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L'être en devenir, considérations aristotéliciennes sur le devenir

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par Martin MBENDE
Grand séminaire philosophat Paul VI Bafoussam, Cameroun - Graduat de philosophie 2008
  

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Conclusion

En somme, que l'on se situe du côté de Héraclite ou de Parménide, on voit émerger un discours philosophique qui rompt avec les spéculations purement physiologistes des milésiens pour jeter les bases de ce qu'on convient d'appeler aujourd'hui ontologie. Notre préoccupation dans ce chapitre, loin de remonter la pensée de tous les philosophes qui ont précédé celle d'Aristote sur le devenir, a consisté à mettre en évidence celles de Héraclite, de Parménide et de Platon.

Avec Héraclite, il nous est apparu que le devenir est ce mouvement continu qui entraîne dans son flux toutes les réalités de l'univers. Toute chose de l'univers est donc continuellement en devenir sous l'impulsion de polemos le conflit. D'où la philosophie des contraires et le perpétuel écoulement qui en découlent. Toute la pensée de Héraclite est portée par l'idée centrale de la préséance du mouvement sur l'Etre. Cependant, peut-on vraiment parler de flux universel quand on sait que tout mouvement se déploie entre un état initial et un état final ? En outre, affirmer du mouvement qu'il est continu comme le fait Héraclite, n'est-ce pas ignorer que le repos participe de certains éléments du cosmos ?

Parménide quant à lui restaure le principe d'identité en niant toute possibilité pour l'Etre de devenir. L'argument des apories et celui de la grandeur infinie de l'Etre corroborés par les Mégariques, auront contribué à démontrer l'impossibilité du mouvement. Cependant, ne peut-on pas dire que la position trop tranchée des éléates et de leurs disciples mégariques en faveur de l'Etre contraint au repos, procède d'une faible analyse de ses significations ? En effet, que dire de l'Etre en puissance et de l'Etre en acte qui rendent compte du devenir sans toutefois induire à la contradiction ?

La théorie platonicienne de la participation et du paradigmatisme des Idées a tenté à sa manière de résoudre le problème de l'Un et du Multiple. Le faisant, Platon s'est efforcé de justifier contre les éléates l'existence d'un non-Etre qu'il a qualifié de relatif par opposition au non-Etre absolu. Il y a là une audace qui passe outre l'interdiction formelle de Parménide : « Non jamais, tu ne plieras de force le non-Être à l'Être ; de cette route, de recherche, écarte plutôt ta pensée »,43(*) pour affirmer l'existence du non-Etre : « Il est donc inévitable que le non-Être soit, non seulement dans le mouvement, mais aussi dans toute la suite des genres. »44(*) Cependant, si les Idées sont responsables du devenir des choses sensibles comme le prétend Platon dans le Phédon,45(*) et s'il y a Idée de tout, laquelle des Idées sera t-elle responsable du devenir de l'homme puisqu'il est à la fois animal, bipède, homme ? Et puis, étant donné que les Idées sont par nature immuables et cause d'immobilité, comment peuvent-elles rendre compte du mouvement des choses sensibles dont elles sont les modèles ?

Au reste, les positions intangibles de l'héraclitéisme et de l'éléatisme, ont laissé en héritage à la pensée deux conceptions de l'Etre diamétralement opposées : en perpétuel écoulement pour Héraclite et toujours au repos pour Parménide. Au jugement d'Aristote, il est évident que « ni ceux qui prétendent que tout est au repos, ni ceux qui prétendent que tout est en mouvement ne disent vrai.»46(*) Ainsi, la réduction de l'Etre à ses accidents ou à sa substance, ou encore l'essai de leur conciliation par Platon n'étaient pas susceptibles de rendre compte de son devenir. D'où leur réfutation par Aristote.

* 43 Le poème de Parménide, fragment 7, cité par AUBENQUE P., op. cit., p. 151

* 44 PLATON, Le Sophiste, 256 d.

* 45 PLATON, Phédon, 100 d.

* 46 ARISTOTE, Métaphysique, , 8, 1012 b, 23.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote