Analyse de déterminants de la mortalité infanto juvénile au Cameroun( Télécharger le fichier original )par Valery Martial TANKOU KAMELA Institut Sous régional de Statistique et d'Economie Appliqué - Ingénieur Statisticien 2009 |
3.3.2 Mortalité des enfants selon les facteurs socio-économiques et culturelsPar facteurs socio-économiques et culturels, on fait référence au milieu d'existence de l'enfant, à l'instruction des parents, et au niveau de vie du ménage où appartient l'enfant. · Le milieu d'existence de l'enfant On se rend compte, que la mortalité des enfants est plus élevée en milieu rural qu'en zone urbaine. Les résultats de l'EDS III, 2004 montrent qu'en milieu rural, sur 1000 naissances vivantes, 169 n'atteignent par leur 5ème anniversaire, contre 119 en milieu urbain. Autrement dit, un enfant sur 8 n'était plus en vie en milieu urbain pour fêter son 5ème anniversaire, par contre un enfant sur 6 n'était plus en vie pour fêter son 5ème anniversaire en milieu rural. Les différences de l'offre et de l'utilisation des services de santé expliqueraient ces différences de mortalité. Par ailleurs le niveau de socialisation des femmes en milieu rural est très faible, ce qui fait qu'elles se servent très rarement des soins qui sont mis à leur disposition. L'accessibilité aux soins de santé en milieu rural est difficile, et bien encore le personnel de santé est insuffisant et parfois moins qualifié qu'en zone urbaine. Un test de khi-deux nous conduit à rejeter au seuil de 5 % (la p-value étant de 0,000) l'hypothèse d'indépendance entre le milieu et la survie ou non de l'enfant. Il y aurait donc par conséquent une certaine dépendance entre les modalités de ces deux variables. Le graphique qui suit nous permet de mieux nous en convaincre. Figure : risque de mortalité des enfants suivant le milieu de résidence (en %o) Source : EDS III, 2004 · L'instruction de la mère Pour ce qui est du Cameroun, on se rend compte à la lumière du graphique ci-après que, plus le niveau d'instruction de la mère est élevé, la proportion des enfants qui décèdent avant leur 5ème anniversaire baisse. En effet, les enfants qui naissent des femmes sans niveau d'instruction, présentent plus de risque de mourir à tout âge que ceux des mères instruites. Car l'instruction de la mère améliore sans doute les connaissances préventives en matière de vaccination par exemple, de contraception pour espacer les naissances et surtout se traduit systématiquement par une meilleure utilisation des services de santé. À la suite de ce graphique on s'aperçoit aussi que les enfants qui naissent de mère sans instruction présente plus de risque de décéder avant leur 5ème anniversaire, que ceux dont le niveau d'instruction de la mère est supérieur ou plus. Une mère alphabétisée peut consigner les vaccinations de son enfant avec l'aide de graphiques spécialement conçus à cet effet. Magali36(*) soutient l'idée que l'éducation de la mère, lui permet de comprendre plus aisément qu'un vaccin puisse entraîner un accès de fièvre temporaire sans que l'efficacité de celui-ci soit remise en cause. Enfin l'auteur affirme que « les femmes instruites ont tendance, plus que les autres, à adopter des pratiques hygiéniques, même très simples, susceptibles d'influencer la santé de leurs enfants. » Peut-on alors affirmer que le niveau d'instruction est un déterminant de la mortalité infanto-juvénile au Cameroun ? Comme précédemment, le test de Khi-deux réalisé sur les deux variables nous amène à croire une possible dépendance entre les modalités de ces deux variables (la p-value étant de 0,000). Figure : risques de mortalité des enfants suivant le niveau d'instruction de la mère (en %o) Source : EDS III, 2004 · L'instruction du père Du graphique ci-dessous, le taux des décès des enfants de moins de 5 ans, selon le niveau d'instruction du père ne varie pas beaucoup. En effet, parmi tous les enfants nés des pères sans niveau d'instruction, le taux est de 12 %, tandis qu'il est de 9 % chez les parents ayant un niveau secondaire et plus. Évidemment l'instruction du père n'influence pas très directement la survie de l'enfant, pour la simple raison que plusieurs hommes passent très peu de temps à la maison, et près des enfants. Bien plus, l'alimentation des enfants, l'attention apportée aux enfants, sont souvent l'apanage des mères. Figure : taux de décès infanto-juvénile en fonction du niveau d'instruction du père (en %) Source : EDS III, 2004 Nous terminons cette section en présentant le niveau de la mortalité des enfants de moins de cinq ans selon le niveau de vie du ménage où il vit. · Le niveau de vie du ménage Le niveau de vie du ménage est un aspect important de la mortalité des enfants au Cameroun. En effet, un niveau de vie élevé s'accompagne d'une amélioration nette des conditions de vie. Dans ces conditions, les enfants qui naissent des familles riches, ont dès la naissance moins de risques d'être malades, et par conséquent moins de risques de mourir. Un revenu élevé est un gage de santé, car à tout moment on peut avoir accès au meilleur médicament à tous les prix et en même temps que le niveau de vie élevé améliore la qualité et la quantité d'éléments que l'enfant peut consommer. Il est moins probable que l'enfant soit bien nourri et soigné, lorsque le niveau de vie du ménage est bas. Les ménages pauvres ont du mal à bien nourrir leurs enfants, en leur apportant les quantités nécessaires en nutriments dont ils ont besoin. Une politique tendant à améliorer les conditions de vie des ménages, aura inéluctablement une incidence sur la mortalité des enfants, en la faisant baisser. Au regard du graphique ci-dessous, on s'aperçoit qu'au Cameroun, les niveaux de mortalité augmentent lorsque le niveau de vie du ménage est faible. Pour les ménages riches par exemple, tous les quotients de mortalité sont les plus bas. Sur 1000 naissances vivantes enregistrées dans ce type de ménage, 88 ne sont plus en vie après quatre ans, par contre plus du double d'enfants ne sont plus en vie pour fêter leur 5ème anniversaire dans les ménages pauvres. Il apparaît en définitive que les enfants n'ont certainement pas à la naissance, les mêmes chances de survivre jusqu'à leur 5ème anniversaire au Cameroun. Réduire alors le niveau de mortalité à l'échelle national, consistera à prendre des mesures favorables pour les pauvres. C'est certainement ce groupe de la population qui explique en grande partie le niveau de la mortalité au Cameroun. Il apparaît également que les ménages ayant un niveau de vie moyen, connaissent des niveaux élevés de mortalité d'enfants. Car un enfant sur 7 n'est plus en vie pour fêter son 5ème anniversaire, dans ces ménages. Figure : risques de mortalité des enfants suivant le niveau de vie du ménage (en %o) Source : EDS III, 2004 Dans la section précédente nous avons présenté les niveaux de la mortalité des enfants en fonction des caractéristiques socio-économiques et culturelles. Il semble se révéler que les facteurs sociaux auraient un effet sur la mortalité des moins de cinq ans au Cameroun. Nous allons dans la section suivante, présenter le niveau de la mortalité en fonction des facteurs démographiques. * 36 _ Tiré de l'ouvrage de Magali BARBIERI sur les déterminants de la mortalité des enfants dans le tiers monde (1991), page 24. |
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