I.1.1.2. La gestion du foncier, un sujet
d'actualité
« Nous, les nomades, gens de la brousse, nous ne
connaissons aucune clôture. Tout ce
qui est herbe, nous le mangeons. La terre et tout ce qui
pousse dessus appartiennent au bon dieu qui nous a tous créées et
qui a mis toute la terre à notre disposition » (La
chèvre et la gazelle - IN : Conte Haoussa- Kanouri de l'Est du
Niger, Sur les rives du fleuve Niger, 2000, p106).
Le Niger est un pays où les ressources naturelles sont
valorisées par l'élevage sur la plus grande part de son
territoire. Une grande partie de sa superficie est composée de savane
à graminées annuelles, dans lesquelles l'agriculture est
impossible, en raison de pluviométries faibles et
irrégulières, et de la légèreté des sols. En
dehors des cultures irriguées qui sont pratiquées jusque dans les
régions sahariennes sur des espaces très localisés (les
dallols, le fleuve Niger, le lac Tchad, les oasis sahariennes...),
l'agriculture est concentrée sur une bande qui longe la frontière
avec le Nigeria, le Bénin et le Burkina Faso. Pourtant, d'une
manière générale, l'occupation agricole de l'espace
progresse au détriment des aires de pâturage. Une forte pression
démographique couplée aux sécheresses sont
incontestablement des facteurs déterminants de cette extension des
surfaces cultivées. Le front agricole a ainsi fait reculer les pasteurs
de 50 Km vers le nord depuis les années 1970. Cette situation
entraîne de nombreux litiges et conflits fonciers entre utilisateurs
pastoraux et agricoles des ressources naturelles.
Pour palier à ces problèmes, un comité
national du code rural est mis en place en 1989, suivit de l'adoption des
ordonnances n° 93-014 et n°93-014 le 2 mars 1993 portant
respectivement sur le régime de l'eau et le principe d'orientation du
code rural. Ceci a constitué un tournant important en matière de
politique foncière au Niger. Ces deux lois définissent le cadre
juridique des activités agricoles, pastorales, sylvicoles et les
conditions d'utilisation des différentes ressources. Cependant la mise
en application de ces dispositions n'a été effective qu'à
partir de 1997. Le code rural
en ses articles 120 et 121 consacre la création de
commissions foncières qui traiteront de toutes les questions
foncières dans le monde rural. Un décret (N° 97- 007
/PRN/MAG/E )sur les « terroirs d'attache » a été
élaboré le 10 janvier 1997. Ce décret a fait l'objet de
nombreuses critiques de la part des chercheurs et des associations
d'éleveurs. La réflexion actuelle sur l'élaboration d'un
code pastoral s'inscrit dans une perspective de prise en compte de ces
insuffisances. Les enjeux sont d'autant plus importants que la politique de
décentralisation menée par l'Etat se confirme notamment au
travers les élections communales qui ont eu lieu en Juillet 2004. Dans
ce nouveau contexte on peut s'interroger sur le rôle que les pasteurs
peuvent jouer dans les nouvelles instances de prise de décision et sur
les recompositions1 que ce processus va entraîner. La
définition et la délimitation du territoire des communes rurales
ainsi que le transfert de compétences à ces nouvelles
collectivités sont porteurs d'enjeux fonciers majeurs pour la
sécurisation des droits des éleveurs.
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