1.2. Bref aperçu des conflits et du processus de
paix de 1998 à 2003
Dans cette section, il sera question d'examiner
brièvement les conflits armés qui ont nécessité
l'intervention des médiations extérieures pour leur
résolution et qui ont conduit à la mise en place d'une transition
démocratique concertée.
1.2.1. Des conflits armés
A la suite d'une guerre éclaire conduite par une
coalition des forces nationales et régionales (forces armées
étrangères notamment le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda), le 16
Mai 1997, le président Mobutu s'est exilé au Maroc, un jour
seulement avant l'entrée des forces rebelles à Kinshasa et
l'auto-proclamation de Laurent désire Kabila en qualité de
président de la République Démocratique du Congo, nouvelle
dénomination du Zaïre.
Ayant constaté que ses anciens alliés se
comportaient en RDC comme en territoire conquis, Laurent Désiré
Kabila avait décidé de rompre ces alliances, le 27 Juillet 1998.
Cette rupture brutale si, on peut le dire ainsi, et le refus des anciens
alliés d'être expulsés du territoire national congolais,
ont provoqué le déclenchement d'une nouvelle guerre, le
02Août 1998, une guerre conduite par de nouvelles forces armées
coalisées.
Au-delà de cette insurrection-agression de l'Est du
pays, le 1er Octobre 1998, une autre rébellion se forme dans
la province de l'Equateur. On parlera du Mouvement pour la Libération du
Congo (MLC) dirigé par Jean-Pierre Bemba Gombo.
Avec la présence avérée des troupes
étrangères sur le terrain des hostilités, la crise
congolaise avait pris une dimension internationale. Aussi, les Chefs d'Etat
africains et la communauté internationale s'étaient
bousculés et mobilisés autour de cette nouvelle crise de
légitimité politique et institutionnelle.
1.2.2. Du processus de paix
La voie militaire utilisée pour la conquête ou la
conservation du pouvoir d'Etat ayant échoué, elle a
cédé place à des âpres négociations
pilotées à de ombreuses reprises par la communauté
internationale.
Progressivement, la négociation et le dialogue se sont
imposés comme voie de sortie du bourbier imposé par cette guerre.
Organisé à Sun City en Afrique du Sud, le Dialogue Intercongolais
a conduit à l'Accord Global et Inclusif (AGI) signé le 17
décembre 2002.
Cet accord est le fruit de plusieurs autres rencontres telles
que : le Sommet de Victoria Falls I et II, Pretoria, Durban, Port-Louis,
Nairobi, Dodoma, qui invitaient à un cessez-le-feu immédiat et
sans condition. Il est également le fruit de l'Accord de Lusaka, des
rencontres de Windhoek et de Gaborone qui ont permis d'obtenir d'autres
acquis.
Cependant, avant d'en arriver à l'Accord Global et
Inclusif, passons brièvement en revue les étapes qui ont
précédé.
Du 03 au 08 septembre 1998, les Chefs d'Etat se sont
réuni à Victoria Falls I et ont décidé
de :
- charger le président zambien Frederik Chiluba de
trouver une solution pacifique à la guerre de la République
démocratique du Congo en amenant les différents
belligérants à signer un accord de cessez-le feu et l'ont
déclaré médiateur attitré dans cette
guerre ;
- charger les Ministres de la Défense et d'autre
officiels de travailler en étroite coopération avec l'OUA
et les Nations Unies ; et leur ont confié le mandat de se
rencontrer au siège de l'OUA, à Addis-Abeba en Ethiopie, le
jeudi 10 septembre 1998, pour établir les modalités d'un
cessez-le-feu immédiat et un mécanisme de supervision du respect
des éléments du cessez-le-feu, particulièrement ceux
relatifs au retrait des forces étrangères de la République
Démocratique du Congo.
En application de la décision des Chefs d'Etats
à l'issue de leur Sommet de Victoria Falls II, les Ministres de la
Défense se sont réunis à Addis-Abeba, le 10 Septembre 1998
et ont élaboré les documents suivants :
- Le projet de cessez-le feu ;
- Le projet des modalités de mise en oeuvre du
cessez-le feu ;
- Le projet de calendrier d'application.
Alors que les experts ougandais et rwandais ont largement
participé à l'élaboration de ces documents, au moment de
leur examen par les Ministres de la Défense, le Rwanda et l'Ouganda ont
décidé de quitter la salle en exigeant la participation des
rebelles congolais.
A l'invitation du président zambien Frederik Chiluba,
les Ministres des Affaires Etrangers et de la Défense avaient tenu leur
première réunion dans la capitale zambienne du 26 au 27 Octobre
en vue d'examiner et d'adopter les projets de cessez-le feu et des
modalités élaborées à Addis-Abeba par les Ministres
de la Défense.
Cette réunion a rencontré un obstacle au moment
de la définition des belligérants qui devraient logiquement
signer l'accord de cessez-le feu.
En effet, le Rwanda et l'Ouganda ne se reconnaissaient pas
comme belligérants dans la guerre du Congo. Pour eux, c'était une
rébellion interne qui concernait les Congolais et qui devrait donc
trouver une solution au travers des négociations entre Congolais
à savoir : les représentants du président Kabila
d'une part, et les délégués de la rébellion de
l'autre.
Grâce à l'arbitrage de l'ONU et de l'OUA,
l'Ouganda finit par reconnaître la présence de ses troupes au
Congo. Le Rwanda demeura intraitable jusqu'à la fin de la
réunion. Il a fallu donc amorcer des contacts pour arriver à
infléchir la position du Rwanda. C'est ainsi que, un mois après,
à l'occasion de sa visite officielle en Afrique du Sud, l'homme fort du
Rwanda, Paul Kagamé reconnaîtra, dans la surprisse
générale, la présence de ses hommes au Congo.
Avec l'acceptation du Rwanda, la question de la
définition des belligérants et des signataires de l'accord a
été totalement évacuée.
Notons aussi qu'à l'issue de la réunion de
Lusaka du 26 au 27 Octobre 1998, il avait été mis sur pied un
mécanisme des contacts de proximité pour prendre en compte les
amendements et les points de vue des rebelles sur les projets d'Addis-Abeba,
relatif au cessez-le feu.
Cette commission, chargée d'effectuer des contacts de
proximité, était composée de la manière
suivante : Zambie (présidence), Mozambique, Afrique du Sud,
Tanzanie, OUA, ONU, SADC.
La commission des contacts de proximité se rencontre en
novembre le 27 Novembre 1998, avec les délégués des
rebelles conduits par leur président Wamba dia Wamba.
La rencontre de Gaborone avait permis aux rebelles d'amender
les projets de cessez-le-feu et des modalités élaborés
à Addis-Abeba. Un document signé par Wamba dia Wamba avait
été adressé au président Chiluba.
Le 27 Novembre 1998, les chefs d'Etat dont les armées
étaient impliquées dans la guerre du Congo se réunirent
à Windhoek, capitale de la Namibie. Cette réunion permit aux
présidents Bizumungu, Museveni, Mugabe, Eduardo Do Santos et San Nujoma
d'adopter le projet d'accord de cessez-le-feu élaboré à
Addis-Abeba. Il sied de noter que c'est à la demande du président
ougandais Yoweri Museveni que cette réunion avait été
convoquée par le président Namibien.
Le chef de l'Etat zambien était chargé de
convoquer rapidement une réunion des ministres des Affaires
Etrangères et de la Défense pour la finalisation des textes
d'Addis-Abeba, de façon à permettre aux chefs d'Etat de les
signer rapidement.
Aussi du 14 au 16 janvier 1999, s'était tenue la
réunion des Ministres des Affaires Etrangères et de la
Défense à Lusaka. Cette réunion avait pour but de faire un
dernier examen des projets d'Addis-Abeba.
Comme le Rwanda et l'Ouganda continuaient d'accuser la RDC de
créer une insécurité à la frontière commune,
les ministres ont décidé de créer deux commissions
chargées respectivement de l'examen des modalités de mise en
oeuvre de cessez-le feu et des questions de sécurité de la RDC et
de ses voisins.
Du 29 au 09 Février 1999, la réunion des experts
membres des commissions des questions de l'examen des modalités de mise
en oeuvre de cessez-le-feu et de la commission des questions de
sécurité de la République Démocratique du Congo et
ses voisins s'est tenue à Lusaka.
La commission chargée de l'examen des modalités
de mises en oeuvre du cessez-le-feu avait pour but d'élaborer les
modalités pratiques de l'application du cessez-le feu et le
calendrier.
Les experts ougandais et rwandais décidèrent de
boycotter les travaux de cette commission, au motif que les rebelles devraient
y participer directement. La commission a donc adopté le document des
modalités en l'absence du Rwanda et de l'Ouganda.
La commission chargée des questions de
sécurité, quant à elle, a enregistré les
déclarations écrites du Rwanda, de l'Ouganda, du Burundi et de la
RDC en rapport avec des questions sécuritaires du Congo et de ses
voisins.
Apres de nombreux contacts à Kinshasa, à Kigali
et à Kampala, ainsi qu'avec des responsables du Rassemblement Congolais
pour la Démocratie, le président Frederik Chiluba, après
avoir obtenu du président Kabila l'accord de la participation directe
des rebelles aux travaux d'experts, a convoqué une deuxième
réunion d'experts. Elle avait eu lieu du 26 au 29 Avril 1999 à
Lusaka.
A peine commencés, les travaux de la commission ont
rencontré un obstacle créé, cette fois-ci, par les
délégués des rebelles. Ils exigeaient que la Zambie
organise, à travers cette commission, une rencontre bilatérale
entre les délégués de Kinshasa et ceux du RCD, Parce que,
selon leurs entendements, c'étaient là les deux
belligérants principaux.
Cette requête avait été rejetée
par la commission. Ce qui avait poussé les délégués
du RCD à boycotter les travaux de la commission qui se sont poursuivis
sans eux et sans le Rwanda, qui n'avait pas répondu présent
à cette réunion.
Le projet des modalités élaboré à
Addis-Abeba a été adopté par la commission, sans le Rwanda
et le RCD. L'Ouganda, pour sa part, l'a adopté moyennant quelques
réserves émises aux points ci-après :
- le retrait des forces étrangères ;
- le rétablissement de l'autorité administrative
par le gouvernement de la RDC sur l'ensemble du territoire congolais ;
- la mise à la disposition d'informations, la
vérification et le suivi ;
- le désarmement des forces
irrégulières ;
- les zones de cantonnement et de stockage ;
- le calendrier de mise en oeuvre de l'accord de
cessez-le-feu.
Comme on peut le constater, les rencontres se sont
succédées, mais sans une solution durable, à cause du
refus des belligérants de transcender leurs positions de départ.
Préoccupée par cette crise appelée la plus grande guerre
de l'Afrique, puisqu'elle avait englobé pratiquement sept Etats,
inquiète également de voir la RDC demeurée longtemps sous
l'emprise des ces Etats, la communauté internationale s'était
impliquée et avait proposé une rencontre inter congolaise
à Sun City en Afrique du Sud, sous la médiation de l'ancien
président Botswanais Ketumile Masire.
Cette rencontre devait, cette fois-ci, impliquer toutes les
forces politiques présentes sur le terrain des opérations.
Commencée le 25 février 2002, elle se clôtura le 02 avril
2002.
Un deuxième round des négociations
s'était déroulé et avait débouché, comme
nous l'avons dit dans les lignes précédentes, sur la signature de
l'Accord Global et Inclusif, le 17 décembre 2002.
Nous voici à la fin de ce chapitre qui cède
place à un autre, consacré à un bref aperçu
historique des institutions politiques post coloniales de la République
Démocratique du Congo.
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