Placement sous écrous et dignité de la personne( Télécharger le fichier original )par Malick BA Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise 2010 |
PARAGRAPHE 2 : LES NORMES INTERNATIONALES SPECIFIQUES
La société qui prend en charge un délinquant et l'écroue, se voit désormais imposer un certain nombre de devoirs, ce qui constitue une nouveauté considérable. Ce concept de « duty of care », cher aux anglo-saxons30(*), permet d'assurer une prise en charge complète de la personne écrouée. Cette analyse est d'autant plus intéressante qu'elle s'accompagne d'une nouvelle perception de la personne privée de liberté, aujourd'hui perçue comme une personne vulnérable. Comme le relève notamment Diane ROMAN, le droit français contemporain connaît en effet « l'émergence d'une catégorie médiane, entre le capable et l'incapable : le vulnérable »31(*), rassemblant des personnes jouissant d'une capacité d'exercice, mais dont la situation particulière atténue cette capacité d'exercice. Avec le très important arrêt Kudla c/Pologne rendu le 26 octobre 2000, les Etats européens se voient imposer de nouveaux standards en matière de traitement des personnes privées de leur liberté. Ils sont désormais tenus « de s'assurer que tout prisonnier est détenu dans des conditions qui sont compatibles avec le respect de la dignité humaine »32(*). Ainsi on peut noter des normes internationales spécifiques aux détenus vulnérables (A) et des normes internationales touchant le traitement des détenus (B). A- LES NORMES INTERNATIONALES SPECIFIQUES AUX DETENUS VULNERABLES Le système pénitentiaire a considérablement diversifié son recrutement depuis quelques années en s'élargissant à de nouvelles populations qui posent de redoutables problèmes de gestion et de coexistence à une administration pénitentiaire prisonnière de ses traditions La protection du détenu vulnérable revêt un caractère particulier à tel enseigne que l'organisation des Nations Unies a prévu une réglementation remarquable le régissant et est applicable au Sénégal. L'Union Européenne s'est inscrit dans cette même optique comme le démontrent aussi certaines décisions de justice récentes. Elle est relative aux mineurs (1), certes peu nombreux, mais dont les " incivilités ", la violence, l'absence de repères déconcertent et déstabilisent les personnels de surveillance les plus expérimentés et aux femmes (2) dont deux principaux motifs expliquent leur présence en prison : les infractions à la législation sur les stupéfiants33(*) et les crimes de sang. Les personnes âgées, les malades et les malades mentaux font également parti de ce groupe de personnes vulnérables. 1- les règles spécifiques relatives aux droits de l'enfant Ensemble des règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineur (règles de Beijing)34(*) et les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté35(*) : - Les règles de Beijing ont été prises en compte par le Haut Commissariat des Nations unies aux Droits et adoptées par l'assemblée générale dans sa résolution 40/33 du 29 Novembre 1985. Etant entendu qu'un mineur est un enfant ou un jeune qui, au regard du système juridique considéré, peut avoir à répondre d'un délit selon des modalités différentes de celles qui sont appliquées dans le cas d'un adulte. Il faut noter que les limites d'âge dépendent expressément de chaque système juridique et tiennent pleinement compte des systèmes économiques, sociaux, politiques et culturels des Etats Membres. Il s'ensuit que toute une gamme d'âges relève de la catégorie des jeunes qui va donc de 7 ans à 18 ans ou plus. Cette disparité est inévitable eu égard à la diversité des systèmes juridiques nationaux et ne diminue en rien l'impact du présent Ensemble de règles minima. L'article 5 stipule que : « Le système de la justice pour mineurs recherche le bien-être du mineur et fait en sorte que les réactions vis-à-vis des délinquants juvéniles soient toujours proportionnées aux circonstances propres aux délinquants et aux délits ». De la même façon, les décisions visant à la protection du délinquant juvénile peuvent aller plus loin qu'il n'est nécessaire et donc porter atteinte à ses droits fondamentaux, comme on a pu l'observer dans certains systèmes de justice pour mineurs. Le contacte avec le milieu carcéral doit être fait de manière à respecter le statut juridique du mineur, à favoriser son bien-être et à éviter de lui nuire36(*). En plus l'expression "éviter de [lui] nuire" est assurément vague et recouvre maints aspects de l'interaction possible (paroles, violence physique, risques dus au milieu). Avoir affaire à la justice pour mineurs peut en soi être "nocif" pour les jeunes, il faut donc interpréter l'expression "éviter de [lui] nuire" comme signifiant tout d'abord qu'il faut faire le moins de mal possible aux mineurs et éviter tout tort supplémentaire ou indu. L'article 17.3 prévoit également « que les mineurs ne sont pas soumis à des châtiments corporels ». En définitive il est donc important de restreindre le placement du mineur dans une institution comme l'indique les dispositions de l'article 19.1 « Le placement d'un mineur dans une institution est toujours une mesure de dernier ressort et la durée doit en être aussi brève que possible ». L'article demande donc que, si un jeune délinquant doit être placé dans une institution, la privation de liberté soit limitée le plus possible, que des arrangements spéciaux soient prévus dans l'institution pour sa détention et qu'il soit tenu compte des différentes sortes de délinquants, de délits et d'institutions. En fait, il faudrait donner la priorité aux institutions "ouvertes" sur les institutions "fermées". En outre, tous les établissements devraient être de type correctif ou éducatif plutôt que carcéral. - Les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté Adoptées par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/113 du 14 décembre 1990 sont déterminantes dans la prise en compte des intérêts du mineur. IL vient en compléments de la Convention internationale relative aux Droits de l'Enfant adopté le 20 Novembre 1989.La justice pour mineurs devrait comme le note les perspectives fondamentales de la charte « protéger les droits et la sécurité et promouvoir le bien-être physique et moral des mineurs. L'incarcération devrait être une mesure de dernier recours ». Les règles posées servent alors de référence dans la perspective d'une meilleure administration du mineur placé sous écrous. La règle 12 illustre bien cette préoccupation lorsqu'elle l'envisage ainsi : « La privation de liberté doit avoir lieu dans des conditions et des circonstances garantissant le respect des droits de l'homme des mineurs. Les mineurs détenus doivent pouvoir exercer une activité intéressante et suivre des programmes qui maintiennent et renforcent leur santé et leur respect de soi, favorisent leur sens des responsabilités et les encouragent à adopter des attitudes et à acquérir des connaissances qui les aideront à s'épanouir comme membres de la société ». Les mineurs doivent être détenus dans des conditions tenant dûment compte de leur statut et de leurs besoins particuliers en fonction de leur âge, de leur personnalité et de leur sexe. Il s'agit donc de respecter sans restriction sa dignité inhérente à sa personnalité. De ce fait son environnement physique a été pris en compte par la règle 31 aux termes duquel les mineurs détenus doivent être logés dans des locaux répondant à toutes les exigences de l'hygiène et de la dignité humaine. Leur placement, leur environnement et leur logement doivent être conforme avec l'objectif primordial de garantir sa dignité37(*). Les mesures de contrainte physique ne doivent pas être humiliantes38(*). De même toute mesure disciplinaire doit assurer, le respect de soi-même et le respect des droits fondamentaux de chacun et est compatible avec le respect de la dignité inhérente du mineur. Pour protéger ce droit , les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté envisage des inspections, en évaluant le respect des règles concernant l'environnement physique, l'hygiène, les locaux de détention, l'alimentation, l'exercice physique et les services médicaux ainsi que tout autre aspect de la vie en établissement qui affecte la santé physique et mentale des mineurs39(*). Dans l'exercice de ses fonctions, le personnel de l'établissement doit respecter et protéger la dignité humaine et les droits individuels fondamentaux de tous les mineurs mais aussi de réduire au minimum les différences entre la vie à l'intérieur et à l'extérieur de l'établissement qui tendent à être préjudiciables au respect de la dignité des mineurs en tant qu'êtres humains. -Convention internationale relative aux Droits de l'Enfant Elle est adoptée par l'assemblée générale le 20 novembre 1989, ratifiée le 31 Juillet 1990 et s'attache à une catégorie de personne jusque le peu envisagé en tant que telle par les conventions internationales (à l'exception de l'article 24 du pacte sur les droits civils et politiques) C'est la raison pour laquelle l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération dans toutes les décisions le concernant. 40(*) Aux termes de l'article 37 les Etats parties veillent à ce que : « Nul enfant ne soit soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ni la peine capitale ni l'emprisonnement à vie sans possibilité de libération ne doivent être prononcés pour les infractions commises par des personnes âgées de moins de dix-huit ans ; Tout enfant privé de liberté soit traité avec humanité et avec le respect dû à la dignité de la personne humaine, et d'une manière tenant compte des besoins des personnes de son âge. En particulier, tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que l'on estime préférable de ne pas le faire dans l'intérêt supérieur de l'enfant, et il a le droit de rester en contact avec sa famille par la correspondance et par les visites, sauf circonstances exceptionnelles ».Cette exigence est accentuée par l'article suivant .Ainsi les Etats parties reconnaissent à tout enfant suspecté, accusé ou convaincu d'infraction à la loi pénale le droit à un traitement qui soit de nature à favoriser son sens de la dignité et de la valeur personnelle, qui renforce son respect pour les droits de l'homme et les libertés fondamentales d'autrui, et qui tienne compte de son âge ainsi que de la nécessité de faciliter sa réintégration dans la société et de lui faire assumer un rôle constructif au sein de celle-ci . Plus d'un million d'enfants sont privés de liberté dans les commissariats, en garde à vue, dans les centres de détention et en prison. Dans de nombreux pays le système de justice pour les mineurs, au cas où il existe, est extrêmement rudimentaire. Le système de justice pénal dans beaucoup de pays est un système en dysfonctionnement Ainsi en Europe pour la chambre d'instruction de la cour d'Appel de Nancy le 1er mars 2007 « la personne détenue est, du fait de la privation de sa liberté d'aller et de venir, incontestablement en situation de vulnérabilité, au point que des droits spécifiques ont été édictés en sa faveur par le législateur pour compenser son état d'infériorité et ne doivent pas portés atteinte a sa dignité »41(*) . 2 - Convention internationale relative aux droits de la femme Le milieu carcéral reste principalement adapté aux détenus hommes et les problèmes spécifiques des femmes, qui constituent une part limitée, mais croissante, de leur population, restent souvent ignorés(Les femmes représentent environ 4,5 à 5 % de la population carcérale européenne cette proportion allant de 2,9 % en Pologne à 7,8 % en Espagne)42(*).Toute personne incarcérée doit être traitée dans le respect des droits de l'homme et que les conditions de détention doivent être conformes aux principes de dignité de la personne humaine. Aussi les besoins et situations spécifiques des femmes incarcérées doivent être pris en compte dans les décisions judiciaires, dans les législations pénales et par les institutions pénitentiaires des états. Etudier le cadre de protection de la femme est d'une dimension sans commune mesure car l'on sait aujourd'hui qu'une forte proportion des femmes détenues ont été victimes d'actes de violences, d'abus sexuels ou de maltraitance dans le cadre de leur famille ou de leur couple et que beaucoup d'entre elles se trouvent en situation de dépendance économique et psychologique; que tous ces éléments ont un lien direct avec leur passé délictueux et la présence de séquelles physiques et psychologiques, comme le stress post-traumatique.). Ce qui les place dans une situation de vulnérabilité et dans un état permanent d'incertitude et de stress. Ce qui pousse à prévoir des conditions spéciales de détention pour les femmes mais aussi la nécessité pour le système judiciaire de veiller au respect des droits de l'enfant lorsque l'on envisage les questions liées à la détention de la mère .C'est aussi la raison fondamentale qui pousse à recommander que les peines de substitution à l'emprisonnement soient davantage privilégiées, telles que des alternatives ancrées dans la société , en particulier pour les mères, dès lors que la peine encourue et le risque pour la sécurité publique sont faibles, dans la mesure où leur incarcération peut entraîner de graves perturbations dans la vie familiale. Autre particularité, le code de procédure pénale prévoit que la garde des femmes est assurée exclusivement par un personnel féminin. Les personnels de sexe masculin doivent être dûment autorisés par le directeur ou la directrice de l'établissement, pour se rendre dans un quartier femmes. Il faut donc nécessairement concevoir des conditions de vie adaptées à leurs besoins dans des unités totalement indépendantes et aussi éloignées que possible du milieu carcéral ordinaire43(*).Pour le CE (17 décembre 2008, O.I.P.), « eu égard à la vulnérabilité des détenus et à leur situation d'entière dépendance vis-à-vis de l'administration, il (...) appartient (à celle-ci) de prendre les mesures propres pour protéger leur vie ». Ainsi l'intégrité physique d'une personne privée de sa liberté doit bénéficier d'une garantie absolue, en raison de son état d'infériorité. La femme se trouve donc être dans cet état. La décision Tomasi est évocatrice en ce qui concerne les personnes vulnérables44(*). B- LES NORMES INTERNATIONALES SPECIFIQUES AUX TRAITEMENTS DES DETENUS « Toute personne soumise à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine45(*) ». Pour garantir ce droit, des règles provenant de sources diverses ont été édictées afin de protéger au maximum la dignité du détenu. - Les conventions contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 Décembre 1984 : Il s'agit d'un droit essentiel au respect de la dignité humaine. L'article 3 de la convention européenne, l'article 7 du pacte et l'article 5 de la convention américaine (sous l'intitulé « droit à l'intégrité de la personne ») convergent sur ce point conformément au désir de l'organisation mondiale qui est d'assurer le développement des droits de l'homme. La perspective dynamique que comporte cet objectif a d'abord conduit à l'adoption, d'une convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Mais la torture au sens de la convention des Nations Unies de 1984 a fait son entrée dans le code pénal le 28 Aout 1996 en vertu de la loi n° 96-15 qui y a inséré un nouvel article 295-1 qui se trouve dans la section consacrée aux « blessures et coups volontaires, non qualifiées meurtres, et autres crimes et délits volontaires ». Pour ce qui est des traitements cruels, inhumains et dégradants, il faut remarquer que l'article 295-1 du code pénal n'incrimine que la torture et ne fait aucune référence aux traitements. Toutefois certaines dispositions du code peuvent servir de base à l'incrimination et à la répression de ces traitements46(*). Ainsi constituent des actes de torture, des blessures, coups, violences physiques ou mentales ou autres voies de fait volontairement exerces par un agent de la fonction publique ou par toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec consentement formulé ou tacite, soit dans le but d'obtenir des renseignements ou des aveux, de faire subir des représailles ou de procéder à des actes d'intimidation, soit dans le but de discrimination quelconque47(*). La convention s'inscrit donc dans une perspective d'enrichissement de la protection conférée à certains droits de l'homme par les instruments internationaux. Elle met à la charge des Etats parties des obligations négatives (empêcher la perpétration d'actes de torture sur leur territoire et ce, quelles que soient les circonstances) et des obligations positives (incriminer les actes de torture, se mettre en mesure d'en juger les auteurs, assure une formation appropriée des personnels en charge des détenus pour rendre impossible l'usage de la torture. -Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du 26 novembre 1987 : La prohibition de la torture résultant déjà de l'article 4 de la convention européenne a institué un comité européen pour la prévention de la torture et autorise à visiter tout lieu ou des personnes sont privées de liberté. Si la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ne mentionne pas explicitement le principe de dignité, la Cour européenne des droits de l'homme a eu depuis longtemps l'occasion de préciser que « le respect de la dignité et de la liberté humaines est l'essence même des objectifs fondamentaux de la Convention »48(*) et que « les droits de l'homme constituent un système intégré visant à protéger la dignité de l'être humain ». A ce titre, le contentieux de l'article 3 de la Convention, qui prohibe de manière absolue la torture et les traitements inhumains ou dégradants constituent un élément essentiel de promotion du principe de dignité. A cette convention s'ajoute les Règles Pénitentiaires Européennes (RPE) adoptées pour la première fois en 1973, révisées en 1987, puis en 2006, les règles pénitentiaires européennes visent à harmoniser les politiques pénitentiaires des 46 États membres du Conseil de l'Europe signataires et à faire adopter des pratiques et des normes communes. Elles s'inscrivent dans une logique de réalisme qui est autant le fruit de l'expérience acquise que le gage de véritables avancées futures49(*). Elles ont été rédigées par le Comité européen de coopération pénologique en lien avec les États membres; la France y a pris une part active. Elles tiennent compte des RPE antérieures, des normes de traitement des détenus établies par le Comité européen de la torture et des peines ou traitements inhumains et dégradants (CPT) et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). En effet avec la Recommandation n° R (87) 3 contenant les Règles pénitentiaires européennes, on apprend que les conditions de la détention doivent être respectueuses de la dignité humaine et selon la Règle n° 72.1 de la version de 2006, on sait que « Les prisons doivent être gérées dans un cadre éthique soulignant l'obligation de traiter tous les détenus avec humanité et de respecter la dignité inhérente à tout être humain »50(*). De même l'article 1er de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne adoptée à Nice le 7 décembre 2000 proclame le caractère « inviolable » de la dignité51(*) . Son article 3 pose que « tout détenu a le droit d'être logé dans des locaux qui répondent à toutes les exigences sanitaires, compte dûment tenu du climat, notamment en ce qui concerne le cubage d'air, la surface minimale, l'éclairage, le chauffage et la ventilation ». Le droit à une alimentation décente et le droit aux soins de santé et aux soins médicaux sont affirmes par les dispositions 4 et 5.
Pour assurer la protection des personnes soumises a la
détention ou a l'emprisonnement, les Nations unies ont
élaboré un « ensemble de règles minima pour
le traitement des détenus ». Adopté par le premier
Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le
traitement des délinquants, tenu à Genève en 1955 et
approuvé par le Conseil économique et social dans ses
résolutions 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13
mai 1977 . C'est le document le plus connu, le plus exhaustif et le plus
diffusé à l'échelle internationale qui régit les
conditions de détention et le traitement des détenus dans le
monde. Comme les renseignements qu'il contient sur le traitement des
détenus sont plus détaillés que ce qu'on trouve
généralement dans les conventions et les pactes internationaux,
ces règles types sont devenues une référence de
première importance en ce qui concerne la notion de traitement humain en
milieu carcéral. Bien que l'Ensemble de règles
minima n'ait pas force de loi en matière de protection des
droits humains, les tribunaux nationaux et internationaux ainsi que les
organismes non gouvernementaux de protection des droits de la personne s'y
réfèrent pour éclairer l'interprétation des
critères et des normes ayant force exécutoire dans ce domaine,
comme le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques et la Convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants.. Trois principes
fondamentaux propres aux droits de la personne se dégagent clairement de
l'ensemble des 95 articles que comprend l'Ensemble de règles
minima pour le traitement des détenus. Premièrement, il faut
respecter la dignité du détenu et sa valeur en tant qu'être
humain pendant toute la durée de son incarcération.
Deuxièmement, la peine inhérente à la perte de la
liberté du fait de l'incarcération est un châtiment
suffisant. Enfin, les pénitenciers ne doivent pas être des lieux
où l'on punit les détenus, mais plutôt où on les
aide à se réadapter. Ainsi le droit universel et les politiques
correctionnelles tiennent compte de ces règles fondamentales
établies par les Nations Unies : des locaux convenablement
chauffés, aérés et nettoyés, une alimentation
saine, des vêtements et de la literie lavés
régulièrement, de l'exercice régulier, l'accès
à des services médicaux de même qualité que ceux
dont dispose le grand public, l'accès à des livres et du
matériel éducatif, des conditions spéciales pour les
détenues enceintes, leur accouchement et le soin de leur enfant,
l'interdiction des châtiments corporels.
A cela il ne faut également pas occulter les principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus adoptés par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/111 du 14 décembre 1990 car tous les détenus sont traités avec le respect dû à la dignité et à la valeur inhérentes à l'être humain52(*).Ils sont au nombre de 10 mais demeurent la toile de fond de toute politique qui prêtent respecter la dignité de la personne. Toutefois le droit interne Sénégalais n'est pas resté de marbre.
SECTION 2 : LES INSTRUMENTS JURIDIQUES INTERNES RELATIFS A LA DETENTIONS'il est vrai que beaucoup de textes sont applicables au Sénégal par le truchement de l'article 79 de la Constitution sénégalaise de 1963 qui dispose que « les traites ou accords régulièrement ratifies ou approuves ont, des leur publication, une autorité supérieure à celle des lois », il est un fait vraisemblable qu'aussi bien la constitution que la législation pénale traitent des conditions de détention notamment dans le cadre du respect de la dignité (PARAGRAPHE 1). Le service public pénitentiaire participe à l'exécution des décisions pénales. Il contribue à l'insertion ou à la réinsertion des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire, à la prévention de la récidive et à la sécurité publique dans le respect des intérêts de la société, des droits des victimes et des droits des personnes détenues. Il est donc opportun d'appréhender les normes juridiques régissant l'administration pénitentiaire (PARAGRAPHE 2). PARAGRAPHE 1 : DES NORMES CONSTITUTIONNELLES A LA LEGISLATION PENALE
La constitution qui est, il faut le préciser au sommet de l'architecture pyramidale des normes suivant la théorie de Hans Kelsen, réaffirme son attachement aux principes des déclarations et des conventions relativement à la prise en considération de la dignité mais aussi celles qui sont distinctifs aux détenus(A). Le législateur sénégalais est aussi passé par là avec l'adoption d'un code pénal d'un genre nouveau pour se départir de la loi coloniale applicable au Sénégal mais aussi pour mieux répondre aux exigences sociales(B). A- LES NORMES CONSTITUTIONNELLES Qu'il s'agisse des grandes religions ou des principaux courants philosophiques, ils ont en commun un effort pour détacher l'être humain de sa condition première, une lente progression vers l'hominisation. Et l'apparition très récente de concepts juridiques comme la dignité de la personne témoigne d'un processus encore inachevé mais en progrès. André Boissarie nous enseigne que les « les souverainetés nationales ont pour limite naturelle la sphère d'application des droits de l'homme ». Il n'est donc pas permis de porter atteinte à cette dignité. Les principes fondateurs de la dignité plongent leurs racines dans un certain nombre de textes dont l'élaboration et l'd'option ont constitué les moments les plus significatifs dans l'histoire des conquêtes de l'humanité pour une égale dignité pour tous les êtres humains sans distinction aucune53(*) . Le Sénégal l'a compris, sa Constitution a fait l'objet de plusieurs révisons successives qui ont un rapport direct avec l'évolution politique, institutionnelle et judiciaire. La dernière charte suprême en date a été adoptée le 7 janvier 2001 par référendum. L `article 7 pose la sacralité de la personne humaine, son inviolabilité et la protection de son intégrité corporelle. Le respect de la dignité du détenu doit faire l'objet d'une vigilance constante de la part de chaque individu. La détention en réalité n'efface pas tous les droits des détenus. Ainsi tout individu a droit au respect de la dignité inhérente a la personne humaine54(*) et toute sortes d'exploitations et d'avilissement de l'homme notamment la torture physique ou morale, et les peine ou les traitements cruels , inhumains ou dégradants sont interdites55(*) .Ainsi le régime pénitentiaire comporte en effet un traitement des condamnes dont le but essentiel est leur amendement et leur reclassement social. Durant les années écoulées, les autorités sénégalaises ont pris un certains nombre de mesures positives pour rendre effectifs le respect des droits de l'homme dans des domaines ou elles ont essuyées diverses critiques. Cependant dés le début le Sénégal consacre la nécessité de promouvoir le respect de la dignité humaine lors de la détention. La loi n°65-61 du 21 Juillet 1965 portant code de procédure pénal traduit cette exigence. C'est ainsi que l'incarcération doit être subie dans des conditions satisfaisantes d'hygiène et de salubrité, tant en ce qui concerne l'aménagement et l'entretien des bâtiments, le fonctionnement des services économiques et l'organisation du travail, que l'application des règles de propreté individuelle et la pratique des exercice physiques. De telles énonciations permettent de mettre en exergue un aspect fondamental du droit interne qui est le soucis de sauvegarder les droits de l'homme et partant de la dignité qui en est le fondement. Mieux encore l'assemblée nationale saisie par un projet de loi du gouvernement relative à la pratique de la torture a, en sa séance du Vendredi 9 Aout 1996, délibéré et adopté la loi dont la teneur suit : « constituent des tortures, les blessures, coups, violences physiques ou mentales ou autres voies de fait volontairement exercés par un agent de la fonction physique ou par toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec consentement exprès ou tacite , soit dans le but d'obtenir des renseignements ou des aveux, de faire subir des représailles ou de procéder à des actes d'intimidation , soit dans le but de discrimination quelconque ...Aucune circonstance exceptionnelle quelle qu'elle soit ,d'instabilité politique intérieure de tout acte d'exception ne pourra être invoque pour justifier la torture». Il s'agit la de l'article 295-1 du code pénal promulgué le 28 Aout 1996 par le biais de la loi n°96-15 du 28 Aout 1996. En se conformant à la convention contre la torture, par l'incorporation dans son arsenal législatif de ces dispositions, l'Etat vient d'effectuer une avancée dans la lutte pour le respect de la dignité par l'interdit d'actes « odieux56(*) ». PARAGRAPHE 2 : LES NORMES JURIDIQUES REGISSANT LES ETABLISSEMENTS PENITENTIAIRES
L'administration pénitentiaire désigne l'ensemble des moyens matériels et humains constituant un service public destiné à assurer l'exécution des condamnations pénales, dans un but d'individualisation de la peine et dans le respect de la sécurité publique. L'administration pénitentiaire possède deux missions principales : Mettre en oeuvre l'exécution des condamnations pénales par la prise en charge des personnes placées sous main de justice, qu'elles soient incarcérées en milieu fermé ou simplement suivies en milieu ouvert. Dans l'exécution de cette mission, l'administration pénitentiaire est chargée de garantir la sécurité publique en assurant la surveillance des personnes détenues, favoriser l'individualisation des peines et la réinsertion sociale, dans un but de prévention de la récidive. L'administration pénitentiaire organise et participe à de nombreux dispositifs d'insertion proposés aux condamnés en partenariat avec d'autres acteurs publics ou associatifs, afin de préparer ou d'accompagner la fin de la peine. Au Sénégal les établissements pénitentiaires pour assurer leur mission se fondent sur une certaine organisation(A) reposant sur un fonctionnement prédéfini(B) . A- L'ORGANISATION DES ETABLISSEMENTS PENITENTIAIRES Alors que la population carcérale était et reste constituée de meurtriers, d'assassins, d'empoisonneurs, d'escrocs, d'auteurs d'homicides involontaires, de vols simples et qualifiés... autrefois dominée par l'aristocratie des braqueurs et du grand banditisme autour d'un caïdat structurant, la prison accueille désormais une population de détenus, prévenus et condamnés, constituée pour sa plus grande part de délinquants sexuels, de malades relevant de la psychiatrie et d'auteurs d'infractions à la législation sur les stupéfiants : les malades mentaux et les toxicomanes représentent désormais, comme à l'étranger, les trois composantes essentielles de la population des prisons sénégalaises. Le régime des établissements pénitentiaires et les conditions de détention sont définis par le décret n° 66-1081 du 31 Décembre 1966 portant organisation et régime des établissements pénitentiaires (modifié et complété par les décrets n° 68-583 du 28 mai 1968 et n° 86-1466 du 28 novembre 1986). Le Sénégal compte trente huit (38) Etablissements Pénitentiaires dont un (01) non fonctionnel. Il existe trois (03) catégories d'Etablissements Pénitentiaires au Sénégal : - Maison d'Arrêt : 02 Elle accueille les inculpés, prévenus et accusés soumis à la détention provisoire, ainsi que les condamnés à l'emprisonnement de police et les contraignables qui sont détenus dans des quartiers distincts. - Maison de Correction : 01 Elle accueille les condamnés à l'emprisonnement correctionnel d'une durée égale ou inférieure à un (01) an après le moment où la condamnation est devenue définitive. - Camp Pénal : 03 dont un (l'ex- Centre Pénitentiaire de Kédougou) non fonctionnel pour des raisons techniques : Ils reçoivent les condamnés aux travaux forcés, à la détention criminelle et les condamnés à l'emprisonnement auxquels il reste à subir une peine d'une durée supérieure à un an ou plusieurs peines dont le total est supérieur à un an après condamnation définitive. - Maison d'Arrêt et de Correction : 32 Un même établissement peut servir à la fois de Maison d'Arrêt et de Maison de Correction. Des annexes aux Maisons d'Arrêt servant de Maisons de Correction peuvent être créées par arrêté du Ministre chargé de l'Administration Pénitentiaire.
Il est prévu des Etablissements Pénitentiaires susceptibles de dispenser un enseignement scolaire ou professionnel pour les condamnés dont la peine doit expirer avant qu'ils aient atteint l'âge de 28 ans (prisons écoles) et des locaux pénitentiaires appropriés des formations sanitaires du lieu de détention où sont hospitalisés les séniles ou inaptes au travail, les malades et les psychopathes (hospices).
Les mineurs, les femmes, les militaires et les détenus politiques sont affectés dans des quartiers distincts de la Maison d'Arrêt ou de la Maison de Correction. Les Inspections Régionales au nombre de 6 ont été créées en s'inspirant de l'organisation administrative, de l'organisation judiciaire, des zones militaires, des légions de Gendarmerie. Ces Inspections Régionales ont conduit logiquement à une nouvelle classification des Etablissements Pénitentiaires basée sur la capacité d'accueil, le plafond budgétaire alloué et à la spécificité des établissements. Ainsi on distingue les établissements hors classe : (08) les établissements de première classe : (16) et les établissements de deuxième classe : (13). B- LE FONCTIONNEMENT DES ETABLISSEMENTS PENITENTIAIRES Les détenus ont le droit d'être placés dans des établissements ou quartiers d'établissement distincts, en tenant compte de leur sexe, de leur âge, de leurs antécédents, des motifs de leur détention et des exigences de leur traitement57(*). Ainsi les hommes et les femmes doivent être détenus dans la mesure du possible dans des établissements différents. Dans un établissement recevant à la fois des hommes et des femmes, l'ensemble des locaux destinés aux femmes doit être entièrement séparé; les détenus en prévention doivent être séparés des condamnés; les personnes emprisonnées pour dettes ou condamnées à une autre forme d'emprisonnement civil doivent être séparées des détenus pour infraction pénale. Les jeunes détenus doivent être séparés des adultes. Les cellules ou chambres destinées à l'isolement nocturne ne doivent être occupées que par un seul détenu. Si pour des raisons spéciales, telles qu'un encombrement temporaire, il devient nécessaire pour l'administration pénitentiaire centrale de faire des exceptions à cette règle, on devra éviter de loger deux détenus par cellule ou chambre individuelle. Lorsqu'on a recourt à des dortoirs, ceux-ci doivent être occupés par des détenus soigneusement sélectionnés et reconnus aptes à être logés dans ces conditions. La nuit, ils seront soumis à une surveillance régulière, adaptée au type d'établissement considéré. Il faut disposer, dans la mesure du possible, d'établissements séparés ou de quartiers distincts d'un établissement pour le traitement des différents groupes de détenus. Les condamnés dont la peine doit expirer avant qu'ils aient atteint l'âge de vingt-huit ans peuvent être détenus dans des établissements pénitentiaires susceptibles de dispenser un enseignement scolaire ou professionnel. Les condamnés séniles ou inaptes au travail, les condamnés malades et les psychopathes sont hospitalisés dans les locaux pénitentiaires appropriés des formations sanitaires du lieu de leur détention .L `article 691 précise aussi que les condamnés sont soumis dans les maisons de correction à l'emprisonnement individuel de jour et de nuit et, dans les camps pénaux, à l'isolement de nuit seulement, après avoir subi éventuellement une période d'observation en cellule. CHAPITRE DEUXIEME : UNE AMELIORATION LEGISLATIVE CONSTANTE DU STATUT JURIDIQUE DES DETENUS En détention, les personnes incarcérées bénéficient d'un statut, impliquant des droits et des devoirs, qui encadre leur vie quotidienne et permet la sanction disciplinaire des comportements répréhensibles. La vie quotidienne en détention diffère en fonction de l'établissement et du type de détenu (prévenu en détention provisoire ou condamné). Les établissements pénitentiaires disposent d'un règlement intérieur qui détaille pour ainsi dire l'encadrement juridique lié aux conditions de vie des détenus (SECTION 1). Pendant longtemps, le reflexe naturel de la société a été guidé par la volonté d'enfermement du délinquant qui doit subir une punition exemplaire et dissuasive58(*) . Mais elle n'avait pas pris en compte les conséquences liées à l'emprisonnement qui a rarement réussi la préparation du détenu à la vie sociale. Le moment était donc venu pur le législateur sénégalais, d'entreprendre une courageuse et nécessaire réforme du système carcéral pour l'adapter aux normes internationales fixées par les conventions internationales auxquelles le Sénégal est partie. Le décret n°2001-362 du 4 mai 2001 relatif aux procédures d'exécution et d'aménagement des sanctions pénales a joué un rôle majeur dans l'encadrement juridique lié au renforcement de l'exigence de la peine (SECTION 2). SECTION 1 : L'ENCADREMENT JURIDIQUE LIE AUX CONDITIONS DE VIE DES DETENUS Parler de l'encadrement juridique lié aux conditions de vie des détenus, c'est aller directement à l'essentiel en étudiant toutes les règles dégagées par les dispositions de l'arrêté ministériel n°7117M .INT.D.A.P du 21 mai 1987 portant règlement intérieur des établissements pénitentiaires, qui traduisent a la fois les droits et les devoirs des détenus, d'ou la question de son statu juridique. Et cette réglementation est effectivement élaborée dans le souci du respect de la dignité des incarcérés. Il en va ainsi de la gestion de leur bien et de leur entretien qui doivent être notés (PARAGRAPHE 1) sans omettre le travail et la discipline qui doivent répondre aux exigences de la dignité (PARAGRAPHE 2).
PARAGRAPHE 1 : LA GESTION DES BIENS ET L'ENTRETIEN DES DETENUS L'arrêté ministériel n°7117M .INT.D.A.P du 21 mai 1987 portant règlement intérieur des établissements pénitentiaires tout en déterminant le cadre général des droits et devoirs des prisonniers donne également aux directeurs des établissements pénitentiaires la possibilité d'édicter leurs propres règlements intérieurs pour adapter les prisons aux utilités du moment. Si le régime alimentaire, l'achat, le pécule et l'habillement y sont importants(A), l'hygiène et la santé des détenus ne peuvent être occultées. A- LE REGIME ALIMENTAIRE, L'ACHAT, LE PECULE ET L'HABILLEMENT Aux termes de l'article 147, la composition du régime alimentaire des détenus est fixée par le Ministre chargé de l'Administration pénitentiaire. Ce régime comporte trois distributions journalières59(*) . Le règlement intérieur de la maison d'arrêt et de correction de Saint louis nous renseigne à bien des égards. En effet la cuisson des repas est assurée par les détenus. Le régime alimentaire, le menu et la quantité d'aliments destinés à l'entretien des détenus sont déterminés par arrêté du Ministre chargé de l'administration pénitentiaire. Le menu peut être amélioré par le Directeur de prison grâce au produit résultant du jardin potager crée à cet effet60(*). En outre, le détenu a la faculté de renoncer au repas de l'établissement et de faire venir de l'extérieur des aliments nécessaires à sa nourriture à condition que ces aliments puissent être consommés sans cuisson nouvelle. Le droit international va encore plus loin : « Tout détenu a le droit à une alimentation ayant une valeur nutritive suffisante au maintien de sa santé et de ses forces, de bonne qualité, bien préparée et servie aux heures usuelles. Chaque détenu doit avoir la possibilité de se pourvoir d'eau potable lorsqu'il en a besoin 61(*)»). De même la règle 20 de l'ensemble de règles minima pour le traitement des détenus informe que tous les détenus doivent recevoir de l'administration aux heures usuelles une alimentation de bonne qualité, bien préparée et servie, ayant une valeur nutritive suffisant au maintien de sa santé et de ses forces. Concernant l'achat et le pécule, l'article 148 souligne qu'à moins d'en être privés par mesure disciplinaire, les détenus ont la possibilité d'acheter, sur leur pécule disponible divers objets ou denrées en supplément de ceux qui leur sont octroyés, selon les modalités prévues par le règlement intérieur. Le détenu conserve la gestion de ses biens patrimoniaux extérieure dans la limite de sa capacité civile. Toutefois, cette gestion ne peut s'effectuer que par mandataire, celui-ci devant être étranger à l'administration pénitentiaire L'article 146 précise que « Si le détenu meurt en prison avant l'expiration de sa peine, ses héritiers ont droit à son pécule, sous déduction éventuelle des sommes dues pour amendes, restitution ou frais de justice »e. Une fiche de pécule est ouverte pour chaque détenu et retrace toutes les opérations effectuées pendant la durée de la détention de son titulaire. Le détenu a la possibilité d'acheter avec son pécule disponible, divers objets ou denrées qui sont vendus à la cantine de l'établissement. Elle est alimentée par les sommes dont le détenu serait porteur lors de son incarcération, et par toutes celles qu'il reçoit de l'extérieur ou qu'il perçoit comme rémunération de son travail62(*). Le détenu est informé de la situation de son pécule par la communication de ses fiches. Il doit émarger et présenter ses réclamations éventuellement. Aussi le détenu condamné peut être employé à des corvées à l'extérieur de la prison au profit d'autres services. Ce travail lui donne droit à une rémunération qui obéit à une certaine règle de comptabilité : La moitié (1/2) est versée au pécule disponible, Le quart (1/4) est versé au pécule de garantie, Et l'autre quart (1/4) au pécule de réserve.63(*) L'habillement fait aussi l'objet de mesures particulières comme le dénote ainsi l'article 149 : « le règlement intérieur édicté par le Ministre chargé de l'Administration pénitentiaire fixe notamment l'habillement ...) ». Les vêtements et sous-vêtements laissés ou fourni au détenu, doivent être propres et maintenus en bon état par ces derniers. Ils disposent pour ce faire de temps libre les dimanches et jours fériés. Le port de vêtement doit être correct64(*). Mais l'ensemble de règles minima pour le traitement des détenus demeure plus expressif dés lors que la règle 17 enseigne que tout détenu qui n'est pas autorisé à porter ses vêtements personnels doit recevoir un trousseau qui soit approprié au climat et suffisant pour le maintenir en bonne santé. Ces vêtements ne doivent en aucune manière être dégradants ou humiliants. Tous les vêtements doivent être propres et maintenus en bon état. Les sous-vêtements doivent être changés et lavés aussi fréquemment qu'il est nécessaire pour le maintien de l'hygiène. Dans des circonstances exceptionnelles, quand le détenu s'éloigne de l'établissement à des fins autorisées, il doit lui être permis de porter ses vêtements personnels ou des vêtements n'attirant pas l'attention. Lorsque les détenus sont autorisés à porter leurs vêtements personnels, des dispositions doivent être prises au moment de l'admission à l'établissement pour assurer que ceux-ci soient propres et utilisables. Chaque détenu doit disposer, en conformité des usages locaux ou nationaux, d'un lit individuel et d'une literie individuelle suffisante, entretenue convenablement et renouvelée de façon à en assurer la propreté. B- L'HYGIENE ET LA SANTE DES DETENUSIl s'agit la de droits essentiels qui impliquent le respect de la dignité des détenus. L'article 149 de l'arrêté y montre les grandes lignes. Car le respect des droits fondamentaux passe par la garantie de la dignité du détenu. On doit exiger des détenus la propreté personnelle; à cet effet, ils doivent disposer d'eau et des articles de toilette nécessaires à leur santé et à leur propreté. Afin de permettre aux détenus de se présenter de façon convenable et de conserver le respect d'eux-mêmes, des facilités doivent être prévues pour le bon entretien de la chevelure et de la barbe; les hommes doivent pouvoir se raser régulièrement. Or l'article 21 du règlement intérieur de la prison de saint louis dispose : « La propreté corporelle est exigée de tous les détenus. Ils doivent faire leur toilette à chaque réveil et se laver au moins une fois dans la journée. Des produits de première nécessité sont distribués périodiquement. L'entretien et la coupe des cheveux pour les hommes sont obligatoires. Pour les femmes, l'entretien et les tresses sans mèches des cheveux sont également obligatoires». De plus « il est alloué aux détenus une ration de savon par semaine. Des produits d'hygiène et d'entretien leur sont également distribués ». Chaque établissement pénitentiaire doit disposer au moins des services d'un médecin qualifié, qui devrait avoir des connaissances en psychiatrie. Les services médicaux devraient être organisés en relation étroite avec l'administration générale du service de santé de la communauté ou de la nation. Ils doivent comprendre un service psychiatrique pour le diagnostic et, s'il y a lieu, le traitement des cas d'anomalie mentale. A son arrivée dans l'établissement, le détenu est soumis autant que faire se peut à un examen médical destiné à déceler toute affection de nature contagieuse ou évolutive. Les principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus énoncent que « les détenus ont accès aux services de santé existant dans le pays, sans discrimination aucune du fait de leur statut juridique ». Le détenu peut à tout moment demander assistance auprès du service médical de la prison pour recevoir des soins médicaux adéquats. L'admission à l'infirmerie de l'établissement est décidée par l'Infirmier Major. L'hospitalisation relève du Médecin traitant. Il faut aussi noter que le détenu malade bénéficie gratuitement des soins qui lui sont nécessaires ainsi que de la fourniture des produits pharmaceutiques dûment ordonnés par le médecin traitant. La gratuité des soins s'étend à tous examens ou traitements de spécialistes que requiert l'état de santé des détenus à l'exception des prothèses et des verres de correction65(*). Néanmoins a l'exception des expertises ordonnées par l'autorité judiciaire, les détenus ne peuvent même à leur frais, être examinés ou hospitalisés dans un établissement privé). Les règles minima précisent par ailleurs à propos des malades qui ont besoin de soins spéciaux, qu'il faut prévoir le transfert vers des établissements pénitentiaires spécialisés ou vers des hôpitaux civils. Lorsque le traitement hospitalier est organisé dans l'établissement, celui-ci doit être pourvu d'un matériel, d'un outillage et des produits pharmaceutiques permettant de donner les soins et le traitement convenables aux détenus malades, et le personnel doit avoir une formation professionnelle suffisante. Tout détenu doit pouvoir bénéficier des soins d'un dentiste qualifié. Somme toute, le médecin est chargé de surveiller la santé physique et mentale des détenus. Il devrait voir chaque jour tous les détenus malades, tous ceux qui se plaignent d'être malades, et tous ceux sur lesquels son attention est particulièrement attirée. Le médecin doit présenter un rapport au directeur chaque fois qu'il estime que la santé physique ou mentale d'un détenu a été ou sera affectée par la prolongation ou par une modalité quelconque de la détention66(*). PARAGRAPHE 2 : LE TRAVAIL ET LA DISCIPLINE EN MILIEU CARCERAL L'exigence de réinsertion, et à travers elle la prévention de la récidive, est au coeur des missions confiées à l'administration pénitentiaire. Elle dispose pour ce faire de moyens certes limités mais relativement diversifiés : elle favorise tout d'abord le travail, afin de ne pas faire coïncider l'incarcération avec une période d'inactivité(A). Aussi les établissements pénitentiaires disposent d'un règlement intérieur qui détaille les fautes disciplinaires (refus de réintégrer sa cellule, possession d'objet interdit, violence, etc....). En cas de commission d'une faute, les détenus comparaissent, devant une commission de discipline qui peut prononcer des sanctions, dont les plus graves consistent en un placement à l'isolement ou au quartier disciplinaire(B). A- L'AMENAGEMENT DU TRAVAIL EN DETENTION Le travail est obligatoire pour tous les condamnés à des peines privatives de liberté pour des faits qualifiés crimes ou délits de droit commun. Il est réglementé par les articles 30 à 65 de l'arrêté. Toutefois la concession ou la cession de la main-d'oeuvre pénale à des particuliers, compagnies ou personnes morales de droit privé, ne peut se faire sans le consentement des détenus intéressés67(*) . Les condamnés de police peuvent demander qu'il leur soit donné du travail. Le travail pénitentiaire ne doit pas avoir un caractère afflictif. Il faut fournir aux détenus un travail productif suffisant pour les occuper pendant la durée normale d'une journée de travail. Ce travail doit être, dans la mesure du possible, de nature à maintenir ou à augmenter leur capacité de gagner honnêtement68(*) . L'organisation et les méthodes de travail pénitentiaire doivent se rapprocher autant que possible de celles qui régissent un travail analogue hors de l'établissement, afin de préparer les détenus aux conditions normales du travail libre. Lorsque les détenus sont utilisés pour des travaux qui ne sont pas contrôlés par l'administration, ils doivent toujours être placés sous la surveillance du personnel pénitentiaire. A moins que le travail soit accompli pour d'autres départements de l'Etat, les personnes auxquelles ce travail est fourni doivent payer à l'administration le salaire normal exigible pour ce travail, en tenant compte toutefois du rendement des détenus. Les précautions prescrites pour protéger la sécurité et la santé des travailleurs libres doivent également être prises dans les établissements pénitentiaires. Des dispositions doivent être prises pour indemniser les détenus pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, à des conditions égales à celles que la loi accorde aux travailleurs libres. Le travail des détenus doit être rémunéré d'une façon équitable et le règlement doit permettre d'utiliser au moins une partie de leur rémunération pour acheter des objets autorisés qui sont destinés à leur usage personnel et d'en envoyer une autre partie à leur famille69(*). B- LE MAINTIEN DE LA DISCIPLINE Les détenus doivent obéissance aux fonctionnaires ou agents ayant autorité dans la prison, en tout ce qu'ils leur prescrivent pour l'exécution des règlements (art 100). L'ordre et la discipline doivent être maintenus avec fermeté, mais sans apporter plus de restrictions qu'il n'est nécessaire pour le maintien de la sécurité et d'une vie communautaire bien organisée. Le règlement détermine aussi la conduite qui constitue une infraction disciplinaire; le genre et la durée des sanctions disciplinaires qui peuvent être infligées; l'autorité compétente pour prononcer ces sanctions. Aucun détenu ne peut être puni sans être informé de l'infraction qu'on lui reproche et sans qu'il ait eu l'occasion de présenter sa défense70(*). L'autorité compétente doit procéder à un examen complet du cas. Dans la mesure où cela est nécessaire et réalisable, il faut permettre au détenu de présenter sa défense par l'intermédiaire d'un interprète. Les peines corporelles, la mise au cachot obscur ainsi que toute sanction cruelle, inhumaine ou dégradante doivent être complètement défendues comme sanctions disciplinaires. Les peines de l'isolement et de la réduction de nourriture ne peuvent jamais être infligées sans que le médecin ait examiné le détenu et certifié par écrit que celui-ci est capable de les supporter. Il en est de même pour toutes autres mesures punitives qui risqueraient d'altérer la santé physique ou mentale des détenus. Il est interdit au détenu : tout acte individuel ou collectif de nature à troubler le bon ordre, toute communication clandestine ou en langage conventionnel, toute introduction d'arme, d'instrument dangereux notamment les rasoirs et les couteaux, l'introduction de boissons alcoolisées ou des matières inflammables71(*). Les instruments de contrainte tels que menottes, chaînes, fers et camisoles de force ne doivent jamais être appliqués en tant que sanctions. Les chaînes et les fers ne doivent pas non plus être utilisés en tant que moyens de contrainte. Les autres instruments de contrainte ne peuvent être utilisés que par mesure de précaution contre une évasion pendant un transfèrement, pourvu qu'ils soient enlevés dès que le détenu comparaît devant une autorité judiciaire ou administrative; pour des raisons médicales sur indication du médecin. * 30 _ Voir, notamment, G. RICHARDSON, « Des droits aux attentes », in O. DE SCHUTTER, D. KAMINSKI, L'institution du droit pénitentiaire, Bruylant /L.G.D.J., 2002, pp. 193 et s. * 31 _ D ROMAN, « A corps défendant », Recueil Dalloz, p. 1284. Vo. également, X. PIN, La vulnérabilité en matière pénale, in F. COHET CORDEY (di.), Vulnérabilité et droit, PUG, 2000, p. 119 s. * 32 _ § 94. Note F. SUDRE, Droit de la Convention européenne des droits de l'homme, La Semaine Juridique, Chronique I, 291, 2001, pp. 128 s. * 33 _ Il s'agit de l'achat, l'usage, de la vente de toutes les formes de drogue prévus par la législation * 34 _ Haut Commissariat des Nations unies aux Droits résolution 40/33 du 29 Novembre 1985 * 35 _ Adoptées par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/113 du 14 décembre 1990 * 36 _ Article 10, Ensemble des règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineur (règles de Beijing) résolution 40/33 du 29 Novembre 1985 * 37 _ Les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, l'Assemblée générale dans sa résolution 45/113 du 14 décembre 1990 règle 27, 28, 32 * 38 _ Les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, l'Assemblée générale dans sa résolution 45/113 du 14 décembre 1990 règle 64 * 39 _ Règle 73 des Nations unies * 40 _ Patrick Wachsmann, Les droits de l'homme, 4 Edition Dalloz 2002, Paris * 41 _ 20 Vo. J. DANET, « Les conditions de détention et l'article 225-14 du code pénal », Recueil Dalloz, 20 p. 2218. * 42 _ Rapport du 5 février 2008 sur la situation particulière des femmes en prison * 43 _ Rapport du 5 février 2008 sur la situation particulière des femmes en prison * 44 _ C.e.d.h arrêt Tomasi c/ France du 27 août 1992, * 45 _ Ensemble des principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement, résolution 41 /173 du 9 Décembre 1988, principe premier * 46 _ M. Delmas- Marty, Criminalité économique et atteinte à la dignité de la personne, Paris, Edition de la Maison des Sciences de l'homme, 1998, p 221 * 47 _ Article 295-1 Du code pénal du Sénégal * 48 _ CEDH, 22 novembre 1995, SW. C/ Royaume-Uni et C.R. c/ Royaume-Uni. * 49 _ Claude d'Harcourt, directeur de l'administration pénitentiaire * 50 _ Recommandation Rec. (2006) 2 du Comité des Ministres aux Etats membres sur les Règles pénitentiaires Européennes, adoptée par le Comité des Ministres le 11 janvier 2006, lors de la 952e réunion des Délégués des Ministres * 51 _ Selon son Préambule, l'Union se fonde sur des valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de Liberté, d'égalité et de solidarité. On peut par ailleurs ajouter que pour la CJCE, la dignité humaine constitue un Principe général du droit communautaire (affaire Omega, Aff. C-36/02, 14 octobre 2004). * 52 _Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus résolution 45/111 du 14 décembre 1990, principe 1 * 53 _ S. kaba, les droits de l'homme au Sénégal, collection XAAM SAA YOON, octobre 1997, p 416 * 54 _ Préambule de la constitution du 7 Janvier 2001 * 55 _ Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, article 5 * 56 _ S. kaba, les droits de l'homme au Sénégal, collection XAAM SAA YOON, octobre 1997 * 57 _ Voir le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (résolution 2200 A (XXI) de L'Assemblée, annexe, art. 10, par. 2 b)); et l'ensemble de règles minima pour le traitement des détenus (Règles 8 et 68). * 58 _ S. kaba, les droits de l'homme au Sénégal, collection XAAM SAA YOON, octobre 1997, p 305 * 59 _Arrêté ministériel n°7117M .INT.D.A.P du 21 mai 1987 portant règlement intérieur des établissements pénitentiaires * 60 _ Article 32 Règlement intérieur mac de saint louis * 61 _ Charte des droits fondamentaux des détenus, article 4 * 62 _ Article 41 Règlement intérieur mac de saint louis * 63 _ Article 43 règlement intérieur mac de saint louis * 64 _ Article 41 règlement intérieur mac de saint louis * 65 _ * 66 * 67 * 68 * 69 * 70 * 71 |
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