3.2.1.2. Evolution de la force de travail de 1960 à
2009
De 1960-1970 : c'est la main
d'oeuvre familiale qui conditionne les activités productrices de
l'exploitation. Les fils du chef de famille, même si ils se marient
souvent jeunes, peu après leur initiation, restent sur l'exploitation
paternelle jusqu'à la mort du chef de famille. Le plus âgé
des fils (ou un oncle) dirige dans les faits les activités agricoles
dès que son père atteint un certain âge mais celui-ci
conserve ses prérogatives en matière de gestion des produits de
la récolte et du grenier familial. Dès lors, les travaux
champêtres et l'acquisition foncière sont collectifs.
En cas de retard observé dans les activités
(absences, maladies, fâcheries...), le système d'entraide
villageois permet de faire appel à une main d'oeuvre conséquente
un jour donné.
Ce qui limite les velléités
d'indépendance des jeunes, notamment en cas de mésentente au sein
de la famille, c'est sans doute leur moindre force de travail (jeune couple
sans enfant en âge de travailler et travail exclusivement manuel). Outre
rendre pénible et fastidieux les travaux agricoles, une moindre force de
travail (2 individus) comporte le risque de compromettre la récolte en
cas de maladie ou de déficience d'un ou des membres de l'exploitation.
De plus, de part leur manquement aux us et coutumes, ils risquent d'avoir plus
de mal à solliciter une aide. Le travail réalisé par les
femmes est par ailleurs considérable, puisque outre les tâches
domestiques (cuisine, collecte du bois mort...) et de cueillette
(karité, néré...) qui leur incombe, elles sont très
actives dans les champs. Les hommes épousant de nombreuses femmes,
disposent donc d'une plus grande force de travail.
De 1970 à 1983 : c'est
toujours la main d'oeuvre familiale qui conditionne les activités
productrices. L'autorité du chef de famille demeure et il
bénéficie toujours de l'appui de ses fils. L'entraide perdure,
les hommes et les femmes formant des groupes d'entraide distincts.
Le premier attelage bovin utilisé au village date de
1963 ou 1964. Une deuxième famille suit dans la décennie mais
c'est semble-t-il à partir des années 1970 que l'ensemble des
producteurs va progressivement adopter cette nouvelle technique de travail.
De 1970 à 1983 :
l'apprentissage des techniques nécessaires à la
maîtrise de l'attelage bovin est un facteur important. Ainsi, ceux qui
possèdent boeufs, charrues et techniques sont très
sollicités.
De 1983 à 1992 : de nouveaux
comportements des jeunes se développent à la faveur du
développement de la culture du coton et plus généralement
des cultures commerciales et des différentes sources de revenus
monétaires. De plus, la doctrine révolutionnaire encourage
l'émancipation sociale et la rupture avec les excès
qualifiés de « féodaux », qui ne sont pas l'apanage des
chefferies coutumières et qui concerne aussi parfois l'organisation des
familles.
Ainsi, du fait par exemple de la problématique de la
répartition des revenus du coton à l'échelle de
l'exploitation familiale, des jeunes se segmentent et individualisent leur
système de production.
Il existe néanmoins une diversité de situations
qui vont de la séparation dans des conditions de type conflictuelles,
accompagnée parfois d'un processus de 'deshéritage' (et
conduisant à de nouvelles entités partant de 'zéro')
à une simple attribution annuelle de la responsabilité et des
revenus liés à une parcelle donnée.
D'autre part, la composition des familles de migrants est encore
plus hétérogène, puisque l'on y observe toute une
mosaïque de situations nuancées...
La maîtrise des techniques liées à la
traction animale conditionne par ailleurs les 'qualifications' des actifs
agricoles, même si ces savoirs se diffusent rapidement et que les
nouvelles générations sont formées de plus en plus
tôt aux rudiments de ces opérations culturales.
Nous avons parlé plus haut de l'impact de ces nouvelles
techniques sur la productivité du travail et sur les facilités et
avantages qu'elles comportent. Utilisé sur une seule exploitation,
l'attelage complet (bovin et matériel) permet la mise en culture et
l'entretien d'une dizaine d'hectares.
Enfin, le développement des activités non
champêtres et la modification des conceptions et pratiques en
matière d'éducation (et notamment la scolarisation) influencent
l'organisation du travail et le rôle dévolu à chaque actif.
On observe donc des variantes entre systèmes de production qui
résultent parfois des différences concernant leur force de
travail.
De 1992 à 2002 : à la
faveur du zonage on assiste à des segmentations surtout du coté
des migrants pour bénéficier des 2.5 ha. Cette deuxième
phase de scission se renforce par le niveau d'équipement et la situation
de l'agriculture à cette époque. On note par contre des
difficultés liées à la main d'oeuvre car beaucoup se
retrouvent avec de grandes superficies et peu ou pas de main d'oeuvre. Le chef
de famille autochtone bénéficie quelque peu du soutien et du
travail de ses fils et des migrants assujettis. La course aux
équipements et à l'achat de la main d'oeuvre devient une
nécessité surtout avec l'augmentation des superficies de coton et
les nouvelles tendances à la scolarisation. La différenciation
des systèmes de production se fonde désormais sur les diverses
variantes techniques et économiques.
De 2002 à 2009 : elle est
toujours à majorité assurée par la main d'oeuvre familiale
mais des particularités s'installent aux files du temps. La chute du
prix d'achat du coton, source de revenus, l'accroissement des prix des intrants
et les difficultés d'accès et enfin l'exploitation du site
d'orpaillage réduit conséquemment la main d'oeuvre et ouvre
encore la porte à la
naissance de nouveaux ouvriers agricoles. Ces ouvriers ne sont
pas très visibles mais proviennent en majorité de familles de
migrants n'ayant plus la possibilité d'accroître leurs superficies
ou de quelques rares autochtones décapitalisant mais dans ce cas ils se
déplacent dans des villages voisins. L'entraide demeure par contre une
voie de recours lors des goulots d'étranglement. Tout le travail est
facilité le niveau d'équipement.
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