Paragraphe II : Les inconvénients du
crédit-bail
A - A l'égard du locataire du bien objet du
contrat
Les inconvénients du crédit-bail sont multiples
à l'égard de la société utilisatrice. Dès la
conclusion du contrat, le locataire se trouve définitivement lié,
il est donc tenu de payer les loyers à la date fixée. Dans le cas
contraire, il sera dans l'obligation de restituer le bien loué, mais
aussi et surtout de verser toutes les échéances qui restent dues
jusqu'à la cessation du contrat211. Au cas où la
livraison du matériel est affectée par un retard de la part du
fournisseur ou du fabricant, ou d'une non-conformité de celui-ci par
rapport au bon de commande, le locataire devra quand même acquitter les
loyers. Par ailleurs, il faut donc commander sous réserve d'obtention du
financement par crédit-bail.
La suspension des loyers en cas de problèmes avec le
matériel constitue à n'en point douter une véritable
source de difficultés. C'est par exemple le cas de la confusion entre
l'organisme financier et le vendeur. Lors de l'achat, il est d'usage dans tous
les contrats de crédit-bail de transférer l'ensemble des actions
à l'utilisateur vis-à-vis du vendeur notamment en cas de vices
cachés d'entretien, de garantie ou de maintenance212. De
cette façon, si le matériel ne fonctionne pas ou est
détérioré, l'utilisateur ne pourra en aucun cas suspendre
le versement des loyers en attendant que le matériel soit
réparé. Il est donc essentiel pour le locataire dans ce cas de
choisir un fournisseur fiable qui ne risque pas de déposer son bilan.
Le crédit-bail est une technique de financement d'un
coût très élevé surtout pour les petits
investissements, généralement supérieur à celui
d'un prêt bancaire classique, il est réservé aux biens
standards, il est souvent délicat de recourir au crédit-bail pour
des matériels très spécifiques, parce que les
sociétés de crédit-bail se montrent réticentes
à acquérir des biens susceptibles de devenir rapidement
obsolètes, ou difficiles à revendre.
210 Horizon +, n° 34 Juin 2010.
211 Art 34 loi n°2010/020 du 21 décembre 2010 portant
organisation du crédit-bail au Cameroun.
212 Com., 8 décembre 1992, B. IV, n° 396 : « le
crédit-preneur a mandat du crédit-bailleur pour exercer les
recours contre les fournisseurs, et ce, même après la
résiliation du crédit-bail »
Les biens financés par crédit-bail ne peuvent
constituer une garantie213 pour la société
utilisatrice. Il est important de souligner cette précision parce qu'il
a été souvent remarqué que les utilisateurs de biens
acquis par crédit-bail, procèdent à la constitution de
ceux-ci en gage, cette pratique traduit une profonde méconnaissance des
règles juridiques en la matière. Il s'agit en effet d'une
anomalie juridique. La condition première de la constitution du gage est
la qualité de propriétaire du constituant, qui rappelons une fois
de plus appartient au crédit-bailleur. Il en résulte que le
locataire ne peut donc consentir de gage sur le bien au profit d'un tiers. Il
faut donc considérer que la pratique décrite ici est
dépourvue de valeur. Il est donc regrettable et très grave que
les juges lui fassent produire un effet quelconque214. En principe
si pour une raison quelconque, l'établissement de leasing ne parvenait
pas à apporter la preuve de son droit de propriété, il ne
pourrait se retrancher derrière ce prétendu gage pour faire
valoir ses droits215.
Les frais de résiliation du contrat sont très
élevés, le bailleur a la possibilité de retirer le bien
à tout moment pour tout défaut de paiement216
puisqu'il demeure propriétaire du bien objet du contrat. Le locataire en
rachetant le bien, même pour une valeur résiduelle faible, doit
l'amortir à l'issue du contrat. Soulignons aussi que les frais de remise
en état du bien à la fin du contrat, sont à la charge du
locataire en cas de restitution du bien. Le locataire qui par anticipation met
fin au contrat, s'expose au paiement des indemnités. De même le
locataire est tenu de remplir les obligations qui représentent
généralement le lot de tout propriétaire, et notamment de
supporter les charges liées au fonctionnement du bien. Par ailleurs le
crédit-bailleur en tant que propriétaire du matériel est
enclin à prendre davantage de risques, qu'il répercutera sous
forme d'une rémunération plus élevée sur la
société utilisatrice du bien.
Comme autres entraves au crédit-bail, on peut noter
dans la pratique camerounaise celle relative au droit d'enregistrement. Le
crédit-preneur qui a généralement vocation à
devenir propriétaire du bien au terme du contrat, le paie deux fois : au
moment de l'achat
213 Art 39 al 1 loi n°2010/020 du 21 décembre 2010
portant organisation du crédit-bail au Cameroun.
214 Cour d'appel d'Abidjan. Arrêt n°276 du 20 mars
1981. Inédit. Dans lequel la Cour parle, à propos d'un tracteur
loué en leasing, "de la vente du matériel
gagé"
215 Le gage est constitué pour éviter que le
locataire ne revende le bien. Mais, en réalité, cet argument est
sans valeur. En effet le payement du prix étant effectué au
comptant par la société de leasing, l'attestation de non gage lui
est délivrée. Dès lors, aucune revente
régulière du bien ne peut avoir lieu sans la production de
l'attestation de non gage.
216 Art 34 loi n°2010/020 du 21 décembre 2010 portant
organisation du crédit-bail au Cameroun.
par le crédit-bailleur, et à la fin du contrat
lorsqu'il fait l'acquisition du bien. Cette double taxation renchérit le
coût des opérations et pénalise le développement du
financement des entreprises à travers les mécanismes du
crédit-bail217.
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