Section 4 : Des impacts de l'activité
humaine sur les écosystèmes
Les activités anthropiques ayant un impact sur les
écosystèmes congolais concernent la récolte du combustible
ligneux, l'agriculture, l'exploitation forestière, la récolte des
produits forestiers non ligneux, la pratique des feux de brousse,
l'exploitation minière, la chasse et la pêche.
4.1. Impacts de la récolte des combustibles
ligneux
L'énergie-bois représente environ 88 % de la
consommation totale d'énergie dans les secteurs domestiques, industriels
et de transport face aux autres formes d'énergie (pétrole,
électricité et charbon). Au regard des potentialités
forestières énormes du Congo, on serait porté à
croire qu'il ne peut y avoir une pénurie d'énergie-bois. La
réalité est toute autre. Dans certaines régions, la
demande en bois de feu excède la capacité
régénératrice des terres forestières. Seules les
régions relativement peu peuplées ou très boisées
de la Cuvette Centrale semblent n'avoir que peu de problèmes
d'approvisionnement en combustibles ligneux, hormis quelques
périmètres autour des grandes agglomérations et des
villes.
4.2. Impacts de l'agriculture
Près de 60 % de la population congolaise seraient
constitués des ruraux. Ces derniers pratiquent essentiellement une
agriculture de subsistance. Pour ce faire, le milieu forestier leur procure un
meilleur rendement que les conditions de savane. Par ailleurs, plusieurs
cultures destinées à l'exportation ou au marché
intérieur (café, cacao, palmier, etc.) s'accommodent mieux d'un
type forestier climacique. L'agriculture extensive est préjudiciable au
maintien des forêts, surtout en zones de forte densité où
le raccourcissement de la période de jachère ne permet plus
à la forêt de se reconstituer.
En République Démocratique du Congo,
l'accroissement des surfaces cultivées entraîne une destruction
massive des écosystèmes forestiers et savanicoles et donc de leur
biodiversité. Dans ce dernier écosystème, la situation est
aggravée par les feux de brousse saisonniers, tardifs et
incontrôlés. L'agriculture traditionnelle, qui utilise une
technologie rustique à faible production, favorise la reconstitution
forestière par le système de jachère. Mais l'accroissement
rapide des besoins alimentaires consécutif à une
démographie galopante incite les paysans à raccourcir la
durée de la jachère. Cette pratique appauvrit les sols et oblige
les agriculteurs à chercher de nouvelles terres en forêt. Les
pratiques agricoles modernes s'imposent de plus en plus en faisant appel
à des variétés cultivées mises au point par la
biotechnologie, au détriment des variétés locales mieux
adaptées. L'usage de plus en plus répandu d'engrais biologiques
et chimiques pour accroître les rendements des cultures ainsi que
l'utilisation des pesticides peuvent entraîner la contamination des
sols, des cours d'eau et des nappes phréatiques et provoquer des
problèmes de santé chez les populations.
Par ailleurs, le surpâturage et la transhumance des
troupeaux provoquent une dégradation rapide des sols spécialement
sur les terrains accidentés. Cette situation est particulièrement
grave dans le Nord-Kivu, le Sud-Kivu, le Bas-Congo, la province orientale et le
Katanga.
4.3. Impact de l'exploitation
forestière
Au Congo, l'exploitation forestière de bois d'oeuvre se
déroule selon la méthode sélective. Elle consiste à
récolter les belles tiges des essences commerciales recherchées,
laissant derrière une forêt écrémée. Le
risque d'épuisement de ces espèces prisées est donc
permanent dans ce type d'exploitation, surtout lorsqu'elle est
répétitive. Elle provoque un déboisement annuel de l'ordre
de 6.000 hectares. Toutefois, les superficies définitivement
déboisées, représentées par les routes ouvertes,
les beach (parcs à bois), les camps et autres ouvrages d'exploitation
sont estimées à 2.000 hectares par an. Une telle exploitation
n'est en soi que peu préjudiciable à l'écosystème
forestier.
Le bois couvre environ les trois-quarts des besoins
énergétiques de la République Démocratique du
Congo. On estime la consommation annuelle moyenne de bois de feu dans
l'ensemble du pays à 1 m3 équivalent / bois par personne. En
termes de charbon de bois, par exemple, les besoins annuels estimés pour
Kinshasa sont de l'ordre de 400 à 500 000 tonnes. Cette situation
entraîne un déboisement aigu dans les régions
péri-urbaines et provoque une surexploitation des espèces
préférées par les producteurs de charbon de bois. Par
ailleurs, les mesures d'efficacité énergétique pouvant
restreindre la demande en bois de feu se heurtent à la pauvreté
quasi chronique et au niveau insuffisant d'instruction des populations rurales
et urbaines.
Par ailleurs, les écosystèmes côtiers,
plus particulièrement ceux de la région de Moanda, sont
dégradés par les déversements d'hydrocarbures en
provenance des navires et des exploitations pétrolières
offshores.
Les conséquences de l'exploitation de ces forêts
sur la conservation des ressources de la biodiversité sont de plus en
plus évidentes, étant donné l'existence des interrelations
étroites entre le monde végétal et le monde animal.
Ainsi, les conséquences néfastes de cette exploitation se
manifestent sur la faune sauvage à la suite de la disparition d'arbres
nourriciers et d'arbres refuges. C'est le cas notamment des chenilles dont les
espèces les plus appréciées vivent sur les arbres des
familles des Méliacées et des Césalpiniacées, qui
comportent malheureusement la plupart des essences commerciales intensivement
exploitées.
4.4. Impacts des autres formes
d'exploitation
Les formes de pression que subissent les ressources naturelles
ne sont pas les moindres du point de vue de la conservation des ressources de
la biodiversité. Elles sont ainsi regroupées simplement par le
fait d'un manque de données chiffrées, fiables pour rendre compte
de leurs impacts.
4.4.1. De la récolte des produits forestiers non
ligneux
Les produits forestiers non ligneux comprennent tous les
produits tirés de la forêt à des fins autres que
l'utilisation conventionnelle de la matière ligneuse. Ces produits,
servant tant à la pharmacopée traditionnelle qu'à
l'alimentation humaine, sont parfois localement exploités de
manière intensive et procurent des revenus substantiels aux ruraux par
leur mise.
La réglementation en cette matière est
insuffisante et imprécise. Aucun mécanisme devant assurer la
pérennité de ces produits n'est mis en place. Les statistiques
par ailleurs échappent à l'administration; d'où la
difficulté d'une planification pour leur exploitation rationnelle.
4.4.2. De la pratique des feux de brousse
Le feu est l'outil privilégié des
agriculteurs traditionnels pour l'installation de leurs champs après
défrichement de la forêt. Pour l'éleveur, l'utilisation de
feu favorise l'apparition des jeunes repousses des graminées vivaces
très appréciées par le bétail.
En zone humide, les feux sont généralement
maîtrisés. Les conditions climatiques ne favorisent pas leur
extension en dehors des zones mises à feu. Dans les zones sèches
particulièrement, la maîtrise du feu est difficile et des
incendies incontrôlés peuvent anéantir en quelques jours
les réserves ligneuses et herbacées sur des milliers d'hectares.
C'est surtout la végétation ligneuse et les herbacées
annuelles qui en souffrent.
Les principaux effets de ces feux de brousse sont
l'accélération de l'érosion, particulièrement en
zones accidentées et à forte pluviosité, la destruction de
l'humus conduisant à la perte de la fertilité des sols et
l'appauvrissement de la flore par la destruction des graines des plantes
annuelles.
4.4.3. De l'exploitation minière
L'exploitation minière, tout
particulièrement lorsqu'elle est pratiquée à ciel ouvert
sur des grandes superficies, est préjudiciable au maintien de la
biodiversité. Les activités extractives ou minières,
même organisées de manière rationnelle pour l'exploitation
des gisements, conduisent très souvent à la dégradation
des ressources de l'environnement. La gravité et l'ampleur de cette
dégradation sont fonction du volume des ressources exploitées et
du type de ressource susceptible de générer des pollutions
particulières nuisant aux éléments biotiques du milieu.
Dans les régions minières de la
République Démocratique du Congo, l'ouverture de carrières
tant artisanales qu'industrielles aliène certains territoires forestiers
ou agricoles et constitue une source potentielle d'accidents pour les animaux.
Dans la plupart des cas, ces carrières, même une fois
remblayées, restent impropres à l'utilisation agricole. Des
terres et de nombreux cours d'eau sont contaminés par les métaux
lourds issus du lavage des minerais et disséminés dans
l'environnement par l'eau et l'air. Cette pollution a des effets
néfastes sur nombre d'espèces animales et
végétales.
4.4.4. De la chasse et pêche
Au Congo, on estime qu'environ 75 % des protéines
animales proviennent de la chasse, régulièrement pratiquée
autour des villages et le long des voies de communications. La chasse de
subsistance est moins nocive et participe même à la
préservation de la ressource cynégétique dont la
forêt constitue la réserve, en autant que la pression
démographique ne soit pas forte. La chasse commerciale, par contre,
née de la nécessité de répondre à la demande
des populations urbaines en viande de gibier, peut devenir destructrice.
Le développement des routes facilite
l'évacuation des produits de la chasse vers les centres urbains et
induit des déséquilibres faunistiques, amplifiés par un
braconnage professionnel orienté vers la récolte des
trophées, d'ivoires, ou la capture d'animaux de compagnie (oiseaux,
serpents, singes, etc.). Ces activités provoquent la raréfaction,
voire la disparition pure et simple de certaines espèces.
Quant aux ressources halieutiques naturelles en eaux
continentales, on note une augmentation des prélèvements
sélectifs concentrés sur quelques espèces
recherchées par les consommateurs (par exemple: le capitaine du fleuve
Congo). Ceci conduit à un déséquilibre écologique
par élimination de certaines espèces.
L'importance de conserver la diversité biologique est
indéniable en vue de pérenniser les ressources biologiques
indispensables au développement socio-économique durable du
pays.
Pour la République Démocratique du Congo,
dont l'abondance et la variété des ressources biologiques en font
une grande puissance environnementale tant au niveau du continent africain
qu'à celui de la planète, les systèmes
socio-économiques formel et informel existant dans le pays semblent
mettre en dualité l'urgence de conserver les ressources biologiques avec
l'impérieuse nécessité de survie des populations et de
développement.
Du point de vue de la biodiversité, les facteurs
humains comptent parmi les éléments fondamentaux de la gestion
des écosystèmes. En effet, l'homme joue tour à tour le
rôle de destructeur et de protecteur de l'environnement.
CHAPITRE I : DE L'EXPLOITATION DE L'ECOSYSTEME
FORESTIER AU REGARD DE LA LOI N° 011/2002 DU 29/08/2002 PORTANT CODE
FORESTIER
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