A- MALADIE HOLLANDAISE
La maladie hollandaise inspirée du cas des Pays-Bas des
années 1960 (ou mal hollandais, ou syndrome hollandais) désigne
la malédiction qui serait attachée pour une économie
nationale à la découverte de ressources naturelles. Elle est
aussi un phénomène économique qui relie l'exploitation de
ressources naturelles et le déclin de l'industrie manufacturière
locale. Le terme "maladie hollandaise" est utilisé par extension pour
désigner les conséquences nuisibles provoquées par une
augmentation significative des exportations de ressources naturelles par un
pays (Corden et al, 1982).
Les économistes se sont mis à réaliser
que la maladie hollandaise constituait peut être un
phénomène très général, subi par tous les
pays bénéficiant d'une forte hausse de leur exportations de
produits primaires (Near et al, 1985).
Le syndrome hollandais peut se déclarer dans une
économie dont les recettes tirées de loyers, par exemple des
ressources minérales ou d'autres sources extérieures telles que
l'aide étrangère, s'emballent soudainement. Dans la mesure
où la demande agrégée accrue n'est pas orientée
dans sa totalité vers un accroissement des importations, on assiste
à un surenchérissement des biens non échangeables par
rapport aux biens échangeables, qui peuvent être importés.
La production privilégie alors les biens non échangeables
plutôt que les biens échangeables, ce qui est préjudiciable
au secteur des exportations.
Il est difficile d'évaluer les effets au Tchad du
syndrome hollandais car les données sont insuffisantes mais aussi parce
que le secteur non pétrolier est sous-développé. Avant le
pétrole, le secteur économique le plus important était
l'agriculture, le coton et le bétail (les principales exportations).
Le risque de syndrome hollandais cause une augmentation des
prix des biens non échangeables (matériaux locaux de
construction, services, production alimentaire pour la consommation locale) qui
pourrait évincer les biens échangeables clés et
potentiels, privant ainsi l'économie d'une importante source d'emplois
et de changements technologiques. La priorité d'une économie non
pétrolière doit être d'éliminer les obstacles
à la croissance pour
améliorer le climat des affaires dans lequel
évolue le secteur privé. Même avant le démarrage de
la production pétrolière, le coton était enlisé
dans des problèmes qui n'ont pas été aggravés par
le pétrole. Toutefois, il est possible que les redevances
pétrolières aient modéré les incitations à
lancer la réforme de la filière coton.
À l'examen des prix des biens non échangeables,
on ne constate aucun signe de syndrome hollandais. La seule variable qui
pourrait jouer est l'augmentation de la masse salariale, qui est passée
de 5 % du PIB non pétrolier en 2000 à 91/4% en 2008; la
moitié de cette augmentation s'explique par le relèvement de la
solde des militaires. Le nombre total d'emplois de la fonction publique est
passé de 57 000 en 2001 à 117 000 en 2008 et le salaire moyen en
termes réels a progressé d'environ 47 % (voir annexe 4 tableau
2). Bien que la production pétrolière constitue une
économie enclavée qui n'a que peu d'effets sur les mouvements de
main-d'oeuvre, l'augmentation des dépenses de l'État pendant
l'expansion pétrolière, qui a alimenté la hausse de la
masse salariale, pourrait se traduire par un mouvement de la main-d'oeuvre des
autres secteurs vers le secteur public. Rien ne prouve, néanmoins, que
ces ressources proviennent de secteurs non pétroliers actifs
plutôt que d'un vivier de main-d'oeuvre précédemment
inactive.
Même si la qualité des investissements n'est pas
optimale, le risque du syndrome hollandais est neutralisé par le recours
aux ressources pétrolières pour construire les infrastructures
nécessaires et investir dans l'éducation et la santé, ce
qui contribue à renforcer le secteur non pétrolier. Il semble que
la disponibilité et les coûts de la main-d'oeuvre dans les
secteurs agricoles, notamment l'élevage, n'aient pas été
touchés par l'émergence d'un secteur pétrolier ni par
l'élargissement de la fonction publique. L'augmentation des
dépenses de l'État a au contraire aidé l'agriculture en
fournissant des infrastructures essentielles.
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