MINISTÈRE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
UNIVERSITÉ DE DSCHANG
FACULTÉ DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES
DÉPARTEMENT DE DROIT PUBLIC ET SCIENCE POLITIQUE
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RÉPUBLIQUE DU CAMEROUN PAIX-TRAVAIL-PATRIE
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LE RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE AU
CAMEROUN, TRENTE ANS APRÈS
Thèse en vue de l'obtention du Master
Recherche Option : Droit public
Présentée et soutenue publiquement par
DOUNGUÉ KAMO Grégoire Yves Sous la
direction de Dr. Célestin SIETCHOUA
DJUITCHOKO Habilité à Diriger les Recherches Chargé
de Cours en Droit public
ANNÉE ACADÉMIQUE 2008-2009
AVERTISSEMENT
L'Université de Dschang n'entend aucunement donner
approbation ni improbation aux opinions émises dans cette thèse.
Celles-ci doivent être considérées comme propres à
son auteur qui en répond.
TABLE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS
- ADD : Jugement ou arrêt Avant dire
droit
- AJDA : Actualité juridique, Droit
administratif
- c/ : Contre
- CAB : Cabinet
- CCA : Conseil du Contentieux Administratif du
Cameroun
- CE : Conseil d'État français
- CFJ/CAY : Cour Fédérale de
Justice, Chambre Administrative de Yaoundé - CS/CA :
Cour Suprême, Chambre Administrative
- CS/AP : Cour Suprême, Assemblée
Plénière
- DGSN : Délégation
Générale à la Sûreté Nationale
- Dir. : Sous la direction de
- Ed : Édition
- GAJA : Grands arrêts de la jurisprudence
administrative
- LGDJ : Librairie générale de
droit et de jurisprudence
- MESIRES : Ministère de l'enseignement
supérieur, de l'informatique et de la
recherche scientifique
- MFPCE : Ministère de la fonction
publique et du contrôle de l'État
- MFPRA : Ministère de la formation
professionnelle et de la réforme
administrative
- MINAT : Ministère de l'Administration
Territoriale
- MINATD : Ministère de l'Administration
Territoriale et de la Décentralisation - MINDAF :
Ministère des affaires foncières
- MINDEF : Ministère de la
défense
- MINEFI : Ministère de l'économie
et des finances
- MINEFIB : Ministère de
l'économie, des finances et du budget
- MINFIB : Ministère des finances et du
budget
- MINMEE : Ministère des mines, de l'eau
et de l'énergie - MINSANTE : Ministère de la
santé publique
- MINUH : Ministère de l'urbanisme et de
l'habitat
- MTPS : Ministère du travail et de la
prévoyance sociale - OR : Ordonnance de
référé
- OSE : Ordonnance de sursis à
exécution
- p. : Page
- PCA : Président de la Chambre
Administrative
- PDF : Portable Document Format. (Format de
document universel) - PM : Premier Ministère
- pp. : Pages
- PR : Présidence de la
République
- PUA : Presses Universitaires d'Afrique
- PUAM : Presses Universitaires
d'Aix-Marseille
- PUC : Presses Universitaires du Cameroun
- PUF : Presses Universitaires de France
- RCD : Revue camerounaise de droit
- Rec. : Recueil
- RGP : Recours gracieux préalable
- RJA : Revue Juridique Africaine
- T. : Tome
- Vol. : Volume
SOMMAIRE
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
PREMIÈRE PARTIE : UNE TRANSFORMATION
LIMITÉE DES EXIGENCES DE FORME DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
.... 14
CHAPITRE-1 : LA RÉAFFIRMATION DU CARACTÈRE
D'ORDRE PUBLIC DU RECOURS GRACIEUX 16
CONCLUSION DU CHAPITRE 1 47
CHAPITRE-2 : L'ATTÉNUATION DE LA RÈGLE DU
RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE 48
CONCLUSION DU CHAPITRE 2 61
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE 62
SECONDE PARTIE : UNE MODIFICATION ATTÉNUÉE
DES EXIGENCES DE FOND DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE 63
CHAPITRE-1 : LA SIMPLIFICATION DES RÈGLES RELATIVES
À LA DÉTERMINATION DE L'AUTORITÉ ADRESSATAIRE DU RECOURS
GRACIEUX PRÉALABLE 65
CONCLUSION DU CHAPITRE 1 93
CHAPITRE-2 : LA QUASI STABILITÉ DES RÈGLES
RELATIVES AUX DÉLAIS DU RECOURS GRACIEUX 95
CONCLUSION DU CHAPITRE 2 108
CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE 109
CONCLUSION GÉNÉRALE 111
RÉSUMÉ
Une trentaine d'années après l'ordonnance
n°72/6 du 26 août 1972 portant organisation de la Cour
Suprême, on peut se poser la question de savoir si le recours gracieux
préalable à la saisine de la juridiction administrative demeure
la même institution qu'elle avait été conçue et
appliquée à l'origine.
Aujourd'hui, à l'heure de la transformation de notre
société sous l'emprise des libertés et droits de l'homme,
il s'avère important de nous demander si le recours gracieux
préalable au Cameroun a intégré l'évolution des
libertés et des droits de l'homme.
Le recours gracieux préalable est -t-il toujours
notamment comme l'écrivait jadis le Professeur KAMTO le «
casse- tête du contentieux administratif camerounais » ? Il
est donc important de mettre en évidence les différentes
transformations que ce recours a connues en l'espace de trente ans.
Cette étude nous permettra de constater que le recours
gracieux préalable a évolué tant dans le fond que dans la
forme.
Dans le fond, les règles relatives à
l'autorité adressataire ont connu une modification significative tandis
que celles relatives aux délais n'ont quasiment pas changé.
Sur la forme, le recours gracieux préalable reste un
recours précontentieux dont le caractère d'ordre public est
menacé par une multitude d'exceptions.
En contentieux administratif, le recours gracieux est la phase
préalable au déclenchement d'une action en justice contre
l'Administration. En tant que tel, c'est un acte de procédure qui
constitue un pré requis à l'accès à la juridiction
administrative. Il a pour but d'inviter l'Administration « selon le
cas soit à retirer l'acte administratif contesté, soit à
réparer le préjudice que son action ou son inaction a pu causer
aux tiers1 ». Ce préalable peut alors bloquer ou au
contraire déclencher la phase proprement contentieuse du contentieux
administratif2. Les recours gracieux sont des « recours qui
sans être nécessairement fondés sur un droit violé
sont portés devant l'Administration ellemême et se règlent
par une décision administrative »3. Par ailleurs,
le fondement du recours gracieux se trouve dans un principe
général dégagé par le juge administratif
français à savoir « la possibilité pour les
autorités administratives d'assurer par une procédure de retrait
le contrôle de leurs propres actes4 ». Le
requérant informe l'Administration par le recours gracieux
préalable de l'imminence d'une action en justice contre elle. Il lui
demande le réexamen d'une décision litigieuse faute de quoi cette
dernière pourra être éventuellement contrainte par une
décision de justice. Le recours gracieux préalable est la
survivance de la théorie du Ministre juge en France. Selon cette
théorie, le Ministre tranchait en premier ressort le litige et sa
décision pouvait être contestée en appel devant le Conseil
d' État5 . La loi n°2006/022 du 29 décembre 2006
fixant l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs en son
article 17 alinéa 1 dispose : « Le recours devant le tribunal
administratif
1 GUIMDO DONGMO (B-R), « Le droit
d'accès à la juridiction administrative au Cameroun .Contribution
à l'étude d'un droit fondamental», RRJ,
n°XXXIII-121 ,2008-1, p.469.
2 KAMTO. (M) « La fonction administrative
contentieuse de la Cour Suprême du Cameroun », in Les Cours
suprêmes en Afrique (sous la direction de CONAC (G) et de DUBOIS De
GAUDUSSON (J), Paris, Economica, 1988, pp.31-67, notamment p.42.
3 TROTABAS (L) et ISOART (P), Droit public, Paris,
LGDJ, 21ième Ed, 1988, p. 200.Voir aussi AUBY (J -M) et
FRAUMONT (M), Les recours contre les actes administratifs dans les pays de la
Communauté Économique Européenne (Allemagne, Belgique,
France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas), Paris, Dalloz, 1971, pp.215 et ss.
4 Voir les conclusions du Commissaire du
gouvernement Rivet sur l'arrêt Dame Cachet, CE, 3 novembre 1922, p.552
,GAJA,6ième Ed, 1974, n°170, pp.170 et suivants.
Cité par KAMTO (M) « La fonction administrative contentieuse de
la Cour Suprême du Cameroun », Article précité,
p.43.
5 TROTABAS (L) et ISOART (P), Ouvrage
précité : le Chef de l'État rendait la justice
administrative. « Juger était considéré comme
administrer». Le Ministre supérieur hiérarchique des
services était de droit juge de droit commun en matière
administrative : c'était la théorie du Ministre juge qui fut
abandonnée en France depuis l'arrêt CADOT de 1889 qui marque la
séparation de l'Administration active de la juridiction
administrative.
n'est recevable qu'après rejet d'un recours
gracieux adressé à l'autorité auteur de l'acte
attaqué ou à celle statutairement habilitée à
représenter la collectivité ou l'établissement public en
cause ». Cette disposition est novatrice à plusieurs
égards par rapport à l'ordonnance n° 72/06 du 26 août
1972 fixant l'organisation de la Cour Suprême de 19726. Il est
toutefois nécessaire de délimiter les cadres conceptuel et
méthodologique de notre sujet.
I- Approche conceptuelle du sujet
Il convient de ne pas confondre le recours gracieux avec des
recours précontentieux avec lesquels il partage la même
finalité qui est celle de requérir de l'Administration qu'elle
revienne sur une décision prise auparavant. Nous pouvons évoquer
à ce titre le recours hiérarchique, le recours de tutelle, la
règle de la décision préalable applicable devant les
tribunaux français, le « fiat justicia anglais ». De
même nous ferons un distinguo entre les modes alternatifs de
règlement des conflits, les recours contentieux et le recours gracieux
préalable.
A - Recours gracieux préalable et recours
hiérarchique
Le recours hiérarchique contrairement au recours
gracieux préalable est adressé non pas à l'autorité
auteur de l'acte, mais plutôt à son supérieur
hiérarchique7. Le contentieux administratif camerounais
laisse quelque place au recours hiérarchique. Un tour d'ensemble de ce
contentieux nous permet de remarquer que dans le contentieux fiscal le
requérant insatisfait de la décision du Directeur des
impôts doit obligatoirement exercer un recours auprès du Ministre
des finances. On peut raisonnablement penser qu'il s'agit là d'un
recours hiérarchique puisqu'il va sans dire que le Ministre des finances
est le supérieur hiérarchique du Directeur des impôts. Aux
termes de l'article 321 du Code Général des Impôts, «
Lorsque la décision du Directeur des impôts ne donne pas
entièrement satisfaction au réclamant, celui-ci doit adresser sa
réclamation au
6 L'article 12 paragraphe 1 de cette ordonnance
disposait : « Le recours devant la Cour Suprême n'est recevable
qu'après rejet d'un recours gracieux adressé au Ministre
compétent ou à l'autorité statutairement habilitée
à représenter la collectivité publique ou
l'établissement public en cause ».
7 OWONA (J), Droit administratif spécial de la
République du Cameroun, Paris, EDICEF, 1985, p. 207.
Ministre des finances. La réclamation ainsi
présentée doit pour être recevable remplir les conditions
suivantes ;...être présentée dans un délai d'un mois
à partir de la notification de la décision du Directeur des
impôts ou dans les soixante jours de la date de mise au recouvrement du
rôle ou de la connaissance certaine de
l'imposition8». Le verbe devoir exprimant une obligation,
on doit y comprendre qu'il ne s'agit pas d'un recours hiérarchique
facultatif. C'est pour cela que le juge administratif a eu à
débouter les requérants qui n'avaient pas respecté cette
formalité9.
Le recours hiérarchique partage avec le recours
gracieux préalable le fait qu'il vise à obtenir un
règlement non juridictionnel du litige administratif et contribue ainsi
à décongestionner le prétoire administratif. On peut aussi
par ailleurs regretter le fait que le législateur camerounais n'ait pas
comme ses homologues béninois, burkinabé et marocain10
laissé aux requérants la possibilité de choix entre le
recours gracieux et le recours hiérarchique. Au Bénin par
exemple, l'article 68 alinéa 2 de l'ordonnance n°21/PR du 26 avril
1966 dispose : «Avant de se pourvoir contre une décision
individuelle, les intéressés doivent présenter un recours
hiérarchique ou gracieux tendant à faire rapporter ladite
décision ». Il découle de cette disposition qu'au
Bénin, le recours gracieux et le recours hiérarchique ont les
mêmes finalités. La juridiction administrative a eu à
dégager sous l'empire de l'ordonnance de n° 72/06
précitée le lien qui peut exister entre le recours gracieux
préalable et le recours hiérarchique11.
8 Code Général des Impôts. Voir
jugement n°128/02-03/CS-CA du 24 septembre 2003, Me N'DENGUE Thomas Byll
c/ État du Cameroun (MINFIB).
9 Voir jugement n°128/02-03/CS-CA du 24
septembre 2003, Me N'DENGUE Thomas Byll c/ État du Cameroun (MINFIB),
jugement précité.
10 Voir ONDOA (M), Le droit de la
responsabilité publique dans les États en développement :
Contribution à l'étude de l'originalité des droits
africains. Thèse Droit, Université de Yaoundé II-SOA, T.1,
pp. 83 et ss. Voir aussi ENONE EBOH (T), les délais dans le contentieux
de l'excès de pouvoir au Bénin, Mémoire disponible sur
http://www.memoireonline.com
2007.
11 Jugement n°36/04-05/CS-CA du 29
décembre 2004, Crédit Foncier du Cameroun c/ État du
Cameroun (MTPS) et MISSOKA Antoine Marie. On peut y relever ce qui suit :
« Attendu qu'en droit camerounais, le recours hiérarchique
s'identifie au recours gracieux en ce qui concerne la décision de
l'inspecteur provincial du travail ».
B- Recours gracieux préalable et recours de
tutelle
Le recours de tutelle comme son nom l'indique est
adressé à l'autorité assurant la tutelle de
l'Administration auteur de l'acte incriminé. Il est l'émanation
du pouvoir de tutelle dans l'Administration moderne.
Le pouvoir de tutelle est exercé le plus souvent par le
pouvoir central et dans tous les cas au nom du pouvoir central sur une personne
morale autre que l' État, qui peut être soit une
collectivité locale, un établissement public ou un organisme
privé exerçant une mission de droit public12. Il
s'agit du pouvoir reconnu à l'autorité de tutelle de provoquer
l'annulation, d'approuver, et d'orienter les actes des autorités sous
tutelle. Le pouvoir de tutelle entraine dans certains cas la substitution des
autorités de tutelle aux autorités locales. Le recours de tutelle
joue un grand rôle dans le contrôle administratif et dans les
rapports pouvoir central pouvoir infra étatique. Au Cameroun il permet
au Gouverneur et au Préfet par exemple d'exercer le contrôle
étatique sur les Communes et les Régions, c'est aussi un
mécanisme de contrôle des établissements publics. Si par
exemple un acte pris par le Recteur de l'Université de Dschang est remis
en cause par un étudiant, le recours de tutelle sera adressé au
Ministre en charge de l'enseignement supérieur. Enfin, il permet une
résolution non juridictionnelle du litige administratif.
Le recours de tutelle a été consacré par
le législateur camerounais dans certains contentieux. C'est le cas du
décret n°90 / 1464 du 09 novembre 1990 qui prévoyait en son
article 31 que « Les actes du Délégué du
gouvernement, du Maire ou de l'administrateur municipal peuvent faire l'objet
d'un recours gracieux auprès de leur auteur. En cas d'insuccès ou
si le magistrat municipal garde le silence pendant un mois, ils sont soumis
à l'appréciation du Préfet qui dispose de deux mois pour y
donner avis ... ». Ce recours était autant obligatoire
12MOREAU (J), Droit administratif, PUF, Collection
droit fondamental, Paris 1989, p.124.
que le recours gracieux préalable et le juge
n'hésitait pas à sanctionner sa violation13.
C - Recours gracieux préalable et règle de la
décision préalable
La règle du recours gracieux préalable
applicable en droit camerounais du contentieux administratif ne traduit pas la
même réalité que celle de la décision
préalable applicable en droit français. Il est toutefois
important de relever que la règle du recours gracieux préalable
est issue de la de la règle de la décision préalable. Ces
deux règles partagent également les mêmes finalités
à savoir protéger l'Administration, le justiciable et enfin
faciliter la tâche du juge en l'informant du contenu de la demande du
requérant14.
La règle du RGP est d'application
générale. Par application de cette règle, obligation est
faite systématiquement à tout requérant, sauf exception,
de s'adresser à l'Administration avant de saisir le juge quelle que soit
la forme du contentieux en cause. Il n'en va pas ainsi de la règle de la
décision préalable française car elle oblige juste le
requérant à diriger son recours contre une décision de
l'Administration. Il en découle que dans le contentieux de l'annulation
pour excès de pouvoir, « cette règle se trouve
nécessairement remplie puisque le recours pour excès de pouvoir
est un procès fait à un acte15 ». Le
requérant n'a plus besoin d'une décision préalable car
celle-ci existe déjà et il peut tout simplement l'attaquer. La
règle de la décision préalable n'a donc de sens que dans
le contentieux de pleine juridiction parce que dans cette hypothèse,
l'Administration n'a pu prendre position sur le problème, et il revient
au requérant de la provoquer afin de saisir le juge administratif sur
les suites à donner à l'affaire16.
13 Jugement n°66/2008/CS-CA du 18 juin 2008,
Entreprise des Travaux à Hydraulique et de Génie Civil (ETHYGEC)
c/ Communauté urbaine de Yaoundé.
14 DEGUERGUE (M), Procédure administrative
contentieuse, Paris Montchrestien, 2003, p.79.
15 DEGUERGUE (M), Ouvrage précité,
p.78.
16 Voir JACQUOT (H), Article précité,
p.113.
Autrement dit, dans le contentieux de l'excès de
pouvoir, la décision préalable est constituée par la
décision attaquée elle-même17. Pour le
Professeur René CHAPUS, la règle de la décision
préalable a deux avantages particuliers. D'une part, elle impose aux
requérants de donner la possibilité de leur accorder ce qu'ils
réclament, ce qui évitera le procès ; c'est-à-dire
qu'elle joue le rôle de « préliminaire de
conciliation ». D'autre part, si l'affaire est portée devant
le juge administratif, « le litige se trouve concrétisé
et délimité par ce qui a été demandé et cela
est de nature à faciliter le travail du juge18
».
Les modes alternatifs de règlement des conflits au rang
desquels l'arbitrage19, la transaction administrative20,
la conciliation et la médiation poursuivent aussi le même but que
le recours gracieux préalable. Il en va de même du « fiat
justicia » de l'ancien Cameroun anglophone21. Le RGP se
pose en s'opposant aux recours contentieux22.
17DE LAUBADERE (A) ,VENEZIA (J.C) ,GAUDEMET
(Y),Traité de droit administratif ,T.1 ,14ième Ed,
Paris, LGDJ,1996,1027 p. , p.476.
18 CHAPUS (R), Droit du contentieux administratif,
Paris, Montchrestien ,7ième Ed, 1998.pp.444 et ss.
19 PATRIKIOS (A), L'arbitrage en matière
administrative, Préface de GAUDEMET (Y), T. 189, LGDJ, Paris 1997, 339
p. L'auteur déclare qu'a priori, « l'arbitrage en
matière administrative peut apparaitre d'abord au voyageur du droit
comme une terre de désespérance». Cependant, il est
d'un grand atout pour les administrés et l'Administration. Voir aussi
TCHAKOUA (J-M), Les modes alternatifs de règlement des
différends, Cours polycopié de Maitrise, Université de
Dschang, 2007-2008, p.16.
20 En France le recours à la transaction est
prôné par les pouvoirs publics dans certains domaines. Une
circulaire du Premier Ministre français du 6 février 1995
relative au développement du recours à la transaction pour
régler amiablement les conflits (JO 15 fév. 1995, p.
2518) a encouragé la conclusion des transactions pour une meilleure
satisfaction des intérêts publics. Malgré
l'intérêt qui s'attache à la transaction et les
encouragements de la circulaire du 6 février 1995, le
développement projeté du recours à la transaction se
traduit aujourd'hui par un relatif échec. Dans son rapport public 2008,
le Conseil d' État relève que les Administrations demeurent
réticentes face à la solution transactionnelle. Voir aussi
Journal officiel de la République française, 18 septembre 2009,
Texte 27 sur 106 ; Circulaire du 7 septembre 2009 relative au recours à
la transaction pour la prévention et le règlement des litiges
portant sur l'exécution des contrats de la commande publique, fichier
PDF, 8 p.
Voir aussi BOUSQUET (J-B), « Une circulaire pour
favoriser le recours aux transactions administratives ». À
propos de la circulaire du 7 septembre 2009, élément
précité. Disponible sur le site
http://www.lextenso.fr/weblextenso/article/print?id=PA200923605,
Petites Affiches, Droit administratif, 26 novembre 2009 n° 236, p.6. Tous
droits réservés.
21 NKONGHO (E), « The francophone « recours
gracieux » and the Common law « fiat justicia » of the former
Federal Republic of Cameroon » , Juridis info n°22,
avril-mai-juin1995, pp.87-90.
22 L'article 2, alinéa 3 de la loi de 2006
précitée dispose :
« (3) Le contentieux administratif comprend :
a) les recours en annulation pour excès de pouvoir et,
en matière non répressive, les recours incidents en
appréciation de la légalité. Est constitutif
d'excès de pouvoir au sens du présent article :
-le vice de forme ;
-l'incompétence ;
-la violation d'une disposition légale ou
réglementaire ;
-le détournement de pouvoir
Pour une bonne compréhension de notre sujet, l'approche
méthodologique doit être précisée.
II - Approche méthodologique du sujet
L'approche méthodologique traite des précisions
relatives à l'intérêt du sujet, à la
problématique, à l'hypothèse de travail, aux
méthodes utilisées et enfin au plan du travail.
A - Intérêt du sujet
Le recours gracieux préalable au Cameroun est apparu
pour la première fois au lendemain de l'indépendance, notamment
l'ordonnance n°61/DF/6 du 4 octobre 196123. Pour le Professeur
MESCHERIAKOFF , « ce recours improprement appelé gracieux peut
être en fait hiérarchique puisqu'il doit obligatoirement
être porté non pas devant l'auteur de la décision
contestée, mais devant certaines autorités habilitées
à le recevoir :la plupart du temps, les Ministres24 ».
Le problème ne se pose plus aujourd'hui en ces termes parce que le
RGP est désormais adressé entre autres à l'auteur de
l'acte attaqué25.
La règle du recours gracieux préalable a
été reprise dans l'ordonnance n°72/6 précitée.
Cependant, entre 1961 et 1972, rien ne permet de dire que le recours gracieux
préalable au Cameroun est un moyen d'ordre public26,
affirme
b) les actions en indemnisation du préjudice
causé par un acte administratif ;
c) les litiges concernant les contrats (à l'exception
de ceux conclus même implicitement sous l'empire du droit privé)
ou les concessions de service public ;
d) les litiges intéressant le domaine public
;
e)les litiges intéressant les opérations de
maintient de l'ordre ».
23 L'article 15 de cette ordonnance dispose «
Les recours pour excès de pouvoir devant la Cour
Fédérale de Justice contre les actes réglementaires ou les
actes administratifs individuels émanant d'autorités
fédérales ne sont recevables qu'après l'échec d'un
recours gracieux tendant au retrait des dispositions attaquées
».
24 MESCHERIAKOFF (A.S), « Le régime
juridique du recours gracieux préalable dans la jurisprudence
administrative camerounaise », RCD n°15 et 16, Série II,
1978, p. 42-55, notamment p.42.
25 Article 17 alinéa 2 de la loi de 2006
précitée.
26Voir JACQUOT (H), Article précité,
p.113. L'auteur cite à l'appui de sa position l'arrêt TAGNY
Mathieu c/ État du Cameroun Arrêt n°19/CFJ-AP du 16 mars
1967.
M. MESCHERIAKOFF. À la faveur de l'ordonnance de 1972
précitée le juge va reconnaitre le caractère d'ordre
public du recours gracieux préalable. À partir du jugement ITEM
Dieudonné, il est désormais établi qu'au Cameroun le
recours gracieux préalable est d'ordre public.
Trois décennies après la réaffirmation de
la règle recours gracieux par le législateur camerounais et la
consécration consécutive de son caractère d'ordre public
par la juridiction administrative, on a l'impression que cette institution
peine à retrouver ses marques. La règle du recours gracieux
préalable n'est pas restée indifférente au temps ou mieux
aux évolutions. Nous sommes partis d'un recours, pourrait-t-on dire,
simple formalité administrative en passant par un recours doté
d'un caractère d'ordre public, pour arriver enfin à un recours
dont le caractère d'ordre public est menacé par une multitude
d'exceptions27, à telle enseigne que la règle, toute
proportion gardée, n'est plus que l'ombre d'ellemême. Autrement
dit, de la confirmation du caractère d'ordre public du RGP à la
multiplication des exceptions et atténuations à la règle,
on a sinon le sentiment, du moins la certitude que la règle du recours
gracieux préalable n'est pas restée la même depuis ses
origines.
S'il nous est demandé aujourd'hui de faire un
exposé sur le régime juridique du recours gracieux
préalable comme l'avait si bien fait le Professeur MESCHERIAKOFF, il est
évident qu'on n'y trouvera pas exclusivement les mêmes arguments
que ceux qui prévalaient en 1978. De nos jours, l'organisation et le
fonctionnement de la Cour Suprême ont évolué. En bref
l'organisation judiciaire n'est plus la même il y' a trente
ans28. Il en est de même des attributions de la Chambre
administrative de la Cour suprême. Elle n'est plus que juge d'appel et de
cassation selon le cas29. Il y a davantage, les règles
gouvernant
,
27 Voir KEUTCHA TCHAPNGA (C) et TEUBOU (B), «
Réflexions sur l'apport du législateur camerounais à
l'évolution de la procédure administrative contentieuse de 1990
à 1997 », Revue Internationale de Droit Africain EDJA n°
45, Avril-mai-juin 2000, pp. 66- 69.
28 ANOUKAHA (F), « La réforme de
l'organisation judiciaire au Cameroun », Juridis Périodique
n°68, octobre- novembre- décembre 2006, pp.45-56, notamment
pp.46-47.
29 SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), «Perspectives
ouvertes à la juridiction administrative au Cameroun par la loi n°
96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin
1972 », Annales de
le contentieux administratif ont été
considérablement modifiées. Une série lois intervenues
dans les années 2000 pour l'essentiel, en application de la loi
constitutionnelle du 18 janvier 199630 ont opéré une
réforme somme toute significative du contentieux administratif
camerounais. La juridiction administrative évoque de nos jours la notion
de recours gracieux collectifs, ce qui n'était pas le cas dans les
années 70. La preuve en est que les Professeurs KAMTO, JACQUOT, NLEP,
MESCHERIAKOFF et bien d'autres n'ont pas fait état des RGP collectifs
dans leurs oeuvres. C'est nous semble-t-il une nouveauté dans la
jurisprudence administrative camerounaise en matière de recours gracieux
préalable.
B - Problématique
Michel BEAUD définit la problématique comme
« l'ensemble construit, autour d'une question principale, des
hypothèses de recherches et des signes d'analyse qui permettront de
traiter le sujet choisi 31». Ainsi, notre sujet pose le
problème suivant : que devient le recours gracieux au Cameroun trente
ans après ?
C - Hypothèse de la recherche
En réponse à notre problématique, il
convient de noter que le recours gracieux préalable au Cameroun trente
ans après a connu une profonde mutation, laquelle l'a affecté
tant dans son fond que dans sa forme, réserve faite que cette mutation
n'a pas la même ampleur de part et d'autre. Ce changement se ressent
à
la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques,
Université de Dschang, T.1, Vol.1, 1997, pp.162-175, notamment p.169.
30Voir loi n°2003/005 du 21 avril 2003 fixant les
attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des comptes de
la Cour Suprême ;
Loi n°2006/017 du 29 décembre 2006 fixant
l'organisation et le fonctionnement des tribunaux régionaux des comptes.
Voir commentaire SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), « La difficile gestation
des juridictions inférieures des comptes au Cameroun »,
Juridis Périodique n°68, octobre-novembredécembre 2006,
pp.101-113.
Loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant
l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs
31 Cité par MANDENG (D), Le contrôle de
la régularité des élections législatives au
Cameroun, Mémoire de DEA, Université de Douala, Année
académique 2003-2004,129 p., notamment p.11.
plusieurs niveaux et se répercute sur tous les
protagonistes du contentieux administratif, à savoir les
administrés, l'Administration et le juge.
D - Méthodes de la recherche
On peut entendre par méthode de recherche la
manière dont les chercheurs organisent leur raisonnement pour parvenir
à un résultat. La méthode est un moyen et non une fin.
C'est un simple instrument qui permet à l'esprit de s'épanouir,
à la réflexion de s'élargir et à l'expression de
s'éclaircir. 32 Elle est constituée de «
l'ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une
discipline cherche à atteindre les vérités qu'elle
poursuit, les démontre et les vérifie33 ».
Il va de soi que la pertinence d'un travail juridique réside dans la
pertinence des idées, étant donné que l'objectif du
juriste est de démontrer une solution juridique par le droit, avec
rigueur et objectivité et non de persuader par
l'absurde.34
1 - L'approche fondamentale : le positivisme
Nous nous évertuerons tout au long de ce travail
à démontrer que le recours gracieux préalable a connu des
mutations qui, bien que relatives restent fondamentales. Nous y parviendrons
par le biais d'une approche positiviste, pour l'essentiel basée sur les
textes juridiques et la jurisprudence. Nous étudierons la jurisprudence
administrative camerounaise prioritairement et nous insisterons sur les
décisions de principe. Nous exploiterons aussi les textes juridiques,
des anciens aux récents. Cette démarche combinera donc la
casuistique et la dogmatique. La dogmatique juridique « consiste pour
l'essentiel dans la description, l'interprétation, et la tentative de
compléter les règles de droit en comblant les carences de la
législation35 »
32COHENDET (M-A), Ouvrage précité,
pp.9-11. Voir aussi pour toutes les questions de méthodologie
KEUTCHA TCHAPNGA (C), Méthodologie de la recherche, Cours
polycopié de Master II recherche, Université de Dschang,
2008-2009 ; ONDOA (M), Théories, méthodologie et
épistémologie du Droit, Cours de Master II recherche,
Université de Dschang, 2008-2009.
33 GRAWITZ (M), Méthodes en sciences sociales,
Paris Dalloz 2001,1019 p., p.351.
34 Sur toute la question, voir COHENDET (M-A), Ouvrage
précité, p.29.
35 COHENDET (M-A), Ouvrage précité,
p.44.
Il s'avère important de ne pas mêler
systématiquement les autres sciences à la science du droit. Cette
approche est essentielle car « bien souvent, ce n'est pas la
quantité du travail qui fait défaut, mais la
méthode36 ». Les positivistes estiment que la
recherche juridique repose sur l'exploitation maximale et exclusive du droit en
vigueur37. Nous ferrons occasionnellement recours à d'autres
approches.
2 - Les approches marginales
L'approche historique est indispensable pour un sujet qui
traite du devenir du recours gracieux préalable au Cameroun. Cette
approche nous permettra de dire ce qu'était le RGP à l'origine et
ce qu'il est aujourd'hui en mettant en évidence la variation de la
position du juge sur certaines règles relatives à ce recours
précontentieux.
Une incursion dans la sociologie juridique nous permettra de
mettre en exergue la relation qui peut exister entre le RGP et certains faits
sociaux. Cette approche nous instruira aussi sur les difficultés de mise
en oeuvre de certaines règles relatives au recours gracieux au Cameroun,
ou sur le bien fondé du recours gracieux pour le requérant compte
tenu de sa situation sociale. Les études statistiques relèvent
aussi de la sociologie juridique38.
« L'informatique est devenue indispensable (...) pour
la recherche (...)39 ». Dans le cadre de notre travail,
nous avons également visité des sites internet
oünous avons recueilli des informations relatives à
certaines préoccupations. Le
droit étranger nous a permis de rendre compte de la
situation du précontentieux administratif dans certains pays. La science
administrative nous aidera notamment à comprendre le comportement de
l'Administration par rapport au recours gracieux.
36Ibidem.
37 ONDOA (M), Cours de Master II
précité.
38 Voir ONDOA (M), cour précité, voir
aussi COHENDET (M-A), Ouvrage précité, p.46.
39 COHENDET (M-A), Ouvrage précité,
p.72.
Ces méthodes contribueront à affiner la forme
ainsi que le fond de notre travail d'autant plus que nous reconnaissons avec
Victor HUGO que « La forme c'est le fond qui remonte à la
surface40 ».
E - Plan
La problématique du devenir du recours gracieux
préalable au Cameroun sera analysée dans une logique qui nous
permettra de mettre en évidence les mutations que ce recours
précontentieux a connues. Ainsi, nous retiendrons essentiellement qu'en
matière de recours gracieux préalable au Cameroun, il y a d'une
part une transformation limitée de ses exigences de forme
(Première partie) et d'autre part une modification
atténuée de ses exigences de fond (Seconde partie).
40 Cité par COHENDET (M-A), Ouvrage
précité.
|
PREMIÈRE PARTIE : UNE
TRANSFORMATION LIMITÉE DES
EXIGENCES DE FORME DU RECOURS
GRACIEUX PRÉALABLE
|
Le recours précontentieux de l'ordonnance n°72/6
du 26 août 1972 fixant l'organisation de la Cour Suprême n'est pas
resté entièrement le même une trentaine d'années
après. À la vérité, il ne s'affirme plus avec la
même rigueur.
Cette situation est naturellement compréhensible car
c'est tout à fait normal que le temps influe sur les règles
procédure. Cette transformation aurait permis au recours gracieux
préalable d'intégrer des situations juridiques nouvellement
acquises. Le caractère d'ordre public du recours gracieux
préalable n'a pas échappé aux transformations qu'a connues
ce recours au Cameroun. On pourrait même être tenté de dire
que la rigueur de la règle du recours gracieux préalable parait
aujourd'hui se réduire comme une peau de chagrin. Quelle est donc cette
règle contre laquelle se dressent systématiquement une
multiplicité d'exceptions à telle point qu'on peut penser que
l'exception a pris le dessus sur le principe ?
Seule une réponse nuancée nous permettra de
comprendre que malgré les atténuations qu'a subies la
règle du recours gracieux préalable (Chapitre 2), son
caractère d'ordre public reste affirmé (Chapitre 1).
CHAPITRE-1 : LA RÉAFFIRMATION DU
CARACTÈRE D'ORDRE PUBLIC DU RECOURS
GRACIEUX
« Le recours gracieux est un moyen d'ordre
public 41». Le caractère formel de la règle
du recours gracieux préalable est resté au delà de toutes
les réformes qu'a connues le contentieux administratif au Cameroun. La
preuve en est que la loi n°2006/022 du 29 décembre 2006 sur
l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs a
réitéré cette exigence aux termes des articles 17, 27, 30
et 52 alinéa 3. Il ressort de ces dispositions que le recours gracieux
préalable couvre un large champ d'application qui a d'ailleurs
reçu une consécration jurisprudentielle.
SECTION-1 : LE CHAMP D'APPLICATION DE
LA RÈGLE DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
Le champ d'application de la règle du recours gracieux
préalable est large. Il renvoie à l'ensemble des domaines que
couvre le contentieux administratif au Cameroun. En d'autres termes, il s'agit
ici plus précisément de faire une analyse approfondie du champ
matériel du recours gracieux préalable. L'étude de ce
champ nous permettra de mettre en évidence les différentes
circonstances d'application du RGP. Pour ce faire, nous regrouperons nos
idées autour de trois axes principaux constitués d'abord par
l'examen du recours gracieux en matière ordinaire (Paragraphe1). Le
recours gracieux préalable en matière d'urgence retiendra ensuite
notre attention (Paragraphe 2), et enfin nous examinerons le recours gracieux
préalable dans les voies de recours (Paragraphe 3).
41 KAMTO (M), Droit administratif processuel du
Cameroun, Yaoundé, PUC, 1990, p.40.
PARAGRAPHE-1 : LE RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
EN MATIÈRE ORDINAIRE
Le recours gracieux préalable en matière
ordinaire n'a pas connu de changement depuis 1972 en ce qui concerne la
prescription de son caractère d'ordre public. En effet, ce
caractère a pour le moins survécu aux différentes
modifications survenues depuis lors. Pour s'en rassurer, il suffit de parcourir
la loi de 2006 précitée. Cette loi nous permet de constater que
le caractère d'ordre public du recours gracieux préalable ne
souffre d'aucune contestation (A). La rigueur formelle du recours gracieux
préalable consacre la possibilité de liaison du contentieux
administratif par ce recours précontentieux (B).
A- La rigueur formelle de l'article 17 de la loi de
2006
La loi n°2006/022 du 29 décembre 2006 fixant
l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs en son article
17 alinéa 1 dispose :
« Le recours devant le tribunal administratif n'est
recevable qu'après rejet d'un recours gracieux adressé à
l'autorité auteur de l'acte attaqué ou à celle
statutairement habilitée à représenter la
collectivité ou l'établissement public en cause ».
Il est semble évident que le recours gracieux
préalable garde toute sa place dans l'ordonnancement juridique
camerounais et ne saurait même disparaitre. Tout au contraire, il
s'impose tant bien que mal. Cette rémanence du recours gracieux
préalable peut bien trouver une explication. La première
justification trouve son fondement dans le fait que le RGP constitue une sorte
de « protection précontentieuse de
l'Administration42 ». La seconde justification
réside en ceci que le recours gracieux préalable
représente un atout non négligeable pour le requérant et
le juge.
42 NLEP (R.G), L'Administration publique camerounaise
: « contribution à l'étude des systèmes africains
d'Administration publique », Paris, LGDJ, 1986, pp 277 et
ss.
1-La protection précontentieuse de l'Administration
On ne surprend pas l'Administration en justice ! Le recours
gracieux préalable est d ordre public et permet à
l'autorité habilitée à le recevoir d'arrêter
définitivement la position de l'Administration sur la question
litigieuse43. Il s'agit donc de la protection non juridictionnelle
de l'Administration. C'est ce qu'a explicitement affirmé la Chambre
Administrative de la Cour Suprême dans le jugement n° 65 du 22 avril
1976 EDIMO Jean Charles c/ État du Cameroun. Depuis1988 dans l'affaire
BABOULE Pierre c/ État du Cameroun, objet du jugement
n°44/CS-CA/87-88 du 28 janvier 1988, la Chambre Administrative de la Cour
Suprême déclare que le recours gracieux d'une demande en
réparation du préjudice subi par un fonctionnaire
illégalement révoqué doit être distinct du recours
gracieux attaché au recours en annulation de l'acte
révoqué44.
La règle du recours gracieux préalable est
d'ordre public. Son absence entraine l'irrecevabilité de la demande en
justice. Le juge administratif l'a affirmé à plusieurs occasions
notamment dans le jugement ITEM Dieudonné c/ État du Cameroun
rendu le 27 avril 1978 ; jugement n°40 ZENGUE NGOULOU Dagobert rendu le 25
mai 1989. Il est donc évident que le recours gracieux préalable
concourt à la protection de l'Administration. Toutefois, il faut nuancer
pour reconnaitre qu'il ne s'agit pas d'une protection entendue dans un sens
strict. Ainsi, selon le Professeur ONDOA Magloire, « la requête
administrative préalable ne protègerait l'Administration que
d'autant que dans le cadre du contentieux de l'indemnisation par exemple, elle
lui éviterait de réparer les préjudices
causés45 ». Or tel n'est pas le cas. Nous
reconnaissons avec le Professeur François Xavier MBOME que la citation
directe contre l'Administration n'est pas possible, -sauf exception- quand il
déclare qu' « En droit administratif, il n y a pas
d'équivalent de la citation
43KEUTCHA TCHAPNGA (C),
Contentieux administratif, Cours de Licence, Université de
Dschang, 2006-2007.
44 Voir KAMTO (M), Ouvrage précité,
p.41.
45 ONDOA (M), Le droit de la responsabilité
publique dans les États en développement, Thèse
précitée, p.87.
directe civile »46. L'Administration
doit alors être en mesure de se prononcer au préalable sur les
griefs formulés contre elle. Le juge et le justiciable tirent aussi du
RGP quelques avantages.
2-Le bien fondé du recours gracieux
préalable pour le justiciable et le juge
Le requérant bénéficie des garanties non
négligeables grâce au recours gracieux préalable. D'abord
et surtout, l'issue heureuse du recours gracieux lui permet de faire une
économie de temps et de moyens. L'obstacle d'une justice administrative
couteuse, tracassière et lente est contourné. Bien plus aucune
condition liée à la capacité ni à la
qualité, encore moins à l'intérêt n'est
exigée devant l'Administration, dans le cadre du recours gracieux par ce
qu'elle n'est pas une juridiction, encore que le RGP n'est pas un recours
contentieux.
Le recours gracieux permet aussi au recourant de faire une
projection sur sa situation juridique future ou éventuelle. La
décision administrative peut ainsi permettre au justiciable de faire une
prévision sur le dénouement du procès. C'est ici une autre
façon de relever qu'une décision motivée de
l'Administration sur un RGP peut amener le recourant à comprendre qu'il
n'a aucune chance de réussite dans un recours contentieux, du fait
notamment de l'inattaquabilité de l'acte litigieux à l'instar
d'un acte de gouvernement. Le recours gracieux préalable est d'autant
plus important qu'il facilite ou allège le travail des juges.
Pour indispensable que soit le recours gracieux à
l'égard de l'Administration, il n'en demeure pas moins vrai que le juge
administratif en tire le plus souvent un grand profit. Tant est que le recours
gracieux préalable contribue énormément s'il aboutit au
décongestionnement du prétoire administratif. Le recours gracieux
préalable est susceptible de mettre le juge à l'abri des recours
intempestifs et fantaisistes qui pouvaient trouver solution devant
l'Administration. Il lui confère ipso facto une
disponibilité raisonnable pour administrer la justice administrative. On
ne peut saisir la juridiction
46 Voir MBOME (F-X), Note sous jugement
n°03/90-91/CS-CA du 21 novembre 1990, AYINA ABE Benoît c/
État du Cameroun, Juridis Périodique n°36, octobre-novembre
- décembre-1990, p.37.
administrative que si le contentieux est lié et le recours
gracieux participe de cette liaison du contentieux.
B - La liaison du contentieux administratif par le
recours gracieux préalable
Il nous convient d'envisager le bien fondé de
l'exigence d'une liaison du contentieux par le RGP avant de dégager les
conséquences qui découlent de cette exigence.
1 - La nécessité d'une liaison du
contentieux par le recours gracieux
L'exigence d'une liaison du contentieux administratif
répond non seulement à une logique d'opportunité, mais
aussi de nécessité. Relevons à toutes fins utiles que le
contentieux est lié lorsque la seule possibilité de le trancher
est le recours au juge. Autrement dit, le contentieux est lié lorsque
les parties ne peuvent plus le régler entre elles47, ou bien
lorsque toutes les conditions sont réunies pour que la partie diligente
saisisse le juge. La liaison du contentieux est une expression plus
usitée en contentieux administratif48. Elle se traduit par le
fait qu'il existe une décision administrative attaquable.
En France, la décision de rejet d'un recours
administratif préalable obligatoire (RAPO) assure la liaison du
contentieux. Il en est de même au Cameroun en matière de RGP.
Ainsi, le rejet du recours gracieux préalable lie le contentieux. Il n'y
a donc pas liaison du contentieux quand l'Administration peut encore
régler le différend. À la vérité, quand
l'exigence de liaison fait défaut, notamment lorsque l'Administration
était encore dans les délais pour se prononcer sur le RGP,- ou
tout simplement n'a jamais eu connaissance préalable du litige - le
recours contentieux fait à l'appui de ce recours gracieux n'a aucune
chance d'aboutissement. La nécessité d'une liaison du contentieux
par le RGP est
47 Voir ABA'A OYONO (J.C), Pratique des contentieux de
Droit public, Cours de Master II recherche, Université de Dschang,
2008-2009.
48 Voir CHAPUS (R), Ouvrage précité,
p.445. Voir aussi http : //fr.
WIKINEWS.org/WIKI/Droit_
public_ en _France : la_ liaison_ du_ contentiteux_ en_ cours d'instance#colum
one.
Voir aussi « Les recours administratifs
préalables, Principes générauxs », disponible
sur
http://bgrondin.perso.infonie.fr/contadm/recours_adm.html.
porteuse des conséquences fondamentales dans la
procédure contentieuse. Il est d'ailleurs important que nous analysions
de long en large ces conséquences.
2 - Les conséquences de l'exigence d'une
liaison du contentieux par le recours gracieux préalable
La nécessité d'une liaison du contentieux par le
RGP entraine le rejet des recours contentieux prématurés, ainsi
que celui des recours gracieux mal dirigés. La même exigence est
à l'origine de l'irrecevabilité des demandes non soumises au
préalable à l'Administration.
a - Le rejet des recours contentieux
prématurés
La juridiction administrative camerounaise a toujours de bon
droit rejeté les recours contentieux intentés avant l'expiration
des délais requis. Il s'agit du temps à l'issue duquel le
requérant peut considérer son recours gracieux comme
rejeté par l'Administration. Le rejet du RGP peut être selon le
cas implicite ou explicite. Le rejet explicite est celui qui émane
expressément de l'autorité ayant reçu le recours gracieux.
Le caractère explicite tient le plus souvent au fait que le
requérant a été informé par une décision
administrative du fait qu'il n'a pas été fait droit à sa
demande. L'évidence du rejet est telle que seul le juge compétent
peut régler le différend.
L'hypothèse du rejet implicite découle de
l'article 17 alinéa 2 de la loi n°2006 /022 du 29 décembre
2006. Cet article dispose que constitue le rejet d'un recours gracieux le
silence gardé par l'autorité adressataire du recours gracieux
pendant un délai de trois mois, consécutif à la demande ou
à la réclamation qui lui a été faite49.
En cas de demande d'indemnisation, l'Administration dispose après avoir
accepté l'indemnisation d'un délai supplémentaire de trois
(3) mois pour en proposer le montant. L'inobservation de cette formalité
entraine l'irrecevabilité de la demande contentieuse.
49 Voir jugement n°65/04-05/ CS-CA du 23 mars
2005, MINDANG Michel c/ État du Cameroun (MFPCE) où le juge
affirme : « Attendu qu'aux termes de l'article 12 de l'ordonnance
n°72/6 du 26 août 1972, le silence gardé par l'Administration
pendant un délai de trois mois sur une demande ou une réclamation
qui lui est adressée constitue un rejet du recours gracieux
».
La juridiction administrative utilise souvent les
qualificatifs de « recours prématurés » ou de
« recours avortés » pour qualifier ces recours
contentieux exercés en violation des délais impartis à
l'Administration pour se prononcer sur le recours gracieux préalable. La
juridiction administrative camerounaise a affirmé cette exigence dans
plusieurs décisions.50 Les recours contentieux
prématurés sont sanctionnés au même titre que les
recours gracieux mal dirigés.
b- Le rejet des recours gracieux
mal dirigés
Plus de trente ans après la consécration du
recours gracieux préalable dans l'ordonnancement juridique camerounais,
les recours contentieux consécutifs aux recours gracieux
préalables mal dirigés connaissent la même sanction que
ceux dans lesquels le recourant n'a même pas formé ce recours
lorsqu'il était exigé. Cette sanction commune est
l'irrecevabilité du recours juridictionnel. Un recours gracieux mal
dirigé est celui qui est adressé à une autorité qui
n'était pas compétente pour le recevoir.
Les recours gracieux mal dirigés étaient
courants avec la désormais abrogée ordonnance du 26 août
1972. Cette situation était en priorité accentuée par
l'expression « Ministre compétent » que recelait
l'article 12 de ladite ordonnance. Nous reviendrons plus tard sur cet aspect de
l'ordonnance de 1972.
Il est de principe qu'un recours mal dirigé
équivaut à une absence de recours. Tel a toujours
été la position de la juridiction administrative au Cameroun.
Dans une décision rendue en 2008 le juge a rejeté un recours
contentieux parce que le recours gracieux préalable a été
adressé au Ministre de l'Administration territoriale en lieu et place de
celui des affaires foncières.51Il en
50 Jugement n°127/04-05/ CS-CA du 22 juillet
2005, DANG Joseph c/ État du Cameroun(DGSN). Dans cette décision,
le juge déclare : « Attendu qu'en saisissant la Chambre
Administrative sans attendre le rejet de l'autorité saisie de son
recours gracieux, le requérant a agit prématurément (...)
Qu'il s'en suit que le recours est irrecevable ».
Jugement n°70/2008/ CS-CA du 18 juin 2008, TONYE Jean
Alphonse c/ État du Cameroun (MINDEF). Le juge déclare «
Qu'en l'espèce, le recourant a déposé son recours
gracieux aux services du Ministre délégué à la
Présidence chargé de la défense le 09 avril 2002 et devait
attendre trois mois, soit jusqu'au 09 septembre pour introduire son recours
contentieux ». En le faisant le 23 août son recours
était prématuré.
51 Voir jugement n°71/2008/ CS-CA du 18 juin
2008, Dame veuve PENTE née DJABOU Marie c/ État du
Cameroun(MINATD).
existe plein d'autres52. Que dire à
présent des demandes non soumises à l'Administration, sinon
qu'obligation est faite au recourant de ne pas soumettre au juge les chefs de
demande qui ne figuraient pas dans le recours gracieux.
c -L'irrecevabilité des demandes non soumises au
préalable à l'Administration
Les demandes nouvelles présentées à
l'audience sont irrecevables. Toutefois, lorsqu'elles ont fait l'objet d'un
recours gracieux, le tribunal les reçoit et renvoie la cause à
une prochaine audience pour conclusion des parties. L'article 52 alinéa
3 de la loi de 2006 précitée qui reprend dans son
intégralité l'article 22 alinéa 3 et 4 de la loi
abrogée n°75/17 du 08 décembre 197553 fixant la
procédure et le fonctionnement de la Cour Suprême en
matière administrative, consacre le rejet des demandes non soumises au
préalable à l'Administration.
Toute demande en justice doit comporter des conclusions qui
comprennent l'objet de la demande. Cet objet est « ce que le
justiciable désire obtenir, ce à quoi il sera fait droit dans le
dispositif de la décision juridictionnelle54 ».
L'objet du RGP ne peut être modifié dans la demande contentieuse.
Il doit donc être le même que celui du recours gracieux. La cause
du recours gracieux préalable doit aussi être la même que
celle du recours contentieux.
52 Jugement n°36/2001-2002/ CS-CA du 27 juin
2002, EMBOLO MVOLA Anne épouse ABESSOLO et Maître Etienne ABESSOLO
c/ État du Cameroun (P R).
Voir aussi jugement n°112/02-03/ CS-CA du 03 septembre
2003 ; FOE Théodore c/ État du Cameroun(DGSN) : le
requérant a saisi le Secrétaire général de la
Présidence au lieu du Délégué général
à la sûreté nationale ou le Président de la
République.
Voir de même, jugement n°02/2002-2003/ CS-CA du 31
octobre 2002, MENTOKE Fridolin c/ État du Cameroun (DGSN) où le
juge déclare que le recours est adressé au Secrétaire
général de la Présidence plutôt qu'au Ministre
responsable de l'Administration avec laquelle le requérant est en litige
(Il n'identifie pas toutefois le Ministre en question).
Voir également jugement n°83/2008/ CS-CA du 18
juin 2008, Syndicat national des professionnels de la comptabilité c/
État du Cameroun MINEFI : Saisine du Premier Ministre au lieu du
Ministre de l'économie et des finances.
Jugement n°73/05-06/ CS-CA du 05 avril 2006, Dame veuve
ANABA née MEUGUE Juliette c/ État du Cameroun (MINUH) et MBALLA
MBOUNOUNG.
53 Article 22 alinéa 3 : « Les
demandes nouvelles présentées à l'audience sont
irrecevables »
Alinéa 4 : « Toutefois, lorsqu'elles ont fait
l'objet d'un recours gracieux, la Chambre les reçoit et renvoie la cause
à une prochaine audience pour conclusion des parties ».
54 MOREAU (J) « La cause de la demande en
justice dans le contentieux de la responsabilité extra contractuelle
», Mélanges STASSINOPOULOS, Paris, LGDJ, 1974 p.77.
Cité par GUIMDO DONGMO (B-R), « Le droit d'accès
à la juridiction administrative au Cameroun .Contribution à
l'étude d'un droit fondamental », Article
précité, p.473.
Le caractère d'ordre public du recours gracieux
préalable a généralement conduit la juridiction
administrative camerounaise à rejeter les demandes formulées pour
la première fois devant elle. Il s'agit en clair ici des questions
contentieuses sur lesquelles l'Administration ne s'est pas prononcée.
Roger Gabriel NLEP évoque en son temps l'exigence d'une identité
d'objet entre le recours gracieux et le recours contentieux55. Cette
exigence traduit le fait qu'on ne peut pas demander à l'Administration
une chose et devant le juge une autre. « De jure, le recours
contentieux doit être le prolongement du recours gracieux dans ses
termes. Tout comme l'appel doit être la continuation du recours
formé en première instance56 ». Dans le
jugement NOUMEN NTCHAO Justin c/ État du Cameroun (MINEFI), objet du
jugement n°125/04-05 rendu par la Chambre Administrative de la Cour
Suprême le 27 juillet 2005, le juge déclare :
« Attendu en l'espèce que s'il ressort du
recours gracieux préalable qu'il a été introduit dans les
formes et délais prescrits ci-dessus, ledit préalable ne comporte
que la demande d'annulation de l'ordre de recette incriminé à
l'exclusivité de sa demande de dommages intérêts (...)
Qu'il ya lieu en conséquence de déclarer la seconde demande
irrecevable et la première recevable »
Dans une autre espèce rendue le 1er
février 2006, le juge relève :
« Attendu qu'en réservant le droit de demander
les dommages intérêts sans expressément formuler une
demande à cet égard dans ledit recours gracieux,
l'intéressé n'a pas satisfait le voeu du texte
susvisé57 ».
55 NLEP (R.G), L'Administration publique camerounaise,
Ouvrage précité, p.272.
56 NGUEKAM (T. D), Le principe de
l'immutabilité de la demande en justice, étude comparée
droit public droit privé, Mémoire de maîtrise en Droit
public, Université de Yaoundé,1985,pp.26-48.Cité par
GUIMDO DONGMO (B-R), Article précité ,p.472.
57 Jugement n°45/2005-2006/ CS-CA du
1er février 2006, FOGANG Moïse c/ État du
Cameroun (MINUH) ;
Jugement n°124/2006-2007/ CS-CA du 28 novembre 2007, NGAWOUO
c/ État du Cameroun (MINMEE). Dans cette décision, l'objet de la
demande dans le recours gracieux préalable est le
Le texte auquel le juge fait allusion n'est rien d'autre que
l'article 12 de l'ordonnance de 1972 précitée. On retrouve
d'ailleurs cette exigence d'identité d'objet entre le RGP et le recours
contentieux dans plusieurs autres décisions58. Dans le
jugement n°29/2008/CS-CA du 02 avril 2008, ZONG OKOMO c/ État du
Cameroun (SESI), le juge relève : « les demandes de
reconstitution de carrière et de paiement en
dommages-intérêts sont irrecevables comme n'ayant pas
figuré sur le recours gracieux préalable ».
Le rejet des demandes non soumises à l'Administration
par le juge est aussi la conséquence logique de la relation
d'immutabilité qui existe entre le recours gracieux et le recours
contentieux. La règle de l'immutabilité permet au juge de rester
dans le cadre de ce qui a été demandé dans le recours
gracieux préalable. La juridiction Administrative l'a toujours
rappelé aux requérants qui ont semblé l'ignorer. Tel
était notamment le cas dans l'affaire BABA YOUSSOUFA c / État du
Cameroun, CFJ-AP, arrêt n°9 du 16 octobre 1968. Dans cette affaire
le requérant, révoqué du cadre des secrétaires
généraux de l'Administration, demandait dans le recours gracieux
à être réintégré dans ce cadre alors que
devant le juge il exigeait plutôt une intégration dans le corps
des administrateurs civils, ce qui n'a pas été admis par le juge.
Le même problème s'est posé dans le jugement n°22 du
27 avril 1978, NDJANA Pascal Bether. Dans le recours gracieux, le recourant
demandait au Ministre des finances de rectifier l'arrêté
autorisant le remboursement des frais médicaux. Par contre, dans sa
requête contentieuse, il demande le paiement à lui de la somme de
1578650 FCFA au titre de remboursement des frais médicaux.
reclassement et le rappel. Malheureusement pour le
requérant, dans sa requête contentieuse, il demande les dommages
intérêts, ce qui entraine l'irrecevabilité de sa
demande.
58Jugement n°45/2004-2005/ CS-CA du 05
février 2005, Société NKUITE et Compagnie c/ État
du
Cameroun, (MINEFI). Le juge y affirme : « Or attendu non
seulement que les requérants n'ont pas établila cessation de
leurs activités en 1988 pour prétendre à
l'exonération d'impôts correspondant à la
période de ladite cessation, mais le défaut
d'identité d'objet du recours gracieux et du recours contentieux et
l'absence des paiements affirmés par les intéressés ne
permettent pas à cette juridiction de déterminer les impôts
dus ou non ».Voir aussi dans le même sens jugement
n°49/04-05 / CS-CA du 02 février 2005,BIDJEBELE Joseph c/
État du Cameroun (MFPRA) où le juge reconnait dans un attendu
qu'étant donné que le recours gracieux ne contient que la demande
de paiement de ses droits, le recours contentieux de BIDJEBELE Joseph doit
être déclaré recevable seulement en cette branche ;par
conséquent l'annulation de l'arrêté litigieux et la demande
de la réintégration subséquente du requérant dans
la fonction publique n'ayant pas fait l'objet dudit recours gracieux sont
irrecevables .
En France devant le juge administratif, le recourant peut
invoquer des moyens nouveaux mais non pas des droits nouveaux. L'arrêt
GARNIER du 21 mars 2007 précise que le requérant peut se
prévaloir de « tout moyen de droit nouveau, alors même
qu'il n'aurait pas été invoqué à l'appui du recours
administratif contre la décision initiale, dès lors que ces
moyens sont relatifs au même litige que celui dont avait
été saisie l'autorité
administrative59».
Le recours gracieux préalable en matière
ordinaire après une trentaine d'années conserve son
caractère obligatoire. Par contre, dans le cadre de l'urgence, la
consécration du recours gracieux a connu une évolution relative
qu'on ne saurait taire.
PARAGRAPHE-2 : LE RECOURS GRACIEUX EN MATIÈRE
D'URGENCE
Les procédures d'urgence permettent de prendre des
mesures conservatoires ou de retarder la prise des effets d'un acte
administratif, afin d'éviter qu'un préjudice irréversible
ne se produise. Les requêtes soumises au juge administratif mettent en
général beaucoup de temps pour aboutir. Ce temps peut même
aller au delà d'une décennie. Pour ne pas laisser les personnes
victimes des actes administratifs aux abois durant le procès, le
législateur camerounais a aménagé à leur
bénéfice des procédures d'urgence. Ces procédures
correspondent selon la gravité du préjudice éventuel au
référé administratif et au sursis à
exécution.
Le référé est une procédure
d'urgence qui « a pour objet de permettre au Président de la
juridiction de prendre, sans toucher au fond du litige, des mesures d'urgence
de nature à sauvegarder les intérêts du requérant
60». Par contre, le sursis à exécution est
une procédure d'urgence qui vise « la suspension de
l'applicabilité d'un acte dans l'attente du jugement à rendre sur
sa légalité ; c'est sa
59 "Problèmes de procédure
administrative non contentieuse". Table ronde organisée par La
Chaire "Mutations de l'Action Publique et du Droit Public", Sciences
Po .Contribution de BRISSON (J-F) « les recours administratifs
préalables obligatoires en droit public français, alternative au
juge ou voie sans issue ? » Contribution_Jean_Francois
BRISSON.pdf.
60 JACQUOT (H), Article précité,
p.120.
neutralisation pendant le procès dont il fait
l'objet, en quelque sorte la « détention provisoire » de
l'acte non encore condamné mais déjà
inculpé61 ». Nous examinerons successivement le RGP
dans le référé administratif (A) et le sursis à
exécution (B).
A - L'exigence nouvelle d'un recours gracieux dans le
référé administratif
Une analyse approfondie du référé
administratif au Cameroun permet de constater qu'il a connu des mutations
significatives en ce qui concerne le recours gracieux préalable. Pour
l'essentiel, nous retenons que le législateur de 2006 a remis en cause
une opportunité issue de la loi n°75/17 précitée en
exigeant formellement un recours gracieux préalable en matière
d'urgence.
1 - La remise en cause de l'acquis de 1975
L'article 27 alinéa 1 de la loi n°2006 / 022
fixant l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs dispose
:
« Dans les cas d'urgence,62 le
Président du tribunal ou le magistrat qu'il délègue peut
sur requête et si le demandeur justifie de l'introduction d'un recours
gracieux, les parties convoquées et après conclusion du
ministère public, ordonner, en référé, toutes les
mesures utiles, sans faire préjudice au principal ».
C'est tout le contraire de la loi n°75/17 du 8
décembre 1975 précitée qui, reprenant plus ou moins
l'article 14 du décret du 19 juin 196463 disposait en son
article 122 :
61 PACTEAU (B), Contentieux administratif, Paris,
P.U.F, 1989, p.235 .Cité par KEUTCHA TCHAPNGA (C), « Le
régime juridique du sursis à exécution dans la
jurisprudence administrative camerounaise », Juridis
Périodique n°38, avril-mai-juin 1999, p.83.
62 Tel était le cas dans l'affaire NKWENKAM
MOLHIE Luc c/CPE de Yaoundé objet de la décision rendue par la
Cour Fédérale de Justice en date du 6 janvier 1970.Cité
par JACQUOT (H), Article précité, p.121.
63 Dans tout les cas d'urgence et sauf pour les
litiges intéressant le maintien de l'ordre, la sécurité et
la tranquillité publiques le Président du tribunal peut sans
préjudicier au principal ordonner sur requête toute mesure
utile, notamment les expertises et les descentes sur les lieux (article 14 du
décret du 19 juin 1964).
« Dans tous les cas et sauf pour les litiges
intéressant le maintien de l'ordre public, la sécurité et
la tranquillité publiques, le Président de la Chambre
Administrative ou l'Assemblée Plénière, ou le magistrat
qu'il délègue peut, après avis conforme du
ministère public, ordonner toute mesure nécessaire sans faire
préjudice au principal ».
Aucune condition relative à l'exigence d'un recours
gracieux préalable n'était donc prévue dans les textes de
1964 et de 1975.
L'interprétation de ce silence amenait logiquement
à penser que le recours gracieux préalable n'était pas
formellement exigé en matière de référé. La
juridiction administrative camerounaise a eu à rendre plusieurs
décisions en matière de référé. Souvent elle
a exigé le RGP64, ce que d'aucuns ont qualifié
d'interprétation négative65. Aussi souvent, elle a
fait fi de cette exigence66. Il s'agissait là d'une
interprétation positive67.
Il ressort clairement de ces deux dispositions que le
législateur de 2006 est resté fidèle à la logique
selon laquelle il ne faut pas surprendre l'Administration en justice. Si tel
n'était pas le cas, comment comprendre que dans un cas d'urgence et donc
nécessitant célérité, la nouvelle loi demande au
requérant de justifier d'un recours gracieux, alors que cette
justification ne sera pas la moindre
64 Voir ordonnance de référé
n°06/du 08 décembre 1998, SOSSO Emmanuel c/Crédit foncier du
Cameroun où le juge a conclut à l'irrecevabilité de la
requête en référé pour défaut de recours
gracieux préalable. (Lire à ce sujet KEUTCHA TCHAPNGA (C), Note
sous ordonnance de référé n°06/du 08 décembre
1998, SOSSO Emmanuel c/Crédit foncier du Cameroun, Juridis
Périodique n°45, janvierfévrier-mars 2001, pp. 41-45.
65 KEMFOUET KENGNY (E,D), Le
référé devant le juge administratif camerounais,
Mémoire de maitrise, Université de Dschang, 1997-1998 ,86 p.,
notamment pp.13-14. Pour l'auteur, l'interprétation négative
protège plutôt l'Administration en exigeant des requérant
un recours gracieux préalable.
66 Voir GUIMDO DONGMO (B-R), Note sous ordonnance
de référé n°13/OR/PCA/90-91 du 25 avril 1991, Journal
« Le Messager » c/ État du Cameroun , Juridis Info
n° 17, janvier- février-mars 1994,pp.54- 56 .Voir dans le
même sens Ordonnance de référé
n°41/OR/CAB/PCA/CS/2003-2004 du 07 juillet 2004,Social Democratic Front c/
État du Cameroun(MINATD et MINEFIB) : « Attendu qu'il ne
résulte pas de ce texte l'exigence d'un recours gracieux
préalable, la juridiction saisie qui est celle du Président
statuant en matière d'urgence, laquelle ne saurait s'encombrer des
délais relatifs au recours gracieux sans courir le risque de voir la
situation de l'une des parties en procès irrémédiablement
compromise par l'exécution de l'acte administratif ».
67 KEMFOUET KENGNY (E,D), Mémoire
précité, en particulier pp.13-14. Pour l'auteur
l'interprétation positive du silence est celle qui privilégie les
intérêts des administrés en leur dispensant de l'obligation
d'exercer un recours gracieux préalable alors que
l'interprétation négative protège plutôt
l'Administration en exigeant du requérant un recours gracieux
préalable.
des tâches ? On ne peut justifier d'un recours gracieux
que si l'on l'a régulièrement formé.
Cette exigence a suscité l'inquiétude de la
doctrine,68 étant donné que l'urgence est «
l'âme du référé69 ». Le
référé est adressé à la Cour par le moyen
d'une requête. C'est une procédure qui se veut simple et rapide.
Par contre tel n'était pas le cas dans l'affaire SOSSO Emmanuel
c/Crédit foncier du Cameroun précitée, objet de
l'ordonnance n°6 du 8 décembre 1998. Dans cette espèce, le
juge a exigé formellement que la requête en
référé soit accompagnée d'un recours gracieux.
Malgré l'indignation de la doctrine,70 le
législateur de 2006 ne s'empêchera pas de reprendre ce
raisonnement juridique dans l'article 27 précité. Il ne faut pas
perdre de vue qu'un même recours gracieux peut valoir tant pour la
demande de référé que pour la demande au fond. En d'autres
termes un seul acte de procédure peut fédérer le RGP du
référé et celui de la demande au fond. Tout compte fait la
prescription du recours gracieux en référé remet
sérieusement en cause l'urgence.
2 - La dénaturation de l'urgence par
l'exigence d'un recours gracieux préalable en
référé
L'exigence d'un recours gracieux préalable dans la loi
n°2006 / 022 est de nature à vider la procédure du
référé administratif de sa substance. On se demande si le
temps que prendra le justiciable pour élaborer un recours gracieux n'est
pas largement suffisant pour mettre en péril une situation juridique
vulnérable. Le péril est d'autant plus probable que beaucoup de
camerounais ne connaissent pas grand-chose du contentieux administratif. Une
situation juridique peut se détériorer
irrémédiablement pendant que le juge impose au
68KEUTCHA TCHAPNGA (C), «La réforme
attendue du contentieux administratif au Cameroun » Article
précité, p.29.
69 AUBY (J.M) et DRAGO (R), Traité de
contentieux administratif .Cité par JACQUOT (H), « Le
contentieux administratif au Cameroun », Article
précité p. 121.
70 Voir KEUTCHA TCHAPNGA (C), « Une
délicate révolution dans la procédure administrative
contentieuse au Cameroun/ À propos du traitement récent de
l'urgence par le juge des référés /Note sous Cour
Suprême du Cameroun, ordonnance de référé n°6
du 08 décembre 1998 SOSSO Emmanuel contre Crédit Foncier
», Juridis Périodique n°45, janvier-février- mars 2001,
pp.41-45, notamment pp.43-44.
requérant de justifier le recours gracieux
préalable. C'est donc indubitable que cette exigence dénature
l'urgence.
Toutefois il convient de nuancer cette position en relevant
que le législateur de 2006 n'exige que l'introduction du RGP. En
d'autres termes, il n'impose pas au requérant d'attendre que
l'Administration arrête sa position définitive avant de saisir le
juge du référé. Il nous semble que le requérant
devra simplement présenter au juge le moment opportun une copie dument
enregistrée du recours gracieux qu'il a conservé. Le juge
s'assure seulement que le requérant a formé un RGP.
Le sursis à exécution quant à lui n'a pas
connu ce changement.
B- La survivance du recours gracieux préalable
dans le sursis à exécution
L'article 91 du décret du 4 juin 1959 disposait
déjà que le recours contentieux contre une décision
administrative n'en suspend pas l'exécution71 . Toutefois, il
précisait qu'au cas où cette exécution sera de nature
à causer un préjudice irréparable et si la décision
attaquée n'intéresse ni le maintien de l'ordre, ni la
sécurité ou la tranquillité publiques, le tribunal pouvait
sur conclusion expresse du ministère public et après
communication à la partie adverse accorder un sursis ou ordonner que
l'exécution n'aura lieu que par provision et moyennant caution.
L'article 16 alinéa 1 et 2 de la loi n°75/17 du 8 décembre
1975 reprend plus ou moins cette disposition. L'article 17 de cette loi
disposait quand à elle que « la demande de sursis peut
être formée en même temps que la demande principale et par
la même requête ». La loi de 2006 a repris dans son
article 30 alinéa 1 et 2 avec certaines réserves72
l'article 16 alinéa 1 et 2 de loi n° 75/17
précitée.
71À l'évidence, on remarque que c'est la force
exécutoire de l'acte qui est suspendu et non l'acte strictement
entendu.
72 « 1) Le recours contentieux contre un acte
administratif n'en suspend pas l'exécution ;
2) Toutefois, si l'exécution est de nature à
causer un préjudice irréparable et que la décision
attaquée n'intéresse ni l'ordre public, ni la
sécurité ou la tranquillité publique, le Président
du tribunal
Dans la loi de 2006 précitée, la requête
est plutôt adressée au Président du tribunal administratif.
Il découle des dispositions précitées que, lorsque la
demande de sursis est formée simultanément avec la demande
principale, elle doit être précédée d'un recours
gracieux préalable. Il faut cependant relever qu'il s'agit dans ce cas
d'un recours gracieux lié tant à la demande de sursis qu'à
la demande au fond. Il faut d'ailleurs retenir avec M. ABA'A OYONO que «
la formalité précontentieuse qu'est le recours gracieux
préalable (...) est valable aussi bien pour le recours visant à
régler la question de fond (...) que pour la requête sollicitant
du juge la mesure provisoire, pour cause d'urgence contentieuse, à
l'instar de la demande de sursis à exécution73
». La demande de sursis doit donc être formée en même
temps ou immédiatement après le dépôt du recours
gracieux pour la demande au fond. Nous ne sommes pas sans ignorer que le
recourant à l'obligation de saisir le tribunal administratif dans les
délais prévus à l'article 1874, sinon
l'ordonnance prononçant le sursis exécution deviendra caduque.
L'article 30 alinéa 4 de la loi de n°2006/022
précitée ainsi formulé est clair et corrobore notre
position.
L'ordonnance de sursis n'est valable au-delà de 60
jours que pour autant qu'un recours gracieux sur la demande principale ait
été introduit en même temps que celui de la demande de
sursis. En effet le délai de l'article 30 précité est un
délai qui court à partir du rejet du recours gracieux. La
tradition a donc été suivie par le législateur de 2006.
Par le passé, le juge avait souvent admis la recevabilité dune
demande de sursis à exécution dans des espèces où
le recours contentieux n'était pas précédé d'un
recours gracieux préalable75. Il faisait ainsi preuve
administratif peut, après communication à la
partie adverse et conclusions du ministère public, ordonner le sursis
à exécution ».
73 ABA'A OYONO (J-C), Note sous jugement CS-CA du
07 décembre 2000, MAMA BILOA Sandrine c/Université de
N'Gaoundéré, Juridis Périodique n°51, juillet-
août-septembre 2002, p.23.
74 « Sous peine de forclusion les recours contre les
décisions administratives doivent être introduits dans un
délai de soixante jours à compter de la décision de rejet
du recours gracieux visé à l'article 17ci- dessous »
(article 18 alinéa 1de la loi n°2006/022
précitée).
75 Ordonnance n°38 du 27 juin 1997, DJANBOU
Maurice c/SOCADIC ; Ordonnance de sursis n°21/OSE/PCA/ 91-92 du 26 juillet
1992, Dame MAYOUGA Yvonne c/ État du Cameroun (MINSANTE); Ordonnance
n°/CS/PCA du 5 octobre 1992 SIGHOKO FOSSI Abraham c/ État du
Cameroun (MINSANTE) .Voir KEUTCHA TCHAPNGA (C) et GNIMPIEBA TONNANG (E), Note
sous ordonnance n°/CS/PCA du 5 octobre 1992 SIGHOKO FOSSI Abraham c/
État du Cameroun (MINSANTE), Juridis Périodique n°68
octobre-novembre-décembre 2006, pp.115-120.
d'originalité, mais méconnaissait sans doute le
caractère d'ordre public de la règle du recours gracieux. Une
telle solution était humaniste ; en réalité, elle
était moins juridique.
L'existence d'un recours gracieux préalable est une
condition incontournable de recevabilité d'une demande de sursis
à exécution puisqu'il reste malgré tout « le
premier degré de règlement du conflit 76».
Il n'est donc pas possible d'avoir gain de cause sur le terrain du sursis
à exécution d'une décision administrative si l'on ne
justifie pas d'un recours gracieux préalable77. Il est une
constance que le recours au fond ne peut pas prospérer si le
requérant n'a pas adressé un recours gracieux. Qu'en est-il dans
les voies de recours ?
PARAGRAPHE-3 : LE RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
ET LES VOIES DE RECOURS
La règle du recours gracieux préalable est
susceptible d'avoir une influence sur les voies de recours. Les voies de
recours désignent les moyens ouverts aux requérants pour obtenir
un nouveau jugement de leur affaire. Nous nous appesantirons sur celles qui
sont plus usitées dans le contentieux administratif camerounais en
l'occurrence le pourvoi en appel(A) et accessoirement le pourvoi en cassation
(B).
A- Recours gracieux préalable et pourvoi en
appel
L'appel78 est la garantie du principe du double
degré de juridiction qui « est en passe d'être
érigé en droit fondamental de l'homme79 ».
C'est une voie de recours de réformation ou d'annulation par laquelle
une partie insatisfaite d'un jugement rendu en premier ressort
défère ce dernier à une juridiction du degré
76MESCHERIAKOFF (A.S), « Le régime
juridique du recours gracieux préalable dans la jurisprudence
administrative camerounaise », Article précité, pp.
42-55.
77 Sur l'ensemble de la question, voir KEUTCHA
TCHAPNGA (C), « Le régime juridique du sursis à
exécution dans la jurisprudence administrative camerounaise »,
Article précité, p.86.
78Sur l'appel, voir SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), L'appel
dans le contentieux administratif au Cameroun, Thèse Droit,
Université Paul Cézanne Aix - Marseille III, 2001, pp.146-147.
79 ANOUKAHA (F), « La réforme de
l'organisation judiciaire au Cameroun », Article
précité, p.54.
immédiatement supérieur, ou bien du second
degré. L'appel a un effet suspensif et dévolutif. Le juge d'appel
statue en droit et en fait.
L'arrêt TAGNY Mathieu représente en
matière de recours gracieux dans le pourvoi en appel un arrêt de
principe. Cet arrêt a fait jurisprudence et reste même
d'actualité trente ans après l'ordonnance de 1972
précitée. Dans cet arrêt le juge a rappelé que le
recours gracieux préalable ne peut être intenté qu'une
seule fois par procédure.
Les faits de l'espèce TAGNY Mathieu, méritent
d'ailleurs d'être rappelés. Le sieur TAGNY Mathieu médecin
de son état est incarcéré et détenu à la
prison de Yaoundé pour des faits de subversion. Il introduit le 20
juillet 1957 un recours devant le Conseil du Contentieux Administratif. Dans sa
requête, il demande la condamnation de l'État à lui payer
une somme représentant le montant de la solde durant la période
de détention allant du 31 mai 1955 au 6 mars 1956. Il demande
subsidiairement que l'État lui accorde une indemnité d'un montant
identique en réparation du préjudice que ladite
incarcération lui a causé.
Malheureusement pour lui, le Conseil du Contentieux
Administratif se déclare incompétent, motif pris du fait que son
action est fondée sur une faute liée au fonctionnement des
services judiciaires. Insatisfait de ce jugement, il demande son annulation
devant le Conseil d'État qui se déclare à son tour
incompétent du fait de l'indépendance accordée entre temps
au Cameroun francophone en 1960.
Le dossier du sieur TAGNY fut donc renvoyé à la
Cour Fédérale de Justice conformément aux accords de
coopération judiciaire signés à cette époque entre
l'État du Cameroun et la France. Le représentant de l'État
soulève devant cette Cour l'irrecevabilité de la demande du sieur
TAGNY pour défaut de recours gracieux préalable. Le juge
rapporteur lui répliqua qu' « il va de soi que le recours
gracieux préalable, lorsqu'il est obligatoire, ne peut être
exercé qu'une seule fois dans chaque instance , le plaideur qui l'a
introduit préalablement à la saisine du juge administratif de
premier degré n'est plus tenu de le répéter pour
cause d'appel, car l'Administration ne peut dire qu'elle a
été attraite à son insu 80».
C'est conformément à ces éclairages du
juge rapporteur que la juridiction rend sa décision. En effet, le juge
déclare recevable le recours du sieur TAGNY, au motif que «
cette procédure, qui est antérieure à la saisine du
juge administratif et ne peut être intentée qu'une seule fois dans
chaque instance, est censée avoir été suivie lorsque,
comme en l'espèce, il apparait que l'Administration a pris position sur
le fond81 ».
Point n'est donc besoin d'un recours gracieux préalable
en appel, étant donné que cette étape qui consacre le
principe du double degré de juridiction est couvert par un autre
principe qui est celui de l'immutabilité du lige.
Ainsi donc une demande présentée pour la
première fois en appel sera déclarée irrecevable non
seulement parce que le procès doit rester le même, mais aussi
parce que l'Administration n'aura pas arrêté sa position
préalablement à cette demande. Le RGP étant d'ordre
public, on peut se demander s'il a une influence sur le pourvoi en cassation
qui est une autre voie de recours.
B - Recours gracieux préalable et pourvoi en
cassation
D'après l'article 116 de la loi n° 2006/022
précitée « Les décisions rendues en premier et
dernier ressort par le tribunal administratif sont susceptibles de pourvoi
devant la Chambre Administrative dans les formes et délais prévus
par les textes fixant l'organisation de la Cour Suprême ».
Sur la question de savoir si la recevabilité des
pourvois en cassation82 est soumise à l'exigence d'un recours
gracieux préalable, une réponse négative
80 Voir NLEP (R.G), L'Administration publique
camerounaise, Ouvrage précité, p.274.
81 Voir MESCHERIAKOFF (A.S), « Le
régime juridique du recours gracieux préalable dans la
jurisprudence administrative camerounaise », Article
précité, pp.47 et ss. Voir aussi NLEP (R.G), L'Administration
publique camerounaise, Ouvrage précité, pp.274 et ss
82 Sur le pourvoi en cassation, voir SIETCHOUA
DJUITCHOKO (C), « L'autonomie du recours en cassation en contentieux
administratif au Cameroun », Juridis Périodique n°82,
avril-mai-juin 2010, pp.77-85 (Première partie) et Juridis
Périodique n°83, juillet-août-septembre 2010, pp.65-75(Suite
et fin).
s'impose naturellement, parce que c'est le même
procès soumis au juge de premier degré qui évolue.
Une fois de plus, il est important de rappeler que le recours
gracieux préalable n'est formé qu'une seule fois pour une
affaire. Le juge de la Haute Cour ne se prononce que sur ce qui à
été demandé préalablement à
l'Administration. Autrement dit, il n'est lié que par le fait
générateur du litige et nous savons que l'issue malheureuse du
recours gracieux préalable à l'égard du justiciable lie le
contentieux. Bien plus, le juge de la Cour Suprême ne juge qu'en droit et
non en fait. Dès lors son souci c'est de s'assurer que les juges
inférieurs ont fait une bonne application de la règle de
droit.
Toutefois, celui-ci peut évoquer, c'est-à-dire
s'étendre sur les questions qui n'ont pas été
soulevées par les parties. Cette possibilité ressort des articles
67 alinéa 2 et 104 alinéa 4 de la loi n°2006 /016 du 29
décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement de la Cour
Suprême83.
Il faut aussi relever que le juge administratif de cassation
ne s'est pas encore prononcé sur une question relative au RGP, mais il
s'est déjà déclaré sur la voie de recours ouverte
contre une ordonnance de sursis84.
Le caractère d'ordre public du recours gracieux
préalable est l'objet d'une traduction jurisprudentielle abondante.
83 L'article 67 alinéa 2 énonce que
« Lorsque la Chambre casse et annule la décision qui lui est
déférée, elle évoque et statue si l'affaire est en
état d'être jugée au fond. L'affaire est reconnue comme en
état d'être jugée au fond lorsque les faits, souverainement
constatés et appréciés par les juges de fond permettent
d'appliquer la règle de droit appropriée ».
L'article 104 alinéa 4 dispose qu' « en cas de
cassation, la Chambre Administrative dispose d'un pouvoir d'évocation
lorsque l'affaire est en état d'être jugée au fond
». Lire à cet effet SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), Article
précité, Première partie, pp.80 et ss.
Les articles ci-dessus sont applicables tant devant la Chambre
Administrative que devant la Chambre Judiciaire d'après l'article 104
alinéa 3 de la loi n° 2006/016 précitée.
84 Ordonnance de sursis à exécution
n°15/OSE/CS/2009/CS-CA du 30 avril 2009, État du Cameroun (MINCULT)
c/La CAMEROON MUSIC CORPORATION (CMC) représentée par Jean Claude
LAURENT et Samuel MBENDE. La cour déclare en substance dans cette
décision :
« Qu'il résulte (...) que l'ordonnance de
sursis à exécution d'un acte administratif est rendu en dernier
ressort et qu'à ce titre, elle n'est susceptible que du pourvoi en
cassation ». Voir également ordonnance de sursis
n°29/OSE/CCA/2009/ CS-CA du 17 juillet 2009, KENMOE Emmanuel c/
État du Cameroun (MINDAF).
SECTION-2 : LA TRADUCTION JURISPRUDENTIELLE
DU CARACTÈRE D'ORDRE PUBLIC
Le caractère d'ordre public du recours gracieux
préalable est toujours entériné de nos jours par la
juridiction administrative au Cameroun. C'est du moins ce qui ressort d'une
analyse de la jurisprudence constante du juge administratif. Ce
caractère est d'autant plus affirmé qu'on peut déjà
le considérer comme un acquis dans la jurisprudence administrative
camerounaise. Il s'agit de la jurisprudence administrative dominante
(Paragraphe 1). Le juge de la Chambre Administrative a nouvellement
consacré le rejet systématique des recours gracieux collectifs
(Paragraphe 2).
PARAGRAPHE-1 : LA JURISPRUDENCE CONSTANTE DU
JUGE ADMINISTRATIF
L'arrêt TAGNY Mathieu c/ État du Cameroun
précité rendu par l'Assemblée Plénière de la
Cour Fédérale de Justice en date du 16 mars 1967 sera à
l'origine d'une controverse doctrinale. Le Professeur Henri JACQUOT va
s'appuyer sur cet arrêt pour affirmer que cette règle n'est pas
d'ordre public85. Cette vision n'est pas partagée par le
Professeur Alain Serge MESCHERIAKOFF dans une réflexion menée
plus tard sur le recours gracieux préalable86. C'est au
courant de l'année 1978 dans l'affaire ITEM Dieudonné c/
État du Cameroun que le juge reconnait formellement au RGP son
caractère d'ordre public. Présenté comme un jugement de
principe (A), ce jugement a tracé une ligne jurisprudentielle suivie de
nos jours (B).
A- L'arrêt de principe
Jadis présenté comme un arrêt de principe,
l'arrêt TAGNY Mathieu est devenu chemin faisant un cas marginal pour ce
qui est du caractère d'ordre
85 JACQUOT (H), Article précité,
p.114.
86Voir MESCHERIAKOFF (A.S), « Le
régime juridique du recours gracieux préalable dans la
jurisprudence administrative camerounaise », Article
précité, p.47. En effet, l'auteur déclare : «Le
juge peut donc soulever d'office ce moyen d'irrecevabilité même si
l'Administration ne le fait pas et est disposée de plaider au fond
».
public du recours gracieux préalable. C'est en d'autres
termes une jurisprudence qui n'a pas fait long feu.
À la faveur de l'entrée en vigueur de
l'ordonnance n° 72/6 du 26 août 1972 et de certaines affaires
célèbres, la juridiction administrative camerounaise a
opéré un virement qui fera jurisprudence jusqu'à nos
jours. Ce revirement consacra le caractère d'ordre public du recours
gracieux préalable. La jurisprudence TAGNY Mathieu est battue en
brèche. L'affaire ITEM Dieudonné c/ État du Cameroun,
objet du jugement n°12/CS-CA/77-78 rendu par la Chambre Administrative de
la Cour Suprême du Cameroun le 27 avril 1978, consacre le
caractère d'ordre public du RGP qui allait subsister jusqu'à nos
jours. Ce qui confère à cette décision son pesant d'or se
trouve dans l'attendu ainsi rapporté par le Professeur NLEP Roger
Gabriel87 :
« Qu'il résulte de ce texte que ce recours,
organisé et prévu par une disposition législative
spéciale, revêt un caractère obligatoire ; qu'il s'ensuit
que l'inobservation des dispositions susvisées, peut être
soulevé d'office par le juge ».
Le texte auquel le juge faisait allusion n'était rien
d'autre que l'article 12 paragraphe 1 de l'ordonnance n° 72 /6 du 26
août 1972. Depuis ce jugement, le caractère d'ordre public du
recours gracieux préalable est un acquis88 à jamais
suivi par la juridiction administrative.
B -La jurisprudence confirmée
Malgré quelques atermoiements, la juridiction
administrative au Cameroun a toujours reconnu le caractère d'ordre
public du recours gracieux préalable. Ceci s'est fait à la faveur
de l'ordonnance n°72/6 du 26 août 1972 fixant l'organisation de la
Cour Suprême. Pourtant, « rien dans le texte de l'ordonnance
n°72/6 du 26 août 1972, pas plus dans ceux qui l'on
précédé permet d'affirmer que la règle
87 NLEP (R.G), Ouvrage précité,
p.275.
88 Voir MESCHERIAKOFF (A.S), Article
précité et KAMTO (M), Ouvrage précité, p.163.
du recours gracieux soit un principe d'ordre public
89». C'était sans doute pour cela que la
jurisprudence hésitait à faire de la règle du RGP un moyen
d'ordre public. Même la doctrine n'était pas unanime sur la
question de savoir si le recours gracieux préalable était un
moyen d'ordre public. Autrement dit, il était question de savoir si le
juge pouvait même l'invoquer au cas où le représentant de
l'Administration s'abstenait de le faire.
Depuis le jugement ITEM Dieudonné
précité, la jurisprudence constante de la Chambre Administrative
de la Cour Suprême laisse entrevoir l'affirmation du caractère
d'ordre public du recours gracieux préalable.
Cette tendance était déjà présente
dans les premiers jugements qui ont suivis le jugement ITEM
Dieudonné90. C'est ainsi que de nos jours, le
caractère d'ordre public du recours gracieux préalable ne souffre
d'aucune contestation, sauf éventuelle exception. Par
conséquence, la juridiction administrative invoque d'office la
règle du recours gracieux préalable91. Aussi cette
juridiction a-t- elle toujours dans sa jurisprudence récente et
constante déclaré irrecevables les recours contentieux issus des
recours gracieux collectifs.
PARAGRAPHE-2 : LE REJET DES RECOURS GRACIEUX
COLLECTIFS
Le rejet permanent des recours gracieux collectifs par la
juridiction administrative camerounaise est une pratique récente.
À preuve, on ne trouve trace de cette notion dans les écrits des
Professeurs KAMTO, NLEP, MESCHERIAKOFF et JACQUOT. À cet égard,
l'irrecevabilité des RGP collectifs nous semble être une
innovation de la juridiction administrative. Cette consécration est
d'autant plus intéressante qu'elle mérite pour sa bonne
89 NLEP (R.G), Ouvrage précité,
p.274.
90 Voir notamment jugement n°14/77-78/CS-CA du
27 avril 1978, ATANGANA ESSOMBA Protais c/ État du Cameroun ; jugement
n°30/77-78/CS-CA du 13 juillet 1978, AKA'A Jules c/ État du
Cameroun.
Dans l'affaire AKA'A Jules notamment, le juge déclare :
« Qu'il importe de rappeler que ces dispositions sont d'ordre public ;
qu'en conséquence, leur violation peut être soulevée
d'office par le juge ». Cité par NLEP (R.G), Ouvrage
précité, p.275 et KAMTO (M), Ouvrage précité,
p.151.
91 Voir, GUIMDO DONGMO (B-R), « Le droit
d'accès à la juridiction administrative au Cameroun »,
Article précité, p.470.
compréhension que l'on évoque les motifs
d'irrecevabilité des recours gracieux collectifs (B), ensuite que l'on
procède à une analyse critique du rejet des RGP collectifs (C).
Mais avant cela il est nécessaire de s'appesantir sur l'affirmation
récente de la notion de recours gracieux collectif (A).
A- L'affirmation récente de la notion de recours
gracieux collectif dans la jurisprudence administrative
Il est nécessaire d'exposer la consécration en
jurisprudence de la notion de recours gracieux collectif (1)
préalablement à l'étude d'une espèce rendue
à cet effet par le juge administratif (2).
1 - La consécration de la notion de recours
gracieux collectif
La notion de recours gracieux collectif est de facture
récente dans la jurisprudence administrative camerounaise. C'est dans
les années 2000 que la Chambre Administrative de la Cour Suprême
rejette certains recours contentieux, motif pris de ce que le recours gracieux
formé à l'appui de la requête contentieuse est
collectif.
Lorsqu'on parcourt la masse des décisions de rejet des
recours gracieux, on relève que c'est tardivement vers 2008 qu'on
découvre les premiers jugements de rejet pour recours gracieux
collectif. Sous réserve d'inventaire, il nous semble que ce soit
là le point de départ du rejet des RGP collectifs.
Dans l'affaire ESSOMBA Apollinaire c/ État du Cameroun
(PM), objet du jugement n°47/CS-CA/2008, le juge déclare :
« Qu'il résulte de la lecture combinée
des textes de loi susvisés que le recours contentieux fondé sur
un recours gracieux collectif est irrecevable ;(...)Qu'en l'espèce, le
recours gracieux versé au dossier est collectif comme ayant
été fait par le recourant et sept (7) autres ».
Toutefois, relevons que ni la loi n°2006/022 du 29
décembre 2006 ni l'ordonnance de 1972 ne mentionnent expressément
la notion de recours
gracieux collectif. Elles ne reconnaissent que les recours
contentieux collectifs : c'est donc une invention sinon une déduction du
juge. Il est désormais acquis qu'un requérant ne saurait se
prévaloir d'un recours gracieux collectif devant la juridiction
administrative camerounaise. Tel était le sort du recours contentieux
introduit par le sieur CHOUALA Yves Alexandre.
2 - Exposé d'un cas d'espèce : Affaire
CHOUALA Yves Alexandre c/État du Cameroun (PM), jugement
n°57/2009/CS-CA du 11 mars 2009
L'article 33 de la loi n°2006/022 du 29 décembre
2006 dispose :
« Toute requête collective est irrecevable,
sauf lorsqu'il s'agit d'un recours dirigé contre un acte indivisible
».
Cette disposition qui reprend mot pour mot l'article 2 de la
loi n°75/17 abrogée92 nous renseigne sur le sort
réservé aux recours contentieux collectifs devant la juridiction
administrative au Cameroun. L'affaire CHOUALA Yves Alexandre c/État du
Cameroun (PM), objet du jugement n°57/2009/CS-CA rendu par la Chambre
Administrative de la Cour Suprême le 11 mars 2009, nous renseigne sur le
rejet des recours gracieux collectifs. Les faits de cette décision sont
les suivants.
Après l'obtention d'un diplôme en relations
internationales (DESS) et d'un Doctorat de troisième cycle à
l'Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC), diplôme
obtenu après 5 années d'études dans cet
établissement qu'il a intégré avec le diplôme de
Licence, sieur CHOUALA Yves Alexandre est recruté dans la fonction
publique par un décret du Premier Ministre. Il officie comme
secrétaire des affaires étrangères en tant que diplomate.
Cependant, le sieur CHOUALA estime que son grade ne correspond pas aux
diplômes dont il est titulaire. Il fonde ses prétentions sur
l'article 10-1 du décret n°75/773 du 18 décembre 1975
portant statut particulier du corps des
92 Cet article dispose : « Toute
requête collective est irrecevable, sauf lorsqu'il s'agit d'un recours
dirigé contre un acte indivisible ».
fonctionnaires de la diplomatie tel que modifié par le
décret n°77/345 du 26 août 1977. Cet article dispose en effet
:
« Les conseillers des affaires
étrangères sont (...) recrutés sur titre , parmi les
candidats titulaires à la fois d' un Doctorat d'État en droit ou
en sciences économiques, ou d'un PHD en droit ,en sciences
économiques ou en relations internationales, ou d'un diplôme
reconnu équivalent à l' un des titres ci-dessus et du
diplôme de sortie du cycle A de l'ENAM (section diplomatique) ou de l'une
des écoles étrangères ou internationales figurant sur une
liste fixée par arrêté présidentiel ».
Fort de cette argumentation, le requérant estime qu'il
devrait plutôt être intégré dans le grade de
conseiller des affaires étrangères. Il saisit alors le Premier
Ministre le 22 janvier 2004 d'un recours gracieux formé par lui et 73
autres collègues. Autrement dit, le recours gracieux préalable
était formé collectivement par 74 personnes dont le sieur CHOUALA
qui l'avait d'ailleurs signé en 61ième position.
À l'expiration du délai imparti au Premier Ministre pour
réagir sur le recours gracieux, il saisit la Chambre Administrative de
la Cour Suprême d'une requête le 19 mai 2004 afin que celle-ci
ordonne son reclassement au grade de conseiller des affaires
étrangères.
Malheureusement pour lui, la juridiction administrative
déclare son recours contentieux irrecevable parce qu'il était
fondé sur un recours gracieux collectif. Le juge déclare à
cet effet :
« Attendu qu'il résulte de la lecture
combinée des textes de la loi susvisés que le recours contentieux
fondé sur un recours gracieux collectif est irrecevable, sauf lorsqu'il
s'agit d'un recours contre un acte indivisible, or le reclassement
réclamé est un acte individuel(...)
Qu'en l'espèce, le recours gracieux adressé
et notifié le 22 janvier 2004 au Premier Ministre par Maître BIYIK
Thomas B.P11.27 Yaoundé, à la requête du recourant qui l'a
signé en 61ième position avec 73 autres est
collectif ».
Cette jurisprudence est également confirmée par
plusieurs autres décisions rendues le même mois93. On
peut bien se demander quel est le fondement du rejet des recours gracieux
collectifs.
B - Les motifs d'irrecevabilité des recours
gracieux collectifs
L'intérêt pour agir en justice doit être
personnel94 et non collectif, exception faite des actes
indivisibles. Nous savons qu'un acte collectif est un « ensemble de
décision individuelles solidaires entre elles95 ».
On peut distinguer la requête collective personnelle dans le cas
où il y a pluralité de requérants et la requête
collective réelle quand elle est relative à une pluralité
de décisions96.
Il nous semble que ce raisonnement peut valoir pour le recours
gracieux collectif. Il va sans dire qu'il est tout à fait possible
d'exercer un recours personnel contre un acte collectif divisible.
La différence entre acte collectif et acte indivisible
est évidente. Entendu littéralement, un acte indivisible est
celui qui pris à l'égard des administrés est telle que ses
dispositions ne peuvent être divisées ou séparées
les unes des autres. Les actes collectifs bénéficient du principe
de l'intangibilité des effets individuels des actes
administratifs97. Tant est qu'ils créent des droits et des
obligations et donc font grief. Un acte indivisible peut être un acte
réglementaire ou non, dont les dispositions forment un bloc
indivisible.
Le recours gracieux collectif contre un acte indivisible est
recevable puisque dans ce cas, les dispositions contre lesquelles le recours
est intenté ne peuvent
93 Jugement n°59/2009 /CS-CA du 11 mars 2009,
KOE Jr Jean Patrice c/État du Cameroun (PR) ; jugement n°79/2009
/CS-CA du 25 mars 2009, SANGALE MAGBEKA Jules Alain c/État du Cameroun
(PM) ; jugement n°81/2009 /CS-CA du 25 mars 2009, Madame OWONA née
MINKUE Laure c/État du Cameroun (PM).
94Voir KAMDEM (J.C), «
L'intérêt et la qualité dans la procédure
administrative contentieuse », RCD, Série II, n°28, 1984,
pp.67 et ss. Voir aussi JACQUOT (H), Article précité, p.116.
95 BOCKEL (A), Droit administratif, Série
manuel et traités, NEA, CREDILA Dakar, 1980 p.196.Cité par BILONG
(S), Note sous affaire NABION Maurice c/Université de Yaoundé,
jugement n°44/92/93/CSCA du 24 juin 1993, Juridis Périodique
n°49, janvier-février-mars 2002, p.34.
96 Voir MBARGA NYATTE (D), « Sociologie du
contentieux relatif aux élections municipales du 21 janvier 1996 au
Cameroun », Juridis Périodique n°45, janvier
-février - mars 2001, pp.78-86, p.79. L'auteur cite CHAPUS (R), Droit du
contentieux administratif, Ed Montchrestien, 1982, p.196.
97 BILONG (S), Note précitée, p.34.
être séparées les unes des autres. En
France, les recours contre une partie des actes indivisibles sont irrecevables
parce qu'ils amèneraient le juge à se prononcer sur l'annulation
totale98.
La Chambre Administrative de la Cour Suprême dans sa
jurisprudence récente rejette toujours les recours gracieux collectifs
dirigés contre les actes divisibles. Dans l'affaire CHOUALA Yves
Alexandre c/État du Cameroun précitée, le recours gracieux
versé dans la requête est dit collectif parce qu'il est
formé par 74 personnes dont le recourant. Ces personnes exigent de
l'Administration le reclassement qui n'est rien d'autre qu'un acte individuel,
comme le précise fort bien la juridiction administrative.
À toutes fins utiles, relevons que les
collectivités, les syndicats99, les associations les
sociétés commerciales entre autres peuvent défendre les
droits de leurs membres devant la juridiction administrative. Les partis
politiques sont souvent admis à exercer des recours
collectifs.100
Les groupements régulièrement constitués
peuvent ainsi exercer des recours gracieux collectifs en vue d'une
éventuelle défense d'un intérêt qui leur est propre
en tant qu'intérêt collectif des personnes qu'ils
représentent. Les recours gracieux exercés par des personnes
morales ne sont pas ipso facto des recours gracieux collectifs.
À titre illustratif la Chambre Administrative de la Cour Suprême a
eu à se prononcer sur des recours exercés par nombre de ces
personnes morales précitées101.
Les recours gracieux collectifs exercés contre les
actes divisibles sont systématiquement rejetés par la juridiction
administrative. Tel était notamment le
98 Sur la notion d'acte indivisible, voir CHAPUS (R),
Droit du contentieux administratif, Ouvrage précité,
pp.777-780.
99Voir KAMDEM (J.C), Article précité,
p.68. Le syndicat agit en vue de la défense de l'intérêt
professionnel de ses membres.
100 Voir MBARGA NYATTE (D), « Sociologie du contentieux
relatif aux élections municipales du 21 janvier 1996 au Cameroun
», Article précité.
101 Voir jugement n°130 /05-06/CS-CA du 12 juillet 2006,
collectivité MVOG-NKILI c/ État du Cameroun ; jugement
n°91/2008/CS-CA du 13 août 2008 , Groupement BABOUANTOU c/
État du Cameroun(MINAT)et Groupement BANGOU, jugement
n°83/2008/CS-CA du 18 juin 2008,Syndicat national des professionnels de la
comptabilité c/ État du Cameroun (MINEFI) ; Ordonnance de sursis
à exécution n°039/OSE/CAB/PCA/CS/ 03-04 du 05 juillet 2004,
Association des témoins de Jéhovah c/ État du Cameroun
(MINUH).
cas de les affaires MBENOH Joseph et BELL BELL II c/
État du Cameroun (PM), objet du jugement n°84/2008 rendu le 18 juin
2008 par la Chambre Administrative de la Cour Suprême et l'affaire BOLO
MBADE Joseph Jérôme c/ État du Cameroun (Ministère
de la culture), objet du jugement n°133/2008 rendu le 18 juin 2008.
Plusieurs autres décisions s'inscrivent dans la même optique et
illustrent per se cette tendance jurisprudentielle102.
Il est sans doute nécessaire de jeter un regard
critique sur ce rejet systématique des recours gracieux collectifs par
la juridiction administrative camerounaise.
C- Analyse critique du rejet des recours gracieux
collectifs
Le rejet des recours gracieux collectifs mérite
nécessairement une analyse critique de notre part. Il est important de
relever qu'il n'est pas question pour nous de remettre en cause, encore moins
d'émettre des jugements de valeur sur des dispositions juridiques. Il
est davantage et surtout question pour nous de peser le pour et le contre pour
rechercher le juste milieu par le biais d'une analyse essentiellement
juridique.
D'un côté, le rejet des recours gracieux
collectifs est tout à fait raisonnable d'un point de vue juridique. Elle
se déduit sûrement de la condition selon laquelle pour mener une
action en justice, on doit se prévaloir d'un intérêt
personnel. Autrement dit, selon le juge de la Chambre Administrative, un
justiciable ne saurait faire valoir ses droits à la faveur d'un recours
gracieux formé avec les autres, ou bien en collectivement. Il va sans
dire que le RGP est la préfiguration du recours contentieux.
« Nul ne plaide par procureur ». Ainsi, un
justiciable ne peut, dans le seul objectif de faire prévaloir le respect
du droit, contester un acte qui ne le concerne pas d'une manière
spécifique , alors même que cet acte est clairement
illégal. C'est le principe de l'interdiction de l'actio
popularis. En France, dans le
102 Voir notamment jugement n°46 /2008/CS-CA du 02 avril
2008, OKONO Jean Gilles c/ État du Cameroun (PM) ; jugement n°45
/CS-CA du 02 avril 2008, NJOCK née ONOMESSENE Brigitte J-F c/
État du Cameroun (PM).
contentieux de la fonction publique, les décisions qui
infligent une sanction disciplinaire comme celles qui procèdent à
des retenues sur traitement d'agents publics ou refusent le versement à
des agents publics de sommes qui leur seraient dues ne peuvent pas être
attaquées par un groupement, c'est-à-dire de façon
collective. Dans ces hypothèses, il appartient à chacun des
intéressés d'introduire lui-même un recours tendant
à l'annulation ou à l'indemnisation, à moins que chaque
intéressé confie à un tiers un mandat de
représentation103.
La juridiction administrative camerounaise ne connaît
pas de l'action collective, entendue comme la voie de droit par laquelle un
seul justiciable peut, au nom d'une catégorie de personnes dont il se
reconnait habilité à porter les intérêts, demander
que soit établie par un jugement ayant autorité de chose
jugée, la réparation du préjudice ou les droits
individuels de tous les membres de cet ensemble alors tiers au procès.
L'action collective est une « procédure contentieuse
conduisant, à la demande d'un « requérant-pilote »
(test claimant dans la terminologie anglo-saxonne) agissant pour le compte
d'une catégorie prétendument lésée, au
prononcé d'un jugement dont la solution s'applique à tous les
justiciables relevant de cette catégorie ».104
D'un autre côté, l'introduction d'actions
collectives offre des garanties de protection juridique qui procurent aux
citoyens un accès facile et peu couteux à la justice. Autrement
dit, les recours collectifs offrent d'ores et déjà des
possibilités d'accès à la justice, dans des conditions
satisfaisantes, à de nombreux justiciables. Il en résulte une
économie de temps et de moyens. Les recours collectifs améliorent
l'accès au juge surtout en ce qui concerne les petits litiges,
c'est-à-dire ceux impliquant de faible sommes pour les victimes, mais
qui risquent d'être au total très coûteux pour le
défendeur. L'un des mérites de la class
action105 en effet est, en regroupant plusieurs recours dans un
seul procès,
103 Voir CASSIA (P), « Vers une action collective en
droit administratif ? », RFDA, 2009 p. 657et ss. (Source
électronique).
104 Sur toute la question, voir CASSIA (P), Article
précité. Voir aussi Voir aussi Mémoire du barreau du
Québec à propos du recours collectif en Cour
fédérale du Canada (Fichier PDF).
105 C'est le pendant des recours collectifs dans le droit
anglo-saxon. Il se traduit littéralement par « action de
classe » .Voir CASSIA (P), Article précité.
d'éviter l'encombrement des prétoires et de
réaliser des économies d'échelle sur les coûts de
procédure.
L'admission des recours gracieux collectifs pourrait aussi
éviter l'Administration de se prononcer sur une multitude de dossiers
ayant les mêmes causes et les mêmes objets.
Cependant, une systématisation des recours collectif
n'est pas sans heurts sur le bon fonctionnement d'une justice administrative
qui souffre déjà de plusieurs maux tels que les lenteurs, son
caractère inefficace et mystérieux106. Le plus grand
risque est celui de l'encombrement du prétoire de la juridiction
administrative par un foisonnement des contentieux. En effet, les tribunaux,
déjà engorgés, auront à faire face à une
surcharge de dossiers compliqués, ce qui entraînera aussi des
difficultés matérielles de les traiter. On pourra alors craindre
dans cette situation qu'un examen sérieux des demandes fasse
défaut.
Est-ce qu'un recours gracieux collectif entraîne
automatiquement un recours contentieux collectif ? À cette question, le
juge de la Chambre Administrative de la Cour Suprême répond par
l'affirmative. Cependant, cela parait critiquable, car il est évident
qu'à la suite d'un recours gracieux préalable collectif, on peut
normalement former un recours contentieux personnel. Bien plus, la loi
n'interdit que les recours contentieux collectifs -Quand ils sont formés
contre des actes divisibles - et non les recours gracieux collectifs. C'est
ainsi qu'il est logique de penser que la juridiction administrative quand elle
rejette les recours contentieux consécutifs aux recours gracieux
collectifs procède par déduction. Peut être veut-elle faire
preuve d'innovation et d'originalité. Aucune disposition légale
n'interdit le recours gracieux collectif. Peut être aussi veut-elle
asseoir un droit administratif jurisprudentiel.
Dans l'affaire SANGALE MAGBEKA Jules Alain c/ État du
Cameroun (PM), objet du jugement n°79/ CS-CA /2009 du 25 mars 2009, il est
certes vrai que le recours gracieux préalable versé dans le
dossier du requérant est collectif
106 Voir THIRIEZ (F), « La justice administrative
», Petites Affiches, n°76 du 22 juin 1998, p.42.
- et dirigé contre le reclassement qui est un acte
divisible -, car ayant été fait par 74 diplômés de
l'IRIC. Cependant, il n'en demeure pas moins vrai que le recours contentieux du
recourant est personnel. Dans cette perspective, le rejet systématique
des recours gracieux collectifs peut être une entrave sérieuse
à l'accès au prétoire administratif au Cameroun.
Nous attendrons de connaitre la position de la juridiction
administrative d'appel sur cette notion de recours gracieux collectif, au cas
où l'une de ces décisions rejetant le RGP collectif lui sera
déférée. Aussi reconnaissons-nous avec M.SIETCHOUA
DJUITCHOKO Célestin que le juge d'appel n'est pas du tout lié par
la solution du juge du premier degré et peut par conséquent, soit
l'infirmer, soit la confirmer simplement107.
CONCLUSION DU CHAPITRE 1
Ce qui précède conduit à dire que le
recours gracieux préalable demeure un moyen d'ordre public dans le
contentieux administratif camerounais. Cela est perceptible notamment dans la
jurisprudence administrative.
Le législateur et le juge administratif continuent
à assortir ce recours des exceptions, qui, ces trente dernières
années ont accru en quantité et en qualité
107 Voir SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), Thèse
précitée, pp.293 et ss.
CHAPITRE-2 : L'ATTÉNUATION DE LA
RÈGLE
DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
L'atténuation de la règle du recours gracieux
préalable est bien une évidence dans le contentieux administratif
camerounais. Un tour d'ensemble de la jurisprudence administrative et des
textes sur le recours gracieux corrobore cette affirmation. Les exceptions
qu'on relève de part et d'autre représentent des
atténuations à la règle du RGP. Pour tout dire, on observe
de nos jours une multiplication des exceptions à la règle du
recours gracieux préalable (Section 1). Les exceptions ainsi
consacrées sont diversement justifiées (Section 2).
SECTION-1 : LA MULTIPLICATION DES
EXCEPTIONS À LA RÈGLE DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
Les exceptions à la règle du recours gracieux
préalable sont à analyser dans une double perspective. En bref,
il existe deux catégories d'exceptions à la règle du
recours gracieux préalable : les unes découlent des dispositions
légales alors que les autres sont de nature prétorienne. Nous
analyserons donc successivement les exceptions légales (Paragraphe 1) et
les exceptions jurisprudentielles (Paragraphe 2).
PARAGRAPHE-1 : LES EXCEPTIONS LÉGALES
Les exceptions légales à la règle du
recours gracieux préalable relèvent essentiellement de deux
sources. D'une part, elles découlent de certaines lois en matière
électorales et en matière de droits et libertés publiques
(A). D'autre part, elles sont relatives à la création du Conseil
de Discipline Budgétaire et Financier(B).
A- Les exceptions inhérentes aux lois sur les
droits et libertés publiques et aux lois électorales
Nous analyserons successivement les exceptions
inhérentes aux lois électorales (1) et les exceptions propres aux
lois relatives aux droits et libertés publiques(2).
1 - Les exceptions inhérentes aux lois sur
les droits et libertés publiques
Les revendications des années de braise au Cameroun ont
favorisé l'adoption d'une série de lois sur les droits
fondamentaux et les libertés publiques. Ces lois recèlent pour
certaines des dispositions qui dérogent à l'article 12 de
l'ordonnance n°72/6 du 26 août 1972 précitée qui
était alors applicable. En clair, ces matières108
peuvent donner lieu à des contentieux qui, bien que ressortissant de la
juridiction administrative, ne reçoivent pas application de la
règle d'ordre public du recours gracieux préalable. En
conséquence les recours qui pourraient être formés sur ces
matières sont dispensés de recours gracieux préalable.
Parmi ces lois, on peut mentionner en premier lieu la loi
n° 90/056 du 19 décembre 1990 sur les partis politiques. Cette loi
énonce en son article 8 alinéa 3 que « Par
dérogation aux dispositions de l'article 12 de l'ordonnance n°72 /6
du 26 août 1972 fixant l'organisation et le fonctionnement de la Cour
Suprême, le refus de l'autorisation prévue à
l'alinéa 2 ci-dessus est susceptible de recours, sur simple
requête devant le Président de la juridiction administrative
».
Le refus d'autorisation d'un parti politique dont fait
état l'alinéa 2 de ladite loi doit être motivé et
notifié au déposant par tout moyen laissant trace écrite.
Il doit être explicite, contrairement à l'autorisation d'un parti
politique qui peut être tacite après un silence de trois mois
à compter de la date de dépôt du dossier auprès des
services du Gouverneur territorialement compétent. Après
l'accomplissement de la formalité de publicité de la part du
Ministre chargé de
108 Il s'agit des droits fondamentaux de l'homme et les
libertés publiques.
l'Administration territoriale109, le refus de
l'autorisation de création d'un parti politique peut donner lieu
à un recours devant le Président de la Chambre Administrative de
la Cour Suprême avec dispense du RGP.
Il en est de même des mesures de suspension d'office
pour une durée de trois mois de l'activité d'un parti politique
responsable de troubles graves à l' ordre public ou qui ne remplit pas
les conditions exigées aux articles 5,6,9,10 et 11 de la loi sur les
partis politiques110.
Dans le même ordre d'idées, la décision
par laquelle le Ministre en charge de l'Administration territoriale dissout un
parti politique peut être attaquée devant la Chambre
Administrative sans que le plaignant ait formé au préalable un
recours gracieux111 .
On mentionnera en second lieu la loi n°90 /053 du 19
décembre 1990 sur les associations. D'après l'article 13
alinéa 3 de cette loi, « Par dérogation à
l'article 12 de l'ordonnance n°72/6 du 26 août 1972 fixant
l'organisation de la Cour Suprême, les actes prévus aux
alinéas 1 et 2 ci-dessus sont susceptibles de recours sur simple
requête, devant le Président de la juridiction administrative. Ce
recours doit intervenir dans un délai de dix (10) jours à compter
de la date de notification à personne ou à domicile. Le
Président statue par ordonnance dans un délai de dix (10)
jours ».
Les actes mentionnés aux alinéas 1et 2 sont les
décisions du Ministre de l'Administration territoriale portant
suspension ou dissolution d'une association. Ils peuvent ainsi être
portés directement devant le Président de la juridiction
administrative112 dans un délai de 10 jours.
109 Le Ministre de l'Administration territoriale est
exclusivement compétent selon l'article 7 de la loi n°90/056
précitée pour autoriser l'existence légale d'un parti
politique.
110 Article 17 alinéa 1 de la loi n°90/056
précitée.
111 Article 18 alinéa 2 de la loi
précitée.
112 Voir jugement n°97/2005-2006/CS-CA du 14 juin 2006,
Association Commune Internationale des Femmes Messagers du Christ (CIFMC) c/
État du Cameroun (MINAT et Madame LEMOTIO née ELELONGUE NDINE
Solange Alvine. Dans ce jugement, le juge déclare : « Attendu
qu'il ressort de l'article 13 alinéa 3 de la loi n°90/53 du 19
décembre 1990 portant sur la liberté d'association que
par
En troisième lieu, le contentieux de la saisine des
journaux est dépourvu de l'exigence d'un recours gracieux
préalable. Ceci ressort de l'article 14 de la loi n°90 /052 sur la
liberté de Communication sociale dans son ancienne rédaction qui
considérait la saisie des journaux comme un cas d'urgence. Cependant,
l'article 17 nouveau alinéa 2 de ladite loi issue de la loi n°96/04
du 04 février 1996 portant modification de la loi sur la liberté
de communication sociale expose que :
« La décision de saisie ou d'interdiction est
susceptible de recours. Dans ce cas, le Directeur de publication saisit le juge
compétent en référé d'heure à heure ou
suivant les dispositions légales analogues en vigueur dans les provinces
du Nord-ouest et du Sud-ouest ».
Il résulte de cette disposition que désormais
c'est le juge judiciaire qui est compétent en cas de saisie ou
d'interdiction des journaux.
Certaines opérations électorales au Cameroun
peuvent aussi donner lieu aux litiges où les requérants n'ont pas
besoin de satisfaire l'exigence du recours gracieux préalable.
2- Les exceptions en matière
électorale
Il ressort de l'article 33 la loi n°92/002 du 14
août 1992 fixant les conditions d'élection des conseillers
municipaux113 que tout électeur ou candidat peut demander la
nullité les opérations électorales de la Commune devant le
juge administratif. Ces contestations sont dispensées de recours
gracieux préalable et
dérogation à l'article 12 de l'ordonnance
n°72/6 du 26 août 1972,fixant l'organisation de la Cour
Suprême, le recours contre une suspension des activités d'une
association se fait par simple requête devant le Président de la
juridiction administrative ».
113 Ces articles disposent respectivement :
Article 33 : « Tout électeur et tout candidat
a le droit d'arguer de nullité les opérations électorales
de la Commune devant le juge administratif »
Article 34-1 : « Par dérogation aux
dispositions de l'article 12 de l'ordonnance n°72/6 du 26 août 1972
fixant l'organisation de la Cour Suprême, les contestations font l'objet
d'une simple requête devant la juridiction administrative ».
ne font l'objet que d'une simple requête devant la Chambre
Administrative de la Cour Suprême114.
Cette disposition a été respectée lors
des contestations nées des élections municipales du 21 janvier
1996 au Cameroun115.
Dans le même ordre d'idées , l'article 26 nouveau
alinéa 1 de la loi n° 2006/010 du 29 décembre 2006 modifiant
et complétant certaines dispositions de la loi n° 92 /002 du 14
août 1992 fixant les conditions d'élection des conseillers
municipaux expose que la décision d'acceptation ou de rejet d'une liste
de candidats peut être portée devant la juridiction administrative
compétente par un candidat , un mandataire de la liste , et tout
électeur inscrit sur la liste électorale de la Commune
concernée. L'article 33 nouveaux quant à lui habilite tout
électeur, tout candidat, tout mandataire ou toute personne ayant
qualité d'agent du gouvernement pour l'élection, à
demander l'annulation des opérations électorales de la Commune
concernée devant la juridiction administrative compétente. Plus
intéressant est l'article 34 alinéa 1 nouveau qui dispose
clairement : « Les contestations font l'objet d'une simple
requête et doivent intervenir dans un délai maximum de cinq (05)
jours suivant sa saisine ».
Il faut relever d'emblée qu'une infime partie du
contentieux électoral ressortit à la compétence de la
juridiction administrative à savoir le contentieux né à
l'occasion de l'élection des conseillers municipaux116.
114 Voir OLINGA, (A.D) « Contentieux électoral
et état de droit au Cameroun », Juridis Périodique
n°41, janvier- février- mars 2000, p. 35.Voir aussi KEUTCHA
TCHAPNGA (C), Contentieux administratif, Cours
précité. Voir aussi ABA'A OYONO (J.C), La compétence de la
juridiction administrative en droit camerounais, Thèse Droit,
Université de Nantes, 1994, p.105.
115 Voir MBARGA NYATTE (D), « Sociologie du
contentieux relatif aux élections municipales du 21 janvier 1996 au
Cameroun », Article précité, p.83.
116 Certains litiges relatifs aux élections ont
été attribués au Conseil Constitutionnel crée par
le titre 7 de la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996. L'article 48
alinéa 1 de cette loi expose que « Le Conseil Constitutionnel
veille à la régularité de l'élection
présidentielle, des élections parlementaires, des consultations
référendaires. Il en proclame les résultats ».
L'alinéa 2 du même article poursuit en ces termes : « En
cas de contestation sur la régularité de l'une des
élections prévues à l'alinéa (1) ci - dessus, le
Conseil Constitutionnel peut être saisi par tout candidat, tout parti
politique ayant pris part à l'élection dans la circonscription
concernée ou toute personne ayant qualité d'agent du gouvernement
pour cette élection ».
On peut aussi relever pour le souligner le fait que la loi
fixant les conditions d'élection des députés à
l'Assemblée nationale permettait déjà à toute
personne intéressée par les résultats du scrutin de saisir
directement le juge compétent117.
La création du Conseil de Discipline Budgétaire
et Financier participe aussi de la mise en évidence des exceptions
légales à la règle du RGP.
B - La création d'un organisme de contrôle
budgétaire et financier : le Conseil de Discipline Budgétaire
et Financier (CDBF)
La création de l'organisme de contrôle
budgétaire et financier à savoir le CDBF a justifié dans
certaines circonstances la dispense pour le justiciable de saisir
préalablement l'Administration avant un éventuel recours devant
le juge administratif. Le Conseil de Discipline Budgétaire et Comptable
(CDBC) devenu Conseil de Discipline Budgétaire et Financier a une
influence remarquable sur la règle du recours gracieux
préalable118. Cette influence tient au fait que le texte qui
le régit renferme des dispositions qui font exception à
l'exigence du recours gracieux préalable.
« Le Conseil de Discipline Budgétaire et
Financier statue par décision ». Telle est la disposition de
l'article 2 alinéa 3 du décret n°2008/028 du 17 janvier
Le recours devant le Conseil Constitutionnel qui n'est
aucunement une juridiction de l'ordre administratif est dispensé de ce
fait même du recours gracieux préalable. D'ailleurs, l'article 77
nouveau alinéa 1 de la loi n° 2006/009 du 29 décembre 2006
modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n°91/20 du
16 décembre 1991 fixant les conditions d'élection des
députés à l'Assemblée nationale énonce que
« Les contestations ou réclamations sont faites sur simple
requête adressée au Conseil Constitutionnel ». Il s'agit
des contestations ou réclamations relatives au rejet ou à
l'acceptation d'une candidature, des réclamations ou contestations
relatives au sigle, à la couleur ou au symbole adopté par un
candidat ou une liste. Le délai de recours est de deux (02) jours
suivant la publication des candidatures ou la notification de la
décision concernée relative à la couleur, au sigle ou au
symbole (Article 72 nouveau, alinéa 5 et article 76 nouveau de la loi
n° 2006/009 du 29 décembre 2006 précité).
Voir aussi KEMFOUET KENGNY (E.D), Le contentieux des
élections présidentielles et législatives au Cameroun et
au Gabon, Mémoire de DEA, Université de Dschang, année
académique 2000-2001, pp.59-61.
117 MANDENG (D), Le contrôle de la
régularité des élections législatives au Cameroun,
Mémoire précité, pp.40 et ss.
118 Voir SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), Note sous jugement n°
14/94-95/CS-CA du 26 janvier 1995, YAP Jean Emile c/ État du Cameroun,
Juridis Périodique n°42, avril -mai -juin 2000.
L'article 14 de la loi n°74/18 du 5 décembre 1974
relative à la responsabilité des ordonnateurs et gestionnaires de
crédits publics et des entreprises de l'État dispensait les
décisions du Conseil de Discipline Budgétaire et Comptable du
recours gracieux préalable.
2008 portant organisation du Conseil de Discipline
Budgétaire et Financier. La décision du CDBF intervient à
la suite d'une instruction minutieuse des affaires dont il est saisi.
L'instruction des dossiers soumis à la CDBF est régie par les
articles 15 à 17 du décret de 2008 précité. Pour
l'essentiel, on retient que le Conseil prend des décisions sur la
responsabilité pécuniaire des ordonnateurs. Ceux de ces derniers
reconnus coupables de la mauvaise gestion des ressources de l'État sont
mis en débet envers le trésor public, à concurrence du
montant des sommes distraites du fait de leur mauvaise gestion. Le point
saillant de la procédure devant le CDBF c'est le fait que ses
décisions sont dispensées de recours gracieux préalable.
Cette dispense ressort clairement de l'article 16 alinéa 1 du
décret précité119
Certaines exceptions à la règle du recours gracieux
préalable au Cameroun ont été consacrées par la
juridiction administrative elle même.
PARAGRAPHE- 2 : LES EXCEPTIONS
JURISPRUDENTIELLES
Certaines exceptions à la règle du recours
gracieux préalable tirent leur source dans la jurisprudence
administrative camerounaise. Pour les besoins de l'analyse, force est de
distinguer les exceptions jurisprudentielles relatives à l'urgence (A)
et celles propres aux matières ordinaires (B).
A - Les exceptions jurisprudentielles en matière
d'urgence
L'affaire DJANBOU Maurice c/SOCADIC120, objet de
l'Ordonnance de sursis à exécution n°38 du 27 juin 1997
portant ordonnance de sursis à exécution consacre une
jurisprudence emblématique en matière de sursis à
exécution. Cette décision est d'autant intéressante que
son analyse ne saurait faire économie des faits. En l'espèce,
à la requête de sieur DJANBOU Maurice, Maître BIYIK,
119 Article 16. (1) « Les décisions du conseil ne
sont pas susceptibles de recours gracieux préalable
(2) Elles peuvent faire l'objet de recours en annulation
devant la juridiction administrative compétente, sans que ce recours ne
soit suspensif. »
120KEUTCHA TCHAPNGA (C), « Le régime
juridique du sursis à exécution dans la jurisprudence
administrative camerounaise », Article précité, pp.
87-88.
huissier de justice saisit au domicile, dans les magasins et
bureaux de la SOCADIC des effets mobiliers. L'huissier est sur le point de
vendre les biens saisis lorsque le procureur de la République lui fait
parvenir un message demandant la restitution des biens saisis, à son
sens, de manière irrégulière. Prévenu, DJANBOU
Maurice introduit devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême une
requête tendant à la rétractation du message -porté
du procureur de la République doublé d'une demande de sursis
à exécution dudit message.
Ce qui nous intéresse prioritairement dans cette
décision qui pose plusieurs problèmes,121 c'est que le
recours contentieux de sieur DJANBOU n'était pas
précédé d'un RGP. Pourtant, il avait été
déclaré recevable par le juge administratif du sursis. Cette
Ordonnance faisait par conséquent exception à la règle
traditionnelle du recours gracieux préalable. Ce qui n'était ni
plus ni moins qu'une interprétation particulière de la loi.
On sait d'ailleurs que dans plusieurs autres affaires,
toujours relatives au sursis à exécution122, le juge a
admis la recevabilité d'un recours contentieux intenté sans que
le contentieux ne soit lié. À vrai dire, le juge a fait droit
à un recours contentieux prématuré, étant
donné que les délais impartis à l'Administration pour se
prononcer sur le RGP n'étaient pas arrivés à leurs termes.
Ces décisions bien que soucieuses des droits des justiciables, brillent
par leur singularité et n'ont pas fait jurisprudence. Elles sont donc
restées isolées.
Avec la loi de 2006 précité, le problème
ne se posera plus en ces termes, car l'article 18 alinéa 4 dispose sans
ambigüité :
« L'ordonnance prononçant le sursis à
exécution devient caduque si, à l'expiration du délai
prévu à l'article 18 ci-dessus, le tribunal n'est pas saisi de la
requête introductive d'instance ».
121 Par exemple celui de la capacité du juge administratif
à protéger les droits des particuliers.
122 Ordonnance de référé n°05/CS/PCA
du 05 octobre 1992 portant sursis à exécution, affaire SIGHOKO
FOSSI Abraham c/ État du Cameroun (MINSANTE) et Ordonnance de sursis
à exécution n°21/OSE/PCA /91-92, Dame MAYOUGA Yvonne c/
État du Cameroun (MINSANTE).
Le délai dont fait état l'article 18 est de 60
jours. Cet article est donc clair sur le fait que désormais - en
matière de sursis à exécution-, après avoir
adressé le recours gracieux à qui de droit, le requérant
peut directement saisir le juge de la Chambre Administrative sans attendre les
délais du recours contentieux.
Il serait donc bénéfique pour le
requérant d'élaborer un recours gracieux qui vaudra tant pour la
demande de sursis que pour le recours au fond. Dans ce cas à l'issue de
la décision de sursis, il devra tout simplement attendre les
délais si tel est le cas pour saisir le juge.
En matière de référé
administratif, sous l'empire de l'article 122 de la loi n°75/17 du 8
décembre 1975 précitée, il arrivait souvent que le Juge
n'exige pas des requérants le RGP. Tel était le cas dans
l'Ordonnance de référé n°41/OR/CAB/PCA/CS/2003-2004
du 07 juillet 2004, Social Democratic Front c/ État du Cameroun (MINATD
et MINEFIB) précitée où le juge déclare:
« Attendu qu'il ne résulte pas de ce texte
l'exigence d'un recours gracieux préalable, la juridiction saisie qui
est celle du Président statuant en matière d'urgence, laquelle ne
saurait s'encombrer des délais relatifs au recours gracieux sans courir
le risque de voir la situation de l'une des parties en procès
irrémédiablement compromise par l'exécution de l'acte
administratif ».
En matière ordinaire, la juridiction administrative
camerounaise s'est aussi montrée révolutionnaire en recevant
certains recours contentieux qui n'étaient pas
précédés de recours gracieux préalables.
B - Les exceptions jurisprudentielles en matière
ordinaire
Il est souvent arrivé que la juridiction administrative
camerounaise par sursaut d'orgueil, si on peut le dire ainsi, admette les
recours contentieux malgré l'absence du recours gracieux.
Concrètement, il s'agit des cas de violation de la
loi par le juge, sauf que, une décision de justice
qu'elle soit bonne ou mauvaise n'est pas moins du droit, nous apprend la
théorie positiviste.123
L'exemption du RGP dans certaines affaires a par ce fait
même permis que l'Administration soit directement attraite en justice
sans avoir au préalable arrêté sa position
définitive sur la question litigieuse, comme s'il s'agissait d'un simple
particulier. Dans l'affaire Dame MBOCKA Jeannette, objet du jugement rendu le
28 décembre 1978, la Chambre Administrative s'est abstenue d'invoquer le
caractère d'ordre public du RGP. Son invocation lui aurait permis de
rejeter la requête de Dame MBOCKA. En se comportant ainsi, la juridiction
administrative a tacitement reconnu la validité du recours de cette
dernière en l'absence du recours gracieux préalable.
Dans le même ordre d'idées, la Chambre
Administrative a fait droit au recours d'une Dame qui, à la suite d'un
accident de circulation causé par un véhicule de l'Administration
l'a saisi directement sans recours gracieux préalable. Elle demandait au
juge la condamnation de l'État à lui payer des dommages
-intérêts124 . Cette jurisprudence date de 1966. Elle
nous permet aussi d'affirmer que c'est à la faveur de l'ordonnance de
1972 et de la jurisprudence ITEM Dieudonné de 1978 que la juridiction
administrative a reconnu le caractère d'ordre public du
RGP125. Pour intéressante qu'elle ait été, la
jurisprudence Dame MBOCKA n'a pas prospéré.
La juridiction administrative a d'ailleurs admis qu'un moyen
tiré du défaut de RGP ne peut plus être invoqué si
le juge judiciaire saisi préalablement à tort s'est
déclaré incompétent126.
123 Voir KELSEN (H), Théorie pure de droit, Trad.
EISENMANN, Dalloz, Paris 1962, p. 320.
124 Voir arrêt n°32/ CFJ-CAY du 15 novembre 1966,
Dame LAMI ABSATOU Bi Mohaman c/ État du Cameroun, Cité par
KEUTCHA TCHAPNGA (C), Cours précité et KAMTO (M), Ouvrage
précité, p .42.
125 Voir notre analyse supra.
126 Voir jugement n°45/ CS-CA du 25 mai1982, DZIETHAM
Pierre C/ État du Cameroun et arrêt confirmatif CS-AP, arrêt
n°8/A du 17 novembre 1983, État du Cameroun c/DZIETHAM Pierre. Dans
ce jugement, le juge déclare :
« Attendu que la question de savoir si DZIETHAM a
formé un recours gracieux est vaine car DZIETHAM a d'abord saisi le juge
de l'ordre judiciaire et la procédure devant le tribunal de Grande
Instance ne subordonne pas l'action dirigée contre l'État
à un recours gracieux préalable »
Il importe à présent pour nous d'envisager les
finalités recherchées par l'édiction de ces exceptions.
Parler des finalités de ces exceptions revient à dégager
leurs justifications.
SECTION-2 : LES JUSTIFICATIONS DES
EXCEPTIONS À LA RÈGLE DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
Les justifications des exceptions à la règle du
recours gracieux préalable au Cameroun sont diverses. La dispense du RGP
dans les recours contre les décisions de la CDBF découle sans
doute de l'instruction dont les dossiers font l'objet devant cet organisme.
Pour le reste, ces justifications peuvent être divisées en deux
groupes. Le premier groupe rassemble les justifications découlant de la
promotion des droits de l'homme et des libertés publiques (Paragraphe
1), tandis que le second groupe tient à la prise en considération
des questions électorales (Paragraphe 2).
PARAGRAPHE- 1 : LA PROMOTION DES DROITS DE
L'HOMME ET LIBERTÉS PUBLIQUES
La poussée démocratique a sûrement
influé de façon positive sur l'orientation du législateur
dans les lois du début des années 90. Ces lois renferment dans
certaines de leurs dispositions des dérogations à la règle
du recours gracieux préalable comme nous avons pu le relever. Le souci
de ces lois était entre autres la promotion des droits de l'homme et
libertés publiques.
À la faveur de l'ouverture démocratique au
Cameroun, plusieurs lois s'inscrivant dans le cadre de la protection et de la
promotion des libertés publiques ont été prises. Il s'agit
de la loi n° 90/056 du 19 décembre 1990 sur les partis politiques
et la loi n°90 /053 du 19 décembre 1990 sur les associations
précitées. Ces dérogations importantes participent,
à n'en point douter, à l'affermissement des droits de l'homme et
libertés fondamentales. Il va de soi qu'à un moment donné,
le recours gracieux préalable est apparu comme une arme
tracassière entre les mains de l'Administration. En d'autres termes, il
était
une sorte de « mouroir » pour les litiges
administratifs. Il en résulte que la sanction d'un droit ou d'une
liberté publique violée par les agissements de l'Administration
pouvait ne pas être assurée parce le requérant
s'était trompé par exemple sur la destination du RGP.
Le droit à un procès équitable est au
coeur de la doctrine juridique, et cette question préoccupe au plus haut
point les avocats et les plaideurs éventuels ainsi que les magistrats.
On ne saurait occulter le fait que « le droit à un
procès équitable est un élément central et
essentiel de l'État de droit »127. S'il se trouve
que le justiciable administré est sacrifié du fait du recours
gracieux préalable à l'autel de la bureaucratie administrative,
cela pose inévitablement un problème de l'égalité
des parties en conflits. Lorsque le juge administratif ne parvient pas à
protéger les libertés consacrées du fait du RGP, il y a
lieu de s'inquiéter.
C'est la raison pour laquelle sur une matière autant
sensible que les libertés publiques, le législateur dispense
à certains égards les recourant de l'obligation de former un
recours gracieux préalable. Le même raisonnement vaut à
quelques exceptions près pour certaines branches du contentieux
électoral.
PARAGRAPHE-2 : LA PRISE EN CONSIDÉRATION DES
QUESTIONS ÉLECTORALES
Les questions électorales font également partie
des questions sensibles dans les démocraties modernes. On a le plus
souvent constaté qu'elles sont à l'origine de la plupart des
instabilités politiques dans le monde, et surtout en Afrique où
les mécanismes de gestion des élections peinent encore à
s'imposer.
Il est tout à fait raisonnable que les questions de
nature électorales soient traitées avec minutie, sinon avec la
plus grande considération. Les contestations de nature électorale
doivent donc être examinées en maintenant à l'écart
toutes
127NGUELE ABADA (M), « la réception
des règles du procès équitable dans le contentieux du
droit public», Juridis Périodique n°63,
juillet-août-septembre 2005, p.19. L'auteur cite SUDRE (F) qui rappelait
fort opportunément que l'essentiel du contentieux français est
formé par le « seul droit à un procès
équitable » qui selon lui constitue le « noyau
dur » , Droit international et européen des droits de l'homme
,PUF, Coll. « Droit fondamental », Paris,
2ième Ed , p.149.
les barrières qui peuvent se révéler
tracassières, au rang desquelles le recours gracieux préalable.
Le dénouement des litiges électoraux, doit intervenir en temps
réel, la célérité y étant de mise. Cet
objectif ne sera jamais atteint s'il faut d'abord adresser un recours gracieux
préalable à l'Administration, attendre un délai de trois
(3) mois au cas où cette dernière ne réagit pas avant de
saisir le juge128. Ce temps est largement suffisant pour laisser la
place aux manifestations de rue, voire aux remous sociaux susceptibles de
mettre à mal la République, ou d'embraser les différents
protagonistes.
Une autre justification réside dans le fait que les
questions électorales entretiennent des rapports très
étroits avec l'urgence129 . « Il importe, pour le
Professeur J.C.MASCLET, que le résultat de l'élection soit
fixé sans tarder pour que le doute ne subsiste pas sur la qualité
de ceux qui ont été légitimement élus, ou pour que
ceux qui ont acquis leur élection de manière
irrégulière n'exercent pas plus longtemps un mandat
usurpé. Le respect du suffrage qui, se confond avec celui de la
démocratie, exige donc le redressement rapide des situations
anormales130». Il est alors judicieux de les traiter comme
des cas d'urgence, et donc avec la plus grande
célérité.
Jusqu'à une période récente, la
complexité dans la détermination de l'autorité
adressataire faisait du RGP, une arme de renforcement de la bureaucratie
administrative, ce qui ne fait pas bon ménage avec le contentieux
électoral.
128 Article 17 alinéa 2 de la loi n°2006/022
précitée.
129 PONTIER (J-M) soulignait qu'une certaine lenteur est sans
doute nécessaire à la sécurité de la justice, mais
lorsque les délais passent à plusieurs distances, ce n'est plus
acceptable, surtout pour un contentieux aussi urgent que celui des
élections. Voir PONTIER (J-M), « Contrôle juridictionnel
et nouvelles protections en France », Administration et
Administrés en Europe. Annuaire Européen d'Administration
publique. Ed. du CNRS.1984, p.47. Cité par MBARGA NYATTE (D), Article
précité, p.85.
130 Voir MBARGA NYATTE (D), Article précité, p.85.
L'auteur cite MASCLET (J-C), Le droit des élections politiques, Que
sais-je ? n°2643, p.97.
CONCLUSION DU CHAPITRE 2
L'atténuation de la règle du recours gracieux
préalable semble de nos jours une évidence. Étant
donné qu'il n y a pas de règle sans exception, il n'est pas
surprenant que malgré son caractère d'ordre public, le RGP ne
soit pas exigé dans certaines matières. Les exceptions
relevées autant de nature légale que jurisprudentielle se
justifient tant par l'essor des droits et libertés publiques et par
l'urgence de certains contentieux à l'instar du contentieux
électoral.
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE
Le recours gracieux préalable après trente ans
garde son caractère d'ordre public. Ce caractère n'est pas remis
en cause par le législateur de 2006. Il prévaut tant dans les
procédures ordinaires qu'en matière d'urgence. Le RGP n'est pas
exigé dans les voies de recours, notamment le pourvoi en appel et le
pourvoi en cassation. Cette situation est due, entre autres, au principe de
l'immutabilité du litige. La règle du recours gracieux
préalable a plusieurs conséquences. Par son application, les
recours gracieux mal dirigés sont rejetés. Les recours
contentieux prématurés le sont également ainsi que les
demandes non soumises à l'Administration, et dans une certaine mesure
les recours gracieux collectifs.
Les exceptions au recours gracieux sont l'oeuvre du
législateur aussi bien que du juge. Elles participent, à n'en
point douter, à la bonne administration de la justice qui impose que des
questions délicates dans les sociétés modernes soient
résolues, sinon avec la plus grande célérité, du
moins avec promptitude. Elles matérialisent aussi, dans une certaine
mesure, la capacité du juge administratif à protéger les
droits des administrés face aux prérogatives exorbitantes de
l'Administration.
Les exigences de fond du recours gracieux préalable ont
relativement muté au fil du temps et s'imposent avec autant de rigueur
que les règles de forme.
SECONDE PARTIE : UNE MODIFICATION
ATTÉNUÉE DES EXIGENCES DE FOND DU
RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
Les exigences de fond du recours gracieux préalable ont
connu une transformation autant remarquable que relative. Il faut tout
simplement reconnaitre que cette modification a le mérite d'avoir
apporté une éclaircie dans le régime du recours gracieux.
Ceci est d'autant plus évident que les règles du recours gracieux
sujettes à problème portaient sur le fond. Ces règles de
fond déteignaient aussi souvent sur les règles de forme. En
d'autres termes, par application du caractère d'ordre public du recours
gracieux préalable, exigence de forme, une bonne partie des recours
était rejetée par la juridiction administrative notamment pour
absence de recours. Régulièrement, ces rejets étaient dus
au fait que les requérant se trompaient sur l'autorité
adressataire ou sur les délais du recours gracieux, exigences de fond.
C'est dire que les exigences de forme et de fond du RGP sont liées.
Cette transformation est à deux vitesses, en ce sens
où elle n'a pas la même ampleur dans les différents aspects
de fond du recours gracieux. Pour tout dire, la modification des exigences de
fond du recours gracieux préalable laisse apparaitre une simplification
des règles relatives à la détermination de
l'autorité adressataire (Chapitre 1), et une quasi stabilité des
règles relatives aux délais du recours gracieux (Chapitre 2).
CHAPITRE-1 : LA SIMPLIFICATION DES RÈGLES
RELATIVES À LA DÉTERMINATION DE L'AUTORITÉ
ADRESSATAIRE DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
La simplification des règles relatives à la
détermination de l'autorité adressataire du recours gracieux est
à mettre au crédit de la loi n°2006/022 du 29
décembre 2006 précitée. Par le passé, sous l'empire
de l'ordonnance du 26 août 1972, il n'était point aisé pour
le justiciable d'adresser un recours gracieux auprès de qui de droit,
même quand la faute de l'Administration était évidente. Les
dispositions légales relatives aux autorités adressataires du
recours gracieux étaient pour le moins évanescentes, sinon
difficilement saisissables. Cette difficulté nuisait tant au juge,
à l'Administration ainsi qu'à l'administré.
La situation s'est désormais clarifiée car
à l'issue de la loi de 2006, le recours gracieux préalable est
devenu un recours dont l'identification de l'autorité adressataire est
simplifiée. Plusieurs hypothèses permettent de mettre en
évidence cette simplification. Pour mieux comprendre cette question, il
convient d'opérer une distinction entre les principales
hypothèses (Section1) et les autres hypothèses (Section 2).
SECTION-1 : LES PRINCIPALES HYPOTHÈSES
L'identification de l'autorité adressataire du RGP
lorsque l'État est en cause est une évidence qui ressort de
l'article 17 de la loi de 2006 précitée (Paragraphe 1). De
même, il est aisé de reconnaitre le destinataire du RGP dans les
établissements publics (Paragraphe 2).
PARAGRAPHE-1 : L' AUTORITÉ ADRESSATAIRE
DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE AU NIVEAU DE L'ÉTAT
La détermination du destinataire du recours gracieux de
l'État par la loi de 2006 sur les tribunaux administratifs
précitée a été saluée par la
doctrine131. Il était grand temps que le législateur
intervienne pour mettre fin à une situation inconfortable qui n'avait
que trop duré. Une réforme sur l'autorité
compétente pour recevoir le RGP était d'ailleurs «
attendue132 ». Désormais, dans l'État
l'auteur de l'acte querellé (A) est le destinataire du recours gracieux
préalable parce qu'il y a eu abrogation du très
controversé « Ministre compétent »,
adressataire du RGP (B).
A - L'auteur de l'acte querellé, destinataire du
recours gracieux
L'autorité adressataire du recours gracieux
préalable sera désormais avec l'article 17 alinéa premier
de loi de 2006 l'auteur même de l'acte attaqué. La récente
loi est sans équivoque à ce sujet. La formule de «
Ministre compétent » autant « maladroite
» que difficile d'application que l'on retrouvait dans l'ancienne
loi133 est dorénavant exclue du domaine du recours gracieux
préalable au Cameroun. L'article 17 (1) de la loi de 2006 répond
par lui même « aux attentes des justiciables jadis
déroutés par l'imprécision et les difficultés
jurisprudentielles maintes fois dénoncées
134». Si par exemple c'est le Président de la
République qui a pris l'acte querellé on n'aura plus à se
démener pour savoir qui sera dans ces conditions le Ministre
compétent pour recevoir le RGP. Ce sera désormais lui-même
le destinataire du recours gracieux. Il en sera de même si l'acte
incriminé est pris par le Délégué
générale à la sûreté nationale.
131 KEUTCHA TCHAPNGA (C) « La réforme attendue du
contentieux administratif au Cameroun », Juridis Périodique
n° 70, avril-Mai-Juin 2007, pp .24-29, notamment p.28.
132 Ibidem. Voir le titre de l'article, p. 24.
133 Article 12 de l'ordonnance de 1972 précitée.
134 KEUTCHA TCHAPNGA (C), Article précité, p.28 ;
voir aussi KAMTO et NLEP dans leur Ouvrage précité.
Les justiciables vont sûrement grâce à
cette réforme accorder plus de crédibilité au contentieux
administratif. Les administrés seront plus motivés à
défendre leur droits contre l'Administration.
Malgré cette consécration tant attendue de
l'auteur de l'acte querellé comme destinataire de RGP lorsque
l'État est en cause, il peut tout de même se poser le
problème de l'identification dudit auteur. En général, il
est très aisé de déterminer l'auteur d'un acte
administratif quand ledit acte est signé. Dans ce cas, il est tout
à fait clair que l'auteur d'une décision administrative est celui
dont la signature est apposée sur la décision. Sur une
décision révoquant par exemple un militaire du corps de
l'armée, on retrouvera sur ladite décision soit la signature du
Ministre en charge des forces armées, soit la signature du
Président de la République selon que l'un ou l'autre est
compétent.
Il est de jurisprudence constante que la signature est une
mention obligatoire pour la validité des actes administratifs. Elle
permet de reconnaitre l'auteur de l'acte. Elle assure aussi
l'authenticité de l'acte administratif d'où il résulte que
son absence fait de l'acte un faux ou un tract. La Chambre Administrative de la
Cour Suprême a eu à le rappeler.135Une décision
administrative dépourvue de signature est susceptible d'annulation
devant le juge administratif, au même titre qu'un acte administratif pris
par une autorité incompétente.
On dira désormais qu'une barrière au droit
d'accès à la justice administrative est tombée avec la
réforme de 2006. Allusion est faite ici à l'abrogation du terme
très controversé de « Ministre compétent
» de l'ordonnance de 1972 précitée.
135 Jugement n°71/ CS-CA du 28 septembre 2000, NGANG
Anatole. Cité par ABA'A OYONO (J-C), Pratique des contentieux de Droit
public, Cours précité.
B - L'abrogation de l'expression « Ministre
compétent », destinataire du recours gracieux préalable
Jusqu'à l'ordonnance du 26 août 1972, les recours
gracieux préalables ne pouvaient être adressés qu'à
une autorité soit désignée par décret en ce qui
concerne la République fédérale et les États
fédérés, soit statutairement habilitée à
représenter la collectivité publique en cause136. Pour
la République fédérale, les Ministres de l'Administration
territoriale et celui de la fonction publique étaient seuls
habilités à recevoir le recours gracieux. Quant aux recours qui
concernaient les États fédérés, ils devaient
être obligatoirement adressés à leur Premier Ministre
respectif137. On remarque alors que l'instruction du recours
était fortement centralisée, ce qui constituait
déjà un grand problème pour les requérants
excentrés.
Une étude statistique menée à la suite
des recours gracieux adressés au courant des années 1968, 1969 et
1970 aux autorités fédérales faisait apparaître un
pourcentage extrêmement élevé de rejets implicites dont
57,4% en 1968 ; 56,2% en 1969 et 59,2% en 1970138. Il s'agissait
selon le Professeur JACQUOT des rejets forcés pour manque de temps
nécessaire pour les instruire139.
L'ordonnance de 1972/06 entendait mettre un terme à
cette situation. En effet, l'article 12140 disposait que le recours
gracieux est adressé au « Ministre compétent
». Il se déduisait du décret 73/51 du 10 février 1973
relatif à la représentation de l'État en justice qu'il
s'agissait des Chefs de départements ministériels directement
intéressés, c'est-à-dire au Ministre qui assure soit la
responsabilité de l'Administration avec laquelle le requérant est
en litige, soit la
136 Article 17 de la loi du 14 juin1969 qui reprenait sur ce
point les dispositions de l'ordonnance du 4 octobre 1961dont l'article 15,
paragraphe 3.
137 JACQUOT (H), « Le contentieux administratif au
Cameroun », Article précité, p.114.
138 AMBOMO ONANA (A), Le recours gracieux préalable au
Cameroun est-il effacé ? Rapport de Licence, mai 1971.Cité par
JACQUOT (H), Article précité, p.114.
139 JACQUOT (H), Article précité, p.114.
140 « Le recours devant la Cour Suprême n'est
recevable qu'après rejet d'un recours gracieux adressé au
Ministre compétent ou à l'autorité statutairement
habilitée à représenter la collectivité publique ou
l'établissement public en cause ».
tutelle technique des personnes morales de droit public en
cause141 . Dans ce cas, le risque était grand que le Ministre
compétent ne maîtrise pas les contours de la décision
attaquée, ce qui ne pouvait qu'entraîner des rejets implicites. Il
faut relever qu'il s'agissait là du Ministre autorité
administrative et non de la personne du Ministre nommément
désignée ainsi que l'a précisé la Chambre
Administrative de la Cour Suprême dans le jugement n°8/CS-CA/87-88
du 29 octobre 1987, MASSO LOBE Jean Charles142.
Les administrés se perdaient fréquemment en
conjecture lorsqu'il fallait introduire un recours gracieux préalable
auprès de l'Administration. Cela était düà plusieurs
facteurs au rang desquels l'ignorance des requérants, la
complexité
des textes applicables, et l'organisation administrative du
pays143. Cette situation faisait du recours gracieux
préalable avant la réforme du contentieux administratif
intervenue en 2006 un morceau dur à croquer pour les requérants,
ou bien un «un couperet dont les conséquences peuvent
être dommageables aux particuliers victimes144 », ou
encore « un véritable barrage dans la saisine du juge
145». L'institution du recours gracieux a pour ainsi dire
occasionné des égarements tant de la part du juge, de
l'Administration que des requérants. L'inconfort juridique en question
était imputable, entre autres, à l'expression « Ministre
compétent » qu'on retrouvait à l'article 12 de
l'ordonnance du 26 août 1972 précitée. Plus grande devenait
la difficulté lorsque par exemple dans une affaire, plusieurs Ministres
s'avéraient compétents. Le plus dur étant dans ce cas de
déterminer lequel de ces Ministres serait habilité au regard de
l'article 12 de l'ordonnance de 1972 à recevoir le RGP.
Plusieurs affaires peuvent illustrer cette situation. La plus
marquante est le jugement n°24 du 13 juillet 1978 ESSOMBA TONGA Gabriel,
rendu par la
141BIPOUN WOUM (J-M), « La
représentation de l'État en justice au Cameroun », RCD,
Série II, 1984, pp.25-26.Voir aussi KEUTCHA TCHAPNGA (C),
Cours de Licence précité.
142 Voir KAMTO (M), Ouvrage précité, p.40.
143 GUIMDO DONGMO (B-R), « Le droit d'accès
à la juridiction administrative au Cameroun », Article
précité, p.476.
144 Voir NGUELE (M), « La réception des
règles du procès équitable dans le contentieux du
droit», Article précité, p. 33.
145 Voir FANDIP (O), Les juridictions administratives et le
temps; cas du Cameroun et du Gabon, Mémoire de DEA, Université de
Dschang, année académique 2006-2007, p.42.
Chambre Administrative de la Cour Suprême. Dans cette
affaire, le requérant est candidat malheureux au concours d'inspecteur
de la jeunesse et des sports. Indigné par les résultats de ce
concours, il saisit le Ministre de la jeunesse et des sports d'un recours
gracieux en vue de l'annulation des résultats dudit concours.
Déçu par la réponse du Ministre, le plaignant saisit la
Chambre Administrative de la Cour Suprême. Malheureusement, la Cour le
déboute de son recours au motif qu'il devait adresser son recours
gracieux au Ministre de la fonction publique puisque l'organisation du concours
lui revenait146. Ce raisonnement de la juridiction administrative
fit un tollé au sein de la doctrine. Le Professeur Henri JACQUOT par
exemple avait estimé qu'« il aurait peut- être
été plus avisé de décider que pour l' État,
les recours gracieux doivent être adressés soit à
l'autorité qui a pris la décision contestée ou
causé le dommage, soit à son supérieur hiérarchique
».147La loi de 2006 n'est pas loin de cette suggestion.
Cette notion de Ministre compétent recelait
également plusieurs autres imprécisions. Qu'adviendrait-il si la
décision contestée émanait du Président de la
République ou de ses services, ou du Premier Ministre ? Y aurait-il un
« Ministre compétent » ? Naturellement, une
réponse négative s'impose parce que le Président de la
République n'est pas un Chef de département ministériel,
le Premier Ministre ne l'est non plus.
Cette situation contribuait à entraver l'expression du
droit d'accès à la justice administrative au Cameroun parce
qu'elle éloignait les justiciables du prétoire. Le droit
d'accès au juge doit être entendu comme « un droit qui
permet non seulement de saisir effectivement le juge sans entraves
financières ou juridiques excessives, mais encore d'être entendu
par ce juge et obtenir un jugement 148 ». Avant la loi
n°2006/022 précitée, il n'était pas abusif de
relever
146 Voir KAMTO (M), Droit administratif processuel du Cameroun,
Ouvrage précité, pp.144-145.
147 JACQUOT (H), « Le contentieux administratif au
Cameroun » RCD n°8, juillet - décembre 1975, p.114.
148 GARRIDO (L), Le droit d'accès au juge administratif.
Enjeux, progrès et perspectives. Thèse Droit, Université
Montesquieu Bordeaux IV, novembre 2005, p .11.
Voir aussi GREWE (C), (dir), « L'accès au juge,
le droit processuel d'action » in procédure (s) et
effectivité des droits, D'Ambro (D), Benoit Rohmer (F) et GREWE (C),
Bruylan, 2003, p.41.
que le RGP constituait une entrave à la justice
administrative qui est selon les termes du Professeur KAMTO «
l'expression concrète de la protection des citoyens contre les
risques d'arbitraire de l'Administration (...) un moyen de défense de
l'individu contre les abus du pouvoir, non pas en vue de compromettre
l'autorité de celui-ci, mais de lutter contre d'éventuelles
dérives despotiques 149».
Au niveau des établissements publics le statu quo a
été maintenu, étant donné que le texte y relatif
était suffisamment clair et ne nécessitait pas absolument une
réforme.
PARAGRAPHE-2 : L'AUTORITÉ ADRESSATAIRE DU RECOURS
GRACIEUX PRÉALABLE DANS LES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS
Relevons d'entrée de jeu qu'en ce qui concerne les
établissements publics la loi de 2006 s'inscrit dans la ligne
tracée par le législateur de 1972 en ce qui concerne
l'autorité adressataire du RGP. En d'autres termes, la loi
n°2006/022 précitée n'a rien changé, du moins pour ce
qui est de l'autorité adressataire des établissements publics.
Cette réalité découle du fait que, comme par le
passé, le droit positif camerounais fait de l'autorité
statutairement habilitée à représenter
l'établissement public en litige la personne compétente pour
recevoir le recours
Voir également, FRISSON ROCHE (M.A), « Le
droit d'accès à la justice et au droit »,
Libertés et droits fondamentaux ,12ème Ed, sous la
direction de CABRILLAC (R), FRISSON-ROCHE (M.A), th. Revet, Paris, Dalloz, 2006
p.451 et BANDRAC (M), « L'action en justice, droit fondamental
», Mélanges Perrot .Dalloz, Paris, 1995, p.1. Cités par
GUIMDO DONGMO (B-R), « Le droit d'accès à la juridiction
administrative au Cameroun. », Article précité,
p.454.
Voir dans le même sens, L'accès à la
justice : un droit fondamental /le point de vue de l'avocat,
Conférence « Vers un meilleur accès des citoyens
à la justice »Bruxelles, 24-26 octobre 2002, Intervention de
KARINE (M), Avocat, Conseil des Barreaux de l'Union européenne (CCBE)
(fichier PDF).
149 KAMTO (M), Ouvrage précité, p.7.
gracieux préalable (B). Encore est-t-il que le
requérant doit pouvoir identifier cette autorité (C). Mais avant
cela, nous ferrons une présentation des établissements publics au
Cameroun (A).
A- Présentation des établissements
publics
Les établissements publics sont régis au
Cameroun actuellement par la loi n° 99/016 du 22 décembre 1999
portant statut général des établissements publics et des
entreprises du secteur public et parapublic. Cette loi en son article 2
alinéa 3 définit un établissement public
administratif150 comme une « personne morale de droit
public, dotée de l'autonomie financière et de la
personnalité juridique ayant reçu de l'État ou d'une
collectivité territoriale décentralisée un patrimoine
d'affectation, en vue de réaliser une mission d'intérêt
général ou d'assurer une obligation de service public
».
Pour Jacques MOREAU, l'établissement public peut
être identifié par la réunion de trois
éléments : c'est d'abord une personne morale administrative,
ensuite c'est un organisme qui gère un ou plusieurs services publics
complémentaires et soumis à la règle de la
spécialité. Enfin, l'établissement public est
rattaché par divers liens à l'État ou aux
collectivités publiques locales151.
Le contrôle de l'État sur les
établissements publics revêt la forme de la tutelle.
D'après la loi de 1999 précitée, la tutelle est le «
pouvoir dont dispose l'État pour définir et orienter la
politique du Gouvernement dans le secteur où évolue
l'établissement public administratif ou l'entreprise du secteur public
ou parapublic en vue de la sauvegarde de l'intérêt
général. Elle s'exerce sur le plan
150 Les services publics industriels et commerciaux ainsi que
les sociétés parapubliques et les sociétés
d'économie mixte ne sont pas des établissements publics au sens
de l'article 17 de la loi de 2006 précitée, et par
conséquent ne requièrent pas application des règles
relatives au RGP. Ils sont justiciables du juge judiciaire. Voir en ce sens
jugement n°159/2004-2005/ CS-CA du 27 juillet 2005, Dame AGNOUNG MOUTE
Bernadette c/Cameroon Telecommunication (CAMTEL). Voir aussi arrêt
n°6/A/ CS-AP du 09 janvier 1975, CDC c/SOCOPAO (Publié par MBOUYOM
(F-X), Recueil des grands arrêts de la Jurisprudence Administrative de la
Cour Suprême du Cameroun, 1970-1975, T.2, Ed KENKOSON, Yaoundé,
pp.144-145.
151 MOREAU (J), Droit administratif, Ouvrage
précité, pp.82 et ss.
technique et sur le plan financier par un
département ministériel ou par toute autre Administration ou
organe désigné dans les statuts ».
Les Universités d'État sont des prototypes
d'établissements publics. L'Agence de Régulation des
Marchés Publics est aux termes de l'article 2 alinéa 1 de la loi
n°2001/048 du 23 février 2001 portant création, organisation
et fonctionnement de l'Agence de Régulation des Marchés Publics
un établissement public administratif doté de la
personnalité juridique et de l'autonomie financière. Elle est
placée sous la tutelle de la Présidence de la
République.
Quant au destinataire du RGP lorsqu'un établissement
public est en cause, cette prérogative est reconnue à
l'autorité statutairement habilitée à représenter
l'établissement en cause.
B - L'autorité statutairement habilitée
à représenter l'établissement public en cause
« Le recours devant le tribunal administratif n'est
recevable qu'après rejet d'un recours gracieux adressé à
l'autorité auteur de l'acte attaqué ou à celle
statutairement habilitée à représenter la
collectivité ou l'établissement public en cause »
(Article 17 alinéa 1 de la loi de 2006 précitée).
La formulation de cet article ainsi que celle de l'article 12
de l'ordonnance de 1972 abrogée sont sans équivoque à
propos de la personne habilitée à recevoir le RGP des
établissements publics.
« En tant que personne morale, l'État ne peut
intervenir dans une instance judiciaire que par l'intermédiaire de
personnes physiques agissant ou répondant en son nom. Il en va de
même pour certains services publics nationaux qui, tout
en disposant d'une Administration et des moyens
administratifs propres ne sont cependant pas dotés d'une
personnalité juridique distincte de celle de
l'État152 ».
L'article 17 de la loi de 2006 ne saurait faire l'objet d'une
interprétation hasardeuse en ce qui concerne le destinataire du RGP dans
un établissement public. La règle du RGP est incontournable sauf
exception. Il va de soi que « l'exercice d'une tutelle administrative
ne semble pas modifier cette règle fondamentale
153».
Le mauvais souvenir laissé par le juge de
l'Assemblée Plénière de la Cour Suprême dans
l'arrêt GUIFFO Jean-Philippe rendu en 1985154 ne saurait
hanter la jurisprudence administrative camerounaise de nos jours. Le juge avait
fait une interprétation atypique155 de l'article 12 de
l'ordonnance de 1972 en admettant que le Ministre de l'éducation
nationale était statutairement habilité à recevoir le RGP
dans une affaire mettant en cause l'Université de Yaoundé.
Cette jurisprudence ne saurait prospérer dans la
jurisprudence camerounaise. Il va de soi qu'en application de l'article 17 de
la loi de 2006 précité, l'auteur de l'acte querellé peut
être en même temps la personne habilitée à
représenter l'établissement public en cause.
L'affaire GUIFFO Jean-Philippe ressemble à certains
égards à l'affaire SOBGUI Gabriel Alexis c/ État du
Cameroun (Ministère de l'enseignement supérieur, de
l'informatique et de la recherche scientifique (MESIRES) et Université
de Yaoundé. Cette affaire est objet du jugement n°106/02-03
/CS-CA
152 BIPOUN WOUM (J-M), « La représentation de
l'État en justice au Cameroun », Article
précité, p.21.
153 OWONA (J), Droit administratif spécial de la
République du Cameroun, Ouvrage précité, p.207.
154 Arrêt n°16/A / CS-AP du 13 juin 1985, GUIFFO
Jean-Philippe c/ État du Cameroun, arrêt infirmatif du jugement
n°40/CS-CA/80-81 du 30 avril 1981, GUIFFO Jean -Philippe c/ État du
Cameroun rendu par la Chambre Administrative. (Voir KAMTO (M), Droit
administratif processuel de la République du Cameroun, Ouvrage
précité, pp.149 et ss.
155À Propos de l'interprétation voir COHENDET
(A-M), Ouvrage précité, pp.23-28. L'interprétation faite
par la juridiction administrative était nous semble -t-il ni
séméiotique, c'est-à-dire basée sur le langage dans
lequel est exprimé le texte, ni téléologique ou finaliste
c'est-à-dire en fonction de l'objectif visé par la
création de ce texte. Cette interprétation était encore
moins systémique. Autrement dit, elle ne prenait pas en
considération d'autres articles ou éventuellement d'autres
règles de droit pour qu'ils s'éclairent les uns les autres.
Même fonctionnelle-basée sur l'objectivité-, elle ne
l'était pas.
du 27 août 2003156. SOBGUI Gabriel Alexis est
enseignant au même titre que GUIFFO Jean-Philippe. Cependant, le
dénominateur commun entre ces deux affaires réside moins sur cet
aspect fonctionnel que sur le plan processuel. Bien plus, on observe une nuance
bien qu'elle soit légère au niveau de cette dernière
affaire. Les faits de ce jugement se présentent en ces termes.
Sieur SOBGUI Gabriel Alexis en litige avec l'Université
de Yaoundé adresse un recours gracieux préalable au Ministre de
l'enseignement supérieur, de l'informatique et de la recherche
scientifique en date du 13 novembre 1990. La Chambre Administrative
déclare son recours mal dirigé et rejette en conséquence
son recours contentieux, motif pris de ce que le RGP du requérant
était adressé au Ministre de l'enseignement supérieur, de
l'informatique et de la recherche scientifique et non au Chancelier
d'Université. En clair, dans cette décision telle que
rapportée par M. SIETCHOUA Célestin, la Haute juridiction
déclare :
« Attendu cependant que depuis le décret
n°73/477du 27 août 1973, l'Université de Yaoundé est
placée sous l'autorité d'un Chancelier qui, aux termes de
l'article 23 dudit décret est sans nul doute l'autorité
habilitée à recevoir le recours gracieux lorsque
l'Université est mise en cause, encore qu'il est constant qu'elle est
devenue un établissement public doté de la personnalité
juridique autonome ».
Par ce raisonnement, le juge de la Chambre Administrative
prenait à contre pied son prédécesseur qui, quelques
années plutôt, dans l'espèce GUIFFO Jean-Philippe
précitée avait fait droit à un recours gracieux
préalable adressé au Ministre de l'éducation nationale au
lieu du Chancelier d'Université.
La réforme de 2006 somme toute fondamentale ne doit pas
être considérée comme une fin en soi pour le recours
gracieux préalable au Cameroun, étant donné que la
nécessité d'une protection plus accrue des justiciables face
à une puissante Administration est toujours d'actualité. C'est
pour cela qu'il est
156 Pour une présentation de cette affaire, voir
SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), Revue de Jurisprudence de la Cour
Suprême-Chambre Administrative, Juridis Périodique n°77,
janvier-février-mars 2007, pp.56-57.
toujours important que les textes déterminent clairement
les autorités habilitées à représenter
l'établissement en cause.
C - La détermination de l'autorité
statutairement habiitée à
représenter l'établissement public en
cause
La détermination de l'autorité statutairement
habilitée à représenter l'établissement public en
cause est relativement aisée. Le plus souvent, les textes qui
régissent l'établissement public en cause désignent
formellement la personne qui pourrait éventuellement le
représenter en justice en cas de litige. Dans la plupart des cas, c'est
le Chef de l'établissement public pour ne pas dire celui qui se trouve
à la tête de cet établissement qui est l'autorité
adressataire du recours gracieux préalable. Il est vrai que ce dernier
peut déléguer ce pouvoir à une autre personne disposant
comme lui d'une autorité légitime dans l'établissement
à représenter. Le Professeur BIPOUN WOUM écrivait
d'ailleurs qu' « une personne publique, l'État par exemple ne
peut être représenté que par un individu ou un groupe
d'individus ayant la qualité d'autorité administrative
157».
Il peut arriver que le droit applicable à certains
établissements publics fasse l'objet d'une interprétation
problématique par les différents protagonistes. Ainsi, on peut
constater dans l'arrêt de l'Assemblée Plénière
GUIFFO Jean-Philippe précitée158, que le
requérant par ailleurs enseignant de droit et le juge se sont
mépris sur l'interprétation du décret n°73/477du 27
août 1973 qui plaçait l'ancienne Université de
Yaoundé sous l'autorité d'un Chancelier distinct du Ministre de
l'éducation nationale. Cette méprise tenait au fait d'estimer que
le Ministre en charge de l'éducation nationale fût
compétent en tant qu'autorité adressataire du recours gracieux
préalable. M. SIETCHOUA DJUITCHOKO Célestin dira plus tard que
cet arrêt opérait une rupture surprenante d'avec
157 BIPOUN WOUM (J-M), « La représentation de
l'État en justice au Cameroun », Article
précité, p.42.
158 Arrêt n°16/A/CS-AP du 13 juin 1985 GUIFFO
Jean-Philippe c/ État du Cameroun précité.
certaines règles les plus solidement établies en
matière de recours gracieux préalable159.
Avec la réforme universitaire au Cameroun intervenue en
1993 portée par le décret n°93/027 du 19 janvier 1993 fixant
les dispositions applicables aux Universités, le Recteur
d'Université est l'autorité statutairement habilitée
à représenter cet établissement public en justice, et donc
compétent pour recevoir le RGP (article 31 in fine).
En définitive, il faut se référer aux
textes qui régissent un établissement public donné pour
savoir qui est l'autorité adressataire du recours gracieux
préalable dans cet établissement.
Certaines hypothèses sont aussi envisageables dans le
cadre de la détermination du destinataire du recours gracieux
préalable.
SECTION - 2 : LES AUTRES HYPOTHÈSES
L'examen le plus complet de la question de l'autorité
adressataire du recours gracieux nous impose sans doute d'évoquer aussi
la situation des contentieux mettant en cause les collectivités
territoriales décentralisées (Paragraphe 1). Ensuite, nous
analyserons le recours gracieux préalable dans l'administration fiscale
(paragraphe 2) et enfin, nous traiterons de l'opportunité de la
prescription d'une obligation de transmettre le recours gracieux en cas
d'erreur du requérant (paragraphe 3).
159 SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), Note sous arrêt
n°01/A/CS-AP du 25 février 1999 précité, GUIFFO
Jean-Philippe c/ État du Cameroun du 25 février 1999, Juridis
Périodique n°65, Janvier- février- mars 2006, p.40.
PARAGRAPHE -1 : L'AUTORITÉ ADRESSATAIRE DU
RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE À L'ÉCHELON
DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DÉCENTRALISÉES
Le contentieux des collectivités territoriales
décentralisées au Cameroun est désormais un contentieux
ordinaire. Avec les avancées considérables du processus de
décentralisation au Cameroun, on a vu apparaitre de nouvelles
règles applicables dans les contentieux impliquant les
collectivités territoriales décentralisées. Ces
règles ont apporté des innovations au niveau du RGP des
collectivités territoriales décentralisées.
Tel n'était pas le cas avant l'intervention des lois de
2004 sur la décentralisation au Cameroun. L'entrée en vigueur de
ces lois a simplifié la phase précontentieuse des litiges
impliquant les collectivités territoriales. On retient que
désormais, la détermination du destinataire du RGP se fera sur la
base des règles ordinaires du contentieux administratif (A) et le
recours de tutelle jadis accessoire au recours gracieux préalable a
été supprimé (B).
A - L'application des règles ordinaires du
contentieux administratif
Désormais, avec l'entrée en vigueur des lois de
2004 sur la décentralisation160 , les textes sont
désormais clairs en ce qui concerne la phase précontentieuse des
litiges impliquant les collectivités territoriales
décentralisées au Cameroun. L'article 49 alinéa 1 de la
loi d'orientation de la décentralisation précise que le Maire ou
le Président du Conseil régional représente la
collectivité territoriale en justice. Déjà, l'article 10
de la loi de 1974 portant organisation communale faisait du Maire le
représentant de la Commune dans tous les actes de la vie civile,
notamment la représentation en justice. Cette loi conférait les
mêmes pouvoirs au Délégué du gouvernement
auprès de la Communauté urbaine. Cette compétence leur
sera également reconnue par la loi n° 015 du 15 juillet 1987 sur
les Communautés urbaines. De son côté, l'article 51 de la
loi
160 Loi n°2004/017 du 22 juillet 2004 d'orientation de la
décentralisation ; loi n°2004 /018 du 22 juillet 2004 fixant les
règles applicables aux Communes ; loi n°2004 /019 du 22 juillet
2004 fixant les règles applicables aux Régions.
n°2004/017 du 22 juillet 2004 d'orientation de la
décentralisation précitée, expose clairement que «
les recours dirigés contre les collectivités territoriales
obéissent aux règles du contentieux administratif, ou du
contentieux de droit commun selon le cas ».
Les règles du contentieux administratif auxquelles
renvoie cette disposition, plus particulièrement dans le cadre du
recours gracieux préalable, ne sont ni plus ni moins que celles
prévues à l'article 17 de la loi de 2006 précitée.
Il s'agit en bref de toutes les règles relatives au RGP, que ce soit en
matière ordinaire ou en matière d'urgence, sans oublier les
textes portant dérogations à la règle du recours gracieux
préalable. Cette loi, somme toute révolutionnaire, vient
élucider un aspect du contentieux administratif camerounais qui
n'était pas des moindres dans l'égarement des justiciables.
Autrement dit, le contentieux des collectivités territoriales
contribuait avant les lois de 2004 sur la décentralisation à
faire du contentieux administratif au Cameroun un contentieux mal
connu161.
La notion de représentation n'est pas une inconnue en
droit. On en parle en droit public et même davantage en droit
privé. Cependant, son usage dans l'un ou l'autre branche du droit ne
revêt pas la même signification, loin s'en faut. Dans la
compréhension de la notion de représentation, les juristes font
recours à celle de mandat entendu comme l'acte par lequel une personne
appelée mandataire est chargée de représenter une autre,
le mandant pour l'accomplissement d'un ou de plusieurs actes juridiques. Cette
définition aux relents conventionnels sied plus au droit privé et
ne donne lieu qu'à quelques rares applications en droit public, que ce
soit en droit administratif162 comme en droit constitutionnel. On ne
saurait concevoir le mandat d'un élu de la nation dans un tel
contexte.
Le Professeur Joseph-Marie BIPOUN WOUM dira à cet effet
que « les règles de droit constitutionnel propres au
mécanisme de la représentation
161 Voir NLEP (R .G), Note sous jugement n°58 / CS-CA du 29
juin 1989, Société RAZEL Cameroun c/ État du Cameroun et
Commune rurale de Tiko, RJA, n°1, 1991, pp. 89-92.
162COUDEVILLE (A), « La notion de mandat en
droit administratif », AJDA, 1979, n°9, p.10 .Cité par
LIMBOUYE YEM (C), Article précité, p.3.
politique s'avèrent immédiatement d'une
utilité très secondaire dans le cas présent : l'exercice
de la souveraineté au non du peuple et la gestion administrative de l'
État ne se rencontrent pratiquement guère et on conçoit
difficilement un député à l'Assemblée nationale ou
le Président de la République dans l'habit d'un défenseur
de la cause de l' État devant les tribunaux163
».
Les mandats électifs sont dépourvus de lien de
subordination entre le mandant, le peuple et le mandataire qui est
l'élu. Autrement dit, c'est un mandat indépendant qui ne peut
être sanctionné qu'à la faveur de la prochaine
élection. C'est le contraire en droit privé où le
représenté garde la possibilité d'intervenir
lui-même afin de « corriger dans le sens de ses
intérêts d'éventuelles carences du représentant
». 164
En droit public, l'utilisation du terme mandat se fait dans un
cadre très spécifique. Ce cadre est celui du mandat
électif. On peut parler par exemple de mandat parlementaire ou de mandat
municipal. Pour ce qui est de la représentativité des
collectivités locales, il serait désormais question de «
mandat régional », de mandat communal et aussi celui que
détient le Délégué du gouvernement. Le recours
gracieux préalable destiné à une Commune est
adressé au Maire, celui de la Région au Président du
Conseil régional, et enfin celui de la Communauté urbaine au
Délégué du gouvernement auprès de la
Communauté urbaine. Ces collectivités sont toujours
représentées parce que ce ne sont pas des personnes physiques. De
ce fait, ils n'existent que par l'intermédiaire des personnes qui les
constituent, et pour parler comme le Professeur Léon DUGUIT, on ne peut
pas dîner avec une collectivité publique locale puisque c'est une
personne morale.
Un autre problème, celui de l'obligation de saisir
l'autorité de tutelle en cas d'insuccès du recours gracieux
préalable a été résolu par la réforme de
2004.
163 BIPOUN WOUM (J-M), « La représentation de
l'État en justice au Cameroun », Article
précité, p.22.
164 Ibidem.
B- La suppression du recours de tutelle accessoire au
recours gracieux préalable
Avant les lois de 2004, il n'était pas du tout facile
pour le requérant de poursuivre une collectivité publique en
justice. Le véritable obstacle sur lequel les requérants
buttaient se trouvait au niveau du RGP et consistait dans le fait que ces
derniers avaient à former un recours gracieux préalable
doublé d'un recours de tutelle. On pourrait même estimer à
tort ou à raison qu'il s'agissait d'un double recours gracieux. Cette
situation résultait de ce qu'après échec du RGP, le
requérant devait non pas directement saisir la juridiction
administrative, mais s'adresser à l'autorité de tutelle par le
truchement d'un recours de tutelle. La décision du Maire sur le recours
gracieux était donc insuffisante pour lier le contentieux.
L'article 73 de la loi de 1974 sur l'organisation communale
précité dispose à cet effet que « les actes du
Maire...peuvent être l'objet d'un recours gracieux auprès de leur
auteur. En cas d'insuccès, ils sont soumis à
l'appréciation de l'autorité de tutelle ; les délais du
recours contentieux ne courant qu'à partir de la date de saisine de
cette autorité ».
Plus significativement, l'article 56 de la loi de 1987 sur les
Communautés urbaines précitée dispose qu' «
aucune action contre la Communauté urbaine n'est recevable si le
demandeur n'a pas préalablement adressé à
l'autorité de tutelle une requête exposant l'objet et les motifs
de sa réclamation dans les délais prévus par la
législation en matière de contentieux administratif
».
L'article 31 du décret n°77/91 du 25 mars 1977qui
déterminait les pouvoirs de tutelle sur les Communes, les syndicats de
Communes et établissements communaux était encore plus explicite
quand il énonçait que « les actes du
Délégué du Gouvernement, du Maire ou de l'administrateur
municipal peuvent faire l'objet d'un recours gracieux auprès de leur
auteur. En cas d'insuccès ou si le magistrat municipal garde le silence,
pendant un mois, ils sont soumis à l'appréciation du
Préfet qui dispose de deux mois pour y donner avis. Le silence
gardé par le Préfet vaut décision
implicite de rejet. En cas de recours contentieux les délais courent
à partir de la date de notification du rejet explicite ou à
partir de la date de rejet implicite165 ».
Ces dispositions témoignent à suffisance de la
situation dans laquelle se trouvait le justiciable, quand il avait à
exercer un recours en justice contre une collectivité publique.
Certaines décisions de justice corroborent cette tendance.
Le jugement n°58/CS-CA du 29 juin 1989,
Société RAZEL Cameroun c/ État du Cameroun et Commune
rurale de Tiko traite de cette complexité jadis décelée en
son temps par NLEP Roger Gabriel.
En effet, à la suite d'une délibération
du Conseil municipal de la Commune rurale de Tiko prise en date des 27 et 28
janvier 1984, il est institué une taxe sur le transport des pierres dans
le ressort de la Commune. La Société RAZEL qui a pour
activité principale la construction et l'entretien des routes, et donc
inévitablement utilise les pierres comme matériaux, se trouve
dans la posture d'un transporteur occasionnel de pierres, est imposée
à la taxe instituée par délibération municipale
à la suite d'un commandement du receveur municipal. Insatisfaite de
cette mesure, la Société RAZEL saisit le Ministre de
l'Administration Territoriale d'un recours gracieux préalable aux fins
d'annulation de cette taxe. Le Ministre ne fit pas droit à sa demande,
la contraignant à se porter à la Chambre Administrative de la
Cour Suprême. Cette fois, la juridiction administrative déclare
son recours irrecevable, le RGP ayant été mal dirigé. On
peut d'ailleurs lire en substance dans ce jugement ce qui suit :
« Attendu que dans le cas d'espèce la
Société requérante devait adresser son recours gracieux au
Maire de la Commune de Tiko, statutairement
165 Voir jugement n°90/2008/CS-CA du 13 août 2008,
KWANYA NGANGWA André Richard c/ État du Cameroun
(Communauté Urbaine de Douala). La cour affirme :
« Attendu en l'espèce que si le
requérant a adressé un recours gracieux au
Délégué du Gouvernement de la Communauté Urbaine de
Douala conformément à la loi, aucune requête n'a
été adressée à l'autorité de tutelle de
ladite Communauté Urbaine, en l'occurrence le préfet
».
Ce recours avait sûrement été introduit avant
l'intervention des lois de 2004 sur la décentralisation
précitée, car le juge de l'espèce faisait encore
application de l'ordonnance n°72/06 abrogée.
compétent pour recevoir le recours gracieux et
représenter sa collectivité en justice.
Que pour avoir adressé sa requête du 2
janvier 1985 au Ministre de l'Administration Territoriale, la
société requérante n'a pas satisfait au voeu de la
loi166 ».
Si tant était que le Maire de la Commune poursuivie
était le destinataire du recours gracieux préalable, il n'en
demeure pas moins vrai que contre sa décision, la société
RAZEL devait diriger sa réclamation vers l'autorité de tutelle,
encore qu'elle n'a jamais saisi le Maire. M. KAMDEM Jean Claude nous rappelle
d'ailleurs que « le Maire seul a qualité pour agir à la
place et au nom de la Commune 167». L'affaire Les
brasseries du Cameroun S.A, objet du jugement n°6 /CS-CA du 29 novembre
1979 ainsi que l'affaire Entreprise de Travaux à Hydraulique et de
Génie Civil (ETHYGEC) c/Communauté urbaine de Yaoundé
s'inscrivent dans le même registre 168. Tout se passait comme
si la collectivité territoriale était un vrai «
incapable169 », insusceptible même de se
défendre seule.
Fort heureusement, les lois de 2004 sur la
décentralisation qui ont d'ailleurs abrogé les anciens textes sur
l'organisation communale170 opèrent une réelle
évolution en la matière. À proprement parler, cette
évolution tient au fait que ces lois ne font aucunement mention d'un
recours de tutelle obligatoire et accessoire au recours gracieux
préalable. C'est dire que désormais et à l'issue du RGP,
le recourant pourra saisir directement la juridiction administrative sans
166 NLEP (R.G), Note précitée, pp.86-92.
167KAMDEM (J.C), « L'intérêt et
la qualité dans la procédure administrative contentieuse
», Article précité, p.66.
168 Jugement n°66/2008/ CS-CA du 18 juin 2008 (recours de
90), Entreprise de Travaux à Hydraulique et de Génie Civil
(ETHYGEC) c/Communauté urbaine de Yaoundé. Dans ce jugement, la
Cour déclare :
« Qu'ainsi, tout recours gracieux dirigé
contre un acte du Délégué du gouvernement et qui est
adressé à une autorité autre que ledit
Délégué en premier lieu, puis au Préfet
compétent en cas d'insuccès, est mal dirigé et entraine
l'irrecevabilité du recours contentieux dont il sert de support
».
En l'espèce le requérant avait cru à tort
que le recours gracieux préalable adressé au
Délégué du gouvernement était suffisant pour saisir
le juge. Par conséquent, le juge déclare son recours contentieux
irrecevable parce que le recours gracieux préalable était mal
dirigé.
169 MOMO (B), « Réflexion sur le
système communal camerounais : contribution à l'étude de
la décentralisation territoriale au Cameroun », Juridis Info
n°24, octobre - novembre -Décembre 1995, pp.81-92, notamment
p.87.
170 Voir notamment l'article 88 de la loi n° 2004/017
précitée.
avoir à passer par le Préfet ou le Gouverneur
selon que l'action est intentée respectivement contre la Commune ou la
Communauté urbaine et la Région.
Pour s'en convaincre, il faut se référer
à l'article 74 de la loi n°2004/017 du 22 juillet 2004
d'orientation de la décentralisation précitée selon lequel
« Toute personne physique ou morale justifiant d'un
intérêt pour agir peut contester, devant le juge administratif
compétent, un acte visé aux articles 68,69 et 70171,
suivant les modalités prévues par la législation
régissant la procédure contentieuse, à compter de la date
à laquelle l'acte incriminé est devenu exécutoire
» .
171 Article 68 (1) : « Les actes pris par les
collectivités territoriales sont transmis au représentant de
l'État auprès de la collectivité territoriale
concernée, lequel en délivre aussitôt accusé de
réception.
(2) la preuve de la réception des actes par le
représentant de l'État visé à l'alinéa (1)
peut être apportée par tout moyen.
(3)Les actes visés à l'alinéa (1)
sont exécutoires de plein droit quinze (15) jours après la
délivrance de l'accusé de réception, et après leur
publication ou leur notification aux intéressés .Ce délai
de quinze (15) jours peut être réduit par le représentant
de l'État.
(4)Nonobstant les dispositions des alinéas (1) et
(2), le représentant de l'État peut, dans le délai de
quinze (15) jours à compter de la date de réception, demander une
seconde lecture de (s) (l') acte (s) concerné(s). La demande
correspondant revêt un caractère suspensif, aussi bien pour
l'exécution de l'acte que pour la computation des délais
applicables en cas de procédure contentieuse, conformément
à la législation en vigueur ».
Article 69- : « Les décisions
réglementaires et individuelles prises par le président du
Conseil municipal ou le Maire dans le cadre de leur pouvoir de police, les
actes de gestion quotidienne sont exécutoires de plein droit dès
qu'il est procédé à leur publication ou notification aux
intéressés. Ces décisions font l'objet de transmission au
représentant de l'État ».
Article 70 - (1) : « Par dérogation aux
dispositions des articles 68 et 69, demeurent soumis à l'approbation
préalable du représentant de l'État, les actes pris dans
les domaines suivants, outre des dispositions spécifiques de la
présente loi :
-les budgets initiaux, annexes, les comptes hors budget et
les autorisations spéciales de dépenses ; -les emprunts et
garanties d'emprunts ;
-les conventions de coopération internationale
;
-les affaires domaniales ;
-les garanties et prises de participation ;
-les conventions relatives à l'exécution et au
contrôle des marchés publics, sous réserve des seuils de
compétence prévus par la réglementation en vigueur
;
-les délégations de service public
au-delà du mandat en cours du Conseil municipal ;
- les recrutements de certains personnels suivant les
modalités fixées par voie réglementaire ».
(2) : « Les plans régionaux et communaux de
développement et les plans régionaux d'aménagement du
territoire sont élaborés en tenant compte, autant que possible,
des plans de développement et d'aménagement nationaux.
Ils sont en conséquence, soumis préalablement
à leur adoption au représentant de l'État ».
(3) : « Les délibérations et
décisions prises en application des dispositions de l'alinéa (1)
sont transmises au représentant de l'État, suivant les
modalités prévues à l'article 68 (1). L'approbation dudit
représentant est réputée tacite lorsqu'elle n'a pas
été notifiée à la collectivité territoriale
concernée, dans un délai maximal de trente (30) jours à
compter de la date de l'accusé de réception, par tout moyen
laissant trace écrite ».
(4) : « Le délai prévu à
l'alinéa (3) peut être réduit par le représentant de
l'État, à la demande du Président du Conseil municipal ou
du Maire. Cette demande revêt un caractère suspensif, aussi bien
pour l'exécution de l'acte que pour la computation des délais
applicables en cas de procédure contentieuse, conformément
à la réglementation en vigueur ».
Les actes auxquels renvoient ces articles peuvent, être
selon le cas, les actes réglementaires ou les actes individuels. En fin
de compte, on constate que le relâchement de la tutelle étatique
sur les collectivités territoriales a eu une influence positive sur le
précontentieux des collectivités territoriales
décentralisées.
Un autre domaine dans lequel le précontentieux a eu du mal
à s'asseoir est le contentieux fiscal sur lequel il convient de se
pencher avec quelque attention.
PARAGRAPHE-2 : LA DÉTERMINATION DE L'AUTORITÉ
ADRESSATAIRE DU RECOURS GRACIEUX DANS LE CONTENTIEUX FISCAL
La détermination de l'autorité destinataire du
recours gracieux dans le contentieux fiscal n'a pas subi une évolution
significative dans la législation fiscale au Cameroun. Le Code
Général des Impôts de 2008 qui nous sert de base de travail
n'a rien apporté de spécial dans la situation qui
prévalait depuis 1972. Deux constances se dégagent de l'examen
des textes et de la jurisprudence en matière fiscale, à savoir
d'une part que le Ministre des finances est toujours le destinataire du recours
gracieux préalable (A), d'autre part que le recours gracieux n'est pas
exigé en cas de demande de sursis de paiement (B).
A- Le Ministre des finances, destinataire du recours
gracieux
L'Administration fiscale camerounaise fait face au quotidien
aux réclamations multiples de la part des contribuables qui
espèrent à tort ou à raison bénéficier d'une
déduction d'imposition. Le recours gracieux préalable est
l'occasion par excellence pour cette Administration de décongestionner
le prétoire administratif. Le contentieux fiscal est un autre
casse-tête ou pour mieux
dire un terrain glissant172 et redoutable du
contentieux administratif. La situation est d'autant plus aggravée que
les contribuables sont pour la plupart réfractaires à
l'égard du fisc.
L'article 418 du Code Général des Impôts de
2008 dispose :
« Avant d'introduire une instance contre
l'Administration tout redevable doit au préalable adresser une
requête au Ministre dont relève la Direction des Impôts aux
fins de savoir quelle suite peut être donnée à sa
déclaration. À défaut de répondre dans les quatre
mois qui suivent ou en cas de réponse défavorable, le redevable
pourra assigner valablement l'État en justice ».
Pour se rendre compte du fait qu'il s'agit là
effectivement du recours gracieux préalable, il faut se
référer aux articles L 118173 et L 119 du CGI de 2008
et plus précisément l'article L 119 qui reconnait sans
ambigüité que « la réclamation
présentée au Ministre [...] tient lieu de recours gracieux
préalable ». Selon cette disposition, la réclamation
doit, à peine d'irrecevabilité, remplir les conditions ci-dessous
:
- être signée du réclamant ;
- être timbrée ;
- être présentée dans un délai de deux
mois à compter de la date de notification de la décision du
Directeur Général des Impôts ;
- mentionner la nature de l'impôt, l'exercice
d'émission, le numéro de l'article de l'avis de mise en
recouvrement et le lieu d'imposition ;
- contenir l'exposé sommaire des moyens et les conclusions
de la partie;
- être appuyée de justificatifs de paiement de la
partie non contestée de l'impôt et de 10 % supplémentaires
de la partie contestée.
172 Voir dans ce sens jugement n°32/87/88/ CS-CA du 26
novembre 1987, affaire KEMAYOU Pierre c/ État du Cameroun avec
observations faites de BOUENDEU (J-D), Juridis info n°2, avril -Mai -Juin
1990, p.53.
173 Article L 118 du Code Général des
Impôts de 2008 : « Lorsque la décision du Directeur
Général des Impôts ne donne pas satisfaction au demandeur,
celui-ci doit adresser sa réclamation au Ministre chargé des
Finances dans les conditions fixées à l'article L 119 (nouveau)
ci-dessous. Lorsque les arguments du contribuable sont reconnus, le
dégrèvement est prononcé par le Ministre chargé des
Finances au-dessus de cent millions (100.000.000 F CFA) de francs [...] ».
Voir également DOMLASSAK (K.P), « Le contentieux fiscal :
procédure normalisée », Juridis info n°7, juillet
-août-septembre 1991, pp.49-51.
Il est donc clair qu'en contentieux fiscal, seul la
décision du Ministre en charge des finances est susceptible de lier le
contentieux, et non celle du Directeur Général des impôts
et encore moins celle du Chef de Centre principal des impôts. On pouvait
déjà relever dans un jugement de la Chambre Administrative rendu
en 2003 :
« Lorsque la décision du Directeur des
impôts ne donne pas entièrement satisfaction au réclamant,
celui-ci doit adresser sa réclamation au Ministre des finances. La
réclamation ainsi présentée doit pour être recevable
remplir les conditions suivantes ;...être présentée dans un
délai d'un mois à partir de la notification de la décision
du Directeur des impôts, ou dans les soixante jours de la date de mise au
recouvrement du rôle ou de la connaissance certaine de
l'imposition» 174.
Autrement dit, une décision émanant du Directeur
Général des Impôts ou du Chef de Centre principal des
impôts ne saurait tenir lieu de recours gracieux, au point de justifier
un recours devant la juridiction administrative.
On peut se poser des questions sur la nature du recours
dirigé contre la décision du Chef de Centre principal des
impôts ou le responsable de la structure chargée de la gestion des
« grandes entreprises ». S'agit-il d'un
précédent recours gracieux préalable ? Sûrement pas,
puisque comme nous l'avons mentionné plutôt, en nous appuyant sur
le CGI de 2008, c'est la réclamation présentée au Ministre
qui tient lieu de recours gracieux préalable.
Mais, s'agit -il alors d'un recours hiérarchique ? On
peut le penser, étant donné que le Directeur
Général des impôts est le supérieur
hiérarchique du Chef de Centre principal des impôts.
Quant au caractère de ce recours vraisemblablement
hiérarchique, il ne fait pas de doute qu'il a un caractère
obligatoire. Nous sommes confortés dans cette
174 Code Général des Impôts issu de la loi
des finances de l'exercice 1979-1980, Voir jugement n°128/02-03/ CS-CA du
24 septembre 2003, Me N'DENGUE Thomas Byll c/ État du Cameroun (MINFIB),
jugement précité.
position par l'article L 117 qui utilise le verbe «
devoir », lequel ne traduit rien d'autre qu'une
obligation175.
Le justiciable peut donc logiquement, en ce qui concerne le
contentieux fiscal, se trouver dans une situation où il devra
inéluctablement former deux recours administratifs à savoir le
recours gracieux préalable et le recours hiérarchique. De telles
ambigüités juridiques ne sont pas décelables au niveau du
sursis de paiement.
B - L'absence du recours gracieux dans le sursis de
paiement en matière fiscale
Le sursis de paiement concerne exclusivement le contentieux
fiscal. Le sursis de paiement apparait surtout et même davantage comme un
correctif au principe de l'effet non suspensif des recours. Le sursis de
paiement est attaché à la phase administrative du contentieux de
l'imposition176.
En fait, le principe de l'effet non suspensif des recours a
pour but : « d'éviter la paralysie de l'Administration et le
développement des requêtes
175 L'article L 117 du Code Général des
Impôts de 2008 énonce que « Lorsque la décision du
Chef de Centre Principal des Impôts ou le responsable de la structure
chargée de la gestion des « grandes entreprises » ne donne pas
entièrement satisfaction au demandeur, celui-ci doit adresser sa
réclamation au Directeur Général des Impôts dans un
délai de trente (30) jours, lequel dispose d'un délai de soixante
60) jours pour répondre. Le Directeur Général des
Impôts peut, lorsque le requérant en a formulé
expressément la demande, consulter au préalable la Commission
Centrale des impôts sur la réclamation contentieuse dont il est
saisi. La Commission ainsi consultée émet un avis motivé
sur le dossier qui lui est transmis dans un délai de 30 jours à
compter de la date de sa saisine. Ledit avis est notifié au
requérant par le Directeur Général des impôts en
marge de sa décision. Toutefois, en cas de non-respect par la Commission
du délai ci-dessus imparti, le Directeur Général des
impôts notifie sa décision au requérant. Mention y est
faite de l'absence d'avis de la Commission. La saisine de la Commission
Centrale des impôts est suspensive des délais de recours
ultérieurs. Lorsque les arguments du contribuable sont reconnus, le
dégrèvement est prononcé par le Directeur
Général des impôts dans la limite de cent millions (100.
000. 000 F CFA) de francs ».
Sur l'instance non juridictionnelle de règlement des
litiges fiscaux, voir SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), Droit et contentieux fiscaux,
Cours polycopié de Maîtrise, Université de Dschang,
Faculté des sciences juridiques et politiques, 2007-2008, pp.62 et
ss.
176 METENBOU (M), « Le sursis de paiement et le
sursis à exécution dans le contentieux de l'imposition au
Cameroun », Annales de la Faculté des Sciences Juridiques et
Politiques de l'Université de Dschang, T.1, Vol. 2, 1997. pp.51-65, plus
précisément p.53.
juridictionnelles à caractère
dilatoire 177». Le sursis de paiement permet au
contribuable en matière d'impôt direct et de taxe sur le chiffre
d'affaire, de différer le paiement de la partie des impositions qu'il
conteste, en attendant la suite à donner à sa
réclamation178.
L'article L 121 du CGI de 2008 dispose :
« Le contribuable qui conteste le bien fondé
ou le montant d'une imposition mise à sa charge peut, s'il a
expressément formulé la réclamation dans les conditions
fixées à l'article L 116 ci-dessus, obtenir le sursis de paiement
de la partie contestée desdites impositions, à condition
:
- de formuler expressément la demande de sursis de
paiement dans ladite réclamation ;
- de préciser le montant ou les bases du
dégrèvement qu'il sollicite ;
Toutefois, la demande de sursis de paiement introduite
auprès du Directeur général des impôts, doit
être appuyée des justificatifs de l'acquittement de 10% du montant
des impositions en cause ».
« La réponse motivée de
l'Administration est notifiée expressément au contribuable.
L'absence de réponse de l'Administration dans un délai de 15
(quinze) jours équivaut à l'acceptation tacite du sursis de
paiement dans les conditions prévues au présent article. Le
sursis de paiement cesse d'avoir effet à compter de la date de
notification de la décision de l'Administration ».
L'article L 123 poursuit en précisant que la
décision de l'Administration doit être rendue dans un délai
de trois (3) mois partant de la date de réception de la
réclamation. Présentée en forme écrite, la
décision de l'Administration doit être motivée. Elle est
envoyée au contribuable par pli recommandé avec accusé de
réception ou remise en mains propres contre décharge.
177 GLEZIAL (J.J), « Le sursis à
exécution des décisions administratives. Théories et
politiques jurisprudentielles », AJDA, septembre 1975, p.381
.Cité par METENBOU (M), Article précité, pp.51- 52.
178 METENBOU (M), Article précité, p.52.
Plus significatif est l'article L 124 d'après lequel
« en cas de silence de l'Administration au terme du délai de
trois (3) mois ci-dessus visé, le contribuable peut saisir d'office la
Chambre Administrative de la Cour Suprême ».
Mais, que faut -il entendre par « saisir d'office la
Chambre Administrative » ? Nous estimons humblement que le
législateur veut tout simplement dire qu'en cas de silence de
l'Administration à l'issue du délai de trois (3) mois à
elle imparti, le contribuable peut directement saisir la juridiction
administrative sans avoir à former un recours précontentieux et
plus précisément le recours gracieux préalable. Autrement
dit, le contribuable n'a plus besoin d'informer l'Administration de l'imminence
d'une action en justice contre elle.
Il serait plus indiqué que le législateur
prescrive une obligation de transmettre à l'égard d'une
autorité saisie à tort d'un RGP par le requérant.
PARAGRAPHE- 3 : L'OPPORTUNITÉ DE LA PRESCRIPTION
D'UNE OBLIGATION DE TRANSMETTRE LE RECOURS GRACIEUX EN CAS D'ERREUR DU
REQUÉRANT
Lorsque le requérant saisit à tort une
autorité d'un recours gracieux, il nous vient à l'esprit un
double questionnement : conserve - t- il les délais pour saisir
l'autorité normalement compétente ? L'autorité saisie
à tort ne peut-elle couvrir l'erreur du requérant ?
En effet, lorsqu'un requérant avait saisi à tort
une autorité d'un recours gracieux, par exemple une autorité
incompétente, la juridiction administrative lui avait toujours
refusé le bénéfice d'une prorogation des délais.
Elle considère d'ailleurs un recours gracieux mal dirigé comme
une absence de recours. Tel
était le cas dans l'affaire ONANA Jacques Didier, objet
du jugement n° 6/77-78 du 23 février 1978, ONANA
Jacques Didier c/ État du Cameroun 179. Les faits de ce
jugement étaient les suivants.
Suite à une plainte déposée auprès
de la brigade de Gendarmerie de Manfé par le nommé ONYEBUCHI
OKOROENYI pour vol d'une somme de 1 380 000 francs, une perquisition
menée par GWANE Emmanuel, alors gendarme à cette Brigade au
domicile du nommé ABU Williams sur lequel pesaient de forts
soupçons permit de retrouver la totalité de la somme
volée. Cependant, il n'était remis au Commandant d'unité
qu'une somme de 1 049 000 francs. Il fut alors ouvert une enquête
à cet effet. Le gendarme GWANE incriminé accuse son
supérieur hiérarchique ONANA Jaques Didier, de lui avoir
ordonné de dissimuler une partie de l'argent. Quelques jours plus tard,
une information diligentée par le juge d'instruction près le
tribunal militaire aux armées de Buéa aboutit à une
ordonnance de non-lieu à l'égard du Commandant ONANA Jacques.
Malgré ce non lieu, ONANA Jaques Didier est
révoqué de ses fonctions par décision
n°0103/MINFA/800 du 10 mars 1969 du Ministre des forces armées.
Bien plus, l'affaire est bouclée par un jugement rendu le 19 mars 1969
par le tribunal militaire permanant de Yaoundé qui condamne GWANE
Emmanuel à sis mois d'emprisonnement avec sursis.
Insatisfait de ce qu'il considère comme une
révocation abusive, ONANA Jaques Didier saisit d'abord le Ministre des
forces armées d'un premier recours gracieux le 12 novembre 1969, soit
huit mois plus tard, et le Chef de l'État d'un second le 20 avril 1972.
Il n'obtint pas gain de cause et saisit la juridiction administrative. Une fois
de plus, son recours est rejeté car non seulement les autorités
saisies du RGP sont toutes incompétentes, mais aussi parce que ledit
recours est forclos.
179 Voir KAMTO (M), Ouvrage précité, pp.142-144.
En application du décret n°64/DE/336 du 10
août 1964, le Ministre Délégué à la
Présidence chargé de l'Administration territoriale et de la
fonction publique fédérale était seul habilité
à recevoir le RGP du requérant. En effet dans cette
décision, le juge « déclare le recours irrecevable pour
défaut de recours gracieux et tardif ».
Il ressort de l'affaire KALLA EPANYA Jacques c / État
du Cameroun, objet du jugement n°34/ CS-CA du 31 mars 1977, qu' «
Il n'y a aucune possibilité de prorogation de ces délais
lorsque le requérant a saisi à tort une autorité
incompétente 180».
Dans une certaine mesure, le requérant de bonne foi est
tout simplement victime du manque d'information de l'Administration. Il aurait
été préférable que le législateur
camerounais à l'instar de son homologue français, institue une
obligation de transmettre à la charge de l'autorité indument
saisie. En effet, l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 relative au droit des
citoyens dans leur relation avec l'Administration en France, met une obligation
de transmettre à la charge de l'autorité qui reçoit par
erreur un recours. Cette loi impose à l'autorité saisie à
tort d'un recours administratif de le transmettre à qui de droit lorsque
les circonstances lui permettent de l'identifier clairement. « Il ne
serait pas possible de vous reprocher d'avoir adressé votre recours
à la mauvaise personne si tant est qu'avec les précisions
contenues dans votre recours, la personne qui en a été
destinataire par erreur soit en mesure de retrouver la personne à qui
adresser ce recours181 ».
Par application de cette obligation, si le Ministre de la
fonction publique et de la réforme administrative reçoit un RGP
dirigé contre une décision du Ministre de la santé
publique, il devra le transmettre à ce dernier dans la mesure du
possible. Dans la même logique, si le Maire est saisi d'un RGP en lieu et
place du Délégué du gouvernement, il devra
également le transmettre à ce dernier
180 MOMO (B), «Problème des délais dans
le contentieux administratif camerounais », Annales de la
Faculté des Sciences Juridiques et Politiques, Université de
Dschang, T.1, Vol.1, 1997, pp. 136 - 161, notamment, p.140.
181
http://admi.net.jo/20000413/FPPX980029L.html,
« Le recours administratif préalable devant l'Administration
»
si les circonstances le permettent. Le Professeur KAMTO nous
rapporte d'ailleurs que la Chambre Administrative de la Cour Suprême
admet la validité d'un recours gracieux adressé à une
autorité incompétente, dès lors que ledit recours a
été transmis à l'autorité normalement
compétente182.
L'obligation de transmettre corrige l'erreur du
recourant183et garde intact les délais pour saisir le juge
administratif. Cette obligation impose d'une manière ou d'une autre un
supplément d'informations à l'Administration dans le processus de
prise des décisions. Une décision administrative bien
formulée permettrait aux administrés de reconnaître
facilement l'auteur de cette décision qui pourrait être le
destinataire du recours gracieux en cas de litige.
Une telle exigence en droit administratif camerounais
contribuerait à la bonne administration de la justice, et
améliorerait qualitativement le recours gracieux préalable au
Cameroun. Bien plus, constate-t- on, le risque d'erreur serait contourné
autant que faire ce peut, si le législateur camerounais avait comme son
homologue béninois prévu en plus du recours gracieux le recours
hiérarchique, le requérant gardant la faculté de faire un
choix selon les cas.
CONCLUSION DU CHAPITRE 1
La détermination de l'autorité adressataire du
recours gracieux préalable enregistre une évolution notoire.
Ainsi, trente ans après l'ordonnance de1972, la simplification des
règles relatives à la détermination de l'autorité
adressataire est nettement perçue tant dans les litiges impliquant
l'État central, les établissements publics et les
collectivités territoriales décentralisées. Pour sa part,
le
182 KAMTO (M), Ouvrage précité, p.40. L'auteur cite
l'affaire FOUDA Hubert c/État du Cameroun, objet de l'arrêt
n°1/A du 6 décembre 1979 de l'Assemblée
Plénière de la Cour Suprême.
183 Voir aussi CHAPUS (R), Droit du contentieux administratif,
Ouvrage précité, p.480.
précontentieux de l'administration fiscale suscite encore
des interrogations. Au niveau des délais du RGP, on observe en revanche
une quasi-stabilité.
CHAPITRE-2 : LA QUASI STABILITÉ DES
RÈGLES RELATIVES AUX DÉLAIS DU RECOURS GRACIEUX
Le recours gracieux préalable n'échappe pas aux
contraintes du temps. Il serait anormal et même injuste qu'après
être resté passif à la violation d'un droit par le fait de
l'Administration pendant un temps, le justiciable décide d'intenter
intempestivement un recours contre elle. Une telle façon de faire
contribuerait à fragiliser ou à paralyser l'Administration. Or,
pour prévenir cette situation, le législateur a enserré
l'exercice du recours gracieux préalable dans des délais stricts.
En Droit, quand on traite du délai, « il s'agit de la
période, de la durée ou encore de l'espace de temps dans lequel
un acte juridique peut valablement être accompli184 ».
Le délai le plus long en matière de recours gracieux
préalable au Cameroun est de quatre (4) ans. Cette durée nous
rappelle celle de la déchéance quadriennale. En règle
générale, l'exercice du recours gracieux préalable est
enfermé dans des délais fixés par la loi. Par
définition, le délai du RGP est la période pendant
laquelle un administré peut régulièrement introduire
auprès de l'autorité administrative compétente un recours
exclusivement dans trois hypothèses : en vue d'obtenir le retrait ou la
réformation d'un acte administratif faisant grief ; en vue d'obtenir
l'indemnisation en réparation du préjudice subi du fait d'un acte
administratif ; en vue enfin d'exiger d'une autorité de prendre un acte
s'il s'avère que cette autorité avait compétence
liée185.
Ces délais sont restés inchangés dans
l'ordonnance du 6 août 1972 comme dans la loi du 29 décembre 2006,
sauf en ce qui concerne la demande d'annulation. Ainsi, la permanence des
délais du recours gracieux préalable est perceptible au niveau
des éléments de détermination des délais (Section
1) et au niveau des modalités de computation desdits délais
(Section 2).
184 FANDIP (O), Mémoire précité, p.9.Voir
aussi GUILLIEN (R) et VINCENT (J), Lexique des termes juridiques, Dalloz, 1987,
p. 155.Voir aussi le dictionnaire Microsoft Encarta 2009.
185 MOMO (B), «Problème des délais dans le
contentieux administratif camerounais », Article
précité, p.136.
SECTION-1 : LA PERMANENCE DES ÉLÉMENTS
DE
DÉTERMINATION DES DÉLAIS
La permanence des éléments de
détermination des délais est l'un des acquis du recours gracieux
préalable. Les facteurs de détermination des délais
oscillent autour de deux points principaux, à savoir l'objet du litige
(Paragraphe 1) et la situation du demandeur (Paragraphe 2).
PARAGRAPHE-1 : LA DÉTERMINATION DES
DÉLAIS
SELON L'OBJET DU LITIGE
En application de l'article 17 alinéa 3(a) de la loi de
2006, « le recours gracieux doit à peine de forclusion
être formé :
a-Dans les trois mois de publication ou de notification de la
décision attaquée ; b- En cas de demande d'indemnisation, dans
les six mois suivant la réalisation du dommage ou sa connaissance
;
c -En cas d'abstention d'une autorité ayant
compétence liée dans les quatre ans à partir de la date
à laquelle ladite autorité était défaillante
».
Dans le contentieux fiscal, le RGP doit être
formé dans les deux mois à compter de la date de notification de
la décision du Directeur Général des Impôts.
À l'évidence, les délais pour former le
recours gracieux varient selon l'objet du litige. La question litigieuse peut
être selon le cas le retrait d'un acte administratif individuel ou
réglementaire. Elle peut être l'indemnisation d'un
administré victime des agissements de l'Administration ou mieux d'une
décision administrative. Enfin, la question litigieuse peut être
l'abstention d'une autorité administrative ayant compétence
liée.
Le législateur de 2006 se montre moins parcimonieux sur
l'édiction des délais que celui de 1972 qui ne prévoyait
qu'un délai de deux mois en cas de
demande de retrait d'un acte administratif. Le délai de
trois mois nous semble plus raisonnable pour accomplir les actes de
procédure précontentieuse.
Le respect des délais apparait comme une «
condition impérative de validité du recours gracieux
préalable »186. Dans la jurisprudence, le RGP
formé au-delà du délai imparti est constamment
frappé de forclusion par la Chambre Administrative187.
Cependant, il serait d'une grande importance que le législateur fasse de
la date une mention obligatoire pour la validité des actes
administratifs, ce qui rendrait le décompte des délais plus
aisé et pratique.
La détermination des délais du RGP dépend
aussi souvent de la situation du demandeur.
PARAGRAPHE-2 : LA DÉTERMINATION DES
DÉLAIS
SELON LA SITUATION DU DEMANDEUR
La situation du demandeur est un élément capital
dans la détermination des délais du recours gracieux
préalable. Nous envisagerons successivement la situation du demandeur en
temps normale (A) et celle du demandeur ayant provoqué une
décision confirmative d'une autre non encore attaquée (B).
A - Cas du demandeur en situation normale
La situation du demandeur en rapport avec l'objet du litige
est un élément de détermination des délais du
recours gracieux préalable. De par la situation du requérant, la
juridiction administrative appréciera si celui était en
état d'introduire son recours gracieux préalable dans les
délais prévus par la loi.
186 Ibidem, p. 137.
187 Jugement n°57 /05-06/ CS-CA du 05 avril 2006, ENONCHONG
Henry ABI NDIFOR c/État du Cameroun(MINUH) et ayants droit de Gustave
KOUAMBO, complété avec :
Jugement n°74/2008/ CS-CA du 18 juin 2008, TONDJA NDJEUDJI
René c/ État du Cameroun (MINDAF) ;
Jugement n°41/2005-2006/ CS-CA du 18 janvier 2006,
EKOBENA et ONANA MESSINA Marcel c/ État du Cameroun (MINUH) et MBAGOFA
et autres ; jugement n°130/05-06/ CS-CA du 27 septembre 2006, Succession
EKOBENA FOUDA Jean c/ État du Cameroun (MINUH) et KABAC TJOL
Philémon et enfin jugement n°110 /05-06/ CS-CA du 12 juillet 2006,
Nouvel office de transit du Cameroun c/CNPS .
De même, la situation du requérant
déterminera s'il peut avoir droit à une prorogation des
délais. Ni l'ordonnance de 1972 abrogée, ni la loi de 2006
précitée ne recèlent des dispositions particulières
relatives à la prise en compte de la situation du demandeur dans la
détermination des délais du recours gracieux préalable.
Quand une telle question se pose au juge, ce dernier fait recours aux principes
généraux de droit applicables en droit public comme en droit
privé, de la jurisprudence ainsi que certains textes particuliers tels
que nous verrons dans les circonstances de prorogation des délais.
La situation du requérant qui provoque une
décision confirmative d'une autre non encore attaquée
mérite d'être analysée.
B - Situation du demandeur provoquant une
décision confirmative d'une autre non attaquée
Un autre problème plus spécifique au RGP est la
tentation du requérant de penser qu'en multipliant les recours gracieux
préalables au cours d'une même procédure, il
bénéficiera autant de fois que possible d'une prorogation des
délais. Si d'aventure, un justiciable incite une autorité
à prendre un acte confirmatif d'un autre non encore attaqué dans
l'optique de faire courir de nouveaux délais, ce dernier sera
évincé. Tout simplement, il convient de noter que recours
gracieux préalable sur recours gracieux préalable ne vaut. La
Chambre Administrative de la Cour Suprême est claire sur ce sujet
lorsqu'elle affirme :
«Tout plaideur qui provoque une décision
confirmative d'une autre non attaquée dans le but de faire courir de
nouveaux délais est forclos (...) Considérant qu'il est de
jurisprudence constante qu'une décision confirmative des
décisions non attaquées dans les délais légaux ne
constitue pas une décision nouvelle ouvrant un nouveau délai
même lorsque cette décision nouvelle a été prise
à la suite d'une instruction nouvelle ».
Le juge condamne selon ses propres termes « la
pratique des demandes nouvelles destinées à faire relever les
requérants de la forclusion encourue en obtenant avec la complaisance
des bureaux des Ministères un nouvel examen de
l'affaire plusieurs années après l'intervention
de la décision initiale expresse ou tacite »188.
Autrement dit, si l'Administration revient plus tard sur une
décision prise auparavant, les délais du RGP ne courent
qu'à partir de la première décision.
En bref, trente ans après l'ordonnance n°72/06, on
relève une quasi stabilité des modalités de computation
des délais.
SECTION-2 : LA QUASI CONSTANCE DES
MODALITÉS DE COMPUTATION DES DÉLAIS
Les modalités de computation des délais
renvoient aux considérations qui gouvernent le décompte des
délais. Ces modalités différent selon qu'il s'agisse des
délais de principe ou des cas de prorogation des délais. Cette
distinction nous conduit à analyser successivement les modalités
de computation des délais de principe (Paragraphe 1) et les
hypothèses de prorogation des délais (Paragraphe2).
PARAGRAPHE- 1 : LES DÉLAIS DE PRINCIPE DU
RECOURS GRACIEUX
Les délais de principe du RGP sont ceux qu'on retrouve
à l'article 17 alinéa 3 (a) de la loi n° 2006/022
précitée. Ces délais requièrent pour leur mise
oeuvre des modalités de computation plus ou moins consacrées par
les textes et la jurisprudence. Étant donné que le
problème relatif à l'acheminement des courriers postaux a eu des
incidences sur la détermination des délais du recours gracieux,
il apparait important d'aborder dans une approche double les modalités
de computation des délais de principe (A) et la situation
particulière des courriers postaux. (B)
188 Voir affaire SEBA NDONGO précitée, citée
par MOMO (B), Article précité, p.140.
A- Les modalités de computation des
délais de principe
En dépit de nombreuses hésitations, la
juridiction administrative camerounaise a fini par prendre position sur les
modalités de computation des délais. Dans un premier temps, le
calcul des délais se faisait de mois en mois ou d'années à
années, compte non tenu du nombre de jours qui composent les mois ou les
années. Il ressort de l'étude faite par M. MOMO Bernard qu'une
analyse des décisions rendues avant 1977 laisse percevoir que la
juridiction administrative incluait dans le décompte des délais
tant le jour de la réalisation ou de la connaissance du fait
dommageable, de publication ou de notification de la décision
litigieuse, encore appelé « dies a quo » , que le
jour où expire le délai prescrit, c'est-à-dire le «
dies à quem ».189
Toutefois, depuis le jugement n°19/CS-CA du 27 avril
1978, NGONGANG Richard c/ État du Cameroun, la juridiction
administrative utilise constamment la notion de délais francs. Dans
cette affaire, la Chambre Administrative avait estimé que le recours
gracieux doit être formé dans les deux mois suivant la
décision attaquée. Celle-ci ayant été
notifiée le 6 octobre 1969, le requérant avait jusqu'au 7
décembre pour présenter son recours gracieux.
En application de l'ordonnance n°72/6 du 26 août
1972 et de la loi du 8 décembre 1975 fixant la procédure devant
la Cour Suprême, le juge adopte un calcul similaire dans l'espèce
ESSOMBA TONGA Gabriel c/État du Cameroun précitée. Un
recours gracieux est adressé le 4 février 1976. Après le
silence de trois mois de l'Administration, le recourant disposait de 60 jours
pour saisir la Cour Suprême. « Il s'en suit que ESSOMBA TONGA
avait jusqu'au 6 juillet pour instruire son recours », conclut le
juge de l'espèce.
Il ne s'agit donc ni plus ni moins que des délais
francs sur lesquels la jurisprudence est désormais fixée.
À la vérité, il s'agissait d'un retour à une
ancienne jurisprudence de plus d'un quart de siècle
matérialisée par un arrêt du
189 Arrêt n°173/CFJ-CAY du 08 juin 1971, OWONO
ESSONO Benoit c/ État Fédéré du Cameroun Oriental,
Recueil MBOUYOM, T.2, pp.327-328. Dans le même sens, Voir jugement
n°69/CS-CA du 24 avril 1976, ABENELANG Gustave c/ État du Cameroun
.Cité par Momo (B), Article précité, p.136.
Conseil du Contentieux Administratif du 29 novembre 1956
opposant le Sieur EKONG Yves Adolphe au Territoire du Cameroun. Dans cette
décision telle que rapportée par M. MOMO Bernard, le Conseil du
Contentieux Administratif déclare :
« Considérant qu'au terme d'une jurisprudence
bien affirmée du Conseil d' État ,le délai
prévu à l'article 11de la loi du 5 août 1881 est un
délai franc, c'està-dire qu'il n'est pas tenu compte du «
dies a quo » jour où la décision a été
notifiée ni du « dies a quem », jour où le délai
arrive à expiration...il a été jugé ,en outre, que
les mois se comptent de quantième à quantième (...)
» .
«Considérant que dans ces conditions, la
décision incriminée ayant été notifiée le 16
avril, le recours pouvait être reçu jusqu'au 16 juillet
inclus190 ».
Dans une décision rendue en 2004, la Chambre
administrative déclare :
« Attendu en l'espèce que le procès
verbal de mise en demeure querellé ayant été
notifié au sieur ACHENGUI le 14 juin 2000 par exploit du
ministère de Maître NGUE Gabriel, huissier de justice, à
Yaoundé, le recourant avait jusqu'au 15 août 2000 inclus pour
former son recours gracieux préalable » 191 .
La situation du RGP acheminé par courrier postal
mérite aussi de retenir notre attention.
B - Les modalités de computation des
délais du recours gracieux préalable acheminé par voie
postale
Jusqu'à une date récente, l'acheminement des
courriers postaux au Cameroun était un véritable calvaire. Il
n'était pas évident que ces courriers arrivent à bon port
et en temps normal. La poste était en crise. Les
190 Voir MOMO (B), «Problème des délais
dans le contentieux administratif camerounais », Article
précité, p.137.
191Jugement n°37/04-05/ CS-CA du 29
décembre 2004, ACHENGUI c/Communauté urbaine de
Yaoundé.
dysfonctionnements de la poste avaient suscité
plusieurs interrogations.192 Ces dysfonctionnements étaient
susceptibles de déteindre sur les actes de procédure
expédiés par voie postale.
L'affaire YOUMBI André c/ République
Fédérale du Cameroun, objet de l'arrêt de
l'Assemblée Plénière de la Cour Suprême du Cameroun
du 8 novembre 1973, parait révélatrice des conséquences du
mauvais fonctionnement de la poste sur les actes de
procédure193. Les faits de cet arrêt sont les suivants
:
À la faveur d'un concours lancé le 16 septembre
1964 et dont la date de clôture était fixée au 30 septembre
de la même année, le requérant expédia son dossier
par voie postale. La suite devint problématique, car son dossier
était parvenu après la date de clôture. Le juge de la
Chambre Administrative était confronté à la
difficulté relative à la date qu'il fallait considérer
dans la détermination des délais : était- ce celle de la
remise du dossier à la poste ou celle de sa réception par le
destinataire ? À cette question, la juridiction administrative
privilégia l'Administration en affirmant qu'un pli remis à la
poste ne devient la propriété du destinataire qu'à la date
de réception du pli par ce dernier, et aucunement à celle de son
expédition.
Pour M. MOMO Bernard, « Cette solution, sans doute
d'origine privatiste (précisément du droit commercial),
paraissait trop sévère » 194. C'est
sûrement pour remédier à cette situation que
l'Assemblée Plénière de la Cour Suprême dans
l'affaire SEBA NDONGO Jean c/ État du Cameroun (DGSN), objet de
l'arrêt n°1/A/CS-AP du 27 novembre 1986, va remettre en cause le
raisonnement tenu 13 ans plutôt. En effet, la Cour déclare :
« Considérant qu'il résulte des
pièces de la procédure que la requête introductive
d'instance de l'intéressé a été
expédié le 29 mai 1982 comme en fait
192 Voir à ce sujet KEUTCHA TCHAPNGA (C), «
Les aspects juridiques de la réforme de l'activité postale au
Cameroun », Revue EJDA, n°45, avril -mai -juin 2000, pp.43-60,
plus précisément pp.45- 46.Voir aussi jugement n°13/CS-CA du
23 novembre 1989, ENYENGUE DIPOKO Bernard c/ État du Cameroun. Dans
laquelle le juge a estimé qu'un fonctionnement défectueux des
services postaux constitue une faute engageant la responsabilité de
l'État.
193Voir recueil MBOUYOM précité,
pp.48-51. Voir aussi MOMO (B), Article précité, pp.139 et ss. 194
MOMO (B), Article précité, p.139.
foi le cachet de la poste, donc dans le délai
légal ; mais qu'elle n'a été enregistrée que le 14
octobre 1983 sous le n°36 de la Chambre Administrative de la Cour de
céans » (...)
« Qu'ainsi SEBA NDONGO Jean ne saurait être
tenu pour responsable du retard de sa requête à parvenir au greffe
de ladite Chambre ».
Cette solution est d'autant plus juste qu'on ne saurait
reprocher au justiciable de bonne foi le mauvais fonctionnement de
l'Administration195. Solution valable aussi bien pour le recours
gracieux que pour le recours contentieux196, elle rejoint la
position du Conseil d' État français qui prend en
considération la date à laquelle la demande a été
adressée à l'Administration.197
De nos jours, la difficulté relative au retard
causé par l'acheminement des courriers postaux apparaîtrait comme
une sorte de faux problème. Cela est dû inévitablement
à l'essor des nouvelles technologies de l'information et de la
communication dont la place primordiale de l'internet n'est plus à
démontrer. Il ne fait plus de doute aujourd'hui que l'e-mail ou le
courrier électronique a considérablement supplanté la
lettre postale198 et on peut même se demander s'il ne sonne
pas le glas de ce dernier. Tout compte fait, il reste que l'e-mail est rapide,
fiable et se trouve progressivement entrain de gagner le coeur des
camerounais.
Nous ne sommes pas sans savoir que presque toutes les
Administrations camerounaises y compris les établissements publics ainsi
que les collectivités territoriales décentralisées ont des
sites internet et des boites électroniques grâce auxquelles elles
pourront désormais recevoir des correspondances électroniques. La
loi de 2006 précitée n'interdit pas d'adresser un RGP par e-mail.
Un raisonnement juridique consiste à dire que ce qui n'est pas
expressément interdit par la loi est implicitement admis. Toutefois, la
juridiction administrative n'a pas
195 Voir les observations de KAMTO (M) à propos de cet
arrêt, Juridis info n°2, avril-Mai -Juin 1990, pp.51-52.
196 Sur cette question, voir MOMO (B), Article
précité, pp.139 et ss.
197 CE, DELORT, 20 février 1970, Rec., Lebon, p.30,
cité par MOMO (B), Article précité, p.140.
198KEUTCHA TCHAPNGA (C), « Les aspects juridiques de la
réforme de l'activité postale au Cameroun », Article
précité, p. 59.
encore tranché un litige relatif au RGP formé par
e-mail, ceci pour dire que cette question relève encore de la
prospective.
La juridiction administrative apprécie désormais
les délais du RGP envoyé par voie postale en privilégiant
les intérêts des administrés. La même démarche
lui serait exigée dans la conception des cas de prorogation des
délais du RGP.
PARAGRAPHE-2 : LES CAS DE PROROGATION DES
DÉLAIS
Les délais prévus à l'article 17
alinéa 3 de la loi de 2006 ne sont que des délais de principe.
Une bonne administration de la justice impose au juge de prendre en
considération des situations juridiques particulières. Tel est le
cas des circonstances de prorogation des délais du recours gracieux
préalable qui ne sont ni par la loi n°2006/022, ni par l'ordonnance
n°72/06 précitées.
Par contre, les hypothèses de prorogation des
délais ont été prévues dans certains textes
juridiques qui relèvent plus ou moins du contentieux administratif.
L'analyse des cas de prorogation des délais requiert d'une part
d'évoquer la force majeure et le motif grave (A), d'autre part
d'envisager la distance ainsi que l'incidence des dimanches et des jours
fériés (B).
A- La force majeure et le motif grave
« Contra non valentem agere non currit».
Cette maxime latine exprime une circonstance dans laquelle un recourant devrait
bénéficier d'une prorogation des délais pour adresser son
recours gracieux préalable. Traduite littéralement, cette maxime
veut dire que la prescription ne peut courir contre celui qui se trouve dans
l'impossibilité absolue d'exercer ses droits. En d'autres termes, le
requérant se trouvant dans une impossibilité insurmontable,
imprévisible et irrésistible ne saurait raisonnablement
être condamné pour n'avoir pas agi dans les délais. Il peut
donc arriver qu'entre le moment de la prise de décision querellée
et l'expiration des délais de principe, la victime d'un acte
administratif
soit emprisonnée199. Il s'agit là
plus précisément d'un cas de motif grave. Il en sera de
même par exemple d'un justiciable qui pendant l'écoulement des
délais impartis souffrait d'une maladie telle qu'il n'était pas
en même d'accomplir les actes de procédure nécessaires. Il
peut en être ainsi s'il est établi que l'intéressé
souffrait d'une maladie mentale, ou était dans un état comateux.
Mais cette hypothèse est plutôt exceptionnelle.
La force majeure est aussi un cas susceptible
d'entraîner la prorogation des délais du recours gracieux. Elle
peut être le fait d'une catastrophe naturelle ayant endommagé les
services administratifs, telle qu'un tremblement de terre ou un tsunami. Pour
qu'on parle de force majeure, il faut que trois conditions soient
réunies, à savoir l'irrésistibilité,
l'imprévisibilité et l'insurmontabilité. Lorsque la force
majeure est établie, elle peut entraîner la prorogation des
délais. Ne dit-on pas souvent qu'à l'impossible nul n'est tenu
?
Néanmoins, il appartient au juge d'user de sa
sagacité pour apprécier la force majeure alléguée,
étant donné que ces hypothèses n'ont pas été
envisagées par le législateur de 2006.
La force majeure n'est d'ailleurs pas la seule circonstance
prorogative des délais à prendre en considération, car la
distance ainsi que la prise en compte des jours fériés peuvent
également y contribuer.
B - La distance et l'incidence des dimanches et jours
fériés
La distance peut aussi constituer un facteur de prorogation
des délais dans le contentieux administratif en général,
et plus particulièrement en matière de recours gracieux
préalable. Il arrive souvent que le requérant se trouve
très éloigné de l'autorité habilitée
à recevoir le recours gracieux préalable.
199 Voir jugement n°34/CS-CA du 24 avril1980, ESSOUGOU
Benoît c/ État du Cameroun ainsi que jugement n°9/ CS-CA du
28 avril 1982, NGANKOU Amos Flaubert c/ État du Cameroun .Cités
par MOMO (B), Article précité, p.155.
Ce problème se posait avec acuité sous l'empire
de l'ordonnance de 1972. Cela était dû au fait que les recours
pour ce qui n'était pas des collectivités territoriales ou des
établissements publics dans une certaine mesure étaient
adressés selon la loi au « Ministre compétent
» qui ne résidait qu'à Yaoundé, siège des
institutions du pays. L'enclavement de certaines régions fit en sorte
que les actes pris par les autorités officiant dans la capitale
n'étaient pas exécutoires le même jour. L'article 3 de la
loi n°72/11 du 26 août 1972 relative à la publication des
lois, ordonnances, décrets et actes réglementaires dispose
d'ailleurs :
« Les lois, les décrets et actes
réglementaires publiés au journal officiel sont
exécutoires à Yaoundé le jour même de leur
publication.
Dans les autres circonscriptions administratives, les lois
et actes réglementaires des autorités centrales sont
exécutoires le lendemain du jour de l'arrivée du journal officiel
au chef-lieu de la circonscription ».
Cet article dispose également que « le jour de
l'arrivée du journal officiel est constaté par le Chef de la
circonscription administrative ».
On peut donc penser qu'une décision prise par une
autorité centrale n'est pas exécutoire dans un département
autre que celui du Nfoundi tant qu'elle n'y est pas arrivée. Cette
décision ne peut donc être attaquée qu'à partir de
la date où elle est devenue exécutoire, et c'est cette date qui
doit être prise en compte dans la computation des délais du
RGP200.
Le délai de distance varie d'un ou deux jours
après la sortie du journal officiel. Cette variation est fonction du
lieu où se trouve le requérant par rapport à
Yaoundé, étant donné que très souvent, c'est le
lieu où il doit déposer son recours gracieux. La loi de 2006 qui
attribue compétence à l'auteur de l'acte pour connaitre du
recours gracieux préalable contribue, dans une certaine mesure
à
200 Sur cette question, voir MBALLA OWONA (R), Les délais
de distance en contentieux administratif camerounais, Mémoire de DEA,
Université de Douala, année académique 2003-2004,72 p.
remédier à ce problème
d'éloignement lorsqu'on sait que les recours gracieux ne seront plus
exclusivement adressés au « Ministre compétent
».
Le requérant qui réside à
l'étranger bénéficiera aussi du délai de distance
prévu par l'article 1033 du Code de Procédure Civile et
Commerciale applicable en matière administrative. Dans le jugement
OUMAROU Paul c/ État du Cameroun, un acte est pris le 11 novembre 1975.
Le délai de deux mois en cas d'annulation expirait en principe le 11
janvier 1976 inclusivement. Étant donné que le sieur OUMAROU Paul
résidait hors de Yaoundé, un recours gracieux adressé par
ce dernier le 03 mars 1976 avait été considéré par
le juge comme valable. On en conclut avec M. MBALLA OWONA Robert qu'il y a eu
application en l'espèce des délais de distance. Dans cette
décision, la Cour affirme: « Compte tenu des délais de
distance, OUMAROU Paul devait considérer son recours rejeté au 10
juin 1976 »201.
Le délai applicable peut être donc majoré
d'un délai de distance d'un ou deux mois : il est d'un mois si le
requérant est établi en Afrique et de deux mois pour le reste du
monde d'après l'article 1033 du Code de Procédure Civile et
Commerciale précité. Ce délai de distance permet de
compenser la position défavorable du justiciable
éloigné202.
Concernant l'incidence des jours fériés, il est
à relever que le délai du recours gracieux peut être
repoussé au prochain jour ouvrable lorsqu'il expire un jour
férié, ou un dimanche. Cette solution nous parait tout à
fait logique. Relevons hic et nunc qu'on ne saurait tenir un
recourant coupable du fait de n'avoir pas agit un jour non ouvrable. Il va de
soit qu'en principe203, les services publics ne reçoivent pas
les usagers et sont d'ailleurs fermés les dimanches et les jours
fériés. Un délai qui expire un de ces jours ne saurait
raisonnablement être
201 Voir dans ce sens jugement n°46 /CS-CA du 30 avril 1981
OUMAROU Paul c/ État du Cameroun. Cité par MBALLA OWONA (R),
Mémoire précité, pp.34 et ss.
202 Ibidem, pp.28 et ss.
203 Certains services fonctionnent régulièrement
24h/24 et du premier janvier au 31 décembre de l'année telle que
le service public de la défense, du maintien de l'ordre et de la
santé.
maintenu quel qu'il soit. C'est ce qui ressort du jugement
n°20/CS-CA du 27 janvier 1983, GUEBAMA PELE Pierre c/ État du
Cameroun204.
CONCLUSION DU CHAPITRE 2
Les règles relatives aux délais du recours
gracieux n'ont pas été l'objet de réformes significatives.
Cette constance se vérifie au double niveau des modalités de
computation des délais que dans les circonstances de prorogation desdits
délais. Concernant les recours gracieux adressés par voie
postale, il n'y a pas pour l'instant de jurisprudence récente en la
matière.
204 MOMO (B), Article précité, p.155.
CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE
Au Cameroun, les exigences de fond du recours gracieux
préalable ont connu une évolution significative. Cette
évolution passe par l'identification de l'autorité destinataire
pour arriver à la détermination des délais qui encadrent
ce recours. Jadis jonchée d'obstacles205, la
détermination de l'autorité adressataire a évolué
et est devenu plus simple. Cette évolution dans le droit du contentieux
administratif au Cameroun est à mettre de façon magistrale au
crédit de la loi n°2006/022 du 29 décembre 2006 et du juge
administratif lui même. Dans le contentieux des collectivités
territoriales décentralisées et le contentieux fiscal, les textes
les régissant déterminent les autorités adressataires du
recours gracieux préalable. Cette détermination est aujourd'hui
bien encadrée dans le contentieux des collectivités locales, avec
l'assouplissement de la tutelle étatique, et moins bien dans le
contentieux fiscal, du fait d'une batterie de recours administratifs
susceptibles d'égarer le requérant.
D'un autre côté, les règles relatives aux
délais du recours gracieux n'ont pas enregistré de changement
notable. C'est ainsi que les délais du recours gracieux sont
restés les mêmes, tant dans le contentieux de l'indemnisation
qu'en cas de défaillance d'une autorité ayant compétence
liée. Dans le contentieux de l'annulation pour excès de pouvoir,
les délais pour exercer le recours gracieux sont passés de deux
à trois mois. L'inobservation de ces délais entraine la
forclusion, sauf application des cas de prorogations des délais. Par
ailleurs, les délais impartis à l'Administration pour
réagir sur le recours gracieux n'ont pas changé et leur
inobservation rend le recours contentieux prématuré.
Quant à la détermination des délais en
cas d'acheminement d'un courrier postal, le problème reste
d'actualité car, en l'état actuel du contentieux
205 Voir ABA'A OYONO (J.C), « Chronique du grain de
sable dans la fluidité jurisprudentielle à la Chambre
Administrative au Cameroun », Juridis Périodique n° 78,
avril -mai -juin 2009, pp.62-74.
administratif, on ne peut savoir si le RGP adressé par
courrier électronique est recevable.
Trente ans après, le recours gracieux préalable
au Cameroun est demeuré un recours précontentieux dont le
caractère d'ordre public s'est beaucoup affaibli, avec la multiplication
à l'excès des exceptions à la règle du RGP. En
d'autres termes, ce recours ne se présente plus de nos jours tel qu'il
avait été conçu originellement. Il s'en suit que ce
recours a connu de nombreuses mutations au point qu'on serait tenté de
dire qu'il n'est plus que l'ombre de luimême.
Par conséquent, s'il fallait réécrire ce
régime juridique de nos jours, nous reconnaitrons
humblement206 qu'en plus de ce que d'illustres auteurs ont
relevé, il reste que les RGP collectifs sont irrecevables devant la
juridiction administrative. Nous mentionnerons dans le même sens que le
recours gracieux préalable à lui seul suffit pour lier le
contentieux dans le cadre du contentieux impliquant les collectivités
territoriales décentralisées.
La justice administrative au Cameroun a
considérablement évolué. Si les administrés
n'obtiennent pas la sanction de leur droit, parce qu'un acte de
procédure n'a pas été respecté, ou bien n'a pas
été formé en temps réel, c'est le
droit207. Toutefois, s'il s'avère le défaut de recours
gracieux est dû aux dispositions légales qui ne sont pas
suffisamment claires, c'est sûrement une injustice. Désormais,
avec l'entrée en vigueur de la loi n°2006/022 du 29 décembre
2006 précitée, cette injustice est corrigée : d'où
l'importance de l'analyse du devenir du recours gracieux préalable au
Cameroun.
Le RGP trente ans après est aussi un recours
extirpé des ambigüités textuelles. Il est désormais
relativement aisé d'identifier le destinataire d'un recours gracieux
préalable tant dans l'État que dans les entités infra
étatiques. L'accès au juge administratif n'est pas moins une
garantie de l'État de droit, et
206 Voir COHENDET (A-M), Ouvrage précité, p.35.
L'auteur affirme : « Il est bien plus dangereux de remettre en cause
les idées reçues que de suivre les sentiers battus. Cependant, le
risque « vaut la chandelle » car c'est seulement grâce à
leur imagination et à leur audace que certains chercheurs ont pu faire
progresser la réflexion juridique ».
207 Voir la maxime « Dura lex, sed lex » (La
loi est dure mais c'est la loi).
rien ne justifierait que de nos jours, le recours gracieux
préalable soit toujours un facteur de renforcement des
prérogatives administratives.
Bien que la règle du recours gracieux préalable
connaisse aujourd'hui plusieurs exceptions, on ne saurait envisager son
éventuelle suppression208. On devrait toujours davantage
opérer la redynamisation du RGP209, étant donné
que « la réforme est appelée à se reformer de
façon permanente et à s'adapter au gré de notre
capacité à la digérer210 »
L'Administration gagnerait à renforcer ses capacités en
matière contentieuse sans toutefois se juridictionaliser, car il faut
toujours faire « la part de l'Administration et du juge
»211. Peut être que certaines difficultés
liées à l'interprétation des textes sur le RGP au Cameroun
vont de paire avec le problème de la spécialisation du juge
administratif. Ainsi « il va falloir songer à former des
magistrats authentiquement administratif (...) le législateur n'a jamais
envisagé de confier le droit judiciaire privé aux magistrats
administratifs, de même devra -t- il cesser de faire du contentieux
administratif la chasse gardée des magistrats
judiciaires212 ».
Il était temps que le recours gracieux préalable
soit véritablement gracieux et non tortueux. D'ou venait -on qu'au
Cameroun un recours qui se veut gracieux par essence tende à devenir la
disgrâce du requérant ?
208 En France, un rapport du Conseil d'État sur les
recours administratifs préalables obligatoires à la saisine du
juge propose l'extension de la procédure de recours administratif
préalable obligatoire dans trois domaines à savoir
- Invalidations de permis de conduire consécutives
à la perte de tous les points par leur détenteur ; -Fonction
publique ;
-Certaines décisions en matière de droit des
étrangers.
Voir en ce sens, Les recours administratifs préalables
obligatoires à la saisine du juge : un mode souple de règlement
des conflits, Conférence de presse, mardi 16 septembre 2008. Disponible
sur
http://WWW.conseil-etat.fr/ce/actual/pdf/rapo_dossier_de_presse.
pdf.
209 Par exemple en édictant une obligation de
transmettre à l'égard d'une autorité indument saisie dans
certaines circonstances. Aussi le législateur devrait envisager la
possibilité de former un recours gracieux par courrier
électronique, étant donné que nous sommes à
l'ère d'internet.
210 Les cahiers de Mutations, n°002, novembre
1998, p.21. (Cité par ABA'A OYONO (J-C), « Un air de printemps
dans le droit parlementaire du Cameroun », Juridis Périodique
n°54, avril -Mai -Juin 2003, p.34.
211 Voir, BONICHOT (J-C), « Le recours administratif
préalable obligatoire : dinosaure juridique ou panacée
administrative ? », Mélanges en l'honneur de Daniel
LABETOULLE, Dalloz 2007, pp 81 et ss. Cité par Brisson (J.F), Article
précité. p.4.
212 SIETCHOUA DJUITCHOKO (C), «Perspectives ouvertes
à la juridiction administrative au Cameroun par la loi n° 96/06 du
18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972
», Article précité, p.173. L'auteur cite aussi KAMDEM
(J-C), Contentieux administratif. Cours polycopié de Licence,
3ième année Droit Public, Université de
Yaoundé, 1985, p.41.
L'avènement des tribunaux administratifs
régionaux encourage à coup sûr les administrés
à intenter les recours contre l'Administration pour revendiquer leurs
droits. Nous espérons que les différents protagonistes du
contentieux administratif camerounais seront à la hauteur de la perche
tendue par le législateur de 2006 en matière de recours gracieux
préalable au Cameroun. Nous reconnaissons cependant avec Olivier BEAUD
que « dans un travail scientifique, la conclusion importe moins que la
démonstration y menant ». 213
213 BEAUD (O), La puissance de l'État,
1ère éd., Paris, PUF, 1994, p.14.
LISTE DES ANNEXES
- Annexe I : Jugement n°57/2009/CA/CS du 11 mars 2009,
Affaire CHOUALA Yves Alexandre c/ État du Cameroun 116
- Annexe II : Loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006
fixant l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs 126
- Annexe III : Extrait de la loi n° 2006/016 du 29
décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement de la Cour
Suprême ..147
- Annexe IV : Modèle de recours gracieux préalable
148
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III- THÈSES ET MÉMOIRES
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2-MÉMOIRES
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camerounais, Mémoire de maitrise, Université de Dschang,
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3**Le contentieux des élections présidentielles
et législatives au Cameroun et au Gabon, Mémoire de DEA,
Université de Dschang, année académique 2000-2001,
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Mémoire de DEA, Université de Douala, année
académique 2003- 2004 ,129 p.
IV-TEXTES JURIDIQUES
1-Ordonnance n° 61 / OF du 4 octobre 1961 fixant la
composition, les conditions de saisine et la procédure de la Cour
Fédérale de Justice.
2- Ordonnance n°72/6 du 26 août 1972 fixant
l'organisation de la Cour Suprême.
3-Ordonnance n° 72/11 du 26 août 1972 relative
à la publication des lois, ordonnances, décrets et actes
réglementaires.
4- Loi n°74/18 du 5 décembre 1974 relative à
la responsabilité des ordonnateurs et gestionnaires de crédits
publics et des entreprises de l'État.
5- Loi n° 75/17 du 8 décembre 1975 fixant la
procédure devant la Cour Suprême en matière
administrative.
6-Loi n° 90/052du 19 décembre 1990 sur la
liberté de Communication sociale. 7- Loi n° 90 /053 du 19
décembre 1990 sur les associations.
8- Loi n° 90/056 du 19 décembre 1990 sur les partis
politiques.
9- Loi n° 91/20 du 16 décembre 1991 fixant les
conditions d'élection des députés à
l'Assemblée nationale
10- Loi n° 92/002 du 14 août 1992 fixant les
conditions d'élection des conseillers municipaux.
11- Loi n° 99/016 du 22 décembre 1999 portant statut
général des établissements publics et des entreprises du
secteur public et parapublic.
12- Loi n°2003/005 du 21 avril 2003 fixant les
attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des comptes de
la Cour Suprême.
13-Loi n° 2004/017 du 22 juillet 2004 d'orientation de la
décentralisation.
14- Loi n° 2006/009 du 29 décembre 2006 modifiant
et complétant certaines dispositions de la loi n° 91/20 du 16
décembre 1991 fixant les conditions d'élection des
députés à l'Assemblée nationale.
15- Loi n° 2006/010 du 29 décembre 2006 modifiant
et complétant certaines dispositions de la loi n° 92 /002 du 14
août 1992 fixant les conditions d'élection des conseillers
municipaux.
16-Loi n° 2006/016 du 29 décembre sur l'organisation
et le fonctionnement de la Cour Suprême
17- Loi n°2006/017 du 29 décembre 2006 fixant
l'organisation et le fonctionnement des tribunaux régionaux des
comptes.
18-Loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant
l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs.
19-Décret n° 2008/028 du 17 janvier 2008 portant
organisation du Conseil de Discipline Budgétaire et Financier.
20- Code Général des Impôts de 2008.
21- Code Civil.
22- Code de Procédure Civile et Commerciale.
V - NOTES DE JURISPRUDENCE
1- ABA'A OYONO (J-C), Note sous jugement
CS-CA du 07 décembre 2000, MAMA BILOA Sandrine c/Université de
N'Gaoundéré, Juridis Périodique n°51, juillet-
août-septembre 2002, pp.19-32.
2-GUIMDO DONGMO (B-R), Note sous ordonnance
de référé n°13/OR/PCA/90-91 du 25 avril 1991, Journal
« Le Messager » c/ État du Cameroun, Juridis Info
n° 17, janvier- février-mars 1994, pp.54-56.
3-KAMTO (M), Note sous CS-AP, arrêt
n°1/A du 27 novembre 1986, SEBA NDONGO Jean c/ État du Cameroun
(D.G.S.N), Juridis info n°2, avril -mai - juin 1990, pp.51-52.
4-KEUTCHA TCHAPNGA (C), « Une
délicate révolution dans la procédure administrative
contentieuse au Cameroun / À propos du traitement récent de
l'urgence par le juge des référés. Note sous Cour
Suprême du Cameroun, ordonnance de référé n°6
du 08 décembre 1998 SOSSO Emmanuel c /Crédit Foncier »
Juridis Périodique n°45, janvier-février- mars 2001, pp.
41-45.
5- KEUTCHA TCHAPNGA (C) et GNIMPIEBA
TONNANG (E), Note sous SIGHOKO FOSSI Abraham c/ État du
Cameroun (MINSANTE) Ordonnance n°/CS/PCA du 5 octobre 1992, Juridis
Périodique n°68, octobrenovembre-décembre 2006,
pp.115-120.
6-MBOME (F-X), Note sous CS-CA, jugement
n°03/90-91 du 21 novembre 1990 AYINA ABE Benoit c/ État du
Cameroun, Juridis Périodique n°36, octobre- novembre
-décembre 1998, pp.35-40.
7-MBOUENDEU (J-D), Note sous CS-CA, jugement
n°32/87-88 du 26 novembre 1987, KEMAYOU Pierre c/ État du Cameroun,
Juridis info n°2, avrilmai -juin 1990, p.53.
- NLEP (R.G),
8* Note sous jugement n° 64/CS-CA du 29 juin 1989, MBARGA
Damien c/ État du Cameroun, RJA n°1, 1991, pp.83-88.
9** Note sous jugement n°58/CS-CA du 29 juin 1989,
Société RAZEL CAMEROUN c/État du Cameroun et Commune
rurale de Tiko, RJA n°1, 1991, pp.89-92.
-SIETCHOUA DJUITCHOKO (C),
10* Note sous jugement n° 14/94-95/CS-CA du 26 janvier 1995,
YAP Jean Emile c/ État du Cameroun, Juridis Périodique n°42,
avril -mai -juin 2000.
11** Note sous GUIFFO Jean-Philippe c/ État du
Cameroun, CS-AP arrêt n°01/A du 25 février 1999, Juridis
Périodique n°65, janvier- février- mars 2006, pp. 39-49.
12*** Revue de Jurisprudence de la Cour Suprême-Chambre
Administrative, Juridis Périodique n°77,
janvier-février-mars 2007, pp.49-57.
VI - COURS
1-ABA'A AYONO (J.C), Pratique des contentieux de
Droit public, Cours de Master II recherche, Université de Dschang, FSJP,
2008- 2009.
- KEUTCHA TCHAPNGA (C),
2*Méthodologie de la recherche, Cours polycopié de
Master II recherche, Université de Dschang, FSJP, 2008-2009.
3**Contentieux administratif, Cours de Licence, Université
de Dschang, FSJP, 2006-2007.
4-ONDOA (M), Théories,
méthodologie et épistémologie du Droit, Cours de Master II
recherche, Université de Dschang, FSJP, 2008-2009.
- SIETCHOUA DJUITCHOKO (C),
5 *Droit et contentieux fiscaux, Cours polycopié de
Maîtrise, Université de Dschang, FSJP, 2007-2008.
6**Droit des nouveaux contrôles administratifs et
financiers au Cameroun, Cours polycopié de Master II Recherche,
Université de Dschang, FSJP, 2008- 2009.
7-TCHAKOUA (J-M), Les modes alternatifs de
règlement des différends, Cours polycopié de Maitrise,
Université de Dschang, FSJP, 2007-2008.
VII - DOCUMENTS OU SOURCES ÉLECTRONIQUES
1-BRISSON (J.F), "Problèmes de
procédure administrative non contentieuse". Table ronde
organisée par La Chaire "Mutations de l'Action Publique et du
Droit Public", Sciences Po .Contribution de Jean François
BRISSON : «Les recours
administratifs préalables obligatoires en droit public
français, alternative au juge ou voie sans issue ? »,
Contribution_Jean _ François_ BRISSON.PDF, 14 p.
2- Circulaire du 7 septembre 2009 relative au recours à
la transaction pour la prévention et le règlement des litiges
portant sur l'exécution des contrats de la commande publique en France,
fichier PDF ,8 p.
3-CASSIA (P), « Vers une action
collective en droit administratif ? » RFDA, 2009, pp. 657et ss.
4-ENONE EBOH (T), Les délais dans le
contentieux de l'excès de pouvoir au Bénin. Disponible sur
http://www.memoireonline.com
2007
5-
http://admi.net.jo/20000413/FPPX980029L.html,
Le recours administratif préalable devant l'Administration.
6-
http://WWW.conseil-etat.fr/ce/actual/pdf/rapo_dossier_de_presse.
pdf. Les recours administratifs préalables obligatoires à la
saisine du juge : un mode souple de règlement des conflits,
Conférence de presse, mardi 16 septembre 2008, 15 p.
7- http : //fr .WIKINEWS.org/WIKI/Droit public_en_ France : La_
liaison_ du_ contentieux en cours d'instance#colum one.
_ _ _
8-BOUSQUET (J-B), « Une circulaire pour
favoriser le recours aux transactions administratives » (À
propos de la circulaire du 7 septembre 2009,).Disponible sur le site
http://www.lextenso.fr/weblextenso/article/print?id=PA200923605
, Petites affiches, n° 236, 26 novembre 2009 ,4 p.
9-Mémoire du barreau du Québec sur le recours
collectif en Cour Fédérale du Canada (Fichier PDF) ,18 p.
10-L'accès a la justice : un droit fondamental /le
point de vue de l'avocat. Conférence « Vers un meilleur
accès des citoyens à la justice », Bruxelles, 24-26
octobre 2002. Intervention de Madame Karine Métayer, Avocat, Conseil des
Barreaux de l'Union européenne (CCBE).Fichier PDF, 4 p.
VIII - RECUEILS DE JURISPRUDENCE
1- MBOME (F-X), Jurisprudence de la Chambre
administrative du Cameroun, 341p.
2- MBOUYOM (F-X), Recueil des grands
Arrêts de la Jurisprudence Administrative de la Cour Suprême du
Cameroun, 1970-1975, T.2, Ed. KENKOSON, Yaoundé, 370 p.
IX - LEXIQUES ET DICTIONNAIRES
1- GUILLIEN (R) et VINCENT (J), Lexique des
termes juridiques, Dalloz, 1987, 483 p.
2- Dictionnaire Microsoft Encarta 2009.
TABLE DE JURISPRUDENCE
- CE, CADOT, 1889.
- Jugement CCA du 29 novembre 1956 EKONG Yves Adolphe c/
Territoire du Cameroun.
- Arrêt n°32/ CFJ-CAY du 15 novembre 1966, Dame LAMI
ABSATOU Bi Mohaman c/ État du Cameroun.
- Arrêt n°19/CFJ-AP du 16 mars 1967, TAGNY Mathieu c/
État du Cameroun.
- Arrêt n°9/ CFJ-AP du 16 octobre 1968, BABA YOUSSOUFA
c/ État du Cameroun.
- Arrêt CFJ du 6 janvier 1970, NKWENKAM MOLHIE Luc c/CPE de
Yaoundé. - CE, DELORT, 20 février 1970.
- Arrêt n°173/CFJ-CAY du 08 juin 1971, OWONO ESSONO
Benoit c/ État Fédéré du Cameroun Oriental.
- Arrêt n°1/A/CS-AP du 8 novembre 1973, YOUMBI
André c/ État du Cameroun.
- Jugement n°65/CS-CA du 22 avril 1974, EDIMO Jean Charles
c/ État du Cameroun.
- Arrêt n°6/A/CS-AP du 09 janvier 1975, CDC
c/SOCOPAO.
- Jugement n°69/CS-CA du 24 avril 1976, ABENELANG Gustave c/
État du Cameroun.
- Jugement n°71/CS-CA du 13 mai 1976, BENE BELLA Lambert c/
État du Cameroun.
- Jugement n°34/CS-CA du 31 mars 1977, KALLA EPANYA Jacques
c/ État du Cameroun.
- Jugement n°12/CS-CA du 27 avril 1978, ITEM
Dieudonné c/ État du Cameroun.
- Jugement n°14/77-78/CS-CA du 27 avril 1978, ATANGANA
ESSOMBA Protais c/ État du Cameroun.
- Jugement n°19/CS-CA du 27 avril 1978, NGONGANG Richard c/
État du Cameroun.
- Jugement n°22/77-78/CS-CA du 27 avril 1978, NDJANA Pascal
Bether c/ État du Cameroun.
- Jugement n°24/CS-CA du 13 juillet 1978, ESSOMBA NTONGA
Gabriel c/ État du Cameroun.
- Jugement n°30/77-78/CS-CA du 13 juillet 1978, AKA'A Jules
c/ État du Cameroun.
- Jugement CS-CA du 28 décembre 1978, Dame MBOCKA
Jeannette c/ État du Cameroun.
- Jugement n°01/79-80/CS-CA du 29 novembre 1979, ESSIMI
Fabien c/ État du Cameroun.
- Jugement n°6/CS-CA du 29 novembre 1979, Les Brasseries du
Cameroun S.A c/ État du Cameroun.
- Arrêt n°1/A/CS-AP du 6 décembre 1979, FOUDA
Hubert c/État du Cameroun.
- Jugement n°34/CS-CA du 24 avril 1980, ESSOUGOU
Benoît c/ État du Cameroun.
- Jugement n°40/CS-CA du 30 avril 1981, GUIFFO Jean-Philippe
c/ État du Cameroun.
- Jugement n°46/CS-CA du 30 avril 1981, OUMAROU Paul c/
État du Cameroun.
- Jugement n°9/CS-CA du 28 avril 1982, NGANKOU Amos Flaubert
c/ État du Cameroun.
- Jugement n°45/CS-CA du 25 mai1982, DZIETHAM Pierre c/
État du Cameroun.
- Jugement n°1/CS-CA du 29 novembre 1982, ESSIMI Fabien c/
État du Cameroun.
- Arrêt n°8/A/CS-AP du 17 novembre 1983, État
du Cameroun c/DZIETHAM Pierre.
- Jugement n°70/84-85/CS-CA du 25 octobre 1984, SEBA NDONGO
Jean c/ État du Cameroun (DGSN).
- Arrêt n°16/A/CS-AP du 13 juin 1985, GUIFFO
Jean-Philippe c/ État du Cameroun.
- Arrêt n°1/CS-AP/ du 27 novembre 1986, SEBA NDONGO
Jean c/ État du Cameroun 1986.
- Jugement n°32/87-88/CS-CA du 26 novembre 1987, KEMAYOU
Pierre c/ État du Cameroun.
- Jugement n°8/87-88/CS-CA du 29 octobre 1987, MASSO LOBE
Jean Charles c/ État du Cameroun.
- Jugement n°44/87-88/CS-CA du 28 janvier
1988, BABOULE Pierre c/ État du Cameroun.
- Jugement n°40/CS-CA du 25 mai 1989, ZENGUE NGOULOU
Dagobert c/ État du Cameroun.
- Jugement n°58/CS-CA du 29 juin 1989, Société
RAZEL Cameroun c/ État du Cameroun et Commune rurale de Tiko.
- Jugement n°64/CS-CA du 29 juin 1989, MBARGA Damien c/
État du Cameroun.
- Jugement n°13/CS-CA du 23 novembre 1989, ENYENGUE DIPOKO
Bernard c/ État du Cameroun.
- Jugement n°03/90-91/CS-CA du 21 novembre 1990, AYINA ABE
Benoît c/ État du Cameroun.
- Ordonnance de référé
n°13/OR/PCA/90-91 du 25 avril 1991, Journal « Le Messager
» c/État du Cameroun.
- Ordonnance de sursis n°21/OSE/PCA/ 91-92 du 26 juillet
1992, Dame MAYOUGA Yvonne c/ État du Cameroun (MINSANTE).
- Ordonnance de sursis n°05/CS/PCA du 5 octobre 1992,
SIGHOKO FOSSI Abraham c/ État du Cameroun (MINSANTE).
- Jugement n° 19 /ADD/CS-CA du 31 décembre 1992,
EFFOUDOU Camille c/ État du Cameroun.
- Jugement n°44/92-93/CS-CA du 24 juin 1993, NABION Maurice
c/Université de Yaoundé.
- Jugement n°36/93-94/CS-CA du 31 mars 1994,
Société MOORE PARAGON c/ État du Cameroun.
- Jugement n° 14/94-95/CS-CA du 26 janvier 1995, YAP Jean
Emile c/ État du Cameroun.
- Ordonnance de sursis du 27 juin 1997, DJANBOU Maurice
c/SOCADIC.
- Ordonnance de référé n°06/du 08
décembre 1998, SOSSO Emmanuel c/Crédit foncier du Cameroun.
- Arrêt n°01/A/CS-AP du 25 février 1999, GUIFFO
Jean-Philippe c/ État du Cameroun.
- Jugement n°71/CS-CA du 28 septembre 2000, NGANG Anatole c/
État du Cameroun.
- Jugement CS-CA du 07 décembre 2000, MAMA BILOA Sandrine
c/Université de N'Gaoundéré.
- Jugement n°36/2001-2002/CS-CA du 27 juin 2002, EMBOLO
MVOLA Anne épouse ABESSOLO et Maître Etienne ABESSOLO c/
État du Cameroun (P R).
- Jugement n°02/2002-2003/CS-CA du 31 octobre 2002, MENTOKE
Fridolin c/ État du Cameroun (DGSN).
-- Jugement n°106/02-03/CS-CA du 27 août 2003, SOBGUI
Gabriel Alexis c/ État du Cameroun (MESIRES) et Université de
Yaoundé.
- Jugement n°112/02-03/CS-CA du 03 septembre 2003, FOE
Théodore c/ État du Cameroun(DGSN).
- Jugement n°128/02-03/CS-CA du 24 septembre 2003, Me
N'DENGUE Thomas Byll c/ État du Cameroun (MINFIB).
- Jugement n°5/CS-CA du 29 octobre 2003, NZEUSSEU Christophe
c/ État du Cameroun (DGSN).
- Ordonnance de sursis à exécution
n°039/OSE/CAB/PCA/CS/ 03-04 du 05 juillet 2004, Association des
Témoins de Jéhovah c/ État du Cameroun (MINUH).
- Ordonnance de référé
n°41/OR/CAB/PCA/CS/2003-2004 du 07 juillet 2004, Social Democratic Front
c/ État du Cameroun (MINATD et MINEFIB).
- Jugement n°36/04-05/CS-CA du 29 décembre 2004,
Crédit foncier du Cameroun c/ État du Cameroun(MTPS) et MISSOKA
Antoine Marie.
- Jugement n°37/04-05/CS-CA du 29 décembre 2004,
ACHENGUI c/Communauté urbaine de Yaoundé.
- Jugement n°49/04-05/CS-CA du 02 février 2005,
BIDJEBELE Joseph c/ État du Cameroun (MFPRA).
- Jugement n°45/2004-2005/CS-CA du 05 février 2005,
Société NKUITE et Compagnie c/ État du Cameroun,
(MINEFI).
- Jugement n°65/04-05/CS-CA du 23 mars 2005, MINDANG Michel
c/ État du Cameroun (MFPCE).
- Jugement n°127/04-05/CS-CA du 22 juillet 2005, DANG Joseph
c/ État du Cameroun(DGSN).
- Jugement n°125/04-05/CS-CA du 27 juillet 2005, NOUMEN
NTCHAO Justin c/ État du Cameroun (MINEFI).
-Jugement n°159/2004-2005/CS-CA du 27 juillet 2005, Dame
AGNOUNG MOUTE Bernadette c/Cameroon Télécommunications.
- Jugement n°41/2005-2006/CS-CA du 18 janvier 2006, EKOBENA
et ONANA MESSINA Marcel c/ État du Cameroun (MINUH) et MBAGOFA et
autres.
- Jugement n°45/2005-2006/CS-CA du 1er
février 2006, FOGANG Moïse c/ État du Cameroun (MINUH).
- Jugement n°57 /05-06/CS-CA du 05 avril 2006, ENONCHONG
Henry ABI NDIFOR c/ État du Cameroun(MINUH) et ayants droit de Gustave
KOUAMBO.
- Jugement n°73/05-06/CS-CA du 05 avril 2006, Dame veuve
ANABA née MEUGUE Juliette c/ État du Cameroun (MINUH) et MBALLA
MBOUNOUNG.
- Jugement n°97/2005-2006/CS-CA du 14 juin 2006,
Association Commune Internationale des Femmes Messagers du Christ (CIFMC) c/
État du Cameroun (MINAT) et Madame LEMOTIO née ELELONGUE NDINE
Solange Alvine.
- Jugement n°110 /05-06/CS-CA du 12 juillet 2006, Nouvel
office de transit du Cameroun c/CNPS.
- Jugement n°130 /05-06/CS-CA du 12 juillet 2006,
Collectivité Mvog-Nkili c/ État du Cameroun.
- Jugement n°130/04-05/CS-CA du 27 septembre 2006,
Succession EKOBENA FOUDA Jean c/ État du Cameroun (MINUH) et KABAC TJOL
Philémon.
- Jugement n°124/2006-2007/CS-CA du 28 novembre 2007,
NGAWOUO c/ État du Cameroun (MINMEE).
- Jugement n°29/2008/CS-CA du 02 avril 2008, ZONG OKOMO c/
État du Cameroun (SESI).
- Jugement n°45 /2008/CS-CA du 02 avril 2008, NJOCK
née ONOMESSENE Brigitte J-F c/ État du Cameroun (PM).
- Jugement n°46 /2008 /CS-CA du 02 avril 2008, OKONO Jean
Gilles c/ État du Cameroun (PM).
- Jugement n°47/2008/CS-CA du 02 avril 2008, ESSOMBA
Apollinaire c/ État du Cameroun (PM).
- Jugement n°66/2008 /CS-CA du 18 juin 2008, Entreprise
des Travaux à Hydraulique et de Génie Civil (ETHYGEC) c/
Communauté urbaine de Yaoundé.
- Jugement°70/2008/CS-CA du 18 juin 2008, TONYE Jean
Alphonse c/ État du Cameroun (MINDEF).
- Jugement n°71/2008/CS-CA du 18 juin 2008, Dame veuve PENTE
née DJABOU Marie c/ État du Cameroun(MINATD).
- Jugement n°74/2008/CS-CA du 18 juin 2008, TONDJA NDJEUDJI
René c/ État du Cameroun (MINDAF).
- Jugement n°83/2008/CS-CA du 18 juin 2008, Syndicat
national des professionnels de la comptabilité c/ État du
Cameroun (MINEFI).
- Jugement n°84/2008/CS-CA du 18 juin 2008, MBENOH Joseph et
BELL BELL II c/ État du Cameroun (PM).
- Jugement n°133/2008/CS-CA du 18 juin 2008, BOLO MBADE
Joseph Jérôme c/ État du Cameroun (Ministère de la
culture).
- Jugement n°90/2008/CS-CA du 13 août 2008, KWANYA
NGANGWA André Richard c/ État du Cameroun (Communauté
Urbaine de Douala).
- Jugement n°91/2008/CS-CA du 13 août 2008, Groupement
Babouantou c/ État du Cameroun(MINAT) et Groupement Bangou.
- Jugement n°57/2009/CS-CA du 11 mars 2009, CHOUALA Yves
Alexandre c/État du Cameroun (PM).
- Jugement n°59/2009/CS-CA du 11 mars 2009, KOE Jr Jean
Patrice c/État du Cameroun (PR).
- Jugement n°79/2009/CS-CA du 25 mars 2009, SANGALE MAGBEKA
Jules Alain c/État du Cameroun (PM).
- Jugement n°81/2009/CS-CA du 25 mars 2009, Madame OWONA
Née MINKUE Laure c/État du Cameroun (PM).
- Ordonnance de sursis à exécution
n°15/OSE/CS/2009/CS-CA du 30 avril 2009, État du Cameroun (MINCULT)
c/ La CAMEROON MUSIC CORPORATION (CMC).
- Ordonnance de sursis n°29/OSE/CCA/2009/ CS-CA du 17
juillet 2009, KENMOE Emmanuel c/ État du Cameroun (MINDAF).
TABLE DES MATIÈRES
AVERTISSEMENT i
TABLE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS ii
SOMMAIRE iv
RÉSUMÉ v
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
PREMIÈRE PARTIE : UNE TRANSFORMATION
LIMITÉE DES EXIGENCES DE FORME DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE
.... 14
CHAPITRE-1 : LA RÉAFFIRMATION DU CARACTÈRE
D'ORDRE PUBLIC DU RECOURS GRACIEUX 16
SECTION-1 : LE CHAMP D'APPLICATION DE LA RÈGLE DU RECOURS
GRACIEUX PRÉALABLE 16
PARAGRAPHE-1 : LE RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE EN
MATIÈRE ORDINAIRE 17
A- La rigueur formelle de l'article 17 de la loi de 2006 17
1-La protection précontentieuse de l'Administration 18
2-Le bien fondé du recours gracieux préalable pour
le justiciable et le juge 19
B - La liaison du contentieux administratif par le recours
gracieux prealable 20
1 - La nécessité d'une liaison du contentieux par
le recours gracieux 20
2 - Les conséquences de l'exigence d'une liaison du
contentieux par le recours gracieux préalable 21
a- Le rejet des recours contentieux
prématurés 21
b- Le rejet des recours gracieux mal dirigés 22
c -L'irrecevabilité des demandes non soumises au
préalable a l'Administration 23
PARAGRAPHE-2 : LE RECOURS GRACIEUX EN MATIÈRE D'URGENCE
26
A- L'exigence nouvelle d'un recours gracieux dans le
référé administratif
27
1 - La remise en cause de l'acquis de 1975 27
2 - La dénaturation de l'urgence par l'exigence d'un
recours gracieux préalable en référé 29
B- La survivance du recours gracieux préalable dans le
sursis à execution
30
PARAGRAPHE-3 : LE RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE ET LES VOIES
DE RECOURS 32
A- Recours gracieux préalable et pourvoi en appel 32
B - Recours gracieux préalable et pourvoi en cassation
34
SECTION-2 : LA TRADUCTION JURISPRUDENTIELLE DU CARACTÈRE
D'ORDRE PUBLIC 36
PARAGRAPHE-1 : LA JURISPRUDENCE CONSTANTE DU JUGE ADMINISTRATIF
36
A- L'arrêt de principe 36
B -La jurisprudence confirmée 37
PARAGRAPHE-2 : LE REJET DES RECOURS GRACIEUX
COLLECTIFS 38
A- L'affirmation récente de la notion de recours gracieux
collectif dans la jurisprudence administrative 39
1 - la consécration de la notion de recours gracieux
collectif 39
2 - Exposé d'un cas d'espèce : Affaire CHOUALA Yves
Alexandre c/État du Cameroun (PM), jugement n°57/2009/CS-CA du 11
mars 2009 40
B - Les motifs d'irrecevabilité des recours gracieux
collectifs 42
C- Analyse critique du rejet des recours gracieux collectifs
44
CONCLUSION DU CHAPITRE 1 47
CHAPITRE-2 : L'ATTÉNUATION DE LA RÈGLE DU
RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE 48
SECTION-1 : LA MULTIPLICATION DES EXCEPTIONS À LA
RÈGLE DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE 48
PARAGRAPHE-1 : LES EXCEPTIONS LÉGALES 48
A- Les exceptions inhérentes aux lois sur les droits et
libertés publiques et aux lois électorales 49
1 - Les exceptions inhérentes aux lois sur les droits et
libertés publiques 49
2- les exceptions en matière électorale 51
B - La création d'un organisme de controle
budgétaire et financier : le Conseil de Discipline Budgétaire et
Financier (CDBF) 53
PARAGRAPHE- 2 : LES EXCEPTIONS JURISPRUDENTIELLES 54
A - Les exceptions jurisprudentielles en matière d'urgence
54
B - Les exceptions jurisprudentielles en matière ordinaire
56
SECTION-2 : LES JUSTIFICATIONS DES EXCEPTIONS À LA
RÈGLE DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE 58
PARAGRAPHE- 1 : LA PROMOTION DES DROITS DE L'HOMME ET
LIBERTÉS PUBLIQUES 58
PARAGRAPHE-2 : LA PRISE EN CONSIDÉRATION DES QUESTIONS
ÉLECTORALES 59
CONCLUSION DU CHAPITRE 2 61
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE 62
SECONDE PARTIE : UNE MODIFICATION ATTÉNUÉE
DES EXIGENCES DE FOND DU RECOURS GRACIEUX PRÉALABLE 63
CHAPITRE-1 : LA SIMPLIFICATION DES RÈGLES RELATIVES
À LA DÉTERMINATION DE L'AUTORITÉ ADRESSATAIRE DU RECOURS
GRACIEUX PRÉALABLE 65
SECTION-1 : LES PRINCIPALES HYPOTHÈSES 65
PARAGRAPHE-1 : L' AUTORITÉ ADRESSATAIRE DU RECOURS
GRACIEUX PRÉALABLE AU NIVEAU DE L'ÉTAT 66
A - L'auteur de l'acte querellé, destinataire du recours
gracieux 66
B - L'abrogation de l'expression « Ministre
compétent », destinataire du recours gracieux préalable
68
PARAGRAPHE-2 : L'AUTORITÉ ADRESSATAIRE DU RECOURS GRACIEUX
PRÉALABLE DANS LES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS 71
A- Présentation des établissements publics 72
B - L'autorité statutairement habilitée à
représenter l'établissement public en cause 73
C - La détermination de l'autorité statutairement
habilitée à representer l'établissement public en cause
76
SECTION - 2 : LES AUTRES HYPOTHÈSES 77
PARAGRAPHE -1 : L'AUTORITÉ ADRESSATAIRE DU RECOURS
GRACIEUX PRÉALABLE À L'ÉCHELON DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES DÉCENTRALISÉES 78
A - L'application des règles ordinaires du contentieux
administratif ... 78
B- La suppression du recours de tutelle accessoire au recours
gracieux préalable 81
PARAGRAPHE-2 : LA DÉTERMINATION DE L'AUTORITÉ
ADRESSATAIRE DU RECOURS GRACIEUX DANS LE CONTENTIEUX FISCAL 85
A- Le Ministre des finances, destinataire du recours gracieux
85
B - L'absence du recours gracieux dans le sursis de paiement en
matière fiscale 88
PARAGRAPHE- 3 : L'OPPORTUNITÉ DE LA PRESCRIPTION D'UNE
OBLIGATION DE TRANSMETTRE LE RECOURS GRACIEUX EN CAS D'ERREUR DU
REQUÉRANT 90
CONCLUSION DU CHAPITRE 1 93
CHAPITRE-2 : LA QUASI STABILITÉ DES RÈGLES
RELATIVES AUX DÉLAIS DU RECOURS GRACIEUX 95
SECTION-1 : LA PERMANENCE DES ÉLÉMENTS DE
DÉTERMINATION DES DÉLAIS 96
PARAGRAPHE-1 : LA DÉTERMINATION DES DÉLAIS SELON
L'OBJET DU LITIGE 96
PARAGRAPHE-2 : LA DÉTERMINATION DES DÉLAIS SELON LA
SITUATION DU DEMANDEUR 97
A - Cas du demandeur en situation normale 97
B - Situation du demandeur provoquant une décision
confirmative d'une autre non attaquée 98
SECTION-2 : LA QUASI CONSTANCE DES MODALITÉS DE
COMPUTATION DES DÉLAIS 99
PARAGRAPHE- 1 : LES DÉLAIS DE PRINCIPE DU RECOURS GRACIEUX
99
A- Les modalités de computation des délais de
principe 100
B - Les modalités de computation des délais du
recours gracieux préalable acheminé par voie postale 101
PARAGRAPHE-2 : LES CAS DE PROROGATION DES DÉLAIS 104
A- La force majeure et le motif grave 104
B - La distance et l'incidence des dimanches et jours
feriés 105
CONCLUSION DU CHAPITRE 2 108
CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE 109
CONCLUSION GÉNÉRALE 111
LISTE DES ANNEXES 115
BIBLIOGRAPHIE 150
I - OUVRAGES 150
II-ARTICLES DE DOCTRINE 151
III- THÈSES ET MÉMOIRES 153
1-THÈSES 153
2-MÉMOIRES 154
IV-TEXTES JURIDIQUES 154
V - NOTES DE JURISPRUDENCE 156
VI - COURS 157
VII - DOCUMENTS OU SOURCES ÉLECTRONIQUES 157
VIII - RECUEILS DE JURISPRUDENCE 158
IX - LEXIQUES ET DICTIONNAIRES 159
TABLE DE JURISPRUDENCE 159
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