Les regroupements bancaires dans les pays en transition: cas de la Tunisie( Télécharger le fichier original )par Faouzi MILED Faculté de droit et sciences économiques et politiques - Master en Finances et Banques 2009 |
II. Présentation et interprétations de résultats empiriques :Nous rappelons que dans notre travail, nous allons adopter la technique d'étude d'évènement pour l'évaluation et la quantification de la réaction des cours des banques qui sont cotées sur la bourse des valeurs mobilières. Dans un premier temps nous allons identifier les opérations des fusions et acquisitions qui sont survenues dans le secteur bancaire tunisien ainsi que leurs dates de réalisation. Cette étape parait une étape requise avant d'entamer l'analyse de l'évolution des cours boursiers des banques qui sont impliquées dans des opérations des fusions et acquisitions. Théoriquement, la date à laquelle l'information concernant celui-ci est rendue publique est considérée comme date de fusion ou d'acquisition bancaire. Dans la pratique, on assimile cette date à celle de la première annonce émanant de la bourse des valeurs mobilières, de la Banque Centrale de Tunisie ou des banques impliquent dans ces opérations des regroupements. Cependant, ce choix ne permet pas d'éliminer complètement l'incertitude sur la date exacte de fusion ou acquisition. D'une part, l'existence d'autres évènements concomitants qui interviennent avant la date d'annonce publique se manifeste par une réaction anticipée du marché boursier.64(*) Ainsi, tous les opérateurs n'agissent pas en même temps sur le marché, d'où une réaction qui s'étale sur une certaine période. On choisit dans presque tous les cas des fusions et acquisitions bancaires en Tunisie, comme période d'évènement, un intervalle de temps mensuel [-6,...,+6] qui est spécifique à chaque banque regroupée et centré sur la date t=0 (mois d'annonce), une date qui est supposée de la première annonce de la fusion ou d'acquisition (l'évènement)65(*). Comme on a montré dans les chapitres précédents, si on admet que la cotation sur le marché boursier tunisien s'effectue en temps continu, la rentabilité d'un titre de la banque i entre deux dates t et t-1 se calcule de la manière suivante : (1) Où Pit est le cours boursier du titre de la banque i à la date t. Une fois qu'on a identifié l'opération de fusion et acquisition et sa date de réalisation, on pourra choisir un intervalle des mois I= [-6,....,+6] comme période d'évènement qui est centrée sur cette date d'annonce ou de réalisation. En dehors de cet intervalle, les taux de rentabilité sont supposés générés par un processus qui décrit leur dynamique à travers le temps. L'évaluation de la réaction d'un titre à un évènement passe alors par l'analyse des rentabilités qui sont réellement réalisées sur l'intervalle I, en supposant, qu'elles sont différentes de celles qui sont produites par le processus qui génère l'évolution des cours boursiers en période normale. On appelle alors cette rentabilité «une rentabilité anormale » (Abnormal Return) d'un titre de la banque i, à une date de fusion ou d'acquisition t (ARit), l'écart entre la rentabilité réelle observée à cette date Rit et celle attendue en période normale. Définissons Rit comme le rendement (observé) réalisé des actions de la banque i pendant le mois t et E(Rit) comme le rendement prévu ou anticipé des titres de la banque i pendant le mois t, c'est-à-dire, le rendement de ces actions que nous avons prévu si la proposition de fusion n'était pas annoncée. Le mouvement des cours qui peuvent être attribués à l'annonce est la différence entre Rit et E(Rit). Nous pouvons appeler cette différence le rendement inattendu (eit) des titres i pendant le mois t selon l'équation suivante : eit = Rit - E(Rit). (2) afin de déterminer la valeur de eit nous devons estimer E(Rit), le rendement inobservable et prévu sur les actions de la banque i pendant le mois t. Le modèle le plus utilisé pour estimer E(Rit) est celui du marché (Fama et autres. (1969)66(*) et Fama (1976)) et qui est adopté pour effectuer ce travail. Selon ce modèle on admet que les rendements des titres des banques qui sont impliquées dans des opérations des fusions et acquisitions en Tunisie suivent une distribution normale multivariée. Les rendements des titres sont générés par le processus stochastique suivant : Rit = i + i Rmt + eit , (3) Avec i = 1,....,n, t = 1,.....w, Rit = taux de rendement du titre i pendant le mois t, Rmt= taux de rendement sur la valeur pondérée de l'indice du marché sur le mois t, i = cov(R it, Rmt)/var (Rmt), i = E (Rit) - i E(Rmt), eit = le résidu aléatoire de titre i pendant le mois t lequel suivant une distribution normale centrée et réduite (avec une moyenne zéro), qui ne sont pas corrélés dans le temps et ayant une variance constante (2) Cov (eit , ejs) = 0, pour tout i j et t s, Cov (eit , Rmt) = 0, pour tout t. Nous allons, par la suite, effectuer une régression selon la méthode des moindres carrés ordinaires (MCO) des rendements individuels Rit sur les taux rendements mensuels du marché bancaire Rmt (avec le taux de rendements mensuels finissant 6 mois avant l'annonce de la fusion ou acquisition bancaire proposée et en dehors de la période d'évènement), nous pouvons estimer les paramètres et pour chaque banque appartenant à l'échantillon. Utilisant ces paramètres estimés ( et) nous pouvons réécrire l'équation (3) comme suit :
Lorsque nous allons déduire des rendements anticipés de ceux qui sont observés réellement, cela nous permet d'obtenir une estimation des rendements inattendus êit qui sont appelés aussi les rendements anormaux ("abnormal" returns). En d'autres termes, [i^ + i^ Rmt] représente le rendement anormal de la banque i durant le mois t, ce dernier est simplement égal à êit. La déduction de de Rit neutralise l'effet des mouvements systémiques du marché bancaire mais ne permet pas de neutraliser les variations des cours boursiers qui sont spécifiques à la banque concernée. Ces variations et ces fluctuations pourraient provenir des évènements autres que la fusion ou acquisition sous l'étude (la proposition de fusion ou la décision des régulateurs), nous pouvons prendre la moyenne en coupe transversale des rendements inattendus (des rendements anormaux) pour les titres dans notre échantillon durant une période de 13 mois pour chaque titre, cela permet d'avoir une période de fusion ou d'acquisition bancaire qui est centrée sur le mois d'annonce. Nous avons :
La période du temps pourrait s'étaler sur presque une année (13 mois). Donc, t = -6,-5, - 4,..., 0,..., + 4, + 5, +6 et ARt est le rendement anormal moyen qui est identique au rendement inattendu moyen durant le mois « t » et « n » représente le nombre des banques qui sont impliquées dans des opérations de fusion et acquisitions en Tunisie. La moyenne en coupe transversale neutralise les variations des cours boursiers des telles banques en question et qui sont spécifiques à la banque et qui ne sont pas reliées à la fusion ou l'acquisition en cours d'étude car ce regroupement ne s'est pas effectué en même temps pour les « n » banques de l'échantillon. La dernière étape dans cette analyse, c'est le calcul des rendements anormaux cumulés moyens (CARs) de mois t1 au mois t2 durant la période de fusion ou d'acquisition (t = -6,-5, - 4,..., 0,..., + 4, + 5, +6). Le mois de l'annonce du regroupement bancaire c'est le mois 0, la période de pré-annonce s'étale sur les 6 mois précédent la date d'annonce et la période de post-annonce couvre les 6 mois après l'annonce de regroupement. Le rendement anormal cumulé moyen pour les « n » banques regroupées de l'échantillon du mois t1 au mois t2 est calculé comme suit :
En faisant ceci, une autre étape dans notre partie empirique consiste à évaluer les rendements anormaux de la banque combinée (c'est la banque cible plus la banque acquéreuse). Examinant uniquement les rendements anormaux des deux banques séparément, ceci pourrait engendrer une interprétation partielle ou biaisée de la réaction du marché boursier aux annonces des fusions et acquisitions. Donc, nous calculons les rendements anormaux de la banque combinée en utilisant la méthode adoptée par Houston et Ryngaert (1994). (7) Avec MVt est la valeur sur le marché des titres de la banque cible un mois avant la date d'annonce, MVb est la valeur sur le marché des titres de la banque acquéreuse un mois avant la date d'annonce, et ARt et ARb sont, respectivement, les rendements anormaux des ième banque cible et acquéreuse le long de la fenêtre de l'évènement. Houston et Ryngaert (1994) ont montré que cette méthode donne le vrai pourcentage de changement de la valeur de la banque combinée avant la fusion. Outre le calcul des rendements anormaux basé sur ces techniques présentées ci avant, nous devrons également faire recours à d'autres types de données telles que la date d'annonce, la date de rumeur et celle d'accomplissement des ces opérations des fusions et acquisitions bancaires en Tunisie, pour bien spécifier la fenêtre d'évènement laquelle servira comme période probable pour l'apparition des effets des regroupements bancaires.67(*) Les données comptables et bilancielles sont obtenues à travers les rapports annuels de la Banque Centrale de la Tunisie. Une base des données appelée « Bankscope» représente une autre source détaillée et riche nous permettant de sélectionner les institutions bancaires qui ont subi des opérations des fusions et acquisitions grâce la présentation détaillée de l'historique de chaque banque « Bank Mergers and Acquisition deals ». Les cours boursiers mensuels ont été obtenus à partir soit de la bourse des valeurs mobilières de Tunisie (BVMT) soit de la base des données « Datastream » qui fournit des informations se rapportant à certains indicateurs boursiers, économiques et financiers de plusieurs banques tunisiennes. L'échantillon inclut pratiquement toutes les banques qui sont publiquement cotées sur le marché boursier tunisien et dont les informations financières mensuelles sont disponibles. Afin de déterminer les dates exactes d'annonce des regroupements et les données financières, boursières et comptables qui sont spécifiques à la banque cible et celle acquéreuse, nous avons effectué une collecte de l'ensemble des données se rapportant aux fusions et acquisitions annoncées à partir de la base des données appelée « Thomson Financial Data - SDC M&A ». L'opération de collecte des données est complétée par quelques rapports et des articles de presse. En croisant les dimensions géographiques et des activités nous pouvons retenir les différentes catégories des fusions et acquisitions bancaires qui pourraient submerger dans le contexte su secteur bancaire tunisien. Cette grille pourrait montrer six types des opérations des fusions et acquisitions bancaires qui sont issues de ces dimensions géographiques et des activités. Nous pouvons trouver un premier type qui renforce les activités initiales des banques avant regroupement (type 1). Un deuxième type renforçant les activités à l'échelle domestique mais dans des régions dispersées (type 2). Un troisième type qui mène à une diversification des activités mais s'effectuant entre banques localisées dans les mêmes régions (type 3). La quatrième catégorie pourrait résulter des regroupements renforçant la diversification des activités dans des régions dispersées bien qu'ils soient domestiques (Type 4). Deux autres (5 et 6) résultent des opérations des fusions et acquisitions transfrontières. On trouve les regroupements qui renforcent les activités initiales des banques avant fusion mais s'effectuant entre banques se localisant dans des pays différents (type 5). Une dernière catégorie (type 6), concerne les opérations des fusions et acquisitions bancaires qui renforcent en même temps la diversification géographique et des activités à l'échelle internationale.
récapitulatif des typologies des regroupements bancaires Ces différents types des opérations des fusions et acquisitions bancaires devraient être testées afin de tirer des conclusions se rapportant au succès des regroupements bancaires en Tunisie. Nous tenons à rappeler les cas des fusions et acquisitions bancaires qui sont survenus en Tunisie sont aux nombres des trois regroupements. Notre objectif dans cette partie, est de vérifier et de déterminer les effets des opérations de fusions et acquisitions bancaires (F&As) dans le cas tunisien. Nous essayerons également de mettre l'accent sur la présentation et l'analyse des stratégies de regroupement à travers le cas d'absorption de la BDET et la BNDT par la STB, le cas d'acquisition de la Banque du Sud par « Andalumaghreb SA » à raison d'une part de 53,54% (effectuée le 5 /12/2005) et le cas d'acquisition d'une part de 52% de l'Union Internationale des Banques (UIB) qui est effectuée par la Société Générale (SG). Les réalisations de ces opérations de regroupements bancaires peuvent constituer un tournant majeur dans les politiques et les stratégies bancaires qui sont menées dans le secteur bancaire tunisien. Ces opérations d'absorption et d'acquisition s'inscrivent dans le cadre de la restructuration du secteur bancaire tunisien et pourraient aboutir, probablement, à la constitution des institutions bancaires qui sont devenues de plus en plus grandes. 1. Cas de regroupement entre « Andalumaghreb SA » et « Banque du Sud »Le 05/12/2005, il a été annoncé que « Andalumaghreb » a acquis une part de 53.54% de la « Banque du Sud » qui est une banque tunisienne de dépôts. « Andalumaghreb » a acquis l'équivalent de 10,708,805 actions sur la bourse des valeurs mobilières (the Tunis Stock Exchange). Le cours de clôture des actions de la « Banque du Sud » est de 7.41 dinars tunisiens. Le 02/12/2005, cette acquisition pourrait être estimée à 79.352 millions de dinars. La part inclut une proportion de 33.54% de gouvernement. Les deux institutions bancaires « Spanish Banco Santander » et « Moroccan AttijariWafa Bank » étaient appelées à détenir des parts dans « Andalumaghreb ». Le tableau suivant décrit cette opération de regroupement entre la « Banque du Sud » et « Andalumaghreb SA », (cf. tableau 3.1). Tableau 3- : Cas de regroupement entre « Andalumaghreb SA » et « Banque du Sud »
(Source : base de données « Bankscope ») * 64 _ Grar A., (1997). * 65 _ Ball C.A., Torous N.W., «Investigating Security-Price Performance in the Presence of Event-Date Uncertainty», Journal of Financial Economics (1988) 22, p. 123-154 * 66 _ Fama E.F., Fisher L., Jensen M.C., Roll R.W., (1969). Op. Cit. * 67 _ Grar A., «Incidence de la division d'actions et de l'attribution d'actions gratuites sur la valeur : une étude empirique sur le marché français », Thèse pour le doctorat de sciences de gestion, Université de Paris IX-Dauphine, 1994 |
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