3- La recette de la banque mondiale :
« L'eau gratuit tue tous les jours des dizaines de
millier de personnes dans le monde et rend malades en permanence de millions de
personnes. Cet état n'est pas une fatalité,il correspond au refus
de donner à l'eau un haut degré de priorité
économique »(1). Une des façon les plus
évidentes de réduire le gaspillage, c'est d'augmenter le prix de
l'eau. Le modèle macroéconomique d'ajustement de la demande aux
nouvelles conditions du marché doit aboutir inévitablement
à une réduction de la consommation, celle-ci ne se faisant pas
obligatoirement au détriment d'un utilisateur, mais étant le
résultat d'une rationalisation des usages subséquente à la
hausse du prix de l'eau. Cette
façon de voir une partie du problème alimente le credo d'acteurs
privés et d'organisations internationales au premier rang desquelles, il
convient de mettre la Banque Mondiale. Des rapports d'études plaident
pour cette solution en lui donnant toutes les apparences de l'évidence
économique .Lors de la deuxième Forum mondial de l'eau qui s'est
tenu à La Haye en mars 2000, la déclaration ministérielle
conclusive propose un concept de gestion de l'eau global.
La proposition a d'ailleurs été faite de
déterminer le prix sur la base du coût réel de mise
à disposition. Parmi les principaux défis rappelés lors du
forum de La Haye, on relève la volonté de « pratiquer
une gestion de l'eau qui reflète les valeurs économiques,
sociales et culturelles, et qui procède à une tarification des
services courant la totalité des coûts liés à ces
1- Teniere Buchot ; interventions économiques pour
améliorer l'usage de l'eau, p427- 433, en UNISCO, Water
valeurs ». Il est certes dit que « cette
approche devrait prendre en compte le besoin d'équité et les
besoins élémentaires des pauvres » 2 .Mais sans doute
s'agit-il là plus d'une concession à certaines organisations non
gouvernementales agissantes qu'une réelle volonté d'agir dans un
sens rompant avec une logique perçue comme inévitable ?
Celle d'un marché laissant la part belle à des acteurs
privés ? On mesure le chemin parcouru depuis la première
conférence internationale sur l'eau, d'autant que dés 1992 cette
dimension économique se devinait dans les travaux de la
conférence de Dublin.
Il est un fait que partout ou le prix de l'eau a
augmenté, une baisse de la consommation a suivi. Appliquant
l'évolution des prix selon les volumes consommés, la
société Nationale de Distribution de l'Eau tunisienne a pu mettre
en évidence qu'entre 1984 et 1994, des bonnes parties des consommateurs
(consommation inférieure à 70 m3 par trimestre) 3.
Dans ce même pays, la tendance est à augmenter de
15% par an les tarifs de l'eau dans les périmètres publics et les
réseaux collectifs d'irrigation.
.Entre la mise à l'encan de l'eau, ce qui est
inacceptable, et une eau totalement gratuite ou peu chère ce qui est
source de gaspillage, il existe une autre voie, socialement et
économiquement responsable.
La question de l'eau dans le monde est une
question strictement économique. La Banque mondiale défend
l'idée suivante : en donnant un prix à l'eau celle-ci sera moins
gaspillée. Pour bien répartir l'eau dans le monde, il faut
respecter la loi de l'offre et de la demande. Autour de la question de
l'eau, il y a beaucoup de conflits très graves, mais il n'y a pas de
guerre. Pour avoir une guerre, il faut qu'il y ait un certain rapport de force
entre deux parties. Les petits pays ou les pays pauvres n'ont pas le pouvoir,
actuellement, d'affronter les décisions des grands ou des riches pays.
La Banque mondiale donne des sous à des pays proches voulant
s'approprier la même eau pour que ceux-ci n'entrent pas en conflit ou en
guerre. Dans son geste, la Banque n'encourage pas ces pays à pratiquer
une gestion commune de l'eau, ce qui constituerait une réelle
prévention de guerres ou conflits, voire une solution.
On nous dit que faire payer l'eau permettrait sa distribution,
ce que sauverait le monde. Pourtant, il y a encore plus de 1,5 milliard de
personnes qui n'ont pas accès à l'eau potable. La privatisation
de l'eau a engendré des histoires d'horreur dans le tiers-monde. Les
gens sans
2-declaration ministérielle de la Haye, forum mondiale de
l'eau, 22 mars 2000.
3- HABAIEB H. ALBERGEL ; vers une gestion optimale des
ressources en eau
argent restent sans eau. La Banque disait solvabiliser les
gens dans le besoin, mais pour une banque, prêter des sous à un
pauvre, ce n'est pas très rentable. Où vont donc les sous de la
privatisation ? À la Banque mondiale et aux multinationales qui
exploitent l'eau. Les politiques de la Banque mondiale ont
dégradé la qualité de l'eau. Par exemple, en entreprenant
de grands ouvrages comme la construction de barrages. Cela a permis le
détournement de l'eau ,qui a entraîné des
dégâts irréparables sur le plan environnemental et sur le
plan humain. Des milliers de gens pauvres en Chine ont perdu leur maison, leur
village et leurs champs pour cultiver après que l'eau
détournée ait inondé leur environnement. S'en sont-ils
trouvés plus riches ?
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