Conclusion générale et perspectives
Le présent travail a montré l'importance de
l'introduction des fabacées principalement la culture de sulla
(Hedysarum coronarium L.) variété Bikra 21 dans les
systèmes de culture des zones montagneuses et spécialement chez
les petits agriculteurs des régions de Zaghouan, Siliana et
Béja.
En effet, dans un premier temps, à travers une
enquête de terrain sur la pratique de la rotation culturale dans les
zones montagneuses de la Tunisie et la typologie des exploitations, les profils
des exploitants favorables à la pratique de la rotation se trouvent chez
les agriculteurs pratiquant ce métier depuis plus de 10 ans,
mariés, âgés de plus de 40 ans et d'un niveau de
scolarisation primaire ou plus. Ce profil analysé est plus
fréquent à Siliana (50,6%), puis à Beja (44,3%) et enfin
à Zaghouan (21,9%). Cependant, l'environnement favorable à la
rotation est représenté par un agriculteur propriétaire
résidant sur les lieux de son exploitation et dont l'activité
principale est l'agriculture, se trouvant à moins de 10km du
marché hebdomadaire, et parcourant une route asphaltée ou semi
asphaltée représentée par 40,1% à Siliana, 26,5%
à Beja et 21,9% à Zaghouan. Le modèle d'exploitation mixte
à élevage (bovins, ovins ou les deux), ayant une topographie en
plaine ou en pente avec un sol de type argileux ou sableux, une surface utile
de plus de 10ha représente le profil favorable à la pratique de
la rotation, se trouvant dans 25,7, 16,4 et 15,4% des cas respectivement
à Béja, Siliana et Zaghouan. L'analyse multidimensionnelle a
permis de mieux cerner la nature des liaisons qui existent entre les
différents paramètres de productions d'une région
donnée, pour montrer que la région est dépendante de la
variable connaissance et pratique de la rotation. Cette dépendance est
dans l'ensemble négative. Les régions de Zaghouan, Béja et
Siliana sont caractérisées par une connaissance de la rotation
respectivement de type absente, faible et moyenne
La caractérisation spectrale de sulla du nord Bikra 21
suite à une comparaison des spectres au stade en pleine floraison avec
celui du blé dur en épiaison et de la jachère non
travaillé a montré une nette différence dans le domaine du
visible surtout dans la bande du rouge. Ainsi, le sulla présente une
réflectance nettement supérieure par rapport à la culture
du blé dur (57%).
Cette distinction peut être attribuée aux
propriétés de couleur dans le rouge spécifique des fleurs
de sulla. Pour confirmer cette distinction entre les différents
spectres, on a calculé l'indice de réflectance dans le visible.
Cet indice, montre une nette différence des valeurs pour le sulla
(0,046) et le blé dur (0,368).
L'analyse des performances de Bikra 21 a montré, les
aptitudes d'adaptation de la variété aux contextes climatiques,
édaphiques et sociaux de la région. Les résultats obtenus
de la caractérisation herbagères de la culture du sulla dans le
système fourrager ont confirmé la bonne adaptation aux divers
modes d'exploitations, le pouvoir élevé de l'efficience
d'utilisation de l'eau et le grand potentiel de production
énergétique. Les vitesses de croissance de la
végétation du sulla varient entre 0,176 et 1,236cm/mm de pluie
pour les deux modes d'exploitations (fauche et pâturage). Pour les
différentes régions (Béja, Siliana et Zaghouan), les
rendements en matière sèche du sulla exploité par fauche
obtenus sont compris entre 1195 et 5490kg MS/ha. Le système
pâturage, fournit des rendements variant de 974 à 5490kg MS/ha.
L'efficience d'utilisation de l'eau du sulla varie selon l'ordre et le mode
d'exploitation entre 0,77 et 4,58 kg MS/m3 pour la fauche et 0,78 et 4,11 kg
MS/m3 de pluie pour le pâturage. Les productions
énergétiques des prairies à sulla obtenues sont comprises
entre 828 et 4666UFL/ha.
L'étude floristique des prairies de sulla, a
révélé l'existence de 28 espèces adventices (09
à Siliana, 14 à Zaghouan et 22 à Béja). En
première année d'installation du sulla, les familles des
astéracées et des poacées se trouvent les plus
représentées. Après quatre cycles d'exploitation, le taux
d'adventices chute pour atteindre 3 à 9%. Les techniques d'exploitations
de la culture du sulla, lui confèrent le statut d'une culture
nettoyante.
La technique de préfanage seule ou combinée au
conditionnement comme l'éclatement des tiges se présente comme
une solution efficace pour améliorer la qualité de la
conservation. L'effet de l'éclatement des tiges sur la teneur en
matière sèche de sulla ne se manifeste qu'après 48h de
préfanage pour un ensilage issu d'un sulla de 1ère et 2ème
année respectivement sans et avec retournement. La technique de
préfanage avec éclatement des tiges permet un gain gratuit en
matière sèche de 5 à 7 point et une bonne conservation par
ensilage à pH variant de 3,91 à 5,3. L'état de
dégradation des protéines à travers le rapport azote
ammoniacal sur azote total a varié de 1,33 à 19,65.
Corrélés aux taux de matière sèche, les AGV
permettent une évaluation de l'état de conservation du fourrage
(excellente, bonne, mauvaise).
Ces derniers varient entre 0,1 et 1,57 Moles/kg MS, montrant
que seuls les traitements RP31-2; ERP22; EP31; et P31 ont produit des ensilages
à un faible taux d'AGV entre 0,1et 0,59 Moles/kg MS. En tenant compte
les contraintes climatiques au cours du séjour de fanage et les frais du
retournement du fourrage, pour un sulla de 1ère année
un préfanage de 24h avec éclatement des tiges semble être
le meilleur traitement, cependant pour un ensilage à base d'un sulla de
2ème année on conseille de procéder à un
éclatement avec 72h de préfanage.
La gestion durable des ressources naturelles en zones
montagneuses vulnérables aux diverses formes d'érosion, en
particulier de nature pluviale représente une technique biologique
permettant la réduction de la dégradation organo-minérale
des sols et l'amélioration de la couverture végétale
conséquente. L'installation du sulla (Hedysarum coronarium L.)
sur des terres en pente 4 à 12% a engendré un ruissellement d'eau
de 1,2 à 5,8 litres suite à une pluie cumulée de 170 mm,
en 60 minutes et ce comparativement à une jachère non
travaillée où la perte d'eau varie de 6,3 à 36,2 litres.
Avec une pente de 12% les taux de ruissellement ont été de 3,4 et
23,2% respectivement pour le sulla et le blé dur (Triticum durum Desf.).
Dans les mêmes conditions, le sulla favorise une infiltration d'eau de
99%, contre 76,6% pour le blé. Par rapport à une jachère
non travaillée, un couvert végétal à base de sulla
sur une pente 12% réduit plus de 10 fois la quantité de terre
érodée. Dans les charges solides transportées par
l'érosion pluviale, l'argile représente 55% du total, avec une
teneur en azote de 32 ppm. Cette partie du sol érodée se trouve
de même hautement pourvue en matière organique
évaluée à 3,5%. Ces pertes en éléments
majeurs pour la fertilité du sol reflètent une dégradation
intense et la faiblesse des rendements des cultures particulièrement
céréalières souvent observés sur ces terres en
pente et non protégées.
La promotion et la valorisation de sulla en tant
qu'espèce fourragère mais aussi à rôle
remédiant spécialement en régions montagneuses
représentent une action qui s'intègre dans le
développement régional durable. L'amélioration de la
couverture végétale ainsi que l'état organique des terres
tentent à redynamiser et surtout sécuriser les secteurs de
production céréalier, fourrager et l'élevage.
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