Enjeux géopolitiques des initiatives des grandes puissances en matière de maintien de la paix en Afrique( Télécharger le fichier original )par Oumarou KOLOGO Université de Ouagagougou - Master de sociologie 2010 |
1.2 L'«exceptionnalité>> africaine et l'implication des organisations sous régionales dans le maintien de la paixLe caractère d'«exceptionnalité» africaine, selon Achille MBEMBE, tient à plusieurs facteurs dont au premier chef la nature complexe des conflits africains qui conditionne de façon générale les activités de maintien de la paix. La majorité des conflits africains comportent en effet des dimensions identitaires, territoriales, économiques, politiques, sociales et environnementales. Ces éléments rendent difficile la négociation proprement dite et ne facilitent pas, non plus, l'acceptation par tous du choix des pays qui pourraient participer à une opération. Etant entendu que les ethnies sont souvent transfrontalières et les frontières poreuses, les conflits ont donc tendance à se régionaliser, ce qui complique le processus de gestion de crise. En outre, la fin de la bipolarité a laissé le champ libre à de nouveaux acteurs de la guerre. On constate ainsi l'apparition de seigneurs de la guerre laquelle devient pour eux un mode de vie naturelle, sans parler de l'existence de plusieurs compagnies privées de sécurité qui prennent part aux conflits contre une rémunération monétaire ou des concessions minières. L'«exceptionnalité>> du maintien de la paix en Afrique s'explique aussi par les relations existant entre l'ONU, l'OUA et les organisations sous-régionales africaines. L'Organisation panafricaine s'est dotée en 1993 d'un Mécanisme de prévention, de gestion et de règlement des conflits afin de remplacer la Commission de médiation, de conciliation et d'arbitrage peu efficace. On y a eu recours dans les crises au Burundi, au Liberia, au Cameroun/Nigeria, au Congo, aux Comores et au Zaïre. Le Mécanisme reste encore limité dans son fonctionnement, l'action de l'OUA. Dans le cadre du renforcement de ce mécanisme, un centre de gestion des conflits a été mis en place, en 1996, au siège de l'OUA. Il est doté d'un bureau d'alerte rapide et d'une salle d'opérations. De plus, des réunions périodiques entre des chefs d'État-major ont été prévues pour définir une doctrine africaine de maintien de la paix. Cependant, KOLOGO OUMAROU, réflexion sur les enjeux
géopolitiques des initiatives l'action de l'OUA reste complémentaire au rôle des organisations sous-régionales qui ne peuvent éclipser complètement la première D'abord préoccupées par les questions de développement économique et d'intégration régionale, les organisations sous régionales africaines assument un rôle sans cesse croissant dans le domaine du maintien de la paix. Par exemple, la Communauté de Développement de l'Afrique australe possède un Organe sur la politique, la défense et la sécurité qui ambitionne de développer une capacité régionale de maintien de la paix. Quant à la Communauté économique des États d'Afrique centrale, elle a institué un Comité consultatif permanent sur les questions de sécurité en Afrique centrale. Par ailleurs, ce Comité a créé des unités spécialisées dans le maintien de la paix et a tenu à Yaoundé, en 1996. L'exemple le plus connu est sans nul doute celui de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) qui a institué une véritable capacité sous-régionale de maintien de la paix avec son intervention militaire au Liberia et en Sierra Leone par le biais de l'ECOMOG (Groupe d'observateurs militaires). La CEDEAO a démontré au Liberia qu'elle pouvait avec un certain succès gérer une situation de conflit tandis qu'en Sierra Leone, elle a défendu la démocratie en restaurant un régime renversé par un coup d'État militaire. Face à des situations de plus en plus complexes, sur un continent où les foyers de tensions sont nombreux, les pays africains sont dépourvus de capacités de réaction rapide, malgré un réservoir de forces significatif. L'expérience a montré que le manque de moyens de projection est également une contrainte majeure liée à leur insuffisance ou à la lenteur de la mobilisation par des pays contributeurs qui n'ont, ni un processus décisionnel commun, ni les mémes intéréts. Or, la mise en oeuvre des programmes RECAMP (Renforcement des capacités africaines de maintien de la paix) par la France depuis 1998, A.C.R.I (Initiative de Réaction aux Crises en Afrique) et actuellement ACOTA (Assistance pour la formation et l'entraînement aux opérations d'urgence) par les Etats-Unis, ainsi que l'intervention directe du Royaume-Uni en Sierra Leone en 2000, sont des exemples qui soulèvent la question de la responsabilité de ces grandes puissances dans le règlement des conflits en Afrique. |
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