Chapitre 1
Les connecteurs
1.1 Qu'est-ce qu'un connecteur?
1.1.1 Définition
Un connecteur est un terme permettant de relier deux ou
plusieurs segments (phrase, énoncé, proposition...) d'un
discours, parmi lesquels on compte par exemple parce que,
donc, puis . . .1. De cette façon, un
connecteur contribue à constituer des unités plus complexes
à partir de ces unités simples que sont les segments en marquant
des relations structurales et sémantiques entre les différentes
entités du discours2.
Mais un problème se pose : celui de déterminer
la taille des unités que le connecteur relie ainsi que de leur donner un
nom. On sait que les connecteurs relient entre eux des parties d'un discours,
or la taille de ces parties n'est pas fixe. On définit donc une
unité de segmentation
1Pour une liste plus complète, bien que non
exhaustive, se référer au corpus de connecteurs du
français que nous avons constitué et qui se trouve en annexe
B.
2Nous pouvons remarquer en passant qu'un certain
nombre d'études psychologiques (en particulier dans le domaine de la
lecture) ont été menées sur les connecteurs (voir par
exemple EHRLICH (1994), p. 190-204), en français et d'autres langues,
mais aussi des études comparatives langue maternelle-langue seconde. Les
résultats de ces expériences tendent à montrer la grande
importance des connecteurs dans la compréhension du discours. En effet,
les connecteurs ne semblent pas indispensables à la bonne
compréhension du discours, mais y contribuent largement en
désambiguïsant les relations entre énoncés qui ne
sont pas marquées : le temps de lecture ne semble pas affecté,
mais la compréhension globale de la structure d'un texte est grandement
améliorée par la présence de connecteurs.
du discours, le segment de discours34 (SD), qui
correspond à l'ensemble des parties d'un discours pouvant être
reliées par un connecteur. Voyons quelques segments de discours de
différentes tailles:
(1.1) [Paul prend son vélo]s1 [parce
qu']conn[il est sportif]s2
(1.2) [Paul prend son vélo]s3. [En
effet,]conn[il est sportif]s4
(1.3) [Paul est rentré chez lui. Jacques dit qu'il est
fâché après Yves]s5.
[À cause de ça,]conn[Yves ne viendra pas
ce soir]s6.
Ici les SD peuvent être des propositions (s1, s2), des
phrases (s3, s4, s6) ou un ensemble de phrases (s 5).
1.1.2 Problèmes de terminologie
Dans la littérature consacrée aux connecteurs, un
grand nombre de termes a été utilisé pour
décrire ces entités. La première personne a
avoir étudié en profondeur les connecteurs du français,
GÜLICH (1970), parle de Gliederungssignale, « signaux
d'articulation ». ROULET et al. (1991) quant à eux emploient le
terme « marqueur de structure de la conver- sation », KNOTT (1996)
« syntagmes relationnels » (relational
phrases), SCHIFFRIN (1987) « marqueurs discursifs »
(discourse markers), d'autres encore « opérateurs
» ou particules de discours (discourse
particles).... Devant la diversité des mots
utilisés pour désigner un même objet, pour des raisons
la plupart du temps théoriques (ou personnelles), il nous faut faire
un choix. C'est pour cela que nous avons décidé d'utiliser le
3Nous avons choisi d'utiliser le terme «
segment de discours », qui nous semblait le plus transparent, parmi un
nombre assez élevé de termes désignant la même
entité: « segment de discours » (discourse segment)
est employé par GROSZ et SIDNER (1986), alors que MANN et THOMPSON
(1987) emploient « segment de texte » (text span), et
d'autres « unité de discours » (discourse unit) ou
encore « constituant discursif ».
4Voir à ce sujet la section 2.3.1.
terme « connecteur »5, le plus neutre et
le plus usité dans la tradition française (entre autres par
ROULET et al. (1991), JAYEZ et ROSSARI (1998) et DUCROT et al. (1980)).
|