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L'impact des politiques macroéconomiques sur la pauvreté au Sénégal

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par Mouhamed LO
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Maitrise 2009
  

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Chapitre 2 : Choix des politiques macroéconomiques et leur impact sur la pauvreté au Sénégal

L'analyse des causes, déterminants et manifestations de la pauvreté au Sénégal suggère une stratégie axée sur quatre leviers fondamentaux : la création de richesse, le renforcement des capacités et la promotion des services sociaux de base, l'amélioration des conditions de vie des groupes vulnérables et une approche participative de mise en oeuvre et de suivi évaluation basée sur la décentralisation du pilotage et de l'exécution.

Articulée autour de ces quatre axes, la stratégie de réduction de la pauvreté revient à promouvoir les opportunités de création de richesse au Sénégal ; organiser l'égalité des chances dans la concrétisation de ces opportunités, notamment à travers le renforcement des capacités des populations pauvres et assurer la protection des groupes vulnérables.

Section 1 : Les Principaux secteurs de la création de richesses

La prise en compte des facteurs tels que les caractéristiques et déterminants de la pauvreté au Sénégal, les liens entre la croissance et le recul de la pauvreté, les indications du groupe vulnérable de la thématique sur le cadrage macroéconomique permettent d'identifier les secteurs d'activités qui paraisse les plus propices à impulser une croissance forte , génératrice de revenus et d'emplois pour les pauvres aussi bien qu'en milieu rural qu'en milieu urbain.

Il importe de préciser ici que les sous secteurs ont été examinés sous l'angle privilégié de leur apport à la lutte contre la pauvreté par la création de richesse.

2.1.1 Secteur primaire

2.1.1.1 L'agriculture

Rappel des politiques et programmes

On peut globalement distinguer deux types d'approche, les politiques proprement dites et les lettres de politiques de développement à partir de 1994.

2.1.1.1.1- Les politiques agricoles

Le non remboursement des dettes a beaucoup joué sur les résultats escomptés.

Le Document d'Orientations Stratégiques (DOS) en 1999 engageait le gouvernement à établir les conditions de réalisation d'une croissance soutenue du secteur agricole sur la base d'un renforcement de la capacité du secteur à améliorer sa productivité et sa compétitivité.

Les priorités recherchées, portaient notamment sur les réformes structurelles, le renforcement des infrastructures physiques et institutionnelles et la restauration de la fertilité des sols.

Ce qui se traduisait concrètement par :

· une réorientation de l'investissement public vers les secteurs productifs entre autres ;

· le développement de l'investissement privé rural, en adoptant le cadre réglementaire, sécurisant le foncier et en restaurant la fertilité des sols ;

· le développement de la compétitivité de l'agriculture, des filières existantes et de nouvelles filières porteuses (maraîchage, fruits) ;

· la stratégie opérationnelle du secteur agricole.

Dans le prolongement du DOS et pour surtout l'opérationnaliser, le gouvernement a réalisé le rapport final de la stratégie opérationnelle du secteur agricole au sens large (productions végétales, productions animales, pêche continentale et aquaculture) ainsi que le plan cadre d'actions à moyen terme en vue de rendre opérationnelles, les orientations stratégiques retenues dans le DOS.

2.1.1.1.1.1- La Loi d'Orientation agro sylvo-pastorale

Cette nouvelle loi qui a été votée en 2004 par l'Assemblée Nationale se propose d'être le soubassement des initiatives des Autorités sénégalaises et ce sur les sous secteurs de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche. Elle fixe pour les trois sous secteurs de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche :

· les objectifs, les priorités et axes de politique de développement ;

· les métiers, organisations et exploitations agricoles ;

· les stratégies de développement ;

· les mesures d'accompagnement.

Ainsi, elle constitue une nouveauté, mais un élément important portant le problème foncier voit sa résolution reportée à plus tard.

2.1.1.1.1.2 - Le Programme National de Développement Agricole

Il est actuellement en cours de finalisation

2.1.1.1.2 - Les lettres de politiques de développement.

De 1995 à 2000 la volonté du gouvernement à vouloir développer le secteur agricole s'est manifestée dans plusieurs lettres de politiques de développement :

2.1.1.1.2.1 La Lettre de Politique de Développement Agricole (LPDA) adoptée en avril 1995 s'est bâtie autour de trois objectifs principaux (sécurité alimentaire, accroissement des revenus en milieu rural, et durabilité des ressources naturelles). Elle s'est fixé une croissance agricole de 4% l'an.

2.1.1.1.2.2- La Lettre de Politique de développement Institutionnel du secteur agricole (LPDI) adoptée en octobre 1998 et axée sur la mise en place d'institutions de développement agricole capables de faire des opérateurs professionnels des partenaires privilégiés du monde rural, de promouvoir un entreprenariat agricole, de recentrer l'état sur ses missions de service public. Elle prévoit que le mode d'organisation dominant sera l'agriculture paysanne à travers des exploitations familiales polyvalentes.

2.1.1.1.2.3- La Lettre de Politique de Développement Rural Décentralisé (LPDRD) a été adoptée en 1999 et préconise une stratégie de développement rural en 2015 qui appelle une synergie des acteurs et des programmes sectoriels et d'une cogestion des investissements communautaires. Elle prône le recentrage du processus de développement local autour des collectivités locales qui sera renforcé par des reformes institutionnelles de la décentralisation, sur le renforcement des capacités des acteurs, le financement des actions locales ; des programmes comme le PNIR entrent dans cette catégorie. D'autres politiques et lettres de développement ont existé pour les autres secteurs du primaire (LPDE, LPERN etc....) qui essayent de traduire la synergie et l'intégration qui doivent exister entre les différents sous-secteurs.

2.1.1.1.3- Les projets et programmes mis en oeuvre

Les projets et les programmes sont les moyens opérationnels pour rendre compte des politiques qui ont été adoptés, les résultats d'évaluation de même que les productions pour les projets productifs sont des moyens de mesure pour se rendre compte du degré d'atteinte des objectifs fixés que sont la lutte contre la pauvreté, la couverture alimentaire et l'octroi de revenus substantiels au monde rural.

Les principaux projets financés par les Programmes Triennaux d'Investissements

Publics(PTIP) de 1991à 2002 pour l'agriculture sont : l'aménagement hydro agricole de l'Anambé, la réhabilitation du Boundoum, Dagana, Thiagar, la restauration de Guédé Mbantou, l'aménagement de Kamobeul, le programme de développement rural du

Sénégal oriental (PDRSO), la SODEFITEX, le projet de développement rural de la base

Casamance (DERBAC), le projet de développement agricole de Matam (PRODAM), les petits projets ruraux (PPR), le programme d'investissement en moyenne Casamance(PROMOCA), les programmes de modernisation et d'intensification de l'agriculture de l'émissaire du delta du fleuve Sénégal(PROMIA), le programme intérimaire de développement de l'agriculture dans la vallée du fleuve(PIDA), le projet de promotion des exportations agricoles(PPEA), le programme spécial de sécurité alimentaire(PSSA), le programme d'investissement du secteur agricole(PISA), le programme des services d'appui aux organisations de producteurs(PSAOP), le programme national d'infrastructures rurales(PNIR), le programme de développement de la rive gauche(PDRG), le programme agricole(phosphatage de fonds, crédit agricole, protection des cultures), etc.

De 1991 à 1998, l'agriculture occupait 70%de la population active rurale avant d'en occuper que les 60% depuis 1999. Cette baisse est due à certains effets négatifs liés à l'agriculture et ce sont la sécheresse, le manque d'intrants agricoles, exode rurale etc.....

2.1.1.1.4- Au niveau des résultats

Le PASA et la LPDA (1995-2001)

2.1.1.1.4.1 Les données macro-économiques

En 1995, la part de l'agriculture par rapport au PIB du secteur primaire est de 50,5% et est arrivé à 54,2% en 2001 (à actualiser).Par contre la part de l'agriculture par rapport au PIB global est resté pratiquement constant durant la même période à 10.2%.

2.1.1.1.4.2- La production céréalière

Le mil et le sorgho occupent 90,87% de la consommation des ménages ruraux agricoles, tandis que l'arachide en occupe 73,22% ce qui montre que le Sénégal est un pays essentiellement rural sous dépendance pluviale (94,58%) des ménages. Entre les années 1996 et 2001 les productions totales céréalières ont connu une baisse passant de 976.079 tonnes à

961.720 tonnes soit une diminution de 1,49% de même que les emblavures qui ont connu une diminution de l'ordre de 11,56% Les années 2000 et 2001 ont été des années exceptionnelles correspondant à des records rarement égalés en volume de production et superficies cultivées avec une répartition des pluies dans le temps et dans l'espace. Les deux variétés mil et sorgho englobent à elles seules 80% de la production nationale céréalière avec 905.196 tonnes soit

80% du total. Le riz malgré une production locale qui croit régulièrement ne peut couvrir les besoins nationaux. La production locale représente à peine 10% des importations de riz du pays.

2.1.1.1.4.3- Les autres cultures vivrières (manioc, niébé)

Comme les céréales traditionnelles, le niébé et le manioc ont connu au cours de la période

1996-2002 des baisses de rendement substantielles, dues à la dégradation de la fertilité des sols dans le Bassin arachidier central. En raison de la faiblesse des rendements moyens obtenus, ces cultures ne procurent qu'une valorisation médiocre de la main d'oeuvre utilisée, mais peuvent jouer en revanche un rôle important dans la sécurité alimentaire de zones fortement déficitaires, et présentent d'autre part un bilan en termes économique légèrement positif.

2.1.1.1.4.4 Les cultures industrielles :

· L'arachide d'huilerie

La comparaison des années 1996 et 2002, permette de remarquer que les emblavures en arachide d'huilerie ont augmenté de 7%, les productions correspondantes de 33,71% avec des rendements qui ont évolué de 28,78% ; cependant, ces résultats font penser à une embellie de l'agriculture, mais ils s'expliquent d'avantage par les années 2001 et 2002 particulièrement fertiles par rapport aux autres années en amont et en aval de cette période ; il s'y ajoute que malgré ces pourcentages assez flatteurs, les résultats moyens de la période donnent 714.964 tonnes pour la production qui est en deçà des objectifs de production de 1.000.000 tonnes par an soit 71 % de couverture des prévisions.

· L'arachide de bouche

Elle a connu une diminution de la superficie cultivée, mais une augmentation de sa production due à un rendement exceptionnel qui n'a d'égal que l'année 2000.

· Le coton

En moyenne, la production nationale de coton est de l'ordre de 35 000 tonnes. Le coton a connu une grande baisse de ses emblavures, 59,7% et une relative diminution de sa production de 7,45% ; ce contraste est largement compensé par le très fort taux de rendement, 1134 kg/ha en 2002, contre seulement 763 kg/ha en 1996.

2.1.1.1.4.5- Les productions fruitières

Elles concernent les mangues, les agrumes, les bananes, les pastèques principalement qui ont connu des augmentations pour les deux premières variétés respectivement de 18,54% et

21,25% et une diminution respectivement de 17,50 et de 82,2% pour les deux autres pendant les années 1996 et 2000 ; sur la période 1995 - 2002,

Cependant, le manque de débouchés (marchés, industries de transformation de conservation) freine l'étalement de la consommation en dehors des périodes de production et en diminue sa capacité de lutte contre l'insécurité alimentaire.

2.1.1.1.4.6- La filière horticole

La filière horticole, quant à elle, a suscité beaucoup d'espoir comme une alternative possible de diversification de l'agriculture sénégalaise, d'amélioration de revenus des agriculteurs et de réalisation de l'objectif de sécurité alimentaire.

En effet, l'analyse de l'évolution des tendances donne un taux de croît de l'ordre de 10%, avec une progression légumière plus forte que la progression fruitière.

Cette performance limitée découle entre autres d'une absence d'organisation de la filière et d'une insuffisance de l'intensification des systèmes de production.

Bilan de la balance céréalière et sécurité alimentaire

L'analyse du bilan céréalier et de la sécurité alimentaire de 1990 à 2002 tirés d'un Rapport sectoriel du GTS « OMD-Création de richesses », intitulé Place et rôle du Secteur primaire dans l'élimination de l'extrême pauvreté et de la faim réalisé en janvier 2005 montre que :

- la part de l'aide alimentaire est passée de 10.9% en 1991, en diminution presque linéaire, jusqu'à 0% en2002, ce qui est du en partie à la nouvelle politique des bailleurs qui ne favorise plus cette forme d'aide à cause du détournement d'objectifs.

- la part des importations sur les approvisionnements a augmenté de 14,4% entre 1990 et 2002

- par ailleurs, la part des importations nettes de céréales, déduction faite de l'aide alimentaire est passée de 28,6%, en 1990 à 49% en 2002 soit une augmentation de

20,4% ;

- ces deux derniers points dénotent que d'une part l'agriculture devient de moins en moins performante au fil des années pour satisfaire les besoins alimentaires du pays et que d'autre part, le Sénégal a une forte dépendance de l'extérieur pour son équilibre alimentaire ;

- la part du riz dans les importations représente 48,4% des importations malgré les potentiels rizicoles dont dispose le pays, ce qui pose le problème du choix des politiques agricoles mises en oeuvre.

Toutes ces analyses des résultats obtenus amènent à faire les constats suivants : les différentes politiques, et les résultats qui les sous-tendent, analysés sous l'angle de la pauvreté et de l'insécurité alimentaire, permettent de constater que les Plans d'Ajustement structurel à Moyen et Long Termes, caractérisés par le désengagement de l'Etat des secteurs productifs, l'implication du secteur privé dans le circuit agricole, la création d'un type de crédit rural adapté aux systèmes de production, avaient comme finalité, entre autres, la sécurité alimentaire et l'octroi de revenus substantiels au monde rural.

- l'analyse des résultats obtenus fait constater que les fruits n'ont pas tenu la promesse des fleurs, car toutes ces politiques et lettres mises en oeuvre n'ont pu faire atteindre les résultats escomptés, la pauvreté et son corollaire l'insécurité alimentaire sont demeurées plus réelles que jamais ; et que le secteur agricole reste toujours confronter à plusieurs contraintes:

Résumé et hiérarchisation des contraintes du sous-secteur agricole

- pluviométrie erratique, caractérisée par une mauvaise répartition dans le temps et dans l'espace ;

- dégradation continue des terres ;

- régression du paquet technologique (matériel agricole) ;

- mauvaise tenure foncière ;

- mauvaise organisation des circuits de commercialisation ;

- insuffisance d'infrastructures d'appui à la production ;

- faiblesse des revenus limitant la capacité d'épargne et d'investissement en milieu rural ;

- difficultés d'accès aux services de base et aux marchés locaux et internationaux ;

- insuffisance des cadres institutionnels et politiques ;

- déséquilibre en matière institutionnelle (par filière et par région). 

L'analyse de ces résultats permet de constater aussi, une relative dispersion des actions de développement du secteur rural par les différents bailleurs de fonds en partenariat avec le

Gouvernement ; celle-ci est due à l'insuffisance d'un cadre cohérent de stratégie globale qui stimule le renforcement du dialogue et de la concertation entre tous les acteurs pour une meilleure coordination des interventions.

Plusieurs problèmes se posent aussi sur le plan foncier :

- le morcellement des exploitations familiales rurales qui entraîne de petites exploitations non viables ;

- la surexploitation des terres et des ressources naturelles ;

- l'incapacité des communautés rurales à gérer les ressources naturelles des terres communes ;

- l'urbanisation galopante qui exige qu'une part importante des terres des communautés rurales soit affectée aux communes urbaines.

Il reste que l'inexistence de la chaîne de froid pour la promotion et le développement des semences surtout horticoles, pose problème surtout que l'électrification rurale qui doit la sous tendre est peu présente dans le monde rural.

L'objectif visé est de relever le maximum de ces contraintes pour une relance durable de l'agriculture, qui permettra à terme de lutter efficacement contre la pauvreté et avoir une sécurité alimentaire durable. Pour ce faire plusieurs réponses doivent être apportées.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry