Résumé
Les noix brutes de cajou représentent le
deuxième produit d'exportation du Bénin derrière le coton.
Elle est exportée en 2004 pour plus de 50.000 tonnes. L'évolution
spectaculaire des données en un quinquennat est très
évocatrice de l'importance que prend cette culture dans les exportations
et globalement dans l'économie du Bénin. Le Bénin a connu
au cours du quinquennat 1997- 2001 un taux de croissance annuelle des
exportations de noix de 33% en valeur et 40% en volume (Trade Map CCI
Genève, 2001). Cette importance a impulsé une dynamisation,
accélérée par la morosité économique que
connaît le secteur phare du coton, et une intervention plurielle. Mais
aussi, cette importance a conduit à une régulation du commerce
international par la mise en place de normes de qualité, face auxquelles
les noix du Bénin, malgré leur potentiel inhérent à
leur label, doivent se conformer.
La présente étude intitulée : «
Evaluation des conditions de mise en oeuvre des normes de prod uction issues
des recommandations CEE/ONU dans la production des noix brutes d'anacarde
à Kouandé, Atacora, Bénin» se propose de contribuer
à une meilleure efficacité des interventions dans l'optique d'une
production de l'anacarde plus rentable et répondant aux exigences en
normes de qualité du commerce international.
Pour conduire ce travail, nous avons enquêté 60
producteurs, de 10 villages et de près de 15 CVPA,
échantillonnés après un recensement systématique
des planteurs membres des organisations de producteurs. Après une
classification des producteurs et une analyse sommaire de la rentabilité
financière des systèmes de production, nous avons utilisé
l'analyse prospective mise au point par l'ICRA.
Le système de production des noix brutes de cajou est
caractérisé par des facteurs de production que sont : la terre
dont la superficie par exploitant est supérieure à 2ha (pour 68%
des producteurs); la main-d'oeuvre est essentiellement familiale (taille
moyenne des ménages est de 7,2) et accessoirement salariée pour
les activités pénibles et la récolte alors que le
financement est quasi-inexistant. Par ailleurs, l'anacardier se retrouve en
association avec d'autres cultures et se place dans le processus de rotation :
92% des planteurs ont au moins une fois produit des cultures vivrières
ou d'autres cultures avant l'installation de plantations d'anacardiers. Le
rendement moyen au niveau de la zone d'étude sur quinze années
d'exploitation est de 307,85kg/ha. Les données de la FAO donnent en
moyenne 225.17 kg/ha sur la même période sur le plan national. Le
test t de Student (t=3,583; p=0,001) indique que la différence est
significative et confirme que la commune de Kouandé a un avantage par
rapport aux autres zones de production
Le système est aussi marqué par un non respect
des normes de production, notamment celles crucialement corrélées
avec la qualité des noix récoltées, par la majeure partie
des producteurs. 83% des producteurs recourent à des semences de
qualité douteuse. Quant à l'écartement, la densité
passe de quelques pieds d'anacardiers dans un champ à une densité
de plus de 200 pieds à l'hectare. 90% des planteurs ne réalisent
pas d'éclaircie. Les producteurs de Kouandé dans leur
majorité déclarent ramasser les noix à leur chute. 3,33%
des producteurs seulement récoltent précocement les noix sur
arbre; 58% mélangent les noix; 65% conservent leurs noix dans les sacs
de jute. Cette culture joue un rôle socioéconomique dans la zone
d'étude.
L'anacardier joue un rôle primordial dans
l'économie des ménages enquêtés. Il est la
première source de revenus agricoles des producteurs et contribue aux
dépenses d'écolage, de santé, de renouvellement du cheptel
mort et vivant, au panier de la ménagère, aux
cérémonies diverses et aux travaux champêtres. En plus,
cette culture est une source évidente d'emplois dans la zone
d'étude, de prestige social, d'assurance vie et contribue à
l'apparition d'une aisance financière temporaire.
La production d'anacardier est globalement
financièrement rentable, et encore lorsqu'on passe du système de
production traditionnel à celui indiqué par les normes de
production.
En ce qui concerne les perceptions des producteurs sur les
normes de production, l'étude nous indique que l'opinion des producteurs
est positive lorsque l'on met en relation la pratique de ces normes avec la
confiance de leurs clients, le rendement de leurs plantations, la protection de
l'environnement, la disponibilité des matériels agricoles, la
coopération entre producteurs, l'habileté compétitive des
exploitations, la compétition sur le marché, les ventes
exportables et le profit à leurs concurrents. Par contre, ils pensent
que le respect des normes de qualité impactent négativement les
coûts de production et les prix aux producteurs. Ces opinons n'ont aucune
relation avec les classes des producteurs que nous avons obtenues selon le test
X2. En effet, il s'est agi de les regrouper par classes
homogènes sur la base des caractéristiques
socio-économiques et/ou démographiques (âge, type de
planteur, mode de faire valoir des terres, le degré de scolarisation,
localisation des plantations), des paramètres de normes
(écartement, mode de récolte, mode de stockage, production de
semences, célérité du ramassage) et le rendement. Les
tests X2 indiquent une forte dépendance entre ces variables
socio-économiques et les classes alors que la différence entre
classes n'est pas significative quand il s'agit de la localisa tion et du
rendement selon le test ANOVA. C'est à partir de cette
catégorisation que l'analyse prospective a été
effectuée.
Sur la base de l'analyse des forces, faiblesses,
opportunités et menaces, nous avons conduit une analyse prospective
qui dégage quatre scénarii probables dans l'évolution de
la pratique des normes dans la production des noix brutes de cajou. Il
s'agit des scénarii optimiste, pessimiste, stationnaire et
réaliste qui se basent sur cinq forces motrices
à savoir la demande en noix brutes de qualité, l'organisation de
la commercialisation, l'organisation du conseil agricole, les crédits et
l'importance quantitative et de la fréquence du vol des noix brutes.
Les «focus groups» organisés ont permis aux
producteurs de proposer des actions d'accompagnement pour améliorer
globalement le label béninois des noix brutes de cajou sur les dix
prochaines années.
Mots cles: analyse prospective,
norme de qualité, normes de production, normes internationales,
perceptions des normes, paramètres de normes, analyse FFOM, label,
commerce international, noix brutes de cajou.
|