Sommaire
Abréviations françaises et allemandes II
Sommaire IV
Introduction 01
Première partie : L'influence du droit de l'Union
européenne sur l'acquisition de la qualité d'actionnaire et
l'exercice des droits y afférents 06
Chapitre premier : Le régime européen d'acquisition
de la qualité d'actionnaire ..06
Section 1 : Les droits et obligations des actionnaires dans le
cadre de la constitution de la société 06 Section 2 : La
protection du potentiel futur actionnaire par une information
adéquate : le prospectus d'émission (directive
2003/71/CE) ...15
Chapitre second : L'appréhension des droits essentiels de
l'actionnaire par le droit de l'Union européenne ... 19
Section 1 : Le principe d'égalité de traitement des
actionnaires 19
Section 2 : L'information des actionnaires, préalable
indispensable à une participation éclairée aux
décisions sociales 22 Section 3 : L'assemblée
générale, lieu d'expression de la démocratie
actionnariale .27
Seconde partie : La protection de l'actionnaire par le
droit de l'Union européenne à l'occasion d'opérations
spécifiques portant sur la société .. 31
Chapitre premier : La protection de l'actionnaire dans le cadre
des opérations afférentes au capital social .31
Section 1 : Le rôle de l'assemblée
générale des actionnaires 31
Section 2 : Le droit préférentiel de souscription
35
Section 3 : La réduction de capital social par retrait
forcé d'actions 42
Chapitre second : La protection des actionnaires minoritaires
dans le cadre des fusions et scissions de sociétés 43
Section 1 : Les fusions et scissions internes 43
Section 2 : Les fusions transfrontalières
..49
Chapitre 3 : La protection des actionnaires dans le cadre des
offres publiques d'acquisition 55
Section 1 : Présentation de la directive 2004/25/CE .
56
Section 2 : La protection des actionnaires minoritaires 59
Conclusion .....70
Synthèse en langue allemande 71
Glossaire des termes allemands 97
Bibliographie 101
Table des matières 108
Introduction
Au sein des matières constituant le champ
d'intervention du droit de l'Union européenne1 (UE) et
faisant l'objet d'une coordination, qui peut prendre la forme d'une
harmonisation ou d'une uniformisation, le droit des sociétés
constitue selon certains auteurs « un terrain d'analyse idéal
pour qui s'intéresse au processus de rapprochement des droits nationaux
au sein de l'Uni européenne »2. Le droit des
sociétés de l'UE trouve son fondement dans les articles 50 §
2 point g et 54 du Traité sur le fonctionnement de l'Union
européenne (ex-articles 44 § 2 point g et 48 TCE). La seconde de
ces dispositions proclame la liberté d'établissement des
sociétés dont le siège social est situé sur le
territoire d'un Etat membre de l'Union européenne et oblige les Etats
à supprimer toute discrimination à l'encontre des
sociétés régulièrement constituées dans un
autre Etat membre, et donc à les traiter de la même manière
que les sociétés constituées selon leur droit national et
situées sur leur propre territoire3, tandis que la
première donne au Conseil et à la Commission européenne le
pouvoir de coordonner, « dans la mesure nécessaire en vue de
les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées, dans les
Etats membres, des sociétés au sens de l'article 54,
deuxième alinéa, pour protéger les intérêts
tant des associés que des tiers ». Un double objectif est donc
imposé aux institutions européennes dans le domaine du droit des
groupements d'affaires, de telle façon que la coordination des droits
nationaux joue à la fois un rôle de protection des
intérêts des tiers, des associés et des actionnaires et
d'accompagnement de la concrétisation de la liberté
d'établissement4.
Préconisée par l'article 50 TFUE (ex-article 44
TCE), la technique de la coordination ou de l'harmonisation par voie de
directives occupe une place majeure dans l'activité de l'UE dans le
domaine du droit des sociétés. En application de l'article 288
TFUE (ex-article 249 TCE), la directive lie tout Etat membre destinataire quant
au résultat à atteindre, mais lui laisse la compétence
quant à la forme et aux moyens de parvenir à ce résultat,
ce qui signifie qu'une obligation de transposition des directives incombe aux
Etats membres. Parfois, ces normes d'origine européenne se «
diluent » dans les législations nationales de telle façon
que
1 Autant qu'il sera possible, nous essaierons de
préférer l'appellation « Droit de l'Union européenne
» à celle de « droit communautaire », caduque depuis
l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne le 1er décembre
2009. L'appellation de « droit communautaire » pourra cependant
réapparaître de temps à autre, dans la mesure où
celle de « droit européen » est de nature à
créer une confusion avec celle de « Droit du Conseil de l'Europe
», et en particulier de la Convention européenne de sauvegarde des
Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, qui n'entre pas dans le
cadre de la présente étude.
2 J.-S. Bergé, S. Robin-Olivier, Introduction au droit
européen, n°381.
3 V. Magnier (sous la direction de), L'entreprise et le droit
communautaire : quel bilan pour un cinquantenaire ?, p. 67.
4 V. Magnier, Rapprochement des droits dans l'Union
européenne et viabilité d'un droit commun des
sociétés », n°155.
l'on en vient à en oublier leur origine5, ce
qui donne « matière à une savoureuse méditation
sur le charme discret de l'intégration juridique furtive et
indolore »6 . En France, tel est le cas du droit
applicable aux fusions et scissions internes7. Ce
phénomène s'explique entre autres par le fait que le droit
européen des sociétés est le produit d'influences
réciproques : ainsi, le droit français a inspiré les
troisième et sixième directives sur les fusions et les scissions
internes et, réciproquement, ces deux directives l'ont contraint
à améliorer ses propres dispositions8. Cependant, il
faut souligner que, malgré son caractère contraignant,
l'harmonisation par voie de directives n'a pas permis de s'abstraire totalement
des différences de cultures juridiques entre les États membres et
des disparités des droits nationaux des
sociétés9. Par ailleurs, si la technique du
règlement n'est pas totalement exclue du champ du droit européen
des sociétés, elle y est davantage utilisée dans le but de
créer des formes supranationales de groupements, comme la
Société européenne10 ou le Groupement
européen d'intérêt économique11, qui ne
s'abstraient pas non plus des législations nationales.
Il n'est pas aisé de mettre en évidence des
traits généraux communs à l'ensemble des textes
européens de droit des sociétés, certains ayant une
formulation très précise qui ne laisse que peu de marge de
manoeuvre aux législateurs nationaux lors de leur transposition (c'est
par exemple le cas des deux premières directives), tandis que d'autres
ont un caractère beaucoup plus général, et utilisent
abondamment la technique du renvoi aux droits nationaux (« directives
cadres »)12. Cependant, la majorité de ces textes
présente un point commun : leur objectif est, entre autres, d'assurer la
protection des intérêts des « associés », notion
générique englobant celle d'« actionnaire »,
limitée aux sociétés par actions. Ces actionnaires peuvent
faire partie d'une société cotée ou non cotée : la
première fait appel publiquement à l'épargne. On parle
également de société dont les titres sont « admis
à la négociation sur un marché
réglementé ». Au contraire, les actions de la seconde
ne le sont pas. La distinction entre sociétés cotées et
sociétés non cotées est, depuis le début du
mouvement d'harmonisation
5 Y. Guyon, Droit des affaires, n°221.
6 A. Boujeka, « Droit des sociétés -
Variations sur l'harmonisation communautaire des droits nationaux des
sociétés : où il se confirme que nous pratiquons tous les
jours le droit communautaire des sociétés, sans le savoir »,
in : Centre d'études juridiques européennes et comparées
de l'Université de Paris X - Nanterre, « Chronique n°1 :
variations sur l'harmonisation communautaire des droits nationaux »,
LPA 2002, n°43, p. 4.
7 H. Le Nabasque, « L'incidence des normes
européennes sur le droit français applicable aux fusions et au
transfert de siège social », Rev. sociétés 2005,
p. 81.
8 H. Le Nabasque, « L'incidence des normes
européennes sur le droit français applicable aux fusions et au
transfert de siège social », Rev. sociétés 2005,
p. 81.
9 A. Le Fèvre, « Le nouveau régime des fusions
et scissions de sociétés commerciales institué par la loi
n°88-17 du 5 janvier 1988 et le décret n°88-418 du 22 avril
1988 », Rev. sociétés 1988, p. 207, n°22.
10 Règlement (CE) n°2157/2001 du Conseil du 8
octobre 2001, relatif au Statut de la Société européenne,
complété par la directive 2001/86/CE du Conseil du 8 octobre 2001
complétant le statut de la Société européenne pour
ce qui concerne l'implication des travailleurs.
11 Règlement (CEE) n°2137/85 du Conseil,
du 25 juillet 1985, relatif à l'institution d'un groupement
européen d'intérêt économique.
12 J.-S. Bergé, S. Robin-Olivier, Introduction au
droit européen, n°382.
européenne de la réglementation
boursière, abondamment utilisée par le droit européen des
sociétés13. Au contraire, le droit français ne
la connaît que de façon embryonnaire14. En droit
européen, cette distinction est fondamentale dans la mesure où
des obligations plus lourdes pèsent sur les sociétés
cotées, notamment en matière d'information envers les
actionnaires et les autres acteurs du marché. Certaines directives ont
donc un champ d'application limité aux sociétés
cotées15.
Si le droit européen se fixe comme objectif d'assurer
la protection de l'actionnaire, il faut cependant constater que cette notion
n'a, pour l'heure, fait l'objet d'aucune définition européenne.
Antérieurement à la proposition de directive du Parlement
européen et du Conseil du 5 janvier 200616, qui a abouti
à la directive 2007/36/CE du 11 juillet 2007 concernant l'exercice de
certains droits des actionnaires des sociétés cotées, nous
ne trouvons en effet aucune tentative de consécration de la notion d'
« actionnaire » en tant que telle. Cependant, le point c) de
l'article 2 de la proposition de directive, qui définissait
l'actionnaire comme étant « toute personne physique ou morale
régie par le droit privé ou public, qui détient,
directement ou indirectement i) des actions de l'émetteur, en son nom
propre et pour son propre compte ou ii) des actions de l'émetteur, en
son nom propre mais pour le compte d'une autre personne physique ou morale
» ne constitue qu'une reprise de la rédaction des
alinéas i) et ii) de l'article 2, point 1 e) de la directive 2004/109/CE
du Parlement européen et du Conseil, dite directive « Transparence
»17, qui définit la notion de « détenteur
d'actions », notion qui englobe aussi les détenteurs de certificats
représentatifs de valeurs mobilières. Cette proposition de
définition de la notion d'actionnaire a cependant été
supprimée du projet de directive par un amendement n°18, qui
définit l'actionnaire par renvoi aux droits nationaux comme «
la personne physique ou morale qui est reconnue comme actionnaire
conformément au droit applicable ». Cet amendement a
été justifié par le fait que la définition de
l'actionnaire « varie considérablement d'un Etat membre
à l'autre ». Il s'agissait donc d'éviter d'imposer de
nouvelles exigences qui retentiraient sur la définition nationale de
13 P.-H Conac, « La distinction des sociétés
cotées et non cotées », Rev. Sociétés
2005, p. 67, n°1.
14 P. Merle, Sociétés commerciales,
n°14.
15 Tel est le cas des directives suivantes :
Directive 2003/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre
2003 concernant le prospectus à publier en cas d'offre au public de
valeurs mobilières ou en vue de l'admission de valeurs mobilières
à la négociation, et modifiant la directive 2001/34/CE ;
Directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil du 15
décembre 2004 sur l'harmonisation des obligations de transparence
concernant l'information sur les émetteurs dont les valeurs
mobilières sont admises à la négociation sur un
marché réglementé et modifiant la directive 2001/34/CE ;
Directive 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril
2004, concernant les offres publiques d'acquisition ; Directive 2007/36/CE du
Parlement européen et du conseil du 11 juillet 2007 concernant
l'exercice de certains droits des actionnaires de sociétés
cotées.
16 Proposition de directive du Parlement Européen et du
Conseil sur l'exercice des droits de vote des actionnaires de
sociétés qui ont leur siège statutaire dans un Etat membre
et dont les actions sont admises à la négociation sur un
marché réglementé et modifiant la directive 2004/109/CE, 5
janvier 2006, COM(2005) 685 final.
17 Directive 2004/109/CE du Parlement
européen et du Conseil du 15 décembre 2004 sur l'harmonisation
des obligations de transparence concernant l'information sur les
émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la
négociation sur un marché réglementé et modifiant
la directive 2001/34/CE.
l'actionnaire18. L'article 2 § 1 point a) de
la proposition de Règlement du Conseil relatif au statut de la
Société privée européenne (SPE) en date du 25 juin
200819 tente à son tour de définir l'actionnaire comme
« l'actionnaire fondateur et toute autre personne dont le nom est
inscrit sur la liste des actionnaires conformément aux articles 15 et
16 ». Il nous semble que cette formulation ne contribue pas à
instaurer une définition européenne de la notion d'actionnaire,
dans la mesure où elle définit celui-ci comme étant...un
actionnaire ! Malgré les nombreuses dispositions faisant appel à
la notion d'« actionnaire », il y a donc, en l'état
actuel du droit européen, toujours lieu de se référer aux
droits nationaux pour la définir.
Les définitions française et allemande de la
notion d'actionnaire sont similaires, voire identiques : l'actionnaire est
l'associé d'une société par actions20,
c'est-à-dire le membre d'un groupement constitué sous forme de
société dont les droits essentiels sont le respect de son droit
de propriété sur ses actions, la participation aux
bénéfices et au fonctionnement de la société, ainsi
que la mise à disposition d'informations concernant la marche de
celle-ci, tandis que ses obligations principales sont la libération des
apports et la contribution aux pertes21 (bien que, dans le cadre des
sociétés par actions, cette dernière sera le plus souvent
limitée au montant des apports). L'actionnaire est donc l'associé
propriétaire d'une ou plusieurs actions22, la notion d'«
action » désignant une quote-part du capital social de la
société par actions, c'est-à-dire à la fois le
droit de l'associé dans la société et le titre
négociable qui représente ce droit, matérialisé par
une inscription en compte23. Il est le pilier des
sociétés par actions, parmi lesquelles figure la
société anonyme, qui est la plus courante d'entre
elles24.
Malgré cette absence de définition autonome de
la notion d'actionnaire, le droit européen des sociétés
appréhende depuis plus de quarante ans le statut de l'actionnaire,
c'està-dire les droits qui lui sont conférés et les
obligations qui lui incombent dans le cadre de la société dont il
détient des actions. Comment le droit communautaire (puis
européen) des sociétés appréhende t-il le statut de
l'actionnaire ? Exerce-t-il une influence sur l'essence des droits et
obligations de celui-ci ? Quels sont les vecteurs utilisés par lui afin
d'assurer une protection efficace des intérêts des actionnaires,
exigée par l'article 54 TFUE (ex-article 48 TCE) ? Ces interrogations
sont capitales à la fois pour les intérêts directs des
actionnaires et pour la réalisation du marché unique
européen, dans la mesure où l'effectivité des
libertés d'établissement et de libre circulation des capitaux est
dépendante de la capacité du droit
18 Rapport de la commission des affaires juridiques
du Parlement européen du 2 février 2007 sur la proposition de
directive du Parlement européen et du Conseil sur l'exercice des droits
de vote des actionnaires de sociétés qui ont leur siège
statutaire dans un Etat membre et dont les actions sont admises à la
négociation sur un marché réglementé et modifiant
la directive 2004/109/CE - Final A6-0024/2007.
19 Proposition de Règlement du Conseil relatif
au statut de la société privée européenne,
COM(2008) 396.
20 G. Köbler, Juristisches Wörterbuch, «
Aktionär », p. 12.
21 G. Cornu, Vocabulaire juridique, «
Associé », p. 82.
22 G. Cornu, Vocabulaire juridique, « Actionnaire
», p. 24.
23 P. Merle, Sociétés commerciales,
n°276 et suiv.
24 G. Ripert, R. Roblot, Les sociétés
commerciales, n°1504.
européen à assurer une certaine
sécurité juridique aux investisseurs.
Un ordonnancement systématique de l'action des
institutions européennes quant au statut de l'actionnaire peut
s'articuler autour de deux grands axes que sont, d'une part, l'étude de
l'influence du droit de l'Union européenne sur le régime
d'acquisition de la qualité d'actionnaire ainsi que sur les droits et
obligations essentiels de celui-ci (Première partie) et, d'autre part,
la protection de l'actionnaire par le droit européen à l'occasion
d'opérations spécifiques portant sur la société
(Seconde partie).
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