Le christ comme médiateur du salut, essai d'herméneutique africaine du message chrétien à la lumière de la christologie de karl Rahner( Télécharger le fichier original )par Thomas RAINCHOU Grand séminaire notre dame de l'espérance de Bertoua - Attestation de fin d'étude de théologie 2006 |
3.2.2. Identité africaine comme médiation pour son salutEdoh F. Bedjra affirme que « pour arriver aux hommes, le salut de Dieu a besoin pour se faire vrai dans l'histoire des hommes d'aujourd'hui, de l'homme et de ses systèmes d'efficacité »178(*). Cette conviction, et celle de la présence réelle du mystère du Christ en tout homme, même dans l'anonymat telle que Rahner l'a fait voir179(*), fondent cette proposition de l'identité africaine comme lieu de la médiation pour son salut. A bien observer l'expérience culturelle et religieuse des peuples africains en dehors de la révélation chrétienne, on y découvre de façon bien claire les valeurs d'espérance, de paix, de joie et d'unité qui sont devenues aujourd'hui l'aspiration profonde des Africains. L'expérience religieuse africaine révèle dans l'ensemble une foi monothéiste portant sur le Dieu unique, le Très Haut, dont les divers rites de louange et les cultes célébrés visent fondamentalement et ultimement l'homme et son salut. Par ailleurs, la conscience anthropologique des cultures africaines accorde une place de choix à la vie comme une valeur sacrée reçue de Dieu à travers les ancêtres pour être transmises aux générations. L'homme est toujours compris non comme un individu isolé, mais comme membre d'une communauté de vie et essentiellement relationnel. Dans un tel contexte où le salut de l'homme est la première préoccupation, les valeurs de paix, de prospérité, de solidarité et d'unité sont aussi premières et structurent l'agir des hommes. Cette réalité identitaire des peuples africains permet donc de comprendre que la crise dans laquelle ils sombrent n'est pas seulement la conséquence du retard technique et économique mais aussi celle de la désarticulation voire de l'aliénation de son identité au contact avec des civilisations en expansion et en position de domination. S'il est vrai que l'homme peut vivre implicitement, même sans le connaître et le confesser explicitement, le mystère du Christ, il est autant vrai que l'on peut lire dans l'identité africaine une médiation pour le salut de l'Afrique. De manière concrète, les Africains doivent être eux-mêmes les agents de leur libération, ils doivent réveiller les valeurs positives de leur culture pour retrouver leur propre identité, qui en elle-même est favorable à leur salut dans son aspect catégorial avec ses implications socio-politiques et donc dans son aspect essentiel en tant qu'avènement du Règne de Dieu. Il faut cependant le reconnaître, une telle entreprise demeure difficile en elle-même compte tenu du sérieux coup historique qu'a reçu l'identité africaine avec la traite des esclaves et la colonisation. Ces deux moments de l'histoire africaine, comme le souligne Edoh F. Bedjra, « constituent des brisures ontologiques qui laissent sur l'Afrique et donc sur sa culture des conséquences néfastes, inattendues et insoupçonnées »180(*). Le retour à l'identité africaine nécessite, humainement parlant, que soient remontées ces conséquences. Si du point de vue humain, c'est pratiquement difficile voire impossible de le faire, un modèle divin devient absolument nécessaire, et même impératif et indispensable. C'est ici que peut et doit se situer la nécessité de la médiation du Christ en Afrique dans toute sa nouveauté. * 178 EDOH F. BEDJRA, Op.cit., p. 296. * 179 Cf. TFF, p.348. * 180 EDOH F. BEDJRA, Op. cit., p. 298. |
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