CONTEXTE ET JUSTIFICATION DE L'ETUDE ET APPROCHE
METHODOLOGIQUE
Chapitre
I. CONTEXTE ET JUSTIFICATION DE L'ETUDE
L'importance de plus en plus grande accordée à
la santé sexuelle et reproductive des adolescents vient de la
caractéristique même de ce groupe. D'une part, l'adolescence
constitue une transition entre l'enfance, période d'exclusive
dépendance vis-à-vis des adultes, et l'âge adulte,
période d'indépendance. Cette transition est
caractérisée par une grande vulnérabilité face aux
risques d'IST/VIH/Sida et de grossesses précoces et
nondésirées. Cette importance accordée aux jeunes tient
également au fait que l'on admet leur ignorance des conséquences
graves découlant de leurs comportements sexuels à risque et leur
immaturité physiologique à les supporter. Il serait donc
primordial dans le cadre de notre étude de faire une analyse
situationnelle afin de mieux cerner les problèmes de la sexualité
des jeunes et leurs implications en Côte d'Ivoire.
I.1. CONTEXTE DE LA SEXUALITE A RISQUE CHEZ LES JEUNES
EN COTE D'IVOIRE
Dans les pays en développement et en Côte
d'Ivoire en particulier, l'accroissement rapide de la population, avec ses
conséquences en termes de d'urbanisation galopante, de forte croissance
de la population juvénile et d'accroissement du chômage et de la
pauvreté, et le développement spectaculaire des moyens de
communication ont brisé les barrières culturelles et
favorisé l'émergence de nouveaux schémas de comportements
sexuels dans la société en général et parmi les
jeunes en particulier. De même, le recul de l'âge aux
premières règles, l'effondrement de l'autorité familiale,
la baisse du pouvoir économique des parents favorisent l'adoption par
les jeunes des rapports sexuels précoces et non protégés,
le multipartenariat et d'autres comportements sexuels à risque
(Djangone-Mian, 2000).Ainsi, une des recommandations de la Conférence du
Caire en 1994 enjoint aux gouvernements et autres éducateurs«
d'essayer de résoudre les problèmes de santé en
matière de sexualité et de reproduction des adolescents,
notamment les grossesses non désirées, les avortements
pratiqués dans de mauvaises conditions de sécurité,
et
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Inégalités sociales et comportements
sexuels à risque des jeunes en milieu urbain en Côte
d'Ivoire
d'encourager un comportement procréateur et sexuel
responsable et sain, y compris l'abstinence, et en fournissant les services
adaptés ».
La sexualité en Côte d'Ivoire demeure
d'actualité car l'augmentation du niveau de sensibilisation sur le VIII
et de la connaissance quant à sa transmission et à sa
prévention n'a pas toujours été associée à
une diminution des comportements sexuels à risques parmi les jeunes et
les chiffres sont parlant. Une étude réalisée en milieu
urbain par Zanou et al en 2002, fait remarquer qu'un très grand nombre
de jeunes écoutent la radio et relève que la chaîne
nationale qui couvre l'ensemble du territoire est regardée par la
majorité des jeunes (79.7%). En dépit des messages et spots
publicitaires visant à la sensibilisation et l'information de la
population juvénile contre la pandémie du sida, force est de
constater que l'entrée en vie sexuelle est relativement précoce
(18 ans) (71,1% pour les garçons et 72,2% pour les filles). Cette
précocité reste vraie quelle que soit la
génération, le milieu de résidence ou la religion ;
l'âge d'entrée en vie sexuelle se situe en effet, entre 15 et 17
ans selon les catégories de population (Institut National de la
Statistique et ORC Macro, 2001). L'entrée en vie sexuelle des hommes se
produit un peu plus tard, soit environ 2,5 années après celle des
femmes (EDSCI 98-99). Les données de l'EDS-CI 1998-99 relèvent
des différences selon le niveau d'instruction et le milieu de
résidence : la précocité des relations sexuelles est un
peu plus prononcée en ville qu'en milieu rural (respectivement 18 ans
contre 19 ans) ; plus les hommes ont un niveau d'instruction
élevé, plus l'entrée en vie sexuelle est précoce
(17,5 ans pour ceux qui sont du niveau d'instruction secondaire et plus, 18,5
ans pour le primaire et 20 ans pour les analphabètes).
Des études ont montré également que plus
tôt commencent les rapports sexuels, plus élevé est le
risque de recours au multiparténariat et aux activités sexuelles
débridées (Aral, Fullilove et al, 1991 ; cité par
Djangone-Mian, 2000). L'enquête démographique et de santé
de 1998-99 en Côte d'Ivoire qui a collecté des informations sur ce
sujet pour la période des 12 derniers mois qui l'ont
précédé révèle qu'environ 3,3 % des femmes
en union et 9,95 % des femmes célibataires ont déclaré
avoir eu au moins deux partenaires sexuels durant cette période de
référence. Ces femmes dont l'âge varie entre 15 ans et 24
ans se retrouvent à des degrés variables dans toutes les
catégories socio-économiques. Les citadines et les femmes de
niveau d'instruction primaire ont plus de partenaires multiples que les femmes
du milieu rural, les analphabètes et les femmes de niveau secondaire ou
plus. Les hommes
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Inégalités sociales et comportements
sexuels à risque des jeunes en milieu urbain en Côte
d'Ivoire
âgés de 15ans à 24 ans qui
déclarent avoir eu au moins deux partenaires sexuels sont nettement plus
nombreux que leurs homologues femmes : 20 % contre 3,3 % chez ceux qui sont en
union, et 34 % contre 9,95 % chez les célibataires. Cela se
vérifie dans toutes les catégories socio-économiques.
Dans de nombreux cas, les rapports sexuels ne sont pas
protégés. Le préservatif qui constitue aujourd'hui le
moyen le plus efficace de protection des rapports hétérosexuels
est bien connu mais son utilisation demeure restreinte. D'après les
données de l'enquête démographique et de santé de
1998-99 par exemple, seulement 7 % des hommes utilisaient le préservatif
au moment de l'enquête, cette proportion est un peu plus
élevée en milieu urbain (10 %) qu'en milieu rural (6 %) (Institut
National de la Statistique et ORC Macro, 2001). Néanmoins, il est
à noter que la vente de préservatif a beaucoup progressé
ces dernières années. De 1993 à 2000, elle a
été multipliée par 3,5 soit un taux d'accroissement annuel
moyen de 19 % (Family Health International, 2001).
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