La prévention, la gestion et le règlement des conflits armes en Afrique de l'ouest( Télécharger le fichier original )par Salamane YAMEOGO Université de Ouagadougou - Maà®trise de doit public 2004 |
CHAPITRE II : LE MECANISME C.E.D.E.A.O., UNE REGLEMENTA-TION DE MISE EN OEUVRE QUELQUE PEU RIGIDE
39. Véritable monument juridique65(*), le mécanisme est sensé apporter une amélioration par rapport aux autres tentatives infructueuses dans la recherche de la sécurité commune66(*). Ses conditions de mise en oeuvre et les moyens prévus ne semblent pas cependant être une révolution véritable. Pour s'en apercevoir, il suffit d'examiner les conditions d'application (section I) et les moyens pour y accéder (section II). Section I : Les conditions de mise en oeuvre40. La nature des crises (paragraphe I), les organes investis de pouvoir d'initiative et la procédure de mise en oeuvre (paragraphe II) entrent dans les conditions d'application du mécanisme. Paragraphe I : La nature des conflits exigeant l'application dumécanisme41. Diverses circonstances appellent l'application du mécanisme. Il s'agit des conflits internes et internationaux (A), mais d'autres circonstances exigent sa mise en branle (B). A. Les conflits armés internes et internationaux 42. L'article 25 (a), (b) et (c) dispose que : « Le mécanisme est mis en oeuvre dans les conditions ci-après : en cas d'agression ou de conflit armé intervenu dans un Etat membre ou de menace d'un tel conflit ; en cas de conflit entre deux ou plusieurs Etats membres ; en cas de conflit interne menaçant de déclencher un désastre humanitaire, constituant une menace grave à la paix et à la sécurité dans la sous-région ». Cette disposition illustre clairement la catégorie de conflits qui nécessite des actions 43. Les conflits armés internes sont ceux qui se déroulent à l'intérieur des Etats. Les troubles intérieurs67(*) ou les tensions internes semblent faire partie de cette catégorie. Le mécanisme s'applique en cas de conflits de cette nature pouvant entraîner un déséquilibre socio-politique de la sous-région. Le conflit armé international est celui qui oppose deux ou plusieurs Etats. Cette classification traditionnelle est loin d'être acceptée partout. En effet, on pourrait avancer sans risque de se tromper que les actuels conflits armés sont internationaux ou des conflits armés internes internationalisés. Les guerres intra-étatiques s'internationalisent plus que jamais67(*) . 44. Le mécanisme C.E.D.E.A.O. semble cependant ignorer cette nouvelle catégorie de conflits armés. Pourtant, la grande majorité des conflits auxquels l'Ouest-africain est confrontée sont bien des conflits armés internes internationalisés. Des Etats sont directement impliqués dans des guerres sanglantes et honteuses. La communauté gagnerait à institutionnaliser cette catégorie de conflits en prenant des décisions courageuses. C'est le prix de la paix. Une autre faille du mécanisme est de ne pas régir les conflits armés dans lesquels une des parties n'est pas membre de la communauté. Comment gérer, régler, et prévenir de tels conflits si le mécanisme reste muet en la matière. N'y a t-il pas lieu d'intégrer cet aspect ? D'autres circonstances nécessitent l'application du mécanisme. B. Les autres crises exigeant l'application du mécanisme 45. L'article 25 (d) et (e) dispose que le mécanisme est mis en oeuvre dans l'une des conditions ci-après : en cas de violations graves et massives des droits de l'homme ou de remise en cause de l'Etat de droit ; en cas de renversement ou de tentative de renversement d'un gouvernement démocratiquement élu. Cette dernière disposition pourrait constituer un temps soit peu une dissuasion pour les auteurs de putschs intempestifs67(*). 46. Cependant, la disposition concernant « les violations graves et massives de droits de l'homme » est aussi sujette à de multiples interprétations. Qu'appelle t-on violations graves de droits de l'homme ? A partir de quand ou de quel degré peut-on se situer dans un tel cas de violation ? Une autre question mérite d'être posée ; en effet, n'assiste t-on pas à des violations graves et massives de ces droits même en temps de paix ? Autant d'interrogations auxquelles les autorités ouest-africaines devraient apporter des réponses claires pour un éventuel réaménagement de l'article 25 (d) du mécanisme. La mise en oeuvre obéit à une procédure qu'il convient d'analyser. * 65 Ce volume tient au nombre de dispositions que le mécanisme contient : 58 articles divisés en 13 chapitres et un protocole additionnel adopté en 2001. * 66 Il s'agit de l'A.N.A.D. dans le cadre de la C.E..A.O. et du P.N.A., du P.M.A.D. dans la C.E.D.E.A.O. * 67Le trouble intérieur est selon le Comité International de la Croix Rouge( C.I.C.R .) une situation, ou sans qu'il y ait à proprement parlé de conflits armés non internationaux, il existe cependant sur le plan interne des affrontements qui présentent un certain caractère de gravité ou de durée et comporte des actes de violence. Ces derniers peuvent revêtir des formes variables, allant de la génération spontanée d'acte de révolte à la lutte entre des groupes plus ou moins organisés et les autorités au pouvoir. * 68 Les soutiens divers apportés aux différentes factions en crise font qu'il est difficile de parler de conflits armés au sens stricte : les conflits libérien, ivoirien, sierra leonais. * 69Selon l'Académie Internationale pour la Paix, de 1960 à 1990, 37 des 72 coups d'Etat militaires qui ont réussit en Afrique (environ 50%) ont eu lieu en Afrique de l'ouest. |
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