Sigles:
ACCEM: Association Commission Catholique
Espagnole de Migration (Asociación Comisión Católica
Española de Migración)
APDHA: Asociación Pro Derechos Humanos de
Andalucía
ATIME: Association des Travailleurs Immigrants
Maghrébins en Espagne CEAR: La Comisión
Española de Ayuda al Refugiado
CEPAIM: Consortium des Agences de l'action
globale avec les migrants (Consorcio de
Entidades para la Acción Integral con Migrantes)
CMPM: Consejo Municipal de Participación
de Migrantes
CODENAF: Association de Coopération et
Développement avec les pays du Nord de l'Africain
EMASES: Empresa Metropolitana de
Abastecimiento et Saneamiento de aguas de Sevilla
IMEDES: Instituto de Migraciones y Desarrollo
Social de la Universidad Autónoma de Madrid INE:
Instituto Nacional de Estadística
INSEE: Institut National de la Statistique et
des Etudes Economiques
MEPSYD: Ministerio de Educacion de Politica
Social y Deporte
MPDL : Mouvement pour la Paix, le
Désarmement et la Liberté
OBCS: Observatorio Castello Social
OCDE: Organisation de Coopération et de
Développement Économiques
ODS: Office de Droits Sociaux
ODI: Office des Droits des Immigrés
ONG : Organisation Non Gouvernementale
OPIA: Observatoire Permanent de l'Immigration en
Andalousie
OPIS: Observatoire Permanent de l'Immigration
à Séville
PIN: Parti des Immigrés Nouvelle
génération: Partido de los Inmigrantes Nueva Generación
PIRUM: Partido Iberico de los Rumanos
SOMAÏ: Support Minimum d'attention à
l'immigré
UPO: Université Pablo de Olavide
Introduction
Migrer est un phénomène social complexe autant
pour les causes que pour les conséquences que cela implique. Les
migrations ont formé et transformé les sociétés
contemporaines en les rendant plurielles, c'est-à-dire qu'actuellement
de nombreux espaces urbains sont composés d'habitants originaires de
pays différents.
L'Espagne a été pendant longtemps un pays
d'émigration. Mais depuis plus de vingt ans, il est devenu un pays
d'immigration. Ce changement relativement récent s'est accru suite aux
différentes vagues migratoires et n'a pas permis aux administrations
publiques de se préparer à accueillir et intégrer les
immigrés.
Deux particularités propres à ce pays nous
intéressent car elles divergent de la situation française. Tout
d'abord, l'Espagne est un pays de propriétaires, cela concerne plus de
80% de sa population. Ensuite, comme nous venons de le souligner, c'est un
territoire d'immigration relativement nouveau. En effet, en 2000, les
immigrés représentaient 2,1% de la population totale alors qu'en
2010 ils étaient 12,2% selon l'Institut Nationale de Statistique
(INE).
Notre étude traite des conséquences de la
multiculturalité dans une ville, ici Séville. Ayant eu diverses
expériences en Espagne et particulièrement à
Séville (études, emploi, loisirs), le choix de cette ville pour
aborder notre sujet s'est rapidement imposé à nous. Par ailleurs,
suite à de multiples lectures, recherches et au visionnage d'un
reportage télévisé de la chaîne Canal Sur :
Inmigrantes en el barrio sevillano de « El Cerezo »
(Immigrés dans le quartier sévillan El Cerezo) du 29
septembre 2010 sur les problèmes de cohabitation entre autochtones et
immigrés dans le quartier El Cerezo; cet espace est apparu comme
étant au coeur de notre recherche. De là s'est confirmé
l'intérêt que nous portons aux minorités et à leur
intégration dans un espace urbain, ici El Cerezo. Certaines de ses
caractéristiques en font un objet d'étude intéressant.
Tout d'abord, il est situé au coeur de la Macarena, district où
se trouve le plus grand nombre d'immigrés à Séville.
Ensuite, ce quartier est celui qui dénombre le plus grand chiffre
d'habitants d'origines étrangères de façon relative.
Enfin, c'est la zone où il y a le plus de commerces au mètre
carré.
Se concentrer sur cet espace pour analyser la question de
l'articulation ségrégation- multiculturalité permet
d'aborder les quartiers multiculturels depuis un cas concret et de se
positionner dans le processus de recomposition sociale du
district de la Macarena durant les dix dernières années.
L'étude de cas prend tout son sens par le biais de la
diversité ethnique et des évolutions récentes dans El
Cerezo. "On réaffirme là le lieu comme une relation
d'expériences entre le sujet et le focus, un lieu en constante
évolution, de par ses « effets multiples » et son
fonctionnement particulier, il doit rester au centre des recherches
géographiques" (ROZENHOLC, 2010, p.26).
Concrètement, l'apport de cette recherche se trouve
principalement dans l'échelle choisie, celle d'un quartier : El Cerezo,
se trouvant au Nord du centre ancien de la ville. En cela, elle se
démarque des recherches effectuées récemment sur les
thèmes de la ségrégation et du "vivre ensemble" dans des
espaces multiculturels tels les travaux des chercheurs et professeurs Maria
Angles Huete Garcia (tutrice de stage) et Francisco Jose Torres Gutierrez. En
effet, ces deux personnes ont effectué avec des équipes de
chercheurs, des travaux sur des thèmes similaires mais pour des
destinataires différents (l'un pour la mairie de Séville et
l'autre pour la communauté autonome d'Andalousie). La première
travaille dans le département de sociologie et le second dans celui de
géographie de la faculté Pablo de Olavide à
Séville. Ils ont permis de restructurer notre étude et de mettre
en avant son aspect innovant. C'est pourquoi ce sont des ressources
incontournables à la rédaction de ce mémoire. Or, leurs
recherches s'inscrivent dans des échelles géographiques
macroscopiques en étudiant des phénomènes de
ségrégation et de multiculturalité de manière
générale et non microscopique dans le sens d'une étude de
cas en particulier comme il est question dans notre sujet.
Comme nous le verrons, s'installer dans un quartier se fait
par choix ou par contrainte, suivant des critères personnels
(coût, amis, famille, proches, situation géographique, etc.). Une
fois installée, chaque personne va s'approprier l'espace dans lequel
elle vit, l'appartement, l'immeuble, les rues et les espaces publics. Accepter
« l'autre » est souvent difficile, c'est ce que nous verrons dans le
quartier El Cerezo. Afin de rendre compte de ce qui est mis en place pour
développer le "vivre ensemble" au sein de ce quartier, nous nous
attacherons aux actions et projets des acteurs qui agissent au niveau local
(mairie, région, associations, etc.) en lien avec les habitants. Nous
partons ici du postulat que dans le quartier étudié, les
immigrés sont victimes de discrimination et de
ségrégation. Cela nous amène à poser
l'hypothèse suivante:
La mise en place de projets d'interactions
multiculturelles entre autochtones et immigrés permet de faire face aux
discriminations.
En partant de ces idées préconçues, nous
avons pu élaborer notre étude en nous intéressant
particulièrement aux associations humanitaires et politiques publiques.
Ceci nous a ensuite mené à un questionnement principal qui a
guidé nos recherches et qui nous amènera à valider une
problématique par la suite. Cette question est:
De quelle façon les politiques publiques et
les acteurs associatifs luttent-ils contre le phénomène de
ségrégation et qu'est-ce que cela implique de vivre dans un
espace multiculturel?
Nous chercherons à savoir si les immigrés sont
intégrés parmi les autochtones ou s'ils sont mis à
l'écart. Voilà pourquoi cette étude a pour objectif de
s'inscrire dans l'analyse des phénomènes de
ségrégation et de connaître les politiques publiques et
projets associatifs qui tentent de créer du « vivre ensemble
».
En conséquence, l'étude de terrain
effectuée en mars 2011 a été le moyen de confronter la
réalité à notre hypothèse et de mettre à
l'épreuve nos outils conceptuels1. Durant cette
période, nous avons pu rencontrer les acteurs intervenant sur les
questions de cohabitation dans le quartier et pour la ville de Séville
tels que Teresa Maqueda, qui est responsable de la délégation des
relations institutionnelles relatives à l'immigration ; Mercedes, qui
est coordinatrice de l'Association Commission Catholique Espagnole de Migration
(ACCEM) ou encore Ousseyma, coordinateur de la fondation Sevilla Acoge. Ces
deux Organisations Non Gouvernementales (ONG) interviennent sur les
problématiques liées au « vivre ensemble » tout comme
la fondation Cepaim qui illustrera également notre recherche.
C'est pourquoi, durant ce mois passé à
Séville, nous nous sommes rendus quasiment chaque jour dans le quartier
El Cerezo pour observer ses fonctionnements et voir quelles sont les
interactions entre habitants. Cette phase d'observation fût
nécessaire afin de s'immerger dans cet espace, de prendre des habitudes
et d'être visible. En l'explorant, il fût possible de se rendre
compte des pratiques sociales (convivialité, exclusion, etc.) et
spatiales (ex: lieux de regroupements, d'interactions) propres à ce
quartier. Cela a permis d'élaborer une carte du quartier où sont
répertoriés les lieux de regroupements ethniques.
1 Nous avons fait le choix de développer
l'argumentaire théorique au fur et à mesure de notre
composition.
De surcroît, fréquenter différents
commerces du quartier et y interroger les employés fût aussi
enrichissant dans le sens où cela a été l'occasion
d'obtenir des témoignages sur les évolutions du quartier,
particulièrement depuis les années 2000 ainsi que de percevoir
les discriminations entre les habitants. Par ailleurs, rencontrer les gens qui
vivent ou interviennent dans ce quartier aura permis de leur proposer de
répondre à notre questionnaire et parfois de continuer avec des
questions plus approfondies. Il n'en reste pas moins qu'aborder des individus
n'est pas une chose facile, nous avons été confrontés
à différents refus de personnes ne voulant pas remplir de
questionnaire ni discuter de la diversité culturelle présente
dans le quartier. Les réactions furent diverses en fonction du groupe
ethnique des personnes interrogées ce qui permet d'effectuer une
typologie. Nous verrons les limites de notre terrain au cours de notre
développement.
Enfin, la prise de nombreuses photographies a également
permis d'illustrer les sujets évoqués dans notre recherche. Elles
apparaissent comme les révélateurs des changements et des
recompositions urbaines du quartier. Un de ces changements pourrait être
l'apparition, il y a deux ans, d'un local partagé par des membres de
l'association Acoge et d'autres de la Cepaim sur la place principale du
quartier El Cerezo (place Punta Umbria). Les deux associations ont des projets
similaires, particulièrement en ce qui concerne l'immigration
(intégration, respect des droits, accès à la
citoyenneté, etc.). Ce lieu est d'un grand intérêt
puisqu'il est révélateur d'un besoin en terme de médiation
culturelle mais également au niveau de l'accompagnement
réalisé par les membres de ces associations auprès des
habitants du quartier (ex: aide pour constituer des papiers, trouver un
travail, régler les conflits). Il fût possible d'interroger trois
membres de l'association Acoge (Gabi, Sonia et Ousseynou) et un membre de
Cepaim (Demba) ce qui nous a permis de cerner leurs actions et intentions au
niveau d'El Cerezo mais également au niveau du district de la Macarena
dont il fait partie.
De plus, ayant effectué ce terrain en mars 2011, deux
mois avant les élections municipales à Séville, il a
été possible d'ouvrir notre recherche à une dimension
politique concernant l'utilisation de la multiculturalité dans le
discours électoral.
Nous allons à présent voir l'évolution de
l'immigration à Séville, les conséquences des
arrivées récentes et les propositions des politiques publiques.
Pour cela nous utiliserons principalement les statistiques de l'INE (Instituto
Nacional de Estadistica) afin de connaître la population habitant
à Séville et plus particulièrement dans le district de la
Macarena (nombre, nationalités et évolutions). Nonobstant, cela
reste une source insuffisante puisque ces chiffres ne concernent que les
personnes inscrites en mairie "empadronados" .
Puis, nous aborderons l'insertion socio-spatiale des
immigrés dans le quartier d'El Cerezo en nous intéressant
particulièrement aux projets associatifs et aux transformations
urbaines.
En dernier lieu, nous nous consacrerons aux pratiques et
interactions des habitants dans leur quartier ainsi qu'à leurs
représentations et à l'image que les médias renvoient d'El
Cerezo. Nous essayerons de comprendre comment se construisent des conflits dans
ce type d'espace et de quelle façon les acteurs de la vie associative
tentent de mettre en place un "vivre ensemble".
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