Section 2 : Sur le plan de l'équilibre
régional
Au Maroc, aucune politique régionale et
d'aménagement du territoire n'a pu arracher ou au moins minimiser les
disparités socio-économiques. La répartition
régionale des créations des PME immatriculées au registre
du commerce confirme la concentration des sociétés commerciales
dans la région du grand Casablanca qui représente 33% de
l'ensemble des immatriculations et au centre.
Au Maroc, la logique du Maroc utile et Maroc inutile
concrétisée par le déséquilibre entre les
régions en termes de ressources et d'emplois, le développement de
l'économie de rente et l'échec de l'Etat dans le sens de
développement de l'esprit d'investissement dans le domaine de production
sont les facteurs responsables du déséquilibre économique
entre les régions et les variables qui entravent les PME de jouer le
rôle de compensation des écarts économiques et sociaux
entre les régions.
En Tunisie et abstraction faite des rabattements fiscaux des
exonérations accordées aux PME en générale, des
faveurs spéciales sont réservées à toute
installation dans les zones territoriales jugées
déshéritées.
Pour le maintien de l'équilibre économique entre
les régions le gouvernement tunisien a aussi utilisé la
particularité unique des PME pour encourager l'implantation de ces
dernières dans des régions déshéritées.
En effet, la Tunisie a été successivement
divisée en trois puis en cinq zones, à chacune ont
été confiés des avantages spécifiques, allant
jusqu'à l'exonération à concurrence de 90% du droit
proportionnel de la patente.
Section 3 : Sur le plan d'absorption du
chômage
Malgré leurs nombre existant sur le territoire, le
problème de financement et la difficulté d'accès au
marché public sont les principales contraintes qui empêchent les
PME d'absorber un nombre important du chômage.
Même si le gouvernement de BENKIRANE a
réservé 40% des appels d'offres du marché public aux PME,
les mécanismes de financement et les incitations fiscales
accordés à ces dernières restent des barrières en
fer pour l'accès de cette famille d'entreprise à ce
marché.
En effet, le financement des PME marocaines est très
marginal en raison de l'étroitesse et des conditions exigées par
les banques. C'est pourquoi ces PME recourent d'une manière quasi
exclusive à l'autofinancement pour confronter leurs besoins de
financement, ce qui leurs posent beaucoup de difficultés qui entravent
d'une part leur croissance et d'autre part leur capacité d'absorption du
chômage.
Cette particularité des PME marocaines est subite et
non choisi faute d'alternatives. Il s'agit là d'un problème
d'asymétrie de l'information et de la conception de facteur risque entre
le banquier et l'entrepreneur. Il faut que ces deux acteurs, indissociables
économiquement, puissent établir un langage commun afin qu'il y
ait un lien entre les demandeurs des biens et les apporteurs d'argent.
La problématique de financement de la PME au Maroc est
aussi liée:
- Au manque de transparence des entreprises et de
professionnalisme dans la présentation des dossiers de crédit.
- A la réticence des banques à octroyer des
prêts aux PME,
- A la sous-exploitation des différentes sources de
financement
Ces analyses et diagnostics résultent à ce que
la problématique de financement constitue souvent un point de
désaccord entre la banque et la PME :
Au niveau des banques : faiblesses au niveau
de gouvernance, la capitalisation, la transparence financière et la
viabilité des projets.
Au niveau des PME : les conditions
d'accès aux crédits (taux d'intérêts, garantie,
etc.)
En outre, le facteur institutionnel, notamment la
complexité des règles comparées aux moyens des PME
marocaines, constitue aussi une importante barrière d'accès des
PME au marché public.
Même si les efforts du gouvernement marocain au profit
des PME, la corruption, le manque de transparence et le retard du paiement
sont des variables responsables de la faiblesse de ces entreprises.
En Tunisie, l'objectif de création de la banque de
financement des PME est d'accorder des avances financières au profit
des PME adjudicataires d'un marché public. Le capital de cette banque
est constitué dans une première étape par des fonds
publics, puis il sera ouvert aux institutions financières
privées.
On note que chaque retard de remboursement des dettes à
la banque des PME est justifié par le retard de règlement des
factures par l'Etat. Cela protège les PME contre chaque déficit
budgétaire.
Les principaux objectifs de la banque des PME sont la
mobilisation des crédits nécessaires à la dynamisation de
l'investissement, l'amélioration des taux d'encadrement, l'impulsion de
l'initiative privée et l'investissement dans les créneaux ne
disposant pas de mécanismes incitatifs.
En effet, les efforts tunisiens dans le financement des PME
sont justifiées par :
- L'augmentation de leur contribution dans le P IB national
en passant de 5,5 en 2005 à19% en 2012 (presque le double de la
contribution des PME marocaines dans le PIB national (10%)) ;
- L'absorption d'une grande masse du chômage (les PME
tunisiennes sont devenues le premier maillon de la chaine économique
nationale).
Pour conclure cette partie, on signale que malgré les
écarts dégagés entre le Maroc et la Tunisie,
l'expérience tunisienne reste très modeste et très
limité par rapport à d'autres pays envoie de
développement en l'occurrence la Turquie, le brésil, l'Inde,
l'Afrique du sud ...etc.
Mais après le printemps arabe, le nouveau gouvernement
tunisien a tenu compte de cette insuffisance nationale pour le
développement des PME. Cette insuffisance était signalée
en 2012 par Le directeur de L'organisation arabe pour le développement
industriel et des mines (OADIM), Mohamed Ben Youssef, dans son
participation à la 6ème rencontre arabe des petites et moyennes
industries (PMI) à Gammarth (Banlieue Nord de Tunis), a pour sa part,
souligné que « malgré l'accroissement des
institutions de micro crédit, la participation de ces dernières
au financement des PME reste très limitée dans les pays arabes.
Cette contribution est estimée à 8,3% du total des
opérations de crédit contre 26,8% dans les pays de l'organisation
de coopération et de développement économique
(OCDE) ».
Le chef du gouvernement provisoire, Hamadi Jébali,
avait justifié cette intervention dans la même rencontre :
- Sur le plan national, il a relevé
qu'en Tunisie, les efforts sont actuellement axés sur l'instauration
d'un cadre qui permettra aux PME, qui représentent 92% du tissu
industriel, de jouer pleinement leur rôle de créatrices de
richesses et d'emplois. Il s'agit, au juste, de renforcer la bonne gouvernance
au sein des PME, de garantir un climat d'affaires plus transparent, d'orienter
"équitablement" l'investissement public et privé vers les
régions intérieures et d'assurer aux diplômés du
supérieur des opportunités d'emploi.
- Sur le plan international, Mr.
Jébali a fait remarquer que son gouvernement s'emploie à
élargir le réseau de ses partenaires économiques. Il a
rappelé, à ce sujet, que les entreprises arabes ou à
participation arabe opérant en Tunisie ne dépassent pas 104
entreprises, soit uniquement 2% du tissu industriel tunisien.
Remarque :
Si nous avons pris le cas de la Turquie au lieu de la Tunisie,
l'écart entre les deux pays (le Maroc et la Turquie) sera plus grand et
les deux pays deviennent incomparables.
Les petites et moyennes entreprises (PME) constituent
l'épine dorsale de l'économie turque. La promotion de leur
développement est un facteur indispensable pour favoriser
l'entrepreneuriat, la concurrence, l'innovation et la croissance dans le
pays.
Les PME en Turquie représentent 99 % des
entreprises et 80 % des emplois, et assurent d'après les
estimations jusqu'à 57 % de la valeur ajoutée totale dans
l'économie. Le développement du financement à moyen terme
contribue largement aux performances des PME en termes de chiffres d'affaires,
d'investissement et de création d'emplois.
À travers le programme de financement
élaboré par la politique économique nationale en entre
2007et 2010, les entreprises ont bénéficié d'un coût
du capital compétitif, ce qui leur a permis d'accroître leurs
débouchés commerciaux à long terme, et surtout de sortir
de la crise. Les PME qui ont utilisé des fonds provenant du projet de
financement appartiennent pour la plupart aux secteurs du textile, du tourisme,
de l'énergie et de la production de caoutchouc et de plastique.
La couverture géographique des PME s'étend
à la plupart des régions de la Turquie, et surtout aux zones mal
desservies de l'Est et du Centre.
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Source : babnet.net
En fin, il est intéressant d'observer comment
fonctionne la commande publique dans d'autres pays du monde afin de pouvoir
s'appuyer sur leurs expériences :
D'abord nous analyserons le cas de l'Argentine et de
l'Afrique du Sud en matière de rationalisation des marchés
publics. Puis, nous tirons les enseignements des expériences de
l'utilisation de la dématérialisation aux États-Unis. En
suite, nous observerons les services de conseils et d'assistance
imaginés par les Indiens. En fin, nous nous pencherons sur un exemple de
coopération entre entreprises au Brésil, sur les
références assouplies aux États-Unis et l'aide
financière proposée en Inde. L'ensemble de ces
observations est tiré de l'ouvrage « Améliorer
l'accès des PME aux marchés publics : l'expérience
des pays sélectionnés ».
- Rationnaliser les marchés
publics:
L'Argentine et l'Afrique du Sud ont mis en place des mesures
intéressantes concernant la rationalisation des marchés
publics. En Argentine, en 1996, dans la ville de Buenos Aires le montant des
marchés publics est de un milliard de dollars américains. Les
élus de la ville se sont rendus compte que l'ensemble des marchés
conclus était en moyenne 30% plus élevé que les prix du
marché. Ils ont décidé de mettre en place des mesures
drastiques pour remédier à cette dérive. Ces mesures
étaient :
- La suppression des marchés fermés. Ces
marchés étant réservés à quelques
entreprises.
- Lancement d'une campagne de communication auprès des
entreprises visant à accroître le nombre de fournisseurs qui
s'intéressent aux appels d'offres de la municipalité.
- Les acheteurs doivent vérifier que les offres des
candidats sont alignées sur les prix du
marché. Après la mise en place de ces mesures, la ville
a économisé 200 millions en un an.
Cette expérience nous montre qu'en communiquant
auprès des entreprises et en ne limitant pas l'accès
d'entreprises (souvent les moins influentes, comme les PME), les
dépenses publiques sont mieux contrôlées. Plus
d'intervenants signifie plus de concurrence. Ainsi les PME et les
administrations ressortent gagnantes de cette mesure.
- Harmoniser les formulaires:
Du côté de l'Afrique du Sud, un livre vert incite
les pouvoirs publics à utiliser les documents contractuels (les
documents équivalents au DCE français) standard et de cesser les
conditions contractuelles spécifiques qui ne sont pas justifiées
pour certains appels d'offres. Le but de cette standardisation est bien
évidement d'harmoniser l'ensemble des procédures. Les documents
contractuels sont plus conviviaux et permettent d'être plus facilement
compris par les entreprises. Ils ne comportent plus d'exigences ou de
conditions trop onéreuses pour les PME. Ces documents sont
diffusés en plus grand nombre et permettent d'atteindre plus de
fournisseurs.
- Un échec dans la
dématérialisation:
Les États-Unis ont vécu une expérience
malheureuse dans leur désir de dématérialiser les
procédures. La France doit tirer les conclusions de cet échec
pour en éviter un semblable. En 1993, un portail Internet est
crée : FACNET. Cette interface créée dans le but
d'économiser un demi-milliard de dollars est un échec. Le
système a échoué car il ne prenait en compte que les
marchés publics d'un montant compris entre 2 500 $ et 100 000 $,
alors que 75% des marchés publics sont inférieurs à 2 500
$. De plus, ce revers s'explique par l'obligation pour les PME d'investir dans
des logiciels et matériels compatibles coûteux. La leçon
à tirer de cette expérience est de prendre conscience que les
PME, bien que très bien équipées, peuvent être
confrontées au problème d'installation de la signature et des
certificats électroniques. Il serait dommage de voir cette initiative
échouée à cause d'un système que les PME ne
maîtrisent pas.
- Accompagner les PME :
Au niveau du conseil et d'assistance, ce sont l'Afrique du Sud
et l'Inde qui brillent par leurs initiatives. L'Afrique du Sud a crée
des centres conseils dans chaque région qui viennent accompagner les PME
durant toute la procédure de réponse à un appel d'offres.
L'existence de ces centres est connue par les entrepreneurs pouvant s'y
référer en cas de problème. De même en
Inde, la société nationale des petites entreprises (NSIC),
fournit de l'information, de la formation et effectue de l'assistance technique
auprès des PME répondant aux marchés publics. De
plus, les petites industries membres de la NSCI sont traitées comme des
fournisseurs classiques : il n'y a pas de différence faite avec les
grandes entreprises. Cependant, ces petites industries, à la
différence des plus grandes, bénéficient d'une bonne
information concernant les appels d'offres. Les plans et les cahiers des
charges leur sont fournis gratuitement bien qu'ils soient payants pour les
grandes entreprises. Les centres d'informations existants en Inde et en
Afrique du sud n'ont, à ce jour, pas d'équivalent dans notre
pays. Il est essentiel de mettre en place de telles structures et d'informer
les PME de leur existence.
- Les coopératives brésiliennes
:
Au Brésil, une expérience très
intéressante a eu lieu concernant le rapprochement d'entreprises. On
pourrait comparer cela au groupement d'entreprises. Il s'agit d'une
coopérative de PME qui se constitue pour répondre à un
appel d'offres. Par ce système, l'État brésilien a pu
profiter d'une meilleure prestation technique pour un coût moins
élevé. Le fait de grouper de la sorte les PME crée un
dynamisme entre elles. Elles se sentent obligées de proposer une
prestation de qualité pour ne pas dévaloriser les PME sur le
produit final. La prestation est souvent meilleure que celle
réalisée par une seule grande entreprise. Il est certain
que ce système est difficilement exportable dans d'autres pays, du fait
des différences de mentalités et d'habitudes. Pourtant, il nous
montre l'importance de favoriser la collaboration entre les PME qui effectuent
des taches précises pour répondre à un appel d'offres.
- Aider financièrement les entreprises
:
Les États-Unis et l'Inde se démarquent par leur
implication en matière de cautionnement et de garanties. Aux
États-Unis, la garantie qu'obtiennent les entreprises auprès de
leurs banques est basée sur les compétences que le banquier
perçoit de l'entrepreneur, et non uniquement sur une sûreté
réelle. Cela favoriserait indéniablement les PME ayant
la capacité de répondre aux marchés publics mais ne
possédant pas toujours les garanties matérielles. En
Inde, le pays permet aux PME de payer les conditions de participations lors du
dépôt de candidature d'une offre et elles ne sont pas tenues des
cautions de bonnes fins lorsqu'elles sont retenues. Cela atténue le
besoin en fond de roulement et de ce fait, favorise la trésorerie de
l'entreprise.
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