Le christ comme médiateur du salut, essai d'herméneutique africaine du message chrétien à la lumière de la christologie de karl Rahner( Télécharger le fichier original )par Thomas RAINCHOU Grand séminaire notre dame de l'espérance de Bertoua - Attestation de fin d'étude de théologie 2006 |
1.2.3. L'expérience de la GrâceLa doctrine chrétienne enseigne que la grâce est la faveur gratuite que Dieu nous accorde de prendre part à sa vie, de répondre à son appel, et de devenir ses enfants53(*). Il s'agit de « la bienveillance absolument gratuite que de toute éternité, Dieu témoigne à l'homme en l'appelant à partager sa propre vie »54(*). Karl Rahner la définit sous deux angles : d'abord comme faveur absolument gratuite par laquelle Dieu se penche sur l'homme, ensuite comme l'effet même de cette faveur55(*). Pour lui l'expérience de la grâce se situe à l'intérieur de celle de la transcendance. En effet, de manière tout à fait concrète, tout homme fait l'expérience du spirituel en lui, soit par l'usage de la pensée, soit par un dépassement de soi dans une relation avec autrui ou encore par la manifestation de l'amour. Cette expérience s'ouvre toujours sur celle du surnaturel en ce sens qu'elle permet de découvrir le vide de l'existence humaine qui est la manifestation de la venue de l'infinité. Ainsi donc, Quand nous sommes détachés et que nous ne nous appartenons plus à nous même, quand nous avons renoncé à nous même et que nous ne disposons plus de nous même, quand tout et nous même nous sommes écartés de nous même en un lointain infini, nous commençons alors à vivre dans le monde de Dieu même, du Dieu de la grâce et de la vie éternelle56(*). En s'engageant ainsi dans l'expérience de la transcendance, aussi bien individuellement que collectivement (dans une expérience religieuse), l'homme qui ne veut plus être maître de lui-même « s'éprouve comme celui qui ne se pardonne pas à lui-même, mais à qui on pardonne, et il éprouve ce pardon à lui octroyé comme l'amour pardonnant, délivrant et sauveur de Dieu lui-même qui pardonne en se donnant lui-même »57(*). Si donc l'homme, de l'ordre de la nature, peut en ce monde expérimenter la grâce, de l'ordre du surnaturel, comme ce don ultime et gratuit de Dieu, il y a absolument en lui une possibilité de rencontre réelle avec Dieu, une rencontre qui doit nécessairement être médiatisée en raison de l'intensité de l'espace ontologique qu'il faut franchir entre Dieu et l'homme. La foi de l'Eglise, disait Monseigneur Albert Rouet, professe que dans l'oeuvre du salut, Dieu « constitue l'homme participant de la nature divine, sans confusion, sans mélange » 58(*). Pour Karl Rahner, cette initiative de Dieu conduit l'homme à une certaine immédiateté par rapport à Dieu ; une immédiateté qui, sans offusquer en quoi que ce soit l'essence de Dieu, n'implique pas non plus la disparition ou le recul pure et simple de l'homme, le non divin, le créé. Il pense en effet que « Dieu comme Dieu n'a pas besoin de se ménager une place en faisant qu'un autre, qui n'est pas lui, libère la place »59(*). Il s'en suit donc que cette immédiateté par rapport à Dieu n'est réalisable que dans une synthèse du divin et de l'humain, une synthèse de la volonté absolue de Dieu qui se communique et de l'acceptation de cette communication par l'homme. C'est une immédiateté qui, « quelque soit la manière plus précise de l'entendre, ne peut avoir lieu en elle-même, ou bien ne peut être possible, du simple fait qu'elle aussi, en quelque sens que ce soit, se trouve médiatisée »60(*). * 53 Cf. CEC 1996-1997 * 54 THEO, p. 701 * 55 Cf. PDTC, p. 205. * 56 K. RAHNER, « L'expérience de la grâce », dans ETIII, p. 76. * 57 TFF, p. 156. * 58 A. ROUET, « Le salut comme communication de Dieu », Rencontre interreligieuse du 12 mars 2003, dans www.diocese-poitiers.com.fr/documents/salut.html . * 59 TFF, p.101. * 60 Ibidem, P. 100. |
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