3.1.2 Proposition d'une approche méthodologique
3.1.2.1 Le choix du modèle
L'utilisation des modèles aide à mieux
prévoir les risques afin de prendre des mesures efficaces de gestion des
ressources naturelles avec un minimum de temps et de moyens. Pour
l'érosion hydrique, des modèles sont utilisés. Nous en
présentons deux : l'équation universelle de pertes en terre de
Wischmeier & Smith (USLE Universal Soil Loss Equation) et la SLEMSA (Soil
Loss Estimation Model for Southern Africa). Ces modèles utilisent
presque les mêmes paramètres
physiques, ils sont et constituent les seuls recours que le
chercheur ou le politique utilisent pour planifier les besoins de conservation
des sols à une échelle régionale.
L'équation de Wishmeier ou l'une de ses versions
modifiées (par exemple RUSLE), ont été empiriquement
établies à partir de mesures ponctuelles sur parcelles
expérimentales. C'est une démarche globale qui prend en compte
tous les facteurs naturels et humains intégrés à
l'échelle d'un bassin versant pour l'évaluation de
l'érosion. Ce modèle mis au point en 1959 aux EtatsUnis est
né du traitement statistique des résultats de nombreuses
années de mesures (20 ans) sur parcelles expérimentales. Depuis,
ce modèle a été largement utilisé en Afrique,
particulièrement en Afrique de l'ouest malgré quelques
modifications tenant compte des conditions bioclimatiques. En effet, selon ce
modèle la perte en sol est donnée par le produit des expressions
suivantes:
E = R.K.SL.C.P
E : équation de perte en terre
R : indice d'agressivité des pluies à
l'érosion
K : indice d'érodabilité du sol
SL : facteur topographique qui intègre la pente et la
longueur de la pente
C : facteur d'occupation du sol par la couverture
végétale et
P : facteur exprimant la protection du sol par les pratiques anti
érosives.
Le principe de ce modèle est de comparer
l'érosion d'un site quelconque à l'érosion d'une parcelle
témoin de dimensions standard tout en la traitant périodiquement
afin qu'il ne se forme aucune croûte superficielle ou qu'elle ne change
pas de formation superficielle initiale. Il faut noter que les mesures sur la
parcelle permettent essentiellement d'évaluer l'érosion
décapante induite par le ruissellement en nappe. Le but essentiel de
cette équation est de définir de façons moins empirique
les techniques culturales et les aménagements anti érosifs
à mettre en oeuvre en un lieu dont on connaît : la topographie, le
climat, le sol et les cultures souhaitables de développer sans risque de
ruiner le patrimoine foncier. Concernant l'érosion en nappe et en rigole
à l'échelle du champ (ou du versant), à l'exclusion des
cas où dominent l'énergie du ruissellent et l'érosion
linéaire (cas des argiles gonflantes, des relief de montagne, des ravins
et des rivières des climats désertiques et
méditerranéenne où l'action des averses exceptionnelle est
déterminante).
Elle n'est universelle que dans la mesure où chacun des
facteurs évoqués joue un rôle important dans le
développement du phénomène d'érosion (Wischemeier,
1976).
Par ailleurs, ce modèle bien que universel, renferme
des défaillances relatives d'une part à l'interaction des
facteurs dans la compréhension et l'efficacité de tel ou tel
facteur dans le déclenchement du processus du ruissellement et de
l'érosion. En effet, selon Auzet (1987) cité par Macary &
Berville (2003) la principale critique à cette équation est
qu'elle se présente sous la forme d'un produit et fait intervenir les
facteurs que par leurs poids statistiques sans tenir compte de leurs liaisons
causales, négligeant alors les relations complexes. Les seules
interactions prises, sont de manière sommaire puisque les facteurs sont
supposés linéaires. D'autre part certains auteurs ont aussi
critiqué la prise en compte des valeurs seuils pour caractériser
les précipitations et aussi l'utilisation des parcelles
expérimentales standardisées. C'est ainsi que le meilleur
critère à retenir devrait être la hauteur à partir
de laquelle on observe le ruissellement. A titre illustratif, Bouzou (1988) a
observé dans nos milieux des pluies de 5mm ayant
générées le ruissellent sur les petites parcelles. Roose
(1988) a aussi souligné une des limites des parcelles d'érosion
en ces termes : « la méthode des parcelles d'érosion fournit
des valeurs relatives d'érosion et de ruissellement, des valeurs
comparatives entre les différents traitements, mais ne donne pas la
valeur absolue de l'érosion en un point du versant puisqu'on isole la
parcelle de son environnement naturel (en particulier des apports d'eau et de
sédiments venant de l'amont) ».
En somme, la compréhension des différents
facteurs et des mécanismes nous imposent à travailler à
des échelles qui nous permettent de prendre en compte tous les aspects
propres dans nos milieux pour comprendre le ruissellement et
l'érosion.
La SLEMSA est aussi un modèle d'estimation de perte en
terre qui s'appui sur les mêmes approches et principes de base que le
modèle précédent. Ce modèle a vu le jour à
la fin des années 1970 en Afrique du Sud plus particulièrement au
Lesotho à partir des travaux de Elwell et Stoking (1980) sur des
parcelles expérimentales standards et l'énergie cinétique
des pluies. Ensuite, il a été initialement testé au
Zimbabwe puis amélioré, il est aujourd'hui adapté dans
plusieurs pays d'Afrique subsaharienne. Aussi ce modèle à
l'avantage d'utiliser peu de moyens et de données et est comparable
à la USLE.
Le schéma explicatif de la SLEMSA tel que donné par
Elwell et Stoking en 1981 se présente comme suit :
PHYSICAL SYSTEM
CROP
CLIMATE
SOIL
TOPOGRAPHY
Length
CONTROL energy interception Rainfall Soil Steepness
![](Dynamique-hydrogeomorphologique-du-kori-mountseka-et-ses-effets-socioeconomiquesapproche-meth9.png)
S
L
SUBMODEL
Crop ratio Soil loss from bare Topographic ratio
Z = KCX
Soil loss from cropland (t / ha / a)
Figure 4: structure du modèle SLEMSA
I: energy interception; E: rainfall energy; F: soil erodibility;
S: slope steepness; L: slope length Z : érosion mesurée ou
prévisible c'est à dire la perte en sol moyenne annuelle en t /
ha.
K : perte en sol sur une parcelle standard non
exploitée
X : facteur topographique
C : facteur des techniques cultural du couvert
végétal.
Notre choix porte sur le modèle de Wischmeier pour la
simple raison qu'il est universel, ce qui nous permettra de comparer les
résultats obtenus avec ceux des autres chercheurs dans des milieux
similaires. En effet comme l'a souligné Roose (1994), l'USLE est
calibrée pour tous les pays où le ruissellement est lié
à la dégradation de la surface du sol. Toutefois notre choix
porte sur la RUSLE ou la Revised Universal Soil Loss Equation qui permet de
passer de la parcelle à de vastes régions agricoles. Cette
version regroupe tout de même les principaux facteurs de la USLE qui sont
le sol, le climat, la topographie et l'occupation du sol.
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