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Le crédit-bail dans l'espace OHADA

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par Joel PENDA DISSAK
Université de Douala - Master II professionnel juriste conseil d'entreprise 2008
  

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B - Les risques encourus par les institutions de micro finance

Il peut exister un litige sur la propriété, ainsi le vendeur auprès duquel la société de financement achète le bien peut ne pas disposer d'un titre de propriété légal (bien hérité, en copropriété, ...), ce qui peut conduire à des litiges, des abus, des contentieux ; une défaillance du fournisseur de matériel en garantie et en maintenance ; Un mauvais entretien ou une mauvaise utilisation du bien en location vente qui conduit à sa détérioration. L'absence de disposition législative régissant le crédit-bail dans la plupart des Etats de l'espace OHADA, rend les méandres de cette technique de financement des entreprises, encore plus complexes pour les autorités judiciaires, ce qui entraîne malheureusement dans certains cas des difficultés de retrait du bien en cas de défaillance du locataire.

Les montants en jeu considérablement colossaux dans le leasing, conjugués à l'indispensable nécessité de la maîtrise technique de l'équipement par le locataire, constituent un risque supplémentaire pour les sociétés de crédit-bail, raison pour laquelle la sélection des emprunteurs et le suivi des dossiers sont essentiels220; surtout qu'il faut noter qu'aujourd'hui la plupart des sociétés de crédit-bail se financent auprès des banques et institutions financières internationales, ce qui ne manque pas de poser le problème de disponibilité de ressources financières longues. C'est pourquoi les institutions de micro finance cherchant à offrir des services de crédit-bail à leurs clients ont tout intérêt à se spécialiser dans une gamme limitée d'équipements et choisir les circuits de distribution les plus appropriés.

1) Risque de valeur résiduelle et risque de crédit

Le bailleur d'un contrat de crédit-bail supporte deux types de risques : le risque de valeur résiduelle221, et le risque de crédit222.

220 Cette rigueur consiste à garantir à la société de crédit-bail que le projet pour lequel elle envisage l'achat du matériel est fiable et rentable.

221 C'est le risque relatif au matériel.

222 Ici il s'agit du risque lié à l'utilisateur.

a) Le risque de valeur résiduelle

Le risque relatif au matériel repose sur la qualité du fournisseur, qui est appréciée à partir de la performance technique et de la fiabilité du matériel livré, de l'efficacité du service après-vente, de la santé financière du constructeur et de sa présence sur le territoire national de l'utilisateur.

L'éventualité d'un quelconque péril lié à l'équipement objet du contrat de crédit-bail tient également à l'existence d'un marché de « l'occasion » actif, sachant que si les sociétés de crédit-bail, n'ont pas vocation à revendre les biens récupérés sur les utilisateurs défaillants, les sociétés de leasing filiales des constructeurs ont les moyens de le faire et que nombre de ces derniers ont dû créer des sociétés spécialisées dans la récupération et la revente.

Le bailleur doit non seulement apprécier le nombre et l'importance des utilisateurs potentiels, mais aussi la facilité d'obtention sur le marché d'un matériel neuf semblable et l'obsolescence prévisible du bien.

La fragilité du marché d'occasion oblige le crédit-bailleur à sécuriser son financement en baissant la durée du contrat et en augmentant les versements périodiques afin de compenser soit le coût de détention du bien223 soit la baisse de la valeur du bien.

Les fluctuations de la valeur résiduelle du bien sur le marché, qui peuvent résulter de l'usure physique ou d'une obsolescence imprévue, ou encore des variations inattendues des taux d'intérêt et du niveau général des prix ; sont des indicateurs à partir desquels les évaluations financières appréhendent le risque lié au matériel.

b) Le risque de crédit

Il se définit comme le risque de perte résultant de l'incapacité d'une contrepartie à effectuer les paiements contractuels, par exemple, l'incapacité d'un obligataire à rembourser sa dette ou l'incapacité du vendeur d'une option à acheter ou vendre l'actif sous-jacent. Dans un contrat de crédit-bail, la contrepartie est l'utilisateur dont la qualité est appréciée

223 Au cas où le crédit-preneur ne lève pas l'option d'achat.

aussi bien en termes financiers224 qu'en termes de compétence du dirigeant et des salariés ou d'appartenance sectorielle et d'activité. Cette appréciation est proche de celle retenue par les établissements de crédit pour l'octroi de prêts à moyen terme, mais elle ne peut être dissociée de la qualité du matériel donné en crédit-bail et de son impact sur le compte de résultat de l'utilisateur, car c'est la rentabilité du matériel qui paie les loyers.

2) Palliatif à l'insuffisance des garanties

Les contrats de crédit-bail prévoient souvent des clauses visant à protéger le créditbailleur contre la cessation de paiement du crédit-preneur. Ils présagent la demande des garanties supplémentaires qui peuvent prendre plusieurs formes: sûreté réelle, personnelle etc.

En effet, l'esprit bancaire des sociétés de crédit-bail suppose l'obtention de garanties supplémentaires afin de faire face au risque encouru soit par la nature du bien objet du contrat225, soit par la faiblesse de la structure financière et la vulnérabilité du crédit-preneur.

S'il est admis que les hypothèques, les garanties personnelles, le dépôt et le blocage d'argent constituent généralement les garanties exigées par les sociétés de crédit-bail, il faut néanmoins remarquer que cette constatation ne reflète pas toujours la réalité qui, elle démontre que certains crédits-bailleurs refusent les dossiers de crédit-bail qui nécessitent des garanties supplémentaires : la propriété du bien en cas de défaut de paiement ne constitue pas une garantie efficace. La garantie réclamée est donc souvent fonction du risque du crédit-preneur. Elle renforce la protection du crédit-bailleur qui n'est pas en mesure de récupérer immédiatement son bien du fait de la lenteur des autorités judiciaires.

Cette absence de récupération immédiate entraîne des coûts supplémentaires tels que le retard dans la recommercialisation du bien, la baisse de la valeur et la perte d'une partie des loyers, ce qui développe le conflit d'intérêt entre crédit-preneur et créditbailleur226.

224 Grands équilibres, solvabilité et rentabilité.

225 Obsolescence rapide.

226 KHALIF FEGHALI, Le crédit-bail, outil stratégique de financement: analyse de la situation libanaise, dans Lebanese Science Journal, Vol. 8, No. 2, 2007 170, www.cnrs.edu.lb.

Comme autre mesure non négligeable qui permet aux sociétés de leasing de se prémunir de toute inexécution des obligations du crédit-preneur relatives au paiement de loyers, nous pouvons citer la clause pénale qui est « celle par laquelle une personne, pour assurer l'exécution d'une convention, s'engage à quelque chose en cas d'inexécution »227 ; qu'elles s'arrangent toujours à insérer dans les conventions, et qui sans doute peut constituer une garantie incontestable. Compte tenu de l'importance de cette clause, il importe pour nous de l'envisager à partir de sa stipulation (a) ainsi que son exécution qui elle, n'a pas manqué de faire couler beaucoup d'encre tant en doctrine qu'en jurisprudence (b).

a) La stipulation de la clause pénale

C'est une clause par laquelle il est prévu que le débiteur d'une obligation devra acquitter une somme déterminée en cas d'inexécution ou d'exécution tardive. Elle constitue donc une évaluation forfaitaire des dommages-intérêts. La clause pénale se rencontre dans tous les contrats de crédit-bail. L'intérêt de cette clause pour la société de leasing est évident. Celle-ci peut espérer que la crainte de la pénalité que représente la clause pénale incitera son cocontractant à exécuter ses obligations. Par cet aspect, la clause pénale peut être rapprochée de l'astreinte228 . En outre, en fixant par avance le montant des dommagesintérêts, le bailleur évite d'avoir à prouver l'existence et le montant du préjudice qu'il subit en cas de défaillance du débiteur. La validité de la clause pénale ne fait pas de doute. Elle est réglementée par l'article 1152 du code civil229, et surtout par les articles 1226 à 1233 de ce même code.

b) L'exécution de la clause pénale

Cette clause veut qu'en cas de résiliation consécutive à la carence du locataire, celuici paye au bailleur une somme déterminée. Le montant de cette somme varie d'un organisme de crédit-bail à l'autre. Il convient de préciser que l'exécution de la clause pénale s'ajoute au règlement des loyers échus avant la résiliation, et impayés.

227 Art 1226 du Code civil.

228 V.B. Starck, Obligations, T.2, 2è édit. par H. Roland et L. Boyer, n° 1488, p. 520.

229 « Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut-être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre »

En France, avant l'intervention de la loi du 9 juillet 1975230, la mise en oeuvre de la clause pénale avait donné lieu, en matière de vente à crédit et de crédit-bail, à un contentieux abondant qui a divisé aussi bien la doctrine que la jurisprudence231.

Le point de départ de cette controverse se situe essentiellement dans le rapprochement de certains textes avec l'article 1152 du Code civil, qui consacre le principe de l'irréductibilité de la clause pénale232.

Mais l'énormité des peines souvent stipulées n'a pas manqué d'émouvoir une partie de la doctrine et de la jurisprudence233. C'est ainsi que deux textes ont été utilisés pour tenter de mettre en échec le principe de l'intangibilité de la clause pénale.

Il s'agit d'abord de l'article 1231 du Code civil. D'après ce texte, « la peine peut être modifiée par le juge lorsque l'obligation principale a été exécutée en partie ». Certains locataires avaient cru pouvoir trouver dans ce texte le moyen de faire diminuer234 le montant de la pénalité mise à leur charge.

Le second texte qui a été utilisé pour tenter de soustraire le locataire à la rigueur de la clause pénale est l'article 1229 du Code civil qui énonce que « La clause pénale est la compensation des dommages et intérêts que la créancier souffre de l'inexécution de l'obligation principale. II ne peut demander en même temps le principal et la peine, à moins qu'elle n'ait été stipulée pour le simple retard ».

L'argument fondé sur ce texte part de l'idée qu'en obtenant la résiliation et en bénéficiant de l'indemnité stipulée, la société bailleresse cumule la résiliation et l'exécution, ce qui est prohibé par l'article 1229 du Code civil.

230 Loi n° 75-597 du 9 juillet 1975, Journal Officiel de la République Française. 1975, p. 7076.

231 V. E. Alfandari, Le contrôle des clauses pénales par le juge, J. c.P. 1971, l, 2395; B. Boccara, La liquidation de la clause pénale et la querelle séculaire de l'article 1231 C. civ. J.C.P.1970, 1,2294.

232 V. E.M Bey, Une forteresse juridique : L'article 1152 du Code civil ou du principe de l'irréductibilité des clauses pénales, Rev. jur. corn. 1974, p. 167.

233 V. G. Cornu, De l'énormité des peines stipulées en cas d'inexécution partielle du contrat de crédit-bail, observ. Rev. dr. civ. 1971, p. 167.

234 L'argument consistait à soutenir que le locataire avait exécuté partiellement son obligation à l'égard du bailleur puisqu'il avait acquitté plusieurs termes de loyers avant d'interrompre le paiement. Dès lors, il aurait pu bénéficier de l'application de l'article 1231 C. civ. qui envisage le cas d'exécution partielle pour autoriser la modification de la pénalité. KASSIA BI Oula, thèse de Doctorat sur l'acquisition à crédit des biens d'équipement personnel en droit ivoirien, www.greenstone.lecames.org

Cette analyse qui voit dans l'exécution de la clause pénale, une exécution de l'obligation ne pouvait triompher. En effet, si la résiliation suivie de l'exécution de la clause pénale aboutit à peu près à cumuler résiliation et exécution, cette vision immédiate ne correspond pas à l'appréhension que le droit doit avoir de cette situation. La résiliation sanctionne le manquement à ses obligations par le locataire. Quant à la clause pénale, sa mise en oeuvre est attachée à l'inexécution du contrat. Même si son montant approche la valeur des loyers restant à courir (voire s'il est identique à celle-ci), la clause pénale est d'une nature différente de ces loyers. Elle constitue une fixation forfaitaire des dommages-intérêts à raison de l'inexécution du contrat.

Si ces tentatives pour soustraire le preneur à la rigueur de la clause pénale n'ont pas abouti, elles ont cependant le mérite d'être à l'origine d'une intervention législative en France.

La loi n° 75-597 du 9 juillet 1975 a ajouté un alinéa 2 à l'article 1152 en ces termes : « Néanmoins, le juge peut, même d'office235, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.»236

En Côte d'Ivoire, les articles 1152 et 1231 restent applicables dans leur rédaction initiale. La jurisprudence ivoirienne est fixée en ce sens que la clause pénale ne peut faire l'objet d'une réduction. Certaines juridictions inférieures vont même jusqu'à affirmer que « l'indemnité due à titre de clause pénale ne saurait faire l'objet d'une réduction, l'article 1231 du Code civil étant inapplicable en matière de crédit-bail ». Cette affirmation est inexacte. On se demande bien d'où ces juridictions tirent l'inapplicabilité de l'article 1231 au crédit-bail ? Il est plutôt judicieux de dire, au contraire que ce texte est applicable à la matière, seulement, il n'est pas d'ordre public et les parties peuvent décider de l'écarter.

La Cour d'appel d'Abidjan s'est naguère prononcée en faveur de l'irréductibilité de la clause pénale, mais en des termes moins excessifs237. On observera pour terminer, que pendant un bon moment cette question n'a pas suscité de graves difficultés en droit ivoirien, parce que la plupart des débiteurs actionnés en exécution d'une clause pénale ne se

235 L'intervention d'office du juge a été prévue par la loi n° 85-1097 du 11 octobre 1985.

236 Sur cette réforme, V F. Chabas, La réforme de la clause pénale, D. 1976, chrono p. 229 et s. Ph Nectoux, La révision judiciaire des clauses pénales, J.C.P. 1978,1, 2913; B. Boccara, La réforme de la clause pénale: conditions et /limites de l'intervention judiciaire, J.C.P. 1975,1, 2742.

237 Cour d'appel d'Abidjan, 30 avril 1976, RI.D.1978, n° 3/4, p.31, observ. de M le Doyen Veaux, p. 34 et s.

présentaient pas à l'audience (et ne se faisaient pas représenter), quelle que soit la cause de leur défaillance dans le paiement.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille