Les difficultés rencontrées par le conservateur des titres immobiliers( Télécharger le fichier original )par Karim et Grace KAPITENE et TEPEANZI Ecole nationale du cadastre et des titres immobiliers (ENACTI), Lubumbashi RDC - Graduat 2012 |
§II. LES INJONCTIONS ET LES INGERENCES LIEES A L'ENVIRONNEMENT EXTERNEEtant un agent et/ou un fonctionnaire public, le conservateur des titres immobiliers de Butembo oeuvre sous l'autorité de la direction des titres immobiliers situé à KINSHASA. Cette Direction, au lieu d'exercer un contrôle de tutelle pour dire se limiter seulement à un contrôle technique, cherche à exercer un contrôle hiérarchique juste pour vouloir imposer ses voeux (A). Il en est de même des autorités politico-administratives, qui, pour elles, cherchent à interférer dans la gestion du sol (B). La justice en RDC étant à double vitesse, c'est-à-dire une justice de riche cherche aussi à imposer ses décisions au conservateur (C). A. LES DICISIONS DE LA HIERARCHIENormalement, pour mener à bien sa tâche, le conservateur ne doit avoir pour guide que la loi et sa propre conscience. Faute de ce faire, il se verra courir le risque de commettre énormément d'erreurs entamant même ses propres mérites74(*) Dans la pratique, le conservateur subit des injonctions de la part de ses supérieurs hiérarchiques. De fois ces injonctions sont sous forme de menace (1). Mais aussi, lors du recrutement des agents, la hiérarchie intervient encore une fois (2). 1. Menaces de la hiérarchie Ces menaces interviennent sous forme de doléances et sous formes des injonctions en vue de permettre au CTI de conserver son poste, s'il obéissait. a. Menaces-doléances Le CTI est soumis à une menace ayant la forme d'une supplication, plus encore mieux, d'une diligence. Il doit tout faire pour nourrir et remplir les poches de ses supérieurs hiérarchiques. Il doit collecter de l'argent à ceux-ci pour maintenir son poste. Toutes ces manigances sont dues au mode de son recrutement. Etant un fonctionnaire, son recrutement s'effectue sous forme de « nomination ». Le CTI est nommé sans pouvoir discuter son statut. Il ne doit pas imposer sa volonté ou encore ne doit pas discuter le statut. C'est l'esprit de l'art.6 du statut du fonctionnaire ou encore de la loi n°81-003 du 17 juillet 1981 portant statut du personnel de carrière des services publics lorsqu'il dispose : « l'agent régi par ce statut est dans une situation légale et réglementaire. Il doit subir les modifications apportées au présent statut ». Dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une décision de nomination, les agents publics sont dans une situation légale et réglementaire75(*). Telle est la situation de tous les fonctionnaires dont on sait qu'ils ne sont jamais recrutés par contrat76(*). Ce caractère réglementaire fait que l'administration voire la hiérarchie peut modifier unilatéralement la situation des fonctionnaires77(*) de même que leurs droits et avantages peuvent être accrus, de même leurs obligations et sujétions peuvent être aggravées, alors qu'ils sont en cours de carrière, sans qu'ils soient juridiquement fondés à s'en plaindre78(*). Profitant de cette situation du conservateur, la hiérarchie menace celui-ci, par un coup de téléphone, « d'une nouvelle mise en place », et que donc le conservateur doit tout faire ou la hiérarchie impose au conservateur une quelconque somme d'argent pour qu'il soit maintenu. La hiérarchie dit souvent au conservateur que ce poste nécessite beaucoup d'allégeance et son détenteur doit avoir l'esprit de monnayage. Pour dire la hiérarchie transforme le conservateur à un « collecteur d'argent ». Cela pousse à une politisation de la hiérarchie et crée ainsi une instabilité du conservateur des titres immobiliers qui, tout le temps ne doit chercher qu'à être maintenu. Sans monnayage, de fois, l'on se trouve sans fonction ou nulle part sur la nouvelle liste de mise en place, mais, l'on constate seulement son remplacement par une autre personne. La question qui reste à se poser est de savoir à qui le conservateur mis à la porte doit se plaindre ? b. Menace-Injonction79(*) L'essor et l'intérêt particulier que connaissent les immeubles dans notre pays ne laissent pas le CTI à l'abri de nombreuses interventions et même des injonctions de leurs chefs hiérarchiques. Beaucoup parmi eux cherchent à obtenir un ou plusieurs terrains pour eux-mêmes soit pour leurs connaissances et amis. Pour ces chefs, leur volonté doit à tout prix être satisfaite, même au mépris de la loi et des droits des tiers. Ces entorses faites à la loi et aux droits des tiers de façon délibérée ses manifestent surtout au sujet des biens dits, « Res nulius » (chose sans maître). Sans anticiper sur ces biens, disons d'orées et déjà la procédure d'abandon de ces biens est entachée de beaucoup d'irrégularités. C'est pourquoi, la réattribution de ces biens engendre d'innombrables procès devant les cours et tribunaux à travers le pays. A cet égard, il y a lieu de constater que la plupart de ces procès ont donné gain de cause aux personnes auxquelles on a retiré ces biens erronément80(*). Toutes ces erreurs et recherches de solutions découlent de l'exécution par le CTI des ordres reçus de leurs chefs hiérarchiques dans le souci de se faire accepter par ceux-ci et de se faire maintenir au poste. A part ces menaces, le CTI reçoit aussi des injonctions dans le recrutement des agents. 2. Injonction dans le recrutement des agents Le recrutement dans les fonctions publiques suit un mode déjà préétabli. Ce mode est conduit par le principe « d'égalité devant les services publics de l'Etat » tel que disposé à l'art.13 de notre constitution du 18 février 2006 : « Aucun congolais ne peut, en matière d'éducation et d'accès aux fonctions publiques ni en aucune autre matière faire l'objet d'une mesure discriminatoire, qu'elle résulte de la loi ou d'un acte de l'exécutif, en raison de sa religion, de son origine familiale, de sa condition sociale, de sa résidence, de ses opinions ou de ses convictions politiques, de son appartenance à une race, à une ethnie, à une tribu, à une minorité culturelle ou linguistique ». Et l'art 22 du décret-loi n°017/2002 du 03 octobre 2002 portant code de conduite de l'agent public de l'Etat81(*)toujours dans le cadre d'assurer l'égalité entre citoyens, nous exhorte en ces termes : « l'agent public de l'Etat doit éviter, dans l'exercice de ses fonctions, l'ethnie, les convictions politiques ou philosophiques, ou d'autres considérations. En RDC, il est toujours difficile de marier le texte à la pratique. L'on se livre souvent à des manoeuvres tendant à réduire tout ce principe d'égalité d'accès dans les fonctions publiques. Parlant du recrutement du personnel dans les nouvelles administrations crées par la rébellion, MUKULU VAWITE écrit : « il est un fait indéniable : la quasi-totalité des agents oeuvrant dans nos nouvelles administration a été affectée sur base des liens parentaux ou animaux parce qu'étant de telle ou telle autre obédience. A titre illustratif, nous citons le cas le plus frappant, celui de la promotion des sympathisants de la DCF/NYAMWISI82(*). De fois, une simple injonction de la hiérarchie ou des autorités hiérarchiques suffit pour être retenu comme agent dans le service public en RDC83(*). Ce sont ces fléaux auxquels se heurte le CTI de Butembo. Le chef hiérarchique dit, souvent par simple coup de téléphone : « je t'envoie x. c'est mon neuve. Cherche où le mettre et assure-lui un bon travail ». soit encore : « je t'envoie y, il est du parti politique z. Sache où lui caser ». Ces gens que l'on a toujours envoyés n'ont pas une compétence requise d'un agent des services de la conservation des titres immobiliers. Pour tout dire, un modèle type de recrutement porte atteinte au principe d'égal accès aux fonctions publiques ; et fait perdre au conservateur la gérance du recrutement des agents. Les chefs hiérarchiques ne sont pas les seuls à donner des injonctions au CTI, il y a aussi des autorités politico-administratives qui affluent le conservateur par des injonctions et des interférences dans la gestion du sol. * 74 MAKOKILA MAMBULU, op.cit., pp.24-35. * 75 André de LAUBADERE, Traité de droit administratif, Tome 1, 11e éd., éd. LGDJ, Paris, 1990, p.320. * 76 Charles DEBBASCH, Institutions et droit administratifs, éd. PUF, Paris, 1978, p.252. * 77 MUHINDO MALONGA, droit administratif et institutions administratives, op.cit., p.348. * 78 Idem, p.349. * 79 MOKOKILA MAMBULU, op.cit., pp.35 et 36. * 80 Nous avons repris in expressis verbis donc à la lettre le vade mecum du conservateur suite à l'importance de cette matière qui concorde plus avec la pratique. * 81 Art .22 du décret-loi n° n°017/2002 du 03 octobre 2002 portant code de conduite de l'agent public de l'Etat. * 82 T. MUKULU VAWITE, recrutement du personnel dans les nouvelles administrations crées par la rébellion ; cas de la ville de Butembo, TFC-UCG, 1999-2000, p.22. * 83 NGUOMOJA VYATSUKA, Lois des services publics : essai de compréhension, TFC-UCG, Butembo, 2003-2004, p.33. |
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