II) Les publics de l'édition juridique.
« Le rôle de l'éditeur
juridique serait [selon André Dunes] fondamental dans les domaines de la
formation des juristes, de leur exercice professionnel, de la solution des
problèmes des entreprises et de la vulgarisation du droit dans le grand
public. »54(*)
Ce qui renvoie dans les faits aux deux marchés
revendiqués par les éditeurs juridiques.
A) L'incontestable marché constitué par les
spécialistes du droit et les professionnels initiés.
La formation des juristes, leur exercice professionnel, la
solution des problèmes des entreprises renvoient à ceux que l'on
avait rangé dans la deuxième catégorie des publics de
l'édition juridique: les étudiants, les universitaires, les
professionnels du droit et les professionnels initiés au droit.
Catégorie, qui correspond dans les faits au premier
et principal marché de l'édition juridique.55(*)
Les éditeurs mettent à leur disposition un
panel d'offre afin de satisfaire à leurs besoins.
a) Les besoins du premier marché de
l`édition.
Si le premier marché de l'édition juridique
ne se limite pas comme on aurait pu le penser aux spécialistes du droit,
il se réduit à un cercle très restreint d'individus dont
les besoins sont attachés à une matière dont les contours
sont difficiles à délimiter.
a-1) Le droit.
Entendu largement comme l'ensemble des règles et
dispositions juridiques régissant les rapports entre les hommes ;
analysé sous le prisme de la hiérarchie des nomes, le droit
renvoie aujourd'hui à une multitude de textes de plus en plus nombreux
et foisonnants.
En termes de chiffre, ce tableau dressé fin janvier
2010, dans un article paru au journal Le Monde permet un bref aperçu de
la situation56(*) :
« En 1980, [indique-t-il] les lois
promulguées représentaient 632 pages. En 1990, ce chiffre
s'élevait à 1 055 pages. En 2006, tous les records ont
été battus avec près de 2 000 pages.
Depuis le début de la législature
actuelle, en 2007, pas moins de 117 projets ou propositions de loi ont
été adoptés, sans compter les conventions
internationales...»
Le constat ne s'arrête pas là.
« Au-delà du nombre, c'est la mauvaise qualité des
textes [...] qui est en cause. »
« Une
« frénésie de lois », une loi instable, peu
lisible, obscure pour les citoyens, [« qui n`y
prête[raient] »] qu`une oreille
distraite »...
Ce constat sévère est
récurrent. »57(*)
Technique, complexe, « instrument du
politique spectacle », parfois simplement
« d'affichage »58(*) .
La loi « bavarde »,
« tâtonne, hésite, bafouille », met à
mal la sécurité juridique, et laisse sur son
passage« un droit mou, flou, à l'état
gazeux... »59(*)
Et aussi dense et complexe qu'il paraisse
déjà, le droit n'est pas que çà...
C'est également par an des dizaines de milliers de
décisions de justice entre lesquelles, fautes d'indications majeures de
leurs auteurs60(*), il est
souvent difficile de se retrouver.
* 54 André Dunes,
opus précité.
* 55 Cf. Tableau de
concordance.
* 56 Le Monde 27 janvier
2010, « Le Parlement, surmené, dénonce la
frénésie de lois. ».
* 57 Karine Gilberg,
« De l'art de mieux légiférer », Le Monde du
17 février 2010.
* 58 Echange de voeux
à l'Elysée le 3 janvier 2005
Voeux
du Conseil constitutionnel au Président de la République.
* 59 Rapport public du
conseil d'Etat 1991, « De la sécurité
juridique ».
* 60 Article 5 code civil
« Il est défendu aux juges de prononcer par voie de
disposition générale et réglementaire sur les causes qui
leur sont soumises. »
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