les conditions relatives aux infractions, aux délinquants et aux autorités habilitées à accorder l'amnistie10(*).

1. Les conditions relatives aux infractions

L'amnistie est souvent accordée pour certaines infractions déterminées.

a) Parfois, le législateur s'attache à la nature de l'infraction en énumérant celles qu'il amnistie. Il est alors fréquent qu'il exclue expressément certaines infractions qu'il considère comme particulièrement dangereuses pour l'ordre social.

La jurisprudence décide que l'infraction visée dans la loi d'amnistie reste amnistiée, même si elle est connexe à une autre infraction qui, elle n'est pas amnistiée.

b) D'autres fois, le législateur s'attache à la gravité de l'infraction servant le bénéfice de l'amnistie à celles qui sont sanctionnées d'une peine inférieure à certains taux.

2. Les conditions relatives au délinquant

Le législateur amnistiant s'attache tantôt à la qualité du délinquant, tantôt à son comportement postérieur à la loi.

a) La qualité du délinquant

Au lieu de lier l'amnistie à la commission de certaines infractions (amnistie réelle) le législateur peut s'attacher aux qualités propres à certain délinquant (amnistie personnelle), C'est le cas par exemple , lorsque le législateur prend en considération la qualité d'ancien combattant , de victimes de guerre, de déportés et de mineursau moment de l'infraction ; voir le fait de s'être distingué d'une manière exceptionnelle dans les domaines culturel ou scientifique 11(*)

Notons cependant que sur le plan de la politique législative, cette nouvelle forme d'amnistie est assez inquiétante car, on en devine de moins à moins les limites. Sur le plan de technique pénale, elle suscite des difficultés qu'il s'agit d'apprécier l'existence des qualités retenues.

Ce qui est sûr, en tout cas, est que l'amnistie réelle profite en effet à l'égard de tous les auteurs et complices de l'infraction tandis que l'amnistie personnelle ne profite qu'au bénéficiaire de la faveur du législateur12(*).

b) Le comportement du délinquant

Certaines lois d'amnistie subordonnent leur application à l'accomplissement par le délinquant d'obligation précise. Il peut s'agir soit du système du « pardon monnayé » par lequel, l'amnistie se subordonne au payement de l'amande par le délinquant et argent sera destiné au public ou soit la bonne conduite du délinquant déjà condamné au sursis avec mis a l'épreuve avant promulgation de l'amnistie.

3. Les autorités habilitées à accorder l'amnistie

La tradition libérale est favorable à une amnistie décidée par le pouvoir législatif, non par le chef de l'Etat. Compétant pour créer les qualifications pénales, le législateur est en même temps compétant pour les supprimer exceptionnellement. Aujourd'hui cependant, à côté d'une amnistie purement législative ne faisant intervenir que le parlement, il existe des formes d'amnistie où sont associés au pouvoir législatif, soit le pouvoir exécutif (grâce amnistiante) soit le pouvoir judiciaire (amnistie judiciaire).

a) La grâce amnistiante

Par la grâce amnistiante, le législateur réserve l'amnistie à des individus qui auront obtenu un décret de grâce pris par le pouvoir exécutif dans un délit déterminé. Elle peut émaner soit du chef de l'Etat soit aussi du chef du gouvernement.

Ces « amnisties par mesure individuelle » pour reprendre l'appellation adoptée par les lois d'amnistie, combinent les avantages de la grâce qui permet une grande individualisation, mais dont les effets sont limités, avec ceux de l'amnistie qui ne permet guère d'individualisation, mais dont les effets sont énergiques.

Notons que l'amnistie qui émane du chef du gouvernement est susceptible de recours en conseil d'Etat et celle qui émane du président de la République échappe à toute investigation juridictionnelle quant au contrôle de motif 13(*)

Il faut remarquer que la grâce amnistiante réserve au chef de l'Etat le pouvoir de faire bénéficier non seulement ceux qui ont été condamnés mais aussi ceux qui sont simplement poursuivis du moment qu'ils remplissent toutes les conditions posées par le législateur.

b) La grâce judiciaire

Certaines lois subordonnent l'amnistie à la peine effectivement prononcée par le juge. L'action publique peut être lancée et la disparition de la qualification dépend de la mansuétude du juge. Le législateur fixe un seuil en deçà de quel elle est accordée et au de-là duquel elle est refusée, dans ce cas le pardon est aussi à la discrétion du juge. C'est ainsi qu'en France par exemple l'art 7 de la loi du 3Août 1995 déclare « amnistiées les infractions commises avant le 18 mai 1995 qui sont ou seront punies à titre définitif, de peine d'emprisonnement inférieures ou égales à trois mois sans sursis... » C'est là une clause habituelle, seul le plafond variant selon les lois.14(*)

De toutes les formes d'amnistie, l'amnistie judiciaire est sans doute celle qui permet la meilleure individualisation.

§3. LES EFFETS DE L'AMNISTIE ET LEURS LIMITES

1° effets de l'amnistie 

L'amnistie dépouille rétroactivement certains faits de leurs caractères infractionnels. Comme nous l'avons signalé ci-haut ; les faits ont bel et bien eu lieu et constituaient des infractions. Ils ne sont pas effacés, mais par l'amnistie, ils cessent d'être des infractions car ils sont considérés par le législateur comme n'ayant jamais existé car la société décide de les couvrir du voile du pardon et de les faire sombrer dans l'oubli.

Ainsi donc, la loi d'amnistie peut intervenir d'abord, avant que la décision soit devenue irrévocable et entraine, en ce cas, des effets puissants. Elle peut en suite intervenir pendant que la justice examine ces faits ; dans ce cas, la juridiction qui instruit cette affaire doit rendre une décision de non-lieu. Et enfin, elle peut intervenir après que la décision de condamnation soit devenue irrévocable ; dans ce cas, ses effets sont alors moins énergiques ; elle n'est qu'un obstacle partiel à l'exécution de la condamnation, une cause incomplète d'extinction de la sanction.

Si les infractions amnistiées ne font pas encore l'objet de poursuite, celles-ci ne peuvent plus être engagées et si les poursuites sont en cours, elles cessent immédiatement, l'action publique s'éteint.

Si l'individu bénéficiaire de l'amnistie a déjà été condamné, la condamnation s'efface et si la peine est encours d'exécution, elle s'éteint immédiatement.

L'amnistie concerne les peines principales, complémentaires et accessoires. La condamnation ne peut donc figurer dans le casier judiciaire ni constituer un empêchement à l'octroi du sursis, ni être en considération pour la récidive ou la délinquance d'habitude. Pour se faire, un récidiviste apparaît, au-devant du juge, comme un délinquant d'habitude ou primaire.

La condamnation ne peut plus être rappelée, ni fondée ou justifiée une quelconque prétention en justice ou devant l'administration ni figurer dans un document quelconque.

L'effet extinctif de l'amnistie est d'ordre public, le tribunal doit l'appliquer d'office et l'intéressé, s'il n'a pas encore été jugé, ne peut refuser le bénéfice de l'amnistie ni demander à prouver son innocence, l'avons-nous dit, par contre, si la condamnation avait déjà été prononcée, la loi lui laisse toujours le pouvoir d'agir en révision.

2° Limitation à l'effet extinctif de la loi d'amnistie

Il existe plusieurs limites à l'effet extinctif de l'amnistie, dont on peut citer par exemple :

Ø Certaines de ces limites sont très raisonnables. Ainsi, la peine ayant été exécutée régulièrement, le condamné ne peut être indemnisé pour le temps passé en prison et il ne peut se faire rembourser l'amende qu'il avait acquittée. De même, l'amnistie n'entraine pas restitution des frais de justice payés par le condamné et ne le dispense pas toujours du payement de l'amende.

Ø L'amnistie n'empêche pas son bénéficiaire de former un pouvoir en révision qui, seul pourra lui permettre de faire établir son innocence. Cependant dès la promulgation de la loi, appel et pourvoi en cassation sont irrecevables en raison du caractère d'ordre public de l'amnistie.

Ø L'amnistie éteint l'action publique et non l'action civile : « l'amnistie ne peut porter atteinte aux droits des tiers » la victime d'une infraction amnistiée peut obtenir réparation en basant son action non sur l'infraction ou la condamnation, mais sur le fait.

Ø Elle ne peut donner droit aux dommages intérêts en faveur de l'amnistié qui a exécuté partiellement ou totalement la peine lui infligée.

Ø Elle ne s'applique pas aux mesures de sûreté. Cependant, cette exception est plus contestable. Ainsi une jurisprudence très ferme décide que l'amnistie n'entraîne pas remise des mesures de sûreté ordonnées à l'occasion de la condamnation désormais effacée.

Ø Le fait dommageable reste une faute quoi qu'il soit répété n'avoir jamais constitué une infraction.15(*)

Toutefois, l'action civile peut être éteinte exceptionnellement dans un intérêt national (général), c'est alors à l'Etat qu'il appartient d'indemniser les victimes 16(*)

Ø Les pouvoirs publics peuvent s'opposer à la nomination d'une personne en se basant sur des faits amnistiés ;

Ø L'amnistie des sanctions disciplinaires et professionnelles donne lieu à des solutions nuancées. le principe est que ces sanctions sont amnistiées et en pratique les lois d'amnistie le rappellent le plus souvent.

Cependant, il faut signaler qu'à ce sujet diverses limites se dessinent :

v La loi peut ne pas le prévoir ;

v La loi prévoit toujours l'exclusion de l'amnistie pour les faits constituant de manquement à la probité, aux bonnes moeurs ou à l'honneur ;

v L'amnistie n'ouvre pas droit à la réintégration pour les agents évincés de la fonction publique.17(*)

§4.LES SORTES DE L'AMNISTIE

L'amnistie peut revêtir plusieurs formes :

1° l'amnistie générale

L'amnistie est générale lorsqu'elle concerne tous les citoyens et toutes les personnes nationales ou étrangères ; auteurs, coauteurs ou complices, pour toutes les infractions commises sur le territoire national ou pour lesquelles les juridictions nationales sont compétentes.

2° l'amnistie réelle

Historiquement, l'amnistie était, à l'origine de caractère réel, « elle était dispensée en considération, non de la qualité et des mérites d'un délinquant, mais seulement en raison de la nature des infractions et de l'époque où elles avaient été commises »

Le législateur peut s'attacher à la nature des infractions amnistiées en donnant la qualification ou en les énumérant. Elle est accordée aux auteurs des infractions déterminées, énumérées dans la loi, sans qu'il ne soit tenu compte de la qualité des bénéficiaires.

Un premier exemple d'une amnistie réelle fondée sur la nature de l'infraction est donné par le décret-loi n° 017/2000 du 19 Février 2000 portant amnistie générale. Celle-ci est accordée à tous les congolais poursuivis ou condamnés pour atteinte à la sûreté intérieure ou extérieure de l'Etat.

Cependant, il faut relever la qualification inexacte de cette loi, car elle ne pouvait être générale alors qu'en même temps elle a visé des infractions spécifiques, à savoir les atteintes à la sûreté intérieure et extérieure de l'Etat, à l'exclusion de toute autre infraction18(*).

Le deuxième exemple est celui de l'Amnistie pour faits des guerre, infractions politiques ou d'opinion, accordée par la loi N° 05-023 du 19 décembre 2005 : « il est accordée une amnistie pour faits de guerre, infractions politiques et d'opinion à tous les congolais résident au pays ou à l'étranger, inculpés , poursuivis ou condamnés par une décision de la justice ».

Le législateur peut exclure expressément les infractions qui, a ses yeux, présentent un danger particulier au regard de l'ordre social : crimes de sang, atteintes aux moeurs ou à l'environnement, trafic de drogue, crime économique etc. C'est dans le même sens que l'art 3 de la loi du 19 décembre 2005 dispose expressément que « la présente loi d'amnistie ne concerne pas les crimes de guerre, les crimes de génocide et les crimes contre l'humanité ». Le législateur peut plutôt prendre en compte la gravité des infractions, et ne faire alors bénéfice de l'amnistie que les auteurs des infractions dont la peine est inférieure à tel taux déterminé. La loi d'amnistie peut déterminer l'époque des faits concernés par l'amnistie. Ainsi, la loi du 19 décembre 2005 précise que : « les faits amnistiés sont ceux commis pendant la période allant du 20Août 1996 au 30 juin 2003.

 

3° l'amnistie personnelle

Cependant, cette institution a évolué et à travers de nombreuses lois a revêtu souvent un caractère personnel. Elle est personnelle, lorsqu'elle est accordée à des auteurs coauteurs ou complices d'une infraction, non plus en vertu de la nature ou de la gravité de celle -ci, mais par la prise en compte de la classe des individus ou de la qualité particulière dont ils sont revêtus : femmes, mineurs d'âge, anciens combattants, anciens rebelles, mandateurs publics...

4° l'amnistie mixte

L'amnistie peut être mixte en ce sens que la loi la portant peut tenir compte à la fois de la nature de l'infraction commise (caractère réel) et de la qualité du délinquant (caractère personnel)

Tel fut le cas de la loi N° 74 /023 du 27 novembre 1974 promulguée par le président MOBUTU SESE SEKO et qui portait amnistie des commissaires d'Etat, commissaires des régions et des ambassadeurs, ainsi que leurs complices condamnés pour détournement des deniers publics.

5° L'amnistie conditionnelle

Le législateur peut soumettre l'octroi de l'amnistie à certaines conditions. Ainsi, le décret -loi N°17/2000 du 19 février 2000 portant amnistie générale a posé des conditions ci-après :

v Mettre fin immédiatement à tout acte portant atteinte à la sûreté de l'Etat ;

v Pour les personnes résidant à l'étranger, regagner le pays dans les délais de 60 jours à dater de l'entrée en vigueur du décret-loi ou se faire enregistré auprès de l'ambassade de la RDC dans le pays de résidence ;

v Pour ceux qui sont dans la rébellion, se faire enregistré auprès de l'autorité compétente sur le lieu d'entrée dans le territoire sous contrôle du gouvernement de salut public ; 

v Se conformer aux textes constitutionnels, législatifs et réglementaires en vigueur en République Démocratique du Congo.

6° l'amnistie d'ordre public

L'amnistie est d'ordre public et l'individu qui en est bénéficiaire ne peut y renoncer. Si les poursuites ont commencé, il ne peut exiger qu'elles aillent à leur terme afin que son innocence soit établie. L'amnistie judiciaire doit lui donner application d'office même si l'individu ne l'invoque pas.

SECTION II. AMNISTIE ET NOTIONS VOISINES

§1 .L'AMNISTIE ET LA GRACE

L'amnistie est une mesure de clémence relevant de la compétence du pouvoir législatif dont bénéficie le coupable d'une infraction, nous l'avons précisé ;

La grâce quant à elle, est aussi une mesure de clémence au profit d'un coupable « irrévocablement condamné » .Elle est l'oeuvre du chef de l'Etat, mieux du président de la République.

L'expression « coupable irrévocablement condamné » suscite une interrogation : peut-elle aussi (la grâce) intervenir avant les poursuites ? Les doctrinaires se font la guerre à cette question. Certains se basant à l'expression sus évoquée, estiment qu'elle ne peut pas intervenir avant que la condamnation n'intervienne, moins encore avant les poursuites. La culpabilité doit être établie dans le chef de l'auteur du crime et ainsi, la condamnation doit être prononcée.

Pour d'autres, la grâce peut intervenir même avant l'établissement de culpabilité parce qu'elle n'est pas trop éloignée de l'amnistie, qui peut à elle, intervenir à n'importe quel moment, même avant les poursuites.

De toutes les façons, nous ne pouvons pas être emporté par ce débat ; ces deux notions sont toutes des mesures de clémence qui produisent les mêmes effets juridiques.

§2. L'AMNISTIE ET L'IMPUNITE

La pratique relève que l'amnistie est une mesure de grâce précise, pour écarter les auteurs d'infractions à des poursuites et / ou à la condamnation, alors que l'impunité suppose, une liberté totale des criminels sans pour autant s'exposer à aucun risque.

Louis JOINET entend essentiellement la notion d'impunité comme une absence de sanction. Selon lui, elle est précisément « l'absence en droit ou en fait, de la mise en cause de la responsabilité pénale des auteurs des violations des droits de l'homme, ainsi que leur responsabilité civile, administrative ou disciplinaire, en ce qu'ils échappent à toute enquête tendant à permettre leur mise en accusation, leur arrestation, leur jugement, et, s'ils sont reconnus coupables, leur condamnation à des peines appropriées, y compris à réparer le préjudice subi par les victimes »19(*)

Toutefois, bon nombre des gens confondent ces deux notions dans la mesure où toutes deux épargnent le coupable à toute action judiciaire si elle n'a pas encore été engagée.

Certes, nous pouvons affirmer, sans risque d'être contredit que ces deux notions sont très différentes : l'amnistie suppose qu'au moins le coupable doit présenter des remords et repartir et que doit passer par l'instance judiciaire ; si l'amnistie ne lui est pas accordée ; la justice doit faire son travail ; elle est active.

L'impunité équivaut à l'absence de la justice, si pas une justice passive. Elle constitue un manquement à l'obligation qu'ont les Etats d'enquêter sur les violations, de prendre des mesures adéquates à l'égard de leurs auteurs notamment dans le domaine de la justice pour qu'ils soient poursuivis, jugés et enfin condamnés à des peines appropriées ; d'assurer aux victimes des voies de recours efficaces et la réparation du préjudice subi et de prendre toutes mesures nécessaires destinées à éviter le renouvellement de telles violations.

§3. L'AMNISTIE ET LA PRESCRIPTION

Comme l'amnistie, la grâce, la prescription est l'une des mesures ou causes d'extinction de l'action publique. Elle éteint aussi l'exécution de la peine. La prescription est un moyen d'acquérir ou de se libérer par un certain lapse de temps, et sous les conditions déterminées par la loi. Il s'agit d'un mode de libération des obligations ; c'est la prescription extinctive. La loi elle-même précise le terme au cours duquel l'infraction, l'action publique ou la peine sont prescrites. Il s'agit d'une prescription légale.

§4. L'AMNISTIE ET LA REHABILITATION

Contrairement à l'amnistie, la réhabilitation est le fait de rétablir dans une situation juridique antérieure en relevant des déchéances d'incapacité. Il s'agit d'une mesure prise par l'autorité judiciaire à la demande du condamné, en vue de remettre celui-ci dans la situation légale et, si possible, sociale qu'il avait perdue suite à une juste condamnation20(*).

La réhabilitation est loin d'être proche d'amnistie, elle n'efface les effets de la condamnation que pour l'avenir. C'est un encouragement à la bonne conduite du délinquant et vise la réinsertion sociale. Toutefois, après qu'elle soit accordée au bénéficiaire, la condamnation ne pourra plus figurer au casier judiciaire et n'empêche plus l'octroi du sursis.

Ainsi donc, La réhabilitation est accordée sous quelques conditions :

v La peine doit avoir été exécutée, remise en vertu du droit de grâce, ou être comme non avenue par suite de sursis.

v Le requérant doit s'être acquitté des restitutions, dommages- intérêts et frais auxquels avait été condamné. En cas de totalité ou d'une partie de ces obligations, sans que toute fois préjudice ne soit porté aux droits des créanciers ;

v Cinq ans doivent être écoulés depuis l'instruction de la peine ou depuis la condamnation conditionnelle ;

v Pendant ce temps, le condamné doit avoir fait preuve de bonne conduite et avoir une résidence certaine ;

v Le condamné ne doit avoir jamais bénéficié au paravent d'une mesure de réhabilitation.

§5. L'AMNISTIE ET L'ABROGATION DE LA LOI PENALE

Eu égard à ce qu'elles apportent en faveur du bénéficiaire, ces deux notions présentent quelques ressemblances : amnistie n'éteint l'action publique qu'à l'égard des destinés de la loi d'amnistie (autres de l'infraction amnistiée) et non à l'égard des coauteurs et complices selon que la loi a été votée.

Comme l'amnistie, l'abrogation de la loi pénale supprime aussi le préalable légal de l'infraction.

En principe, la loi applicable à l'infraction est celle qui était en vigueur au jour de sa commission. Toutefois, le principe de non rétroactivité des lois pénales est assorti des exceptions : « les lois les plus douces rétroagissent » tel est le cas de celles qui ôtent à un fait son caractère délictueux. Les poursuites deviennent donc impossibles si elles n'avaient pas encore commencées. Elles s'arrêtent aussi si l'action publique avait déjà été déclenchée.

CHAPITRE II. ANALYSE DES LEGISLATIONS CONGOALISES EN MATIERE D'AMNISTIE

SECTION I. ETAT DU DROIT POSITIF CONGOLAIS EN MATIERE D'AMNISTIE

Le recours à l'amnistie est toujours déterminé par des considérations politiques. C'est un moyen de gouvernement tendant à l'apaisement par la suppression de répression des infractions commises dans des périodes particulièrement difficiles. A cet égard, la loi d'amnistie est avant tout une loi de circonstance.21(*)

Cependant, le législateur précise toujours que la loi d'amnistie sera applicable qu'aux faits antérieurs à une certaine date. Par ailleurs, l'amnistie est souvent accordée pour certaines infractions déterminées. Parfois, le législateur s'attache à la nature de l'infraction, en énumérant celles qu'il amnistie. Il est alors fréquent qu'il exclut expressément certaines infractions qu'il considère comme particulièrement dangereuses pour l'ordre social.

§1. CONTEXTE SOCIO POLITIQUE DES PROMULGATIONS DES DIFFERENTES LOIS D'AMNISTIE EN RDC

A. DECRET LOI N°03-001 DU 15 AVRIL 2003

1. Conflits armes : 1998-2002

La rupture du nouveau Chef de l'État congolais Laurent-Désiré Kabila avec ses alliés rwandais dans le but de s'affranchir de leur tutelle sera à l'origine des nouveaux conflits armés en RDC du 2 août 1998 au 17 décembre 2002. Il s'en suivra un bilan lourd pour la RDC avec des conséquences avérées, dont :

· la multiplication des mouvements politico-militaires encadrés par des soldats et officiers provenant de certains pays voisins dont le Rwanda, l'Ouganda et le Burundi ;

· la présence des forces d'intervention étrangères de l'Angola, du Zimbabwe et de la Namibie qui interviendront en RDC sous des motivations diverses dont l'accès aux richesses minières, le positionnement géostratégique, ou la sécurité de leurs frontières ;

· la partition du pays en zones contrôlées (a) par les forces gouvernementales et ses alliées, (b) par le RCD et son allié le Rwanda, (c) par le MLC et son allié l'Ouganda, (d) les groupes provenant de l'émiettement du RCD et leurs alliés du Rwanda ou de l'Ouganda dont le RCD-ML, le RCD-National, le RCD-Congo, et le RCD-K ;

· l'affrontement sur le sol congolais des troupes rwandaises et ougandaises pour le contrôle de l'accès aux ressources minières ;

· la mort d'entre 3 200 000 et 4 200 000 personnes, en plus du déplacement d'environ 1 457 000 personnes 22(*);

· la constitution et le déploiement en RDC de la force de la Mission des Nations-Unies au Congo (MONUC) ;

· l'assassinat du nouveau Chef de l'État congolais Laurent-Désiré Kabila.

· l'arrivée au pouvoir d'un nouveau Chef d'État, Joseph Kabila, par des voies autres que les élections.

Ces conflits ont amené à des négociations entre belligérants (groupes armés et gouvernement de la RDC) pour le partage du pouvoir. La société civile et l'opposition non armée ont participé à titre d'invité.

2. Dialogue Inter-Congolais de Sun City (février à décembre 2002)

Le DIC s'est tenu à Sun City (Afrique du Sud) du 25 février au 17 décembre 2002. Les germes de ce dialogue se retrouvent dans les conflits armés qui secouent la RDC durant la période allant de 1998 à 2002 dont une brève description est présentée ci-dessus. Les facteurs de mobilisation interne, dont les appels lancés par des organisations de la société civile et les chefs des confessions religieuses pour un dialogue réunissant les acteurs impliqués dans les conflits armés recevront l'aval du président Laurent-Désiré Kabila pour l'organisation d'une consultation nationale.

Il y aura aussi plusieurs tentatives de médiation, parrainées par l'extérieur, pour résoudre la crise congolaise, s'étant échelonnées de 1998 à 200123(*).

Les principaux acteurs au DIC sont le gouvernement de la RDC, l'opposition armée (MLC, RCD et ses variantes), la société civile/forces vives (Églises et ONG), l'opposition politique non armée (UDPS, FONUS, MPR-fait privé, et personnalités invitées), et finalement le Bureau de facilitation qui sera entièrement entre les mains des pays étrangers. L'organisation de ces assises fut entièrement financée par l'extérieur à travers une conférence de bailleurs de fonds. Le DIC sera structuré autour des organes suivants : les séances plénières (l'organe de décision par consensus), les commissions (5 au total et toutes présidées par l'extérieur), les sous-commissions, et les comités ad-hoc. Sa structure organisationnelle a prévu aussi, en plus de la direction et les services de facilitation, les observateurs ne prenant part aux débats (Nations Unies, Union Africaine, Union Européenne, Zambie et l'Afrique du Sud) et des experts n'assistant pas aux séances (BERCI, IDPGL, NDI, IFES). Un total de 367 délégués participera au DIC. Les protagonistes-clés (MLC, RDC-Goma, opposition politique non armée, le gouvernement) auront chacun 68 délégués. L'opposition non armée en comptera 71 et les autres se répartiront le reste.

Il en résultera, après des multiples trajectoires, un accord global et inclusif qui sera signé le 21 avril 2003 par tous les délégués et dotera la RDC d'un agenda devant permettre la fin des hostilités, le retour à l'ordre constitutionnel normal, la création d'une Armée républicaine par l'intégration des forces belligérantes, la réconciliation nationale, la réunification de l'administration, l'organisation des élections et la mise en place des institutions de la transition dont un gouvernement et un parlement24(*). La finalité de ces assises aura été :

Ø le partage des pouvoirs pendant la période de transition, avec une part importante réservée à l'opposition armée, au sein du gouvernement, du parlement (Assemblée nationale et Sénat), des administrations provinciales et locales, et les entreprises publiques ;

Ø la création des institutions politiques de transition, dont des institutions d'appui à la démocratie ;

Ø la création d'un comité international d'accompagnement de la transition (CIAT) composé, en plus de la MONUC, des cinq pays membres permanents du conseil de sécurité, de la Belgique, du Canada, de l'Afrique du Sud, de l'Angola, du Gabon, du Mozambique, de la Zambie, et de la commission européenne;

Ø d'une Commission de suivi de l'Accord ;

Ø le vote d'une constitution définitive ;

Ø l'organisation des élections présidentielle et législative en 2006 ;

Ø la pacification et la réunification du pays où une paix relative entre les belligérants sera observée en dépit de quelques soubresauts. Mais, cela ne saura pas durer comme en témoigne les violences qui surviendront après le deuxième tour des élections et plus tard l'émergence d'autres conflits armés.

3. Amnistie provisoire suite à l'accord global et inclusif de 2002

Suite à l'accord global inclusif de 2002, il a été promulgué un décret-loi n°03-001 du 15 avril 2003 accordant une amnistie provisoire pour les faits des guerres et les infractions politiques et d'opinions.

Le parlement de la transition adoptera par la suite la loi n° 05-023 du 19 décembre 2005 en abrogation du présent décret.

B. LA LOI N° 05-023 DU 19 DECEMBRE 2005

Adoptée par le parlement de transition pour abroger le décret présidentiel de 2003, elle a repris les crimes énumérés dans le décret précité mais a étendu la période : du 20 août 1996 au 20 juin 2003. Cette loi de 2005 qui vient élargir le champ temporel des faits couverts par l'amnistie, nous poussera avant d'en faire une analyse minutieuse ; de parler du conflit armé de 1996 jusqu'en 1997.

4. Conflit arme : 1996-1997

Une révolte déclenchée dans le Kivu par une catégorie particulière des Tutsis du Zaïre 25(*) qui s'est muée ensuite en une rébellion contre la dictature de Mobutu est à l'origine du conflit armé que connaitra ce pays du 17 avril 1996 au 17 mai 1997.

Les principaux animateurs de cette rébellion seront regroupés au sein d'un mouvement hétéroclite dénommé l'Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo, comprenant des Tutsis zaïrois et des opposants au régime de Mobutu, mais qui seront en soi actionnés par de nombreux alliés dont le Rwanda, l'Ouganda et l'Angola qui mettront leurs troupes dans cette lutte sous divers prétextes. Notamment l'exemple de poursuite des refugiés hutus ou le démantèlement des bases arrières des rebelles ougandais pour contenir leur menace d'insécurité) en plus d'en assurer le commandement des opérations militaires.

Il s'en suivra un bilan lourd pour la RDC avec des conséquences avérées, dont (liste non exhaustive) :

- le déversement par le Rwanda de sa population en contrôlant sinon en occupant une partie de l'Est du Zaïre, et l'accès à ses richesses26(*) ;

- le déversement par l'Ouganda d'une partie de ses troupes dans la partie orientale de la RDC pour assurer l'accès aux richesses ;

- la fin de la dictature de Mobutu et l'avènement au pouvoir de Laurent-Désiré Kabila ;

- la suspension par le nouveau régime des acquis de la période de transition amorcée au début de 1990 et de ses institutions ;

- l'infiltration des institutions de l'État par des personnes n'ayant pas la nationalité congolaise ou d'autres ayant combattu dans les forces armées des pays alliés dont le Rwanda et l'Ouganda.

- la mort et les déplacements internes de près de 260 000 et 350 000 personnes, respectivement27(*) ;

Ce conflit a été résorbé par voie militaire, et ce, après l'échec des négociations entre les belligérants pour le partage de pouvoir et la gestion de la transition.

5. La loi d'amnistie de 2005

La loi N° 05-023 du 19 décembre 2005 accorde une amnistie pour faits de guerre, infractions politiques et d'opinion à tous les congolais résident au pays ou à l'étranger, inculpés, poursuivis ou condamnés par une décision de la justice. 

C.  LA LOI N°09/003 DU 07 MAI 2009

6. Conflits armes : 2008 a 2009

La dissidence de certains anciens officiers supérieurs du RCD qui avaient refusé de rejoindre leur affectation au sein du commandement des FARDC à Kinshasa, va servir fermement à un nouveau conflit armé dans la province du Nord-Kivu, du mois d'août 2008 jusqu'en janvier 2009, qui opposera le mouvement politico-militaire du Congrès National pour la Défense du Peuple (CNDP) soutenu par le Rwanda et les troupes de l'armée congolaise ainsi que leurs alliés locaux.

Ce conflit a conduit à un accord négocié entre le gouvernement de la RDC et le Rwanda, le parrain du CNDP dont le bilan comprend 28(*):

- la promesse d'impunités des personnes qui continuent à semer la désolation auprès de la population du Kivu ;

- le brassage des membres du CNDP au sein des FARDC sans aucun mécanisme d'identification au préalable des militaires concernés ou leur affectation ailleurs dans le territoire de la RDC ;

- l'entrée massive des troupes rwandaises dans l'Est du Congo, sans un recensement officiel, pour y conduire des interventions mixtes avec les forces gouvernementales.

7. Conférence sur la paix, la sécurité et le développement dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu (6 au 23 janvier 2008)

La conférence de paix a été convoquée à la suite de l'émergence des conflits armés brièvement présentés ci haut. Le Chef de l'État de la RDC, Mr. Joseph Kabila suite à l'échec de son option militaire optera pour une option politique en signant une ordonnance portant convocation de ladite conférence afin de réfléchir sur les voies et moyens d'une paix durable et d'un développement intégral dans les Kivu29(*). La conférence, entièrement financée par le gouvernement congolais, sera organisée du 6 au 23 janvier 2008, sous la facilitation intérieure et connaîtra la participation de 1300 délégués (500 prévus au départ) dont des représentants des groupes armés (CNDP, PARECO et autres), des communautés ethniques et des personnalités politiques originaires de l'Est du Congo. La conférence sera structurée autour d'un président, d'un comité des sages et d'un panel des modérateurs, d'une plénière et des ateliers.

Il en résultera un acte d'engagement signé par les représentants du gouvernement, des groupes armés, de la communauté internationale.

Des engagements divers seront pris par les protagonistes, notamment un cessez-le-feu immédiat, le brassage militaire ou le désarmement et réintégration dans la vie civile, la facilitation du retour des refugiés et des personnes déplacées, la création d'une zone démilitarisée et l'abstention à soutenir des groupes armés nationaux ou étrangers, présentation et promulgation d'une loi d'amnistie pour faits de guerre et insurrectionnels.

Il en résultera aussi un programme national, de sécurisation, pacification, stabilisation et reconstruction des provinces du Nord-Kivu et Sud-Kivu : le Programme «  Amani ou Amani  leo » en swahili qui signifie Paix Immédiate. Ce programme fut soutenu et financé par la Communauté internationale après la tenue de la conférence de Goma. Il avait pour mission de faire cesser les hostilités, faciliter le désengagement sur les lignes de front, faciliter l'intégration des éléments armés et rétablir l'autorité de l'État afin de permettre le retour des déplacés internes et autres réfugiés dans leurs localités d'origine. Le 28 Octobre 2008, le coordonnateur adjoint d'Amani avait démissionné ne croyant plus que le programme atteindra ses objectifs. Le 20 aout 2009, le Chef de l'État de la RDC créa un autre programme dénommé STAREC (stabilisation et Reconstruction) pour remplacer Amani, auquel il a assigné trois volets : la sécurité, l'humanitaire et l'économie.

La transition entre les deux programmes n'était pas bien assurée, engendrant ainsi des malaises parmi certains signataires. Le peu de succès récolté par STAREC a conduit à son association avec l'ISSSS (International Support. Stabilisation, Security and Strategy). Malgré cela, la paix et la sécurité se sont toujours avérées sans évidence pour les populations de l'Est de la RDC. L'échec de la coordination des efforts des uns et des autres entre les initiateurs et la divergence des intérêts politiques et économiques des bailleurs de fonds de STAREC et ISSSS finirent par prendre le dessus. Le retour de la guerre en 2012 est une indication que les deux plans ont échoué d'atteindre leurs objectifs. L'Est de la RDC demeure dans l'insécurité et même plus qu'il était avant les deux plans. Le nombre des déplacés internes supposés réintégrer leurs demeures ou villages ou villes afflue davantage. Leurs conditions socioéconomiques et celles de l'Est de la RDC sont vulnérables et ne laissent pas croire qu'elles vont s'améliorer aussitôt.

8. Accords du 23 mars 2009 avec le CNDP

Les accords de paix du 23 mars 2009 ont été élaborés par le gouvernement de la RDC et le CNDP d'une part et, d'autre part, avec différents autres groupes armés du Nord et du Sud Kivu. Ils sont le résultat de longues négociations menées tour à tour à Nairobi et à Goma. Ils ont été signés sous la double facilitation de Son Excellence OLUSEGUN OBASANJO, envoyé spécial du Secrétaire Général des Nations-Unies pour la région des Grands Lacs et Mr Benjamin MKAPA pour le compte de l'Union Africaine (UA) et de la Conférence Internationale pour la Région des Grands Lacs (CIRGL). Ces deux personnalités qui sont, respectivement, d'ex-présidents de la république fédérale du Nigéria et de la république-unie de Tanzanie, ont apposé leurs signatures sur ce document en tant que témoins et constituent jusqu'à ce jour, la facilitation internationale.

Les accords du 23 mars comportent 16 articles articulés autour des principaux points suivants:

· la transformation du CNDP en parti politique ;

· la libération des prisonniers politiques ;

· la promulgation d'une loi d'amnistie couvrant la période allant de 2003 jusqu'à la signature des accords ;

· la mise en place d'un mécanisme national de réconciliation et des comités locaux de conciliation ;

· la création d'une police de proximité ;

· le classement des provinces du Nord et Sud-Kivu en zone sinistrée ;

· l'éradication du phénomène FDLR ;

· le retour des réfugiés et déplacés internes.

· D'autres questions concernent la réhabilitation des députés provinciaux proches du CNDP qui avaient été invalidés, l'insertion des cadres administratifs qui avaient rejoint le CNDP, la gestion du contentieux relatif aux biens spoliés, la prise en charge par le gouvernement des blessés de guerre, des veuves et orphelins d'ex-éléments CNDP, la mise en place des mécanismes efficaces de bonne gouvernance y compris celui de la certification, de l'exploitation, de l'évaluation et du contrôle des ressources naturelles.

9. La loi d'amnistie de 2009

Les accords de Goma de janvier 2008 avaient recommandé l'adoption d'une loi d'amnistie, ce qui avait été fait par l'Assemblée nationale congolaise qui a adopté un projet de loi le 12 juillet 2008. Mais sur terrain les combats ont repris avant que le Sénat n'ait pu l'examiner à son tour. L'accord du 23 mars 2009 entre le gouvernement congolais et le CNDP a de nouveau appelé à l'adoption rapide d'une loi d'amnistie. Cependant, le même texte de loi n'a pas pu être adopté par le Sénat. En effet, plusieurs sénateurs de l'opposition notamment l'ont rejeté, l'accusant d'être discriminatoire, tant sur le plan du contenu que sur le plan géographique. Finalement, le 5 mai 2009, à la suite d'une procédure quelque peu discutable, le Parlement a adopté la loi d'amnistie sur base du rapport de la commission mixte paritaire, loi qui a été par la suite promulguée par le Président Kabila le 7 Mai 2009.

D. LA LOI D`AMNISTIE DU 11 FEVRIER 2014

1. Conflits armes : 2012...

La défection des FARDC de quelques anciens éléments du CNDP déplorant leurs conditions de travail et l'absence de la volonté du pouvoir de Kinshasa d'appliquer de l'entente négocié par le CNDP est à l'origine des conflits armés dans la province du Nord-Kivu depuis le mois d'avril 2012 entre les troupes gouvernementales et le M23. Ce dernier est un mouvement politico-militaire qui, selon le rapport S/2012/843 daté du novembre 2012 d'un groupe d'experts des Nations Unies sur la RDC, est directement sous la tutelle du Rwanda. Selon ce rapport, les éléments du M23 sont recrutés par le Rwanda qui les forment sur son territoire, les organisent et les transportent ensuite en RDC où ils continuent de bénéficier des conseils et d'un appui matériel. Le M23 reçoit aussi un support logistique des officiers de l'Ouganda. Le bilan de ce conflit comprend (liste non exhaustive) :

- l'occupation d'une partie du territoire national congolais depuis juillet 2012 avec le soutien du Rwanda et de l'Ouganda ;

- l'occupation de la ville de Goma pendant plusieurs jours qui s'est soldée par le dépouillement, à titre de butin de guerre, du parc roulant et des actifs mobiliers de l'administration publique ainsi que des réserves monétaires des banques ;

- les violations des droits humains, le pillage des ressources naturelles et des massacres des populations civiles ;

- des exécutions extrajudiciaires, des viols des femmes et enfants.

Ces conflits ont amené à des concertations entre belligérants (groupes armés et gouvernement de la RDC) sous les auspices du Président en exercice de la CIRGL (assumé par l'Ouganda, un parrain avéré du M23) pour un compromis politique.

1. Négociations Gouvernement - M23

Les négociations entre le gouvernement congolais et le groupe rebelle du M23 ont été sanctionnées par le Sommet des Chefs d'État et de Gouvernement de la CIRGL qui s'est tenu en date du 24 novembre 2012 en Ouganda sur la situation sécuritaire dans l'Est de la RDC. Ce sommet s'est ouvert après l'échec de l'option militaire et la chute de la ville de Goma le 20 novembre 2012 entre les mains des éléments du M23. Ces négociations sont ainsi tenues sous les auspices de la CIRGL et la facilitation de son président en exercice, Monsieur Yoweri Kaguta Museveni, président de l'Ouganda. Entamées, depuis le 6 décembre, ces négociations ont pris fin et s'articulent autour des points tels que l'évaluation des accords du 23 mars 2009 signés avec le CNDP ; les questions politiques, sociales et économiques ; et le mécanisme de suivi. D'une manière générale, ces négociations sont dénoncées par une partie de l'opinion nationale à travers les parties politiques d'opposition et des organisations de la société civile. Elles souffrent, à leur avis, de manque de crédibilité au regard de sa facilitation qui est assumée par Monsieur Yoweri Kaguta Museveni, président de l'Ouganda, identifié dans le rapport de l'ONU, comme l'un des parrains du groupe rebelle de M23 avec son homologue Paul Kagame du Rwanda.

2. La loi d'amnistie de 2014

Une loi d'amnistie pour faits de guerre, faits insurrectionnels et infractions politiques destinée aux combattants de groupes rebelles notamment du M23 a été adoptée le mardi 4 février par l'Assemblée nationale et promulguée par le président Joseph KABILA le 11 février 2014.

§2. PARTICULARITES ET PORTEE JURIDIQUE DES DIFFERENTES LOIS D'AMNISTIE

L'histoire législative congolaise en matière d'amnistie est marquée par les différents textes pris dans différentes périodes résumées comme suit :

I. Décret Loi N°03-001 du 15 avril 2003accorde une amnistie provisoire suite à l'Accord Global et Inclusif de 2002 pour les faits de guerre et les infractions politiques et d'opinion.

II. Loi N°05/023 du 19 décembre 2005adoptée par le parlement de transition pour abroger le décret présidentiel de 2003, elle a repris les crimes énumérés dans le décret précité mais a étendu la période : du 20 août 1996 au 20 juin 2003.

III. la loi n°09/003 du 7 mai 2009 portant amnistie pour faits de guerres et insurrectionnels commis dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu pendant la période allant du mois de juin 2003 au 07 Mai 2009.

IV. La loi d'amnistie de2014 pour faits insurrectionnels, faits de guerre et infractions politiques couvrant la période du 1er janvier 2006 jusqu'au 20 décembre 2013.

Contrairement aux précédentes lois d'amnistie, la loi de 2014 n'accorde pas une amnistie collective. Elle exige aux bénéficiaires de s'engager personnellement sur l'honneur et par écrit pour pouvoir en bénéficier. Cette importante loi va contribuer à la matérialisation de la cohésion nationale, en vue de la consolidation de la paix en RDC.

Votée en des termes non identiques par l'assemblée nationale et sénat, et promulguée par le Chef de l'Etat, cette loi a retenu la période allant du 1er janvier 2006 au 20 décembre 2013 ; une période pris en compte par rapport a l'objectif de la cohésion nationale, de la nature des faits amnistiés et de la portée générale de la loi d'amnistie du 19 décembre 2005, contrairement à celle du 07 Mai 2009 limitée aux faits insurrectionnels commis dans les provinces du Nord et Sud-Kivu.

Outre les deux autres lois d'amnistie élaborées dans les contextes de la guerre, de l'accord de Sun City, mais aussi dans un contexte post conflit et de la cohésion nationale, celle-ci a une particularité par rapport aux autres en ce que la personne éligible doit s'engager par un acte d'engagement de ne plus récidiver. Au cas contraire, il lui sera retiré le bénéfice de cette loi. En cas de violation, celle-ci entraîne l'ouverture et la réouverture des charges antérieures et annule à cet effet son bénéfice à la loi d'amnistie.

Il sied dès lors d'examiner les différentes infractions amnistiables prévues par les lois de 2009 et 2014 ; et d'en analyser les définitions pour en dégager les similitudes et les dissemblances.

A. LES DISSEMBLANCES ENTRE LA LOI D'AMNISTIE 2009 ET CELLE DE 2014

Chaque loi d'amnistie définit son champ d'application en précisant les infractions amnistiables ainsi que les conditions aux quelles l'amnistie est soumise.Nous estimons que le point de divergence entre les deux lois sous examen résiderait au niveau des infractions. Ainsi, par rapport aux faits insurrectionnels, l'article 2 al.2 de la loi de 2009 entend par faits insurrectionnels tout acte de violence collective de nature à mettre en péril les institutions de la République ou à porter atteinte à l'intégrité du territoire national. L'article 3 de la loi sur l'amnistie de 2014quant à lui entend par faits insurrectionnels tous les actes de violence collective commis à l'aide de violence ou des armes dans le but de se révolter contre l'autorité établie en vue d'exprimer une revendication ou un mécontentement.

Comme on le remarque, la loi de 2014 étend les faits insurrectionnels non seulement aux actes de violence collective mais aussi aux armes utilisées dans le but d'exprimer une revendication ou un mécontentement contrairement à la loi de 2009.

L'incrimination de mouvement insurrectionnel est une innovation en droit militaire, même si dans son ensemble, le droit positif congolais n'en est point à sa première expérience.

Le mouvement insurrectionnel constitue une des manifestations attentatoires à la sûreté d'un Etat, découlant d'une série d'actes visant à perturber l'ordre public et à menacer l'autorité établie. A cet effet, chaque entité étatique prévoit des mécanismes conséquents pour parer à tout débordement et sauvegarder, à travers des normes légales, son autorité ainsi que l'ordre, la sécurité et la tranquillité sur toute l'étendue du territoire national.30(*)

Le mouvement insurrectionnel est incriminé en droit militaire. Ainsi par exemple, l'art. 136 du code pénal militaire dispose : « Constitue un mouvement insurrectionnel, toute violence collective de nature à mettre en péril les institutions de la République ou à porter atteinte à l'intégrité du territoire. »

Par rapport aux faits de guerres, la loi de 2009 entend par faits de guerres, les actes inhérents aux opérations militaires autorisées par les lois et coutumes de guerres qui, à l'occasion de la guerre, ont causé un dommage à autrui.31(*) La loi sur l'amnistie de 2014 entend quant à lui par fait de guerre, les actes inhérents aux opérations militaires et conformes aux lois et coutumes de guerres qui, à l'occasion d'un conflit armé, ont causé un dommage à autrui.

Le législateur de 2009 parle de « à l'occasion de la guerre », contrairement au législateur de 2014 qui parle lui de « à l'occasion d'un conflit armé ».

Nous pensons que le législateur de 2009 faisait référence au droit de la guerre qui est une expression pour designer les lois, en général coutumières, sur lesquelles s'entendent les peuples ennemis lorsqu'ils sont en guerre. La loi de 2014 fait référence au conflit armé en se fondant sur la décision du tribunal pénal international pour l'ex Yougoslavie (TPIY) qui a apporté la première définition claire d'un conflit armé, lors de l'affaire Tadic. Le TPIY estimait alors qu'un « conflit armé existe chaque fois qu'il ya recours à la force armée entre Etats ou un conflit armé prolongé entre les autorités gouvernementales et des groupes armés organisés ou entre de tels groupes au sein d'un Etat. »

Par rapport aux infractions politiques, la loi de 2009 est muette à ce sujet contrairement à la loi de 2014 qui les consacre. 

B. LES RESSEMBLANCES ENTRE LES DIFFERENTES LOIS D'AMNISTIE

Au terme de toutes ces lois d'amnistie, ne sont pas amnistiables : les crimes de guerres ; les crimes de génocide et les crimes contre l'humanité. Toutes ces lois consacrent également le principe selon lequel « dans aucun cas l'amnistie ne pourra être opposée aux droits des tiers ». C'est-à-dire que l'amnistie n'éteint pas l'action civile de la victime.

1. Les crimes non amnistiables.
a. Les crimes de guerre.

Notion centrale du jus in bello par opposition au jus ad bellum ; le crime de guerre est l'ensemble des agissements qui méconnaissent les lois et coutumes de guerre32(*). Actuellement, des efforts internationaux déployés pour prohiber certains comportements contraires à ces lois et coutumes se sont concrétisés à partir essentiellement de la seconde moitié du 19ème siècle avant de trouver un premier couronnement dans les Conventions de la Haye de 1849 et de 1907 et un second dans le statut du Tribunal de Nuremberg (art.6.b). Dès Nuremberg, on a trouvé que les lois et les coutumes de la guerre s'étaient cristallisées en droit coutumier.33(*)

Une autre définition nous est donnée par le Statut de la Cour Pénale Internationale :«les crimes de guerre incluent notamment les violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés34(*) ,...».

Le droit de la guerre allait ensuite connaitre un développement considérable sous l'impulsion du Comité International de la Croix Rouge (CICR) avec les quatre conventions de Genève du 2 Août 1949, apportant la démonstration que la distinction entre les lois et les coutumes de guerre et droit international humanitaire étaient moins absolus qu'on ne le pensait.

Ces conventions de Genève forment donc une sorte de code du crime de guerre sans que d'ailleurs le mot soit utilisé par elles35(*), il sera employé plus tard, par l'art.85 du Protocole Additionnel du 08 juin 197736(*).

Pour donner un aperçu du contenu de ces Conventions, on dira que l'art 3 commun au quatre Conventions de Genève pose un certain nombre des dispositions minimales applicables aux conflits armés.

Se trouvent ainsi prohibés, en tout temps et en tout lieu, à l'égard des personnes protégées par chaque instrument 37(*):

a. Les atteintes portées à la vie et l'intégrité corporelle notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations, les traitements inhumains, les tortures et supplices,

b. Les prises d'otages,

c. Les atteintes à la dignité des personnes notamment les traitements humiliants,...

C'est sur base de ces définitions que les Etats ont à leur tour, par le biais du législateur, défini ces crimes en droit interne. S'agissant de la R.D.C, depuis le code de justice militaire de 1972, le crime de guerre y était défini comme «toutes les infractions aux lois du Zaïre qui ne sont pas justifiées par les lois et coutumes de la guerre»38(*).

Il s'agissait d'une définition conforme à l'Accord de Londres du 08 Août 1945 qui le définissait comme «des violations des lois et coutumes de guerre39(*)».

Par contre, le code pénal militaire congolais de 2002 le définit comme «toutes infractions aux lois de la République commises pendant la guerre et qui ne sont pas justifiées par les lois et coutumes de la guerre40(*).

Contrairement à l'ordonnance de 1972, la nouvelle loi innove en précisant que les infractions doivent être commises pendant la guerre. Elle rencontre donc clairement le principe de la légalité et de l'incrimination précise41(*).

L'amnistie qui empêche le déclenchement de l'action publique contre des crimes de guerre, connus aussi sous l'appellation d'atteintes flagrantes au droit international humanitaire, commises pendant des conflits armés internationaux ou non internationaux, est incompatible avec les obligations contractées par les États au titre des Conventions de Genève de 1949 et de leurs Protocoles additionnels de 1977 qui ont fait l'objet d'une large ratification, et peut aussi violer le droit international coutumier.

Les crimes de guerre sont des violations graves du droit de la guerre, connu aussi sous le nom de droit international humanitaire. Il s'agit du corps de règles de droit international qui régit la conduite des conflits armés internationaux et non internationaux. Selon le droit de la guerre, certaines violations sont d'une gravité telle qu'elles engagent la responsabilité pénale des personnes au niveau national comme au niveau international. Les crimes de guerre s'étendent en général aux violations flagrantes du droit de la guerre, lequel vise à protéger les personnes qui ne prennent pas ou plus part aux hostilités, et des règles qui limitent les moyens et méthodes de guerre.

Les Conventions de Genève font de certaines violations des infractions graves et exigent des Hautes Parties contractantes qu'elles prennent «toute mesure législative nécessaire pour fixer les sanctions pénales adéquates à appliquer aux personnes ayant commis, ou donné l'ordre de commettre, l'une ou l'autre des infractions graves» énumérées dans les Conventions. En outre, chaque partie contractante «aura l'obligation de rechercher les personnes prévenues d'avoir commis, ou d'avoir ordonné de commettre, l'une ou l'autre de ces infractions graves, et elle devra les déférer à ses propres tribunaux, quelle que soit leur nationalité. Elle pourra aussi, si elle le préfère, et selon les conditions prévues par sa propre législation, les remettre pour jugement à une autre Partie contractante intéressée à la poursuite, pour autant que cette Partie contractante ait retenu contre lesdites personnes des charges suffisantes».

L'article 85 du Protocole additionnel de 1977 aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I) rend les dispositions des Conventions de Genève de 1949 qui concernent les infractions graves applicables aux infractions de même nature visées dans le Protocole et considère plusieurs autres actes comme des infractions graves. Une amnistie qui empêcheraitde poursuivre des infractions graves serait purement et simplement incompatible avecles obligations des États aux termes des Conventions de Genève et du Protocole I de rechercherles personnes prévenues d'avoir commis des infractions graves et de veiller à ce qu'elles soientpoursuivies

b. Le crime de génocide

La Convention de l'ONU du 09 décembre 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide le définit comme étant «l'un quelconque des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel :

· Meurtre des membres du groupe ;

· Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale des membres du groupe ;

· Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entrainer sa destruction physique totale ou partielle ;

· Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;

· Transfert forcé d'enfants d'un groupe à un autre42(*).

En tant que crime de droit des gens43(*), le génocide apparait comme une espèce particulière du genre humain que représente le crime contre l'humanité. Il fait partie du droit international coutumier comme l'a rappelé la Cour Internationale de Justice dans l'affaire Bosnie-Herzégovine c/Serbie et Monténégro : « la norme interdisant le génocide constituait assurément une norme impérative (jus cogens) »44(*).

Comme le crime de guerre, le législateur congolais n'est pas resté indifférent en matière du crime de génocide. La R.D.C. étant partie à la Convention de 1948, le législateur, tout en mentionnant le génocide dans la définition des crimes contre l'humanité, en a donné une définition particulière. Par génocide, il faut entendre la destruction totale d'un groupe ethnique, religieux ou politique.45(*) Cette définition critiquable de l'ancien code a été énoncée par l'article 164 du code pénal militaire de 2002.46(*)

Le génocide s'apparente donc au crime contre l'humanité sans aucun doute le plus grave. On retrouve en effet dans les mêmes infractions, la même gravité extrême des actes commis, l'atteinte à la vie n'étant qu'une variété parmi d'autres atteintes portées à l'homme, l'intention de l'auteur étant de collaborer à une politique systématique d'anéantissement physique ou morale.47(*)

C'est donc des motifs discriminatoires, à ceci près que ces motifs sont plus nombreux dans le crime contre l'humanité (raciaux, ethniques, religieux, sociaux, politique, culturels...) que dans le génocide (nationaux, ethniques et religieux seulement).48(*)

Ensuite, nous y constatons la même indifférence à la qualité de l'auteur qui peut être un gouvernant, un fonctionnaire ou un particulier49(*).

L'article premier de la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide confirme que le génocide «est un crime du droit des gens» que les Parties contractantes «s'engagent à punir». L'article 4 prévoit que les personnes ayant commis le génocide ou l'un quelconque des autres actes énumérés «seront punies, qu'elles soient des gouvernants, des fonctionnaires ou des particuliers».

Attendu que les principes sous-jacents de la Convention consacrent le droit international coutumier, une amnistie qui empêcherait la mise en mouvement de l'action publique en cas de génocide violerait également les obligations des États en droit coutumier.

Bien que des infractions graves ne puissent être commises que pendant des conflits armés internationaux, des violations graves des règles de droit humanitaire qui s'appliquent aux conflits armés non internationaux constituent aussi des crimes de guerre. Les règles de droit humanitaire qui régissent les conflits armés non internationaux sont énoncées dans l'article 3 commun au quatre Conventions de Genève de 1949 et du Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II). Certains crimes de guerre sont aussi reconnus en droit international coutumier comme des violations graves des «lois et coutumes de la guerre».50(*)

Une amnistie qui couvrirait des violations graves des lois de la guerre régissant les conflits armés non internationaux serait d'une validité douteuse. D'après leCICR, il existe une jurisprudence internationale à l'appui de la proposition selon laquelle les crimes deguerre ne peuvent faire l'objet d'une amnistie et cela vaut pour tousles crimes de guerre.

Il y a lieu de souligner tout spécialement cette observation à la lumière d'une disposition du Protocole additionnel II, en l'espèce le paragraphe 5 de l'article 6, qui a été parfois mal interprété. Le paragraphe 5 de l'article 6 stipule : à la cessation des hostilités dans un contexte de conflit armé non international, les autorités au pouvoir s'efforceront d'accorder la plus large amnistie possible aux personnes qui auront pris part au conflit armé ou qui auront été privées de liberté pour des motifs en relation avec le conflit armé, qu'elles soient internées ou détenues.

Retraçant l'historique de sa rédaction, le CICR a affirmé que cette disposition visait à encourager ..., à la fin des hostilités, la libération en quelque sorte de ceux qui avaient été détenus ou punis pour le simple, fait d'avoir participé aux hostilités. Elle ne cherchait pas à accorder une amnistie à ceux qui avaient violé le droit international.51(*)

Tout en excluant les crimes de guerre, le paragraphe 5 de l'article 6 du Protocole additionnel II encourage les États à accorder aux anciens rebelles une amnistie pour des crimes de rébellion, sédition et trahison, par exemple. Les États peuvent aussi amnistier des rebelles de faits de guerre légitimes, tels que le fait de tuer des membres des forces rivales dans des conditions qui ne rentrent pas dans la définition du crime de guerre.

Dans son étude Droit international humanitaire coutumier, le CICR a aussi conclu que la règle suivante- pour l'essentiel une reformulation du paragraphe 5 de l'article 6 avait fait désormais le statut de loi coutumière :

« A la cessation des hostilités, les autorités au pouvoir doivent s'efforcer d'accorder la plus large amnistie possible aux personnes qui auront pris part à un conflit armé non international ou qui auront été privées de liberté pour des motifs en relation avec le conflit armé, al'exception despersonnes soupçonnées ou accusées de crimes de guerre ou condamnées pour crimes de guerre ».

c. Les crimes contre l'humanité

Ce terme apparut premièrement dans le vocabulaire international, bien avant de recouvrir une réelle signification juridique, plus précisément pénale.

C'est ainsi que l'on peut relever, l'intervention de Robespierre en faveur de la condamnation à mort du Roi Louis XVI en tant que« criminel envers l'humanité», ou celle de ce personnage révolutionnaire français haut en couleur que fut Louise Michel.52(*)

Selon le statut du Tribunal militaire de Nuremberg, « les crimes contre l'humanité, c'est-à-dire, l'assassinat, l'extermination, la réduction en esclavage, la déportation et tout autre acte inhumain commis contre toutes les populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour les motifs raciaux ou religieux, lorsque ces actes ou persécutions, qu'ils aient été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du tribunal ou en liaison avec ce crime».53(*)

Aux fins du Statut de Rome, on entend par crime contre l'humanité l'un des actes ci-après commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile et en connaissance de cette attaque :

a) Meurtre ;

b) Extermination ;

c) Réduction en esclavage ;

d) Déportation ou transfert forcé de population ;

e) Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ;

f) Torture ;

g) Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée et toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;

h) Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste ..., ou en fonction d'autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe [ou tout crime relevant de la compétence de la Cour];

i) Disparitions forcées ;

j) Apartheid ;

k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.

Dans le nouveau code pénal militaire congolais, le crime contre l'humanité est défini comme étant des« violations graves du droit international humanitaire commises contre toutes populations civiles avant ou pendant la guerre »54(*), d'où, il résulte une confusion d'avec les crimes de guerre.

Amnistier des crimes contre l'humanité serait incompatible avec les obligations contractées par les États au titre de plusieurs traités et peut être incompatible avec les obligations des États au titre du droit international coutumier.

Bien que plusieurs instruments internationaux traitent des crimes contre l'humanité, dont les statuts de chaque tribunal pénal international ou mixte créé depuis l'instauration du Tribunal de Nuremberg, celui-ci inclus, ce type de crime n'a pas encore fait l'objet d'un instrument comparable à la Convention sur le génocide.55(*) Aux termes du préambule du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, les crimes contre l'humanité comptent malgré tout parmi «les crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale» et qui «ne sauraient rester impunis» et dont la «répression doit être effectivement assurée».

Une amnistie qui exempterait les crimes contre l'humanité de sanctions ou d'action civile serait aussi incompatible avec les obligations des États parties au titre de plusieurs instruments relatifs aux droits de l'homme d'ordre général qui ne citent pas expressément ce crime international, dont le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention américaine relative aux droits de l'homme, mais qui ont été interprétés comme exigeant la répression des crimes contre l'humanité.56(*)

2.  La responsabilité civile du fait des infractions amnistiées

Les lois d'amnistie connaissent toutes le « leitmotiv» selon lequel « dans aucun cas l'amnistie ne pourra être opposée aux droits des tiers ». Cette réserve du droit de tiers signifie que l'amnistie n'éteint pas l'action civile de la victime.57(*)

De ce fait, l'amnistie efface une condamnation pénale et non pas civile. De même ne peut être opposée aux administrations de l'Etat agissant comme partie civile. C'est dans ce contexte que s'inscriventtoutes les lois portant amnistie pour faits de guerres, insurrectionnels, et infractions politiques ou d'opinion.

a. La responsabilité des belligérants

La responsabilité directe ou du fait personnel ou encore de droit commun, comme son nom l'indique, est celle qui a sa source dans un fait personnel de l'auteur du dommage.

Le dommage doit être rattaché à l'activité de son auteur. La responsabilité ne sera retenue, c'est-à-dire la sanction ne sera prononcée, que si le dommage a été causé par l'activité de celui auquel on entend faire supporter les conséquences de son acte en le punissant, si l'acte constitue une infraction réprimée par le droit pénal, ou en l'obligeant à la réparation du dommage, s'il s'agit de la responsabilité civile. Cela est évident dans la responsabilité individuelle du fait personnel : seul l'auteur de l'acte dommageable en sera responsable.

Dans la responsabilité collective des membres d'un groupe pour le comportement dommageable envers autrui d'un membre de ce groupe, le lien de causalité entre l'activité de celui-ci et le dommage n'en est pas moins nécessaire, mais il devrait alors conduire à la seule responsabilité individuelle de l'auteur de l'acte. En réalité, la responsabilité collective double la causalité par une obligation de garantie qui pèse sur les membres du groupe et qui manifeste une solidarité en vertu de laquelle il n'est pas possible d'isoler l'activité d'un membre du groupe de celle des autres membres. Les actes des membres du groupe sont indissociables en raison de leur appartenance au groupe et de la cohésion de celui-ci, ce qui ne préjuge pas d'éventuelles sanctions prises à l'intérieur du groupe contre celui dont l'activité a été génératrice de dommage pour une personne extérieure au groupe. Mais il importe de remarquer que la responsabilité collective est, en réalité, une responsabilité doublée d'une obligation de garantie.58(*)

La même constatation peut être faite à propos de certaines responsabilités dites du fait d'autrui, ainsi, lorsque la loi admet qu'une personne est responsable du dommage causé par une autre, même si l'activité de la première n'est pour rien dans la survenance qui trouve sa seule cause dans l'activité de la seconde, c'est la solidarité, conduisant à une obligation de garantie, qui justifie la sanction prononcée, et non pas la responsabilité. En cette matière encore, la responsabilité à l'encontre d'une personne est doublée d'une obligation de garantie mise à la charge d'une autre personne. Mais, lorsque la sanction contre une personne pour le dommage causé par une autre est prononcée en raison de ce que l'activité de l'auteur immédiat du dommage n'a été rendue possible qu'en raison du comportement du responsable du fait d'autrui, il ne s'agit plus de garantie mais bien de responsabilité individuelle.59(*)

Selon l'article 258 et 259 de notre code civil disposant respectivement : « Tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; chacun est responsable du dommage qu'il a causé, non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ».60(*)

Ces articles montrent que la responsabilité du fait personnel est conditionnée par une faute intentionnelle ou d'imprudence commise par la personne dont sa responsabilité se trouve engagée.

En outre, il est requis l'existence d'un dommage et d'une relation de cause à effet entre la faute et le dommage, un élément sans la réunion desquels la responsabilité directe n'existe pas.

C'est ainsi qu'un conducteur n'engage pas sa responsabilité civile en dépassent la vitesse limitée exigée sur une route, sans causer d'accident. Il commet certes une contravention au code de la route qui est une infraction pénale.

En revenant aux belligérants, on remarque l'existence d'un dommage et d'une relation de cause à effet entre la faute et le dommage. Car selon une équipe d'enquête de « Human Rights Watch » qui s'est rendue dans les zones contrôlées par le CNDP et ses alliés, à partir de sa base de Goma, leur enquête a permis de collecter des informations démontrant que tous les groupes armés actifs dans les conflits ayant déchiré l'Est du Congo, tous les combattants quelle que soit leur allégeance, se sont attaqués à des civils. Ils ont tué, blessé, violé de milliers des personnes, et ont provoqué l'exode de plus d'un demi-million d'autres victimes, nonobstant des meurtres et des pillages reconnus à leur charge.61(*)

Toutes les composantes étaient responsables des entités et territoires qu'elles contrôlaient et y posaient des actes de gouvernement, ils sont responsables des actes commis en violation des instruments juridiques susmentionnés sur leur territoire et devront à cet effet répondre devant les cours et tribunaux internationaux ou nationaux selon que les faits ou crime leur reprochés révèlent de la compétence d'une instance judiciaire internationale telle la Cour Pénale Internationale.

C'est dans ce cadre que le Président de la République Joseph KABILA devant le Conseil de Sécurité de 2003 va faire une demande sur la dotation du Congo d'un tribunal ad hoc à l'instar du Tribunal Pénal International pour le Rwanda ou pour l'ex-Yougoslavie, pour ne pas laisser impunis les responsables de ces faits dommageables.

Cela étant dit, tous ces mouvement politico-militaires sont responsables de leurs faits préjudiciables à l'égard des victimes et de ce fait ils les doivent indemnisation. Cette responsabilité des mouvements n'exclut pas la responsabilité personnelle des membres de ces groupes armés, s'ils sont identifiables.

Sur base des mesures d'amnistie dont les belligérants sont bénéficiaires, les victimes d'une part se trouvent bloqué car ne pouvant pas se constituer partie civile car l'action publique reste annulée par le fait d'amnistie.

D'autre part, bien que la loi d'amnistie leur reconnaît la possibilité de porter leur cause devant le juge civil, elles se trouvent toujours en difficulté de prouver le fait non seulement par ce que les actes posés par les belligérants ne sont plus considérés comme étant criminels, mais aussi par ce que la plupart de ces belligérants ont par le jeu de l'accord, bénéficie des postes de responsabilité soit dans le gouvernement, le parlement, l'administration publique et surtout dans l'armée.

Ce qui fait que les victimes restent sans indemnisation, personne ne peut, dans ce cas, demander à la personne amnistiée quoique ce soit.62(*)

b. La responsabilité de l'Etat

Dans certaines situations, compte tenu de la difficulté que nous avons présentée précédemment, rend l'individualisation de la responsabilité civile difficile. Ainsi, l'Etat peut assumer la dite responsabilité, car c'est à lui que revenait le rôle premier de protection de ses citoyens et c'est lui-même qui a pris le risque d'amnistier les responsables.

Aux termes de l'article 5 du projet de codification du droit international, est comme fait de l'Etat d'après le droit international, le comportement de tout organe de l'Etat ayant le statut d'après le droit interne de cet Etat pour autant qu'en l'occurrence ait agit en cette qualité.63(*)

La problématique du rapport personne-pouvoir s'articule autour de la dialectique de l'Etat pourvoyeur des droits de la personne. La personne en droit est l'être apte à jouer un rôle dans la vie juridique, capable d'être sujet des droits. L'homme, en sa qualité de personne est donc titulaire des droits.64(*)

En RDC, les droits de la personne tirent leur source dans les instruments juridiques situés au sommet de la hiérarchie normative. Ont également valeur constitutionnelle au Congo, les droits garantis par la charte africaine des droits de l'homme et des peuples ainsi que la Charte Internationales des droits de l'homme. Cette constitutionnalisation des droits de homme fait de tout congolais un titulaire des droits subjectifs, créancier des obligations positives (action) ou négatives (abstentions) de la part de l'Etat.

L'on distingue les violations par action qui incluent les brutalités, les services, les exécutions, ... dont sont victimes les gouvernés, des violations par omission lorsque las pouvoirs publics restent passifs dans les situations qui exigent une intervention de leur part.

Sont qualifiées de systématiques les violations inhérentes de l'ordre sociopolitique du pays, alors que sont aberrantes celles qui se produisent de temps à autre dans un Etat qui offre par ailleurs de larges garanties constitutionnelles.65(*)

L'emploi par l'Etat des forces armées pour la suppression des mouvements insurrectionnels est considéré comme une action toute naturelle. Il y a pour ainsi dire extension des fonctions des forces armées, jugée dans beaucoup de pays dont le nôtre comme raisonnable. L'Etat doit protéger la vie de ses citoyens et pour éviter les dangers, personne ne prend soin de la sécurité de l'Etat, s'il ne le fait pas lui-même.

Il est reproché aux lois d'amnistie de 2009 et 2014 relatives aux groupes rebelles ayant sévis dans l'Est de la RDC d'inconstitutionnelles. En effet, l'art. 52 de la Constitution congolaise dispose : « Aucun individu, ou groupe d'individus, ne peut utiliser une portion du territoire national comme base de départ d'activités subversives ou terroristes contre l'Etat congolais ou tout autre ». Or, ces lois d'amnistie qui excluent théoriquement du champ d'application les crimes de génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis dans l'est de la RDC, légitiment la mutation du CNDP et M-23 en parti politique et réhabilitent purement et simplement leurs membres. A la suite de cela, des seigneurs de guerre présumés coupables, d'autres condamnés, ont été placés ou seront placés à des postes de commandement des FARDC.

Etant donné que l'amnistie est assimilée aux actes relevant des organes du gouvernement et comme elle a porté atteinte aux droits des victimes (tiers), l'Etat en sera alors retenu comme responsable, c'est l'Etat qui prend alors en principe la charge d'indemnisation de ces dommages du fait des délinquants amnistiés.

c. La responsabilité de la communauté internationale

Tout sujet de droit, voit sa responsabilité engagée du fait des comportements illicites qui lui soient applicables.

L'intégration accélérée des membres de CNDP et d'autres rebelles dans les FARDC acceptée par la communauté internationale a été décidée sans que l'on ne se soit assuré qu'ils n'ont pas commis des violations massives des droits humains ou des crimes comme le viol et les violences sexuelles.66(*)

Dans l'ordre international, il faut noter la constitutionnalisation des mécanismes onusiens et africains. La RDC a ratifié tous les textes qui constituent la Charte Internationale des Droits de l'homme, acceptant ainsi de se soumettre aux mécanismes de contrôle qu'ils organisent, il en est de même de la charte africaine des Droits de l'Homme et des Peuples.

Notre pays est par ailleurs partie prenante au projet de la création d'une Cour Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples et de la Cour Pénale Internationale qui envisagent des mécanismes beaucoup plus efficaces en faveur des droits de la personne.

Quid de l'effectivité de ces différents mécanismes ? Si nous n'envisageons que le Congo indépendant, on observe qu'après l'admission dans le concert des Nations, notre pays a été aux prises avec des violations systématiques allant jusqu'au renversement des institutions établies. Cet état s'est hélas poursuivi jusqu'à ces jours.67(*)

Les grandes puissances dans leurs relations entre Etat soutiennent certains pays africains et ont même des intérêts surtout économiques et stratégiques dans ce pays. C'est de cette manière que la communauté internationale n'a pas intervenu plus vite pour limiter des violations des droits humains fondamentaux, car on ne peut être à la fois celui qui met le feu et le pompier. Ainsi, Mathieu et J.C WILLAME, affirment même que : la guerre qui sévit au Congo depuis 1996 et qui est à l'origine des multiples violations de droits de l'homme fût revêtue d'un caractère international du fait que sans l'appui de la communauté internationale , les conflits n'auraient pas eu lieu.68(*)

Pour finir, les différentes lois d'amnistie prises dans l'histoire législative de la RDC ont effacé tous les faits dits : « faits de guerre , faits insurrectionnels et infractions politiques ou d'opinion  ».

Après une décennie de tentatives non concluantes de rétablissement de la paix en RDC, il est clair que seul un effort sans relâche de lutte contre l'impunité dans la région des grands lacs demeure la voie indiquée pour mettre fin de façon durable au cycle de violence et des tueries massives qui sévit à l'Est de la RDC.

La communauté internationale devait tout mettre en oeuvre pour accompagner la RDC dans la réforme du système de sécurité.

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiquesfait obligation aux États parties de garantir que toute victime de violations du Pacte «disposera d'un recours utile» (art. 2, par. 3 a).69(*) Une amnistie qui empêcherait les victimes d'accéder à une voie de recours au civil violerait manifestement le Pacte. En 2004, le Comité des droits de l'homme a réaffirmé le devoir des États parties de «veiller à ce que toute personne dispose de recours accessibles et utiles pour faire valoir les droits» que lui reconnaît le Pacte et d'accorder «réparation aux personnes dont les droits reconnus par le Pacte ont été violés». De l'avis du Comité, «le Pacte implique de manière générale l'obligation d'accorder une réparation appropriée».70(*)

Par ailleurs, le Comité des droits de l'homme71(*) a affirmé à plusieurs reprises que le Pacte ne prévoyait pas le droit pour un particulier de demander qu'un État poursuive pénalement une autre personne. Il n'en reste pas moins que , le Pacte, selon son interprétation, ferait obligation aux États parties de prendre les mesures voulues pour enquêter sur les violations des droits de l'homme tenues pour criminelles, de traduire en justice les responsables de ces violations et d'accorder un recours utile aux victimes.

En cas de violations particulièrement graves des droits de l'homme, les procédures de caractère disciplinaire et administratif ne satisfont pas pleinement aux obligations des États parties de prévoir des recours adéquats et utiles. Le Comité des droits de l'homme a au contraire indiqué clairement que l'État partie avait le devoir de mener des enquêtes approfondies sur les violations supposées des droits de l'homme, en particulier lorsqu'il s'agissait de disparitions forcées et d'atteintes au droit à la vie, et d'engager des poursuites pénales contre quiconque était présumé responsable de ces violations, de procéder au jugement et de prononcer une peine. Dans son Observation générale no 31, il a précisé que le devoir des États parties de traduire les auteurs de violations des droits de l'homme en justice s'étendait à d'autres violations graves, à savoir :

Lorsque les enquêtes que les États parties sont tenus de mener révèlent la violation de certains droits reconnus dans le Pacte, les États parties doivent veiller à ce que les responsables soient traduits en justice. Comme dans le cas où un État partie s'abstient de mener une enquête, le fait de ne pas traduire en justice les auteurs de telles violations pourrait en soi donner lieu à une violation distincte du Pacte. Ces obligations se rapportentnotamment aux violations assimilées à des crimes au regard du droit national ouinternational, comme la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradantsanalogues ..., les exécutions sommaires et arbitraires ... et les disparitionsforcées...

En conséquence, les États parties au Pacte «ne sauraient exonérer les auteurs de leur responsabilité personnelle comme cela s'est produit dans le cas de certaines amnisties ... et immunités préalables», s'agissant de fonctionnaires ou d'agents de l'État qui ont commis des violations tenues pour des crimes, dont des violations commises dans des circonstances qui en font des crimes contre l'humanité (par. 18).

La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, comme d'autres instruments relatifs aux droits de l'homme de caractère général, reconnaît le droit des victimes à un recours en cas de violations des droits fondamentaux (art. 7, par. 1 a)). Bien que les interprétations des obligations de répression énoncées, dans la Charte, telles qu'elles émanent des organes de supervision72(*), ne soient pas aussi développées que celles d'autres traités des droits de l'homme de caractère général, les décisions de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples donnent à penser que les enquêtes et l'action publique, au même titre que l'indemnisation des violations, jouent un rôle nécessaire dans le respect de leurs obligations par les États parties.73(*)

SECTION II. AMNISTIE ET PERSPECTIVES DE PAIX EN RDC

§1. LE BUT DES DIFFERNTES LOIS D'AMNISTIE

Le but recherché par le législateur congolais à travers les différentes lois d'amnistie c'estla paix et la cohésion sociale en période post conflit.

Le droit international impose aux Etats de poursuivre les crimes graves tels que le génocide, les crimes de guerre, et les crimes contre l'humanité. Cependant, il arrive que pour consolider la paix fragile ou la démocratie naissante, ces Etats décident de recourir à l'amnistie. Dans un tel contexte, l'amnistie est prise pour empêcher que les actes commis sous les contraintes de la guerre ou de tensions politiques ne soient poursuivis.

Il importe de nous interroger si les diverses lois sur l'amnistie ont-elles atteint leur objectif ultime qui est de contribuer à la consolidation de la paix en période post conflit ?

Pour rencontrer cette question, certaines perspectives sont envisageables pour une meilleure consolidation de la paix en RDC.

§2. LES PERSPECTIVES DE PAIX EN RDC

Depuis 1996, la République Démocratique du Congo a été plongée dans plusieurs guerres meurtrières, qui ont causé la mort directement ou indirectement de quelques millions de personnes. L'Accord Global et Inclusif du 17 décembre 2002 et la Constitution de la Transition adoptée le 6 mars 2003 ont marqué la fin d'une longue période de négociations de paix, menées par les différents participants au Dialogue inter congolais, avec une très forte implication de la communauté internationale.

Pour gérer ce passé douloureux, pour punir les responsables, restaurer la dignité des victimes, réparer le mal qui leur ont été fait et réconcilier la nation, la RDC devrait rendre effective le mécanisme de la justice transitionnelle qui prend une place de plus en plus importante dans les analyses sur les mécanismes de résolution de conflit et d'instauration d'une paix durable. Ainsi, tout en sachant qu'aucun futur n'est possible sans qu'on ne tire les leçons du passé, nous suggérerions à l'Etat congolais de tenter de faire face à des exactions massives commises dans le passé, en établissant les responsabilités, en rendant la justice et en permettant la réconciliation. Pour ce faire, un nombre des processus des mécanismes tant judiciaires que non judiciaires, et dans le cas échéant, une intervention plus ou moins importante de la communauté internationale dans les poursuites engagées contre des individus, des indemnisations, des enquêtes visant à établir la vérité, une réforme des institutions, des contrôles et des révocations, ou une combinaison de ces mesures.La communauté internationale doit imposer aux Etats d'adopter des mesures de justice transitionnelle qui favorisent la recherche de la vérité, la responsabilité pénale, la réforme institutionnelle et les réparations pour promouvoir efficacement la paix et la réconciliation.

De ce qui précède, il ya nécessité de rendre effective la justice transitionnelle dont nous résumons ses objectifs en ce sens :

· identifier les responsables des crimes internationaux et les violations massives des droits de l'Homme et les mettre devant leurs responsabilités à travers des mécanismes judiciaires ou non-judiciaires ;

· mettre en place des mécanismes de réparation en sens large pour les victimes ;

· identifier les causes du conflit afin d'y remédier (réforme institutionnelle, justice sociale et mesures de non-discrimination) ;

· réconcilier les individus, les groupes, les communautés et la nation, ce qui comprend la restauration de la confiance ;

· prévenir de futurs conflits violents.

Ainsi la lutte contre l'impunité devra nécessairement comporter :

- une recherche de la vérité des faits et l'établissement des responsabilités dans les exactions commises ;

- la sanction de ces faits par la justice parce qu'il est primordial que les victimes soient entendues, prises au sérieux et qu'elles reçoivent réparation74(*).

L'impunité est exactement le contraire. En déniant le droit à la justice et en amnistiant les bourreaux, elle rend toute réconciliation impossible et plonge les victimes dans l'oubli75(*). L'impunité reste de mise en dépit du prononcé de la sanction chaque fois que celle-ci paraît insuffisante, c'est-à-dire complètement disproportionnée eu égard à l'infraction commise. Aussi, la définition de l'impunité retenue par GUISSE nous est apparue plus complète car pour lui, l'impunité est « l'absence ou l'insuffisance des sanctions répressives et réparatrices des violations volontaires ou involontaires des droits et libertés de l'individu »76(*).

Eu égard à ce qui précède, nous pensons que pour l'intérêt de la paix, l'amnistie a souvent été accordée aux auteurs de violation flagrante des Droits de l'homme comme un moyen d'attirer les ennemis d'hier dans le giron politique, et la RDC ne fait pas exception.

Cependant, pour que les amnistiés ne récidivent plus, nous souhaiterions que l'amnistie soit limitée pour qu'elle ne soit pas un mécanisme à adopter pour la RDC. Cela implique l'organisation de la justice pour que ces crimes soient punis.

Nous suggérerions également au gouvernement congolais de mettre en place un programme spécifique pour la réparation des victimes et de mettre fin à l'impunité par la mise en place effective des mécanismes de justice transitionnelle en RDC.

CONCLUSION

Nous voici au terme de notre étude dont l'objet était d'analyser le cadre juridique de l'amnistie et son impact sur le processus de paix en RDC.

Le point de départ de notre travail portait sur un double questionnement articulé comme suit :

· Qu'entendre par l'amnistie en droit ? et quel rapport existe-t-il entre l'amnistie et d'autres notions voisines comme la grâce présidentielle, la prescription, l'abrogation d'une loi pénale et la réhabilitation ?

A cette question nous avons vu que l'amnistie est une mesure de clémence relevant de la compétence du pouvoir législatif dont bénéficient les criminels dans le but d'effacer rétroactivement le caractère infractionnel de leurs actes ou faits punis par la loi. Elle se rapproche d'autres notions voisines par le fait que toutes mettent les auteurs des crimes à l'abri soit des poursuites, soit de l'exécution de la peine soit en remettant le criminel dans la situation légale et, si possible, sociale qu'il avait perdu suite à une juste condamnation. Elle se distancie également de ces autres notions qui lui sont voisines par le fait qu'elle émane de l'autorité législative et concerne toutes les personnes qui se trouvent dans son champ d'application tant matérielle que temporelle.

· Quelle expérience la RDC a-t-elle de l'amnistie ? Comment les différentes lois intervenues ont-elles contribué à consolider la paix souvent fragile dans ce pays ?

La RDC dispose d'une riche expérience en matière de pratique d'amnistie comme instrument de recherche de la paix et de l'apaisement social.

L'histoire législative congolaise en matière d'amnistie est marquée par les différents textes pris dans différentes périodes résumées comme suit :

Ø Décret-loi n°03-001 du 15 avril 2003 qui avait accordé une amnistie provisoire suite à l'Accord Global et Inclusif de 2002 pour les faits de guerre et les infractions politiques et d'opinion.

Ø Loi N°05/023 du 19 décembre 2005 adoptée par le parlement de transition pour abroger le décret présidentiel de 2003, elle a repris les crimes énumérés dans le décret précité mais a étendu la période : du 20 août 1996 au 20 juin 2003.

Ø la loi n°09/003 du 7 mai 2009 portant amnistie pour faits de guerres et insurrectionnels commis dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu pendant la période allant du mois de juin 2003 au 07 Mai 2009.

Ø La loi d'amnistie du 11 février 2014 portant amnistie pour faits de guerre, faits insurrectionnels et infractions politiques.

Ce bilan législatif a été facilité grâce aux différentes concertations tenues çà et là dans le pays et à l'extérieur du pays dans le but de contribuer à la restauration de la paix en RDC. Il s'agit de :

DIC qui s'est tenu à Sun City (Afrique du Sud) du 25 février au 17 décembre 2002. Les germes de ce dialogue se retrouvent dans les conflits armés qui secouent la RDC durant la période allant de 1998 à 2002. A l'issue de ce dialogue, il en résultera, après des multiples trajectoires, un accord global et inclusif qui sera signé le 21 avril 2003 par tous les délégués et dotera la RDC d'un agenda devant permettre la fin des hostilités. Suite à l'accord global inclusif de 2002, il a été promulgué un décret-loi n°03-001 du 15 avril 2003 accordant une amnistie provisoire pour les faits des guerres et les infractions politiques et d'opinion. Le parlement de la transition adoptera par la suite la loi n° 05-023 du 19 décembre 2005 en abrogation du présent décret.

Conférence sur la paix, la sécurité et le développement dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu ténue à Goma du 6 au 23 janvier 2008. Les accords de paix du 23 mars 2009 ont été élaborés par le gouvernement de la RDC et le CNDP d'une part et, d'autre part, avec différents autres groupes armés du Nord et du Sud Kivu. Ils sont le résultat de longues négociations menées tour à tour à Nairobi et à Goma et dont il avait recommandé l'adoption d'une loi d'amnistie, ce qui avait été fait par l'Assemblée nationale congolaise qui a adopté un projet de loi le 12 juillet 2008. Finalement, le 5 mai 2009, à la suite d'une procédure quelque peu discutable, le Parlement a adopté la loi d'amnistie sur base du rapport de la commission mixte paritaire, loi qui a été par la suite promulguée par le Président Kabila le 7 Mai 2009.

Les négociations entre le gouvernement congolais et le groupe rebelle du M23 ont été sanctionnées par le Sommet des Chefs d'État et de Gouvernement de la CIRGL qui s'est tenu en date du 24 novembre 2012 en Ouganda sur la situation sécuritaire dans l'Est de la RDC. Ce sommet s'est ouvert après l'échec de l'option militaire et la chute de la ville de Goma le 20 novembre 2012 entre les mains des éléments du M23. A l'issue de ces négociations, plusieurs recommandations ont été prises, parmi lesquelles un projet de la loi d'amnistie devant bénéficier aux ex-rebelles du M23 pour faits insurrectionnels, faits de guerre et infractions politiques.

Pour mener à bien notre étude et de manière la plus rigoureuse possible, nous avons utilisé la méthode exégétique qui nous a permis d'analyser et d'interpréter des textes juridiques mis à notre disposition, en l'occurrence ceux qui réglementent l'amnistie dans notre pays ; et la méthode sociologique qui nous a permis de placer le sujet dans son contexte social afin de dégager le contexte des crises qui ont toujours précédé l'adoption des différentes lois d'amnistie prises en RDC.

Pour appuyer ces méthodes, nous avons fait recours, dans ce travail, à la technique documentaire qui nous a permis de ressasser les opinions des auteurs de droit sur les différentes questions que soulèvent la problématique du présent travail.

Ainsi, ce travail de validation de nos hypothèses dont le premier chapitre cadre avec les notions générales de l'amnistie en droit congolaisoù nous avons développé sa genèse et ses notions voisines.

Le second chapitre portantanalyse des législations congolaises en matière d'amnistienous a permis de valider la seconde hypothèse en donnant l'état de la législation congolaise en matière d'amnistie. L'amnistie qui est la loi de l'oubli, doit en tout cas apaiser les esprits des personnes qui ont subi des exactions par d'autres personnes et comprendre qu'après tous ces événements elles sont appelées à vivre ensemble pour préparer un meilleur avenir. L'analyse de différentes lois intervenues dans l'histoire législative et leur contexte d'adoption nous a renseigné que l'Etat dans sa politique d'adoption des différentes lois, respecte les normes internationales qui veulent à ce que les crimes internationaux ne puissent pas être concernés par l'amnistie. Cependant nous avons remarqué ; qu'en dépit de la volonté de l'Etat de respecter ses obligations internationales en matière des crimes internationaux, il en subsiste des failles quant aux réparations civiles qui ne sont pas concernées par l'amnistie.

Les différentes lois intervenues en RDC en matière d'amnistie devraient être l'initiative de cette population qui a été victime de ces faits dommageables pour qu'elle même puisse comprendre et prendre une décision résolue qui traduit leur volonté du pardon et de cohabitation pacifique.

Etant une oeuvre humaine, nous ne prétendons pas par ce travail avoir épuisé toutes les questions en rapport avec cette thématique. Puisse notre postérité suppléer à cette oeuvre ! Puisse enfin que tout autre chercheur qui voudrait parfaire ce travail, élargir le champ de son étude ou approfondir la problématique que nous en dégageons en abordant les questions qui n'ont pas été entamées ici !

BIBLIOGRAPHIE

I. TEXTES JURIDIQUES NATIONAUX

1. Constitution de la République Démocratique du Congo, telle que révisée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011, J.O.RDC, 52ème année, n°3 du 1èr février 2011.

2. La loi n° 05-023 du 19 décembre 2005 accorde une amnistie pour faits de guerre, infraction politiques et d'opinion

3. Ordonnance loi no 72/060 du 25 septembre 1972 portant code de justice militaire

4. Loi n° 024/2002 du 18 novembre 2002 portant code pénal militaire

5. Décret loi n°03-001 du 15 avril 2003 accordant une amnistie provisoire pour les faits des guerres et les infractions politiques et d'opinions.

6. La loi n°09/003 du 07 mai 2009 portant amnistie pour faits des guerres et insurrectionnels commis au nord et Sud-Kivu

7. La loi du 11 févier 2014 portant amnistie pour faits de guerre, faits insurrectionnels et infractions politiques.

II. TEXTES JURIDIQUES INTERNATIONAUX

1. Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale du 17 juillet 1998

2. L'accord de Londrès portant Statut du Tribunal Militaire international de Nuremberg.

3. Protocole additionnel I. du 08 juin 1977 relatif aux conflits armés internationaux.

4. Convention sur la Prévention et la Répression du crime de Génocide.

5. Statut du tribunal militaire international de Nuremberg.

6. Convention de 1968 sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.

III. REFERENCES DOCTRINALES

1. A.HUET et alii, Droit pénal international, PUF, 3ème éd. Paris, 2005.

2. Ch. HENNEAU et J. VERH AGEN, Droit pénal général 2e éd. Bruyant, Bruxelles, 1995.

3. DE PAGE H., Traité élémentaire de droit civil Belge, 4ème éd., t2, vol I, Bruylant, Bruxelles, 1990.

4. De Villers Gauthier ; Omasombo Tshonda, Jean. « Zaire - la transition manquée : 1990-1997», Les Cahiers Africains, nos 27-28-29, 1997.

DUPUIS (M), Droit international public, 2ème éd., Dalloz, Paris, 1993.

5. G. LEVASSEUR et J.P DOUCET, Droit Pénal Général, éd, SIREY, Paris 2000.

6. H. Ruiz Fabri, G.Della Morte, E. Lambert Abdelgawad (dir.), Amnistie, grâce et prescription en Europe, Paris,Société de Législation comparée, Coll. de l'UMR de droit comparé 1977.

7. Jean PRADEL,Droit Pénal Général, éd, cujas, 11éd, Paris 1996.

8. Kalumvueziko, Ngimbi. Congo-Zaïre, le destin tragique d'une nation. L'Harmattan, Paris, 2009.

9. KATUALA KABA KASHALA, Code civil Zaïrois annoté, éd. BATENA NTAMBUA, Kinshasa, 1995.

10. LAMY E., Théories générales du Droit pénal Congolais, Kinshasa, 1972.

11. LARROUMET (Ch), Réflexion sur la responsabilité civile : Evolution et problèmes actuels en Droit Comparé, Université McGill, Montréal, 1983.

12. MATHIEU et WILLAME (J), RDC Chronique d'un entre deux guerres : octobre 1996 juillet 1998, 2ème éd., Paris, 1998.

13. MUGANGU MATABARO (S), Les droits de l'homme dans la région des grands lacs réalité et illusion, Bruylant Academia, Bruxelles, 2003.

14. MUTATA LUABA, Droit pénal militaire, Des peines et incriminations de la compétence des juridictions militaires, T1 éd. du service de documentation et d'études du Ministre de la justice et garde des sceaux, Kinshasa, 2005.

15. NYABIRUNGU MWENE SONGA, Traité de droit pénal général Congolais 2e éd université Africaine 2007.

16. P. KOLB et L. LETURMY, Droit pénal général, Gualiano éditeur, EJA-Paris-2005.

17. P.CURRAT, Les crimes contre l'humanité dans le statut de la CPI, LGDJ, 2006.

18. R. Chapus, Droit administratif général, II, 6e Ed., 1992.

19. W Jean Didier, Droit pénal général, paris, Montchrestien, 1991.

20. WILFRID J., Droit pénal général, 2ème éd. Montchrestien, Paris, 1991.

IV. REFERENCES JURISPRUDENTIELLES

1. Affaire Bosnie-Herzégovine c/Serbie et Monténégro, Application de la convention pour la prévention et la répression du génocide.

2. Arhuacos c. Colombie, constatations concernant la communication no 612/1995, 29 juillet 1997 (A/52/40 (vol. II), annexe VI, sect. Q, par. 8.2 et 8.8) et Bautista de Arellana c. Colombie, constatations concernant la communication no 563/1993, 27 octobre 1995 (A/51/40 (vol. II), annexe VIII, sect. S, par. 8.2 et 8.6).

3. Le Tribunal Militaire International de Nuremberg a décidé que les violations du règlement de la Haye constituaient des crimes de guerre car durant la seconde guerre mondiale, ces règles s'étaient cristallisées en droit coutumier.

4. Parada Cea et al. v. El Salvador, affaire no 10.480, rapport no 1/99, 27 janvier 1999, par. 116. Voir Comité international de la Croix-Rouge, p. 813.

5. Voir Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, Le Procureur c. Duko Tadic', affaire no IT-94-1-AR72, arrêt du 2 octobre 1995, par. 134 ;

6. Le Procureur c. Delalic' et consorts, affaire no IT-96-21-A, arrêt du 20 février 2001, p173.

7. Voir, par exemple, Comité des droits de l'homme, Observation générale no 31 (2004) sur la nature de l'obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, par. 18; Cour interaméricaine des droits de l'homme, Almonacid-Arellano et al. v. Chile, arrêt du 26 septembre 2006, par. 114

8. La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples prévoit la création de la commission africaine des droits de l'homme et des peuples, dont la jurisprudence est examinée ici. Un protocole relatif à la Charte africaine, adopté en 1998 et entré en vigueur le 25 janvier 2004, porte création de la cour africaine des droits de l'homme et des peuples.

9. Social and Economic Rights Action Center et al. c. Nigeria, communication no 155/96 ; et Mouvement burkinabe des droits de l'homme et des peuples c. Burkina Faso, communication no 204/97.

V. ARTICLES, RAPPORTS ET AUTRES DOCUMENTS

1. JOURNAL LE SOUVERAIN, BUKAVU, MAI-JUIN 2009, P 9.

2. Kisangani Emizet François. Civil wars in the Democratic Republic of Congo: 1960-2010. Lynne Rienner, Londres, 2012, p2.

3. L.JOINET, lutter contre l'impunité - dix questions pour comprendre et agir, paris, la découverte, 2002, p.9.

4. Bouvier, Paul ; Bomboko, Francesca. « Le dialogue inter congolais : Anatomie d'une négociation à la lisière du chaos - contribution à la théorie de la négociation», Les Cahiers Africains, pp. 31-50.

VI. REFERENCES ELECTRONIQUES

1) Http : www.ictj.org/rdc/justice traditionnelle. Consulté le 16 janv.2014 à 11h00

2) Http:www.hrw.org/french/resports/rdc/2001/Congo. Consulté le 16 janv. 2014 à 10h49'.

3) http:// www. Droit-fondamentaux. Org/ (visité le 09 fevrier 2014 à 07h 12')

TABLE DES MATIERES

CHAPITRE I. L'AMNISTIE EN DROIT CONGOLAIS 2

SECTION 1. GENESE DE L'AMNISTIE 6

§1. NOTION ET CARACTERE DE L'AMNISTIE 6

1°Objet de l'amnistie 6

2° Caractère de l'Amnistie 7

§2. LES CONDITIONS D'AMNISTIE 8

1. Les conditions relatives aux infractions 8

2. Les conditions relatives au délinquant 9

a) La qualité du délinquant 9

b) Le comportement du délinquant 9

3. Les autorités habilitées à accorder l'amnistie 9

a) La grâce amnistiante 10

b) La grâce judiciaire 10

§3. LES EFFETS DE L'AMNISTIE ET LEURS LIMITES 11

1° effets de l'amnistie 11

2° Limitation à l'effet extinctif de la loi d'amnistie 12

§4.LES SORTES DE L'AMNISTIE 13

1° l'amnistie générale 13

2° l'amnistie réelle 13

3° l'amnistie personnelle 14

4° l'amnistie mixte 15

5° L'amnistie conditionnelle 15

6° l'amnistie d'ordre public 15

SECTION II. AMNISTIE ET NOTIONS VOISINES 16

§1 .L'AMNISTIE ET LA GRACE 16

§2. L'AMNISTIE ET L'IMPUNITE 16

§3. L'AMNISTIE ET LA PRESCRIPTION 17

§4. L'AMNISTIE ET LA REHABILITATION 18

§5. L'AMNISTIE ET L'ABROGATION DE LA LOI PENALE 18

CHAPITRE II. ANALYSE DES LEGISLATIONS CONGOALISES EN MATIERE D'AMNISTIE 20

SECTION I. ETAT DU DROIT POSITIF CONGOLAIS EN MATIERE D'AMNISTIE 20

§1. CONTEXTE SOCIO POLITIQUE DES PROMULGATIONS DES DIFFERENTES LOIS D'AMNISTIE EN RDC 20

A. DECRET LOI N°03-001 DU 15 AVRIL 2003 20

1. Conflits armes : 1998-2002 20

2. Dialogue Inter-Congolais de Sun City (février à décembre 2002) 21

3. Amnistie provisoire suite à l'accord global et inclusif de 2002 23

B. LA LOI N° 05-023 DU 19 DECEMBRE 2005 23

1. Conflit arme : 1996-1997 23

2. La loi d'amnistie de 2005 24

C. LA LOI N°09/003 DU 07 MAI 2009 24

1. Conflits armes : 2008 a 2009 24

2. Conférence sur la paix, la sécurité et le développement dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu (6 au 23 janvier 2008) 25

3. Accords du 23 mars 2009 avec le CNDP 26

4. La loi d'amnistie de 2009 27

D. LA LOI D`AMNISTIE DU 11 FEVRIER 2014 28

1. Conflits armes : 2012... 28

2. Négociations Gouvernement - M23 28

3. La loi d'amnistie de 2014 29

§2. PARTICULARITES ET PORTEE JURIDIQUE DES DIFFERENTES LOIS D'AMNISTIE 29

1. Les crimes non amnistiables. 32

a. Les crimes de guerre. 32

b. Le crime de génocide 35

c. Les crimes contre l'humanité 38

2. La responsabilité civile du fait des infractions amnistiées 40

a. La responsabilité des belligérants 40

b. La responsabilité de l'Etat 43

c. La responsabilité de la communauté internationale 44

SECTION II. AMNISTIE ET PERSPECTIVES DE PAIX EN RDC 48

§1. LE BUT DES DIFFERNTES LOIS D'AMNISTIE 48

§2. LES PERSPECTIVES DE PAIX EN RDC 48

CONCLUSION 51

BIBLIOGRAPHIE 55

TABLE DES MATIERES 59

* 1NYABIRUNGU MWENE SONGA, Traité de droit pénal général Congolais 2e éd université Africaine 2007, p 423.

* 2 Ch. HENNEAU et J. VERH AGEN, Droit pénal général 2e éd. Bruyant, Bruxelles, 1995, p454.

* 3Jean PRADEL droit pénal général, éd, cujas, 11éd, Paris 1996.p.824

* 4H. Ruiz Fabri, G.Della Morte, E. Lambert Abdelgawad (dir.), Amnistie, grâce et prescription en Europe, Paris, Société de Législation comparée, Coll. de l'UMR de droit comparé 1977 p. 60

* 5NYABIRUNGU.M. op.cit, 1995 p.354

* 6Jean PRADEL op.cit.p.419

* 7 P. KOLB et L. LETURMY, Droit pénal général, Gualiano éditeur, EJA-Paris-2005, p411.

* 8 NYABIRUNGU idem, p.423

* 9G. LEVASSEUR et J.P DOUCET, droit pénal général, éd, SIREY, Paris 2000 p. 133

* 10Jean Pradel. Op. cit. p. 413

* 11Idem p. 414

* 12Ibidem

* 13 W Jean Didier, droit pénal général, paris, Montchrestien, 1991, p.303

* 14Jean Pradel op.cit. p.416

* 15Jean Pradel, op cit ; pp 826-828

* 16 G LEVASSEUR et Ali, op. Cit .p. 112

* 17 R. Chapus, Droit administratif général, II, 6e Ed., 1992, n°357.

* 18NYABIRUNGU MWENE SONGA .op cit P.423

* 19 L.JOINET, Lutter contre l'impunité - Dix questions pour comprendre et agir, Paris, La Découverte, 2002, p.9.

* 20NYABIRUNGU MWENE SONGA op. cit, p.327

* 21LAMY E., Théories générales du droit pénal congolais, Kinshasa, 1972, p 520.

* 22Kisangani Emizet François. Civil wars in the Democratic Republic of Congo: 1960-2010. Lynne Rienner, Londres, 2012, p2.

* 23Bouvier, Paul ; Bomboko, Francesca. « Le dialogue inter congolais : Anatomie d'une négociation à la lisière du chaos - contribution à la théorie de la négociation», Les Cahiers Africains,pp. 31-50.

* 24Kalumvueziko, Ngimbi. Congo-Zaïre, le destin tragique d'une nation. L'Harmattan, Paris, 2009, p239.

* 25De Villers Gauthier ; Omasombo Tshonda, Jean. « Zaire - la transition manquée : 1990-1997», Les Cahiers Africains, nos 27-28-29, 1997, p269.

* 26Kalumvueziko Ngimbi ; op. Cit, p220.

* 27Kisangani Emizet François, op. Cit, p2.

* 28Kalumvueziko Ngimbi ; idem. pp. 254-255

* 29De Villers Gauthier ; Omasombo Tshonda, Jean, op cit , p447.

* 30MUTATA LUABA, Droit pénal militaire, Des peines et incriminations de la compétence des juridictions militaires, T1 éd. du service de documentation et d'études du Ministre de la justice et garde des sceaux, Kinshasa, 2005, p 444

* 31 Art.2 al. 1, Ibidem

* 32 A.HUET et alii, Droit pénal international, PUF, 3ème éd. Paris, 2005, p. 102.

* 33 Le Tribunal Militaire International de Nuremberg a décidé que les violations du règlement de la Haye constituaient des crimes de guerre car durant la seconde guerre mondiale, ces règles s'étaient cristallisées en droit coutumier.

* 34 Art.8(2) du statut de Rome.

* 35 A.HUET et alii, Op. cit., p.102.

* 36 Art.85(5) du P.A.I du 08 juin 1977.

* 37 A.HUET et alii, Op. cit., pp .275 à 301, Art. 3 communs aux conventions de Genève.

* 38 O-L no 72/060 du 25 Septembre 1972 portant Code de Justice Militaire, art.502.

* 39 Art. 6(b) de l'Accord de Londres portant statut du Tribunal Militaire International de Nuremberg.

* 40 Art.72 du C.P.M.

* 41 J.ROBERT et J.DUFFAR, Op.cit., p.276. 

* 42 Art.2 de la Convention de 1948, voire également l'Art.6 du Statut de la C.P.I.

* 43 A. HUET et alii, Op.cit. p.101, Art.1 de la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide.

* 44 Affaire Bosnie-Herzégovine c/Serbie et Monténégro, Application de la convention pour la prévention et la répression du génocide.

* 45 Art. 530 Code de justice militaire de 1972.

* 46L'article 164 du code pénal militaire corrige pour l'essentiel les lacunes de la définition précédente.

* 47 A. HUET, Op.cit., p101.

* 48Ibidem.

* 49 Art. 4 de la convention de 1948.

* 50Voir Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, Le Procureur c. Duko Tadic', affaire no IT-94-1-AR72, arrêt du 2 octobre 1995, par. 134 ; Le Procureur c. Delalic' et consorts, affaire no IT-96-21-A, arrêt du 20 février 2001, par. 163 à 173.

* 51Cité dans Commission interaméricaine des droits de l'homme, Parada Cea et al. v. El Salvador, affaire no 10.480, rapport no 1/99, 27 janvier 1999, par. 116. Voir Comité international de la Croix-Rouge, op. Cit. p. 813.

* 52 P.CURRAT, Les crimes contre l'humanité dans le statut de la CPI, LGDJ, 2006, p. 33.

* 53 Art. 6(c) du statut du tribunal militaire international de Nuremberg.

* 54 Art.165 du code pénal militaire.

* 55 La Convention de 1968 sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité prévoit toutefois que les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles (art. 1 b)).

* 56Voir, par exemple, Comité des droits de l'homme, Observation générale no 31 (2004) sur la nature de l'obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, par. 18; Cour interaméricaine des droits de l'homme, Almonacid-Arellano et al. v. Chile, arrêt du 26 septembre 2006, par. 114.

* 57WILFRID J., Droit pénal général, 2ème éd. Montchrestien, Paris, 1991, p304.

* 58LARROUMET (Ch), Réflexion sur la responsabilité civile : Evolution et problèmes actuels en droit comparé, Université McGill, Montréal, 1983, p7.

* 59Idem, p 12

* 60KATUALA KABA KASHALA, Code civil Zaïrois annoté, éd. BATENA NTAMBUA, Kinshasa, 1995, pp 151, 152.

* 61Http:www.hrw.org/french/resports/rdc/2001/Congo. Consulté le 16 janv. 2014 à 10h49'.

* 62Http : www.ictj.org/rdc/justice traditionnelle. Consulté le 16 janv.2014 à 11h00.

* 63DUPUIS (M), Droit international public, 2ème éd., Dalloz, Paris, 1993, p 339.

* 64DE PAGE H., Traité élémentaire de droit civil Belge, 4ème éd., t2, vol I, Bruylant, Bruxelles, 1990, p 489.

* 65MUGANGU MATABARO (S), Les droits de l'homme dans la région des grands lacs réalité et illusion, Bruylant Academia, Bruxelles, 2003, pp 298-299

* 66Journal le Souverain, Bukavu, mai-juin 2009, p 9.

* 67MUGANGU MATABARO (S), Op. Cit, p 300.

* 68MATHIEU et WILLAME (J), RDC Chronique d'un entre-deux guerres : octobre 1996 juillet 1998, 2ème éd., Paris, 1998, p 175

* 69 Ce droit est garanti «alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles»

* 70 Observation générale no 31, par. 15 et 16. De plus, «selon le cas, la réparation peut prendre la forme de restitution, réhabilitation, mesures pouvant donner satisfaction (excuses publiques, témoignages officiels), garanties de non-répétition et modification des lois et pratiques en cause aussi bien que la traduction en justice des auteurs de violations des droits de l'homme».

* 71Arhuacos c. Colombie, constatations concernant la communication no 612/1995, 29 juillet 1997 (A/52/40 (vol. II), annexe VI, sect. Q, par. 8.2 et 8.8) et Bautista de Arellana c. Colombie, constatations concernant la communication no 563/1993, 27 octobre 1995 (A/51/40 (vol. II), annexe VIII, sect. S, par. 8.2 et 8.6).

* 72 La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples prévoit la création de la commission africaine des droits de l'homme et des peuples, dont la jurisprudence est examinée ici. Un protocole relatif à la Charte africaine, adopté en 1998 et entré en vigueur le 25 janvier 2004, porte création de la cour africaine des droits de l'homme et des peuples.

* 73Voir, par exemple, Social and Economic Rights Action Center et al. c. Nigeria, communication no 155/96 ; et Mouvement burkinabe des droits de l'homme et des peuples c. Burkina Faso, communication no 204/97.

* 74 S. MONSEUR et A.FISCHER, Réconcilier l'inconciliable ? Comment rendre justice et mémoire, un travail sur le passé pour un avenir de paix et démocratie, Etude de justice et de paix, 2005, p.23, cité par G.B.KODOU, « Amnistie et impunité des crimes internationaux », in Droit fondamentaux, n°4, janvier - décembre 2004 , pp .67-95. Disponible sur le site http:// www. Droit-fondamentaux. Org/ (visité le 09 fevrier 2014).

* 75Idem.

* 76 E.H. GUISSE, « le procès équitable », in Rencontres internationales sur l'impunité des auteurs des violations graves des droits de l'homme, organisée par la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme(CNCDH) et la Commission Internationale des Juristes (CIJ) sous les auspices des Nations Unies (du 2 au 5 novembre1992), Palais des Nations, Genève, p.17, cité par KODOU, G.B. « Amnistie et impunité des crimes internationaux »,pp. 67-95.






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