REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier mes camarades de classe, en
particulier NDOUMBE FASANI, MAY KA, ADIA, CLAUDE SANE,
FRANCOIS DIATTA, BENEDICTA, GORA DIOP, DIEYNABA, GERMAIN
BIAGUI, JOEL BAPISSEN ...etc., à la famille
THIAW notamment CLARISSE, ALPHONSE,
BARTHELEMY, BEROU....etc.
Mention spéciale à BRUNO FAYE,
PIERRE FAYE, MATY FAYE , JEAN DIENG, GUY SENE, PHILIP MBAYE, THERESE
NDIONE, VIKY AMOR, ANNA DIONE, MARY HERVE, à
ma tutrice THERESE , à
la famille BASSE (mes
voisins de chambre), sans oublier la famille LOPEZ,
à MICHEL BOP, à mes amis du
groupe « jeunesse entente » et
à l'association des élèves et étudiants
de Térokh yendane (AEETY) dont je suis le
Président, à l'ensemble des enseignants de
l'école Saint Martin de yendane qui ont beaucoup
contribué à mon éducation, ainsi que tous mes
frères et soeurs qui, de prés ou de loin ont contribué
à la réalisation de ce modeste travail.
Mes sincères remerciements au
corps professoral de l'UFR des Sciences Juridiques et Politiques de
l'UGB, plus particulièrement ADRIEN DIOH
qui n'a ménagé aucun effort dans la réalisation
de ce modeste travail. Grâce à votre disponibilité et
à votre ouverture d'esprit, vous avez su marquer du sceau de la rigueur
intellectuelle, cette oeuvre scientifique. Veuillez recevoir ici toute ma
gratitude et ma reconnaissance.
DEDICACES
Nous dédions ce modeste travail à mon
père MAGATTE THIAW que Dieu dans son amour a
rappelé auprès de Lui, à mon frère
CLEMENT NGAGNE THIAW arraché à notre
affection le 1er SEPTEMBRE 2008, « que Dieu vous accueille
dans son paradis céleste », à ma cousine
TEISSI ELIZA DENISE LOPEZ rappelée à
dieu le 19 juillet 2008 « que la terre lui soit
légère » AMEN
Nous le dédions aussi :
Ø A mon père MICHEL
pour tout ce qu'il a fait pour moi, lui qui a assuré mon
éducation scolaire ;
Ø A ma maman HELENE DIONE,
qui m'a donné la vie, assuré mon éducation morale et
religieuse de base.
Ø A GENOU, EMMANUEL, BERTHE,
MADOU...etc.
Ø A ma famille de Mboro : ALOYSE
THIAW, à ma tante MARY
DIONE, à mes frères et soeurs CELESTIN,
OLIVIER VINCENT, HENRY, ROSA, RENEE, MAREME FALL
Ø A tous mes frères et soeurs qui m'ont
beaucoup encouragé et conseillé.
ABREVIATIONS
ART : article
C.C.N : clause de non-concurrence
C.trav : code du travail
C. cass : cour de cassation
C. com. : code du commerce
C. civ : code civil
J.C.P : juris-classeur périodique
Bull. CIV : bulletin civil
D. : Dalloz
Sommaire
CHAPITRE1 : la licéité des clauses de
non-concurrence
SECTION1: les conditions de validité des clauses
de non-concurrence
PARAGRAPHE1 : les conditions légales de
validité des clauses de non-concurrence
A : une limitation de la clause dans le temps
et dans l'espace
B :
interdiction portant sur une activité de nature
concurrentielle
Paragraphe2 : les conditions
jurisprudentielles de validité des clauses de non-
Concurrence
A : intérêt légitime
de l'employeur, cause de l'obligation de non-concurrence du
salarié
B : la licéité des clauses
sans contrepartie pécuniaire
SECTION 2 : le sort des clauses de non-concurrence
irrégulières
PARAGRAPHE1: la nullité relative des clauses
irrégulières
A : différentes limites à
l'annulation des clauses irrégulières
B : Les effets de l'annulation des clauses
irrégulières
PARAGRAPHE : la possibilité d'une
révision judiciaire des clauses excessives
A : la condition
indifférente : la cause de
l'irrégularité
B : la condition nécessaire :
la violation par le salarié de l'obligation de
non-concurrence
CHAPITRE2 : La mise en oeuvre de la clause de non-
Concurrence
Section1 : La portée de l'obligation de
non-concurrence
Paragraphe1 :
obligation générale de non-concurrence pendant la
durée du contrat de travail
A : une interdiction de concurrence par
obligation d'exclusivité
B : une interdiction de concurrence
assortie d'aménagements
Paragraphe2 :
la liberté de la concurrence à l'expiration du contrat de
travail sous réserve d'exception
A : la nullité de plein droit des
clauses interdisant l'exercice d'activité concurrentielle à
l'expiration du contrat de travail
B : la validité exceptionnelle des
clauses interdisant l'exercice d'activité
concurrentielle
Section2 : Les sanctions de la violation des
clauses de non- Concurrence
Paragraphe1 : les sanctions encourues par le
salarié
A : la condamnation du salarié au
paiement de dommages-intérêts
B : la suppression du droit à
l'indemnité
Paragraphe2 : les sanctions encourues par le
nouvel employeur
A : l'engagement de la
responsabilité du nouvel employeur pour concurrence
déloyale
B : condamnation in solidum au paiement de
dommages-intérêts
Conclusion
INTRODUCTION GENERALE
Pendant longtemps, le Droit du Travail a été
présenté, analysé et enseigné comme étant un
droit protecteur. C'est en effet un droit partisan parce que l'essentiel de
ses règles sont orientées vers la protection des salariés
qui sont réputés faibles. Ainsi, le contrat de travail est un
contrat de dépendance par excellence. Le salarié a accepté
à l'avance de se placer sous les ordres de son employeur, et ce dernier
détient es qualité, une panoplie de prérogatives qui lui
permettent de faire fonctionner son entreprise. C'est donc dire que les
rapports de travail sont par essence inégalitaires, c'est ce qui
justifie dans une certaine mesure l'orientation protectrice du Droit du
Travail, dans un souci de rééquilibrer les rapports de travail.
Mais depuis quelques années, il s'est
développé une théorie que l'on appelle la
Flexibilité de l'Emploi qui est venu refouler
l'orientation partisane du Droit du Travail. Le postulat de cette
théorie est empreint d'une certaine évidence. C'est l'entreprise
qui génère l'emploi. Il n'ya pas d'emploi sans entreprise. Par
conséquent, tout ce qui affecte celle-ci rejaillit nécessairement
sur celui-là. Dés lors, il ya lieu de protéger
l'entreprise dans un environnement mondialisé, à rude
concurrence.
En effet, le principe de la liberté du travail et
notamment celle de choisir son activité, tout comme celui de la
liberté du commerce et de l'industrie, trouvent leur origine dans
l'article7 du Décret d'Allarde des 2 et 17 mars 1791. En principe, un
salarié qui quitte son emploi peut se réembaucher librement dans
une entreprise, fut-elle concurrente de la première, ou exercer pour son
propre compte une activité concurrente de celle de son ancien employeur.
Dans certains cas, d'ailleurs, la qualification professionnelle du
salarié ne lui ouvre guère d'autres choix. En soi, l'acte
concurrentiel du salarié ne peut donc être critiqué. Bien
mieux, il s'inscrit dans les Principes Généraux du Droit
commercial qui tendent à promouvoir la concurrence et s'attachent
à en interdire les pratiques restrictives.
Certes, cette concurrence ne doit pas être
déloyale et s'accompagner, par exemple, de détournement de la
clientèle ou de révélation de secrets touchant l'ancien
employeur. Ainsi, il est clair qu'un salarié, après avoir
travaillé plusieurs années dans une entreprise est susceptible
d'en connaitre quelques secrets : procédés de fabrication,
technique de financement ou de commercialisation, projets industriels ou
commerciaux,...etc.
Pour se prémunir contre la concurrence susceptible
d'être faite par le travailleur à son entreprise, l'employeur
exige parfois que ce dernier s'engage, à n'exercer aucune
activité professionnelle soit pour son compte, soit au service d'une
autre entreprise en insérant souvent dans le contrat de travail qu'il
soumet à la signature du salarié une clause de non-concurrence.
C'est donc pour parer aux conséquences préjudiciables de la
concurrence d'un ancien salarié que les employeurs ont pris l'habitude
de prévoir dans les contrats de travail une telle clause.
Inspirée du droit commercial la clause de non-concurrence a
été purement et simplement transposée en droit du
travail.
Réfléchir sur la clause de non-concurrence en
droit du travail sénégalais, tel que le présent sujet se
propose de le faire, implique avant toute chose que les termes de notre
thème de réflexion soient clarifiés.
A ce propos, la clause de non-concurrence peut être
définie comme « une clause d'un contrat par laquelle
l'une des parties s'interdit d'exercer dans certaines limites de temps et de
lieu, une activité professionnelle déterminée susceptible
de faire concurrence à l'autre partie. »1(*)
Ayant pour objet d'interdire au salarié d'exercer une
activité professionnelle concurrente, à son profit ou pour le
compte d'un tiers après la rupture du contrat de travail, la clause de
non-concurrence ne doit pas être confondue avec la clause
d'exclusivité et l'obligation générale de loyauté
qui regroupe les obligations de fidélité, de direction et de
réserve et l'interdiction des actes de corruption qui reçoivent
application pendant l'exécution du contrat de travail et non
après sa rupture.
L'intérêt essentiel de cette distinction concerne
la perspective dans laquelle la validité des conventions restrictives de
concurrence est appréciée. Lorsqu'on est en présence d'une
convention qui interdit l'exercice d'une activité et qui donne naissance
à une obligation de non-concurrence, sa validité est d'abord
subordonnée à la condition que ne soit pas porté une
atteinte trop grave à la liberté économique individuelle
de la personne qui y est assujettie. En revanche, la validité des
conventions qui interdisent seulement quelques modalités dans l'exercice
d'une activité s'apprécie différemment car, dans ce cas,
la liberté économique individuelle est rarement en jeu. C'est
alors surtout par rapport aux règles qui tendent à ce que la
concurrence soit effective, par rapport à la liberté du
marché, que doit être envisagée la validité de ces
conventions.
A cet effet, l'obligation d'exclusivité est une
obligation par laquelle l'une des parties à un contrat(ou les deux)
s'engage à ne pas conclure d'autres conventions identiques avec un
tiers. Contrairement à l'obligation de non-concurrence qui
s'analyse en une pure et simple obligation de ne pas faire, l'obligation
d'exclusivité engendre en même temps une obligation de faire
(contracter avec le créancier de l'exclusivité) et une obligation
de ne pas faire (ne pas contracter avec les concurrents du créancier de
l'exclusivité).
Bien que réalisant une limitation de la concurrence par
son caractère négatif, l'accent est généralement
mis sur l'aspect positif de l'obligation d'exclusivité ;
c'est-à-dire l'intensification des relations contractuelles entre le
créancier et le débiteur de l'exclusivité.
Concernant l'obligation de discrétion ou de
confidentialité, il faut dire que l'exécution de certaines
conventions conduit à ce que l'un des contractants ait connaissance des
secrets d'affaires de l'entreprise. Dans ces circonstances une
nécessaire protection de l'entreprise a suscité des dispositions
légales ou réglementaires qui mettent à la charge de
certains contractants une obligation de non divulgation souvent
qualifiée d'obligation de discrétion ou de
confidentialité.
Obligation de confidentialité et obligation de
non-concurrence concourent toutes deux au maintien des situations acquises,
à la préservation des avantages obtenus dans la lutte
concurrentielle mais leur objet et leur efficacité différent
profondément. L'obligation de confidentialité n'oblige
qu'à la non-divulgation mais son débiteur conserve la
liberté d'exercer une activité en concurrence avec le
créancier de l'obligation de confidentialité, activité
redoutée car elle sera souvent l'occasion de la divulgation ou de la
mise en oeuvre des connaissances qui sont l'objet de l'obligation de
confidentialité.
En revanche, l'obligation de non-concurrence a une
finalité plus large puisqu'elle implique non seulement une
non-divulgation mais également l'interdiction de mettre en oeuvre ces
connaissances dans le cadre d'une activité concurrentielle.
A cet égard, étudier la clause de
non-concurrence en droit du travail sénégalais est important
à plusieurs égards. Les problèmes posés par les
clauses de non-concurrence sont devenus très classiques. Si la
validité de ce type de clause ne fait plus de doute au regard du
principe de la liberté contractuelle, la nécessité de
préserver une autre liberté, celle d'entreprendre, s'est fait
très vite sentir. Les juges ont donc construit, au fil des
années, le régime de la clause de non-concurrence à l'aune
de cet objectif de conciliation entre ces deux libertés.
Ainsi, ces clauses portent alors atteinte à deux
principes fondamentaux de notre droit: la libre concurrence et
la liberté du travail. Tout homme étant libre
d'exercer l'activité professionnelle de son choix, les clauses qui
portent atteinte à cette liberté devraient en principe être
déclarées illicites. De la même façon, tout homme
étant libre de faire concurrence aux entrepreneurs déjà
établis, les clauses limitant cette liberté ne peuvent produire
leurs effets que dans des conditions très particulières.
Bien que la clause de non-concurrence heurte, en la
matière, un principe de valeur constitutionnelle (la liberté
du travail), sa validité n'a jamais été mise en
cause. Le législateur sénégalais, tout en affirmant la
licéité de cette restriction à la liberté du
travail, s'est contenté d'en poser les limites : « un
compromis va nécessairement s'établir entre le droit que
possède toute personne de gagner sa vie par son travail (liberté
du travail) et l'intérêt de l'entreprise à conserver
certains secrets et à retenir sa clientèle ».
L'équilibre qui doit être trouvé et
respecté dans toute clause de non-concurrence entre
l'intérêt du créancier de non-concurrence et la sauvegarde
de la liberté d'entreprendre du débiteur de non-concurrence, est
incontestablement plus difficile à maintenir s'agissant des rapports
d'un employeur et de son ancien salarié.
Ainsi, il convient de se poser la question de savoir
comment la clause de non-concurrence est-elle encadrée par le droit du
travail sénégalais ?
A coté de la loi et de la jurisprudence, le contrat
vient souvent limiter la liberté de la concurrence afin d'assurer la
protection de l'entreprise. Les restrictions ainsi apportées à
la liberté de la concurrence s'observent dans des clauses
insérées dans de nombreuses conventions qui relèvent
notamment du droit du travail. En outre, la nature de certains contrats est
analysée comme emportant de plein droit l'obligation pour l'une des
parties de s'abstenir d'une certaine forme ou de toute concurrence à
l'encontre d'un partenaire contractuel actuel ou passé.
Dans ces diverses hypothèses, on se trouve en
présence d'une obligation de non-concurrence, obligation dont
l'étude est l'objet du présent sujet et qui constitue une
limitation apportée à la liberté de la
concurrence puisque une convention oblige l'une des parties à la
non-concurrence envers l'autre.
Par son appellation même, l'obligation de
non-concurrence apparait comme une obligation de ne pas faire, comme imposant
à son débiteur une abstention de concurrence. Plus
précisément, l'obligation de non-concurrence interdit à
une personne (le débiteur de non-concurrence) d'exercer une
activité économique ou professionnelle déterminée
en concurrence avec celle développée par une autre personne (le
créancier de non-concurrence).
L'étude de l'obligation de non-concurrence en droit du
travail sénégalais fait apparaitre deux pôles
d'intérêt : le droit des personnes dans ce
qu'il a de plus fondamental et le droit des biens dans ce
qu'il a de plus novateur se rejoignent dans la notion d'obligation de
non-concurrence. Au regard de la personne, l'obligation de non-concurrence a
pour effet essentiel de porter atteinte à ces libertés
primordiales que sont la liberté du travail et la liberté
du commerce et de l'industrie et ainsi de venir limiter gravement le potentiel
d'activité du débiteur de non-concurrence.
En effet, la fonction de l'obligation de non-concurrence, qui
consiste à protéger directement ou indirectement l'employeur
contre la concurrence dangereuse ou anormale que pourrait développer le
débiteur de non-concurrence, rattache cette obligation au droit des
biens en ce qu'elle s'avère indispensable à la valorisation
de l'activité humaine à travers la notion de
clientèle. 2(*)
Le développement de l'obligation de non-concurrence est
en effet étroitement lié au mouvement qui tend à
considérer les clientèles professionnelles comme des biens et qui
constitue l'un des traits marquants de la transformation du patrimoine
moderne3(*).
En définitive, l'obligation de non-concurrence se situe
ainsi au carrefour du patrimonial et de
l'extrapatrimonial.
C'est d'ailleurs sous ces divers angles que l'intervention du
législateur sénégalais s'est surtout manifestée
dans le domaine de l'obligation de non-concurrence dans la mesure où la
question s'est posée de savoir si une telle obligation était
licite.
A cet égard, aux termes de l'art L 35 du code du
travail sénégalais, un certain nombre de conditions doivent
être respectées afin que soit valable et efficace la clause de
non-concurrence venant établir un engagement de non-concurrence de
l'ancien salarié. Les clauses de non-concurrence suscitent donc un
double problème de licéité et de mise en oeuvre. Eu
égard à ces considérations, on examinera d'une part, la
licéité des clauses de non-concurrence (chapitre1)
et d'autre part, la mise en oeuvre des clauses de
non-concurrence (chapitre 2).
CHAPITRE PREMIER: LA LICEITE DES CLAUSES DE
NON-CONCURRENCE
L'existence des clauses de non-concurrence
insérées dans les contrats de travail nourrit de nos jours un
contentieux fleuve. Le salarié s'interdit d'exercer, dans certaines
limites de temps et de lieu, une activité professionnelle
déterminée, pour son compte ou pour le compte d'un tiers,
susceptible de faire concurrence à son employeur.
En effet, la clause de non-concurrence est
particulièrement redoutable en période de crise de l'emploi,
puisqu'elle réduit les chances de retrouver un emploi dans le même
secteur d'activité, au-delà de la concurrence déloyale. Du
coté de l'entreprise, elle est souvent une nécessité,
compte tenu du savoir faire acquis, face à une concurrence vive.
Ainsi, la clause de non concurrence semble difficilement
compatible avec le respect de la liberté du travail. L'existence donc
de ce principe fondamental de la liberté du travail et de cela de la
libre concurrence ne fait pas complètement échec à la
licéité des clauses de non-concurrence.
Aussi, le législateur sénégalais
face à ces deux intérêts contradictoires a-t-il
tenté de les concilier en assujettissant la validité ou
plutôt l'efficacité des clauses de non-concurrence à des
conditions (section1), et dont le non respect à des
impacts sur le sort des clauses de non concurrence irrégulières.
(section2)
Section1 : les conditions de validité des
clauses de non concurrence
En droit du travail sénégalais, le
législateur a affirmé la licéité des clauses de non
concurrence insérées dans les contrats de travail. Ainsi pour
être valable, une clause de non-concurrence doit se conformer aux
conditions de validité dégagées par le législateur
(parag1), sans pour autant ignorer les conditions
jurisprudentielles de validité (parag2).
Paragraphe 1 : les conditions légales de
validité des clauses de non concurrence
Aux termes des dispositions de l'article L35 du code du
travail sénégalais, une clause de non-concurrence, pour
être valable, doit être limitée dans le temps et dans
l'espace(A), et laisser au salarié la
possibilité d'exercer normalement l'activité qui lui est propre
c'est-à-dire que l'interdiction ne peut porter que sur une
activité de nature à concurrencer l'employeur
(B).
A : une limitation de la clause dans le temps et dans
l'espace
« La liberté de faire le commerce ou
d'exercer une industrie ne peut être restreinte par des conventions
particulières que si ces conventions n'impliquent pas une interdiction
générale et absolue, c'est-à-dire illimitée tout
à la fois quant au temps et au lieu... ».
Le principe de limitation des clauses de non-concurrence ainsi
formulé en 1900,4(*)
a, depuis, été maintenu, tout en étant
précisé et affiné. En s'inspirant de cette jurisprudence
dégagée, les législateurs africains ont pendant
longtemps affirmé que pour être valable, la clause de
non-concurrence doit être limitée dans le temps et dans
l'espace.
Cette limitation de la clause dans le temps et dans l'espace a
connu une évolution en droit du travail sénégalais. En
effet, l'ancien code du travail prévoyait
que l'interdiction de concurrence ne pouvait dépasser deux ans et ne
pouvait s'appliquer que dans un rayon de deux cent kilomètres autour du
lieu de travail.5(*)
Cependant, avec l'entrée en vigueur du nouveau code du
travail, le législateur sénégalais, à travers les
dispositions de l'article L35 al3 dispose
que : « l'interdiction de non-concurrence ne peut
dépasser un an et ne peut s'appliquer que dans un rayon de 50
kilomètres autour du lieu de travail. » 6(*)
A cet effet, il y'a lieu de reconnaitre que la
réduction du temps et du lieu au-delà desquels il est interdit
au salarié d'exercer une activité concurrentielle, tend à
protéger la liberté du travail de ce dernier. Autrement dit, le
nouveau code du travail améliore la situation des travailleurs soumis
à la clause de non-concurrence, laquelle est limitée dans
l'espace à 50 kilomètres et dans le temps à 1 an.
L'intention du législateur semble être ici de concilier les
intérêts contradictoires du salarié et de l'employeur.
La limitation de la clause dans le temps et dans
l'espace varie en effet d'une législation à une autre. En guise
d'exemple, on peut noter que le législateur gabonais dispose en
matière de clause de non concurrence que : «
l'interdiction de concurrence ne peut dépasser trois mois et ne peut
s'appliquer que dans un rayon de cent kilomètres. »
Il va s'en dire que la limitation légale de la clause
de non concurrence au Gabon (3mois) prive pratiquement celle-ci de toute
utilité.
La clause de non-concurrence, limitée à un an,
ce délai doit certainement courir à compter du jour de la rupture
du contrat et du départ effectif du salarié de l'entreprise.
Ceci étant, la limitation temporelle vise à fixer la
période pendant laquelle le salarié ne pourra avoir
d'activité concurrente, tandis que celle dans l'espace a vocation
à déterminer la zone territoriale où toute activité
concurrente est interdite. Le champ géographique peut donc se limiter
à la commune, au département, à la région en
fonction du rayon d'activité de l'entreprise. Attention, elle ne peut
avoir pour effet d'empêcher le salarié de retrouver une
activité professionnelle.
En effet, la cour de cassation française dans un
arrêt du 26 MARS 1928 a toujours jugé que :
« l'obligation de non concurrence ne pouvait pas avoir une
portée générale et absolue : elle ne pouvait pas
être à la fois illimitée dans le temps et dans
l'espace »7(*). Elle précise à cet effet, qu'il
convient d'assimiler à une clause illimitée dans le temps et dans
l'espace, « la clause d'une durée limitée
lorsque le contrat prévoit que l'employeur peut unilatéralement
prolonger la durée prévue dans le contrat ». La
limitation dans le temps et dans l'espace doit présenter une certaine
fixité. L'employeur ne peut se réserver la possibilité
d'étendre à son gré la portée de la clause de
non-concurrence dans le temps et dans l'espace.
De ce qui précède, il convient de retenir
qu'une clause de non-concurrence qui ne fixerait donc pas de durée
à l'interdiction de concurrence établie, serait entachée
d'irrégularité.
Un engagement restrictif de concurrence doit résulter
de la clause, non une suppression définitive de la liberté de
travail du salarié, débiteur de non-concurrence. L'engagement
restrictif de concurrence doit être temporaire. Aussi une clause dont le
libellé ne permet pas de délimiter la zone géographique
à l'intérieur de laquelle l'engagement restrictif de concurrence
joue, ne peut être tenue pour valable. Elle établit une
interdiction générale que rien ne justifie au regard de la
liberté d'entreprise du salarié.
Par ailleurs, en droit du travail, de nombreuses conventions
collectives contiennent des clauses déterminant quelle peut être
la durée maximale d'une obligation de non concurrence. La plupart de ces
conventions fixent cette durée à une année. De ce fait,
lorsqu'une de ces conventions collectives est applicable, les cocontractants
peuvent évidemment conclure une clause de non-concurrence d'une
durée plus courte que celle fixée par la convention.
En revanche, s'ils insèrent dans le contrat de travail
une obligation de non-concurrence qui dépasse la durée maximale
conventionnelle, les dispositions de la convention collective seront
substituées à celles du contrat individuel de travail. Dans
toutes les entreprises qui entrent dans le champ d'application de telles
conventions collectives, les cocontractants sont liés par ces
dispositions.
La limitation de l'obligation de non-concurrence dans
l'espace est envisagée plus rarement par les conventions collectives.
Certaines précisent cependant que l'interdiction de travail concernera
« une zone territoriale limitée avec précision par
référence à la zone géographique dans laquelle
s'exerçait l'activité de
l'intéressé ». Dans tous les cas où une
convention collective ou un accord collectif ne détermine pas quelles
sont les limites de durée et d'espace de l'obligation de non
concurrence, il appartient au juge, en l'absence de tout texte
législatif ou réglementaire, de faire la distinction entre les
clauses licites et illicites. La législation sénégalaise
en droit du travail ne donne pas au juge cette opportunité dans la
mesure où de telles limites ont été prévues dans le
code du travail.
Aussi, la durée et le champ d'application
géographique d'une clause de non concurrence ne sont-ils pas, à
eux seuls, des critères déterminants pour apprécier la
licéité de celle-ci, lorsqu'un texte conventionnel n'impose pas
de règle précise à ce sujet. Certes, une obligation de
non-concurrence portant sur une activité déterminée sera
déclarée illicite si elle est illimitée dans le temps et
dans l'espace. En outre, si on s'en tient à la lettre du texte de
l'article L 35 du code du travail sénégalais, la
limitation de la clause dans le temps et dans l'espace est exigée
conjointement et non alternativement.
Mais, une obligation de non-concurrence peut être
déclarée licite, alors même qu'elle a un champ
d'application très étendu, si elle n'interdit pas au
salarié d'exercer une activité professionnelle correspondant
à sa formation. En revanche, une interdiction de faire concurrence
limitée à 1an peut être annulée au motif que son
application sur l'ensemble du territoire sénégalais oblige un
salarié à s'expatrier pour retrouver un emploi conforme à
sa formation et aux connaissances qu'il a acquises.
En référence à la jurisprudence
française sur la question, on note que certaines décisions ont
annoncé une évolution en se montrant plus respectueuse de la
liberté du travail. Selon ces décisions, une clause de
non-concurrence doit être géographiquement restreinte aux lieux
dans lesquels le salarié peut faire une concurrence réelle
à l'employeur étant donné la nature de l'entreprise et
son rayon d'action, et la zone prohibée doit être d'autant plus
limitée que l'interdiction atteint avec plus de rigueur le
salarié dans l'activité spécifique qui est la sienne.
La jurisprudence sénégalaise, quant à
elle, considère que, « même si l'activité du
travailleur s'exerce en grande partie en dehors du lieu de son affectation
principale, l'application territoriale de la clause de non-concurrence doit
être limitée à un rayon de 200 kilomètres autour du
lieu d'affectation principale »8(*).
Le caractère limité de l'engagement de
non-concurrence, nécessaire à sa validité,
s'apprécie aussi au niveau de l'activité prohibée.
L'interdiction de non-concurrence ne peut alors porter que sur une
activité de nature à concurrencer l'employeur.
(B)
B : une interdiction portant sur une activité
de nature concurrentielle
Le droit du travail ne saurait rester une notion purement
abstraite, ce n'est jamais à un travailleur non spécialisé
qu'on impose une clause de non-concurrence. Le souci légitime de
l'employeur est de se garantir contre le passage au service d'un concurrent
d'un salarié qui, soit en raison de la technicité qu'il a acquise
ou confirmée, soit en raison de ses rapports qu'il a établis avec
la clientèle, représente une
certaine « valeur ».
Ainsi, le législateur sénégalais, aux
termes de l'article L 35
dispose : « l'interdiction ne peut porter que sur une
activité de nature à concurrencer l'employeur. »
Autrement dit, pour être valable, la clause de non-concurrence doit
avoir pour objet d'interdire au salarié d'exercer une activité
qui pourrait directement ou indirectement concurrencer son employeur.
L'interdiction de concurrence peut concerner donc aussi bien
l'établissement du salarié dans une activité
concurrentielle pour son propre compte que l'embauchage au service d'une
entreprise concurrente.
En droit du travail sénégalais, il y'a lieu de
noter que la clause de non-concurrence, insérée dans un contrat
de travail a un effet limité dans la mesure où le salarié,
à la fin du contrat de travail, peut directement sous réserve de
quelques exceptions concurrencer son ancien employeur. A cet égard, en
l'absence d'une activité de nature concurrentielle susceptible
d'être exercée par le salarié, la clause non-concurrence ne
pourrait pas s'imposer à ce dernier même si la rupture
résulte de son initiative ou d'une faute lourde qui lui est imputable.
La définition de l'activité commerciale est,
sans aucun doute, celle retenue par le droit commercial c'est-à-dire
celle qui s'adresse à la même clientèle pour lui offrir les
mêmes services ou les mêmes biens.
L'expression même d'obligation de non-concurrence
indique la nature de la prestation due par le débiteur de
non-concurrence. Ce dernier est tenu d'une obligation de ne pas faire, de
l'obligation de s'abstenir de concurrencer le créancier de non
concurrence.
Il ne suffit pas cependant de dire que le débiteur
doit une abstention de concurrence. On doit chercher quel est le contenu exact
de cette prestation de non-concurrence.
L'activité interdite au débiteur de
non-concurrence ne l'étant pas en raison du caractère
déloyal qu'elle pourrait présenter, mais en raison de la
concurrence qu'elle détermine, il convient de connaitre avec
précision la portée d'une interdiction visant des actes licites
en eux-mêmes. Il s'agit à cet effet d'examiner le contenu de la
prestation de non-concurrence quant à son objet proprement dit,
c'est-à-dire l'interdiction d'exercer telle ou telle activité
professionnelle.
Au demeurant, si l'objet de la clause de non concurrence est
d'interdire au salarié, d'exercer après la résiliation de
son contrat de travail certaines activités susceptibles de nuire
à l'entreprise, encore faut-il que celui-ci ait acquis une connaissance
suffisante des secrets de l'entreprise à des divulgations
éventuellement utilisables par une entreprise concurrente. Il est donc
normalement exigé qu'un travailleur ait exercer des fonctions
impliquant une possibilité ultérieure de concurrence pour que
l'exercice d'une activité concurrente puisse lui être interdit
après son départ de l'entreprise. C'est dans cette perspective
qu'il a été jugé que violait une clause de non-concurrence
un employé technique qui avait repris des fonctions commerciales au
service d'une entreprise concurrente parce que les expériences et
connaissances qu'il avait acquises chez son ancien employeur
présentaient un intérêt pour le nouvel employeur et
justifiaient l'interdiction de leur transmission. Ainsi une interdiction de
non-concurrence est suffisamment légitimée par toute
possibilité de développement de concurrence du chef d'un ancien
salarié après son départ de l'entreprise.
Pour être valable, une clause de non-concurrence doit
alors laisser au salarié non seulement la possibilité d'exercer
normalement l'activité qui lui est propre, mais aussi la
possibilité de retrouver un emploi conforme à sa qualification
professionnelle. Le salarié doit donc pouvoir exercer le métier
pour lequel il est qualifié, sans mettre en danger l'activité de
l'entreprise.
La détermination de la nature de l'activité
professionnelle interdite au débiteur de non-concurrence est parfois
susceptible de poser quelques difficultés.
Elle est souvent l'oeuvre de la volonté des parties
qui rédigent une clause de non-concurrence ; clause donnant
naissance à l'obligation de non-concurrence ou venant préciser le
contenu d'une obligation de non-concurrence de plein droit.
Cette détermination (surtout en droit français)
est aussi parfois réalisée par la convention collective de
travail qui réglemente la clause de non-concurrence dans une branche
d'activité déterminée ou encore par les ordres
professionnels qui rédigent les contrats-types utilisés par les
membres de la profession considérée.
De ce qui précède, on se rend compte qu'une
étude de la rédaction des clauses de non-concurrence fait
apparaitre que deux méthodes sont essentiellement employées par
les contractants pour déterminer l'activité professionnelle
interdite au débiteur de non-concurrence. Celle-ci est soit
désignée nommément dans le texte de la clause,
soit déterminée indirectement par référence
à l'activité du créancier de non-concurrence.
Selon le professeur Y. Serra, la frontière est souvent
difficile à tracer entre les modes d'exercice de l'activité
professionnelle permis et ceux qui sont prohibés au débiteur de
non-concurrence. Corrélativement, lorsqu'en présence d'un contrat
imposant une obligation de non-concurrence de plein droit à la charge de
l'une des parties aucune clause de non-concurrence n'est venue préciser
l'activité professionnelle interdite au débiteur de
non-concurrence ou lorsque les parties en rédigeant une clause de
non-concurrence ont stipulé une interdiction de concurrence par rapport
à une activité « de même nature »
ou « similaire », il appartient au tribunaux, en cas de
difficulté, de préciser la nature de l'activité
professionnelle interdite.
Dans le même ordre d'idée, un salarié
avait souscrit une clause de non-concurrence par laquelle il s'engageait
à ne pas « accepter un emploi similaire » dans
une entreprise concurrente et après la rupture du contrat de travail, il
avait, dans le temps et le lieu prohibés, créé une
entreprise concurrente qu'il exploitait. La difficulté portait sur le
sens à donner à l'expression « accepter un emploi
similaire ». Celle-ci interdisait-elle au débiteur de la
clause de non-concurrence de créer une entreprise concurrente ?
Il s'agit là de la difficulté
d'interprétation que l'on observe le plus souvent dans le domaine des
clauses de non-concurrence accessoires à un contrat de travail lorsque
la clause fait défense au salarié pour l'après contrat
« de se mettre au service d'un concurrent direct », de
« se réembaucher dans une entreprise concurrente »
ou encore « d'entrer dans une maison similaire ».
Alors que les juges du fond avaient admis cette
possibilité en s'appuyant sur le principe d'interprétation
restrictive des clauses de non-concurrence, cette décision a
été censurée par la cour de cassation qui a
indiqué « qu'une clause interdisant à un
salarié d'accepter un emploi similaire dans une entreprise concurrente
lui interdit également d'occuper le même emploi dans une
entreprise concurrente créée par lui... »9(*)
Par conséquent, quelle que soit l'activité
professionnelle interdite, pour être valable, une clause de
non-concurrence doit laisser au salarié non seulement la
possibilité d'exercer normalement l'activité qui lui est propre,
mais aussi la possibilité de retrouver un emploi conforme à sa
qualification professionnelle. Le salarié doit donc pouvoir exercer le
métier pour lequel il est qualifié, sans mettre en danger
l'activité de l'entreprise.
En droit français, le critère relatif à
la possibilité pour le salarié de retrouver un emploi n'est pas
récent. On en trouve trace dans une décision de
1952 : « pour être valable, une clause de
non-concurrence doit laisser au salarié la possibilité d'exercer
normalement l'activité qui lui est propre.»10(*)
Dans les faits, ce critère a été
longtemps marginalisé par les autres critères. Les arrêts
de la cour de cassation du 18 Septembre 2002 (Gan vie) le
réhabilitent pleinement. La cour énonce que « le
juge peut restreindre l'application d'une clause de non-concurrence même
justifiée par les intérêts de l'entreprise, (...) lorsque
cette clause ne permet pas au salarié d'exercer une activité
conforme à son expérience
professionnelle ».11(*) Il va s'en dire que pour
apprécier la gravité de l'atteinte apportée à cette
liberté, les juges tiennent essentiellement compte de deux
paramètres :
ü ils recherchent si l'activité interdite au
salarié correspond à une activité qu'il exerce pendant de
longues années ou au contraire pendant une période assez
brève, si cette activité a été exercée
pendant une courte période, les juges considèrent qu'il ne s'agit
pas de l'activité propre du salarié et qu'elle peut valablement
être interdite par une clause de non-concurrence.
Ainsi a été jugé licite une clause
faisant interdiction à un agent technico-commercial,
spécialisé dans la commercialisation de stimuleurs cardiaques,
d'exercer cette activité dans la France entière, alors que le
salarié n'exerçait cette activité que pendant 2ans et
qu'il avait travaillé 12ans dans d'autres branches professionnelles.
ü En revanche, si le salarié exerce depuis
longtemps l'activité qui est prohibée par la clause, les juges
considèrent qu'il y'a atteinte à la liberté du travail et
ils annulent la clause.
A partir du moment où l'existence d'une situation de
concurrence a été établi, la clause peut valablement
interdire au salarié toute activité dans une entreprise
concurrente. Cette interdiction de concurrence pour être valable, doit
donc être limitée dans sa nature c'est-à-dire à une
activité susceptible de concurrencer l'employeur, de ce fait, la clause
de non- concurrence qu'un employeur introduit dans un contrat de travail ne
devrait viser que l'hypothèse où ,à l'issue de la
relation de travail, le salarié décide d'exercer une
activité concurrente de celle de l'employeur, ce qui exclut la
concurrence vis-à vis d'un tiers.
La clause de non-concurrence doit aussi être
limitée quant aux activités prohibées et ne doit
empêcher le salarié de travailler. Le juge s'attachera au
degré à la fois théorique et pratique de
spécialisation du salarié et à l'exercice d'autres
branches d'activités ou d'autres activités de la même
branche dans lesquelles le salarié pourra exercer sa profession.
La portée de la clause de non concurrence, qui
conditionne sa validité, doit alors s'apprécier au regard de
l'activité réelle de l'entreprise et non par rapport à la
définition statuaire de son objet social. Les juges ne peuvent donc se
fonder sur l'objet social inscrit très généralement dans
les statuts pour considérer que la clause avait pour effet d'interdire
au salarié d'exercer toute activité professionnelle.
A l'instar des conditions légales de
validité de la clause de non concurrence, la jurisprudence a
dégagé des clauses qui viennent complétées celles
prévues par le législateur. (parag2)
Paragraphe2 : les conditions jurisprudentielles de
validité de la clause de non concurrence
S'inspirant de la jurisprudence française, le
juge sénégalais estime que pour être licite, une clause de
non concurrence doit respecter en plus des conditions légales de
validité deux paramètres : l'employeur doit avoir d'une part
un intérêt légitime à
protéger(A) et d'autre part, que la validité de
la clause ne soit pas subordonnée à l'exigence d'une
contrepartie pécuniaire. (B)
A : l'intérêt légitime de
l'employeur, cause de l'obligation de non-concurrence du
salarié
L'obligation de non-concurrence résultant
d'une clause de non-concurrence accessoire à un contrat de travail ne
bénéficie d'aucune présomption de licéité.
Il appartient au créancier de l'obligation de non-concurrence
d'établir l'existence d'un intérêt légitime. De ce
qui précède, il convient de souligner qu'une clause de
non-concurrence ne peut pas être stipulée dans n'importe quelle
situation et vis-à vis de n'importe quel salarié. Pour être
valable, elle doit avant tout avoir pour but de protéger les
intérêts légitimes de l'entreprise. En d'autres termes,
il faut que l'entreprise soit susceptible de subir un préjudice
réel au cas où le salarié viendrait à exercer son
activité professionnelle dans une entreprise concurrente. C'est ce qui
résulte de l'article L-35 lorsque le législateur estime
que : « l'interdiction ne peut porter que sur une
activité de nature à concurrencer l'employeur. »
A contrario, en l'absence d'une activité de nature concurrentielle
susceptible d'être exercée par le salarié, la clause de
non-concurrence ne pourra pas s'imposer à ce dernier même si la
rupture résulte de son initiative ou d'une faute lourde qui lui est
imputable. L'interdiction de non concurrence, dans cette circonstance n'est pas
obligatoire dans la mesure où elle ne sert pas à protéger
un intérêt légitime de l'entreprise.
Dans le domaine de l'obligation de non-concurrence,
l'intérêt légitime est trouvé dans le souci de
protéger directement ou indirectement la clientèle du
créancier de non-concurrence ou des éléments attractifs de
clientèle qui appartiennent à ce dernier ; protection
nécessitée par la position actuelle ou passée
occupée par le débiteur de non-concurrence vis-à-vis de
cette même clientèle. La clause de non-concurrence est
justifiée parce que la concurrence que pourrait développer le
débiteur de non-concurrence à l'encontre du
bénéficiaire de la clause présenterait un caractère
anormal.
Ainsi, J. AMIEL-DONAT, estime que
l'intérêt légitime de l'employeur à l'obligation de
non-concurrence du salarié ne se trouve pas dans la nature de
l'activité confiée à ce dernier pendant la durée du
travail, c'est du risque que fait courir cette même activité,
développée au profit d'un concurrent, que l'employeur tire son
besoin de protection.
En droit sénégalais, il y'a lieu de noter que la
clause de non-concurrence, insérée dans le contrat de travail
à un effet limitée dans la mesure où le salarié,
à la fin du contrat de travail, peut directement, sous réserve de
quelques exceptions, concurrencer son ancien employeur.
En effet, la chambre sociale de la cour de cassation
dans un arrêt du 25sept1991, revenant sur sa position antérieure,
réintroduise la référence à la notion
« d'intérêt légitime » et
décide qu' « une clause de non-concurrence,
insérée dans un contrat de travail pour protéger les
intérêts légitimes de l'entreprise, est licite si elle ne
porte pas atteinte à la liberté du travail en raison de son
étendue dans le temps et dans l'espace compte tenu de la
possibilité pour le salarié d'exercer des activités
correspondant à sa formation et à son expérience
professionnelle. »
A ce propos, J.AMIEL DONAT et Y.SERRA approuvent le
revirement opéré par la cour de cassation et le situent au niveau
de l'arrêt du 14 mai 1992 (laveur de vitres) et non dans
l'arrêt du 25 sept 1991(précité). Y.SERRA parle de
« nouvelle et heureuse orientation de la
jurisprudence » et estime
que : «désormais les juges du fond, pour
apprécier la validité d'une clause de non-concurrence souscrite
par le salarié, ont la possibilité et le devoir de rechercher si
cette restriction à la liberté du salarié correspond
à un impérieux besoin de protection de l'entreprise en raison de
l'activité passée et des fonctions exercées par ce
salarié au sein de l'entreprise, la nature de l'emploi et le niveau de
responsabilité du salarié devant jouer un rôle
déterminant à cet égard. » J.AMIEL DONAT
pour sa part estime qu'en « opérant un revirement
spectaculaire et presque inespéré, la chambre sociale retient
pour la première fois de manière explicite, la
légitimité de la clause de non-concurrence en tant que condition
de validité. »
L'existence d'un intérêt légitime
devient donc une condition de validité de la clause de non-concurrence.
Il en résulte que désormais, un employeur ne peut plus exiger
l'exécution d'une clause de non-concurrence tant qu'il n'a pas
établi que l'existence de celle-ci était justifiée par les
risques particuliers que fait courir à l'entreprise mise à
la disposition de tiers des connaissances acquises par le salarié au
cours de l'exécution de son contrat de travail. De ce fait, les juges
utilisent fréquemment l'appartenance à un secteur concurrentiel
comme indice pouvant attester la légitimité de la protection
recherchée. Ils apprécient la concurrence qui s'exerce dans le
secteur d'activité.
L'analyse du secteur d'activité de l'entreprise est
pertinente. Pour déterminer si une entreprise a un intérêt
à se préserver d'une concurrence, il peut être utile de
vérifier si elle a des concurrents susceptibles de recruter le
salarié.
La clause de non-concurrence est en effet légitime si
l'entreprise a des raisons de craindre une concurrence que pourrait lui causer
le salarié ; il doit ainsi présenter un risque
concurrentiel.
On s'accorde pour reconnaitre que l'appréciation de ce
risque est intimement liée aux fonctions que le salarié
occupait dans l'entreprise. De façon pragmatique, les juges du fond se
référent le plus souvent à trois indices utiles :
ü le contact avec la clientèle,
ü l'accès à des informations
spécifiques sur l'entreprise
ü l'acquisition du savoir-faire propre à
l'entreprise.
Ainsi a été considéré comme
indispensable à la protection des intérêts légitimes
de l'entreprise, la clause de non-concurrence interdisant à un
garçon de café, en contact direct avec la clientèle,
d'entrer au service pendant un an, d'une entreprise concurrente exerçant
la même activité de café-brasserie12(*).
La clause de non-concurrence porte atteinte à
la liberté professionnelle du salarié au moment où son
intérêt commanderait de le laisser disposer de la plus grande
latitude dans la recherche d'une nouvelle situation. Cette restriction
importante aux initiatives du salarié ne peut trouver sa justification
que dans l'intérêt supérieur de l'autre partie au contrat
de travail .Cet intérêt dépassera le cadre des
rapports bilatéraux et prendra en compte la défense de
l'entreprise-employeur face aux attaques dont elle peut faire l'objet de la
part d'autres intervenants économiques. Une analyse économique
sera alors nécessaire ce qui conduira à rechercher si,
après son départ de l'entreprise, le salarié peut causer
un préjudice concurrentiel à son ancien employeur en
plaçant ses compétences et connaissances au service d'un tiers ou
en les mettant lui-même en valeur.
A partir du moment où l'obligation de non-concurrence
s'avère nécessaire ou même simplement utile à la
protection d'une clientèle contre la concurrence anormale d'un
partenaire contractuel actuel ou passé, elle est présumée
correspondre à l'intérêt légitime de son
créancier.
Ceci est tellement vrai que, comme il a été
constaté à propos de l'existence de l'obligation de
non-concurrence, les tribunaux imposent parfois aux parties à une
convention l'existence d'une obligation de non-concurrence de plein droit,
celle-ci étant censé être contenue dans la
réglementation légale du contrat considéré ;
le canal de l'obligation de garantie ayant servi la plupart du temps à
l'obtention d'un tel résultat.
Il est encore nécessaire de noter que le juge, dans
une perspective de réglementation de la clause de non-concurrence, pose
le principe de la licéité de la clause non assortie d'une
contrepartie pécuniaire. (B)
B : la licéité des
clauses sans contrepartie pécuniaire
Comme pour toute obligation, l'appréciation
de la validité de l'obligation de non-concurrence en droit du travail
devait être effectuée non seulement au regard de son objet mais
aussi de sa cause, particulièrement en ce qui concerne son existence.
L'exigence d'une contrepartie pécuniaire à
l'interdiction de faire concurrence semblerait s'imposer. Un principe
général domine le droit des contrats ; dans les contrats
synallagmatiques, l'obligation de chaque partie doit avoir une cause qui est la
contrepartie fournie par le contractant. Or, curieusement, dans le domaine du
contrat de travail et des clauses de non-concurrence, la cour de cassation
écarte catégoriquement le droit commun des
contrats : « la validité d'une clause de
non-concurrence n'est pas subordonnée à l'octroi au
salarié d'une contrepartie pécuniaire si celle-ci n'est pas
prévue par une convention collective.»
Ainsi, le tribunal du travail de Dakar, dans une
décision du 4 janvier 1973, a estimé
que : « sauf clause contraire de la convention
collective ou du contrat de travail, il n'est pas nécessaire, pour que
la clause soit valable ou efficace qu'une indemnité soit stipulée
en faveur du travailleur pour constituer la cause juridique de son
obligation. »13(*)
Il s'avère nécessaire de
préciser que si la convention collective prévoit une
indemnisation en contrepartie de la clause ,celle-ci est due même si
elle n'est pas prévue au contrat de travail et l'employeur ne peut
soutenir, de ce fait, la nullité de la clause, car la nullité
étant instituée dans le seul intérêt du
travailleur.
A l'inverse, en l'absence de contrepartie
pécuniaire prévue dans la convention collective ou le contrat de
travail, la clause de non-concurrence n'en est pas moins licite. De même,
si la convention collective prévoit une contrepartie pécuniaire
sans pour autant prescrire la nullité de la clause, en cas d'absence
d'indemnité de non-concurrence, ou en présence d'une
indemnité contractuelle dérisoire; l'employeur pourra se
prévaloir de cette clause. De son coté, le salarié pourra
réclamer le paiement de la contrepartie pécuniaire qui s'imposait
aux parties en application de la convention collective.
Cette licéité d'une obligation sans
cause est critiquée par la doctrine qui souligne non seulement la
violation des règles générales de droit contractuel, mais
également le caractère peu équitable de la solution. Les
inconvénients de cette jurisprudence sont limités par la pratique
des acteurs sociaux qui introduisent fréquemment dans les conventions
collectives une clause prévoyant le versement d'une indemnité
mensuelle en contrepartie de l'obligation du salarié de ne pas
travailler dans une entreprise concurrente.
L'indemnité n'est donc pas une condition de
validité de la clause de non-concurrence sauf dispositions
conventionnelles contraires. Elle ne répare pas un préjudice mais
compense l'avantage constitué par l'employeur de l'absence de
concurrence par le salarié. S'il l'estime dérisoire, le juge
peut augmenter le montant de l'indemnité en cas de violation d'une
clause de non-concurrence.
Le paiement de l'indemnité de non-concurrence doit
s'effectuer lors du départ effectif du salarié et non à la
fin du préavis. En toute hypothèse, le non paiement par
l'employeur de l'indemnité libère le salarié de
l'interdiction de concurrence et constitue un trouble manifestement illicite
à l'origine d'une saisine du juge des référés.
La jurisprudence française a pendant
longtemps admis la licéité des clauses de non concurrence sans
contrepartie pécuniaire. Cependant, dans un arrêt du 10 janvier
2002,la cour de cassation a considéré
qu' : « une clause de non-concurrence n'est licite que
si elle est indispensable à la protection des intérêts
légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans
l'espace , qu'elle tient compte des spécificité de l'emploi
du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au
salarié une contrepartie pécuniaire... ces conditions
étant cumulatives. »14(*)
Ainsi, l'existence d'une contrepartie pécuniaire
est-elle une nouvelle condition de validité des clauses de
non-concurrence. Pour être licite, la clause de non-concurrence,
indispensable à la protection des « intérêts
légitimes » de l'entreprise doit alors remplir toutes les
conditions requises (être limitée dans le temps et dans
l'espace et comporter une contrepartie financière.) Une clause qui
ne remplit pas l'une des conditions de validité est nulle.
La nouveauté tient donc dans le fait que la clause
de non-concurrence qui ne comporte pas de contrepartie financière n'est
pas licite. Il va s'en dire qu'un salarié qui aujourd'hui respecte une
clause de non-concurrence alors qu'elle ne fait référence dans
son contrat de travail à aucune contrepartie financière, a droit
à des dommages-intérêts(même si la clause a
été signé avant le10 juillet 2002).
Depuis ce revirement de 2002, le juge français exige
de manière obligatoire la stipulation d'une contrepartie
pécuniaire en échange du respect par le salarié de
l'interdiction de non- concurrence, alors qu'en droit sénégalais,
elle n'est obligatoire que si la convention collective ou le contrat de travail
le prévoit. Cette exigence d'une contrepartie pécuniaire
était souhaitée par une partie de la doctrine sur le fondement
de la théorie de la cause. Reprenant cette analyse à son
compte pour justifier la décision rendue le 10 juillet 2002, le
professeur Y. Serra relève que « sur le strict plan
juridique, la prévision d'une contrepartie pour la validité de la
clause de non-concurrence n'est que la traduction du principe fondamental du
droit des obligations selon lequel la validité d'une obligation suppose
l'existence d'une cause qui veut que, sauf intention libérale, à
l'obligation de l'un des contractants réponde en échange
l'obligation de l'autre »
Par ailleurs, le caractère obligatoire d'une
contrepartie à l'obligation de non-concurrence du salarié
s'inscrirait parfaitement dans l'analyse qui est faite de la fonction de cette
obligation qui réside dans le souci de protéger la
clientèle de l'entreprise. Il est normal que la restriction
apportée à la liberté du travail et à la
liberté du commerce dans la personne de l'ancien salarié pour la
conservation de cette valeur que représente la clientèle de
l'entreprise reçoive nécessairement une contrepartie.
De surcroit, si le salarié ne respecte plus la
clause de non-concurrence qui le lie à son ancien employeur, celui-ci
est en droit de ne plus lui verser la contrepartie financière qui lui
est normalement due pour l'avenir. L'employeur se doit donc de verser seulement
au salarié une contrepartie financière proportionnelle au temps
pendant lequel il a respecté son obligation de non-concurrence.
Du fait du rapprochement existant entre le droit
français et le droit sénégalais ; on pourrait
considérer que le juge sénégalais fera sienne la position
de la jurisprudence française en érigeant la contrepartie
pécuniaire à l'interdiction de concurrence à laquelle est
soumise le salarié une condition de licéité de
l'obligation de non-concurrence.
A présent que les conditions de validité de la
clause de non-concurrence sont élucidées, il convient
systématiquement de s'interroger sur le sort des clauses de
non-concurrence irrégulières. (Section
2)
Section2 : le sort des
clauses de non-concurrence irrégulières
Dans un contrat de travail, une clause de
non-concurrence peut être irrégulière soit parce qu'elle
ne respecte pas les conditions de validité dégagées par le
législateur, soit parce qu'elle ne respecte pas celles imposées
par la jurisprudence ou la convention collective applicable.
La sanction du non respect des conditions de validité
d'une clause de non-concurrence résidera le plus souvent dans
l'annulation de la clause illicite (parag 1) mais
cette solution n'est pas toujours vraie, notamment en droit du travail
où le juge se livrera souvent à une révision de la clause
de non-concurrence (parag2).
Paragraphe1 : la nullité
relative des clauses irrégulières
Les clauses de non-concurrence
irrégulières pour non respect des conditions de validité
sont en principe annulées. Il s'agit d'une nullité relative qui
connait des tempéraments(A). La nullité
de telles clauses lorsqu'elle est prononcée, produit un certain nombre
d'effets(B).
A : différentes
limites à l'annulation des clauses
irrégulières
L'établissement des conditions de
validité des clauses de non-concurrence n'est pas une pure fantaisie du
législateur sénégalais. La validité d'une clause
d'interdiction de concurrence est donc subordonnée au respect de ces
conditions de validité.
Lorsqu'une clause de non-concurrence ne respecte pas les
conditions nécessaires à sa validité elle est susceptible
d'annulation en application du droit commun des contrats. Et comme en
règle générale la clause de non-concurrence n'a pas
été la cause impulsive et déterminante de la convention
dont elle est l'accessoire, la nullité de la clause n'entraine pas
celle de la convention principale.
En effet, l'employeur qui invoque la clause de
non-concurrence inscrite dans le contrat de travail pour le protéger
de la concurrence de son ancien salarié, peut alors se voir opposer la
non-validité de cette disposition conventionnelle. Pour se
libérer d'une obligation de non-concurrence trop contraignante, l'ancien
salarié peut en demander l'annulation pour défaut du respect
d'une condition de validité à savoir, outre les conditions de
droit commun, le caractère limité de la clause.
Une clause de non-concurrence, pour être valable,
doit déterminer avec précision les limites de l'interdiction de
concurrence qu'elle met à la charge du salarié, celui-ci ne
devant pas subir une atteinte trop grave à sa liberté du travail
et devant, en tout état de cause, conserver la possibilité
d'exercer son activité professionnelle. Toute clause de
non-concurrence peut être remise en cause parce qu'établissant
un engagement excessif ou trop imprécis. Il faut toutefois constater que
l'annulation des clauses irrégulières est souvent
écartée dans des cas relativement nombreux et pour des raisons
assez différentes
Une première raison tient à la
rédaction même des conventions collectives. Celles-ci ne font pas
toujours des exigences qu'elles formulent des conditions de validité de
la clause. Aussi, une convention collective peut-elle prévoir
qu'à défaut de mention contractuelle relative à
l'indemnité compensatrice, le salarié aura droit à une
indemnité compensatrice fixée par la convention collective elle
même. La rédaction incomplète de la clause contractuelle de
non-concurrence ne donnera pas lieu à l'annulation de l'obligation de
non concurrence ; par application de la convention collective, les juges
donneront à la clause toute sa portée en imposant à
l'employeur le paiement d'une indemnité compensatrice d'un montant
égal à celui qui est fixé par la convention collective.
D'autres conventions collectives contiennent des clauses, qui font clairement
de l'existence d'une indemnité pécuniaire, prévue par le
contrat de travail, une condition de validité de l'obligation de non
concurrence.
Une seconde raison tient à la tendance qu'ont
les juges à valider partiellement des clauses qui sont en principe
illicites, lorsque le salarié a violé rapidement et manifestement
l'obligation de non-concurrence qu'il avait contractuellement acceptée.
Cette jurisprudence se manifeste lorsque la clause de non-concurrence est trop
étendue dans l'espace, dans le temps, ou quant aux activités
prohibées. Au lieu d'annuler la clause de non-concurrence, les juges
préfèrent sanctionner le salarié qui n'a pas tenu aucun
compte de l'engagement contracté, en faisant concurrence à son
ancien employeur, très peu de temps après la rupture du contrat
de travail, et dans un lieu proche de celui où il travaillait
antérieurement. A cet égard, la cour de
cassation dans un arrêt de 1972 a
estimé : « une clause qui, abstraitement,
pourrait être considérée comme nulle, parce qu'elle aurait
pu aboutir à interdire au salarié l'exercice de sa profession,
n'en devra pas moins recevoir application, lorsqu'il est constaté que,
concrètement le salarié s'est réinstallé
immédiatement à son compte dans un lieu proche de celui où
il travaillait et a eu une activité concurrentielle effective au
détriment de son ancien employeur ou est passé directement au
service d'une entreprise concurrente. »15(*)
Ainsi une clause de non-rétablissement dans un
rayon donné qui pourrait être tenue pour excessive, compte tenu de
la nature de l'activité concentrée dans un espace restreint, doit
recevoir application dés lors que le salarié a repris une
activité concurrente à proximité de l'établissement
de l'ancien employeur.
Enfin, une troisième raison limite les cas
d'annulation. Seuls les salariés, débiteurs de l'obligation de
non concurrence, peuvent utilement solliciter l'annulation de cette clause
puisqu'elle est instituée seulement dans son intérêt. La
nullité « instituée seulement dans
l'intérêt du salarié », a un
caractère relatif, seul le salarié peut donc invoquer la
nullité d'une clause de non-concurrence portant atteinte à la
liberté du travail. Cette clause est nulle en principe et si le
salarié obtient l'annulation de la clause, il retrouve sa
liberté : sa clause est entièrement anéantie pour
l'avenir, dans son intégralité, et ne peut plus produire aucun
effet.
Cependant, il y'a lieu de noter que les employeurs ne
sont pas recevables à invoquer devant les juges la nullité de la
clause de non-concurrence pour échapper aux conséquences
pécuniaires de l'interdiction de rétablissement .C'est ainsi
que la cour de cassation, dans une décision a estimé
que : « le salarié ne s'étant pas
prévalu de la nullité éventuelle, instaurée
à son seul profit de la clause de non-concurrence, l'employeur
n'était pas recevable à le faire dans le but d'échapper
aux conséquences pécuniaires de l'interdiction imposée par
lui au salarié. »16(*)
En déclarant irrecevable la demande en nullité
formée par l'employeur, la jurisprudence tend à détourner
l'employeur d'une tentation à laquelle il pourrait succomber et vient
s'inscrire parfaitement dans l'évolution contemporaine de la
théorie des nullités.
Permettre à l'employeur d'invoquer la nullité de
la clause de non-concurrence parce que trop attentatoire à la
liberté du travail ouvrirait la possibilité pour l'employeur de
stipuler une C.N.C qui ne serait pas conforme aux exigences de la
législation relativement aux conditions de validité de ces
clauses ou qui ne respecterait les dispositions du droit conventionnel à
cet
égard mais qui jouerait cependant un rôle
dissuasif au regard d'un éventuel projet d'activité
concurrentielle que pourrait envisager le salarié pour
l'après-contrat, tout en laissant à l'employeur la faculté
d'échapper au paiement de l'indemnité de non-concurrence en
demandant et en obtenant l'annulation de la clause de non-concurrence par
définition illicite.
Il faut aussi replacer cette jurisprudence
française, concernant la sanction des conditions de validité de
la clause de non-concurrence accessoire à un contrat de travail et lui
donnant quant à sa mise en oeuvre le caractère d'une
nullité relative, dans le cadre d'une solution plus
générale applicable à l'ensemble de la
réglementation du travail au regard de laquelle « la
violation des règles établies dans l'intérêt des
travailleurs n'est sanctionnée par la nullité que lorsqu'elle
nuit aux intérêts de ceux-ci ».17(*)
Enfin, on peut observer que cette
jurisprudence française vient illustrer et conforter l'évolution
contemporaine de la théorie des nullités. Le fait qu'une
convention ait un objet contraire à l'ordre public, ce qui est le cas
lorsqu'une clause de non-concurrence détermine une atteinte excessive
à la liberté du travail, ne conduit plus nécessairement
aujourd'hui à admettre que la sanction encourue soit la nullité
absolue. Une distinction est généralement effectuée entre
l'ordre public de direction et l'ordre public de protection dont les
règles « ne justifient qu'une action en
nullité relative dont l'exercice doit être réservé
à celle des parties que le législateur a voulu
protéger ». Il est donc posé un principe de
portée générale selon lequel
«une règle posée dans l'intérêt de
l'une des parties ne peut autoriser l'autre à s'en prévaloir pour
obtenir l'annulation d'un contrat »18(*).
Établie pour protéger les
salariés contre les atteintes à la liberté du travail, la
nullité est, comme les autres nullités de protection, une
nullité relative. Si un salarié tenu par une obligation de
non-concurrence illicite préfère exécuter cette obligation
pour percevoir l'indemnité compensatrice (qui dans certains cas est
très importante), l'employeur ne peut pas faire échec
à la volonté du salarié, dans la mesure, du moins,
où il n'a pas renoncé en temps utile et dans les formes convenues
au bénéfice de la clause ; il sera condamné à
payer l'indemnité compensatrice.
En effet, il s'avère intéressant de
préciser que la nullité de la clause de non-concurrence,
n'interdit pas à l'ancien employeur de poursuivre son ancien
salarié (et/ou l'entreprise qu'il aurait fondée) dés lors
qu'il démontre que ce dernier s'est livré à des actes de
concurrence déloyale à son égard.
Lorsque la clause de non-concurrence est annulée pour
cause d'irrégularité, cette annulation est susceptible de
produire un certain nombre d'effet tant à l'égard du
salarié mais aussi tant à l'égard de l'employeur.
Autrement dit, l'annulation d'une clause de non-concurrence pour non respect
des conditions de validité n'est pas sans effet sur la situation des
parties au contrat. (B)
B : les effets de l'annulation des
clauses irrégulières
L'annulation d'une clause de non-concurrence pour non
respect des conditions de validité n'est pas sans conséquence sur
la situation des parties au contrat. En d'autres termes, une telle annulation
produit des effets tant à l'égard du salarié qu'à
l'égard de l'employeur. Il convient de ce fait de rappeler que seul le
salarié est admis à demander la nullité de la clause de
non-concurrence dans la mesure où il s'agit d'une nullité de
protection c'est-à-dire une nullité relative.
Dans l'hypothèse où le salarié
décide de solliciter l'annulation de la clause de non- concurrence
irrégulière, la décision d'annulation, dans les cas
où elle intervient, entraine-t-elle la disparition rétroactive de
l'obligation de non-concurrence et de verser au salarié une
indemnité compensatrice si celle-ci est prévue par le contrat de
travail ou par la convention collective ? A cette question posée,
la cour d'appel d'AIX-en Provence dans un arrêt rendu le 10 mai
1989 avait répondu à la question posée de
manière claire et sans ambigüité.
En l'espèce, un salarié poursuivi pour
violation d'une C.N.C assortie d'une indemnité de non-concurrence, forma
une demande reconventionnelle en nullité de cette clause pour
défaut de limitation dans l'espace. Ayant obtenu gain de cause, le
salarié, invoquant la jurisprudence rapportée ci-dessus et selon
laquelle seul le salarié peut agir en nullité en la circonstance,
prétendait en outre que l'employeur, n'étant pas recevable
à se prévaloir de la nullité de la clause de
non-concurrence, ne pouvait obtenir la restitution du versement de la
première tranche de l'indemnité de non-concurrence qui avait
été déjà effectué, ni être
libéré de l'obligation de verser la deuxième tranche de
cette indemnité.
La cour d'appel a refusé de suivre cette argumentation
en jugeant que « dans la mesure où le salarié
a revendiqué avec succès la nullité de la clause de
non-concurrence, ladite nullité doit être appliquée dans
toutes ses conséquences, et les choses doivent être remises
dans l'état où elles se trouvaient avant la
constatation de ladite nullité »19(*) et qu'en conséquence,
il devait être procédé à la restitution de la
fraction de l'indemnité compensatrice déjà perçue
et il ne pouvait être prétendu au paiement de la deuxième
tranche. Le salarié avait été, pour ce motif
condamné à rembourser à l'employeur la partie de
l'indemnité compensatrice qu'il avait déjà
perçue.
Une jurisprudence récente de la chambre sociale, sur la
même question avait retenu la solution opposée ; elle
considère que « la clause de non-concurrence s'est
effectivement appliquée avant que la nullité n'en soit
judiciairement constatée et elle en déduit que l'employeur
n'était pas fondé à solliciter la restitution des sommes
versées au titre de la contrepartie financière de l'obligation
qui avait été respectée »20(*)
Il convient donc, d'un point de vue pratique, de
distinguer deux situations :
ü dans un premier cas, le salarié n'a pas tenu
compte d'une clause de non-concurrence dont les conditions de validité
n'étaient pas réunies :
si les juges, dans cette hypothèse, décident de
prononcer non pas une simple révision de la clause mais la
nullité de celle-ci, le salarié ne sera pas condamné pour
violation de l'obligation de non-concurrence, mais il ne pourra pas conserver
l'indemnité compensatrice qui lui aurait éventuellement
été versée avant la décision d'annulation et
dans un arrêt rendu, la cour de cassation approuve les juges du fond
d'avoir refusé d'ordonner la restitution de la contrepartie
financière, au motif que l'employeur n'avait pas démontré
que le salarié avait violé la clause litigieuse pendant les deux
années durant lesquelles elle s'était effectivement
appliquée. Si l'employeur avait rapporté la preuve de la
violation de l'obligation de non concurrence par le salarié, il aurait
au contraire obtenu le remboursement des sommes versées au titre de la
contrepartie financière.
ü dans le second cas, le salarié a respecté
l'obligation de non concurrence tant que celle-ci n'a pas été
annulée :
Il peut alors conserver les sommes qui ont été
payées par l'employeur en exécution de la clause de
non-concurrence avant la décision d'annulation. L'annulation n'a pas
dans cette hypothèse un effet rétroactif.
Cependant, il y a lieu de souligner que lorsqu'un employeur
impose à un salarié une clause de non-concurrence qui ne remplit
pas les conditions nécessaires à sa validité en
interdisant à son débiteur de continuer à exercer son
activité professionnelle, la jurisprudence, indépendamment d'une
éventuelle annulation, considère parfois que le salarié
peut obtenir réparation du préjudice que lui cause la clause de
non-concurrence illicite.
En ce sens, la C.cass a approuvé des juges du fond qui,
sans avoir à se prononcer sur la nullité d'une clause de
non-concurrence qui n'était pas demandée par le salarié,
avaient estimé que cette clause était illicite et que son
application avait causé un préjudice au salarié en lui
empêchant de trouver un emploi correspondant à son
expérience professionnelle.21(*)
Il a été de même octroyé
des dommages-intérêts à un salarié parce que
l'application d'une clause de non-concurrence ne lui avait pas permis, en
raison de son étendue, de trouver un emploi dans le cadre de sa
qualification professionnelle, une telle situation étant
génératrice pour lui d'un préjudice dont il était
fondé à demander réparation.22(*)
Par ailleurs, la jurisprudence française, face
à une clause irrégulière, tranche aujourd'hui en faveur
d'une position médiane en prenant en compte la protection de
l'intérêt légitime de l'employeur. Elle s'efforce
d'éviter de prononcer la nullité d'une clause excessive ne la
réduisant à de plus juste limites. Il s'agit donc d'une
révision réduction. Autrement dit, nonobstant le fait que les
clauses de non-concurrence sont parfois irrégulières, les
juges lorsqu'ils sont saisis, dans certains cas, ne prononcent pas la
nullité, ils décident simplement de les
réviser. (parag2)
Paragraphe2 : la possibilité d'une
révision judiciaire d'une clause excessive
Conformément à l'orthodoxie civiliste,
la clause de non-concurrence illicite devrait se trouver frappée de
nullité, dans son intégralité et, sans pouvoir produire
aucun effet. Le travailleur recouvre de ce fait son entière
liberté. Particulièrement pour les clauses de non-concurrence, si
certaines sont annulées, d'autres, bien qu'excessives et donc
annulables, font l'objet d'une révision judiciaire et conservent ainsi
leur efficacité dans les limites plus restreintes. Pour qu'il soit
ainsi, la jurisprudence dégage deux conditions à savoir une qui
est indifférente : la cause de
l'irrégularité(A) et une autre condition qui
semble nécessaire : la violation de l'obligation de non-concurrence
par le salarié (B).
A : La condition
indifférente : la cause de l'irrégularité
Etant donné l'absurdité d'une
annulation des clauses de non-concurrence irrégulières et son
utilisation abusive par certains salariés contrairement à la
volonté évidente des parties, s'est progressivement et
récemment élaborée une jurisprudence qui témoigne
d'une originalité et d'une adéquation dont les mérites
n'ont peut être pas été suffisamment soulignés.
C'est ainsi que l'on peut observer le
développement, de manière affirmée d'une pratique
judiciaire de révision de la clause de non-concurrence accessoire
à un contrat de travail ; pratique non seulement approuvée
par la cour de cassation française, mais aussi imposée aux juges
du fond par la Haute juridiction et par laquelle une obligation de
non-concurrence illimitée ou d'une dimension excessive quant à
son champ d'application dans le temps, dans l'espace ou relativement aux
activités prohibées n'est pas annulée mais
déclarée applicable pour sanctionner la concurrence
développée par le salarié qui l'avait souscrite.
Cette révision est souvent obligatoire
pour les juges du fond dont les décisions d'annulation d'une clause de
non-concurrence illicite sont censurées par la cour de cassation. Par
exemple, en présence d'une clause de non-concurrence dont le contenu
quant aux activités interdites était trop étendu, la cour
de cassation française, après avoir relevé que les juges
du second degré avaient « annulé
intégralement la clause litigieuse au motif que les tribunaux ne
pouvaient la modifier pour en réduire l'étendue en substituant
à la convention conclue par les parties une disposition qui leur
paraitrait plus logique ou plus équitable... » a
reproché aux juges du fond leur conception trop orthodoxe de la
signification de l'article 1134 du Code civil23(*) qui leur avait interdit de réduire le champ
d'application de la clause et a censuré leur
décision en déclarant, après avoir
réduit la portée de la clause, « que dans cette
mesure qui laissait (à l'ancien salarié) une possibilité
de travail dans sa propre spécialité, la clause litigieuse avait
été légitimement convenue »24(*)
De façon fort contestable, la cour de cassation
admet que les juges au lieu d'annuler la clause illicite, procède
à sa révision et lui donne un effet limité qui la valide
partiellement ; ce qui n'entre en aucune manière dans la fonction
du juge car aux termes de l'article 97 du Cocc « le
contrat ne peut être révisé ou résilié que du
consentement mutuel des parties ou pour les causes prévues par la
loi ». Ce pouvoir de révision est très largement
reconnu aux juges du fond. Il peut être utilisé quelle
que soit la cause de l'irrégularité de la clause. La
révision a alors été imposée au
salarié aussi bien dans des cas où la durée de
l'obligation de non-concurrence était excessive, ou le champ
géographique de l'interdiction était trop vaste que dans ceux
où l'étendue des activités professionnelle
prohibées empêchait le salarié d'exercer son
activité propre.
Il est possible de douter de l'intérêt
qu'il y a à maintenir, même partiellement, une clause de
non-concurrence par essence attentatoire à la liberté du travail
alors que l'application du droit commun des contrats, principal fondement
avancé par la jurisprudence pour justifier le principe de la
validité de la clause de non-concurrence en droit du travail, conduirait
à l'annuler et permettrait ainsi à l'ancien salarié de
jouir d'une totale liberté de concurrence, la règle étant
qu'aucune obligation de non-concurrence ne survit de plein droit à
l'expiration du contrat de travail. En outre il faut bien admettre que la
révision de la clause de non-concurrence ne préserve que les
intérêts de l'employeur, jamais ceux du salarié et que les
premiers ne sont pas toujours légitimes.
La cause de l'irrégularité, dans ces
circonstances est indifférente. La révision d'une clause de
non-concurrence illicite va dans l'intérêt de l'employeur
dans la mesure où celle-ci la valide partiellement. Il s'ensuit que les
juges au lieu de tirer les conséquences normales et habituelles de la
violation des règles de validité d'une obligation,
révisent souvent la clause contractuelle, en en limitant la
portée si elle est excessive, soit au regard des dispositions de la
convention collective applicable, soit au regard des conditions
dégagées par le législateur lui-même. Cette solution
jurisprudentielle est retenue pour toutes les clauses qui portent une
atteinte excessive à la liberté du travail lorsque le
salarié fait concurrence à son ancien employeur dans des
conditions qui auraient pu valablement lui être interdites.
La distinction entre l'annulation et la révision ne se
fait pas à partir de ce qui rend excessive l'atteinte à la
liberté du travail. Les jugent se reconnaissent le pouvoir de
réviser la clause de non-concurrence que son caractère excessif
résulte d'un champ d'application trop étendu ou d'une
durée beaucoup plus longue.
La distinction ne se fait pas non plus selon que le
caractère excessif résulte d'une violation des règles
posées par le législateur ou par la convention collective
applicable (pour un exemple de révision dans un cas où
l'obligation a un caractère excessif parce qu'elle ne respecte pas les
limitations posées par la convention collective,25(*) : le contrat de travail
prévoyait une clause de non-concurrence d'une durée de six
années alors que la convention collective applicable en l'espèce,
subordonnait la validité de l'interdiction contractuelle à une
durée maximale de deux ans ; le salarié étant
entré au service d'une entreprise concurrente dés l'expiration du
préavis, les juges du fond décident à bon
droit « que dans cette mesure au moins, la clause de
non-concurrence est licite ».
La cause de l'irrégularité est
indifférente dans la prise en compte de la révision d'une clause
de non-concurrence irrégulière. Ce constat ne doit pas nous
laisser perdre de vue qu'il existe une autre condition nécessaire qui
implique que la clause de non-concurrence irrégulière soit
violée par le salarié avant même la constatation judiciaire
d'une telle irrégularité. (B)
B : La condition nécessaire : la
violation par le salarié de l'obligation de non-concurrence
La révision d'une clause
irrégulière est cependant subordonnée au comportement du
débiteur de l'obligation de non-concurrence. Si celui-ci respecte
l'obligation de non concurrence bien qu'elle soit illicite, et demande aux
juges d'en prononcer la nullité, la juridiction saisie prononcera la
nullité. En revanche, si au lieu de demander en justice l'annulation de
la clause illicite, le salarié la viole, les juges peuvent
réviser la clause contractuelle et la rendre licite en en limitant la
portée. En d'autres termes, la violation par le salarié de
l'obligation de non-concurrence est une condition nécessaire du pouvoir
de révision du juge.
De ce fait, le plus souvent, les jugent utilisent la
technique de révision pour condamner le salarié qui a
violé l'obligation de non concurrence peu de temps après
l'expiration de son contrat de travail et dans des lieux proches de celui
où l'ancien employeur exerce son activité. Si cette violation
intervient plusieurs années après l'expiration du contrat de
travail, les jugent refuseront éventuellement de réviser la
clause contractuelle et déclareront celle-ci illicite.
Mais la technique de la révision peut
être utilisée pour débouter un ancien employeur qui
invoquerait la violation d'une clause de non-concurrence qui avait un champ
d'application très étendu (l'ensemble du territoire
national) ; les jugent du fond peuvent décider qu'il ya lieu
de réduire le champ d'application géographique de la clause aux
seuls départements dans lesquels le salarié avait exercé
ses fonctions et de débouter l'ancien employeur de sa demande. 26(*)
Aussi, la cour de cassation, dans une
décision du 18 septembre 2002 avait-elle décidé
que « le juge, en présence d'une clause de
non-concurrence insérée dans un contrat de travail, même
indispensable à la protection des intérêts légitimes
de l'entreprise, peut lorsque cette clause ne permet pas au salarié
d'exercer une activité conforme à sa formation et à son
expérience professionnelle, en restreindre l'application en en limitant
les effets dans le temps, l'espace ou ses autres
modalités ».27(*) Ce faisant, le juge procède à une
véritable réfaction de la clause. Le juge ne parait pas, en
revanche, se reconnaitre le pouvoir de compléter une clause
légitime mais dépourvue d'une des autres conditions
exigées par le législateur ou la convention collective applicable
à la matière.
A cet effet, une analyse de la jurisprudence permet
d'observer donc que la clause de non-concurrence annulable est validée
dans les cas où il est constaté que l'ancien salarié qui
l'avait souscrite s'était livré à une activité en
concurrence directe avec celle de son ancien employeur. Ainsi, il a
été jugé que « la clause excessive devait
recevoir application dans la mesure où il était constaté
que l'intéressé était venu concurrencer son ancien
employeur en s'installant à son compte dans le même secteur que
celui-ci, quelques mois seulement après la rupture »
28(*)
Plus encore, la pratique de la révision judiciaire de
la clause de non-concurrence en droit du travail est révélatrice
d'une conception réductrice de la liberté de principe
reconnue au salarié de concurrencer son ancien employeur à
l'issue du contrat de travail. L'analyse de la Jurisprudence française
permet, en effet, d'observer, comme on vient de le faire, que la clause de
non-concurrence annulable est validée essentiellement parce qu'il est
constaté que l'ancien salarié s'était livré
à une activité concurrente de celle de son ancien employeur et
que la révision apparait ainsi comme la sanction d'un tel comportement,
ce qui est tout à fait critiquable.
Sur le plan logique, la critique tient à ce que cela
revient à déterminer la validité d'une convention non au
moment de sa conclusion mais à celui de son inexécution.
Critique ensuite en ce sens que la clause de non-concurrence
étant par hypothèse illicite parce qu'excessive, elle ne devrait
produire aucun effet.
L'attitude du salarié, la concurrence qu'il exerce
contre son ancien employeur devrait donc être appréciée,
non pas développée comme dans le cadre d'une interdiction de
concurrence mais, au contraire, dans celui du principe selon lequel un ancien
salarié, à défaut de clause de non-concurrence valable,
dispose d'une entière liberté de concurrence. Autrement dit, la
seule sanction possible devrait être une condamnation pour
concurrence déloyale de la part de l'ancien salarié, ce
qui n'a jamais été avancé, aucune faute n'étant
relevée dans les espèces jugées. Or, l'attitude de la
jurisprudence contredit cette analyse. La cour de cassation réagit comme
si, en définitive, elle considérait que l'ancien salarié
se trouve de plein droit tenu d'une obligation de non-concurrence envers son
ancien employeur, la clause n'étant là que pour aménager
le contenu de cette obligation.
Le sentiment véritable de la jurisprudence serait donc
que l'ancien salarié ne doit pas user effectivement de la liberté
de concurrence qui lui est reconnue en principe après la cessation du
contrat de travail, qu'il est tenu en quelque sorte de respecter une
obligation implicite de réserve dans l'activité
concurrentielle qu'il déploie à l'encontre de son ancien
employeur. Ceci est grave pour la liberté du travail et la
liberté d'établissement et réduit singulièrement la
portée de l'affirmation selon laquelle, à l'issue du contrat de
travail, le salarié recouvre une pleine et entière liberté
de concurrence.
Il convient donc de préciser, que la révision
d'une clause de non-concurrence irrégulière ne peut concerner
qu'un point sans grande importance ou d'ordre technique ; elle ne doit pas
nécessiter l'adjonction des termes ou la modification même des
termes de la clause existante.
La clause de non-concurrence ayant remplie les conditions de
validité prévues par le code du travail, pose un autre
problème qui est relatif à sa mise en oeuvre par les parties au
contrat de travail (CHAPITRE2).
CHAPITRE2: La mise en oeuvre de la clause de
non-concurrence
L'application de la clause de non-concurrence
insérée dans le contrat individuel de travail suppose que ni sa
validité, ni son efficacité ne soient contestées avec
succès. Une clause d'interdiction de concurrence qui respecte les
conditions légales de validité doit dés lors recevoir
application par les parties contractantes.
La mise en oeuvre d'une clause de non-concurrence licite peut
entrainer un différend entre le salarié et son employeur, ainsi
il s'avère nécessaire de s'interroger d'une part sur la
portée de la clause (section1) et d'autre part
sur les sanctions prévues en cas de violation d'une telle clause
(section2).
Section1: la portée de
l'obligation de non-concurrence
La portée de l'obligation de
non-concurrence insérée dans un contrat de travail peut
être appréciée selon qu'on est en cours d'exécution
du contrat de travail ou à l'expiration de celui-ci. Pendant toute la
durée du contrat de travail, le salarié est soumis à une
obligation générale de non-concurrence (parag1).
Une telle obligation cesse de produire ses effets à l'expiration du
contrat. Autrement dit, à la fin du contrat de travail le salarié
peut, sous réserve d'exception, concurrencer son ancien employeur
(parag2).
Paragraphe1 :Une obligation
générale de non-concurrence pendant la durée du contrat
de travail
Pendant la durée du contrat de travail, le
salarié est tenu envers son employeur par une obligation
générale de non-concurrence. Il lui est donc interdit d'exercer
une activité qui pourrait concurrencer son employeur. Il s'agit en
effet, d'une interdiction de concurrence par obligation
d'exclusivité(A). Dans certains cas, cette interdiction
de concurrence est assortie d'aménagements (B).
A : Une interdiction de concurrence par
obligation d'exclusivité
Lorsque la clause de non-concurrence est licite,
elle entraine toujours l'obligation pour le salarié de ne pas
concurrencer son employeur pendant un certain temps, c'est-à-dire
pendant toute la durée du contrat de travail. L'employeur,
créancier de l'obligation de non-concurrence, est en droit d'attendre du
salarié, débiteur de non-concurrence, qu'il respecte l'engagement
qu'il a pris de ne pas exercer d'activité concurrentielle selon des
modalités et des limites qui ont été
précisées, et le salarié est en droit d'attendre de
l'employeur qu'il respecte ses propres engagements.
La clause d'interdiction de concurrence tire sa
force obligatoire du principe selon lequel « les conventions
légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont
faites ».
En effet, l'obligation de non-concurrence qui résulte
d'une clause ne se confond pas avec l'obligation générale de
non-concurrence que doit respecter le salarié durant toute
l'exécution du contrat de travail. Mais en droit du travail
sénégalais, ces deux notions semblent avoir le même sens.
Il en résulte que :
ü même en l'absence de clause expresse, le
salarié est tenu par une obligation de non-concurrence vis-à-vis
de son employeur jusqu'à l'expiration de son contrat de travail,
ü le simple fait de rappeler dans le contrat de travail
l'obligation qui pèse sur tout salarié de ne pas concurrencer
l'employeur pendant toute la durée du contrat ne permet pas d'en
déduire l'existence d'une clause de non-concurrence.
A cet égard, aux termes de l'article L.35 al 1 du
c.trav « le travailleur doit toute son activité
professionnelle à l'entreprise, sauf dérogation stipulée
au contrat». Ainsi, le salarié lorsqu'il est sous
l'autorité de l'employeur, il a comme obligation de
« consacrer son temps de manière constante et
exclusive » à l'activité pour laquelle il est
rétribué.
Le salarié doit donc exécuter consciencieusement
et loyalement la prestation de travail, ce qui postule qu'il ne peut
concurrencer son employeur. Il va s'en dire que la principale obligation du
salarié est naturellement celle de fournir la prestation de travail
prévu par le contrat. Toutefois, parce que le contrat de
travail « doit être exécuté de bonne
foi », parce que, en outre, il oblige « non
seulement à ce qui y est exprimé, mais aussi à toutes les
suites que l'usage, l'équité ou la loi donnent à
l'obligation d'après sa nature », il faut donc admettre
l'existence d'obligations accessoires, dont la portée varie
considérablement selon les fonctions exercées et la place
occupée dans l'entreprise.
L'obligation de bonne foi et de loyauté
que le salarié contracte à l'égard de l'employeur en
concluant un contrat de travail a pour corollaire l'obligation de
non-concurrence en cours de contrat. Cette obligation de loyauté peut
entrer en conflit avec la liberté d'expression. L'article 17 de la
convention collective interprofessionnelle dispose qu'«il est interdit
également au travailleur de divulguer les renseignements acquis au
service de l'employeur ». Il pèse alors sur le
salarié une obligation de discrétion et de réserve. A cet
égard, indépendamment du secret professionnel stricto sensu, le
salarié est tenu, sanctions pénales à l'appui, au respect
des « secrets de fabriques ». En outre, il ne doit pas
divulguer hors de l'entreprise des informations présentant un
caractère confidentiel dont il a eu connaissance en raison de ses
fonctions.
On pourrait penser que la loyauté, la
discrétion et la bonne foi contractuelles servent d'étalon de
mesure de l'expression portant sur l'entreprise. Tel n'est plus en règle
générale, l'analyse retenue par la C.cass
française : « l'abus de droit est la seule
limite apportée à la liberté d'expression des
salariés en dehors de l'entreprise ». De manière
générale, il est désormais affirmé que
« sauf abus, le salarié jouit dans l'entreprise et en
dehors de celle-ci de sa liberté d'expression ».
Il est parfois prévu dans le contrat une
clause d'exclusivité. Il ne faut pas en exagérer la
portée. On peut dire qu'elle est le pendant de la clause de
non-concurrence, mais en cours de contrat. Le salarié s'engage à
une totale disponibilité professionnelle à l'égard de
l'entreprise. Pour autant, pendant toute la durée de son contrat de
travail et sauf disposition contraire entre les parties, le salarié ne
peut effectuer en dehors des travaux qui lui sont confiés, aucun
travail rémunéré de même nature susceptible de
faire directement concurrence à l'entreprise. Le législateur
sénégalais, par le biais de l'alinéa 2 de l'art L.35 s'est
prononcé dans ce sens en estimant qu' « il est
loisible, sauf convention contraire, d'exercer, en dehors de son temps de
travail, toute activité à caractère professionnelle non
susceptible de concurrencer l'entreprise ou de nuire à la bonne
exécution des services convenues ».
Pendant l'exécution du contrat de travail,
mais en dehors de son temps de travail, le travailleur peut, sous
réserve de ne pas enfreindre les règles du cumul d'emplois,
exercer une autre activité professionnelle non susceptible de
concurrencer l'entreprise ou de nuire à la bonne exécution des
services convenus. Mais il peut s'interdire cette faculté par une
convention contraire expresse, passée entre lui et son employeur.
Ainsi, le salarié est libre en dehors de son temps de travail d'exercer
une autre activité professionnelle. Un salarié à temps
partiel est donc libre de conclure un autre contrat, pour le compte d'un
nouvel employeur, sous réserve de ne pas dépasser la durée
maximale du travail. Par ailleurs, l'exclusivité pendant ou en dehors
des heures est limitée dans le sens de l'autorisation par l'employeur
et dans le sens de l'interdiction d'exercer d'autres activités en dehors
du temps de travail.
En l'absence de disposition particulière, le
salarié n'est pas tenu de consacrer à l'exécution du
contrat l'intégralité de son activité professionnelle.
Aucun principe de portée générale ne s'oppose, en droit du
travail, au cumul d'emplois si ceux-ci sont pratiquement compatibles et
n'impliquent pas un dépassement de la durée maximale du travail.
On doit donc admettre que le salarié est
débiteur envers son entreprise d'une obligation de non-concurrence de
plein droit qui lui interdit de développer toute activité en
concurrence avec celle de son employeur ; solution retenue par le
législateur sénégalais.
Ni la jurisprudence, ni la doctrine n'identifie
cependant avec précision le fondement de cette obligation de
non-concurrence de plein droit. Elle serait contenue dans d'autres obligations
plus larges qui bien que non écrites, participeraient de la
règlementation légale du contrat de travail et seraient
inhérentes à la nature même de ce contrat. Depuis quelques
années, et cela est particulièrement vrai pour la motivation des
décisions des tribunaux ; l'obligation qui astreint le
salarié est analysée comme découlant d'une
« obligation de fidélité » qui
pèserait sur ce dernier et dont l'expression même a
été empruntée à différent droits
étranger notamment au droit italien (obligo di fidelta). Il
s'agirait d'une obligation de bonne foi particulière qui comprendrait
non seulement une obligation de non-concurrence mais aussi une obligation de
loyauté et une obligation de discrétion. L'exécution d'un
contrat de travail emporte donc une obligation de fidélité qui
est équivalente à une obligation tacite de non-concurrence.
Une jurisprudence constante avait estimé en effet
qu'un « employé ne peut, sans manquer aux obligations
résultant de son contrat de travail, exercer une activité
concurrente de celle de son employeur pendant la durée du contrat de
travail »29(*) ou encore, « que le
salarié, tenu envers l'entreprise qui l'emploi d'un devoir
général de fidélité, ne peut, pendant la
durée du contrat de travail, exercer une activité concurrente
de celle de l'entreprise ».30(*)
Bien que ne nécessitant pas une stipulation
particulière des parties, l'obligation de non-concurrence du
salarié pendant la durée du contrat de travail est parfois
expressément visée par une clause de non-concurrence contenue
dans le contrat. Ainsi, il peut être prévu que le
salarié « est tenu à l'égard de la
société, par une obligation de fidélité, pendant
toute la durée du contrat qui lui interdit de s'intéresser,
directement ou de collaborer sous quelque forme que ce soit à une telle
entreprise ».
Ces clauses peuvent se révéler utiles, selon
la profession considérée et la vivacité de la concurrence
dans un secteur d'activité déterminé, pour
préciser, aménager voire compléter l'obligation de
non-concurrence de plein droit qui pèse sur le salarié. Elles
présentent l'avantage, en outre, d'assurer l'information du
salarié puisqu'en signant le contrat de travail, il prendra alors
connaissance de l'existence et du contenu exact de l'obligation à
laquelle il est astreint.
Au demeurant, l'obligation de non-concurrence de plein droit
qui pèse sur le salarié pendant la durée du contrat lui
interdit alors de développer, directement ou indirectement tout acte de
concurrence à l'encontre de son employeur que ce soit en exerçant
une activité similaire pour son compte ou à travers une
société concurrente ou encore au profit d'une entreprise
concurrente.
La jurisprudence sanctionne régulièrement la
violation de cette obligation qui justifie le licenciement soit en
considérant qu'elle constitue une faute qui engage la
responsabilité et le contraint à réparer le dommage
concurrentiel subi par l'employeur, soit en estimant qu'il s'agit d'une faute
grave privative des indemnités de rupture ; soit enfin qu'il ya
là pour le moins une faute sérieuse qui constitue une cause
réelle et sérieuse de nature à justifier le
licenciement.
La violation de l'obligation de non-concurrence par le
salarié constitue de toute évidence la violation d'une obligation
contractuelle puisque le contrat de travail lui interdit toute concurrence
envers son employeur, même celle qui serait développée par
des moyens normaux.
Toutefois, la détermination du contenu de
l'obligation de non-concurrence et de sa période d'application suscite
un contentieux abondant.
S'agissant de la détermination du contenu de
l'interdiction de concurrence, l'une des difficultés majeures tient
à ce que si le salarié est débiteur d'une obligation de
non-concurrence pendant le contrat de travail, il recouvre en principe, une
pleine et entière liberté de concurrence envers son ancienne
entreprise lorsque le contrat de travail a pris fin. Dés lors, le
salarié peut-il, dans cette perspective d'une liberté de
concurrence retrouvée et alors qu'il est encore dans les liens de son
contrat de travail, concevoir et préparer une activité
concurrente de celle de son employeur pour le temps qui suivra l'expiration du
contrat ?
L'analyse de la jurisprudence permet de constater que pour
résoudre cette question les tribunaux s'attachent à discerner
dans l'activité développée par un salarié en vue de
son activité future, les actes effectifs de concurrence,
jugés contraire à l'obligation de non-concurrence, des actes
simplement préparatoires de concurrence dont l'accomplissement
n'est pas interdit. Autrement dit, il est admis que l'obligation de
non-concurrence qui pèse sur le salarié ne fait pas obstacle
à ce qu'il prépare une future activité concurrente de
celle de son employeur à la condition que cette concurrence ne devienne
effective qu'après l' expiration
du contrat de travail, c'est-à-dire à un
moment où l'ancien salarié jouit d'une entière
liberté de concurrence.
En ce sens, la cour de cassation française a
jugé qu'une cour d'appel retient à juste titre qu'après
avoir rappelé « que le salarié, tenu envers
l'entreprise qui l'emploie d'une obligation générale de
non-concurrence, ne peut, pendant la durée du contrat de travail,
exercer une activité concurrente de celle de
l'entreprise », a indiqué « que
cependant il ne lui est pas interdit de préparer dés alors une
telle activité pour la concurrencer soit individuellement, soit au moyen
d'une société, après l'expiration du
contrat ».31(*)
La solution ainsi dégagée par la jurisprudence
est satisfaisante car elle seule permet de sauvegarder les
intérêts légitimes du salarié et notamment, comme
le relève la cour de cassation, la possibilité pour lui
« de se procurer des moyens d'existence après la
rupture de son contrat »32(*) tout en protégeant l'employeur contre toute
concurrence qui développerait ses effets avant l'expiration du contrat
de travail.
Sinon, si la liberté de préparer une
activité concurrente de celle de l'employeur n'était pas reconnue
au salarié qui, par hypothèse, n'est pas lié par une
interdiction de concurrence pour l'après-contrat, cela contraindrait ce
dernier soit à n'envisager et préparer qu'une activité de
remplacement non concurrente, ce qui lui interdirait souvent de mettre en
oeuvre son expérience professionnelle et ainsi le pénaliserait,
soit à ne pouvoir préparer une activité concurrente qu'une
fois le contrat de travail expiré, ce qui priverait alors le
salarié de ressources pendant le temps nécessaire à cette
préparation. Etant précisé qu'en pratique il n'est pas
envisagé en la circonstance que l'hypothèse où le
salarié a le projet d'exercer une activité concurrente dans le
cadre d'une entreprise qu'il crée ou déjà existante et
à laquelle il participera. Le problème en revanche n'a pas de
raison d'être en principe si le salarié désire se
réembaucher dans une entreprise concurrente, aucun temps mort
n'étant alors à redouter.
Par conséquent, la reconnaissance de la
liberté pour les salariés de constituer, pendant qu'ils sont
encore dans les liens de leur contrat de travail, une société
concurrente de l'entreprise qui les emploie est toujours subordonnée par
les tribunaux à l'exigence que cette création ne détermine
aucun acte de concurrence tant que le contrat de travail n'est pas
arrivé à son terme, la formule la plus souvent employée
par la jurisprudence étant : « à la
condition de n'exercer pendant la durée de leur contrat, directement ou
par l'intermédiaire de la nouvelle société, aucune
activité concurrente de celle de leur
employeur ».33(*)
Concernant la période d'application de
l'obligation de non-concurrence du salarié, celle-ci devrait voir son
application coïncider avec celle du contrat et durer tant que le contrat
de travail est en vigueur.
Des difficultés peuvent cependant surgir dans la
détermination du moment exact de l'expiration du contrat de travail,
particulièrement en ce qui concerne l'extrême fin du contrat. Par
ailleurs, pendant l'existence du contrat de travail peuvent survenir des
périodes durant lesquelles, tout en substituant, le contrat de travail
est suspendu et ou peut se poser la question de l'application de l'obligation
de non-concurrence qui pèse sur le salarié.
Les problèmes relatifs au respect de l'obligation de
non-concurrence du salarié surgissent souvent dans la période qui
précède la fin du contrat de travail car une fois le contrat
expiré, le salarié recouvre alors une pleine et entière
liberté de concurrence. Il s'agit donc d'une période
charnière où le risque de concurrence de la part du
salarié est particulièrement élevé et ou, en
conséquence, il est primordial de savoir si l'obligation de
non-concurrence subsiste.
Cette question doit être examinée en distinguant
selon que l'employeur a ou non dispensé le salarié
d'exécuter la prestation de travail pendant la durée du
préavis.
En effet, pendant le préavis de rupture, qu'il s'agisse
d'un licenciement ou d'une démission, les obligations qui
découlent du contrat de travail continuent de produire leurs effets. Il
en résulte que l'obligation de non-concurrence de plein droit à
laquelle est astreint le salarié développe ses
conséquences jusqu'à l'expiration du préavis.
La jurisprudence est en ce sens d'une manière
constante et il a jugé que : toute indemnité doit être
refusée au salarié qui fait concurrence à son ancien
employeur pendant la durée du préavis car « le
contrat de travail subsiste avec toutes les obligations qui en découlent
pour l'une et l'autre partie pendant la durée du
préavis ».34(*)
Aussi faut-il continuer d'admettre cette solution
lorsque l'employeur a dispensé le salarié d'exécuter
le travail pendant le délai-congé ? Après des
hésitations, la jurisprudence avait appliqué dans cette situation
de dispense du travail pendant le préavis la même solution que
celle retenue lorsque le préavis est travaillé,
c'est-à-dire le maintien du contrat de travail et des obligations qui y
sont attachées dont l'obligation de non-concurrence.
Aujourd'hui en droit français le doute n'est plus
permis car l'article L.122-8 C.trav pose le principe selon lequel
« l'inobservation du délai-congé n'a pas, dans ce
cas, pour conséquence d'avancer la date à laquelle le contrat
prend fin ». L'obligation de non-concurrence qui pèse
sur le salarié persiste là encore jusqu'à
l'expiration du préavis.
De manière très orthodoxe certains
arrêts ont statué en ce sens en jugeant par exemple que manque au
respect de l'obligation de non-concurrence le salarié qui, après
démission et dispense de l'exécution du préavis, a
créé une société concurrençant directement
son employeur car « jusqu'à l'expiration du
préavis, peu important qu'il ait été dispensé de
l'exécuter, le salarié était tenu à l'obligation de
non-concurrence envers son employeur ».35(*) Il ya lieu de
préciser que cette solution peut être retenue en droit du travail
sénégalais, dans la mesure où le salarié est tenu
d'observer la clause de non-concurrence instituée dans son contrat en
cas de démission.
Pendant toute la durée du contrat de travail, le
salarié est alors assujetti à une obligation
générale de non-concurrence. Mais cette interdiction n'est pas
absolue dans la mesure où elle peut être assortie
d'aménagements conformément à la volonté des
parties. (B)
B : une interdiction de concurrence
assortie d'aménagements
Le salarié est en principe tenu envers
son employeur, par une obligation générale de non-concurrence
pendant toute la durée de son contrat de travail. Ainsi, il ne lui est
pas permis d'exercer une activité qui pourrait directement ou
indirectement concurrencer son employeur. En effet sans pour autant remettre en
cause les conditions dans lesquelles la clause de non-concurrence a
été élaborée, il est possible de la rendre
inefficace. Tel est le cas lorsque les parties, par un effet de leur
consentement, résilient la clause : ce que le consentement a fait,
le consentement peut le défaire ; rien n'interdit aux parties de
convenir que telle clause n'est désormais plus nécessaire. Outre
cette suppression par accord des parties, il est possible de remettre en cause
la clause de non-concurrence sur simple manifestation de volonté de
l'employeur. C'est la faculté de renonciation.
S'agissant de la suppression de la clause par accord de
volontés des parties, l'hypothèse relève d'une simple
application du droit commun des contrats. Elle procède du principe de
l'autonomie de la volonté. Les conventions collectives de travail
rappellent fréquemment cette faculté : la clause «
pourra être introduite, modifiée ou supprimée par
avenant en cours de contrat, avec l'accord des parties ». Le
seul problème que peut poser cette suppression concerne sa preuve. Le
contrat individuel de travail prévoyait expressément une clause
de non-concurrence ; sa suppression par accord des parties doit
également se réaliser de manière expresse,
conformément à la règle du parallélisme des formes.
Cette exigence est présente dans les dispositions des conventions
collectives prévoyant qu'un avenant au contrat individuel de travail est
nécessaire pour que la suppression puisse s'opérer.
Il faut que le contrat de travail traduise l'état des
relations de l'employeur et du salarié : une obligation de
non-concurrence ne peut exister sans dispositions expresse du contrat de base,
ou d'un avenant, et elle ne peut disparaitre qu'en vertu d'une disposition
expresse faisant l'objet d'un avenant au contrat individuel.
La clause non-concurrence fait naitre, au profit de
l'employeur, le droit d'exiger qu'il respecte son engagement restrictif de
concurrence. Or, comme tout titulaire d'une créance, il peut renoncer au
bénéfice de ce droit. Cette renonciation à l'obligation de
non-concurrence ne présente de difficultés que s'agissant d'une
obligation résultant d'une clause insérée dans un contrat
de travail affectée d'une modalité particulière, le
créancier s'étant engagé à verser une somme en
contrepartie de l'engagement restrictif de concurrence.
Le lien existant entre ces deux prestations est tel qu'il est
de règle que, en cas de méconnaissance de son engagement, le
salarié ne puisse plus prétendre au paiement de
l'indemnité prévue.
C'est la raison pour laquelle nombreux sont les employeurs
qui, afin de se libérer du paiement de cette somme, invoquent la
non-conformité de la clause figurant au contrat individuel afin d'en
obtenir l'annulation donnant ainsi à la jurisprudence l'occasion de
préciser que seul le salarié peut invoquer la
non-conformité de la clause au regard des dispositions de la convention
collective applicable.
Si la voie de la nullité n'est pas ouverte à
l'employeur qui veut se libérer de cette charge, celle de la
renonciation à l'obligation de non-concurrence est utilisable. Or,
l'exercice par l'employeur de la faculté de renonciation à
l'engagement de non-concurrence souscrit par le salarié, va avoir des
répercutions sur l'exigibilité de l'indemnité
compensatrice conventionnellement prévue. Cette somme, en effet, n'a
plus de raison d'être dés lors qu'aucune interdiction de
concurrence ne pèse sur l'ancien salarié, ce dernier ne
subissant pas, dans son activité professionnelle, une restriction telle
qu'il soit nécessaire de « compenser » une perte de
salaire.
Toute renonciation à un droit par le
créancier doit être explicite et non équivoque, mais il est
admis, s'agissant d'une remise de dette, que cette opération, qui n'est
pas formaliste en soi, puisse se réaliser d'une manière tacite.
Ces règles ne sont pas suffisantes ici : la
renonciation à l'obligation de non-concurrence ne peut résulter
que d'une manifestation formelle de volonté de l'employeur,
notifiée au salarié. Le contrat individuel de travail ou la
convention collective applicable exigent parfois le respect d'une forme
déterminée : un écrit, une lettre recommandée
avec demande d'accusé de réception.
La clause de non-concurrence n'est donc pas une disposition
convenue par les parties dans l'intérêt du
salarié-débiteur de non-concurrence. Ce sont les
intérêts de l'employeur-créancier de non-concurrence qui
sont essentiellement pris en compte. La faculté de renoncer à
l'application de la clause de non-concurrence appartient donc exclusivement
à l'employeur-créancier de non-concurrence. Les parties sont
libres, toutefois, de convenir que le salarié devra donner son accord,
exigence qui résulte parfois des conventions collectives. Cette
hypothèse toutefois est rare et peut soulever quelques
difficultés en cas de désaccord.
S'inspirant de la faculté de renonciation,
certaines conventions collectives prévoient la possibilité pour
l'employeur de décider de la suppression de la clause avant toute
cessation du contrat de travail. Il convient, en effet, d'éviter que
cette suppression ne constitue l'instrument d'une fraude aux droits du
salarié. Ce dernier, a droit à une indemnité compensatrice
en cas de renonciation par l'employeur à l'application de la clause de
non-concurrence.
Cette suppression est analogue à celle qui
résulte de l'accord des parties puisqu'ici les parties ont voulu, d'un
commun accord, que cette suppression puisse intervenir
unilatéralement.
L'obligation générale de non-concurrence qui
pèse sur le salarié pendant toute la durée de son contrat
de travail se trouve anéantie à la fin de ce contrat. Ainsi,
après l'expiration du contrat de travail, le salarié est libre de
concurrencer son ancien employeur sous réserve de quelques
exceptions. (parag2)
Paragraphe2 : La
liberté de la concurrence à l'expiration du contrat de travail
sous réserve d'exception
Après l'expiration du contrat de travail, le
salarié se trouve libre pour se mettre au service d'une
entreprise concurrente ou pour s'établir à son compte dans une
même activité que celle de son employeur et en concurrence avec ce
dernier.
C'est la raison pour laquelle le législateur
sénégalais a posé comme principe : la nullité
de plein droit de toute clause interdisant au salarié l'exercice d'une
activité à l'expiration du contrat(A).
Au-delà de ce principe, il a été admis la validité
exceptionnelle des clauses s'imposant au salarié même au terme de
son contrat de travail(B).
A : La nullité de plein droit de toute
clause interdisant l'exercice d'activité concurrentielle à
l'expiration du contrat de travail
Si le salarié, tant que dure la relation de
travail, ne peut concurrencer son employeur puisqu'il lui doit toute son
activité professionnelle, il retrouve sa liberté et son
indépendance à l'expiration du contrat. Par ricochet, la
concurrence exercé par un ancien salarié qui développe
pour son propre compte une activité similaire ou qui se met au service
d'une entreprise concurrente peut être redoutable pour l'ancien employeur
dans la mesure où cet ancien salarié a connaissance des secrets
et du savoir-faire de l'entreprise, de son organisation et de ses
méthodes de gestion ou encore en raison des relations nouées avec
la clientèle.
Pourtant la protection de l'entreprise se situe dans une
perspective radicalement différente pour le temps suivant l'expiration
du contrat de travail de celle qui existait pendant la durée du contrat.
Le principe est alors, en effet, que le salarié
recouvre une pleine et entière liberté de concurrence
après l'expiration de son contrat de travail. Ce principe résulte
du code du travail sénégalais où le législateur
à travers l'article L.35 affirme avec force qu' « est
nulle de plein droit toute clause d'un contrat de travail portant
interdiction pour le travailleur d'exercer une activité quelconque
à l'expiration du contrat... ». Autrement dit, les
clauses d'interdiction à l'expiration du contrat sont en principe
nulles. Cette nullité de plein droit doit être
distinguée de la nullité de droit dans la mesure
où s'il y'a nullité de droit, la juridiction compétente
est tenue de prononcer la nullité de l'acte dés lors qu'elle est
demandée et que l'hypothèse prévue est
réalisée ; il ne peut en apprécier
l'opportunité. La nullité de droit n'est donc pas une
nullité de plein droit qui se produirait sans jugement.
Le fait d'interdire à l'employeur
d'insérer dans le contrat de travail du salarié une clause visant
à empêcher ce dernier de le concurrencer à la rupture du
contrat, amoindrissant ainsi sa liberté de travail, constitue sans nul
doute une « disposition plus favorable » au
salarié.
La liberté de concurrence de l'ancien salarié
à l'expiration du contrat de travail résulte en droit
français d'une importante et constante jurisprudence qui estime que
« la liberté du travail et de la concurrence implique que
le salarié qui retrouve son indépendance à la fin du
contrat de travail soit en droit de s'établir à son propre
compte ; il peut donc concurrencer librement son ancien employeur
dés lors que son comportement n'est pas
déloyal... »36(*)
La jurisprudence affirme donc sans équivoque
qu'après l'expiration du contrat de travail, la sauvegarde de la
liberté du travail et de la liberté de la concurrence doit
l'emporter sur la protection des intérêts de l'entreprise.
L'employeur ne peut plus rien exiger du salarié. Aucune obligation de
non-concurrence de plein droit ne survit à la disparition du contrat de
travail et sauf le cas où la rupture du contrat résulte d'une
faute lourde de celui-ci.
Par conséquent, l'absence de clause de
non-concurrence à l'expiration du contrat de travail ouvrant au
salarié la possibilité de se mettre au service d'une entreprise
concurrente, l'ancien employeur peut être tenté d'entraver cette
liberté soit en essayant d'empêcher cette embauche, soit en
incitant le nouvel employeur à rompre le contrat conclu avec l'ancien
salarié. Dans ces circonstances, la jurisprudence considère que
l'ancien employeur engage sa responsabilité et doit être
condamné à réparer le préjudice subi par son
ancien salarié. En ce sens il a été jugé qu'
« une société a commis une faute à
l'encontre de son ancienne salariée en incitant son nouvel employeur
à licencier celle-ci alors qu'elle ne pouvait ignorer qu'elle ne
pouvait se prévaloir d'aucune clause de non-concurrence à
l'encontre de son ancienne salariée ni rapportée la preuve de
faits soit disant déloyaux invoqués à l'encontre de cette
dernière ».37(*)
Il s'avère nécessaire d'apporter une
précision relativement au contenu de la liberté de concurrence de
l'ancien salarié. Ainsi, après la cessation du contrat de
travail, l'ancien salarié recouvre une totale liberté de
concurrence envers son ancien employeur. En conséquence, il est loisible
à d'anciens salariés de « constituer une
société concurrente » de celle de leur
ancienne entreprise et il ne rêvait pas un caractère illicite, le
fait pour le salarié de constituer une société ayant le
même objet social que son ancien employeur, et d'exercer la même
activité.
L'ancien employeur même s'il subit un préjudice
du fait de l'activité concurrentielle développée par un
ancien salarié, ne peut en principe la critiquer car, la liberté
économique individuelle a pour corollaire la licéité
du dommage concurrentiel : tout préjudice subi par une personne du
fait de la concurrence exercée par une autre, ne peut apparaitre que
comme le résultat du jeu de la libre concurrence ; il ne saurait
donc être fait grief à cette dernière d'avoir su mieux
tirer parti de cette liberté. « Le principe de la
liberté civile permet à chacun, dans la lutte, de montrer ses
talents, la clientèle est à qui sait la prendre ».
Le dommage concurrentiel résultant pour l'ancien
employeur de l'activité de son ancien salarié est donc licite en
soi. Sans doute le salarié profitera-t-il de l'expérience et des
connaissances acquises chez son ancien employeur pour développer sa
nouvelle activité. Tant qu'il n'a recours à des
procédés déloyaux, la concurrence qu'il exerce à
l'encontre de son ancien employeur n'a rien de
répréhensible ; ce dernier ne saurait se plaindre du dommage
qu'il subit de ce fait.
Cependant, pour étendue qu'elle soit, la liberté
de concurrence de l'ancien salarié vis-à-vis de son ancienne
entreprise n'est pas sans bornes, elle connait des limites qui
résideront dans l'observation d'une faute dans l'exercice de la
concurrence. Agissements fautifs qui seront sanctionnés dans le cadre de
l'action en concurrence déloyale car si le législateur
sénégalais proclame la liberté de concurrence de l'ancien
salarié, c'est toujours sous la condition « de ne pas
transgresser les usages loyaux du commerce » ou
« de respecter les usages loyaux du commerce ».
Certes, l'employeur est protégé des
comportements anormaux et blâmables que l'ancien salarié pourrait
être amené à adopter dans l'exercice de cette
activité concurrentielle : ainsi tout agissement contraire à
la loyauté professionnelle, tel qu'un détournement de fichier
clientèle ou un dénigrement, pourrait être
sanctionné par le jeu de l'action en concurrence déloyale. On
n'a pu s'interroger toutefois sur l'incidence que pourrait avoir la prise en
considération de la collaboration passée sur
l'appréciation de la déloyauté imputable à l'ancien
salarié. Ainsi, pour certains auteurs, le passé ne serait-il pas
neutre ; subsisterait, du contrat de travail antérieur, une sorte
d'obligation de modération ou de discrétion incitant l'ancien
salarié à garder quelque réserve dans l'activité
concurrentielle déployée à l'encontre de son ancien
employeur. « L'ombre de l'ancien contrat, ou plus exactement de
l'appartenance du salarié à l'entreprise s'attache à ses
pas ».38(*)
Quelques décisions jurisprudentielles ont semblé reprendre cette
analyse et apprécier d'une manière large la notion de
déloyauté, celle-ci découlant de simples faits
concurrentiels et non de l'établissement de procédés
déloyaux en eux mêmes. A pu être jugé déloyal
le fait, pour d'anciens salariés, de mettre en commun les connaissances
acquises chez l'employeur sur les clients, les fournisseurs et les prix, afin
de pouvoir proposer des conditions plus avantageuses pour des articles
similaires.
Dans le même esprit, la cour de cassation vient de
remettre en cause, semble-t-il, la solution auparavant admise selon laquelle le
démarchage de la clientèle d'un concurrent, même lorsqu'il
est le fait d'un ancien salarié, ne constitue pas en lui-même un
acte de concurrence déloyale.39(*) Cela étant, il convient bien de souligner
que ce qui peut être critiqué ce n'est pas la concurrence de
l'ancien salarié en elle-même (par hypothèse possible et
licite) mais les moyens employés pour l'exercice de cette concurrence
s'ils sont jugés déloyaux.
Comme le relève avec pertinence certains arrêts,
il appartient à l'ancien employeur, pour triompher dans son action en
concurrence déloyale, de prouver que les salariés ont commis,
après la rupture du contrat de travail, « non seulement
des actes de concurrence, ce qui ne leur était pas interdit, mais des
agissements contraires aux usages loyaux du commerce »40(*) ou encore « que
les activités concurrentielles ne peuvent être
considérés comme répréhensibles en
elles-mêmes, que seuls les moyens utilisés peuvent
éventuellement engager la responsabilité de l'ancien
salarié et de son nouvel employeur, s'ils sont
déloyaux ».41(*) C'est de la concurrence elle même
toutefois que l'ancien employeur va souffrir sans que l'ancien salarié
ait eu recours à quelque moyen répréhensible pour capter
la clientèle.
L'ancienne appartenance du salarié à
l'entreprise, la connaissance qu'il a de son organisation, des informations
confidentielles et des secrets ainsi que des relations nouées avec la
clientèle font de l'ancien salarié un concurrent
privilégié dont la déloyauté de la concurrence sera
parfois reconnue plus facilement qu'elle le serait à l'égard d'un
concurrent ordinaire. Pour autant, cela ne doit pas conduire à ce que
la concurrence exercée par d'anciens salariés soit
considérée comme déloyale du seul fait de leur ancienne
qualité mais il est difficile de faire totalement abstraction de ce que
l'ancien salarié n'est pas un concurrent comme un autre. De ce fait,
c'est entre ces deux considérations qu'oscille une jurisprudence toute
en nuances qui cependant, ces dernières années, évolue
dans le sens d'une reconnaissance de plus en plus entière de la
liberté de concurrence de l'ancien salarié.
Si la liberté de l'ancien salarié est
incontestable, force est de constater, toutefois, qu'une certaine mesure doit
être respectée par lui dans l'exercice de son activité
concurrentielle par rapport à son ancien employeur. Ainsi le poids des
relations passées est tel qu'un comportement qui, de la part d'un autre,
passerait pour normal et licite, risque d'être considéré
comme déloyal parce que provenant d'une concurrence trop agressive et
acharnée de la part d'un ancien collaborateur. Sous cette réserve
donc, l'ancien salarié peut librement concurrencer son ancien employeur
à la rupture du contrat de travail. Et, faute de pouvoir reprocher au
salarié une concurrence déloyale, l'ancien employeur ne peut que
supporter les désagréments que la concurrence de ce dernier lui
occasionne. A cet effet, à la différence du droit
sénégalais, le droit français, donne la possibilité
à l'employeur d'éviter une telle situation ; par
conséquent, ce dernier peut insérer dans le contrat de
travail une clause interdisant au salarié, après la cessation du
contrat, d'exercer une activité concurrente.
La consécration de la nullité de plein droit de
toute clause d'un contrat de travail portant interdiction pour le travailleur
d'exercer une activité concurrente à l'expiration du contrat,
n'est pas sans réserve. (B)
B : La validité exceptionnelle des
clauses interdisant l'exercice d'activité concurrentielle
L'obligation de non-concurrence résultant de
la clause insérée dans un contrat de travail s'applique-t-elle
quelle que soit la cause de la rupture de ce dernier ? Pour éviter
toute difficulté, le législateur sénégalais a
déterminé avec précision l'étendu de la clause
à cet égard.
De surcroit, la clause ne s'impose au travailleur que si la
rupture du contrat résulte d'une démission ou d'un licenciement
pour faute lourde de sa part. La jurisprudence sénégalaise se
montre assez stricte sur ce point et refuse toute efficacité à la
clause si le contrat (à durée déterminée)
prend fin par la survenance du terme, ou par un licenciement qui n'est pas
motivé par une faute.42(*)
Il faut toutefois relever, ici encore, l'incidence des
conventions collectives de travail : ce que la négociation
individuelle ne peut pas faire, la négociation collective, parfois, le
permet. Ainsi certaines conventions collectives, afin de protéger le
salarié et lui éviter une interdiction de concurrence que
l'intérêt de l'employeur ne justifierait pas pleinement,
limitent-elles le jeu de la clause éventuellement insérée
dans le contrat individuel aux seuls cas qu'elles prévoient. Ainsi,
« une convention restrictive de la liberté du travail
après la résiliation du contrat ne pourra être valable
qu'à condition d'être limitée au seul cas de
démission et de licenciement pour faute
lourde ».43(*)
La démission est alors, une manifestation de la
volonté d'abandonner une fonction ou un emploi. Un salarié peut
à tout moment reprendre sa liberté en mettant fin à un
état de subordination estimé désormais par lui
insupportable. Il n'a pas à motiver sa décision, la
volonté de recouvrer sa pleine liberté d'action étant elle
même un motif suffisant. La volonté du salarié, à la
supposer non équivoque, ne vaudra pas démission lorsqu'elle n'a
pas été émise librement. La jurisprudence requalifie la
décision du salarié en licenciement chaque fois que le
salarié a été contraint à la démission par
le comportement fautif de l'employeur.
Mais, il est rare que soit mise en cause la
responsabilité contractuelle du salarié à l'égard
de son employeur. Le plus souvent, lorsque le salarié manque à
ses obligations contractuelles, l'inexécution ou la mauvaise
exécution ne sont envisagées que comme cause réelles et
sérieuse justifiant le licenciement : le salarié est
licencié, ce licenciement est justifié, l'employeur n'en demande
pas davantage.
S'il prétend en outre obtenir des
dommages-intérêts, c'est plutôt, d'ailleurs, sur la base de
la responsabilité délictuelle, à raison de fautes commises
à l'occasion de la rupture du contrat (démissions abusives) ou
postérieures à cette rupture.
La responsabilité contractuelle du salarié est,
au demeurant, soumise à des conditions particulièrement
restrictives : elle suppose que le salarié ait commis une faute
lourde. La jurisprudence se réfère explicitement au
« principe selon lequel la responsabilité du
salarié n'est engagée envers son employeur qu'en cas de faute
lourde ». Les fautes susceptibles d'être reprochées
au salarié se rangent en diverses catégories en fonction de
leur degré de gravité ; la faute lourde se situe
certainement au sommet de cette hiérarchie : elle est plus grave
que la faute grave.
Le législateur, en posant comme principe la
liberté de la concurrence à l'expiration du contrat de travail du
salarié n'omet pas de prévoir une exception à la
règle. Ainsi, le salarié est tenu d'observer la clause de
non-concurrence nonobstant l'expiration de son contrat dans le cas où
la rupture lui est imputable ou résulte d'une faute lourde de sa
part.
On observe en outre que la validité par la loi des
interdictions contractuelles de concurrence intervient uniquement en cas de
rupture par démission, ce qui constitue une atteinte à la
liberté de démissionner, ou en cas de licenciement pour faute
lourde, ce qui fait de la clause, non pas un instrument fondé sur la
protection de l'entreprise, mais une sanction supplémentaire
imposée au salarié fautif.
Le salarié fautif ou démissionnaire supporte
une interdiction de concurrence à l'égard de l'ancien employeur
qu'il respecte ou méconnait. L'obligation de non-concurrence doit
être respectée par l'ancien salarié de même que tout
nouvel employeur.
Cependant, en droit du travail français,
même en cas de licenciement pour motif économique, l'ancien
salarié est tenu de l'obligation de non-concurrence. Selon une partie de
la doctrine « si le chef d'entreprise a résilié
irrégulièrement le contrat à durée
indéterminée, cela veut dire que le rapport de travail n'aurait
normalement pas dû s'éteindre et que, en conséquence,
l'obligation de non-concurrence n'aurait pas dû naitre. Le salarié
licencié abusivement ou contraint à démissionner ne peut
donc être tenu d'assumer son engagement ». Cette analyse avait
été en un premier temps, retenue par la jurisprudence. Mais la
cour de cassation devait affirmer, en 1974, un principe nouveau, auquel elle
s'est tenue jusqu'à présent : « si les conditions
abusives dans lesquelles (l'employeur) avait mis fin au contrat étaient
susceptibles d'entrainer la réparation du préjudice en
résultant pour le salarié, elles ne dispensaient pas par
elles-mêmes les parties de l'exécution des obligations
découlant de leur convention. Dés lors que la clause est
conçue en termes généraux, l'obligation de non-concurrence
qui en résulte doit s'appliquer après la rupture du contrat de
travail, qu'elle qu'en soit la cause et même si elle est entachée
d'irrégularité. Lorsque les parties désirent limiter
l'application de l'engagement restrictif de concurrence aux seuls cas de
démission ou de licenciement pour faute grave, par exemple, elles
doivent l'indiquer expressément.
Le « devoir » ainsi mis à la
charge du nouvel employeur ne sera invoqué qu'en cas de violation par le
salarié de son obligation de non-concurrence : c'est à ce
moment-là que l'on pourra en appeler à une méconnaissance
par le nouvel employeur de son devoir, afin de sanctionner, le cas
échéant, son comportement. C'est donc le problème de la
sanction du non-respect de l'obligation de non-concurrence qui est ici
posé. (section2)
SECTION2 : sanctions de la violation des clauses
de non-concurrence
Un salarié, assujetti à l'obligation de
non-concurrence envers son employeur peut voir sa responsabilité mise en
oeuvre en cas de non respect d'une telle obligation. Autrement dit, le
salarié encoure diverses sanctions du fait de la violation d'une clause
de non-concurrence légalement instituée dans son contrat de
travail. (parag1) Aussi le débauchage d'un
salarié soumis à une obligation de non-concurrence
présente-t-il des risques considérables pour le nouvel employeur
qui peut voir sa responsabilité engagée envers l'ancien
employeur. (Parag 2).
Paragraphe 1 : les sanctions encourues par le
salarié
Le salarié, auteur de la violation d'une clause de
non-concurrence, insérée dans son contrat de travail peut
être condamné au paiement de
dommages-intérêts(A) en plus de la perte de son
droit à la contrepartie pécuniaire prévue
(B).
A : La condamnation du salarié au paiement de
dommages-intérêts
D'origine volontaire parce que expressément
prévue par une clause de non-concurrence ou d'origine légale
parce que comprise comme contenue dans la réglementation légale
d'un contrat, l'obligation de non-concurrence est une obligation contractuelle
et devrait obéir aux règles qui gouvernent tant les conditions de
mise en oeuvre des sanctions d'une obligation contractuelle que les
conséquences qui s'attachent à la violation d'une telle
obligation.
Créancier d'une obligation de résultat, le
créancier de non-concurrence n'a pas à prouver la faute du
débiteur de non-concurrence, celle-ci résulte de
l'inexécution même de l'obligation de non-concurrence. La
prestation due par le débiteur de non-concurrence consiste en une
inaction, une abstention. S'il agit dans le domaine qui lui est interdit, il
viole alors son obligation de ne pas faire et commet par là une
faute.
L'acte de concurrence qui réalise la violation de
l'obligation de non-concurrence est celui qui sollicite la clientèle du
créancier de non-concurrence. Peu importe que l'action concurrentielle
débouche sur la réalisation effective de la vente d'un produit ou
de la fourniture d'un service. Autrement dit, ce qui constitue essentiellement
la transgression de l'obligation de non-concurrence réside dans le fait
pour son débiteur de se mettre en situation de
concurrence avec le créancier de non-concurrence dans les
limites d'espace et de temps prohibées et cela en exerçant une
activité concurrente pour son propre compte ou pour le compte
d'autrui.
Si le créancier de non-concurrence n'a pas à
démontrer la faute du débiteur de non-concurrence, celle-ci
résultant de l'inexécution de l'obligation de non-concurrence, il
doit en revanche rapporter la preuve de cette inexécution.
La preuve de la violation de l'obligation de non-concurrence
peut se faire par tous les moyens, notamment par témoins puisqu'il
s'agit d'un fait juridique et cela même si ce fait consiste dans la
conclusion d'un acte juridique, d'un contrat de travail par exemple.
Ainsi, les conventions collectives qui prévoient une
obligation de non concurrence, généralement assortie d'une
contrepartie pécuniaire, envisagent fréquemment les
conséquences d'une inexécution par l'une ou l'autre partie. En
effet, une lecture des dispositions de l'article 17 de la convention
collective interprofessionnelle ainsi que celles de l'article L-35 du code du
travail sénégalais, régissant l'existence des clauses de
non- concurrence dans les contrats de travail, ne permet pas de déceler
de manière précise les sanctions que peut risquer un
salarié, auteur de la violation d'une obligation de non- concurrence
licite. Il n'en demeure pas moins qu'une telle violation est
sanctionnée par le juge sénégalais.
Par ailleurs, le salarié qui viole l'obligation de
non-concurrence s'expose donc à diverses sanctions. Le salarié
responsable d'une telle violation peut par ailleurs être condamné
à réparer le préjudice subi par son ancien employeur et se
voir interdire par le juge, éventuellement sous astreinte, et même
en référé de poursuivre son activité ou même
ordonner la fermeture de l'entreprise ouverte en violation de la clause.
Très souvent, l'employeur se garantie contre le non-respect de la clause
de non-concurrence par le travailleur au moyen d'une clause pénale
l'assurant d'une indemnité forfaitaire.
La cour d'appel, dans une de ces décisions, a
estimé que le non respect de la clause de non- concurrence par le
salarié l'expose au paiement de dommages-intérêts pour la
réparation du préjudice effectivement subi par
l'employeur. Elle a donc considéré
que : « la condamnation du travailleur à payer
à l'employeur un franc symbolique pour la réparation du
préjudice effectivement subi n'est pas justifiée si le
préjudice est réel et important »44(*)
Le droit du travail considère la violation d'une clause
de non-concurrence par le salarié pendant la durée de son contrat
de travail comme étant un motif de licenciement pour faute lourde. Il
y'a lieu de rappeler qu'en droit du travail sénégalais, la clause
de non- concurrence ne s'impose au travailleur que si la rupture du contrat de
travail résulte d'une démission ou d'un licenciement pour faute
lourde de sa part. Dans ces conditions, le salarié est alors tenu
d'observer l'obligation de non-concurrence et en cas de manquement à
cette obligation, l'employeur est en droit de lui réclamer des
dommages-intérêts en réparation du préjudice
causé. L'employeur, victime d'un tel préjudice, peut
demander en justice d'une part, l'exécution en nature de son obligation
et d'autre part, une exécution par équivalent c'est-à-dire
la condamnation du débiteur de l'obligation de non-concurrence à
lui verser des dommages-intérêts. En outre, il peut aussi se
prévaloir de l'exception d'inexécution ou demander la
résolution ou la résiliation pure et simple du contrat de
travail.
Dans certains contrats lorsque le débiteur de
non-concurrence ne respecte pas son engagement, le créancier de
non-concurrence peut mettre en oeuvre la faculté reconnue au
créancier d'une obligation inexécutée qui lui permet de
suspendre l'exécution de ses propres obligations à laquelle
prétendrait son cocontractant. En ce sens, il a été
jugé que l'exploitation par le vendeur d'un fonds de commerce dans les
conditions prohibées par une clause de non-concurrence permet à
l'acquéreur de suspendre le paiement du prix sans s'exposer pour autant
à une action en résolution de la part du vendeur.45(*)
Aussi, en application du droit commun des contrats, le
créancier d'une obligation de non-concurrence inexécutée
peut, dans certaines hypothèses, poursuivre et obtenir
l'anéantissement du contrat dont cette obligation de non-concurrence
constitue un élément.
La sanction de la violation de l'obligation de non-concurrence
inexécutée peut tout d'abord résider dans la
décision unilatérale du
créancier de non-concurrence de mettre fin au contrat. La violation de
l'obligation de plein droit dont est tenu le salarié pendant la
durée du contrat de travail constitue toujours une faute dans laquelle
la jurisprudence voit une cause réelle et sérieuse de
licenciement.
Autrement dit, la résolution entrainant
l'anéantissement rétroactif du contrat, le juge en la
prononçant ne peut, en même temps, ordonner l'exécution
d'obligations qui étaient contenues dans le contrat résolu. Comme
l'indique l'article 1184 C.civ dans son deuxième alinéa, le
créancier de l'obligation inexécutée se voit offrir le
choix entre deux possibilités : l'exécution forcée ou
la résolution mais l'une est exclusive de l'autre.
On peut pourtant se demander si cette solution doit toujours
recevoir application en ce qui concerne la clause de non-concurrence. Ainsi,
M.M. Weill et Terré, après avoir indiqué que le contrat
résolu est privé d'effet pour l'avenir, remarquent-ils :
« certaines clauses du contrat sont toutefois maintenues pour
l'avenir, précisément celles qui étaient relatives
à la cessation du contrat, par exemple la clause stipulant que
l'ouvrier, après la rupture de son contrat, ne pourra se faire embaucher
chez un concurrent »46(*)
Concernant l'exécution en nature,
malgré la règle posée par l'article 1142 du code civil
français selon laquelle « toute obligation de faire
ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas
d'inexécution de la part du débiteur», les juges
décident qu'un employeur peut obtenir en justice la condamnation du
salarié à cesser immédiatement tout acte de concurrence
vis-à-vis de son ancien employeur, éventuellement sous astreinte.
Le salarié sera condamné à démissionner de son
nouvel emploi.
Soucieux de faire respecter sans délai l'obligation de
non-concurrence, l'ancien employeur saisit le plus souvent le juge des
référés qui est compétent pour ordonner les mesures
conservatoires ou de remises en l'état qui s'imposent (il peut
statuer « même en présence d'une contestation
sérieuse ». Selon l'objet de la demande, celui-ci
ordonnera au salarié de cesser de travailler pour le compte du nouvel
employeur ou à l'employeur de « cesser tout
emploi » du salarié.47(*)
Cependant, ce droit pour l'employeur d'obtenir
l'exécution en nature de l'obligation de non-concurrence est reconnu
avec une particulière netteté. La cour de cassation
décide, en effet, que les juges du fond n'ont pas le choix d'ordonner
ou de ne pas ordonner la rupture du contrat de travail qui a été
conclu en violation d'une clause de non-concurrence. Lorsque le
créancier de l'obligation de non-concurrence formule une telle demande,
le juge doit ordonner cette rupture. Il ne peut pas, au motif qu'il condamne le
salarié à verser une indemnité à l'employeur en
réparation du préjudice causé par la violation de la
clause, débouter l'employeur d'une demande d'exécution en
nature.48(*)
Cette solution révèle non seulement que le juge
du fond est contraint d'ordonner l'exécution en nature de l'obligation
de non-concurrence lorsque celle-ci est licite et que l'exécution en
nature est demandée par le créancier, mais également que
la condamnation à une réparation par équivalent ne fait
pas obstacle à une exécution en nature. Le caractère
continu de l'obligation de non-concurrence explique ce cumul de sanctions. Il
s'ensuit que la réparation par équivalent permet de
réparer le préjudice qui a été subi par l'employeur
du fait de la violation de la clause, mais cette réparation ne
protège pas l'ancien employeur contre les nouveaux actes de concurrence
que le salarié peut encore commettre. Seule l'interdiction sous
astreinte de continuer l'exercice de l'activité prohibée assure
le plein respect de l'engagement souscrit par le salarié.
Le recours à l'exécution forcée en nature
suppose, en effet, qu'il s'agisse là du moyen le plus adéquat
pour réparer les conséquences préjudiciables
résultant de la violation de l'obligation conventionnelle. Il ne s'agit
pas d'ordonner une sanction disproportionnée au regard du
préjudice subi : ainsi pourrait-on s'interroger sur
l'opportunité de la décision de fermeture de l'entreprise
concurrente indument créée par l'ancien salarié, alors que
cette fermeture priverait d'emploi plusieurs personnes.
Il appartient au juge saisi de l'affaire de décider de
l'exécution forcée en nature de l'obligation de non-concurrence.
Ainsi, doit-il rejeter toute demande en ce sens dés lors qu'il est
établi que le créancier de l'obligation de non-concurrence ne
fait valoir aucun intérêt justifiant le prononcé d'une
telle mesure. Tel est le cas s'il a cessé son activité
professionnelle ; il n'est pas légitime, dans cette
hypothèse, d'ordonner au débiteur de cesser l'activité
concurrentielle litigieuse.
Par conséquent, le cumul d'une exécution en
nature et d'une exécution par équivalent est écarté
en droit du travail lorsque la clause de non-concurrence contient une clause
pénale en cas de violation par le salarié de son obligation de
non-concurrence. Ce n'est là une application de l'article 1229 du code
civil aux termes duquel le créancier « ne peut
demander en même temps le principal et la peine, à moins qu'elle
n'ait été stipulé pour le simple retard ».
Pour le professeur Y. Serra, cette conception n'a qu'une portée
limitée, car cet article n'est pas un texte d'ordre public. Les parties
contractantes peuvent donc tout en insérant une clause pénale
dans le contrat de travail, préciser que le versement de
l'indemnité forfaitaire convenue n'ôte pas à l'employeur le
droit de faire cesser la violation de l'obligation de non concurrence.49(*)
S'agissant de l'exécution par
équivalent, pour que le salarié soit condamné à
payer des dommages-intérêts à l'employeur, il faut que ce
dernier rapporte la preuve du préjudice subi. Par application des
règles du droit commun, le montant des dommages et
intérêts correspond à l'importance de celui-ci, les juges
du fond étant souverain pour apprécier la valeur du
préjudice subi par l'employeur. En cas d'action en concurrence
déloyale fondée sur un détournement de clientèle,
l'ancien salarié pourra être condamné à
réparer le manque à gagner de l'ancien employeur.
Ainsi, l'évaluation des juges du fond du
préjudice est, dans ces conditions, difficilement prévisible, et
les employeurs préfèrent souvent fixer forfaitairement le
montant de l'indemnité qui sera due en cas de violation de l'obligation
de non-concurrence par le salarié, en insérant dans le contrat de
travail une clause pénale. Malgré la force obligatoire du
contrat, les juges peuvent modérer la peine qui a été
convenue si elle est excessive comme ils peuvent d'ailleurs l'augmenter si elle
est manifestement dérisoire.
Dans un arrêt du 13 décembre2000, la cour de
cassation a refusé de réduire le montant de la clause
pénale.... En l'espèce, la clause pénale prévoyait
le versement de 2ans de salaire en cas de violation de la clause. Le
salarié avait fait établir par expertise que le préjudice
réel était bien inferieur. Peu importe, dit la
C.cass, « le montant de la clause pénale n'est pas
nécessairement égal à celui de la réparation du
préjudice résultant de l'inexécution d'une clause
contractuelle »50(*)
Il a été aussi précisé que
si la clause de non-concurrence est illicite, l'employeur peut toutefois
obtenir réparation du préjudice subi du fait du comportement
déloyal de son ancien salarié postérieurement à la
rupture des relations contractuelles. A défaut d'une clause
pénale, le salarié peut être condamné à des
dommages et intérêts au profit de son ancien employeur, dont le
montant est laissé à l'appréciation du juge.
Hormis les dommages-intérêts, le salarié
fautif verra son droit à l'indemnité de non-concurrence
anéanti (B).
B : la suppression du droit à
l'indemnité de non-concurrence
L'existence d'une indemnité compensatrice de
l'obligation de non-concurrence n'est pas, de façon
générale, une condition de validité de la clause de
non-concurrence, mais nous avons déjà eu l'occasion de le
mentionner, les conventions collectives et les contrats individuels de travail
prévoient très souvent l'existence d'une telle
indemnité.
Cependant, la violation de la clause de non-concurrence par un
salarié entraine donc la suppression de son droit à
l'indemnité. Puisqu'il ne respecte pas l'engagement qu'il avait
souscrit, il ne peut évidemment pas prétendre à
l'indemnité qui a pour but de compenser les inconvénients
résultant de la limitation apportée à sa liberté de
travailler.51(*)
Ce qui est plus original, c'est que le salarié ne peut
plus prétendre au versement d'une indemnité mensuelle de
non-concurrence si, après avoir violé son engagement, il cesse de
concurrencer son ancien employeur. La violation, même
passagère, de l'obligation de non-concurrence fait perdre au
salarié l'intégralité de l'indemnité de
non-concurrence. Dés lors qu'il s'y soustrait, il perd tout droit
à l'indemnité convenue. Peu importe qu'il ait respecté
pendant quelques semaines ou quelques mois la clause de non-concurrence :
la contrepartie pécuniaire est attachée à un respect total
des engagements pris ; leur méconnaissance partielle l'exclut pour
le tout. Si l'indemnité de non-concurrence a déjà
été versée à l'intéressé, il doit en
restituer le montant.
Le créancier de l'engagement de non-concurrence peut
également essayer d'en obtenir le respect par le jeu d'astreintes
conventionnelles dont le principe et le montant ont été par
avance arrêtés dans l'accord initial, ou d'astreintes judiciaires,
le cas échéant demandées en
référé.
En revanche, si le salarié commence par respecter
l'obligation de non-concurrence avant de la violer, il a droit à
l'indemnité pour toute la période pendant laquelle il a tenu son
engagement. Elle est aussi due en partie si le
salarié commence par respecter la clause puis, constatant l'absence
totale de paiement de la contrepartie par son ancien employeur, il l'enfreint
alors qu'elle court toujours. Pour les juges, l'indemnité de
non-concurrence doit être évaluée proportionnellement
à la période pendant laquelle le salarié a respecté
l'interdiction. Cette position n'est pas nouvelle52(*), mais c'est la première
fois qu'elle l'adopte lorsque le non-respect de son obligation par le
salarié était consécutif à l'absence de versement
de l'indemnité par l'employeur. Cette solution admet
implicitement que l'indemnité compensatrice de la clause de
non-concurrence s'acquiert mois par mois pendant toute la durée de la
clause53(*). Cette
position tient au fait qu'il s'agit d'une obligation issue du contrat de
travail, et qui continue de s'appliquer après la rupture de ce
dernier. À ce titre, l'indemnité a la nature d'un salaire, et
son versement doit s'interrompre dès que le salarié
n'exécute plus son obligation. La somme versée par l'employeur
vient rémunérer le salarié en contrepartie du respect de
la prohibition54(*).
En résumé, le salarié qui manque
à son obligation de non-concurrence perd définitivement son
droit à indemnité. De surcroit, il peut se voir condamné
à rembourser la contrepartie pécuniaire qu'il avait indument
perçue sous forme d'une augmentation de salaire durant
l'exécution du contrat de travail.
A l'instar du salarié, auteur de la violation d'une
obligation de non-concurrence, le nouvel employeur peut voir sa
responsabilité engagée dans certains cas. (Parag
2)
Paragraphe 2 : les sanctions encourues par le
nouvel employeur
Le contentieux relatif à l'obligation de
non-concurrence a fourni de nombreuses occasions aux tribunaux pour
élaborer la théorie générale du tiers complice de
la violation d'une obligation contractuelle. Le nouvel employeur ayant
engagé un salarié tenu par une clause de non-concurrence peut
voir sa responsabilité être engagée sur le fondement de la
concurrence déloyale (A) et ainsi être
condamné en paiement de
dommage-intérêts(B).
A : Engagement de la responsabilité du nouvel
employeur pour concurrence déloyale
Très souvent, en effet, le débiteur de
non-concurrence viole son obligation en contractant avec un tiers, employeur,
ou encore en exerçant l'activité prohibée par
l'intermédiaire d'un prête-nom ou à travers une
société concurrente ou en se réembauchant dans une telle
entreprise.
Dans cette hypothèse, une jurisprudence
française constante sanctionne le tiers qui se rend ainsi complice de la
violation de l'obligation de non-concurrence en le condamnant pour concurrence
déloyale et cela en application du principe selon lequel
« toute personne qui, en connaissance de cause, aide autrui
à enfreindre les obligations contractuelles pesant sur elle, commet une
faute délictuelle à l'égard de la victime de
l'infraction. »55(*)
La liberté qu'à un employeur de faire des
prépositions d'emploi aux salariés appartenant à des
entreprises concurrentes trouve cependant des limites dans le cadre des
dispositions relatives au débauchage fautif ainsi que dans celui de
l'action en concurrence déloyale.
Lorsque la concurrence déloyale est constituée
par l'embauchage d'un salarié lié par une clause de
non-concurrence, l'ancien employeur peut exercer non seulement une action
contractuelle dirigée contre le salarié, pour non respect de ses
obligations, mais aussi une action délictuelle cette fois contre le
nouvel employeur. Le nouvel employeur peut alors voir sa responsabilité
engagée envers le précédent.
Ainsi, aux termes de l'article L 57 C. travail, si
un salarié a rompu abusivement son contrat de travail et engage à
nouveau ses services, le nouvel employeur est solidairement responsable du
dommage causé à l'employeur précédent dans les cas
suivants :
ü s'il est démontré qu'il est intervenu
dans le débauchage ;
ü s'il a embauché un salarié qu'il savait
déjà lié par un contrat de travail ;
ü s'il a continué à occuper un
salarié après avoir appris que celui-ci était encore
lié par un contrat de travail.
Dans ce cas, la responsabilité du nouvel employeur
cesse si, au moment où il a été averti, le contrat de
travail abusivement rompu par le salarié était venu à
expiration soit, s'il s'agit d'un contrat à durée
déterminée par l'arrivée du terme, soit s'il s'agit d'un
contrat à durée indéterminée par l'expiration du
délai-congé ou si un délai de 15 jours s'était
écoulé depuis la rupture du contrat.
Le nouvel employeur est considéré comme
étant complice s'il connaissait l'existence de l'engagement, même
s'il ne l'a appris qu'après l'embauche. On peut semble-t-il affirmer
aujourd'hui que le moment où le tiers a connaissance de l'obligation de
non-concurrence à la violation de laquelle il participe est
indifférent, la seule réserve étant cependant qu'il est
nécessaire que cette connaissance ait lieu pendant la durée
d'application de l'interdiction de concurrence.
La cour de cassation française a même admis la
responsabilité de l'employeur qui s'était abstenu de
procéder à des vérifications56(*). Toutefois, le nouvel
employeur ne commet aucune faute si, dés qu'il a eu connaissance de la
clause, il procède à la mise en pied conservatoire du
salarié et aménage le contrat de travail de façon à
respecter cette clause.
Par conséquent, le salarié qui dissimule
sciemment à son nouvel employeur l'existence d'une clause de
non-concurrence commet une faute grave ne permettant plus son maintien dans
l'entreprise pendant le préavis, en raison notamment des
conséquences qu'une telle faute pouvait entrainer pour le nouvel
employeur. Une telle faute justifie aussi la rupture anticipée d'un
contrat à durée déterminée. Il importe peu que la
clause de non-concurrence ait une faible portée pratique. Le
législateur sénégalais, à la lumière de
l'article L-57 C.trav, sanctionne le débauchage fautif en disposant
que « l'employeur n'est pas autorisé à
engager un travailleur encore sous contrat avec un autre.» ce
débauchage est formellement interdit en raison de considération
d'ordre moral. D'ailleurs, il est réprimé tant sur le plan
pénal que civil : « sont passibles d'une amende
de 500 mille à 1millon de franc et d'un emprisonnement de trois mois
à un an, tout employeur, fondé de pouvoir ou
préposé qui aura engagé ou tenter d'engager ou conserver
dans son service un travailleur encore lié à un autre
employeur par un contrat de travail. » L'interdiction vaut aussi
bien pour les apprentis liés à un contrat d'apprentissage que
pour les stagiaires en cours de formation professionnelle.
Le délit n'est établi que si le travailleur a
rompu abusivement sa relation de travail soit sur instigation de l'employeur,
soit en dehors. Dans cette dernière hypothèse, l'employeur n'est
incriminable que s'il a embauché le salarié alors qu'il le savait
lié encore à un autre employeur ou si après l'avoir appris
il continu à l'occuper.
Il ressort des termes de cet article que pour que la
responsabilité du second employeur puisse donc être retenue
à l'égard du premier, il est nécessaire, d'une part, qu'il
y ait rupture abusive du premier contrat par le salarié et, d'autre
part, qu'il y ait provoqué la rupture anticipée abusive ou l'ait
connue au moment ou postérieurement au débauchage.
Il s'avère nécessaire de préciser que
lorsque la violation de la clause est caractérisée, le
salarié s'étant fait embaucher au service d'une entreprise
concurrente, l'employeur n'a pas à justifier d'un préjudice
actuel et certain. Il n'est pas non plus nécessaire pour
caractériser la violation de la clause qu'un acte de vente ait
été conclu ou que des actes de concurrence soient
consommés.
Si la clause de non-concurrence prévoit une
interdiction de s'intéresser ou de collaborer directement ou
indirectement à une société concurrente, la
diversité aurait permis de confier au salarié un travail sans
relation avec ses anciennes activités importent peu.57(*)
Il a été aussi jugé qu'un salarié
qui s'engage à ne pas reprendre contact avec les clients de son
ancien employeur en vue de leur proposer une affaire s'interdit d'entrer en
relation de quelque manière que ce soit avec ses clients, même si
des clients se sont spontanément présentés à lui
pour faire appel à ses services.58(*)
En effet, recruter le personnel d'une entreprise concurrente
pour s'approprier son savoir faire et sa clientèle, le principe est
admis. Mais il peut être qualifié de concurrence déloyale
si l'ancien employeur démontre qu'il a subi un préjudice, a
fortiori lorsque le salarié est tenu par une clause de
non-concurrence. Ainsi, une entreprise avait envoyé aux salariés
d'un concurrent une lettre circulaire dans laquelle elle leur proposait un
embauchage et s'engageait implicitement à prendre en charge les frais de
procédure résultant des poursuites éventuelles de l'ancien
employeur. Pour les juges, il s'agissait d'une incitation déloyale
à quitter leur emploi.59(*)
L'action en concurrence déloyale dirigée contre
le nouvel employeur qui a embauché un salarié lié par une
interdiction de concurrence est recevable nonobstant l'existence d'une action
contractuelle de l'ancien employeur contre ce salarié et alors que ces
deux actions, l'une délictuelle, et l'autre contractuelle, qui tendent
à la réparation d'un préjudice différent, peuvent
se cumuler.60(*)
La responsabilité du nouvel employeur dans ce cas est
la responsabilité délictuelle du tiers complice de la violation
d'une obligation contractuelle.
L'étude de la jurisprudence française sur la
question révèle en effet, que les juges recherchent, dans chaque
affaire, si le débauchage s'accompagne de circonstances
particulières susceptibles de caractériser un acte de concurrence
déloyale.
Comme le souligne le professeur Y. Serra, «
les tribunaux s'appuient sur diverses considérations telles que la
manière dont le débauchage s'est réalisé : sur
incitation ou pas du nouvel employeur et, si plusieurs salariés sont
concernés, selon que les départs ont eu lieu successivement ou
simultanément, l'importance du personnel débauché
comparée à l'ensemble du personnel de l'entreprise
considérée, la qualification professionnelle de ce même
personnel : plus celle-ci est élevée, plus la
désorganisation de l'entreprise sera plausible et inversement ; ou
enfin, le fait que le débauchage a été effectué
afin d'obtenir la connaissance des secrets de l'entreprise
délaissée. »
Ainsi, il a été considéré que
l'embauchage simultanée de plusieurs salariés d'une même
entreprise par une entreprise concurrente pour y remplir les mêmes
fonctions et ou après avoir offert des conditions de
rémunération plus favorables constitue, indépendamment de
toute clause de non-concurrence, un acte de concurrence déloyale.
61(*)
Doit également être condamnée, du fait de
ses actes de concurrence déloyale, une société qui avait
embauché simultanément la moitié du personnel d'une autre
société, soit 7 sur 14, cette société ne pouvait
ignorer la complète désorganisation de sa rivale qui devait
nécessairement résulter de l'ampleur de ce transfert de
salariés.62(*)
En revanche, il a été jugé que
n'était pas constitutif d'un acte de concurrence déloyale, le
fait pour une société d'avoir embauché plusieurs
salariés précédemment au service d'une
société concurrente, ces embauchages ayant eu lieu à la
suite soit de petites annonces parues dans la presse locale, soit sur
l'initiative de salariés qui s'étaient adressés
spontanément au nouvel employeur.63(*)
Certaines décisions considèrent qu'il y a
manoeuvre de désorganisation de l'entreprise lorsqu'un concurrent offre
des conditions de rémunération plus favorables aux
salariés de cette entreprise.64(*) Le débauchage peut désorganiser
l'entreprise à cause du nombre de salariés concernés ou de
leur qualification.
Pour les juges, le démarchage de la
clientèle d'un concurrent est punissable dés lors que des moyens
déloyaux sont utilisés. C'est notamment le cas de la prospection
systématique des clients du concurrent. Il en va de même pour les
manoeuvres déloyales qui consistent à se présenter
faussement comme envoyé par le concurrent pour faire des propositions
aux clients de celui-ci.
Les juges admettent que le départ d'un salarié
vers une nouvelle entreprise peut entrainer un déplacement de
clientèle non fautif. Seule condition : qu'aucun
procédé déloyal n'ait été utilisé.
Une entreprise n'a pas de droit privatif sur ses clients. La manoeuvre de
détournement doit être clairement établie. La jurisprudence
révèle de ce fait trois catégories de débauchage
fautif : le débauchage massif ou systémique de
salarié du concurrent, le débauchage concerté
révélé par le départ simultané de plusieurs
salariés stratégique pour le concurrent, et le débauchage
sélectif en vue de détourner le savoir faire du concurrent.
Concernant la mise en oeuvre de la responsabilité du
tiers complice, la question s'est posée de savoir si le fait que la
clause de non-concurrence à la violation de laquelle il est
prétendu qu'un tiers a participé soit litigieuse, fasse l'objet
d'une instance en justice relativement à sa validité, constituait
une cause d'exonération de la responsabilité du tiers en le
constituant de bonne foi.
La jurisprudence a répondu par la négative dans
le domaine de la clause de non-concurrence en droit du travail en affirmant que
le nouvel employeur qui embauche un salarié ayant souscrit une
interdiction de concurrence engage sa responsabilité «
même si la validité de la clause était
litigieuse... »65(*)
La solution s'impose sinon la porte serait ouvert à des
abus manifestes de la part des intéressés qui introduiraient
à dessein une demande en justice en arguant de la nullité de
l'engagement de non-concurrence, ce qui conduirait en pratique à priver
cette convention d'une partie de son efficacité.
En revanche, la nullité d'une clause de non-concurrence
interdit l'engagement de la responsabilité du tiers complice de la
violation de cette interdiction. Dans cette perspective il
a été jugé « que la clause
de non-concurrence invoquée... étant nulle, cette
société ne peut soutenir que le nouvel employeur se serait rendu
complice de la violation de cette clause... »66(*). Une autre solution
ne se comprendrait pas. La mise en jeu de la responsabilité du tiers
suppose en effet que l'obligation de non-concurrence soit licite car on ne voit
pas comment un tiers pourrait être condamné en tant que complice
de la violation d'une obligation de non-concurrence dont le créancier ne
pourrait poursuivre l'exécution à l'encontre du débiteur
parce que cette obligation a un caractère illicite.
L'établissement de la faute délictuelle du nouvel employeur
entraine ipso facto sa condamnation au paiement de
dommages-intérêts(B)
B : condamnation in solidum au paiement de
dommages-intérêts
Le nouvel employeur qui embauche une personne qu'il savait
liée par une clause de non-concurrence engage sa responsabilité
délictuelle envers le précédent employeur.
Par ailleurs, le tiers complice auteur d'un débauchage
fautif, peut être condamné à verser des
dommages-intérêts au profit de l'employeur
précédent, dans le cadre d'une action en concurrence
déloyale.
Le nouvel employeur, complice de la violation de l'obligation
non-concurrence est alors déclaré solidairement responsable avec
le débiteur de non-concurrence des conséquences dommageables qui
résultent de l'inexécution de l'interdiction de
concurrence : condamnation in solidum au paiement des dommages
intérêts ou condamnation in solidum au paiement de la clause
pénale prévue par les parties à la convention de
non-concurrence.67(*)
La constatation que la responsabilité du
débiteur de non-concurrence est de nature contractuelle alors que celle
du tiers complice relève du domaine de la responsabilité
délictuelle ne constituant nullement un obstacle à une
condamnation in solidum.
Le créancier de non-concurrence a donc la
faculté de poursuivre à la fois, devant des juridictions
différentes le plus souvent par le jeu de la compétence, le
débiteur de non-concurrence sur le terrain de la responsabilité
contractuelle et le nouvel employeur sur celui de la responsabilité
délictuelle en condamnation in solidum à la réparation du
dommage causé par la violation de l'obligation de non-concurrence, ce
qui lui assure une chance d'indemnisation effective plus grande.
Le bénéficiaire de la clause peut
également demander au juge des référés d'imposer au
nouvel employeur de cesser sous astreinte d'employer le salarié.
Il faut préciser que le législateur
sénégalais ,à travers les dispositions nouvelles du
code du travail a prévu en effet une formation de
référé social, composée du président du
tribunal du travail et du greffier qui pourra, d'une part ordonner toutes les
mesures qui ne heurtent à aucune contestation sérieuse, prescrire
les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit
pour prévenir un danger imminent, soit pour faire cesser un trouble
manifestement illicite .
Dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas
sérieusement contestable, la formation de référé
pourra prescrire des astreintes. Désormais il n'est plus
nécessaire pour l'ancien employeur désireux d'astreindre le
nouvel employeur à cesser d'employer le salarié de recourir au
juge civil selon la procédure dessinée par le code de
procédure civile.
L'ancien employeur peut enfin attraire le nouvel employeur
devant le tribunal du commerce s'il est commerçant ou devant le tribunal
du travail s'il ne l'est pas, afin de lui réclamer les dommages
intérêts en réparation du préjudice subi.
CONCLUSION
Insérée au contrat de travail ou plus rarement
stipulée lors d'un accord ultérieur, la clause de non-concurrence
interdit au salarié de se faire embaucher par un concurrent à
l'expiration de son contrat. Un tel engagement du salarié doit
être exprès et ne saurait se présumer.
Au sortir de ces différentes analyses, il apparait que
la clause de non-concurrence insérée dans un contrat de travail
constitue un instrument fondé sur la protection de l'entreprise. En
effet, pour être valable, la clause de non-concurrence doit avant tout
avoir pour but de protéger les intérêts légitimes de
l'entreprise. En d'autres termes, il faut que l'entreprise soit susceptible de
subir un préjudice réel au cas où le salarié
viendrait à exercer son activité professionnelle dans une
entreprise concurrente.
Cependant, la manière dont la clause de
non-concurrence est encadrée par le droit du travail
sénégalais montre qu'il reste encore « du chemin
à faire ». Ainsi, par exemple, la prohibition de plein droit
de toute clause portant interdiction pour le travailleur d'exercer une
activité quelconque à l'expiration de son contrat de travail est
susceptible d'entrainer des conséquences néfastes pour l'ancien
employeur. Cette disposition signifie que le salarié à
l'expiration de son contrat de travail peut, directement ou indirectement,
concurrencer son ancien employeur. Psychologiquement, une telle concurrence a
des apparences de « trahison » et ce d'autant
plus que le salarié tend aujourd'hui à être reconnu comme
faisant partie intégrante de l'entreprise de l'employeur.
Ayant pris conscience de ces conséquences, les juges
français ont admis la possibilité pour l'employeur de
prévoir une clause de non-concurrence interdisant au salarié
d'exercer une activité concurrente même après l'expiration
du contrat de travail. À coté de la protection des
intérêts de l'employeur, le droit du travail français
semble être plus protecteur des intérêts du salarié
que le droit sénégalais du travail dans la mesure où il
est fait obligation à l'employeur de verser au salarié soumis
à une clause de non-concurrence une contrepartie financière. La
jurisprudence française fait donc de la contrepartie financière
une condition de validité de la clause de non-concurrence.68(*) La nouveauté tient donc
dans le fait que la clause de non-concurrence qui ne comporte pas de
contrepartie financière n'est pas licite. Ceci vaut quelle que soit la
date de rédaction de la clause (avant ou après l'arrêt
précité).
En revanche, la jurisprudence sénégalaise ne
semble pas faire de la contrepartie financière une condition de
validité de la clause de non-concurrence.69(*)
En résumé, la clause de non-concurrence est une
clause dont il faut se méfier et qui mérite une attention
particulière, car elle peut s'avérer contraignante tant pour le
salarié que pour l'employeur.
BIBLIOGRAPHIE
TEXTES DE LOI
Loi n°97-17 du 1er décembre 1997
portant code du travail de la République du Sénégal
Loi n°61-34 du 13 juin 1961 (JOS n°3462 du 3juill
1961) portant ancien code du travail de la République du
Sénégal
Jurisprudence
Cass civ 26 mars 1928 DP 1928
Trib trav Dakar 3 févr. 1966 Soc.5 janv. 1984 D.1984
I.R, 443
Cass soc18 oct. 1952et cass soc 27fevr 1996
Cass soc 18 sept 2002 N°00-42-904 Gan vie, Recueil
Dalloz 2002 JURIS P.3229
Cass soc 1ermars 1995
Trib trav Dakar, 4 janv. 1973, précité,
(motifs)
Cass soc, 10 juill 2002, M.MOLINE c/Sté MSAS cargo
international
Cass soc 18 oct. 1972, précité
Cass soc, 16 avril 1991, n°88- 40 -557
Soc.12 févr. 1975, Bull.civ. V, n°68, (rendu
à propos d'un litige relatif au paiement d'une indemnité de
clientèle)
Cass soc, 28 oct. 1997 SA GENERAL ELECTRIC cgr, Dr social
1998.78 obs., G.COUTURIER
Soc. 10 janv. 1985 I.R. 476
Versailles, 11 juill. 1986, D.1987, Somm.268
Soc.4 mars 1970 Bull.civ. V, n°155V.
Cass soc 11 DEC 1990 Bull civ V n°474
Cass soc 25 mars 1998 Dr soc 1998
Cass soc 18 SEPT 2002 D.2002
Soc.16 mai 1972, Bull.civ.v,n°348
Com.8 févr, 1965 B civ III n° 96
Paris 20 sept 1988 D.1989 somm 260
Cour d'appel Paris 20 sept. 1988 D. 1989 somm.260
Soc. 20 févr. 1989. Bull. civ. V, n°84, D.1989
Versailles, 2mars 1989, D.1990 Somm.81
Com.8fevr 1965 Bull.civ. III, n°96
Paris, 7 avr.1986, D.1987, Somm.265
Versailles, 26 juill 1989, D. 1990, Somm. 335 et les obs.
Paris, 23 nov. 1989, D.1990, somm. 335 et les obs.
Paris, 4 nov.1981 : Gaz. Pal.1982, 1, somm.82
Versailles, 9 juin 1986 D.1987 somm.263 et les obs.
Paris, 5 avr 1990 D.1990 somm. 335 et les obs.
Trib trav Dakar, 20 mars 1967 TPOM n°220, p4880,
C.A. 3AVR 1968, Sodack c/Lucas ABreu
C.A 7 mai 1969, TPOM, 1969, N°267 P.5910
Nancy, 20 févr.1959, D. 1959 ,233
Cass soc13 janv.1998 .Dr soc 1998
V. Cass soc 25 OCT 1990 Bull civ V. n°495
Cass soc 24 janv. 1979 D. 1979.619 note Y.SERRA
CASS.SOC 20 fevr1975 D.1976.142 Y.SERRA
Cass soc 13 déc. 2000 MARIUSSE C/ SA FIDUCIAIRE DE
France
Cass. Soc.22 oct.1997.Bull. civ. v, n°119
Cass. soc. 27 mars 1996, n° 92-41.992)
(Cass. soc. 18 février 2003, n° 01-40.914)
(Cass. soc. 8 juin 1999, n° 96-45.616)
Com, 5 févr. 1991 D.1991 I.R.69
Cass com. 5 févr. 1991
Cass soc 15 FEVR 1995
Cass soc, 22 janv. 1991
CA Paris, 1er mars 1984
C. Cass com. 24 1998 N°96-15-694 Recueil Dalloz
1999
CA Paris, 17 févr. 1993 D. 1994 somm 223
CA Rouen, 24 janv. 1993 Rjs 10/1993 N° 981
Cass.com 13mai 1975 D.1975 IR 164
Cass com., 6 mai 1996
Soc. 10 mai 1983, Bull. civ. V, n°251
Paris, 25 nov. 1986, D.1987, Somm.272
Angers, 6 mars 1989, D.1990, Somm. 79
Cour de cassation arrêt du 10/07/2002
Trib trav Dakar 4/01/1973
OUVRAGES
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francophone au sud du Sahara) Tome II : Le contrat de travail (suite) Le
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G.H. CAMERLYNCK, GERARD Lyon-Caen : Droit du Travail
9ieme édition DALLOZ
JEAN PELISSIER, Alain Supiot, Antoine Jeammaud :
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Dalloz -Sirey jurisprudence générale
1996
Gérard Couturier : Droit du Travail : 1/Les
Relations individuelles de travail 2ieme édition PUF 1994
Philippe Le Tourneau, Loic Cadiot : Droit de la
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Dalloz 2002
Gérard Lyon-Caen, Jean Pélissier, Alain
Supiot : Droit du Travail 17ieme édition Dalloz 1994
Raymond Lemesle : Le Droit du travail en Afrique
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Jean-Claude Javillier : Manuel droit du travail L.G.D.J
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Jean Pélissier : Droit de l'Emploi Dalloz Action
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matière commerciale sociale et civile (Droit interne et communautaire)
Dalloz Affaire 1991
Jacqueline Amiel-Donat : Les clauses de non-concurrence
en Droit du Travail édition Litec 1988
TABLE DES MATIERES
Remerciements...................................................................................1
Dédicaces...............................................................................2
Abréviations..........................................................................3
Sommaire.............................................................................................4
Introduction...........................................................................7
CHAPITRE1 : la licéité des clauses
de non-concurrence ......12
SECTION1: les conditions de
validité des clauses de
non-concurrence........................................................................12
PARAGRAPHE1 : les conditions
légales de validité des clauses de
non-concurrence............................................12
A : une limitation de la clause dans le
temps et dans
l'espace..................................................................................13
B :
interdiction portant sur une activité de nature
concurrentielle...............................................................16
Paragraphe2 : les conditions
jurisprudentielles de validité des clauses de non-
Concurrence...................................20
A : intérêt légitime de
l'employeur, cause de l'obligation de non-concurrence du
salarié..............................................21
B : la licéité des clauses sans
contrepartie
pécuniaire........................................................................23
SECTION 2 : le
sort des clauses de non-concurrence irrégulières
.......................................................................27
PARAGRAPHE1: la nullité relative des
clauses
irrégulières.............................................................................27
A : différentes limites à
l'annulation des clauses
irrégulières.......................................................................27
B : Les effets de l'annulation des clauses
irrégulières......................................................................31
PARAGRAPHE : la possibilité
d'une révision judiciaire des clauses
excessives............................................................33
A : la condition indifférente :
la cause de
l'irrégularité....................................................................34
B : la condition nécessaire : la
violation par le salarié de l'obligation de non
concurrence....................................36
CHAPITRE2 :
LA MISE EN OEUVRE DE LA CLAUSE DE NON
CONCURRENCE....................................................38
Section1 : La portée de
l'obligation de
non-concurrence....................................................................39
Paragraphe1 :
obligation générale de non-concurrence pendant la
durée du contrat de travail........................39
A : une interdiction de concurrence par
obligation
d'exclusivité....................................................................39
B : une interdiction de concurrence assortie
d'aménagements...............................
..............................46
Paragraphe2 :
la liberté de la concurrence à l'expiration du contrat de
travail sous réserve d'exception
..........................48
A : la nullité de plein droit des
clauses interdisant l'exercice d'activité concurrentielle à
l'expiration du contrat de
travail...............................................................................49
B : la validité exceptionnelle des
clauses interdisant l'exercice d'activité
concurrentielle............................................53
Section2 : Les sanctions de la
violation des clauses de non-
Concurrence.......................................................................56
Paragraphe1 : les sanctions encourues par le
salarié.............56
A : la condamnation du salarié au
paiement de
dommages-intérêts............................................................................56
B : la suppression du droit à
l'indemnité..........................62
Paragraphe2 : les sanctions encourues par le
nouvel
Employeur........................................................................63
A : l'engagement de la responsabilité
du nouvel employeur pour concurrence
déloyale..................................................63
B : condamnation in solidum au paiement de
dommages-intérêts................................................................................69
Conclusion....................................................................71
Bibliographie.................................................................73
Table des
matières.........................................................78
* 1 _ Cette définition
est tirée du lexique des termes juridique édition Dalloz
* 2 _ YVES SERRA : la
clause de non-concurrence en matière commerciale, sociale et civile
* 3 _ P.CATALA, « La
transformation du patrimoine dans le droit civil moderne », Rev.
trim. dr. civ. 1966, p.185
* 4 _ Cass civ 2 juill 1900,
précité
* 5 _ Ancien code du
travail : Loi n° 61- 34 du 13juin 1961(Jos n°3462 du 3 juill
1961)
* 6 _ Loi n°97-17 du
1erdécembre1997 portant code du travail de la
République du Sénégal
* 7 _ Cass civ 26 mars 1928 DP
1930
* 8 _ Trib trav Dakar 3
févr. 1966
* 9 _ Soc.5 janv. 1984 D.1984
I.R, 443
* 10 _ Cass soc18 oct. 1952et
cass soc 27fevr 1996
* 11 _ Cass soc 18 sept 2002
N°00-42-904 Gan vie, Recueil Dalloz 2002 JURIS P.3229
* 12 _ Cass soc
1ermars 1995
* 13 _ Trib trav Dakar, 4 janv.
1973, précité, (motifs)
* 14 _ Cass soc, 10 juill 2002,
M.MOLINE c/Sté MSAS cargo international
* 15 _ Cass soc 18 oct. 1972,
précité
* 16 _ Cass soc, 16 avril 1991,
n°88- 40 -557
* 17 _ Soc.12 févr.
1975, Bull.civ. V, n°68, (rendu à propos d'un litige relatif au
paiement d'une indemnité de clientèle)
* 18 _ J.GHESTIN Traité
de droit civil, tome2,le contrat, n°778,L.G.D.J.,1988, 2e
éd.
* 19 _ CA AIX en PROVENCE 10
mai 1989 RJS3/1990 N°202
* 20 _ Cass soc, 28 oct. 1997
SA GENERAL ELECTRIC cgr, Dr social 1998.78 obs., G.COUTURIER
* 21 _ Soc. 10 janv. 1985 I.R.
476
* 22 _ Versailles, 11 juill.
1986 , D.1987, Somm.268
* 23 _ Art 1134 : les
conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux
qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur
consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.
Elles doivent être exécutées de bonne
foi.
* 24 _ Soc.4 mars 1970
Bull.civ. V, n°155
* 25 _ V. Cass soc 11 DEC 1990
Bull civ V n°474
* 26 _ Cass soc 25 mars 1998 Dr
soc 1998
* 27 _ Cass soc 18 SEPT 2002
D.2002
* 28 _ Soc.16 mai 1972,
Bull.civ.v,n°348
* 29 _ Com.8 fevr,1965 B civ
III n° 96
* 30 _ Paris 20 sept 1988
D.1989 somm 260
* 31 _ Cour d'appel Paris 20
sept. 1988 D. 1989 somm.260
* 32 _ Soc. 20 févr.
1989. Bull. civ. V, n°84, D.1989
* 33 _ Versailles, 2mars 1989,
D.1990 Somm.81
* 34 _ Com.8fevr 1965 Bull.civ.
III, n°96
* 35 _ Paris, 7 avr.1986,
D.1987, Somm.265
* 36 _ Versailles, 26 juill
1989, D. 1990, Somm. 335 et les obs.
* 37 _ Paris, 23 nov.
1989, D.1990, somm. 335 et les obs.
* 38 _ A.BRUN,
L'évolution du régime de la concurrence irrégulière
dans les rapports du travail : Mélanges Roubier
* 39 _ Paris, 4 nov.1981 :
Gaz. Pal.1982, 1, somm.82
* 40 _ Versailles, 9 juin 1986
D.1987 somm.263 et les obs.
* 41 _ Paris, 5 avr 1990 D.1990
somm. 335 et les obs.
* 42 _ Trib trav Dakar, 20 mars
1967 TPOM n°220, p4880, C.A. 3AVR 1968, Sodack c/Lucas ABreu
* 43 _ Art .21, C.C.N.,
personnel du service interentreprises de médecine du travail
* 44 _ (C.A 7 mai 1969, TPOM,
1969, N°267 P.5910
* 45 _ Nancy, 20
févr.1959, D. 1959 ,233
* 46 _ Droit civil, Les
obligations, Dalloz, 4é éd n°490
* 47 _ Cass soc13
janv.1998 .Dr soc 1998
V. Cass soc 25 OCT 1990 Bull civ V. n°495
* 48 _ Cass soc 24 janv. 1979
D. 1979.619 note Y.SERRA
* 49 _ CASS.SOC 20 fevr1975
D.1976.142 Y.SERRA
* 50 _ Cass soc 13 déc.
2000 MARIUSSE C/ SA FIDUCIAIRE DE FRANCE
* 51 _ Cass. Soc.22
oct.1997.Bull. civ. v, n°119
* 52 _ (Cass. soc. 27 mars
1996, n° 92-41.992)
* 53 _ (Cass. soc. 18
février 2003, n° 01-40.914)
* 54 _ (Cass. soc. 8 juin 1999,
n° 96-45.616)
* 55 _ Com, 5 févr. 1991
D.1991 I.R.69
* 56 _ Cass com. 5 févr.
1991
* 57 _ Cass soc 15 FEVR 1995
* 58 _ Cass soc, 22 janv.
1997
* 59 _ CA Paris, 1er
mars 1984
* 60 _ C. Cass com. 24 1998
N°96-15-694 Recueil Dalloz 1999
* 61 _ CA Paris, 17
févr. 1993 D. 1994 somm 223
* 62 _CA Rouen, 24 janv. 1993
Rjs 10/1993 N° 981
* 63 _ Cass.com 13mai 1975
D.1975 IR 164
* 64 _ Cass com., 6 mai 1996
* 65 _ Soc. 10 mai 1983, Bull.
civ. V, n°251
* 66 _ Paris, 25 nov. 1986,
D.1987, Somm.272
* 67 _ Angers, 6 mars 1989,
D.1990, Somm. 79
* 68 _ Cour de cassation
arrêt du 10/07/2002 : une clause de non-concurrence n'est licite que
si elle (....) comporte une contrepartie financière.
* 69 _ Trib trav Dakar
4/01/1973 : « sauf clause contraire de la conv coll ou du
contrat de travail, il n'est pas nécessaire, pour que la clause soit
valable ou efficace qu'une indemnité soit stipulée en faveur du
travailleur
pour constituer la cause juridique de son
obligation »
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