La confrontation des
éducateurs au monde pénitentiaire
La question que pose sans doute un tel partenariat est celle
de savoir quelle conception l'éducateur donne à la peine. En
effet, dans la perspective historique de l'Education Surveillée devenue
en 1990 la Protection Judiciaire de la Jeunesse, ce
« retour » en prison pourrait a priori être
vécu professionnellement comme une sorte de retour en arrière.
Cependant lors des sessions de formation à l'ENAP, tout
le monde semble s'accorder sur l'idée que « nous allons tous
dans le même sens ». Cette clairvoyance à son
importance, puisque elle conditionnera de près ou de loin l'ensemble de
la vie en détention. En tout état de cause, au cas où les
points de vue seraient amenés à diverger sur cette question entre
le personnel éducatif et celui de surveillance, on peut se demander si
cela constituerait un obstacle au travail en commun au sein des E.P.M ?
Comment l'éducateur se positionnera-t-il face à
des problématiques carcérales qui pourront le choquer et pour
lesquelles il sera tenté de les analyser avec son éthique
professionnelle. Autrement dit, les notions d'éthique et de
déontologie sont elles les mêmes entre un surveillant et un
éducateur ? Je pense ici au quartier mineurs de la maison
d'arrêt de X... où sur la porte de la cellule d'un mineur
était affichée une étiquette marquée
« pointeur ». L'éducatrice alors en poste au sein de
cet établissement était persuadée que ce panneau avait
été écrit de la main d'un surveillant et de ce fait avait
alerté la direction de l'établissement. Ce qui évidemment
avait crée une tension palpable entre surveillants et éducateurs
au sein de la prison. Il faut gager et cela au regard du profil volontaire des
surveillants amenés à travailler au sein des E.P.M et du fait de
leur sensibilité éducative, que ce type de problème sera
peu prégnant.
Un second constat pourrait mettre à mal les
éducateurs. C'est celui lié à la constitution du groupe de
jeunes pris en charge au sein des E.P.M. En effet, dans les F.A .E de la
P.J.J, il existe les commissions d'admission.
Celles-ci permettent à l'équipe éducative
de constituer sur dossier le groupe de jeunes amené à vivre en
collectivité et cela en fonction des délits et des
problématiques de chacun. Or en E.P.M, il n'y a pas a priori ce
« choix » dans la constitution du groupe des détenus
alors que dans le même temps la vie collective se veut proche par
certains égards de celle qui existe en foyer (gestion en collectif des
moments clés de la journée : repas, lever, coucher). Il
existera donc un certain nombre de difficultés dans la prise en charge
quotidienne du groupe au vu des profils délinquants. Ce qui
nécessiterait par exemple un partenariat plus poussé avec le
service médico-psychologique de la détention (SMPR).
Ainsi, mettre en commun les compétences des
éducateurs et des surveillants, c'est aussi faire en sorte que ce
partenariat irradie par exemple sur les relations avec le SMPR ou les avocats
ou bien encore avec l'éducation nationale.
Enfin, comment se positionnera l'éducateur dans une
situation conflictuelle qui éclate en détention et comment cette
situation sera-t-elle gérée ? Sera-t-elle de la stricte
compétence de l'administration pénitentiaire ? Et comment
dans cette hypothèse, pourra réagir l'éducateur face
à une gestion des conflits qui sera peut-être moins basée
sur la négociation ?
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