6. 5 Phases lamellaires.
La question naturelle est l'extension de l'étude
au cas où nous avons plus d'une
hapitre 5 : Mécanique Statistique des
membranes confinées .. 141
retés aléatoires.
Dans notre analyse, nous partons d'une phase
lamellaire composé de deux membranes fluides parallèles (neutres)
sans impuretés. Les effets de ces entités sur la physique seront
discutées ci-dessous. La cohésion entre ces membranes en bicouche
est assurée par des interactions attractives de van der Waals
[18], qui sont équilibrées, à courte
distance de séparation, par une répulsion forte provenant des
forces d'hydratation [19] et des fluctuations de forme
stériques résultant des ondulations membranaires
[8].
Pour deux bicouches lipidiques parallèles
séparées par une distance finie l, l'énergie
totale d'interaction (par unité d'aire) est donnée
par
V (l) =
VH (l) + VW
(l) + VS
(l) .
(5.59)
Le premier terme représente l'énergie
d'hydratation, qui agit à petite distance de séparation (de
l'ordre de 1nm). Ces forces d'hydratation ont
été découvertes pour les multi-bicouches sous contrainte
externe [18]. La forme proposée pour cette
énergie est
VH (l) =
AHe-l/ëH . (5.60)
Les valeurs typiques de l'amplitude AH et de
la portée ëH sont de l'ordre de AH ?
0.2J/m2
et ëH ?
0.3nm.
Le deuxième terme désigne
l'énergie d'interaction de van der Waals, qui résulte de la
polarisabilité des molécules lipidiques et aussi de celle des
molécules d'eau. Cette énergie d'interaction a la forme
standard
hapitre 5 : Mécanique Statistique des
membranes confinées .. 142
VW (l) =
-12ð
I_l2-2
(l + ä)2 + (l
+ 2ä)2] . (5.61)
La constante d'Hamaker est dans l'intervalle W '
10-22 -
10-2iJ. Dans l'expression
ci-dessus, l'épaisseur de la bicouche lipidique ä est de l'ordre de
ä ' 4nm.
Le troisième terme représente
l'énergie d'interaction stérique, qui est due aux ondulations de
la membrane. D'après Helfrich [8], cette énergie
(par unité d'aire) est donnée par
2
Vs (l) =
cH.
(kBT)2
Ici, kB est la constante de Boltzmann, T est
la température absolue, et ê est le module de courbure usuel des
deux membranes. Pour deux bicouches ayant des constantes de rigidité de
courbure êi et ê2, nous avons
ê = êiê2/
(êi + ê2). La
valeur précise du coefficient cH est encore sujet de
controverses. En effet, d'après Helfrich cH '
0.23 [8], mais les simulations
numériques prédisent des valeurs bien inférieures,
à savoir cH ' 0.16 [24],
cH ' 0.1 [25], cH '
0.07 [26], et cH '
0.08 [27]. Par conséquent,
l'énergie d'interaction stérique est considérable,
uniquement pour des membranes ayant de petits modules de courbure.
Généralement, cette énergie s'annule, pour des interfaces
rigides (ê -* oo).
Notons, tout d'abord, que la phase lamellaire reste
stable, pour une énergie potentiel minimale, à condition que la
profondeur du potentiel soit comparable à l'énergie thermique
kBT. Elle dépend, en particulier, de la valeur de l'amplitude
W. Pour des membranes non chargées, la constante d'Hamaker peut varier
en changeant la polarisabilité du milieu aqueux.
D'un point de vue théorique, Lipowsky et
Leibler [20] ont prédit une transition
hapitre 5 : Mécanique Statistique des
membranes confinées .. 143
avec l'exposant critique 0
[20], qui est de l'ordre de 0 '
1.00#177;0.03.
Un tel exposant a
de phase, qui fait passer le système d'un
état où les deux membranes sont en contact, à un
état où ils sont totalement séparées. Une telle
transition est de premier-ordre, si l'énergie stérique
est prise en compte. Par contre, si cette énergie est ignorée
(pour les membranes relativement rigides), la transition est plutôt de
second-ordre. Nous nous limitons au cas où la transition est de
seconde ordre. Il a été montré qu'il existe un certain
seuil W,, au-delà duquel l'interaction de van der Waals est suffisante,
pour que les deux membranes soient en contact. Au-dessus de cette amplitude
caractéristique, les ondulations des membranes deviennent plus
dominantes que les forces attractives, ce qui conduit alors à une
séparation totale des deux membranes . En fait, la valeur critique W,
dépend des paramètres du problème, tels que la
température T, l'amplitude AH, la portée ëH,
l'épaisseur S de la bicouche, et le module de courbure i. A
température ambiante, et pour AH ' 0.2
J/m2, ëH '
0.3 nm et S ' 4 nm, W, a
été trouvé de l'ordre de W, '
(6.3 - 0.61)
x 10-21J, quand la
constante de rigidité est de l'ordre de i ' (1 -
20) x 10-19J. Par
exemple, pour la lécithine d'oeuf, la constante de rigidité de
courbure est de l'ordre de i ' (1 -
2)x10-19J
[25], et la valeur critique correspondante W, se trouve dans
l'intervalle W, ' (6.3 -
4.1)x10-21J.
Notons que la valeur typique W, correspond à une certaine
température, appelée température de
délocalisation T, [20,
21].
En particulier, il a été trouvé
[20] que, lorsque la valeur de l'amplitude critique est
approchée par dessus, la séparation moyenne entre les deux
membranes diverge comme
(l)0 =
î0? ~ (T, -
T)-o , T T,- ,
(5.63)
hapitre 5 : Mécanique Statistique des
membranes confinées .. 144
tô "' 1 + 4
+ O (w2~
S1
, (impuretés attractives) ,
(5.65)
été calculé, en utilisant la
théorie de champ moyen et le Groupe de Renormalisation.
Maintenant, nous supposons que la phase lamellaire est
piégée dans un milieu aqueux trouble. Comme première
implication, les impuretés modifient subtantielle-ment le
phénomène de transition de délocalisation, en particulier,
la température critique. Pour la simplicité, nous admettons que
les deux membranes fluides adjacentes sont physiquement identiques. Alors, nous
devons considérer deux situations physiques distinctes, selon que les
impuretés attirent ou repoussent les deux membranes. Comme nous avons
montré au-dessus, pour les impuretés attractives, la
rugosité de la membrane, î1, est importante. Dans ce cas,
l'énergie stérique domine. Par conséquent, nous nous
attendons à ce que la transition de délocalisation se produise
à une température critique, T7 , plus faible que celle sans
impuretés, Te. Toutefois, pour des impuretés
répulsives, nous avons une tendance opposée, à savoir que
la transition de phase se passe à une température critique
supérieure à Te (sans impuretés). Cela peut
être expliqué par le fait que la rugosité de la membrane
est moins importante, et que l'énergie de van der Waals domine.
Dans tous les cas, la séparation moyenne (l) se
comporte comme
(l) = î1
~ (T: - T)-O
, T ? T*-
e . (5.64)
La nouvelle température critique
Te* peut être estimée comme suit. En
utilisant les relations (5.28) et
(5.31), nous montrons, au premier ordre dans
le couplage d'impuretés w, que
x*e -
xe ti -w + O
(w2) , (impurets
rpulsives) . (5.71)
hapitre 5 : Mécanique Statistique des
membranes confinées .. 145
î? w
LN 1
-4
|
+ O
(w2) , (impurets
rpulsives) .
|
(5.67)
|
En combinant les relations
(5.63) à
(5.66), nous trouvons que la
différence entre les deux températures critiques
Te et Te* (sans et avec
impuretés) est comme suit
Te -
Te* ti w +
O (w2) ,
(impuretés attractives) , (5.67)
Te -
T*e ti -w +
O (w2) ,
(impurets rpulsives) . (5.68)
Les préfacteurs dans les comportements
précités restent inconnu. Le changement de température est
alors proportionnel à la fraction volumique d'impuretés et leur
force d'interaction avec les membranes formant la phase lamellaire. Alors, nous
sommes dans une situation semblable aux effets de taille finie. Pour les
membranes chargées, qui forment une phase lamellaire, il a
été trouvé [20] que la séparation
moyenne entre deux bicouches adjacentes se comporte comme
(l)0 =
î0? ti
(x -
xe)-ø ,
x ? xe , (5.69)
avec x la concentration ionique moyenne du
milieu aqueux, et xe sa valeur critique. Par exemple, pour
le DPPC dans la solution de CaCl2,
xe est dans l'intervalle [22] :
xe N 84 -
10mM. En présence d'impuretés, la
séparation moyenne se comporte comme : (l)
=î? ti (x -
x*e)-ø,
avec le même exposant ø. Dans ce cas, nous
avons
x*e -
xe ti w + O
(w2) , (impurets
attractives) , (5.70)
hapitre 5 : Mécanique Statistique des
membranes confinées .. 146
Notons, enfin, que nous aurons les mêmes
commentaires qu'avant.
|