1.1.4.1.2. Externalités
La notion d'externalité a son origine dans les travaux
de Marshall qui définit « économies internes » comme
organisation interne des firmes et « économies externes »
celles liées à l'environnement industriel. (Somakpo, 2004)
Pigou distingue effet positif ou économie externe de
l'effet négatif ou déséconomie externe. L'absence de
compensation monétaire rend compte du caractère non marchand de
l'effet (externe).
Elle est l'expression utilisée pour désigner
toute situation où les activités d'un (ou de plusieurs) agent(s)
économique(s) ont des conséquences sur le bien-être (au
sens large) d'autres agents, sans qu'il n'y ait des échanges ou des
transactions entre eux.(Guerrien et All, 2002).
La Présence d'externalités se traduit
généralement par l'apparition d'inefficience (au sens du
critère de Pareto), car il n'existe pas à priori de «
récompense» (ou de gain) pour ceux qui sont à l'origine
d'externalités positives ni de sanctions pour ceux qui engendrent des
externalités négatives.(Guerrien et All, 2002).
Les facteurs externes(coûts) non supportés par
les producteurs individuels, mais par la population dans son ensemble, ou
avantages qui bénéficient à la société, mais
échappent aux producteurs, constituent dans ce domaine, un
élément essentiel. Or les principaux effets induits sont ceux que
causent l'épuisement ou la dégradation des ressources naturelles
et, notamment, du cadre naturel. (Gillis, 1995).
La définition de Guerrien semble être plus
adaptée à notre étude. Cette définition de
l'externalité est relative à l'expression utilisée pour
désigner toute situation où les activités d'un (ou de
plusieurs) agent(s) économique(s) ont des conséquences sur le
bien-être (au sens large) d'autres agents, sans qu'il n'y ait des
échanges ou des transactions entre eux.
1.1.4.2. Approche d'analyse théorique.
1.1.4.2.1. Exploitation de graviers.
Pendant longtemps, de nombreuses recherches ont été
menées sur l'activité d'exploitation des carrières de
gravier.
10
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
Déjà en 1962 Maurice SLANSKY1,
s'intéressant aux ressources minières dans le sud du Bénin
(ex Dahomey), a révélé la présence d'importants
gisements de graviers dans certaines régions dont celle de Dogbo
où les dépôts étaient particulièrement bien
développés.
Dans son ouvrage intitulé Contribution à
l'étude géologique du bassin sédimentaire côtier du
Dahomey et du Togo, et dans lequel il a étudié la
stratigraphie de la région de Dogbo, il signale que le gravier est tout
proche de la surface de la terre à Dogbo (une profondeur comprise entre
deux (02) et trois (03) mètres de la surface du sol.
Les conclusions de cette étude de SLANSKY, justifient
l'existence d'un gisement de graviers dans la commune de Dogbo.
En 1974, A. HOUESSOU avait fait la description de l'existence
de plusieurs bancs de graviers dans la région de Comé, autre zone
d'exploitation que la commune de Dogbo.
En cette même année, C.MIGAN avait mis en
évidence d'importantes couches de gravier au cours d'une campagne de
recherche de calcaire et de phosphate dans la région de
Gbédji.
Cette révélation a poussé l'OBEMINES
(Office Béninoise des Mines) à mener une
campagne de recherche de gravier à proximité de ce même
village, campagne dont les résultats ont servi plus tard d'indice pour
le projet minier des Nations Unies BE N/81/008 en Juin 1983.
Ce n'est qu'en 1983, que A. AGBANTHOUNDO, B.
IHETA, A.HOUESSOU, MI KIROV et N. SCHIPPER, ont effectué des travaux de
recherches géologiques sur le gravier dans la zone du ex Mono, secteur
Sê, dans le cadre du projet : recherches minières au
Bénin. Ils ont procédé par des forages de puits dans
ledit secteur aux fins de faire l'évaluation des substances utiles dans
le bassin sédimentaire côtier2.
Ces travaux de recherches ont permis de mettre en
évidence plusieurs sortes de gisements dont le gravier. C'est un
gisement exploitable de grande importance. Ils ont révélé
au total cinq sites de carrières de graviers dans le secteur et ont
remarqué une similitude entre le gravier retrouvé sur place et
ceux de Lokossa et de Dogbo.
1 Maurice SLANSKY, Bureau de Recherches
Géologiques et Minières n°11
2 Rapport sur les recherches géologiques du
gravier dans la zone du ex Mono secteur Sê en 1983 p.4
11
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
Selon leur rapport, les résultats de cette campagne qui
a eu lieu à Sê, doivent permettre d'évaluer les
réserves existantes de graviers et d'établir des
paramètres qui assureront une exploitation rationnelle du gravier du ex
Mono3.
Mais jusque là, aucune évaluation proprement
dite des réserves de gravier existantes n'est faite. Ce qui pose un
problème de projection du niveau des réserves de graviers face
à une intense exploitation.
Fayçal YACHIR, dans son ouvrage intitulé
Enjeux miniers en Afrique, met un accent particulier sur la motivation
de l'impérialisme occidental en Afrique dans le domaine des ressources
minières. Cette motivation est basée sur le contrôle et
l'exploitation des ressources minières du continent. De ce fait, le
poids de l'Afrique dans l'approvisionnement du monde développé en
métaux de base, est clairement mis en évidence de même que
la spécialisation croissante du continent dans la fourniture de minerais
à l'Europe et au Japon. C'est en effet une réalité trop
souvent occultée. L'ouvrage comporte beaucoup d'enseignements du point
de vue de l'agressivité nouvelle que manifeste l'impérialisme au
cours de la phase actuelle. Sur les principaux aspects que sont le
contrôle des gisements, la rente tirée de leur exploitation ou de
leur transformation locale, l'histoire récente des pays miniers du
continent révèle beaucoup plus d'échecs que de
succès. Ainsi, la nationalisation des gisements en Afrique est purement
formelle et leur transformation locale très peu
développée. Aucun pays minier n'a ni réussi, ni même
sérieusement tenté, d'accroître ses revenus par une
politique appropriée.
Cette description historique du secteur des mines, montre le
caractère non rationnel et agressif de l'exploitation minière en
Afrique qui demeure la ruse de l'impérialisme occidental en Afrique. Il
est donc temps, que l'Afrique notamment le Bénin cherche à
adopter une approche qui pourrait permettre d'accroître ses revenus par
des politiques de gestion durable appropriées.
Le document dénommé Profil de la zone
côtière du Bénin a été
élaboré en collaboration avec le Ministère de
l'Environnement ; le Grand Ecosystème Marin de l'Habitat et de
l'Urbanisme du Golfe de Guinée et le Centre pour l'environnement et le
développement en Afrique (Ceda).
Le profil de la zone côtière du Bénin est
un document qui fait le diagnostic de l'état de l'environnement par
l'analyse des principaux problèmes environnementaux côtiers :
l'érosion
3 Rapport sur les recherches géologiques du
gravier dans la zone du ex Mono secteur Sê en 1983 p.4
12
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
des sols, la pollution de l'air, des eaux marines et
lagunaires, l'érosion côtière, les déchets urbains,
l'occupation du sol (mauvaise maîtrise du foncier), l'exploitation des
forêts et des écosystèmes fragiles, la pêche, etc.
Ce travail d'analyse des problèmes environnementaux de
la zone côtière du Bénin a été
réalisé dans une première étape par une
équipe de chercheurs chevronnés sous la coordination de Marcel
A. Baglo, Directeur Général de l'Agence
Béninoise pour l'Environnement, et Théophile Ch. Worou de la
Direction de l'Environnement. Le rapport réalisé a servi de
document de base à l'ensemble des représentants de toutes les
structures nationales impliquées dans la gestion de la zone
côtière qui l'ont amendé puis adopté. Ce forum qui a
rassemblé diverses compétences a permis non seulement d'analyser
les problèmes environnementaux côtiers dans toutes leurs
dimensions, mais également de jeter les bases d'un Plan National de
Gestion Intégrée de la zone côtière du
Bénin.
Selon le profil de la zone côtière au
Bénin, le secteur minier béninois est très peu
développé. En effet, selon les estimations de 1992, la part du
secteur minier dans la formation du Produit Intérieur Brut (PIB) ne
représente que 0,6%. Dans la zone côtière du Bénin,
il existe des gisements de pétrole, de gaz naturel, de tourbe, de sable
marin, de graviers et d'argile, ainsi que d'importantes ressources en eau. La
volonté politique des différents gouvernements de faire des
matières premières minérales un des moteurs du
décollage de l'économie béninoise s'est traduite sur le
terrain par l'amorce d'un développement de la recherche
géologique et de l'activité minière.
A ce jour, les gisements les plus importants découverts
dans la zone côtière sont les ressources minières en
gisements de calcaire, d'argile, de sable et de graviers. Quant aux gisements
de gravier, ils sont situés dans le Sud du Mono, leurs réserves
exploitées avaient été évaluées à
plus de 13 millions de tonnes.
Ce secteur n'est pas sans connaître des
difficultés. Ces différents gisements sont mis en valeur de
façon artisanale ou industrielle. Ils constituent d'importantes sources
de revenus pour les populations riveraines. Toutefois, l'exploitation desdits
gisements se fait en l'absence de toute gestion rationnelle et au mépris
de toute réglementation, générant ainsi des nuisances
à l'environnement (érosion côtière, carrières
désaffectées, etc.).
Par ailleurs on note dans ce document de profil sur la zone
côtière que les gisements existants sont assez bien connus.
Cependant, les recherches devront se poursuivre pour
13
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
identifier l'ensemble des richesses minières de cette
région, ce qui nécessite d'importants moyens financiers.
La cartographie de la localisation des gisements et de leurs
zones sensibles et la mise en place d'une base de données sur lesdites
ressources restent à faire.
Néanmoins au niveau du Plan Stratégique pour la
Relance du Secteur Minier en République du Bénin, se trouvent
deux (02) cartes dont l'une synthétisant les formations
géologiques du Bénin et l'autre mentionnant les
potentialités minières au Bénin. (DG/mines)
En 2004 C. GUIDI avait fait des recherches sur le thème
: Problématique de la gestion des carrières de graviers dans
la commune de Lokossa. Il ressort de cette étude que la gestion de
l'exploitation de la ressource minière de Lokossa pose un grand
problème. Ce problème engendré par la gestion de
l'activité résulte non seulement de l'analphabétisme des
exploitants mais aussi et surtout de leur ignorance des notions de gestion. Des
recommandations ont été faites pour une amélioration de la
contribution des graviers dans le développement harmonieux de la commune
de Lokossa. Parmi ces recommandations on peut citer entre autres :
l'intervention de l'Etat dans le secteur de gravier à travers les
collectivités locales en tant que gardien du patrimoine national ; la
réorganisation de l'activité d'exploitation des carrières
de gravier ; le développement chez les exploitants un esprit
d'équipe et de coopérative ; etc.
Cette étude montre qu'il y a une surexploitation des
graviers avec des conséquences néfastes sur les populations
(santé, risque d'accident, perturbation de sommeil ; etc.) et sur
l'environnement (dégradation du sol, dégradation des voies,
etc.).
1.1.4.2.1. Externalités
Le concept économique de référence en
matière de problème d'environnement est celui d'effet externe et
plus précisément de déséconomie externe ou
d'externalité négative. On dit qu'il existe un effet externe
lorsque l'activité d'un agent économique affecte l'utilité
(le bien-être ou le profit) d'autres agents, sans qu'il y ait de
transaction sur le marché.
En matière d'environnement, les procédures
d'estimation peuvent être appliquées aussi bien à la mesure
des avantages, pour la collectivité, d'une amélioration de la
qualité de l'environnement, qu'à l'évaluation des dommages
liés à une dégradation de l'environnement.
14
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
Si l'on reprend la formulation de Maurice Allais, la valeur
sociale d'un objet est mesurée par son prix. Cette valeur dérive
essentiellement du phénomène collectif de l'échange et
elle ne saurait exister en dehors de lui. L'ensemble des prix constitue en fait
"l'échelle des valeurs sociales", qui caractérise toute
économie de marché. Le marché transmet, par
l'intermédiaire des prix, des signaux quant à la rareté
des ressources, et alloue ces ressources aux utilisations où elles sont
les plus précieuses. Or, dans le cas des biens environnementaux, il
n'existe pas de marché donc pas de système de prix. Pourtant
l'inexistence d'un système de prix ne signifie pas pour autant que les
actifs environnementaux n'ont pas de valeur.
Dans le cadre de l'analyse utilitariste, les valeurs
attribuées aux actifs environnementaux sont construites sur la base des
préférences des agents. Cependant, ce choix suppose qu'on exclut
de fait la possibilité d'existence d'une valeur intrinsèque,
c'est à dire une valeur construite selon un principe biocentré
donc indépendante de toute évaluation par les hommes.
L'approche économique s'inscrit donc dans un courant de
pensée anthropocentré où l'évaluation des actifs
environnementaux se fonde sur les bénéfices ou les dommages
affectant le bien-être des individus.
La théorie économique a développé
différentes méthodes d'évaluation des
préférences des agents lorsqu'il y a absence de marché.
Ces méthodes peuvent être groupées en deux
catégories: celle reliée à l'observation des comportements
et des décisions (préférences
révélées) et celle issue de réponses à des
situations hypothétiques (évaluation contingente et jeux
d'enchères). La première catégorie inclue des
méthodes basées sur l'analyse de la demande, des fonctions de
coût, des prix de marché et des choix et comportements
observés.
Dans la seconde catégorie, on questionne directement
les individus sur leur consentement à payer (CAP) pour une modification
donnée (hypothétique) de leur environnement. On peut aussi les
interroger sur la façon dont leur comportement changerait si la
modification était mise en oeuvre, ou enfin sur la façon dont ils
classent certaines situations alternatives (combinaisons différentes de
revenus, santé et autres biens).
Les types d'avantages les plus facilement identifiables sont
ceux obtenus par usage direct ou indirect des ressources naturelles: on parle
alors de valeurs d'usage directes ou indirectes.
15
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
L'utilisation peut aussi être envisagée dans une
optique à plus long terme. Les ressources pourront, dans le futur,
être l'objet d'un usage. Le bien n'a donc pas de valeur d'usage mais son
utilisation potentielle dans le futur détermine une valeur d'option.
Cependant, les individus peuvent attribuer une valeur à un bien
même s'ils n'en ont pas l'usage dans le présent et n'envisagent
pas de l'utiliser dans le futur. Une valeur peut être définie sur
la base du pur plaisir qui découle de son existence sans que cela puisse
être mis en relation avec un usage présent ou futur. On
définit alors un autre type de valeurs, les valeurs d'existence et
patrimoniale. La valeur de patrimoine a cela de particulier qu'elle provient du
désir de transmettre un environnement non détérioré
aux générations futures.
Dans l'analyse globale d'un écosystème, il est
probablement raisonnable de partir du principe selon lequel les individus
n'auraient pas une connaissance suffisante du monde pour évaluer
l'environnement. On peut alors envisager une nouvelle valeur attribuable aux
composantes environnementales, la valeur systémique. Chaque composante
serait donc évaluée en fonction du rôle qu'elle joue dans
l'écosystème.
Il convient de noter qu'il est possible, sur la base de cette
conception de la valeur, d'envisager des valeurs systémiques
présentes et futures (quel rôle pourra jouer une composante
environnementale dans le futur).
Cette notion est intimement liée à l'état
des connaissances scientifiques et donc au problème de l'incertitude.
Elle reste toutefois intéressante car elle permet d'intégrer dans
l'évaluation d'un actif naturel les phénomènes
d'interdépendance des services liés à ce bien ainsi que
les problèmes d'irréversibilité.
Les approches utilisées donc pour évaluer les
effets négatifs supportés par les individus sont de deux types :
évaluations directes et évaluations indirectes.
· Les évaluations directes visent à
attribuer une valeur monétaire en terme de gains ou de pertes aux actifs
naturels. La méthode des coûts de transport, la méthode des
prix hédonistes, l'évaluation contingente constituent des
exemples.
· Les évaluations indirectes visent à
établir à partir de la recherche, le lien de cause à
effet, des relations de doses-réponses. La méthode du coût
économique de la maladie et la méthode des
bénéfices de protection de santé, constituent des
exemples. (Somakpo, 2004)
16
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
Les solutions politiques par lesquelles les pouvoirs publics
doivent intervenir pour remédier aux facteurs externes et assurer le jeu
rationnel des forces du marché sont : Droits de propriété,
réglementation publique, fiscalité et les permis
commercialisables.
Selon La Revue `'Finances et
développement»(Décembre 2007), il ressort de l'explication
des relations complexes qui sont à la base de la sustainomics(à
partir de « sustainable economics », «économie durable
») qu'il n'existe pas de mesures reconnues de développement durable
comparables aux mesures du développement économique.
L'idéal de base est la nécessité d'internaliser les
coûts environnementaux et sociaux, d'éliminer les
dysfonctionnement du marché qui entraînent les dégradations
et d'intégrer toutes les externalités pour calculer le prix des
ressources naturelles. Enfin, un appel est fait aux valeurs, aux idées
et à la religion afin qu'elles inventent de meilleures incitations
à protéger l'environnement pour les générations
futures et mettent un terme au matérialisme actuel qui ne pourra pas
durer. (Mohan, 2007).
Dans le cadre de cette étude, les instruments
d'évaluations directes semblent être mieux adaptés compte
tenu du fait qu'il sera plus facile d'attribuer une valeur monétaire en
terme de gains ou de pertes dus à l'exploitation de graviers.
1.1.4.2.2. La nature du potentiel de Développement
Durable.
Si un gouvernement voulait étudier le succès de
son pays dans le maintien d'une croissance durable, quels sont les concepts,
les instruments de mesure qu'il pourrait utiliser ?
Il apparaît souhaitable d'inclure également les
ressources naturelles dans les modèles de croissance économique
et dans la mesure de la production nationale. Pour inclure les ressources
naturelles dans la réflexion sur la croissance économique, les
économistes ont élaboré le concept de capital naturel
d'où la première mesure. La deuxième est liée au
concept de potentiel de développement durable qui est la capacité
à maintenir la consommation, pendant une période
indéfinie, à un niveau constant. Il existe d'autres
méthodes qui tiennent compte des ressources et du revenu national.
1.1.4.2.3. La pratique de la Méthode
d'Evaluation Contingente (MEC).
La méthode d'évaluation contingente a
été appliquée pour la première fois par R. Devis en
1963, pour la valorisation des actifs naturels. Cette méthode est depuis
très utilisée par les économistes du fait de sa relative
simplicité.
17
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
La théorie économique connaît plusieurs
méthodes d'évaluation des dommages liés à la
dégradation de l'environnement.
La méthode des marchés hypothétiques,
encore appelée méthode d'évaluation contingente, ne repose
pas sur une référence à des marchés existants, mais
procède à une évaluation directe du consentement à
payer au moyen d'enquêtes et de questionnaires.
Elle consiste à amener les personnes soumises aux
enquêtes à révéler leur préférence en
ce qui concerne la demande d'un bien environnemental (qualité de
l'environnement comme le sol, les voies ; etc.) par le truchement, soit du
consentement à payer (CAP) pour bénéficier d'une
amélioration de la qualité de l'environnement, soit du
consentement à recevoir (CAR) comme compensation si le dommage dû
à la dégradation de l'environnement est inévitable.
Il s'agit d'une méthode qui permet, par interrogation
directe des individus de générer une estimation des mesures
compensées de variation du bien-être. C'est un ensemble de
procédures utilisées pour estimer la variation d'utilité
ex-ante de l'impact d'une politique à l'aide de questionnaires directs,
de jeux d'enchères ou de référendum.
On décrit aux agents interrogés un marché
contingent dans lequel on leur fait faire un choix. C'est à dire qu'on
décrit à travers un scénario, par exemple sur la base
d'une politique visant à l'amélioration d'un actif
environnemental, pour ce qui nous concerne, l'amélioration de
l'exploitation de graviers ; et on demande ensuite dans le questionnaire quel
est le consentement à payer de la personne enquêtée pour
cette amélioration ainsi qu'un certain nombre d'autres questions.
Puisqu'il s'agit d'une méthode alternative de
valorisation des actifs naturels, plus souvent utilisée car plus
flexible, il conviendra de s'interroger sur son degré de
validité. Il importe donc de maîtriser les principes de la
Méthode d'Evaluation Contingente (MEC).
Il faut noter qu'il y a 4 mesures du surplus, mais le choix
dépend de l'état de référence ainsi que de
l'état de droit des individus sur l'offre des actifs naturels. La MEC
est employée chaque fois que le marché ne permet pas d'utiliser
les méthodes indirectes de révélation des
préférences, ou lorsque l'intervention publique ne peut s'appuyer
sur aucune donnée disponible.
18
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
Pour comprendre les possibilités, mais aussi les
limites dans l'exercice d'évaluation contingente, il convient de
s'arrêter sur les obstacles auxquels se heurte une
révélation parfaite des préférences.
La MEC s'expose donc à des difficultés d'analyse
importantes. Ces difficultés découlent non seulement de limites
opératoires (Exemple : lourdeur du dispositif d'enquête) mais
aussi de multiples biais qu'elle peut impliquer (BONNIEUX, 1998; CARSON, 1999).
Il s'agit notamment du caractère fictif de l'échange
proposé qui impose de s'interroger sur la solidité des
consentements à payer déclarés ex ante. C'est le biais
hypothétique. Il s'agit aussi de la méconnaissance des
conséquences de l'amélioration avancée dans le
scénario qui implique une sensibilité parfois extrême des
réponses au contenu du scénario, au protocole d'enquête et
aux informations véhiculées par d'autres questions. C'est le
biais informationnel (WILLINGER, 1996).
Du fait au moins de ces deux biais, nous savons, depuis les
recherches réalisées par TVERSKY et KAHNEMAN, que cette
méthode présente le risque de construire les réponses
qu'elle vise à recueillir.
Aussi, une littérature foisonnante aborde cette
problématique des biais. Elle traite cette question le plus souvent sous
l'angle de la résolution économétrique du biais induit par
les questions servant aux enquêtés pour déclarer leur
intention de payer : question ouverte ou fermée, nombre des montants ou
intervalles proposés ; etc.
Cet exercice de choix exige donc la résolution par
l'agent de deux problèmes: un problème de formulation de la
valeur (choix sous contrainte budgétaire) et un problème de
révélation de cette valeur (opportunité et comportement
stratégique).
Dans leur ouvrage (Desaigues et Point, 1993) sur les
méthodes d'évaluation, ces deux économistes de
l'environnement proposent la prise en compte de six points pour faire une
évaluation correcte et éviter un certain nombre de biais.
Le mécanisme de l'évaluation contingente
nécessite donc six (6) points à savoir : la population
interrogée, la définition de l'actif naturel, le support de
paiement, la question de révélation des valeurs (le
système d'enchères montantes ou descendantes, la question
ouverte, la question fermée), les caractéristiques
socio-économiques et enfin l'élaboration du questionnaire.
19
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
L'analyse des réponses et le calcul du Consentement
à Payer maximal (CAP) moyen se fait à base de différents
modèles dépendant des types de question (ouverte ou
fermée), et des réponses données par les individus. Il y a
le modèle Logit et le modèle Probit. Ces deux modèles sont
utilisés dans le cadre de l'analyse des questions fermées
simples. Lorsque la loi des termes aléatoires est logistique, on utilise
le modèle Logit. Le modèle Probit s'utilise dans le cas d'une loi
normale.
La résolution du biais d'auto-sélection et la
prise en compte des variables censurées se fait grâce au
modèle Tobit et la méthode d'Heckman, méthode de Greene.
Ces modèles sont utilisés dans le cadre de l'analyse des
réponses à la question ouverte.
Le traitement du biais hypothétique se fait dans le cas
des surévaluations du CAP.
Parmi les études sur les évaluations directes
des actifs naturels, l'évaluation contingente est la méthode la
plus utilisée.
Une étude sur l'application de la méthode
d'évaluation contingente aux récifs coralliens dans la
Caraïbe a été faite dans la zone de pigeon de la Guadeloupe
par J. RABOTEUR et M. RODES, en avril 2006.
Cette étude porte sur les récifs coralliens. Ces
récifs sont présents dans plus de cent (100) pays. C'est l'un des
écosystèmes les plus variés de notre planète. Il
convient donc, dans ces régions et plus particulièrement en
Guadeloupe, d'avoir conscience de l'impact des activités humaines sur
l'environnement.
Dans cette optique, une évaluation économique du
patrimoine environnemental s'est avérée indispensable pour une
gestion durable des actifs naturels. L'objectif de cette étude
exploratoire est d'estimer la valeur économique globale de la zone de
Pigeon en Guadeloupe.
Cet article utilise la méthode de l'évaluation
contingente pour une évaluation du bénéfice
économique et social de l'actif naturel que représentent les
récifs frangeants des îlets Pigeon.
R. Kast et S. Luchini dans leur article intitulé "
Calcul économique et incertitude socio-politique : une procédure
d'évaluation des projets publics " ont accordé une place
importante à l'évaluation contingente des biens publics.
20
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
Cette étude montre que les processus de décision
publique possèdent une double dimension.
Ils doivent à la fois tenir compte d'aspects
économiques et du contexte socio-politique dans lequel ils
s'inscrivent.
Cet article construit une procédure d'évaluation
expérimentale en deux étapes, fondée sur deux
théories économiques, qui permet d'évaluer les
bénéfices d'un projet public donné en tenant compte des
aspects socio-politiques.
L'évaluation contingente est utilisée pour
savoir combien les individus sont prêts à payer ex-ante
pour une modification donnée (quantitative ou qualitative) d'un bien
public.
G. Geniaux et S. L. GREQAM font une description dans
leur article relatif à l'évaluation économique des
ressources non échangées, de l'évaluation contingente.
Dans leur exposé, les méthodes indirectes telles
que la méthode des coûts de protection, la méthode
hédonistique et la méthode des coûts de transport n'ont pas
été abordées. Seule est présentée la
méthode d'évaluation contingente. Cette méthode permet
théoriquement de mesurer l'ensemble des valeurs que la théorie
économique a mis à jour.
L'objectif de cette étude est de contribuer à
fournir des informations susceptibles d'éclairer les décisions
des pouvoirs publics dans la mise en oeuvre de l'Assurance Maladie Universelle
en Côte d'Ivoire. De façon spécifique, il s'agit d'estimer
les dispositions des ménages à cotiser pour l'Assurance Maladie
Universelle et d'identifier les facteurs explicatifs de ces cotisations. Pour y
arriver, une enquête basée sur la méthode de
l'évaluation contingente et portant sur 367 chefs de ménages
agricoles a été réalisée dans le département
d'Aboisso, département agricole situé à l'Est d'Abidjan,
à la frontière ivoiro-ghanéenne. Les données de
cette enquête ont été analysées en utilisant une
approche descriptive et en ayant recours à un modèle
économétrique : le modèle tobit censuré.
R. E GBINLO dans son étude sur « Évaluation
du coût social de la pollution de l'air par les taxis moto à
Cotonou, Bénin » a utilisé la MEC pour évaluer le
coût social de la pollution de l'air par les taxis moto à
Cotonou.
Cette étude débouche sur la première
estimation du CAP des Cotonois pour améliorer la qualité de l'air
et la détermination du coût social lié à
l'activité de taxis moto.
21
Politiques de gestion durable des ressources naturelles non
renouvelables au Benin: cas de l'exploitation du gravier dans la commune de
DOGBO.
De cette étude, il ressort que le CAP est une fonction
croissante du revenu, des dépenses de santé, les personnes
âgées annonçant, toutes choses étant égales
par ailleurs, une valeur plus faible que les autres. Les femmes ont un CAP plus
élevé que les hommes. Ce coût social qui caractérise
la perte du bien-être causée par la détérioration de
la qualité de l'air pour l'ensemble de la population exposée est
déterminé par la méthode d'évaluation contingente.
Il s'élève à 429.481.264 FCFA et constitue un
véritable outil d'aide à la décision pour les pouvoirs
publics en matière de politique de transport et d'amélioration de
la qualité de l'air.
Toutefois, aux vues de tout ce qui précède en
comparant les avantages et les limites de toutes les méthodes de
monétarisation, et en fonction du temps et des ressources dont nous
disposons, nous avons opté dans le cadre de cette recherche, une
démarche basée sur l'étude des externalités
grâce à la méthode d'évaluation contingente, une
méthode qui est donc adaptée à l'évaluation des
impacts de l'exploitation des carrières de graviers sur l'environnement.
Cette méthode permet par interrogation directe des individus, de
générer une estimation des mesures compensées de variation
du bien-être. Son apparente simplicité, jointe à un
approfondissement récent des procédures à respecter pour
lui conserver une certaine fiabilité (Mitchell et Carson, 1989),
explique son succès parmi les économistes : c'est certainement la
méthode de valorisation des actifs naturels la plus utilisée ces
dernières années car elle permet de mesurer les
bénéfices d'usage et de non-usage.
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