2. Protection sociale et recul de la pauvreté
La protection sociale avec ses trois dimensions d'aide,
d'assurance et de transferts sociaux joue un rôle déterminant pour
lutter contre la pauvreté et la faim.
La croissance économique de la richesse constitue la base
de tout développement humain dans un pays donnée. En effet, la
création du surplus économique résultat d'une bonne
gouvernance et une répartition égalitaire même avec des
moyens limités en matière de ressources naturelles, peut
améliorer la situation de la population et développer davantage
le bien être social.
C'est à partir essentiellement du travail qu'on peut
réaliser le plus grand nombre de besoins et ce en matière de
santé, de nourriture, de logement et d'éducation.
Il reste à mentionner aussi l'importance de l'offre de
biens et services que l'Etat s'engage à fournir dans des meilleures
qualités avec des coûts abordables à toute la population
sans discrimination.
La Tunisie a réalisé depuis plusieurs années
une performance notable en matière de croissance économique, de
couverture sociale, d'amélioration du revenu par habitant et des
conditions de vie.
Elle a intégré les trois dimensions de la
protection sociale pour éradiquer la pauvreté au sens large du
terme puisque l'extrême pauvreté et la faim sont quasi
inexistantes depuis plusieurs années.
L'assurance sociale couvre presque la totalité des actifs
occupés contre la vulnérabilité et le risque de tomber
dans la pauvreté et la marginalisation en cas de maladie, de vieillesse,
de décès, etc. mais ne couvre pas les chômeurs dont leur
nombre parait élevé avec un taux de chômage de 14,2% en
2008. Elle constitue donc un moyen préventif efficace contre la
pauvreté surtout au moment de vieillissement.
La croissance économique seule n'a pas pu
résoudre, pour le cas tunisien, le chômage des jeunes et surtout
des diplômés et le noyau dur de la pauvreté. Sans le
soutien familial et une indemnisation, les chômeurs demeurent une
population vulnérable. Le gouvernement procède jusqu'à
maintenant par des politiques d'incitation à l'emploi
(micro-crédits par exemple) et de l'indemnisation pour une durée
limitée sans penser sérieusement à créer une caisse
de chômage faute de moyens de financement.
Tableau 30 : Croissance, revenu, taux de chômage et
taux de couverture sociale :
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
PIB aux prix constants en MD
|
17181
|
18016
|
18318
|
19334
|
20425
|
21368
|
22516
|
23942
|
25169
|
Croissance en %
|
4,7
|
4,9
|
1,7
|
5,5
|
5,6
|
4,0
|
5,4
|
6,3
|
5,1
|
Revenu par hab. en D.
|
|
2981
|
3081
|
3287
|
3564
|
3746
|
4100
|
4435
|
4911
|
Croissance en %
|
|
|
3,3
|
6,6
|
8,4
|
5,1
|
9,4
|
8,1
|
10,7
|
Création d'emploi
|
|
69300
|
62600
|
65000
|
74400
|
76500
|
76400
|
80200
|
79800
|
Croissance en %
|
|
|
-9,7
|
3,8
|
14,5
|
2,8
|
-0,1
|
4,9
|
-0,4
|
Taux de chômage en %
|
|
|
|
|
13,9
|
14,2
|
14,3
|
14,1
|
14 ,2
|
Taux de couverture sociale en %
|
83,3
|
84,3
|
85,6
|
86,9
|
87,4
|
89,0
|
90,4
|
91,9
|
93,3
|
Source : Budgets Economiques (2004, 2005, 2006, 2007, 2008,
2009), Ministère de Développement et de Coopération
International, INS.
2.1. Mesure de la pauvreté
La pauvreté est une notion normative se
caractérisant par l'insuffisance des ressources (revenu décent)
pour subvenir aux besoins essentiels d'une vie normale et de s'intégrer
activement dans la société.
La pauvreté au sens large du terme prend plusieurs
dimensions :
-la pauvreté pécuniaire :
c'est une pauvreté perçue par rapport aux ressources disponibles
(revenu) et leur écart à un seuil de pauvreté
calculé normativement pour un panier de biens alimentaires et non
alimentaires selon l'approche absolu ou le seuil est calculé par rapport
à la distribution des niveaux de vie de l'ensemble de la population avec
come référence le revenu médian selon l'approche relative.
C'est le noyau de la pauvreté qualifiée de monétaire.
Cette approche réductrice est critiquée surtout par
(SEN, A. ,1976) dans ses oeuvres la qualifiant d'utilitarisme, ne prenant en
compte que le revenu et la consommation alors que la pauvreté doit
contenir aussi les situations sociales et personnelles de l'individu ainsi que
ses capacités qui sont conditionnées par un ensemble
d'éléments sociopolitique, environnemental et individuel.
La pauvreté des conditions de vie :
Elle résulte de l'impossibilité de satisfaire les besoins qui
permettent d'assurer une vie convenable dans une société
donnée. Cette pauvreté est appelée aussi pauvreté
d'existence, elle est plus difficile à cerner que la pauvreté
pécuniaire. La pauvreté des
potentialités : C'est une pauvreté de
capacité qui exprime le manque de moyens permettant de sortir de cette
pauvreté. La pauvreté humaine : Elle
tient compte de dimensions non économiques tels que les dimensions
sociale, politique, culturelle, etc. Le programme des Nations Unies pour le
développement a crée deux indicateurs synthétiques pour
mesurer d'une manière globale le développement humain et la
pauvreté humaine l'IPH et l'IDH.
Pour pouvoir démarquer les pauvres et les non pauvres, il
y a lieu de fixer un seuil dit de pauvreté qui constitue une certaine
frontière qui sépare les deux catégories.
Le seuil de pauvreté absolue se détermine en
fonction d'un panier choisi comme référence en termes de niveau
de vie d'un individu pauvre moyen alors que le seuil de pauvreté
relative se calcule par rapport au bien être du reste de la population.
On parle aussi d'un seuil de pauvreté subjective qui dépend du
jugement de valeur que la personne le donne à sa situation personnelle
eu égard à des comparaisons avec son entourage et son
expérience dans la vie.
A part les mesures de la pauvreté selon l'approche absolue
utilisée par Tunisie depuis 1980 et inspirée par les travaux de
la Banque Mondiale (BM) et l'approche relative suivie par l'Union
Européenne (EU), le programme des Nations Unies pour le
développement utilise l'indice de développement humain (IDH) (
moyenne pondérée de l'espérance de vie à la
naissance, du PIB par habitant et le niveau d'instruction) et l'indice de
pauvreté humaine (IPH) pour pouvoir classer les pays en fonction du
degré de développent humain (IDH) et le niveau de la
répartition de la richesse nationale (IPH).
En Tunisie, c'est à partir des enquêtes
consommation- budget des ménages réalisées tous les cinq
ans que l'Institut National de la Statistique (INS) procède au calcul
du seuil de pauvreté.
Depuis 1980 et jusqu'au 2000, l'INS applique une méthode
préconisée par la Banque Mondiale (BM) qui consiste à
considérer deux composantes dans la détermination du seuil de
pauvreté. La première composante concerne les dépenses
alimentaires basée sur le coût des besoins minimum en calories
d'une personne correspondante au profil des pauvres et la deuxième
consiste à tenir compte des dépenses non alimentaires
correspondant au deuxième décile (20%) des personnes de la
répartition selon la tranche de dépenses et ce en prenant deux
sous populations de pauvres appartenant l'une au milieu urbain et l'autre au
milieu rural.
Pour calculer les seuils de pauvreté des autres
années, l'INS procède par actualisation du seuil de base de 1980
en s'appuyant sur l'indice des prix de consommation.
Cette méthode montre qu'il y ait une diminution de la
pauvreté monétaire (basée sur le revenu) absolue de 12,9%
en 1980 à 3,8% en 2005.
En 2005, l'INS a commencé à utiliser une nouvelle
méthode différente de la première en ne
considérant qu'une seule sous population des pauvres dont les
dépenses annuelles par personne sont comprises entre 360 et 480 dinars
pour calculer le seuil de pauvreté en se basant sur un besoin en
calories égal à 2213 kcal par personne par jour au lieu de
1807.
Pour des comparaisons internationales, la Banque Mondiale retient
des seuils de pauvreté identiques (1,25 Dollars/jour ; 2
Dollars/jour etc.) en tenant compte dans ses mesures de ce qu'on appelle les
Parités de Pouvoir d'Achats (PPA). La parité de pouvoir d'achat
(PPA) selon l'INSEE est un taux de conversion monétaire qui permet
d'exprimer dans une unité commune les pouvoirs d'achat des
différentes monnaies.
Ce taux exprime le rapport entre la quantité
d'unités monétaires nécessaire dans des pays
différents pour se procurer le même "panier" de biens et de
services.
Pour l'Union Européenne (UE), l'Eurostat (l'organisme
européen des statistiques) utilise un seuil relatif de 60% du revenu
médian qui reflète le mieux les inégalités et la
répartition du revenu mais on ne peut pas à partir de ce seuil
mesurer l'évolution de la pauvreté.
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