L'ordonnance de la C.I.J. en l'affaire relative à des questions concernant l'obligation de poursuivre ou d'extrader (Belgique c. Sénégal), demande en indication des mesures conservatoires( Télécharger le fichier original )par Etienne KENTSA Université de Douala - DEA 2010 |
Section I : La teneur des assurances proprio motu du SénégalL'importance des assurances données par le Sénégal peut être mesurée par rapport à la demande en indication des mesures conservatoires. Ces assurances sont relatives, d'une part, à l'effectivité des mesures tenant à la rétention de Hissène HABRE au Sénégal (§ 1) et, d'autre part, à la volonté affirmée de ce dernier de juger l'ex-président tchadien (§ 2). § 1- L'effectivité des mesures relatives à la rétention de Hissène HABRE au Sénégal On s'attardera tour à tour sur l'explication de la déclaration du président sénégalais (A), et la surveillance exercée sur Hissène HABRE et sur son entourage (B). A. L'explication de la déclaration du président WADE Le Sénégal a avant tout entrepris de préciser et de justifier les propos médiatiques de son président. Le défendeur prétend en fait qu'il s'agissait d'un « faux prétexte à la demande de mesures conservatoires »155(*). En effet, on se souviendra que la demande belge était principalement justifiée par une déclaration du président de la République du Sénégal sur les ondes de Radio France Internationale (ci-après : « RFI ») le 2 février 2009. L'entretien accordé à RFI est d'ailleurs la seule référence médiatique inscrite dans la demande belge. On peut y lire ce qui suit : « Actuellement, [Hissène] HABRE est en résidence surveillée à Dakar, mais il ressort d'un entretien donné par le Président sénégalais, A[bdoulaye] WADE, à Radio France Internationale, que le Sénégal pourrait mettre fin à cette mise en résidence surveillée s'il ne trouve pas le budget qu'il estime nécessaire à l'organisation du procès de [Hissène] HABRE »156(*). On peut donc regretter, avec le Sénégal, que lors des observations orales, la Partie belge ait plutôt mentionné d'autres déclarations médiatiques du président sénégalais157(*), et n'ait pas tenu compte davantage de la déclaration faite sur RFI. Dans sa plaidoirie, la demanderesse mentionne en premier lieu l'interview accordée au journal espagnol Público et reproduite dans le numéro daté du 14 octobre 2008. Interview qui a d'ailleurs amené Human Rights Watch158(*) à déclarer que le président sénégalais semait le doute sur la tenue du procès contre Hissène HABRE159(*). Le président WADE conditionnait en effet le jugement de Hissène HABRE par l'obtention du financement requis de la société internationale et déclarait qu'il « n['allait] pas garder indéfiniment [Hissène] HABRE au Sénégal »160(*). La demanderesse mentionne ensuite la déclaration faite dans le journal français La Croix du 18 décembre 2008 : « Je vais donc mettre en garde mes homologues lors du prochain sommet de l'Union africaine en janvier [2009] et, si des [décisions] ne sont pas prises, peut-être renverrai-je Hissène Habré au Tchad. Mais en tout cas, si le procès ne se tient pas, je ne le garderai pas encore longtemps au Sénégal »161(*). Enfin, la Belgique fait cas de l'entretien accordé, le 3 février 2009, à l'Agence France-Presse (AFP) qui rapporte ledit entretien comme suit : « Interrogé pour savoir ce qu'il comptait faire en l'absence de financements, M. Wade a évoqué deux options : « ou je le renvoie chez lui » mais dans ce cas, a-t-il estimé, c'est l'actuel président tchadien Idriss Deby « qui va avoir des problèmes » ; « ou je le renvoie au président de l'Union africaine », [...] le leader libyen Mouammar Kadhafi »162(*). L'État défendeur a insisté sur le fait que la déclaration faite à RFI, dont se prévaut la demanderesse pour solliciter les mesures conservatoires, a été « complètement distraite de son contexte, et s'est vu attribuer un sens qu'elle n'avait évidemment pas »163(*). Le président sénégalais déclare en effet dans cette interview ce qui suit : « J'avais dit que si on ne me mettait pas dans les conditions, c'est-à-dire de financement du procès, moi, j'allais rendre le dossier. J'autorise ces ONG à venir au Sénégal pour qu'on leur dise exactement où nous en sommes... J'ai accepté [que le procès se tienne] parce que je suis contre l'impunité. Nous avons été jusqu'à prendre les textes internationaux et à les intégrer à notre propre droit pour pouvoir juger Hissène Habré. [Après toutes les promesses d'appui qui ont été faites], comme ça traînait un peu, j'ai dit « il faut que le [soutien financier promis] soit réellement disponible... C'était pour pousser un peu pour qu'on accélère... Dès que nous aurons les moyens, le procès va commencer. Il n'y a absolument aucun doute »164(*). Le défendeur a conclu là-dessus en disant que la « tonalité générale du propos présidentiel se situe (...) dans la perspective de la tenue d'un procès » et qu'une « interprétation contraire serait en effet quelque peu déloyale »165(*). On conviendra facilement que, même si la Belgique n'a ni versé dans le « caviardage »166(*), ni tronqué les déclarations du président WADE, elle n'en a tout de même présenté que des extraits de nature à dénoter la mauvaise foi du président sénégalais. Cette façon d'opérer, quand bien même elle serait motivée par l'urgence de la situation, peut être pertinemment qualifiée de tentative de manipulation. B. La surveillance exercée sur Hissène HABRE et sur son entourage A propos de la surveillance exercée sur Hissène HABRE et sur sa famille, le Sénégal la qualifie de « constante et resserrée ». A l'issu de la plaidoirie des représentants sénégalais, il est clair que la « probabilité que l'ex-président tchadien quitte le Sénégal et échappe à toute poursuite pénale est quasi nulle »167(*). La Cour sera par ailleurs informée de ce que Hissène HABRE ne dispose pas d'un titre de voyage en cours de validité, lui permettant de voyager - ni passeport, ni sauf-conduit168(*). Sur le plan de la logistique, le défendeur relève que ladite surveillance est exercée au quotidien par le gouverneur militaire, responsable de la sécurité du Palais de la République ; mission de surveillance confiée également à un groupe d'intervention de la gendarmerie sénégalaise. Cette dernière est une unité d'élite dotée de moyens spéciaux, formée et entraînée pour la protection des autorités. Dans la banlieue dakaroise Ouakam, lieu de localisation des deux demeures de Hissène HABRE, cette surveillance est assurée également par une autre brigade de gendarmerie sénégalaise. Si l'on s'en tient à ce qui précède, l'on constate tout simplement une certaine application, par le Sénégal, de l'une des exigences de la Convention contre la torture à savoir la détention de toute personne présumée auteur d'infractions prévues à l'article 4. Il s'agit des « actes de torture », « tentative de pratiquer la torture » ou « tout acte qui constitue une complicité ou une participation à l'acte de torture ». En effet, il ressort de l'article 6, § 1 de ladite Convention que : « S'il estime que les circonstances le justifient, après avoir examiné les renseignements dont il dispose, tout État partie sur le territoire duquel se trouve une personne soupçonnée d'avoir commis une infraction visée à l'article 4 assure la détention de cette personne ou prend toutes autres mesures juridiques nécessaires pour assurer sa présence. Cette détention et ces mesures doivent être conformes à la législation dudit État ; elles ne peuvent être maintenues que pendant le délai nécessaire à l'engagement des poursuites pénales ou d'une procédure d'extradition ». De ce qui précède, il peut être relevé la capacité et une certaine volonté du Sénégal de maintenir Hissène HABRE sur son sol. L'on se doit de rappeler ici que l'ancien dirigeant tchadien n'est pas détenu. Il n'est pas inutile en effet, de préciser que la « détention » et la « résidence surveillée » sont deux situations nettement différentes. La « détention » est l'état de l'individu retenu à quelque titre que ce soit dans un établissement pénitentiaire169(*). L'on dit par contre qu'un individu est mis en « résidence surveillée », cas de l'ex-président tchadien, lorsque ce dernier, bien que continuant d'habiter sa résidence ou son domicile habituel, est soumis à une surveillance systématique des autorités judiciaires. Cette situation est celle dans laquelle est placé Hissène HABRE au Sénégal. § 2- La volonté affirmée du Sénégal de juger Hissène HABRE Des éléments qui permettent de dénoter une volonté sénégalaise de juger Hissène HABRE, on a retenu les réformes normatives (A) et les négociations internationales (B) engagées en vue de l'organisation du procès contre l'ex-président tchadien par le Sénégal. A. Les réformes normatives entreprises par le Sénégal Comme on l'a relevé à l'introduction de cette étude, le Sénégal a modifié sa législation afin de doter ses juridictions de la compétence pour le jugement des crimes internationaux en général et des crimes allégués de Hissène HABRE en particulier. La partie belge s'en est réjouie d'ailleurs lors du premier tour de plaidoiries sur sa demande en indication de mesures conservatoires. Ces « réformes de fond et de forme » touchent non seulement la législation pénale, mais aussi la législation constitutionnelle sénégalaise. Sur le plan pénal, le Sénégal a promulgué deux lois le 12 février 2007170(*) à savoir : Ø la Loi n° 2007-02 qui modifie son Code pénal en y incorporant le crime de génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité ; Ø la Loi n° 2007-05 qui modifie son Code de procédure pénale en y introduisant, d'une part, le principe de la compétence universelle pour la répression des crimes énumérés ci-dessus et, d'autre part, l'imprescriptibilité par « nature » de ces crimes171(*). Le Sénégal a ainsi mis sa législation pénale en conformité avec la Convention des Nations Unies sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité du 26 novembre 1968172(*). Du fait de ces deux lois, relève Raphaël TIWANG WATIO, le Sénégal rentre ainsi, bon gré mal gré, dans le groupe minoritaire d'Etats africains ayant effectivement [intégré dans l'ordre juridique interne] les Conventions internationales protectrices des droits de l'homme173(*). Il importe de noter qu'à travers les dispositions de l'article 669 dudit Code de procédure pénale, « il a été prévu qu'à l'occasion des crimes internationaux commis par un étranger, à l'étranger, les juridictions sénégalaises pouvaient être compétentes si cet étranger était appréhendé sur [son] territoire ou si le gouvernement obtenait son extradition »174(*). Le défendeur a fait valoir que c'est d'une compétence universelle assez large qu'ont été dotées les juridictions sénégalaises. Sur le plan constitutionnel, le Sénégal a modi?é sa Constitution par la Loi constitutionnelle n° 2008-33 du 7 août 2008175(*). L'article 1er de cette loi remplace l'article 9176(*) de la Constitution de la République du Sénégal par les dispositions suivantes : « Toute atteinte aux libertés et toute entrave volontaire à l'exercice d'une liberté sont punies par la loi. Nul ne peut être condamné si ce n'est en vertu la rentrée en vigueur avant l'acte commis. Toutefois, les dispositions de l'alinéa précédent ne s'opposent pas à la poursuite, au jugement et à la condamnation de tout individu en raison d'actes ou omission qui, au moment où ils ont été commis, étaient tenus pour criminels d'après les règles du droit international relatives aux faits de génocide, crimes contre l'humanité, crime de guerres. La défense est un droit absolu dans tous les Etats et à tous les degrés de la procédure. » La lecture de ces dispositions nouvelles enseigne sur l'étendue et l'importance de la réforme ainsi opérée. En effet, on constate qu'il existe désormais une exception au principe de la non-rétroactivité de la loi pénale pour le crime de génocide, les crimes contre l'humanité et le crime de guerre177(*). C'est dire si à présent les juridictions sénégalaises peuvent pertinemment poursuivre les crimes internationaux, ce qui n'était pas vraiment le cas en 2000. Raphaël TIWANG WATIO n'est pas de cet avis. En fait, au sujet du motif d'incompétence tiré de l'article 669 du Code de procédure pénale sénégalais par la Cour d'appel de Dakar le 4 juillet 2000, cet auteur trouve que cet « argument était fallacieux »178(*). Il se justifie en affirmant que l'adoption des mesures de mise en oeuvre de la compétence universelle, à travers les deux lois du 12 février 2007, n'aura pas pour effet de rendre l'Etat sénégalais universellement compétent ; puisqu'il l'était depuis la ratification de la Convention contre la torture179(*) (c'est-à-dire depuis 1986180(*)). Ces réformes permettent de toutes les façons de donner plein effet aux dispositions de la Convention contre la torture. En effet, comme le rappelle fort à propos Damien VANDERMEERSCH, « en ratifiant l'une des Conventions prévoyant le principe de compétence universelle, les États s'engagent à attribuer compétence à leurs juridictions pour connaître des infractions visées par [lesdites] Convention[s] »181(*). Les États ont en fait une certaine responsabilité dans le renforcement de l'ordre juridique international en général. Michel VIRALLY faisait d'ailleurs remarquer en 1964 que « l'ordre juridique international est (...) incomplet [et a par conséquent] besoin du droit interne pour fonctionner »182(*). John DUGARD renchérissait en affirmant que : «[w]hile international protective measures are important, it is essential, in the first instance, that municipal law provide legal protection to the rights contained in international human rights conventions»183(*). Les réflexions de ces auteurs soulèvent subtilement la question des rapports entre deux catégories juridiques bien distinctes qui coexistent : d'un côté une pluralité de droits nationaux, cadres et reflets de sociétés fortement intégrées et étroitement hiérarchisées, de l'autre le droit international, qui s'adresse avant tout à des entités souveraines184(*). La doctrine est divisée sur la question des rapports entre les deux ordres juridiques. Il existe ainsi deux grandes écoles ou théories en la matière : la théorie moniste et la théorie dualiste. La théorie moniste voit une unité voire une consubstantialité entre le droit international et le droit interne. Dans la pratique des Etats, l'on distingue deux types de monisme : le monisme avec primauté du droit interne et le monisme avec primauté du droit international. Ce second type de monisme demeure le plus répandu de nos jours. Le Sénégal a opté pour ce type dans sa constitution (articles 97 et 98185(*)). La lecture de ces dispositions permet de constater que le Sénégal fait une place éminente, parmi les normes applicables dans l'ordre juridique national, aux normes d'origine internationale, en particulier conventionnelle. Les réformes normatives entreprises par le Sénégal en 2007 et 2008 sont en parfaite conformité avec le principe de la primauté du droit international. Les réactions à ces importantes réformes ont été, d'une part, le dépôt de la plainte du 16 septembre 2008186(*) contre Hissène HABRE, d'autre part, la saisine en octobre 2008 de la Cour de Justice de la Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO)187(*) par les conseils de l'ancien président tchadien et la procédure engagée contre le Sénégal par un partisan de Hissène HABRE devant la Cour africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (CrADHP)188(*). B. Les négociations internationales engagées en vue de l'organisation du procès contre Hissène Habré Selon la partie sénégalaise, c'est sa préoccupation d'organiser le procès contre Hissène HABRE qui justifie les négociations entreprises avec l'Union européenne (ci-après : « UE ») et avec l'Union africaine (ci-après : « UA »). Ces deux organisations se sont en effet engagées à apporter leur soutien au Sénégal pour l'organisation et la tenue du procès. Procès qui, comme on le verra plus loin, nécessiterait des ressources financières colossales. Pour ce qui est de l'UE, l'on peut d'abord rappeler que celle-ci a montré un certain intérêt pour la lutte contre l'impunité en Afrique en général et pour l'affaire Habré en particulier. De fait, dans la Résolution législative du Parlement européen sur l'impunité en Afrique, en particulier le cas de Hissène Habré, du 16 mars 2006, l'UE a invité le Sénégal à garantir à Hissène HABRE un procès équitable, conformément à la Convention des Nations Unies contre la torture, en l'extradant vers la Belgique s'il ne devait pas y avoir d'alternative africaine189(*). Ensuite, le 26 avril 2007, le Parlement européen exhortera l'Union à « encourager et [à] appuyer le gouvernement du Sénégal dans ses efforts, en vue de préparer un procès rapide et équitable de Hissène Habré, a?n qu'il réponde devant la justice des accusations de violations massives des droits de l'Homme »190(*). A cet effet, une délégation européenne s'est rendue à Dakar l'année suivante. Aux termes de cette visite, celle-ci a fait un rapport, et dans une lettre du 15 mars 2008, elle a « constaté avec satisfaction la détermination du Sénégal à mener à bien ce procès »191(*). Enfin, on peut noter l'élaboration conjointe du budget du procès, par l'UE et par le Gouvernement de la République du Sénégal192(*). Il convient de noter que le 24 novembre 2010, s'est tenue à Dakar la table ronde des bailleurs de fonds pour le financement du procès de Hissène HABRE. Au cours de cette rencontre, l'Union africaine s'est engagée à dégager un million de dollars (près de 500 millions Cfa) ; l'Union européenne s'apprête à donner pour sa part 2 millions d'euros (environ 1 milliard 310 millions Cfa). Le reste du budget sera complété par les engagements unilatéraux d'autres Etats comme la Belgique, le Tchad, la France, l'Allemagne ou les Pays-Bas. S'agissant de l'UA, tout a commencé avec la décision des autorités sénégalaises de soumettre à cette organisation régionale l'affaire Habré. Les négociations avec l'UA ont conduit à l'adoption d'un ensemble de décisions. Outre la mise en place du Comité d'éminents juristes africains et le mandat donné au Sénégal de « poursuivre et de faire juger » Hissène HABRE, la Conférence des chefs d'État et de Gouvernement de l'UA a demandé à tous les États membres de coopérer avec le Gouvernement sénégalais. La Conférence a par ailleurs lancé un appel tant aux États membres qu'aux partenaires internationaux et à la communauté internationale pour la mobilisation de toutes les ressources, notamment financières, utiles à la préparation et au bon déroulement du procès193(*). Le Sénégal a été également invité par l'UA à « s'ouvrir à l'expérience et à la contribution des juridictions et juges du continent en vue de l'organisation du procès »194(*). Après l'analyse des assurances proprio motu du Sénégal dont le caractère convaincant apparaît clairement, il importe d'analyser leur impact tant sur la demande belge que sur le différend principal. Section II : L'impact des assurances sénégalaises sur la demande belge et sur le différend principal Les assurances données par le Sénégal ont eu une influence non négligeable sur l'évolution de l'affaire qui l'oppose à la Belgique. Cette influence est très facile à démontrer. En effet, le but recherché à travers la demande belge, était d'empêcher Hissène HABRE de quitter le Sénégal ; hypothèse qui aurait pour conséquence la perte, par la Belgique, de son droit de poursuivre et juger le mis en cause. Or les assurances sénégalaises ont le mérite de battre en brèche les craintes belges. Ces assurances remettent en cause l'urgence alléguée et donnent un caractère superflu aux mesures conservatoires demandées par la Belgique. Par ailleurs, les assurances données par le Sénégal ont un effet apaisant sur le différend principal opposant les parties en ce qui concerne le respect par le Sénégal de son obligation de poursuivre Hissène HABRE ou de l'extrader vers la Belgique aux fins de poursuites pénales. L'on analysera tout d'abord l'impact des assurances sénégalaises sur la demande belge (§ 1) avant d'examiner cet impact sur le différend principal (§ 2). § 1- L'impact des assurances sur le sort de la demande belge Il s'agit ici de disséquer l'influence des assurances sénégalaises sur la demande belge en indication de mesures conservatoires. Le premier effet ou l'effet indirect de ces assurances a été de rendre discutable l'existence d'une urgence en l'espèce. Pour ce qui est de leur effet direct, elles ont rendu superflues les mesures conservatoires sollicitées par la Belgique. Il importe donc de s'attarder sur la superfluité des mesures conservatoires sollicitées par la Belgique (B) non sans s'être au préalable appesanti sur la remise en cause de l'existence de l'urgence alléguée par la Belgique (A). A. La remise en cause de l'urgence alléguée par la Belgique La Cour a tenu compte des assurances données par le Sénégal pour constater que le risque de préjudice irréparable aux droits revendiqués par la Belgique n'est pas apparent à la date à laquelle son Ordonnance est rendue195(*). Elle en conclut par conséquent qu'il n'existe, dans les circonstances de l'espèce, aucune urgence justifiant l'indication des mesures conservatoires. Il faut relever qu'avant le premier tour d'observations orales du Sénégal, les craintes de la Belgique étaient clairement fondées. En effet, nul ne peut nier que les déclarations médiatiques du président WADE étaient de nature à semer le doute sur l'éventualité du procès Habré au Sénégal. C'est du reste pour cette raison que dès l'ouverture de l'audience consacrée à sa plaidoirie (du 06 avril 2009), l'agent du Sénégal, Cheikh Tidiane THIAM, a reconnu que cette affaire allait donner l'occasion à son pays de faire clairement connaître sa détermination à demeurer un État de droit respectueux du droit international196(*). Tout au long de la phase orale, les représentants du Sénégal ont déclaré à plusieurs reprises que le Sénégal ne permettra pas à Hissène HABRE de quitter son territoire avant que la Cour ait rendu sa décision définitive197(*). Le Sénégal a fait des précisions en ce qui concerne les déclarations de son président. En effet, lorsque l'on prend connaissance de ces déclarations sur toute leur étendue, il est loisible de reconnaître que leur auteur a voulu faire pression notamment sur l'UA et sur les éventuels donateurs. Mais l'on ne peut pas reprocher à la Belgique d'avoir pris ces déclarations pour argent comptant. Car l'essentiel à retenir de celles-ci était la possibilité ouverte que Hissène HABRE quitte le Sénégal. Les interférences politiques198(*) qu'il y a eu auparavant dans la tentative de jugement de Hissène HABRE au Sénégal confortaient en tout cas les inquiétudes de la Belgique. En outre, le Sénégal a prouvé sa détermination à poursuivre et à juger Hissène HABRE, notamment en relevant les réformes normatives et les négociations entreprises avec l'UE et avec l'UA en vue de la mobilisation des ressources financières aux fins de l'organisation du procès. Au vu du caractère convaincant des assurances ainsi faites, on peut convenir avec le défendeur qu'il y a absence de risque de préjudice irréparable justifiant l'indication de mesures conservatoires. Toutefois, il faut préciser que l'urgence alléguée par la demanderesse est considérée comme inexistante dans cette affaire parce que le défendeur a donné des assurances suffisantes. Celles-ci ont rendu inutiles les mesures conservatoires sollicitées par la Belgique. B. La superfluité des mesures conservatoires sollicitées par la Belgique Les assurances données par le Sénégal ont eu un impact considérable sur la demande belge en indication de mesures conservatoires. Il convient de rappeler que cette demande visait plus précisément une mesure conservatoire, à savoir la prise par le Sénégal de toutes les mesures en son pouvoir pour que Hissène HABRE reste sous le contrôle et la surveillance de ses autorités, en attendant que la Cour rende un arrêt définitif dans cette affaire. Or, dans sa plaidoirie, le Sénégal a fait valoir l'effectivité de la surveillance et du contrôle exercés sur l'ex-président tchadien et sur sa famille. Le Sénégal a aussi rassuré la Cour sur le fait que cette surveillance était exercée au quotidien et de manière resserrée. Le défendeur a par ailleurs relevé que les mesures sollicitées par la demanderesse étaient identiques aux mesures déjà prises par lui. Le Sénégal ayant démontré l'absence de son intention de laisser Hissène HABRE quitter son territoire, les mesures conservatoires sollicitées par la Belgique devenaient donc superflues. En effet, la Cour, rappelant les assurances tant proprio motu qu'en réponse au juge Christopher GREENWOOD, a conclu qu'il n'existait, dans les circonstances de l'espèce, aucune urgence justifiant l'indication de mesures conservatoires. Dans leur déclaration commune, les juges KOROMA et YUSUF ont affirmé que les assurances du Sénégal, au cours des audiences, protègent les droits des parties et écartent le risque de préjudice irréparable, exactement de la même façon qu'une Ordonnance indiquant des mesures conservatoires199(*). Ils ajoutent que «the Court should simply have declared that following the declaration by Senegal the request for the indication of provisional measures had ceased to have any object»200(*). Le juge CANÇADO TRINDADE, pour sa part, n'est pas de cet avis. Ce dernier estime que la décision de la Cour de ne pas indiquer des mesures conservatoires peut être sérieusement contestée201(*). Il est cependant difficile de suivre cette opinion dans la mesure où le fait, pour la Belgique, de demander des mesures qui existent déjà au Sénégal, en plus de la volonté affirmée de celui-ci de les maintenir, rend superflue leur indication par la Cour. Mais ce caractère superflu ne concerne évidemment pas la demande en elle-même. Ces assurances sénégalaises sont susceptibles d'influencer le différend principal. § 2 - L'impact des assurances sénégalaises sur le différend principal Les assurances données par le Sénégal dans le cadre de cette procédure incidente sont de nature à influencer le différend principal. De fait, ces assurances font ressortir en substance la reconnaissance par le Sénégal de son obligation de poursuivre Hissène HABRE. Or, faut-il le rappeler, la requête belge vise la reconnaissance par la Cour de l'obligation pour le Sénégal de poursuivre pénalement l'ex-président tchadien, à défaut, de l'extrader. Dès lors, on ne peut nier que le Sénégal, en prenant cette option, a en quelque sorte réduit l'ampleur du différend. Dans son opinion individuelle, le juge ad hoc Serge SUR a d'ailleurs estimé qu'on ne voyait plus en quoi consiste le différend, la Belgique et le Sénégal convenant que la Convention contre la torture impose aux États qui y sont parties d'établir leur compétence pénale et de poursuivre les personnes accusées des incriminations qu'elle prévoit, à défaut de les extrader202(*). Mais on ne saurait prendre le risque de conclure péremptoirement, comme Serge SUR, à la disparition de l'objet du différend203(*). Les questions que soulève cette affaire exigent la prudence. En effet, le but ultime de celle-ci est le jugement de Hissène HABRE, le moyen pour l'atteindre étant de poursuivre ce dernier (au Sénégal) ou de l'extrader vers la Belgique aux fins de poursuites pénales. Or, tout dépendra dorénavant de la bonne foi du Sénégal par rapport aux assurances données. L'essentiel n'est pas de reconnaître son obligation. Bien sûr que le faire c'est déjà une bonne chose, une avancée. Mais l'on attend du titulaire de l'obligation moins des déclarations de bonne foi que des actes concrets (les poursuites). C'est pour cette raison que la position de la Cour sur la question de l'existence prima facie d'un différend entre les parties, doit être saluée. En fait, même si les assurances sénégalaises ont pu atténuer la portée du différend, seul l'engagement des poursuites contre Hissène HABRE ou son extradition pourrait faire disparaître définitivement l'objet du différend. De plus, on doit toujours « distinguer du différend substantiel le différend résultant de la divergence des États sur sa réalité même »204(*). * 155 _ Voir CR 2009/9, p. 46 (SALL). * 156 _ Voir Demande en indication de mesures conservatoires du 19 février 2009, p. 1. * 157 _ Cf. C.I.J., Questions concernant des obligations de poursuivre ou d'extrader, op. cit., p. 14, § 63. * 158 _ HRW est basée à New York. * 159 _ Cf. Human Rights Watch, Le président Wade sème le doute sur la tenue du procès de Hissène HABRE, Communiqué de presse, 21 octobre 2008, http://www.hrw.org/legacy/french/docs/2008/10/21/senega20021.htm (consultée le 17 juillet 2009). * 160 _ Cf. CR 2009/8, p. 33 (DAVID). * 161 _ Ibid. Les italiques ajoutés. * 162 _ Ibid., p. 34. * 163 _ CR 2009/9, p. 47, § 7 (SALL). * 164 _ Idem, § 8 et 9. * 165 _ Idem, § 10. * 166 _ CR 2009/10, p. 15, § 15 (DAVID). * 167 _ CR 2009/9, p. 42, § 10 (DIANKO) * 168 _ Il s'agit d'un permis donné par une autorité d'aller quelque part, d'y séjourner un certain temps et de s'en retourner librement, sans crainte d'être arrêté. CR 2009/9, p. 48, § 14 (SALL) ; CR 2009/11, p. 20, § 17 (SALL). * 169 _ Voir Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri CAPITANT, 8ème éd., PUF, Paris, 2000, p. 286. * 170 _ Pour une connaissance approfondie de ces deux lois, voir spécialement Raphaël TIWANG WATIO, « Réflexions sur les lois du 12 février 2007 portant modification du Code pénal sénégalais et mise en oeuvre du Statut de la cour pénale internationale », African Yearbook of International Law, vol. 15, 2008, pp. 285-302. * 171 _ Cf. CR 2009/8, p. 20 (DAVID). * 172 _ Adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 2391 (XXIII) du 26 novembre 1968, et entrée en vigueur le 11 novembre 1970. * 173 _ Voir Raphaël TIWANG WATIO, op. cit. (supra, note n° 170), p. 285. * 174 _ Cf. CR 2009/9, p. 28, § 39 (KANDJI), Italiques ajoutés. * 175 _ Journal officiel de la République du Sénégal, 8 août 2008, p. 754, http://www.gouv.sn/spip.php?article711 (consulté le 17 septembre 2010). Cf. également CR 2009/8, p. 20 (DAVID). * 176 _ Les dispositions antérieures de l'article 9 se lisent comme suit : « Toute atteinte aux libertés et toute entrave volontaire à l'exercice d'une liberté sont punies par la loi. Nul ne peut être condamné si ce n'est en vertu d'une loi entrée en vigueur avant l'acte commis. La défense est un droit absolu dans tous les états et à tous les degrés de la procédure ». * 177 _ Cf. Groupe d'action judiciaire (GAJ) de la FIDH, op. cit. (supra, note n° 8), p. 42. * 178 _ Raphaël TIWANG WATIO, op. cit. (supra, note n° 170), p. 287. * 179 _ Ibid. * 180 _ Ratification faite par la loi sénégalaise n° 86-26 du 16 juin 1986 publiée au Journal officiel de la République du Sénégal du 8 août 1986. * 181 _ Damien VANDERMEERSCH, op. cit. (supra, note n° 21), p. 467. L'auteur note que pour assurer la transposition en droit interne des obligations contractées sur le plan international, le législateur national a une double possibilité : soit il élabore, à la suite de chaque ratification d'une Convention créant un ou plusieurs nouveaux chefs de compétence, une législation spécifique de mise en oeuvre (adaptation par incorporation) ; soit il se dote d'une norme générale relative à la mise en oeuvre de telles obligations (adaptation par renvoi). La Belgique d'abord et le Sénégal par la suite semblent avoir opté pour la seconde possibilité. Ainsi, par la Loi du 18 juillet 2001 portant modification de l'article 12 bis de la Loi du 17 avril 1878 contenant le Titre préliminaire du Code de procédure pénale (CPP), la Belgique s'est dotée d'une disposition générale : « Les juridictions belges sont compétentes pour connaître des infractions commises hors du territoire du Royaume et visées par une Convention internationale liant la Belgique, lorsque cette Convention lui impose, de quelque manière que ce soit, de soumettre l'affaire à ses autorités compétentes pour l'exercice des poursuites » (Idem). Le Sénégal a fait pareil à travers l'article 669 nouveau de son CPP précité. * 182 _ Michel VIRALLY, « Sur un pont aux ânes : les rapports entre droit international et droits internes », in : Mélanges offerts à Henri ROLIN, Pedone, Paris, 1964, p. 498 [Cité par Alain PELLET, op. cit., (supra, note n° 3), p. 176]. * 183 _ John DUGARD, «The role of human rights treaty - Standards in domestic law : the southern African experience», in : Philip ALSton and J. CRAWFORD eds., The future of human rights treaty monitoring, 2000, p. 286 [Cité par Alain PELLET, op. cit., (supra, note n° 3), pp. 176-177]. * 184 _ Voir Nguyen QUOC DINH et Alii, op. cit., (supra, note n° 63), p. 84. * 185 _ L'article 97 prévoit que : « Si le Conseil constitutionnel a déclaré qu'un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution, l'autorisation de le ratifier ou de l'approuver ne peut intervenir qu'après la révision de la Constitution ». L'article 98 se lit comme suit : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie ». * 186 _ Cf. infra, Troisième partie, chapitre 2, Section, para. 1, A. * 187 _ Amnesty international, Sénégal, terre d'impunité, op. cit., (supra, note n° 2), p. 25. Il ressort de ce rapport que le 14 mai 2010 la Cour de justice de la CEDEAO a déclaré recevable la plainte de Hissène HABRE contre l'État du Sénégal et doit maintenant prononcer un jugement sur le fond. * 188 _ CR 2009/9, pp. 28-29, § 43 (KANDJI). * 189 _ Cf. http://hrw.org/french/docs/2006/03/16/chad13077.htm (consultée le 17 juillet 2009). * 190 _ Cf. Groupe d'action judiciaire (GAJ) de la FIDH, op. cit. (supra, note n° 8), p. 38. Les italiques ajoutés. * 191 _ Cf. CR 2009/9, p. 48 (SALL). * 192 _ Décision n° 4 Assembly/AU/Dec.246(XIII), du 3 juillet 2009, portant sur le cas Hissène HABRE, § 3, http://www.africa-union.org/root/AU/Conferences/2009/july/summit/docs/DECISIONS/ASSEMBLY%20AU%20DEC%20243%20-%20267%20(XIII)%20_F.pdf (consultée le 23 juillet 2009). Cette décision a été prise lors de la treizième session ordinaire de la Conférence des chefs d'Etat et de Gouvernement de l'UA, tenue du 1er au 3 juillet 2009 à Syrte (Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste). * 193 _ Voir notamment Décision n° 24 Assembly/AU/Dec.157 (VIII), du 30 janvier 2007, portant sur le procès de Monsieur Hissène HABRE et l'Union africaine, http://www.africa-union.org/root/ua/Conferences/2007/janvier/SUMMIT/Doc/Decisions/D%C3%A9cisions%20-%208%C3%A8me%20session%20ordinaire%20de%20la%20Conf%C3%A9rence.doc (consultée le 23 juillet 2009). * 194 _ Ibid. * 195 _ C.I.J., Questions concernant l'obligation de poursuivre ou d'extrader, op. cit., p. 16, § 72. * 196 _ Voir CR 2009/9, pp. 8-9 (THIAM). * 197 _ Voir CR 2009/9, p. 21, § 57 (THIAM) ; CR 2009/9, p. 42, § 10 (DIANKO) ; CR 2009/9, p. 54, § 11-12 (GAYE) ; CR 2009/11, pp. 19-20, § 17 (SALL). * 198 _ A propos des interférences politiques exercées dans la première tentative de jugement de Hissène HABRE au Sénégal, voir Reed BRODY, op. cit. (supra, note n° 7), pp. 315-317. Cet auteur note par exemple que, « bien que l'élection de Wade marquât le renouveau de la démocratie sénégalaise, elle eut immédiatement des effets négatifs sur l'affaire Habré, notamment parce que l'avocat de Habré, Madické Niang, était l'un des proches conseillers de Wade. Une fois au pouvoir, Wade nomma Niang au poste de conseiller spécial aux affaires légales, tout en le laissant continuer d'exercer son métier d'avocat et d'assurer la défense de [Hissène HABRE] », p. 315 (les italiques ajoutés). Le 25 mai, ajoute Reed BRODY, le Conseil de l'ordre des avocats du Sénégal décida que tant qu'il demeurait au service de Wade, Niang ne pouvait pas exercer devant une cour de justice. Le président Wade réassigna rapidement Niang à un poste rémunéré de consultant juridique, manoeuvre tactique visant à permettre à Niang de travailler pour le gouvernement, tout en continuant de représenter Hissène HABRE et d'autres clients privés. Le 30 juin 2000, relève encore cet auteur, le Conseil supérieur de la Magistrature, présidé par le chef d'État sénégalais et son Ministre de la Justice, décida de muter le juge d'instruction Demba Kandji de son poste de juge d'instruction en chef du Tribunal régional de Dakar à un poste d'assistant du procureur à la Cour d'appel de Dakar. En conséquence, le juge Kandji dut abandonner l'instruction de l'affaire Habré. Ce transfert constitue sans aucun doute une sanction à l'encontre du Juge Kandji pour la hardiesse avec laquelle il traitait l'affaire. Voir également Abdoullah CISSE, op. cit. (supra, note n° 7), pp. 251-252. Cet auteur relève la promotion du président de la chambre d'accusation Cheikh Tidiane DIAKHATE au Conseil d'État (pendant que l'affaire était en cours de délibéré) comme étant l'un des aspects de ce qu'il a qualifié comme étant « le poids du politique ». Voir aussi le Groupe d'action judiciaire de la FIDH (GAJ), op. cit. (supra, note n° 8), pp. 15-43. * 199 _ Déc. com. KOROMA et YUSUF, p. 3, § 10. * 200 _ Ibid. * 201 _ Op. diss. CANÇADO TRINDADE, p. 20, § 78. * 202 _ Op. ind. SUR, p. 6, § 15. * 203 _ Ibid., pp. 5-6, §§ 13-15. * 204 _ Voir Jean COMBACAU et Serge SUR, op. cit. (supra, note n° 79), 559. |
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