§ 2 : Un principe qui ne fait pas obstacle à
une protection spécifique des actionnaires minoritaires.
L'actionnaire minoritaire peut être défini comme
tout apporteur de capitaux qui « en raison, de la faiblesse de son
apport, n'a pas droit de regard sur la gestion des dirigeants d'une
société. Les minoritaires se distinguent des
majoritaires par l'influence qu'ils peuvent avoir en assemblée
»92. Même si le principe de l'égalité de
traitement des actionnaires, majoritaires comme minoritaires, est
affirmé à diverses reprises par des directives européennes
de droit des sociétés, force est de constater qu'il ne fait pas
obstacle à la prise en considération par celles-ci de la position
d'actionnaire minoritaire et à l'édiction de dispositions
protégeant spécifiquement celui-ci. Ainsi, certaines directives
prévoient un traitement différencié en sa faveur, ayant
vocation à compenser les inconvénients découlant de sa
position de minoritaire « soumis à la loi de la majorité
qui règne dans les sociétés par actions
»93.
Tel est le cas de la directive 2005/56/CE sur les fusions
transfrontalières de sociétés de capitaux, dont l'article
10 § 3 prend en considération une procédure prévue
par les droits allemand et autrichien qui permet aux actionnaires s'estimant
lésés par le rapport d'échange des actions convenu au
projet de fusion et approuvé par l'assemblée
générale des actionnaires de contester cette parité
d'échange. De la même façon, l'article 4 § 2 de cette
directive donne aux législateurs nationaux la faculté d'adopter
« des dispositions destinées à assurer une protection
appropriée aux associés minoritaires qui se sont prononcés
contre la fusion transfrontalière ». Comme nous le verrons
ultérieurement, l'Allemagne a utilisé cette disposition pour
conférer un droit de retrait aux actionnaires minoritaires (§ 122i
UmwG). De
91 D. Verse, Der Gleichbehandlungsgrundsatz im Recht der
Kapitalgesellschaften, p. 100.
92 V. Magnier (sous la direction de), L'entreprise et le
droit communautaire : quel bilan pour un cinquantenaire ?, p. 78.
93 G. Ripert, R. Roblot, Les sociétés
commerciales, n°1597.
façon similaire, si la directive 2004/25/CE du 21 avril
2004 concernant OPA énonce, d'une part, au titre des principes
généraux OPA que « tous les détenteurs de titres
de la société visée qui appartiennent à la
même catégorie doivent bénéficier d'un traitement
équivalent », ses articles 15 et 16 prévoient, d'autre
part, des mécanismes de retrait et de rachat obligatoires s'appliquant
uniquement aux actionnaires minoritaires.
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