CHAPITRE TROISIEME
IMPLICATIONS DE L'UNION DOUANIERE DU
COMESA SUR L'ECONOMIE CONGOLAISE ; UNE
ANALYSE PAR LE MODELE D'EQUILIBRE
GENERAL CALCULABLE
Le but de ce chapitre est d'analyser les implications de
l'union douanière du COMESA sur la structure économique de la RDC
et le volume du commerce, et partant sur le bien-être des ménages
congolais, en recourant à la modélisation en équilibre
général calculable statique.
III.1. MODELE D'EQUILIBRE GENERAL CALCULABLE
L'analyse des impacts dune union douanière est d'une
importance capitale, tant elle implique des effets sur la structure de commerce
au niveau aussi bien national que régional. Les instruments de politique
commerciale, comme par exemple les droits de douane, ont des effets directs et
indirects sur les prix relatifs des produits et des intrants, lesquels effets
sont transmis aux industries et aux marchés des autres économies
de la région avec lesquelles le pays commerce. Dès lors, il
convient de prendre en compte les interactions sectorielles qui en
résultent. A cet effet, la modélisation en équilibre
général offre un cadre analytique permettant de prendre en compte
ces changements de production inter et intra sectoriels, et par extension, les
variations de la demande de différents facteurs de production.
Le modèle utilisé dans ce travail est
adapté aux données de l'économie congolaise (PEP-RDC 1-1),
s'inspire du modèle PEP 1-1, développé en 2009 par
Decaluwé, Lemelin, Maisonnave et Robichaud. PEP-RDC 1-1 se distingue de
PEP 1-1 en la prise en compte de la spécification de la mesure du
bien-être dans le modèle et il est calibré en tenant compte
des particularités structurelles de l'économie congolaise,
analysées au deuxième chapitre.
III.1.1.ÉLABORATION DU MODELE D'ÉQUILIBRE
GENERAL CALCULABLE
La construction des modèles d'équilibre
général calculable, qui sont applicable à l'étude
d'une problématique déterminée, se fait suivant un
ensemble d'étapes de travail bien définies.
Généralement, ces étapes sont au nombre de neuf.
Étape 1. : L'identification de la
problématique
Dans cette étape, le modélisateur se pose la
question de savoir à quoi devrait servir le modèle, quelle serait
son utilité ou encore mieux à quelles questions est - il
censé répondre. Est-on intéressé par l'impact sur
l'économie d'un changement de dotation de facteurs de production, les
normes environnementales, la fiscalité directe ou indirecte, les termes
de l'échange extérieur, etc.
Étape 2. : La collecte des données
statistiques de base
Les données généralement utilisées
proviennent des comptes nationaux, le compte de la balance des paiements, le
tableau des échanges interactivités, les comptes des
administrations publiques, les comptes des opérations
financières, etc. Selon leur nature, ces données peuvent
être des données propres à une année
déterminée, ou encore des moyennes calculées sur un
certain nombre d'années déterminées, sont exprimées
en valeur ou en volume.
Cependant, il est rare que le modélisateur fasse
lui-même la collecte des données primaires en enquêtant
personnellement. La plupart du temps, il recourt à des bases de
données déjà construites.
Étape 3. : La Construction du cadre
comptable
Les données collectées à l'étape
précédente doivent satisfaire certains équilibres, encore
dits ex-post49. Pour cela, les constructeurs des modèles
d'équilibre général calculable ont adopté un cadre
comptable
49 A titre d'exemple : les particuliers ne
peuvent pas consommer davantage que la quantité offerte d'un
bien déterminé. Or,
l'hétérogénéité des bases de données
utilisées fait que cette identité entre quantité offertes
et
demandés n'est pas toujours obtenue du premier coup.
Il faudra donc effectuer des ajustements statistiques quisouvent
nécessiteront un réexamen des définitions
utilisées, par exemple celles des produits , voire un retour aux
données primaires elles-mêmes. (Décaluwé,
1996)
particulièrement opérationnel et connu sous le
nom de matrice de comptabilité sociale. Celle- ci est un tableau
carré à double entrée qui, lorsque complété,
donne les équilibres comptables qui doivent nécessairement
être satisfait à la période ou au moment du temps
observé, pour différentes catégories des flux et de
stocks. L'ensemble de ces équilibres constitue ce qui est appelé
la situation de référence de l'économie
étudiée.
Étape 4. : Le choix des formes
fonctionnelles
Les formes fonctionnelles sont des relations
mathématiques qui décrivent les différentes relations
technologiques et comportementales propres aux producteurs, aux consommateurs
ou à d'autres agents économiques comme l'État et le reste
du monde. En outre, ces relations sont des fonctions d'offre et de demande
d'outputs et d'inputs. Leur ensemble correspond à la vision qu'a le
modélisateur sur le fonctionnement de l'économie
étudiée basée sur l'observation des faits.
Étape 5. : Le calibrage ou choix des valeurs
numériques
Par calibrage, on entend le choix des paramètres des
formes fonctionnelles. Ces valeurs doivent pouvoir satisfaire le critère
fondamental suivant : lorsqu'introduites dans le modèle, elles doivent
permettre au modélisateur de reproduire la situation de
référence, en l'occurrence les chiffres de la matrice de
comptabilité sociale. L'hypothèse est que cette situation
correspond à l'équilibre économique compatible avec les
fonctions numériques spécifiées qui ont été
retenues.
Étape 6. : La Reproduction de la situation de
référence
Il s'agit de reproduire, à l'aide d'un modèle,
la situation de référence, compte tenu des valeurs
numériques des variables exogènes à cette situation et des
valeurs numériques des paramètres résultant de
l'opération de calibrage.
Étape 7. : L'établissement du plan des
simulations ou choix des scénarios
Ce choix est double. Il s'agira d'abord de sélectionner
les variables (prix, quantité ou valeur) ou les paramètres
(ratio, élasticité, etc.) du MEGC, dont on modifiera la valeur
numérique dans le but de traiter plus adéquatement la
problématique identifiée à l'étape 150.
Ensuite établir le plan des simulations, compte tenu des choix
précis qu'il implique, permet au modélisateur d'affiner la
problématique elle-même telle qu'elle a été
formulée à l'étape 1.
Étape 8. : La simulation
Elle consiste à résoudre le MEGC avec la ou les
nouvelles valeurs numériques choisies à l'étape 7 pour les
variables ou paramètres qui traduisent les chocs retenus. Au terme de
cette étape est obtenue la nouvelle simulation.
Étape 9. : L'interprétation des
résultats
Il s'agit, à cette dernière étape, de faire
la comparaison la plus soignée possible de la situation de
référence et de la nouvelle situation51.
Au terme de l'étape 9, l'exercice de
modélisation en équilibre général calculable peut
être considéré comme achevé. Dans certains cas,
cependant, le modélisateur serait tenté de retourner, au vu des
résultats, à l'étape 7, celle du choix du plan des
simulations, afin de modifier la nature ou l'intensité des chocs
retenus, voire aux étapes 4 ou 5, pour modifier certaines formes
fonctionnelles, ou pour changer certaines des valeurs numériques des
paramètres. Par ailleurs, ces 9 étapes sont en pratiques,
résumées en 4 grandes étapes suivantes :
50 A titre d'exemple, si c'est l'impact d'une
plus grande libéralisation du commerce extérieur qui nous
intéresse, il faudra diminuer le taux des droits des douanes à
l'importation. Il s'agit ensuite de choisir l'intensité du choc qui va
être introduit, par exemple, une diminution de ce taux de 10%. On peut
naturellement répéter la simulation des intensités de choc
différentes, à savoir successivement 10, 20 et 30% de diminution.
On peut aussi combiner deux ou plusieurs chocs dans une même simulation,
par exemple, en introduisant simultanément une baisse du taux de douane
de 10% et une augmentation de 10% des subventions aux producteurs produisant
des biens semblables aux biens importés. (Decaluwé et Al.,
1996)
51 Un MEGC, du moins quand il est
appliqué à une économie concrète, contient en
général un très grand nombre de variables. A fin de
faciliter cette comparaison des deux situations, on aura intérêt
ici à se concentrer sur la comparaison des valeurs numériques des
variables les plus susceptibles d'être affectées par la simulation
quitte à examiner d'autres variables si cette première
interprétation semble incomplète ou laisse un sentiment
d'insatisfaction. (Decaluwé et Al., 1996)
1.
le choix pour l'économie étudiée de
désagrégation de la matrice de comptabilité sociale qui
soit pertinent pour l'étude des politiques économiques que l'on
voudra simuler à l'aide du MEGC, et le remplissage pour l'année
de base de la simulation, des cases non nulles de la dite matrice ;
2. le choix des spécifications des comportements des
différents agents, activités et institutions, dont les comptes
constituent les entrées et sorties (ou lignes ou colonnes) de la
matrice.
3. le choix des valeurs prédéterminées
(paramètres ou variables) qui entre dans ces spécifications de
comportement.
4. la simulation des résultats.
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Figure N°2 : Neuf Etapes d'Elaboration du
MEGC
1. Identification De La
Problématique
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2. Collecte Des Données Statistiques De
BASE
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3. Vérification de la cohérence internes
des Données (Cadre Comptable)
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4. Choix des formes fonctionnelles et de la Fermeture
macroéconomique
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5. Choix des valeurs numériques des
paramètres ou calibrage
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6. Reproduction de la situation de
référence
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7. Choix de plan des simulations ou choix des
scénarios
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8. Simulation et obtention de la nouvelle
simulation
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9. Interprétation des
résultats
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Source : Adapté de Shoven et
Whalley (1992, p.104), (Decaluwé et Al., 2006)
Revérification de la relation entre le choc choisi et
les questions posées.
Modification de la nature et de lintensité du choc de
simulation au vu des résultats de simulation.
Modification des valeurs numériques des paramètres
au vu de simulation.
Modification des formes fonctionnelles au vu des
résultats de simulation.
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