IV-3-REPRESENTATIONS SOCIALES SUR L'ENVIRONNEMENT
IMMEDIATCHAPITRE V: REPRESENTATIONS SOCIALES SUR
L'ENVIRONNEMENT IMMEDIAT
Il est question dans le cadre de cette section de
présenter les résultats obtenus sur les représentations
sociales des risques, les pratiques des habitants des zones
étudiées envers les risques, leurs croyances. Comment ils se
comportent à leur égard, individuellement et collectivement.
Leurs enjeux réels dans ce domaine. Ceci dans une approche
essentiellement qualitative.
La notion de représentation sociale trouve
une partie de sa
pertinence dans cette expérience
d'approfondissement dans les
liens existants entre les opinions. On peut la comprendre
comme
un système de savoirs pratiques (opinions,
images, attitudes,
préjugés, stéréotypes,
croyances), générés en partie dans les
contextes d'interactions individuelles ou/et inter
groupaux. J.M.
SECA (2001 :11)
Il s'agit ici de définir la perception que les
habitants des zones à risque ont de leur environnement immédiat,
de leurs actions. La perception elle aussi étant un concept renvoyant
à la représentation mentale d'un ou plusieurs
phénomènes, déterminante dans l'adoption de comportements
spécifiques. L'analyse qualitative de la perception des risques par les
populations enquêtées prend en compte trois indicateurs qui
sont : la perception de l'acuité des problèmes liés
au cadre de vie, la perception sur l'origine des problèmes sanitaires,
la perception des causes de l'accumulation des ordures.
IV-3-1-PERCEPTION DE L'ACUITE DES PROBLÈMES LIÉS
AU CADRE DE VIE
De manière
générale, il apparaît que peu de personnes sont
informées au sujet des problèmes que peuvent causer les
marécages sur leur santé et leurs activités
économiques. La perception de l'acuité des problèmes
liés au cadre de vie a été saisie à l'aide de la
question suivante : selon vous, quels sont les dangers de votre milieu
naturel ?
Tableau 4 : Problèmes perçus comme
étant graves au niveau des sites à risque
Problèmes sanitaires
Crise économique
Problèmes environnementaux
Problèmes
Source : Notre enquête sur le terrain
De ce tableau, il ressort que la population
enquêtée accorde une faible importance aux problèmes
liés à leur cadre de vie. Ce qu'elle considère comme
grave, c'est la crise économique. La crise économique qui a pour
corollaire la pauvreté, la dévaluation et l'inflation. Cette
dernière figure au premier rang des problèmes cités. Les
problèmes d'insalubrité sont comme mineurs. Les problèmes
sanitaires sont cités en troisième lieu car pour la population,
les risques ne font pas l'objet d'un problème préoccupant, le
degré de familiarisation avec ces risques est une conséquence de
l'expérience ou de l'habitude. L'apparition et la recrudescence de
certaines maladies comme problème ne sont pas seulement le propre de
leur milieu, mais sont des problèmes à la fois mondiaux et
nationaux tel qu'affirme M. ELIAS (commerçant à
Maképé Missoké) « Croyez-vous que c'est seulement
dans cette zone qu'il y a problèmes de santé ? Allez aussi
voir à Bonapriso ou même à Paris, il n'y a pas risque de
santé »
. Les problèmes sanitaires ne sont plus
considérés ici comme préoccupant car n'étant pas
spécifiques à leur milieu.
IV-3-1-1- Perception de l'acuité des
problèmes liés au cadre de vie selon le niveau
d'instruction
Danger
Pas de danger
Danger grave
Primaire
Secondaire
Universitaire
Tableau 5: acuité des problèmes liés
au cadre de vie selon le niveau d'instruction
Source : Note enquête sur le terrain
Les personnes non instruites ne perçoivent pas
l'acuité des problèmes d'insalubrité comme danger. Pour
eux, en dehors de la crise économique qui est un danger, il y a aussi le
Sida qui est partout. Mais pour les personnes instruites, (personnes ayant un
niveau secondaire au moins) les problèmes sanitaires apparaissent comme
un danger permanent dans leur milieu. Ils mettent en exergue l'émergence
régulière des maladies tels que le paludisme, le cholera.
Nous faisons face tous les jours ici à des
véritables problèmes sanitaires. Ce milieu est vraiment un milieu
à risque. Nous sommes parfois victimes du cholera à cause du
caractère impropre de l'eau que nous consommons. Nous n'avons pas d'eau
potable. On se contente parfois des eaux du puits non traité. Aussi nous
faisons chaque jour face aux ordures qui attirent des moustiques, des eaux
usées qui forment le marécage. La conséquence, c'est
parfois le paludisme et certaines crises. (JEAN MICHEL,
étudiant, Maképé Maturité)
En effet, l'effet de l'instruction sur la perception de
l'acuité des problèmes liés à l'environnement
immédiat peut s'expliquer par le fait que l'appréhension d'un de
ces quelconques problèmes ou la compréhension de leurs processus
exige un minimum d'instruction. Dès qu'on accède au
2nd cycle de l'enseignement secondaire, on acquiert les
éléments de connaissance fondamentale en ce qui concerne
l'environnement. Cette connaissance leur donne le minimum sur l'hygiène
et la salubrité. Ce qui ne constitue pas le cas chez ceux qui n'ont pas
été à l'école.
IV-3-1-2- Perception de l'acuité des
problèmes lies au cadre de vie selon le sexe
Les diverses
personnes interviewées hiérarchisent différemment les
risques (BARJONET, CAUZARD 1987) parce qu'ils hiérarchisent
différemment les valeurs (GAILLARD 1995) et donc les normes.
Selon le sexe, les hommes reconnaissent les dangers
liés à l'habitation des sites marécageux. Ils
conçoivent leur environnement comme un danger car souvent victimes des
inondations et des destructions en saison pluvieuse.
Je suis gérant d'une boutique et j'habite
là tout prêt. Je sais qu'il y a
un danger dans cette zone. Pendant la saison pluvieuse,
les pluies et les courants d'eau remplissent même nos maisons. Il n'y a
pas de canalisation des eaux dans mon quartier. En plus, il n y a chaque fois
des maladies qui apparaissent. Pour ne pas accroître ces risques, je fais
tout pour être à l'aise. J'ai fait creuser le W.C. de
manière profonde chez moi. Pour les eaux usées et les ordures, je
les jette n'importe où. Je suis obligé, l'africain n'a pas
d'hygiène, il est toujours exposé au risque quoi qu'il
fasse. (M. ALBERT, Maképé Maturité)
L'analyse permet de comprendre que les hommes quoi que
conscients du danger de leur milieu pensent que ce danger est commun à
tous les africains. C'est pourquoi ils continuent dans la fabrique des risques
par le rejet des eaux souillées, des ordures « n'importe
où ». Chez les femmes, surtout les « buy and
sellam » rencontrées dans les marchés, malgré le
fait qu'elles côtoient chaque jour les ordures et les eaux
souillées, ne sont pas conscientes du danger qu'elles courent. Si elles
s'offusquent de la proximité des marécages, c'est plutôt
parce qu'ils gênent les « assos » (clients) et non
parce qu'ils sont des sources de maladies ou d'inconfort pour elles.
Ce qui me préoccupe plus, c'est le fait que
ces eaux souillées et ces ordures gênent mes assos. Les dangers,
il n y en a pas, je jette mes ordures et les déchets de mes marchandises
dans n'importe quel coin noir. C'est la mairie qui ne fait pas son travail.
Elle ne doit pas toujours attendre qu'on lui signale qu'il y a un danger ici.
Donc, je fais comme je veux. Ce n'est pas ma faute. (JEANNE,
Maképé Maturité).
Je suis vendeuse de condiment, il n'y a pas de
risque ici. Depuis je vends dans cet endroit quoiqu'il est marécageux.
Je n'ai jamais été malade. Même si je le suis, ce n'est pas
parce que je suis en contact avec les ordures. Tout homme tombe malade. Ce qui
me gêne le plus ici, c'est que quand il pleut, je vend moins à
cause du fait que ces eaux et ordures empêchent mes clients de circuler.
C'est tout. (COLLETTE, Maképé Maturité)
Les femmes buy and sellam ne reconnaissent pas les dangers de
leur milieu que par rapport au manque dont elles sont souvent victimes. Elles
ne se préoccupent pas des dangers sanitaires qui pour elles n'existent
même pas. Ce résultat peut s'expliquer par une certaine
méfiance de ces femmes. Car pour certaines, le but de cette
enquête serait de provoquer le contrôle du marché par la
mairie. Il apparaît clair que même si ces femmes ont des
problèmes de santé, déclarer est difficile de peur de
« se vendre moins cher. » tel que
déclaré par GISELE (Maképé Missoké)
Vous voulez qu'on vous dise qu'il y a danger ici
pour que vous partez dire à l'Etat de venir nous déguerpir n'est
ce pas ? Il n'y a donc pas de danger ici.
(2) Clients. Nom qu'utilisent les femmes by and sellam
pour désigner leurs clients
Aussi, la différence de perception de l'acuité
des problèmes liés au cadre de vie selon le sexe peut s'expliquer
par un accès différentiel à l'information au sujet des
problèmes liés à l'environnement immédiat,
tributaire de l'accès inégal des hommes et des femmes à
l'instruction. La proportion des femmes qui ont un niveau secondaire ou
supérieur est faible par rapport à celle des hommes (15% de
femmes instruites contre 29,5%des hommes)
Tableau 6 : découpage et restructuration
des discours sur l'acuité des problèmes selon le sexe
Zones
|
Noms
|
Fonctions
|
Sexes
|
Propositions
|
Maképé
Maturité
|
JEANNE
|
Commerçante
|
F
|
Notre milieu est sans
danger
|
MAMADOU
|
Moto taximan
|
M
|
Le risque ici est mineur
|
DEJOLIE
|
Commerçant
|
M
|
Il y a quand même un
risque à vivre ici
|
MONIQUE
|
Vendeuse
de beignets
|
F
|
Nous nous sentons bien
|
Maképé
Missoké
|
SERGES
|
Creuseur
de sable
|
M
|
Comme dans toutes les
zones marécageuses,
il y a des maladies à tout
moment
|
CHRISTELLE
|
Infirmière
|
F
|
C'est un milieu
dangereux par moment
|
BENEDICTE
|
Commerçante
|
F
|
Il n y a rien de mauvais
ici
|
AMOS
|
Menuisier
|
M
|
Il y a urgence à
aménager cet endroit.
|
Source : Notre enquête sur le terrain
Les discours recueillis permettent de comprendre que les
individus perçoivent différemment leur milieu selon le sexe. Les
femmes ne voient à priori pas d'inconvénients dans leur milieu
quelque soit la fonction, contrairement aux hommes qui quoique conscients des
dangers minimisent ceux-ci. Les représentations des risques sont donc
construites différemment selon le sexe et selon les différents
niveaux d'influence. Les schémas de pensées orienteraient alors
les conduites, ou les justifieraient.
IV-3-1-3-Perception de l'acuité des
problèmes lies au cadre de vie selon la durée de résidence
dans le quartier.
Les personnes ayant résidé plus de 10 ans dans
les zones marécageuses hiérarchisent les risques. Les risques
n'ont pas le même poids pour les personnes interviewées. Pour
certaines, il n'y a même pas de risque dans leur milieu.
Il n y a pas de risque ici, je suis
dans ce quartier depuis 25 ans, je vends les maniocs et je n'ai jamais eu
d'infection, ni de maladie. Mon quartier est bien. Cette
déclaration de M. ALAIN a été renforcée par celle
de AÏCHA
Allez vous adresser à ceux
qui pensent qu'il y a des dangers ici. Vous voulez faire détruire le
quartier pour rien. Je suis née ici et voici j'ai 30 ans, je ne suis pas
morte. Je nage même souvent avec mes enfants dans les cours d'eau que
vous voyez. C'est mon quartier. Il n y a rien
Si certaines personnes interviewées pensent qu'il n y a
pas de danger dans leur milieu, d'autres par contre pensent que ces risques
quand bien même il « en existerait restent
mineurs. » et ne peuvent en aucun cas avoir un effet
négatif énorme sur la santé, ni sur les marchandises
vendues. Cela se traduit par cette déclaration de COLLETTE
Le fait que vous me voyez encore bien portant prouve
qu'il n'y a pas de danger dans ce milieu. Les risques que vous évoquez
sont tellement mineurs ici. Il n'y a pas de risque majeur. Avez-vous
déjà vu un noir mourir de la saleté ? Même s'il
y a un danger, est-ce le propre de ce milieu ? Mes toilettes sont
là tout proche de ma cuisine et je vends juste là à
coté depuis 20 ans. Rien de grave ne m'est arrivé.
Les personnes ayant donc résidé plus de dix ans
dans le quartier perçoivent leur milieu comme
« bien ». Cela peut être dû à deux
facteurs : de façon générale, plus on réside
dans un quartier, plus on se familiarise avec les problèmes
spécifiques de ce quartier ; l'autre élément
d'explication est le phénomène dit d'appropriation. Plus les
individus séjournent dans un milieu, plus ils ont des relations
psychoaffectives poussées avec ce milieu. Ce genre de relations les rend
plus sensibles aux problèmes de ce milieu qu'ils considèrent
comme étant le leur et dans lequel ils se projettent.
Il apparaît clairement que sans être totalement
absents, l'acuité des problèmes liés au cadre de vie ne
constitue pas encore un sujet de vive préoccupation pour les populations
enquêtées. Ce résultat peut traduire l'ignorance et le
manque d'information et d'intérêt au sujet des risques liés
à l'habitation des sites à risques. Les ménagères
ont tendance à avoir plutôt une perception économique de
l'environnement immédiat. Ce résultat éclaire un peu plus
le débat déjà soulevé dans la revue de la
littérature autour de l'intérêt accordé par les
populations aux problèmes liés à l'habitation des zones
à risque. Est-ce que les populations dynamiques sont au courant des
risques ? La construction et la fabrique des risques relèveraient
du manque d'information, d'instruction et surtout de la crise
économique. La prépondérance des problèmes
économiques dans les réponses des personnes interrogées
conforte davantage le point de vue de A. YOUMBI (1992) qui pense que les
revendications pour un ordre démocratique interne et la lutte pour la
survie restent les préoccupations prioritaires des Camerounais.
IV-3-2-PERCEPTION DE L'ORIGINE DES PROBLEMES SANITAIRES ET
CAUSES DE L'ACCUMULATION DES ORDURES
Le désir de comprendre la
perception de l'origine des problèmes sanitaires a été
motivé par le fait qu'une catégorie de la population a
soulevé dans la perception de l'acuité des problèmes de
leur cadre de vie un danger sanitaire. Nous désirons savoir d'où
viennent ces dangers sanitaires. Les populations enquêtées (les
hommes et les personnes instruites surtout) évoquent le caractère
nuisible des ordures, la stagnation des eaux usées et la pollution
atmosphérique.
Tableau 7 : Découpage des discours
recueillis sur l'origine des maladies
Source : Notre enquête sur le terrain
Nous notons que de façon générale, dans
l'esprit des personnes interrogées, les déchets constituent les
éléments les plus nuisibles. Le second problème est celui
des eaux usées. Cependant les problèmes tels que la pollution
atmosphérique sont peu désignés.
L'importance inégale des problèmes
mentionnés tient probablement à 2 choses. Elle tient d'abord
à une acuité différentielle des problèmes
désignés. Les dangers et les problèmes varient suivant les
zones et les manifestations.
Ensuite, ce classement traduit la perceptibilité
différentielle des problèmes. Les ordures et les eaux
usées sont immédiatement perceptibles, ce qui n'est pas le cas de
la pollution atmosphérique qui exige tel qu'énoncé par (J.
MARCUS, 1989 :24) « la teneur en plomb de l'air » ou
la connaissance de litho météores nocifs en suspension dans
l'air. Compte tenu de la généralisation dans les zones de
Maképé des déchets au moment de la préparation de
cette enquête, nous avons jugé utile de demander aux personnes
enquêtées de donner les causes de l'accumulation des ordures et
des eaux souillées. Les réponses à cette question sont
diverses et leur importance varie aussi.
IV-3-2-1-Découpage et restructuration des
discours sur les causes de l'accumulation des ordures et des eaux
usées
Tableau 8 :
Découpage et restructuration des discours sur les causes de
l'accumulation des ordures et des eaux usées.
Locuteur
|
Zones
|
Propositions
|
Noyau référent
|
ARMAND
|
Maturité
|
Le gouvernement doit assurer
le strict minimum à la population
|
Gouvernement (Etat)
|
ALBERT
|
Maturité
|
La mairie de Douala 5e ne fait bien
son travail
|
Mairie (Etat)
|
GISELE
|
Missoké
|
AICHA
|
Missoké
|
TEZA
|
Missoké
|
Nous les Africains, nous manquons
de civisme. Nous sommes ignorants
|
Nous
(Incivisme)
|
JOSUE
|
Missoké
|
L'Africain est toujours exposé
aux risques. Nous n'avons pas le
choix. C'est notre façon de faire
|
Nous
(Ignorance)
|
COLLETE
|
Maturité
|
INOUSS
|
Missoké
|
PAUL
|
Maturité
|
La communauté urbaine de Douala
est seule responsable.
|
Communautés
Urbaines de
Douala (CUD)
Etat
|
BENEDICTE
|
Missoké
|
MONTE
|
Maturité
|
C'est la faute des pouvoirs publics.
Ils ne connaissent pas l'hygiène et la
salubrité
|
Pouvoirs publics
(Etat)
|
ELAN
|
Missoké
|
Source : Notre enquête sur le terrain.
IV-3-2-2-Analyse et interprétation des discours
recueillis sur les causes de l'accumulation des ordures.
Du tableau ci-dessus, il ressort que les individus
perçoivent les causes de l'accumulation des ordures dans leur zone comme
une défaillance de l'Etat. Ensuite dans une moindre mesure comme un
manque de civisme de la par des populations et enfin comme une
conséquence de la pauvreté.
IV-3-2-2-1-Part de l'état
En effet, les individus que ce
soit ceux de Maképé Maturité ou ceux de
Maképé Missoké tiennent pour principal responsable de
l'accumulation des ordures et des eaux souillées l'Etat qu'ils
qualifient « d'irresponsable » pour reprendre un
commerçant interviewé à Maképé
Missoké, Les pouvoirs publics sont indifférents au sort des
populations. La régularité des modèles argumentaires
(mairies, gouvernement, pouvoirs publics), ayant une polarité
négative atteste ce fait. L'insalubrité du cadre de vie est
perçue comme une défaillance des pouvoirs publics vis à
vis de leurs devoirs, comme une « défaillance de tout
système » pour reprendre les mots d'un commerçant
interviewé à Maképé maturité.
Toutefois il apparaît à l'inverse une faible
responsabilité des populations dans cette situation. Cette
responsabilité est multiforme.
IV-3-2-2-2- Manque de civisme
Certains pensent que les habitants
n'ont pas assez de civisme ou qu'ils n'assument pas leur responsabilité
dans la gestion de leur cadre de vie. D'autres par contre estiment que
l'accumulation des ordures tient à une ignorance des dangers liés
à cette pratique. Enfin, d'aucuns estiment que le dégradation du
cadre de vie découle d'un état de pauvreté des
populations. Bien que peu défendue, cette dernière thèse
est celle qui fait aujourd'hui école car certains spécialistes de
la sociologie des risques qui estiment qu'il existe une corrélation et
une synergie entre pauvreté et fabrique des risques par des populations.
(C. GILBERT, op. cit.)
Au terme de ce chapitre, il convient de relever que plusieurs
facteurs expliquent les dynamiques socio-économiques dans les sites
à risque de Douala. Les approches dynamiste et individuelle ont permis
de mettre en exergue la croissance démographique et l'expansion urbaine,
la croissance de l'exode rural et la difficulté d'intégration des
migrants comme causes ou mobiles des dynamiques socio-économiques dans
les sites à risque. La croissance démographique a pour corollaire
l`extension urbaine, la diversité des populations et l'apparition des
inégalités sociales. Ces inégalités
entraînent une occupation irrationnelle du terrain urbain par les couches
faibles et pauvres. Les quartiers non urbains illustrent cette occupation
spatiale désordonnée (habitat spontané, zones
marécageuses et inondables, zone polluée). Les difficultés
d'intégration des migrants dans l'espace urbain a pour
conséquence de véritables réceptacles ethno claniques. Les
populations font de plus en plus recours aux espaces dépourvus de tout
contrôle ou elles constituent « une civilisation rurale
dans l'enceinte même du périmètre urbain. »
(C. R. NGUIMALET, 2007 :4). La pauvreté des enquêtés,
leurs faibles revenus et la difficulté de logement sont des facteurs qui
les contraignent à lutter pour s'affirmer, dominer. Ils sont à
la quête du mieux être et d'une intégration
économique. Quelles que soient leurs caractéristiques, les
difficultés économiques qu'ils éprouvent, la
nécessité matérielle leur confèrent une perception
mineure des risques. Même si certains individus (en particulier les
instruits) sont conscients du danger, ceux-ci minimisent ce danger. Pour les
femmes buy and sellam, les marécages, les ordures et les pollutions sont
plutôt des handicaps pour leurs commerces, car gênant leurs
« assos ». Cette perception positive du milieu donne
à la population de ne pas se soucier de leurs cadres de vie.
Toutefois, dans quelles conditions vivent ces populations et
quelles stratégies développent-elles pour la survie
quotidienne ?
Individus
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