2.
Problématique
Depuis la Conférence d'Arusha (janvier 1984) qui
préparait les prises de position africaines à la
conférence de Mexico (août 1984) et l'adoption du programme
d'action de Kilimandjaro, les milieux politiques africains s'affirment beaucoup
plus favorables à la planification des naissances, conçue comme
un droit au «bien-être» et un élément important
d'une politique de santé. L'expérience africaine des
années soixante dix : sécheresse, désertification,
récession économique, urbanisation rapide, chômage des
jeunes, a renforcé l'intérêt pour la maîtrise de la
croissance démographique (Gubry, 1988; Sala-Diakanda, 1991).
La conférence internationale du Caire de 1994 a
été une occasion pour faire le point sur les progrès
accomplis et pour proposer de nouvelles actions. C'est au cours de cette
conférence que le concept de SMI/PF sera remplacé par celui de la
santé de reproduction qui tient davantage compte de la
stérilité, des individus, du couple et de l'enfant. Malgré
ces améliorations, la toile de fonds est restée la
même : la recherche de l'amélioration du bien être
familial par la baisse de la croissance démographique. Pour ce faire,
parmi les six déterminants proches de la fécondité (la
nuptialité, la pratique de la contraception, l'allaitement, l'abstinence
post-partum, la stérilité et l'avortement), la CIPD a
privilégié la pratique contraceptive. L'idée de base
était donc d'un programme de planification familiale avec des services
de qualité, bénéficiant d'un soutien des autorités
politiques et appuyé par des activités de sensibilisation du
grand public. Cela, pour entraîner des changements de comportements en
matière de procréation (NZITA, 2008).
Or, les déclarations officielles dans une enceinte
internationale ne valent pas modification des règlements, des lois, des
prises de position qui contrôlent, dans la vie quotidienne d'un pays,
l'accès à la planification des naissances. Il existe une grande
diversité des attitudes dans les décisions concrètes au
sein de chaque pays. I1 arrive même que les positions officielles, prises
à l'extérieur, soient très peu ressenties
à l'intérieur du pays (Locoh, 1989).
Les programmes de planification familiale en Afrique, c'est
à eux qu'on pense d'abord lorsqu'on parle de programmes en
matière de population, associent encore dans bien des pays ces deux
réalités à la fois : des programmes ambitieux, clés
en main, proposés avec une insistance croissante aux gouvernements par
des organismes internationaux et une absence quasi-totale des infrastructures
les plus modestes pour réaliser ces programmes. Mais le même
décalage entre les ambitions affichées et leurs effets concrets
dans la vie quotidienne pourrait s'appliquer sans peine à d'autres
secteurs censés agir sur les familles (Locoh, op.cit).
Les résultats de plusieurs enquêtes menées
en Afrique sur la pratique contraceptive révèlent qu'il faut
encore beaucoup d'efforts dans la matérialisation des projets en ce
sens. En dépit du manque de volonté politique dans certains pays,
les rapports de genre dans le domaine de la sexualité est aussi un
obstacle dans la pratique contraceptive. Ces rapports, tels qu'ils existent en
Afrique subsaharienne empêchent les femmes de négocier valablement
un rapport sexuel ou de décider d'une naissance. La décision en
matière de procréation dépendant en effet, principalement
du mari (RWENGUE M., 1997).
En République Démocratique du Congo, bon nombre
des lois en vigueur, visent à la protection de la femme congolaise et
à sa pleine intégration sociale. Notamment, la déclaration
sur l'élimination de la violence à l'égard de la femme,
doc.ONU.A/RES/48/104, mais celle-ci n'accède pas encore à un
statut qui lui permette de s'épanouir pleinement et de participer
à la prise des décisions relatives à la taille de sa
famille. Le faible taux de prévalence contraceptive de la femme
congolaise en est sans doute une des preuves.
Ceci est appuyé par les résultats de MICS2
(2001), qui indiquent qu'une femme sur trois utilise une méthode
contraceptive, moderne ou traditionnelle. Parmi ces utilisatrices, 27% ont
recours à une méthode contraceptive traditionnelle et seulement
4% à une méthode contraceptive moderne pour prévenir une
grossesse non-désirée. Ces chiffres sous-estiment la
réalité dans la mesure où ils n'excluent pas de la
sous-population susceptible de concevoir les femmes enceintes, infertiles et
celles en aménorrhée post-partum. La pratique de la contraception
moderne par les femmes en union ou leurs partenaires est donc
particulièrement faible.
Six ans après, les résultats de l'EDS-RDC (2007)
montrent que les méthodes contraceptives sont relativement bien connues
en RDC. En effet, un peu plus de huit femmes sur dix (82%) contre neuf hommes
sur dix (89%) ont déclaré connaître au moins une
méthode.
Mais les besoins non satisfaits en matière de
planification familiale restent encore importants, puisque près d'une
femme en union sur quatre (24%) en a exprimé le besoin. La
majorité de ces femmes auraient voulu utiliser la contraception comme
moyen d'espacement des naissances (19% contre seulement 5% pour limiter leur
descendance). Le nombre idéal d'enfants étant de 6,3 pour
l'ensemble des femmes et de 6,8 pour les femmes en union. Chez les hommes, le
nombre idéal d'enfants est un peu plus élevé avec 7,0 pour
l'ensemble des hommes et 8,0 pour ceux en union (EDS-RDC, 2007).
De ce qui précède, il apparait que plusieurs
facteurs restent à la base de cette situation. Cette étude se
propose donc de répondre aux questions ci-après :
- Quels sont les déterminants ou les facteurs
à la base du besoin non satisfait en matière de planification
familiale au sein du couple en République Démocratique du
Congo?
- Les points de vue des hommes et des femmes ne
seraient-ils pas pertinents dans les choix contraceptifs de leurs partenaires ?
Qu'est-ce qui les empêchent d'utiliser la contraception malgré
leur bonne intention ?
3. Objectifs :
3.1. Objectif
général
Par ce travail, nous pensons mettre à la disposition
des décideurs politiques, organismes nationaux qu'internationaux des
éléments nécessaires, sur base desquels il faudra miser
pour espérer réussir dans les programmes liés à la
planification familiale, à moyen et à long termes.
3.2. Objectifs
spécifiques
Trois objectifs spécifiques sont assignés dans
cette étude, à savoir :
- (i) évaluer l'importance des Besoins Non
Satisfaits ;
- (ii) identifier les facteurs à la base de la non
satisfaction des besoins en matière de régulation ou de
contrôle des naissances ;
- (iii) caractériser les couples ayant les Besoins
Non Satisfaits en Planification Familiale.
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