(*) Valeurs fixées par le Décret exécutif
n° 93-160 du 10 Juillet 1993.
Introduction :
Il ne faut pas confondre le traitement des eaux, qui a pour
fonction de les transformer en eau potable, et l'assainissement des eaux
usées rejetées par le consommateur après utilisation.
L'assainissement des eaux usées a pour objectif de collecter puis
d'épurer les eaux usées avant de les rejeter dans le milieu
naturel, afin de les débarrasser de la pollution dont elles sont
chargées.
2.1. Les étapes et procédés de
traitement des eaux usées :
La dépollution des eaux usées nécessite
une succession d'étapes faisant appel à des traitements
physiques, physico-chimiques et biologiques. En dehors des plus gros
déchets présents dans les eaux usées, l'épuration
doit permettre, au minimum, d'éliminer la majeure partie de la pollution
carbonée.
Selon le degré d'élimination de la pollution et
les procédés mis en oeuvre, plusieurs niveaux de traitements sont
définis : les prétraitements, le traitement primaire et le
traitement secondaire. Dans certains cas, des traitements tertiaires sont
nécessaires, notamment lorsque l'eau épurée doit
être rejetée en milieu particulièrement sensible.
A titre d'illustration, les rejets dans les eaux de baignade,
dans des lacs souffrant d'un phénomène d'eutrophisation ou dans
des zones d'élevage de coquillages sont concernés par ce
troisième niveau de traitement. Les traitements tertiaires peuvent
également comprendre des traitements de désinfection. La
réduction des odeurs peut encore être l'objet d'attentions
particulières.
2.1.1. Les prétraitements :
Les eaux brutes doivent généralement subir,
avant leur traitement proprement dit, un prétraitement qui comporte un
certain nombre d'opérations, uniquement physiques ou mécaniques.
Il est destiné à extraire de l'eau brute, la plus grande
quantité possible d'éléments dont la nature ou la
dimension constitueront une gêne pour les traitements ultérieurs.
Il s'agit principalement des déchets volumineux (dégrillage), des
sables et graviers (dessablage) et des graisses
(dégraissage-déshuilage) (DEGREMONT, 1978).
2.1.1.1. Dégrillage :
Au cours du dégrillage, les eaux usées passent
au travers d'une grille dont les barreaux, plus ou moins espacés,
retiennent les matières les plus volumineuses charriées par l'eau
brute, qui pourraient nuire à l'efficacité des traitements
suivants ou en compliquer leur exécution.
Le dégrillage permet aussi de protéger la
station contre l'arrivée intempestive des gros objets susceptibles de
provoquer des bouchages dans les différentes unités de
l'installation. Les éléments retenus sont, ensuite,
éliminés avec les odeurs ménagères (DEGREMONT,
1978).
2.1.1.2. Dessablage :
Le dessablage a pour but d'extraire des eaux brutes les
graviers, les sables et les particules minérales plus ou moins fines, de
façon à éviter les dépôts dans les canaux et
conduites, à protéger les pompes et autres appareils contre
l'abrasion et à éviter de surcharger les stades de traitements
suivants.
L'écoulement de l'eau, à une vitesse
réduite, dans un bassin appelé "dessableur" entraine leur
dépôt au fond de l'ouvrage. Les sables
récupérés, par aspiration, sont ensuite essorés,
puis lavés avant d'être soit envoyés en décharge,
soit réutilisés selon la qualité du lavage (DEGREMONT,
1978).
2.1.1.3. Dégraissage - Déshuilage :
Le déshuilage est une opération de
séparation liquide-liquide, alors que le dégraissage est une
opération de séparation solide-liquide (à la condition que
la température de l'eau soit suffisamment basse, pour permettre le
figeage des graisses). Ces deux procédés visent à
éliminer la présence des corps gras dans les eaux usées,
qui peuvent gêner l'efficacité du traitement biologique qui
intervient en suite (DEGREMONT, 1978).
2.1.2. Le traitement primaire :
Le traitement "primaire" fait appel à des
procédés physiques, avec filtration et décantation plus ou
moins aboutie, éventuellement assortie de procédés
physicochimiques, tels que la coagulation- floculation :
2.1.2.1. Coagulation - floculation :
La turbidité et la couleur d'une eau sont
principalement causées par des particules très petites, dites
particules colloïdales. Ces particules, qui peuvent rester en suspension
dans l'eau durant de très longues périodes, peuvent même
traverser un filtre très fin. Par ailleurs, puisque leur concentration
est très stable, ces dernières n'ont pas tendance à
s'accrocher les unes aux autres. Pour les éliminer, on a recours aux
procédés de coagulation et de floculation.
La coagulation a pour but principale de déstabiliser
les particules en suspension, c'est-à-dire de faciliter leur
agglomération. En pratique, ce procédé est
caractérisé par l'injection et la dispersion rapide de produits
chimiques : sels minéraux cationiques.
La floculation a pour objectif de favoriser, à l'aide
d'un mélange lent, les contacts entre les particules
déstabilisées. Ces particules s'agglutinent pour former un floc
qu'on peut facilement éliminer par les procédés de
décantation et de filtration (DES JARDINS, 1990).
2.1.2.2. Décantation :
La décantation est un procédé qu'on
utilise dans, pratiquement, toutes les usines d'épuration et de
traitement des eaux (DES JARDINS, 1990). Son objectif est d'éliminer les
particules dont la densité est supérieure à celle de l'eau
par gravité. La vitesse de décantation est en fonction de la
vitesse de chute des particules, qui elle-même est en fonction de divers
autres paramètres parmi lesquels : grosseur et densité des
particules (VILAGINES, 2003).
Les matières solides se déposent au fond d'un
ouvrage appelé "décanteur" pour former les boues "primaires". Ces
dernières sont récupérées au moyen de
systèmes de raclage. L'utilisation d'un décanteur lamellaire
permet d'accroitre le rendement de la décantation. Ce type d'ouvrage
comporte des lamelles parallèles inclinées, ce qui multiplie la
surface de décantation et accélère donc le processus de
dépôt des particules. La décantation est encore plus
performante lorsqu'elle s'accompagne d'une floculation préalable
(DEGREMONT, 1978).
2.1.2.3. Filtration :
La filtration est un procédé physique
destiné à clarifier un liquide, qui contient des matières
solides en suspension en le faisant passer à travers un milieu poreux.
Les solides en suspension, ainsi retenus par le milieu poreux, s'y accumulent ;
il faut donc nettoyer ce milieu de façon continue ou de façon
intermittente.
La filtration, habituellement précédée
des traitements de coagulation-floculation et de décantation, permet
d'obtenir une bonne élimination des bactéries, de la couleur, de
la turbidité et, indirectement, de certains goûts et odeurs (DES
JARDINS, 1990).
2.1.3. Le traitement secondaire (Biologique) :
Dans la grande majorité des cas, l'élimination
des pollutions carbonées et azotées s'appuie sur des
procédés de nature biologique, basés sur la croissance de
micro-organismes aux dépens des matières organiques
"biodégradables" qui constituent pour eux des aliments.
Les micro-organismes, les plus actifs, sont les
bactéries qui conditionnent en fonction de leur modalité propre
de développement, deux types de traitements (VILAGINES, 2003) :
2.1.3.1. Traitements anaérobies :
Les traitements anaérobies font appel à des
bactéries n'utilisant pas de l'oxygène, en particulier, aux
bactéries méthanogènes qui conduisent, comme leur nom
l'indique, à la formation du méthane à partir de la
matière organique, et à un degré moindre de CO2.
Ce type de fermentation est appelé digestion en
hydrologie. C'est une opération délicate qui demande une
surveillance importante. En effet, la température doit être
maintenue à un niveau très stable et suffisamment
élevé. Il faut aussi éviter les écarts brutaux de
pH et les substances inhibitrices du développement bactérien,
à titre d'exemple : les cyanures, les sels de métaux lourds et
les phénols.
Ce système est davantage utilisé pour le
traitement des effluents urbains, que pour le traitement des effluents
industriels généralement toxiques pour les bactéries
(VILAGINES, 2003).
2.1.3.2. Les traitements aérobies :
Les bactéries utilisées exigent un apport
permanant d'oxygène. On distingue trois méthodes essentielles
:
2.1.3.2.1. Les lits bactériens :
Le principe de fonctionnement d'un lit bactérien,
quelques fois appelé filtre bactérien ou filtre percolateur,
consiste à faire ruisseler l'eau à traiter, préalablement
décantée, sur une muse de matériau de grande surface
spécifique servant de support aux microorganismes épurateurs, qui
y forment un feutrage ou un film plus ou moins épais, sous lequel une
couche anaérobie peut de développer sous la couche
aérobie, si son épaisseur est importante (DEGREMONT, 1978).
2.1.3.2.2. Les boues activées :
Les boues activées constituent le traitement
biologique aérobie le plus répondu (OMS, 1979). Le
procédé consiste à provoquer le développement d'une
culture bactérienne dispersée sous forme de flocons (boues
activées), dans un bassin brassé et aéré (bassin
d'aération) et alimenté en eau à épurer. Dans ce
bassin, le brassage a pour but d'éviter les dépôts et
d'homogénéiser le mélange des flocons bactériens et
de l'eau usée (liqueur mixte) ; l'aération peut se faire à
partir de l'oxygène de l'eau, du gaz enrichi en oxygène, voire
même d'oxygène pur, a pour but de dissoudre ce gaz dans la liqueur
mixte, afin de répondre aux besoins des bactéries
épuratrices aérobies.
Après un temps de contact suffisant, la liqueur mixte
est envoyée dans un clarificateur appelé parfois décanteur
secondaire, destiné à séparer l'eau épurée
des boues. Ces dernières sont recyclées dans le bassin
d'aération pour y maintenir une concentration suffisante en
bactéries épuratrices.
L'excédent (boues secondaires en excès) est
extrait du système et évacué vers le traitement des boues
(DEGREMONT, 1978)
2.1.3.2.3. Le lagunage :
Le lagunage est un système biologique
d'épuration, qui consiste à déverser les eaux usées
dans plusieurs basins successifs de faible profondeur, où des
phénomènes naturels de dégradation font intervenir la
biomasse qui transforme la matière organique. La matière
polluante, soustraite aux eaux usées, se retrouve en grande partie dans
la végétation et les sédiments accumulés, et en
faible partie dans l'atmosphère sous forme de méthane et d'azote
gazeux (GRAUSCLAUDE, 1999).
2.1.4. Les traitements tertiaires :
Les traitements tertiaires regroupent tous les traitements
complémentaires visant à affiner la qualité de l'effluent
ayant subis les traitements physiques, physico-chimiques et biologiques. Leur
utilisation s'impose lorsque la nature des milieux récepteurs recevant
l'eau dépolluée l'exige (DEGREMONT, 1978) :
· Les zones sujettes aux phénomènes
d'eutrophisation ;
· Les eaux de baignade ;
· Besoins agricoles;
· Recharge de nappes aquifères ;
· Pisciculture ;
· Usage domestique allant jusqu'à la consommation
humaine.
Les traitements tertiaires englobent, principalement,
l'élimination de l'azote, l'élimination du phosphore et la
désinfection, mais aussi le traitement des odeurs.
2.1.4.1. L'élimination de l'azote :
Les stations d'épuration classiques, prévues
pour éliminer les matières carbonées, n'éliminent
que des quantités réduites d'azote présent dans les eaux
usées. Pour satisfaire aux normes de rejet en zones sensibles, des
traitements complémentaires doivent être mis en place.
L'élimination de l'azote est, le plus souvent, obtenue
grâce à des traitements biologiques, de
"nitrification-dénitrification".
Les procédés physiques et physico-chimiques
d'élimination de l'azote (électrodialyse, résines
échangeuses d'ions, "strippage" de l'ammoniaque) ne sont pas
utilisés dans le traitement des eaux résiduaires urbaines, pour
des raisons de rendement et de coût (BECHAC et al, 1987).
2.1.4.2. L'élimination du phosphore :
L'élimination du phosphore, ou
"déphosphatation", peut être réalisée par des voies
physico-chimiques ou biologiques.
En ce qui concerne les traitements physico-chimiques,
l'adjonction de réactifs, comme des sels de fer ou d'aluminium, permet
d'obtenir une précipitation de phosphates insolubles et leur
élimination par décantation. Ces techniques engendrent une
importante production de boues.
La déphosphatation biologique consiste à
provoquer l'accumulation du phosphore dans les cultures bactériennes des
boues. Les mécanismes de la déphosphatation biologique sont
relativement complexes, et leur rendement variable (en fonction notamment de la
pollution carbonée et des nitrates présents dans les eaux
usées). Dans les grosses installations d'épuration, ce
procédé est souvent couplé à une
déphosphatation physico-chimique, pour atteindre les niveaux de rejets
requis (SATIN et SELMI, 1999).
2.1.4.3. La désinfection :
Les traitements primaires et secondaires ne détruisent
pas complètement les germes présents dans les rejets domestiques.
C'est pourquoi, la désinfection de l'eau s'impose.
La désinfection est un traitement qui permet de
détruire ou d'éliminer les micro-organismes susceptibles de
transmettre des maladies ; ce traitement n'inclut pas nécessairement la
stérilisation qui est la destruction de tous les organismes vivants dans
un milieu donné.
On peut procéder à la désinfection en
ajoutant à l'eau une certaine quantité d'un produit chimique,
doté de propriétés germicides. Les produits chimiques les
plus utilisés sont : le chlore (Cl2), le dioxyde de chlore(ClO2),
l'ozone (O3), le brome (Br2), l'iode (I2) et le permanganate de potassium
(KMnO4).
On peut également désinfecter l'eau grâce
à des moyens physiques : ébullition, ultrasons, ultraviolets (UV)
ou rayon gamma (DES JARDINS, 1990).
Les ultraviolets sont de plus en plus utilisés, car
ils présentent l'avantage de ne pas entrainer l'apparition de
sous-produits de désinfection. Cependant, ils nécessitent un
investissement important.
2.1.4.4. Le traitement des odeurs :
La dépollution des eaux usées produit des
odeurs, qui sont parfois perçues comme une gêne par les riverains
des stations d'épuration. Les principales sources de mauvaises odeurs
sont les boues et leur traitement, ainsi que les installations de
prétraitement.
Le seuil de tolérance de ces nuisances olfactives est
subjectif et aucune norme en matière d'émissions malodorantes
n'existe. Cependant, les exploitants de stations d'épuration cherchent
à limiter les odeurs dégagées par les traitements.
La conception des stations est le premier
élément permettant de limiter l'émission d'odeurs dans le
voisinage. Il faut, par exemple, veiller à réduire les surfaces
d'échange entre l'air et les eaux usées.
Ainsi, les ouvrages les plus odorants sont souvent
regroupés pour concentrer l'émission d'effluves
nauséabonds. Leur couverture est aussi une manière
d'atténuer les émissions malodorantes.
Des installations de désodorisation chimique ou
biologique sont également mises en place, au sein des stations
d'épuration. La désodorisation chimique est la technique la plus
utilisée. Les gaz malodorants sont captés puis envoyés
dans des tours de lavage, où un liquide désodorisant est
pulvérisé. Ces lavages peuvent comporter de la soude, de l'acide
et/ou de l'hypochlorite de sodium (eau de javel), réactifs qui captent
ou neutralisent les mauvaises odeurs (MARTIN et LAFFORT, 1991).
2.2. Réutilisation des eaux usées :
L'importance des coûts d'amener des eaux pour
l'alimentation des villes, jointe à celle de leur évacuation, qui
va de pair avec la raréfaction des ressources en eau, conduit un peu
partout dans le monde, et pas seulement dans les zones arides ou semi arides,
à se poser la question de la réutilisation des eaux
usées.
Après dépollution, les eaux usées
constituent "une ressource de seconde main", qui trouve principalement son
utilité dans :
2.2.1. L'industrie :
2.2.1.1. Lavage et transport industriel des matériaux
:
Dans beaucoup d'industries, le lavage et le transport des
matériaux sont très peu exigeants en qualité de l'eau.
C'est pourquoi les eaux usées épurées sont
utilisées pour (VALIRON, 1983) :
· Le lavage des matières premières (charbon,
gravier, etc.) et leur transport (craie par exemple) ;
· Le transport des déchets (cendres d'une centrale
thermique) ;
· Le lavage d'entretien (wagon, sols, bouteilles, etc.).
2.2.1.2. Refroidissement industriel :
De nombreuses industries utilisent les opérations de
refroidissement qui consomment une part très importante des eaux. C'est
le cas dans (VALIRON, 1983) :
· Les centrales électriques et nucléaires (la
production d'électricité) ;
· La pétrochimie ;
· La chimie ;
· L'industrie du caoutchouc ;
· L'industrie automobile.
2.2.2. L'irrigation :
Dans le cas de l'irrigation, les eaux usées sont
utilisées soit brutes, soit après traitement biologique (boues
activées ou lagunage le plus souvent). Leur intérêt
réside dans le fait que :
· Les eaux brutes contiennent des nutriments qui
accroissent notablement les rendements agricoles, ce qui soulage de
l'utilisation des engrais artificiels très couteux ;
· Les autres sources d'eau utilisable en irrigation se
raréfient en raison de leur potabilité tant recherchée.
2.2.3. Les usages municipaux :
Les usages municipaux peuvent couvrir une assez large gamme
d'utilisations, qui ne requiert pas d'eau de qualité potable, comme par
exemple (VALIRON, 1983) :
· L'arrosage des parcs et jardins publics ;
· Le lavage des rues ;
· La lute contre les incendies ;
· Le nettoyage des engins de collecte des ordures
ménagères.
2.3. L'épuration des eaux usées en
Algérie : 2.3.1. Volumes des eaux usées en 2004 :
Le calcul des volumes des eaux usées (EU) pour
l'année 2004 a été effectué par la Direction de
l'Assainissement et de la Protection de l'Environnement (DAPE) du
Ministère des Ressources en Eau (MRE), et ce, dans le cadre de la
mission 1 de l'étude de la réutilisation des eaux usées
à des fins agricoles ou autres sur tout le territoire national.
Le tableau 2, ci-après, présente les volumes des
eaux usées générées par région
hydrographique pour l'ensemble de la population urbaine et rurale du pays. Le
tableau 3 donne la répartition spatiale des rejets des eaux
usées.
Tableau 2 : Volume des eaux usées par
région hydrographique - 2004.