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Analyse du système de commercialisation des graines de "voacanga africana" au Bénin et les implications pour la conservation de l'espèce

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par K. Edem Aubin Fafeh
 - agroéconomiste 2011
  

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1.1.5. Voacanga africana : généralités et commercialisation

Généralités

Voacanga africana, de nom vernaculaire1(*) Voacanga d'Afrique en français, est répandu dans toute l'Afrique tropicale continentale, du Sénégal jusqu'au Kenya vers l'est et jusqu'à l'Angola, au Zimbabwe et au Mozambique vers le sud. C'est un petit arbre qui peut atteindre une hauteur de 10 m, avec une division dichotome des branches. Le tronc atteint 30 cm de diamètre et exsude un latex blanc à la coupure. Les feuilles sont opposées, simples, entières avec une petite ochréa membraneuse à la base du pétiole. Le limbe est elliptique de 7-42 cm, à base cunéiforme à décurrente sur le pétiole. L'inflorescence est une cyme et le fruit est constitué de deux follicules séparés, verts jaunes à la maturité. Ils contiennent de nombreuses graines ellipsoïdales, de couleur marron et de forme irrégulière (Maroyi, A., 2006).

La plante pousse sur terre ferme parfois à proximité des marécages, surtout dans les sables littoraux humides de la zone soudanoguinéenne. Elle résiste aux inondations temporaires ; toutefois, si ces périodes se prolongent, il en résulte une déperdition des feuilles consécutive à une sécheresse physiologique (Eyog Matig O. et al., 2006).

La régénération se fait par germination des graines tombées à terre. La multiplication se fait par semis des graines ou par bouturage de la tige ou des racines (taux de bourgeonnement atteignant 80%). Les plantes issues du semis présentent un fût plus allongé et fructifient après 7 à 8 ans tandis que les plantes issues du boutures de tiges aoûtées fructifient dès la 2ème année après la plantation (Eyog Matig O. et al., 2006).

Différentes parties de la plante de Voacanga africana ont des usages médicinaux dans toute son aire de répartition.

Le latex ou une décoction ou infusion de l'écorce de la tige, des feuilles ou des racines sont appliqués sur les blessures, les furoncles ou les plaies, et servent à traiter la blennorragie, l'eczéma, les infections cryptogamiques et la gale. On les absorbe également pour traiter les problèmes cardiaques, l'hypertension et les affections rhumatismales (Nkuinkeu, 2000). Le latex est appliqué sur les dents pour traiter les caries, et en gouttes dans les yeux il traite l'ophtalmie (Maroyi, A., op. cit).

Au Sénégal, on boit une décoction de feuilles comme tonique et contre la fatigue. Une décoction de racines est administrée trois fois par jour pour traiter les douleurs après l'accouchement et les hernies. En Côte d'Ivoire, une décoction de feuilles est administrée en lavement contre la diarrhée ; on en met dans un bain contre l'oedème, et on l'utilise en friction et comme ingrédient d'une boisson pour traiter la lèpre. On applique de la pulpe des feuilles ou de l'écorce de la tige pour calmer les convulsions chez les jeunes enfants, et le jus est introduit dans les narines comme tranquillisant. Au Cameroun, le fruit est employé en infusion pour traiter les ulcères d'estomac. En R.D. du Congo, on boit une décoction d'écorce contre les vers intestinaux, mais on considère cela comme un remède dangereux. Une infusion de ramilles est administrée contre la bronchite. Une pâte préparée à partir des racines est appliquée sur la tête pour tuer les poux. Les racines séchées et réduites en poudre sans leur écorce externe sont mélangées à de la bouillie pour traiter les affections rénales et les problèmes de menstruation chez les femmes. En Tanzanie, on prépare avec de l'eau froide un extrait de fruits et de graines qui est absorbé contre les lésions internes. Les graines sont également utilisées pour traiter l'hypertension sanguine. L'écorce des racines des espèces de Voacanga est couramment ingérée par les chasseurs et les batteurs de tamtam pour combattre la fatigue et accroître leur endurance, et également, à plus forte dose, à des fins magiques et religieuses (Maroyi, A., op. cit.).

Des firmes pharmaceutiques européennes extraient des graines la tabersonine, qui est facilement convertie en vincamine, composé largement utilisé en gériatrie. On utilise aussi des extraits de graines dans des médicaments destinés à traiter les maladies de coeur, abaisser la pression sanguine et soigner le cancer (Maroyi, A., op. cit.).

Au Sénégal, les fruits sont considérés comme comestibles. En Afrique de l'Ouest, le copieux latex a été employé pour falsifier le caoutchouc d'Hevea, et les enfants en font des balles pour jouer. Comme il est collant, il sert de glu pour capturer les oiseaux. En Zambie et au Ghana, on brûle le bois pour en tirer du sel. Voacanga africana fournit des perches de construction, mais son bois est considéré comme étant de qualité inférieure. A partir des branches, on confectionne des flèches et des gaines de couteau. En R.D. du Congo, le bois sert à confectionner des instruments de musique. Le bois est également utilisé comme bois de feu. L'écorce fournit une bonne fibre, qui sert à faire des cordes. Au Nigeria, on en fait un fil qui est mélangé à du fil de coton et d'autres fibres pour confectionner des nattes. En Tanzanie, Voacanga africana est planté comme plante ornementale en raison de ses fleurs blanches odorantes (Maroyi, A., op. cit.).

Les usages des différentes parties de Voacanga africana sont aussi divers que variés.

Commercialisation

Voacanga africana est l'une des plantes médicinales exportées de l'Afrique tropicale vers l'Occident. Plus de 400 tonnes de graines de Voacanga africana sont exploitées au Cameroun par les paysans et exportées vers l'Europe. Entre 1984 et 1985, 30,5 tonnes de produits de Voacanga africana (écorces, racines et graines) ont été exportées (Thomas, 1987). En 1989, 575 tonnes ont été exportées en France (Cunningham, 1993 cité par Eyog Matig O. et al., 2006).

Il existe depuis les années 1980 un marché régulier pour les graines de Voacanga. Plusieurs centaines de tonnes de graines de Voacanga africana et de certaines autres espèces de Voacanga, comme par ex. Voacanga thouarsii, sont exportées de Côte d'Ivoire, du Ghana, du Cameroun et de la R.D. du Congo à destination de firmes pharmaceutiques de France et d'Allemagne (Eyog Matig O. et al., 2006).

Les prix à l'exportation du Cameroun en 2004 ont été (par kg) : écorce de la tige US$ 14, poudre d'écorce de la tige US$ 18, racines US$ 14, poudre de racines US$ 18, écorce de racines US$ 47, poudre d'écorce de racines US$ 51, graines US$ 6. Aux Etats-Unis, les prix des graines ou de l'écorce de racines relevés sur Internet en 2005 étaient les suivants : 30 g de graines US$ 20, 30 g d'écorce de racines US$ 24, 115 g d'écorce de racines US$ 80, 450 g d'écorce de racines US$ 280, 1 kg d'écorce de racines US$ 400 (Maroyi, A., op. cit.).

De ce qui précède, l'on peut dire que les acteurs du commerce de V. africana brassent visiblement d'importants flux de graines et de monnaies. L'espèce est bien ancrée dans le commerce international, le Cameroun, le Ghana, la Côte d'Ivoire et la R.D. du Congo étant les principaux pays exportateurs ds produits de V. africana dans l'espace géographique ouest et centre africain.

* 1 Small-fruit wild frangipani en anglais, Cata grande en portugais, alè en fon (langue béninoise dans la zone d'étude)

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille