Les fonds structurels européens
Gay Pascal, Master 1 de droit public
Mémoire de Droit public de l'économie, sous la
direction de Mr. François Lichère
SOMMAIRE
Introduction
4
Partie 1- La recherche par les fonds structurels de
l'intégration communautaire
Section 1- Le cadre d'intervention des fonds
structurels
I- Le développement progressif d'une politique de
cohésion communautaire
5
A- Des balbutiements initiaux au marché unique
B- De l'émergence d'une politique de cohésion
à l'agenda de Lisbonne
C- L'élargissement et le bilan contrasté
jusqu'en 2007
II- Les objectifs actuels de la politique de cohésion
communautaire
9
A- La convergence
B- La compétitivité régionale et
l'emploi
C- La coopération territoriale
Section 2 - L'intervention des fonds structurels comme
soutien de la politique de cohésion communautaire
I- L'insertion des fonds structurels dans le budget
communautaire
14
A- L'importance des fonds dans le budget
communautaire
B- Le manque de clarté entre cohésion,
compétitivité et solidarité
II- Les principes généraux d'intervention des
fonds structurels
18
A- La subsidiarité
B- Le partenariat
C- L'additionnalité
Partie 2- La concrétisation par les fonds
structurels de l'action communautaire
Section 1 - Le mécanisme d'intervention des
fonds structurels
I- La détermination du principe de
programmation
23
A- La complémentarité
B- La programmation proprement dite
C- La proportionnalité
II- La mise en oeuvre du principe de programmation
27
A- Les systèmes de gestion et de contrôle
autorisés des fonds structurels
B- Les engagements et les paiements
Section 2 - L'administration des fonds structurels par
les Etats membres, l'exemple français
I- La prédominance d'une gestion
déconcentrée des fonds structurels
32
A- Les choix réalisés en terme de
programmation
B- Vers une décentralisation des fonds
structurels ?
II- La mise en oeuvre financière des fonds
structurels
35
A- Le circuit financier des fonds structurels
B- Les interactions des aides communautaires avec les autres
régimes d'aides existants
Bibliographie
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Introduction
« Vous savez que je ne suis pas de ceux qui
considèrent que la globalisation est le diable. Elle peut être,
comme la langue d'Esope, la meilleure ou la pire des choses. (...). La
politique de cohésion, telle qu'elle est encore envisagée,
constitue un remède contre cette maladie terrible que serait la
domination de l'esprit intergouvernemental dans l'Europe et cet éloge de
la compétition entre les nations. Oui, n'en déplaise à
certains, entre le monde et la nation il y a l'Europe, cette Europe qui
traverse des moments difficiles, qui est, grâce à l'esprit qui
l'inspire encore, grâce à la cohésion économique et
sociale, grâce aux pas déjà accomplis, l'espoir qui nous
fait militer, agir et espérer. En parlant cohésion, nous parlons
de cet enjeu politique majeur qui demeure dans ce siècle : l'Union
des pays Européens ».
Jacques Delors s'exprime ainsi à Bruxelles le 28 juin
2006, devant le groupe socialiste du Parlement Européen. La
réforme des fonds structurels, dans le cadre de la programmation du
budget européen pour la période 2007-2013, était alors
soumise à l'étude de l'institution. Dans le même temps,
l'Union européenne se trouvait face à un triple défi. Un
défi politique avec l'élaboration du futur traité de
Lisbonne, ratifié par la France en 2008. Un défi
économique avec la mise en oeuvre des politiques économiques
à venir telles que définies par les Conseils de Lisbonne de 2000
et de Göteborg de 2002. Enfin, un défi social, avec
l'élargissement de l'Union Européenne, dix nouveaux Etats
membres, principalement de l'ex bloc de l'Est en 2004, et la Bulgarie et la
Roumanie en 2007. Inscrite dès le traité de Rome dans son
préambule, l'approche territoriale du processus d'intégration
européenne concerne aujourd'hui les articles 158 à 162 du
Traité sur l'Union Européenne. L'objectif des fonds structurels
est de réduire les disparités entre les niveaux de
développement des différentes régions, par la
solidarité financière des Etats membres, en participant aux
développements et à l'ajustement structurels des régions
les moins favorisées. Il s'agit de financer par les aides
communautaires, qui découlent de ces fonds, des projets de dimensions
locales ou nationales. C'est à dire de faire en sorte que les Etats
membres, l'Union et les régions qui la composent puissent se donner les
moyens de faire face à ce triple défi.
Les fonds structurels ont connus leur essor durant une
période où l'Europe des projets semblait marquer le pas et
où l'idée d'une union plus politique a émergée. Les
fonds structurels relèvent d'une approche fonctionnaliste, très
économique, pourtant. Ils ne remettent pas en cause les
compétences des Etats-membres, leurs politiques économiques,
puisque ceux-là sont partie prenante de la gestion et de la
sélection des projets auxquels vont participer les fonds. Il y a
là l'idée d'une intégration « par le
haut », c'est-à-dire par l'Europe et en raison des
compétences économiques transférées en
priorité à la Communauté, d'une logique « du
bas », propre à l'espace régional. L'action et
l'intégration sont ainsi les deux raisons d'être des fonds
structurels, les deux ressorts de la politique de cohésion communautaire
au sein d'une « économie sociale de marché »,
tel que l'Union se définie dans l'article 3-3 du Traité de
Lisbonne. D'une logique purement économique, les institutions
communautaires ont de fait une visée politique, certes très
biaisée car restant dans des domaines strictement économiques de
projets locaux et ciblés. La politique de cohésion communautaire
est avant tout une manière de rééquilibrage
économique entre les Etats membres. Les fonds structurels sont
nés du constat d'une Europe politique insuffisante. Cependant, ces
derniers sont assignés d'une méthode d'intervention pour le moins
complexe et de priorités qui tendent à se multiplier, de
même que de principes en perpétuelles évolutions. Autrement
dit, pour paraphraser Esope, « les hommes applaudissent aux
imitations et sifflent la réalité ». Les fonds
structurels n'en font pas exception, ni dans la recherche de
l'intégration communautaire (Partie 1), ni dans la concrétisation
de l'action communautaire (Partie 2).
Partie 1- La recherche par les fonds structurels de
l'intégration communautaire
L'intégration par le biais des fonds structurels est
indirectement évoquée par la préambule du Traité
sur l'Union Européenne : « Déterminés
à promouvoir le progrès économique et social de leurs
peuples, compte tenu du principe du développement durable et dans le
cadre de l'achèvement du marché intérieur, et du
renforcement de la cohésion et de la protection de l'environnement, et
à mettre en oeuvre des politiques assurant des progrès
parallèles dans l'intégration économique et dans les
autres domaines ». L'intervention des fonds structurels est le fruit
de l'évolution d'un cadre à la fois politique, économique
et juridique (Section 1). L'idée est, véritablement, de soutenir
la politique de cohésion communautaire (Section 2).
Section 1 - Le cadre d'intervention des fonds
structurels
La politique de cohésion communautaire est peu à
peu apparue comme une nécessité, pour accompagner la construction
européenne (I). Les objectifs actuels de cette politique (II) en sont le
reflet.
I- Le développement progressif d'une politique de
cohésion communautaire
Peuvent se distinguer trois temps dans le développement de
la cohésion communautaire, à savoir des balbutiements initiaux
jusqu'au marché unique (A), jusqu'à l'agenda de Lisbonne (B) et
jusqu'à la période de programmation actuelle (C).
A- Des balbutiements initiaux au marché unique
L'Europe s'est construite en prenant en considération les
inégalités, réelles, de richesse entre les Etats membres
et les régions. Le préambule du traité de Rome de 1957
marque dès son origine la volonté, pour l'Europe des six, bien
que les disparités régionales soient alors peu marquées,
de déterminer une politique de cohésion économique et
sociale, en visant à ce que les Etats membres expriment leur souci de
« renforcer l'unité de leurs économies et d'en assurer
le développement harmonieux en réduisant l'écart entre les
différentes régions et le retard des moins
favorisées ». En ce sens est créé le Fonds
Social Européen (FSE), à l'article 123 et s. Celui-ci ne sera
opérationnel qu'en 1973. Il vise, notamment, à
« améliorer les possibilités d'emploi des travailleurs
et (...) de contribuer au relèvement de leur niveau de vie ».
Un second fonds apparaît en 1962 avec la Politique Agricole Commune, le
Fonds Européen d'Orientation et de Garantie Agricole (FEOGA),
divisé à partir de 1964 en une section
« garantie », entrant dans le cadre de la PAC, et une
section « orientation », à l'origine prévu
pour le financement des structures agricoles (art. 40-4, actuel art. 34 par.3).
Timidement, ces fonds prennent place mais, paradoxalement, les moyens mis en
oeuvre furent très limités. Les disparités
régionales continuèrent à être
élevées. Les fonds connurent leur premier essor avec la
première crise pétrolière de 1973. A cette époque,
celle-ci a fortement touché les régions industrielles. Certaines
régions industrielles, fortement touchées par l'augmentation du
chômage, telles que le Nord-Pas-de-Calais ou la Lorraine en France, ou le
Mezzogiorno Italien, montraient un besoin de reconversion. La même
année, la Communauté économique européenne (CEE)
intégra en son sein l'Irlande, le Danemark et le Royaume-Uni. Ce dernier
fit très vite pression pour obtenir d'abord un
« remboursement » quant à sa contribution
générale au financement de la communauté, et
particulièrement à la PAC. Est créé le 18 mars 1975
le FEDER, Fonds Européen de développement régional,
prévu à l'article 160, dont l'objet est alors d'être
« destiné à contribuer à la correction des
principaux déséquilibres régionaux dans la
Communauté par une participation au développement et à
l'ajustement structurel des régions en retard de développement et
à la reconversion des régions industrielles en
déclin ». Sa finalité est alors la solidarité
financière au profit des régions les plus pauvres de l'UE. Il
faut noter que ces créations découlent de l'actuel article 308 du
traité de l'Union, selon lequel les compétences
européennes peuvent s'étendre « si une action de la
Communauté apparaît nécessaire pour réaliser, dans
le fonctionnement du marché commun, l'un des objets de la
Communauté ». La politique régionale représente
alors environ 7% du budget européen. Dans cette optique, il semble alors
plus accompagner les politiques nationales de développement, en
contribuant à leur remboursement, que faire l'objet d'une
décision communautaire. Les moyens du FEDER sont en effet, au moins
jusqu'en 1984, calculés sur la base de quotas entre Etats, même si
en 1979 se présente une section hors quotas du fonds, égale
à 5% du total de ses dotations. En 1984 est supprimé le
système de quotas par l'institution d'un seuil plancher, qui conditionne
les financements supplémentaires à l'intégration de
projets nationaux dans la politique générale de la
Communauté. Cette dernière peut alors proposer des programmes
d'initiative communautaire, adoptés à la majorité du
Conseil.
En vérité, ces fonds paraissent être un
préalable à l'accomplissement du marché unique. Il est
préférable dans cette perspective que les régions
européennes les plus défavorisées puissent rattraper leur
retard, et ainsi corriger une accentuation probable des
déséquilibres économiques régionaux. En ce sens,
les crédits alloués aux différents fonds ont suivis chaque
élargissement, et l'entrée d'Etats membres relativement plus
pauvres. Notamment en 1981 avec la Grèce, puis en 1986 avec le Portugal
et l'Espagne. Une approche plus sectorielle est alors envisagée. En
1985, dans le domaine agricole, sont mis en place des programmes
intégrés méditerranéens, en ce qui concerne les
marchés des fruits et légumes. C'est l'apparition des programmes
pluriannuels, financés par un ou plusieurs fonds. Egalement, il a
existé des opérations intégrées de
développement. Mais ces approches sont restées trop sectorielles.
C'est ainsi que l'Acte Unique Européen, le marché commun et sa
libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des
capitaux, a fait peser des craintes sur la politique de cohésion
économique et sociale. Celle-ci s'est dotée d'une réelle
base juridique par un titre V, aux articles 158 à 162 du traité
CE actuels, sous un titre XVII. L'article 159 dispose en ce sens que
« en particulier, la Communauté vise à réduire
l'écart entre les niveaux de développement des diverses
régions ». L'acte unique en fait une nouvelle politique
commune. Les fonds sont dotés d'une procédure où, sur
proposition de la Commission, la structure et les règles
opérationnelles des fonds sont adoptées à
l'unanimité par le Conseil, après un avis conforme du Parlement.
La nécessité des fonds prit alors de l'ampleur, sous l'impulsion
de Jacques Delors, alors président de la Commission. Un programme
présenté au Parlement européen en 1987, intitulé
« réussir l'Acte unique », qui impliquait une
orientation de la politique budgétaire communautaire vers la
cohésion économique et sociale. Ce que reflètent les 5
règlements de 1988, dont le règlement cadre n°2052/1988. Fut
proposé par l'institution un programme fortement à destination
des ces trois nouveaux Etats, et de l'Irlande. Les fonds ont dès lors
fait l'objet d'une approche, pour la première fois,
intégrée. Ils prennent alors tout leur sens de fonds
structurels.
B- De l'émergence d'une politique de cohésion
à l'agenda de Lisbonne
Le premier « paquet Delors »
révèle un doublement des crédits structurels, qui
deviennent le second budget communautaire derrière la PAC. Le budget est
alors d'environ 70,4 milliards d'euros. Le FEDER, le FSE et le FEOGA
orientation sont destinés à répondre à 5 objectifs.
Ils sont, de facto, concentrés par objectif et par région.
L'objectif 1 concentre 80% du FEDER et concerne les trois fonds, et est relatif
aux régions en retard de développement ayant un PIB
inférieur à 75% du budget communautaire. L'objectif 2 appelle le
FEDER et le FSE, et concerne les régions en reconversion industrielle et
sociale. Les objectifs 3 et 4, la formation des jeunes de moins de 25 ans et
les chômeurs de longue durée, sont financés par le seul
FSE. L'objectif 5 a vise à l'amélioration des structures
agricoles par le FEOGA orientation, l'objectif 5 b au développement
rural. Les principes généraux propres aux fonds structurels se
mettent alors en place. Par exemple, apparaissent les principes du partenariat
entre la Commission, les Etats et les autorités régionales. De
même qu'une programmation pluriannuelle des budgets et des objectifs
permet aux régions de bénéficier d'un cadre relativement
stable, favorisant leur développement. Cette programmation ne concerne
pas que les fonds, mais aussi tout le budget européen. Les Etats membres
devaient, enfin, apporter eux aussi des ressources en vertu du principe de
l'additionnalité. Cet ensemble est complété par les
initiatives communautaires, pour lesquels une partie des crédits des
fonds structurels est réservée, et qui sont davantage
ciblés sur des petits projets, avec notamment le programme Leader pour
le développement local en milieu rural, ou le programme interreg, pour
la coopération transfrontalière. Quatorze types d'initiatives
furent lancés entre 1988 et 1993. A cette époque, interreg a
concerné notamment la Corse, la Lorraine, et le développement des
zones rurales. 1988 est donc axé sur les régions les moins
favorisées. C'est le principe de concentration des aides communautaires
qui prédomine.
La réforme du 20 juillet 1993 cherche à
améliorer le dispositif. L'intervention communautaire est
orientée vers des politiques d'ensemble, visant principalement à
la lutte contre le chômage et le développement des régions
les plus défavorisées. D'ores et déjà, le budget
passe à 145 milliards d'euros sous l'effet du « paquet Delors
II ». Union économique et monétaire aidant, la
nécessité du contrôle accru des dépenses publiques
nationales a entraîné un besoin d'aide financière par ce
biais. Le règlement cadre 2081/93 remplace le règlement de 1988
et la période de programmation s'étend de 1994 à 1999.
L'IFOP, instrument financier d'orientation de la pêche, est
créé spécifiquement pour répondre à la crise
de la pêche. Egalement, le fonds de cohésion est instauré,
à l'actuel article 161. Celui-ci cherche à financer des projets
de réseau transeuropéens d'infrastructures de transport et
d'environnement, dans les Etats membres dont le PIB est inférieur
à 90% de la moyenne communautaire, c'est-à-dire les pays du Sud
et l'Irlande. Il n'est pas à proprement parler un fonds structurel,
puisqu'il en est même souvent distingué, mais il découle de
la même logique d'intégration. Toutefois, sa portée semble
plus être de faire diminuer les écarts de niveaux de prix que
réellement les disparités régionales. En ce qui concernes
les initiatives communautaires, dont le nombre commença à
diminuer, Interreg est par exemple axé sur la coopération
interrégionale, avec notamment l'accord « pacte »,
pôle d'action et de coopération transfrontalière, conclu
entre le Nord-Pas-de-Calais et le Hainaut Belge. Mais ces initiatives furent
contestées par certains Etats, car, moins planifiées que les
actions structurelles, elles pouvaient apparaître comme une politique
communautaire d'aménagement du territoire.
Les fonds structurels ont alors une efficacité qui reste
à démontrer. Indéniablement, des Etats comme l'Espagne ont
largement pu développer leurs infrastructures et améliorer leurs
équipements publics. Le cas de cet Etat est intéressant car si
tous les pays connaissent des disparités régionales, c'est encore
plus le cas de l'Espagne. A partir de 1993, l'Espagne est éligible au
fonds de cohésion. Elle le restera jusqu'en 2013 Entre 1996 et 2003, les
fonds structurels et le fonds de cohésion représentèrent
1,1% en moyenne du PIB espagnol. La manne financière au titre des fonds
structurels s'est réduite à 4 régions pour l'actuelle
période de programmation, par exemple l'Andalousie et la Galice. Sept
autres ne recevront plus de fonds structurels, du fait de
l'élargissement.
C- L'élargissement et le bilan contrasté
jusqu'en 2007
Le Conseil Européen se réunit à Lisbonne en
mars 2000, et lance, autour de trois piliers économique, social et
environnemental, l'objectif de renforcer la compétitivité de l'UE
et d'arriver au plein emploi en 2010. Les cinq engagements de Lisbonne sont de
promouvoir l'économie de la connaissance, renforcer le marché
unique, instaurer un climat plus favorable pour les entreprises,
accroître la flexibilité du travail tout en maintenant la
cohésion sociale, et, du moins depuis la conférence de
Göteborg de 2001, installer le primat de la croissance durable. En terme
de fonds structurels, la Commission avait dès 1997, dans le cadre des
travaux préparatoires, créé l'agenda 2000. L'un des trois
défis de celui-ci est de « réduire les écarts
existant entre les régions en terme de richesse et de perspectives
économiques », dans l'optique de l'élargissement. La
cohésion économique et sociale devient un des fondements de
l'Union, et plus seulement une politique commune. La réforme des fonds
structurels intervient en 1999, par un règlement général
n°1260/1999 du Conseil du 21 juin, qui couvre la période 2000-2006.
Il faut noter que ce règlement général centralise le
règlement cadre et le règlement de coordination des fonds
structurels qui étaient jusque-là adoptés
séparément. Fortement marqué par cet agenda 2000, la
réforme des fonds structurels passe par la concentration des aides,
censée assurer une plus grande efficacité du financement
communautaire. Le fonctionnement des fonds tend à être
simplifié, pendant que l'évaluation et le contrôle sont
renforcés. Le nombre d'objectifs passe de 7 à 3. L'objectif 1 est
de soutenir le développement des régions les moins
prospères. 2/3 des crédits sont alloués à cet
objectif, qui a une portée de convergence puisqu'il vise les
régions les plus défavorisées. Il est financé par
le FEDER, le FSE, le FEOGA et l'IFOP. L'objectif 2 est de relancer les zones en
difficulté structurelle. Il reçoit 11,5% de la dotation
budgétaire, et est financé par le FEDER et le FSE. Il vise
à redynamiser les zones en difficultés structurelles. L'objectif
3 concerne le développement des ressources humaines, pour les
régions dans lesquelles des aides à l'éducation, à
la formation et à l'emploi sont nécessaires. Il intègre
les anciens objectifs 3 et 4, concerne environ 12% de la dotation, et est
financé par le seul FSE. Les initiatives communautaires, à savoir
Interreg, Urban, Leader et Equal, couvrent 5,35% des dotations structurelles.
A partir de là, la nouvelle programmation doit tenir
compte de l'élargissement. Le besoin des nouveaux Etats membres
atteindra 14,3 milliards d'euros, contre 16,2 milliards pour la période
2000-2006. Jusque là, il y a eu des effets positifs, comme la
réduction des disparités de revenus, une hausse de la croissance
ans les zones qui en ont particulièrement
bénéficiés, des restructurations industrielles. De
même que des effets moins mesurables comme une amélioration du
partenariat et, pur ainsi dire, de l'intégration. Toutefois, la
cohésion économique et sociale est loin d'être
achevée. Les disparités régionales sont encore
prééminentes, comme le phénomène de concentration
des activités tel que connaît la « banane
bleue » et les inégalités territoriales qui en
découlent. L'Europe est ainsi, en 2006, à la croisée des
chemins. L'élargissement a eu pour effet d'accroître les
disparités régionales quand l'Europe elle-même doit faire
face à un ralentissement de sa croissance économique. Les
règlements de 2006 de la période de programmation 2007-2013 n'en
sont que le reflet. Il faut préciser que le fonds de cohésion est
prévu dans le règlement n°1083/2006, qui dispose que
« dans un souci de cohérence accrue au niveau de
l'intervention des différents Fonds, il convient d'intégrer le
Fonds de cohésion dans la programmation de l'intervention
structurelle ». Par ailleurs, est crée un instrument de
développement rural, à peu près égal à 70
milliards d'euros, qui remplace le FEOGA orientation et qui intègre le
programme Leader +. Celui-ci ne peut cependant pas être
intégré dans l'analyse des fonds structurels.
En ce qui concerne l'éligibilité des régions
aux objectifs, est mise en place une nomenclature des unités
territoriales statistiques (NUTS), selon 3 niveaux, et selon le
règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 mai 2003. Le
niveau NUTS 3 concerne les populations entre 150 000 et 800 000
habitants. Il s'agit en réalité d'un niveau départemental.
Le NUTS 2, entre 800 000 et 3 millions. Il concerne les régions et
les régions d'outre mer. NUTS 1, entre 3 millions et 7 millions. Il
s'agit d'essayer de découper les zones européennes de
densité démographique en unités administratives, bon an
mal an, équivalentes. S'il n'existe pas dans une zone une unité
administrative suffisante, elle sera constituée d'un ensemble
d'unités plus petites. Très critiquée, cette nomenclature
est cependant nécessaire pour appréhender les objectifs actuels
assignés aux fonds structurels. C'est une décision de la
Commission qui établie la liste des régions éligibles pour
chaque objectif. A noter, enfin, que le Traité de Lisbonne, dans son
article 3, dispose que l'Union « promeut la cohésion
économique, sociale et territoriale ». La cohésion
communautaire intègre donc en son sein une nouvelle exigence de
cohésion territoriale.
II- Les objectifs actuels de la politique de cohésion
communautaire
Les trois objectifs sont prévus à l'article 3 du
règlement n°1083/2006 du Conseil du 11 juillet 2006, qui est en la
matière le règlement général des fonds structurels
pour la période 2007-2013. De manière à simplifier
l'articulation entre les différents fonds structurels et leur
assignation à des objectifs, ceux-là ont étés plus
clairement délimités. Le principe de concentration, qui vise
à éviter un saupoudrage des fonds, est mis en oeuvre. Une
communication de la Commission en date du 5 juillet 2005 résume ces
trois objectifs : stimuler le potentiel de croissance (A), anticiper et
promouvoir les changements économiques (B), promouvoir une
intégration plus forte du territoire de l'Union dans toutes ses
dimensions (C).
A- La convergence
L'objectif de convergence se substitue à l'objectif 1,
concernant les régions en retard de développement, et dont les
instruments financiers sont le FEDER et le FSE. Le FEOGA et l'IFOP sont
supprimés, faisant l'objet de programmations séparées. Cet
objectif comprend également le fonds de cohésion, pour les Etats
membres dont le revenu national brut est inférieur à 90% de celui
de l'Union. Le règlement général dispose que l'objectif
« vise à accélérer la convergence des Etats
membres et régions les moins développés en
améliorant les conditions de croissance et d'emploi par l'augmentation
et l'amélioration de la qualité des investissements dans le
capital physique et humain, le développement de l'innovation et de la
société de la connaissance, l'adaptabilité aux changements
économiques et sociaux, la protection et l'amélioration de la
qualité de l'environnement ainsi que l'efficacité
administrative ». Objectif ayant une véritable portée
d'intégration communautaire, de développement structurel, il vise
avant tout les nouveaux Etats membres, et « constitue la
priorité des fonds », reprenant les stratégies de
Lisbonne et de Göteborg en ce qui concerne l'innovation et
l'environnement, notamment. L'article 5 du même règlement indique
que les régions qui y sont éligibles sont celles dont le PIB
(produit intérieur brut) est inférieur à 75% du PIB moyen
de l'UE. Concrètement, quatre-vingt-quatre régions
représentant dix-sept Etats membres et près de cent cinquante
millions d'habitants sont concernées. Une période de
« phasing-out » est prévue pour seize régions
éligibles à l'ancien objectif 1 qui, sans l'élargissement,
aurait été statistiquement en dessous des 75% du PIB moyen. Cette
mesure est un régime transitoire dégressif prenant en compte
l'effet statistique de l'élargissement, entraînant un abaissement
mécanique du seuil. Il concerne les régions de niveau NUTS 2
Pour la période de programmation 2007-2013, cet objectif
rassemble 81,5% du budget finançant les fonds structurels. Le
critère des régions avec un PIB par habitant inférieur
à 75% de celui de l'UE rassemble à lui seul 57,5% du total du
budget, soit plus de la moitié. Ce critère est calculé
« en utilisant la population éligible, la
prospérité régionale, la prospérité
nationale et le taux de chômage ». S'ajoute le fond de
cohésion à hauteur de 20%, et la période de phasing-out. A
ce titre, l'Etat qui en bénéficie le plus est la Pologne, avec
une allocation de 44,4 milliards d'euros, en prix courants. On note que
l'Espagne et l'Italie sont en deuxième position, avec des allocations de
l'ordre de 21 milliards d'euros. La France est dotée de 3,2 milliards,
tandis que l'Allemagne consacre 11,9 milliards. L'objectif de convergence, de
manière globale, concerne près de 100 régions, 35% de la
population de l'UE à 27 et...12,5% du PIB.
Pour cet objectif, trois fonds sont mis en oeuvre. Concernant le
FEDER, l'article 4 du règlement n°1080/2006 du 5 juillet 2006, il
se concentre sur 11 priorités. Brièvement, il s'agit de la
recherche et développement, la société de l'information
notamment pour les PME, les initiatives locales et l'aide aux services de
proximité pour créer de nouveaux emplois qui ne relèvent
pas du FSE, l'environnement, la prévention des risques naturels et
technologiques, le tourisme, les investissements culturels, dans les
transports, dans l'énergie, dans l'éducation et
particulièrement dans la formation professionnelle, ainsi que dans les
infrastructures sanitaires et sociales. Le FSE, quant à lui, et par le
règlement 1081/2006 de la même date, son intervention est incluse
dans l'article 3. Ainsi, « dans le cadre de l'objectif
«convergence», le FSE soutient des actions entreprises dans les
États membres ». En ce sens, ses priorités sont
d'« augmenter et améliorer l'investissement dans le capital
humain », c'est à dire la mise en oeuvre des réformes
des systèmes d'éducation et de formation, la participation accrue
à l'éducation et à la formation tout au long de la vie, et
le développement du potentiel humain dans le domaine de la recherche et
de l'innovation. Egalement, « renforcer la capacité
institutionnelle et l'efficacité des administrations et des services
publics aux niveaux national, régional et local », en
encourageant des mécanismes destinés à améliorer la
conception, le suivi et l'évaluation des politiques et des programmes,
de même que le développement des capacités pour leur mise
en oeuvre. Ainsi, et insidieusement, le FSE intervient pour le financement des
services publics nationaux, par cette priorité. Rappelons que le concept
de SIEG est considéré, depuis un arrêt de la CJCE du 19
mars 1991 France contre Commission, comme un « instrument de
politique économique » des Etats membres. L'Union fait
référence aux services publics pour mettre en oeuvre ses propres
actions, ses propres politiques, dans le cadre national. Le FSE intervient
également dans d'autres priorités, qui sont les mêmes que
pour l'objectif de compétitivité régionale et d'emploi, et
que nous détaillerons ci-après. La convergence, de fait, est
très orientée sur les efforts de recherche, d'innovation, de
développement des infrastructures. Peut être y'a t-il là un
paradoxe avec l'objectif de rattrapage d'économies qui, moins
intégrées, ont plus un besoin criant de restructurations que de
soucis d'environnement ou de formation professionnelle. Mais, en
réalité, la stratégie de Lisbonne, qui transparaît
véritablement dans ces priorités, a permit aux institutions
communautaires de conclure à ce que réussir
l'élargissement, et combler le retard économique de certaines
régions, revienne à considérer qu'il faut avant tout une
croissance forte. Celle-ci est le fruit, à terme, du progrès
technique, de l'investissement qualitatif et endogène. Ce qui peut
amener, à terme, à la question de savoir s'il faut conserver ou
non le critère du PIB pour l'éligibilité des
régions aux objectifs. Celui-ci ne prend que très mal en compte
ces critères plus qualitatifs.
Le fonds de cohésion est prévu dans le
règlement 1084/2006 du 11 juillet 2006. Dans son article 1er,
il est dit qu'il est régi par le règlement 1083/2006. Il doit
donc respecter les mêmes principes que les fonds structurels. Et il
intervient de la même manière, pour cet objectif de convergence.
Ses objets sont à la fois l'environnement et les réseaux de
transports transeuropéens.
B- La compétitivité régionale et
l'emploi
Les anciens objectifs 2 et 3, qui concernaient les zones en
reconversion économique et sociale et les systèmes de formation
et de promotion de l'emploi, sont regroupés dans un objectif de
compétitivité régionale et d'emploi. Celui-ci est
financé à la fois par le FEDER et par le FSE. Il comprend aussi
les initiatives Urban et Equal, tout comme d'ailleurs l'objectif de
convergence. La compétitivité « vise, en dehors des
régions les moins développées, à renforcer la
compétitivité et l'attractivité des régions ainsi
que l'emploi en anticipant les changements économiques et
sociaux ». L'article 3 du règlement général de
2006 précise que cela passe « par l'augmentation et
l'amélioration de la qualité des investissements dans le capital
humain, l'innovation et la promotion de la société de la
connaissance, l'esprit d'entreprise, la protection et l'amélioration de
l'environnement, l'amélioration de l'accessibilité,
l'adaptabilité des travailleurs et des entreprises ainsi que le
développement de marchés du travail inclusifs ». Autant
dire un certain progrès social, dans des zones qui peuvent
connaître de faibles densités de population. A ce titre, et
même si cela ne concerne pas que cet objectif, une communication du 5
juillet 2005 montre que la Commission cherche à mettre en oeuvre une
politique de développement régional, car « les actions en
faveur des zones rurales doivent contribuer à garantir un niveau
d'accès maximum aux SIEG en vue d'améliorer la qualité de
vie dans les zones rurales, nécessaire pour attirer les entreprises, le
personnel qualifié et pour limiter la migration ». La
compétitivité concerne, selon le considérant 18 du
règlement, « le territoire de la Communauté qui n'est
pas couvert pas l'objectif convergence ». Il n'y a pas de zonage,
avec des zones rurales ou urbaines par exemple, comme ce fut le cas auparavant.
Ce zonage avait l'avantage d'éviter tout risque
d'arbitraire. Egalement, l'objectif concerne les régions couvertes
par l'ancien objectif 1, mais qui dépassent désormais le
critère des 75%, et que l'on peut appeler le
« phasing-in ».
L'objectif de compétitivité régionale et
d'emploi concentre environ 16% de la programmation, dont 3,4% pour le
phasing-in, pour un total de près de 43,6 milliards d'euros. Il est
à noter que c'est la France qui en bénéficie le plus, avec
10,3 milliards. De là à y voir la marque d'un manque de
compétitivité globale...cet objectif est lui aussi financé
par le FEDER et le FSE, chacun pour moitié. C'est à l'Etat,
d'ailleurs, de préciser à la Commission les régions qui y
sont éligibles. L'article 5 du règlement 1080/2006 dispose que
« le FEDER concentre son intervention, dans le cadre de
stratégies de développement durable, tout en promouvant
l'emploi », et ce par 3 biais. Tout d'abord, l'innovation et
l'économie de la connaissance, qui se réfère à
l'amélioration des capacités régionales de recherche et
développement technologique, à la stimulation de l'innovation et
de l'esprit d'entreprise, et à la promotion de l'esprit d'entreprise,
ainsi que « la création d'instruments d'ingénierie
financière et de pépinières propices à la
capacité de développement technologique et de recherche des
PME ». Autre biais, l'environnement et la prévention des
risques. Cela concerne la réhabilitation de l'environnement physique, le
développement de la biodiversité, la production d'énergies
renouvelables, la promotion de transports publics propres et durables, les
mesures de prévention et de gestion des risques naturels et
technologiques, la valorisation du patrimoine naturel et culturel. Dernier
biais, les services d'intérêt économiques
généraux du transport et des télécommunications.
Cette priorité vise à l'amélioration des réseaux
transeuropéens de transport, et à l'encouragement de
l'accès des PME aux technologies de l'information et de la
télécommunication. L'article précise que pour les
régions en situation de phasing in, ces priorités peuvent
s'étendre à celles prévues pour l'objectif de la
convergence.
Quant au FSE, le règlement 1081/2006 inclut dans son
article 3, comme dit précédemment, des priorités qui sont
les mêmes que pour l'objectif de convergence. Il s'agit d'augmenter la
capacité d'adaptation des travailleurs, des entreprises et des chefs
d'entreprise, par l'éducation, la formation continue et l'investissement
dans les ressources humaines, et par la conception et la diffusion de formes
d'organisation du travail plus productives. Egalement, il s'agit
d'améliorer l'accès à l'emploi et à l'insertion
durable sur le marché du travail des demandeurs d'emploi et des
personnes inactives, par la modernisation et le renforcement des institutions
du marché du travail, par l'individualisation des besoins, par
l'amélioration de l'accès à l'emploi des femmes ou encore
par une meilleure prise en charge des migrations transfrontières. De
même, il s'agit de renforcer l'inclusion sociale des personnes
défavorisées sur le marché du travail, en encourageant
l'insertion des personnes en situation d'exclusion sociale, d'abandon scolaire,
les personnes dites de minorités, les personnes handicapées,
ainsi que celles travaillant dans des services d'aides aux personnes
dépendantes ; et en encourageant aussi la lutte contre les
discriminations à l'embauche et sur le marché du travail. Tous
ces critères sont le reflet des quatre programmes d'actions
communautaires que sont la lutte contre la discrimination,
l'égalité entre les hommes et les femmes, la lutte contre
l'exclusion sociale, et l'employabilité. Le FSE, en quelque sorte, prend
en charge le volet social de l'Union, de manière sectorielle. Il faut
noter que ces 4 programmes ont fusionnés en un seul, nommé
PROGRESS, permettant de mieux cerner le rôle du FSE quant à la
politique sociale de l'Union Européenne.
C- La coopération territoriale
Troisième et dernier objectif, la coopération
territoriale. Il vise « à renforcer la coopération au
niveau transfrontalier par des initiatives conjointes locales et
régionales, à renforcer la coopération transnationale par
des actions favorables au développement territorial
intégré en liaison avec les priorités de la
Communauté, et à renforcer la coopération
interrégionale et l'échange d'expérience au niveau
territorial approprié ». Il est, de fait, composé de la
coopération transfrontalière, transnationale et
interrégionale. Les frontières nationales ne doivent pas
être un obstacle à l'intégration européenne. En ce
sens, cet objectif est calqué sur le fonctionnement d'Interreg,
c'est-à-dire sur un fonctionnement d'initiatives communautaires. Selon
l'article 7 du règlement cadre, les régions qui sont
éligibles à la coopération transfrontalière sont
les régions NUTS 3 situées le long des frontières
terrestres, intérieures et maritimes, « compte tenu des
ajustements potentiels nécessaires pour assurer la cohérence et
la continuité de l'action de coopération ». Pour la
coopération transnationale, de même que transfrontalière,
la liste des régions éligibles est déterminée par
la Commission, après consultation des Etat membres. Pour la
coopération interrégionale, tout le territoire européen
est éligible. Le premier type de coopération recouvre 1,8% de la
programmation, la coopération transnationale 0,5%, et la
coopération interrégionale 0,1%.
Cet objectif est entièrement financé par le FEDER.
L'article 6 du règlement 1080/2006 énonce à ce sujet 3
priorités. Dans ce qui va suivre, chaque « sous
priorité » doit évidemment intégrer une
dimension de coopération régionale en rapport avec la
priorité principale. La première est « le
développement d'activités économiques, sociales et
environnementales transfrontalières au moyen de stratégies
conjointes en faveur du développement territorial durable ».
Cela passe par, notamment, le développement des PME, du tourisme, de la
culture, du commerce transfrontalier, la protection des ressources naturelles
et culturelles, la prévention des risques environnementaux et
technologiques, le lien entre zones rurales et urbaines, un meilleur
accès aux réseaux de transports, de distribution d'eau et
d'énergie, ainsi qu'une utilisation conjointe des infrastructures dans
des secteurs comme la santé, la culture, le tourisme et
l'éducation. De même, le cas échéant, le FEDER peut
intervenir dans les domaines de l'employabilité, si cela a une
visée territoriale. Enfin, l'article précise que le fonds
intervient aussi dans le cadre du programme Peace, en Irlande du Nord, par la
promotion de la stabilité sociale et économique. Ce programme
consiste en la consolidation du processus de paix dans cette région. Il
est financé à hauteur de 0,1% du total de la programmation,
c'est-à-dire 200 millions d'euros. Autre grande priorité,
« l'établissement et le développement de la
coopération transnationale ». Cela concerne l'innovation, par
la création et le développement de réseaux scientifiques
et technologiques et par l'amélioration des capacités
régionales en matière de recherche et développement
technologique. Cela concerne aussi l'environnement, par la gestion de l'eau,
par l'efficacité énergétique, par la prévention des
risques liés à la protection de l'environnement. Cela concerne
également l'accessibilité aux services de transport et de
télécommunications. Enfin, le développement urbain
durable, avec le renforcement du développement polycentrique aux niveaux
transnational, national et régional. La troisième et
dernière grande priorité est « le renforcement de
l'efficacité de la politique régionale », par le biais
de la promotion de la coopération interrégionale basée sur
l'innovation, l'économie de la connaissance et sur la protection
l'environnement, par le biais de l'identification, le transfert et la diffusion
de meilleures pratiques, et par le biais de la prospective.
La coopération territoriale devient ainsi plus lisible.
Cet objectif est basé sur l'idée que les frontières
nationales sont un obstacle à la compétitivité de l'Union
dans son ensemble. Il s'agit de répondre par des solutions communes
à des problèmes communs. En ce sens, alors que les deux autres
objectifs sont purement relatifs à l'intégration communautaire,
celui-ci est plus relatif à l'idée d'une intégration
équilibrée. Quelque part, la coopération territoriale est
une forme de convergence inter-étatique. La mise en oeuvre de cet
objectif peut être confiée au groupement européen de
coopération territoriale, prévu par le règlement
n°1082/2006 du 5 juillet 2006. C'est un organisme doté de la
personnalité juridique dont la raison d'être est de rationaliser
l'objectif de coopération, et regroupe conventionnellement les
administrations des Etats membres, régionales ainsi que locales, de
même d'autres organismes publics et associatifs.
Section 2 - L'intervention des fonds structurels comme
soutien de la politique de cohésion communautaire
Le champ d'intervention des fonds structurels résulte
avant tout d'une volonté politique d'ensemble, inscrite dans le budget
communautaire (I). Cette intervention obéit aussi à des principes
généraux (II).
I- L'insertion des fonds structurels dans le budget
communautaire
L'intégration par les fonds structurels est
justifiée car l'Union européenne contient en son sein des zones
inégalement développées. Il faut aider les projets, les
zones et les Etats à ne pas voir s'accroître leurs
disparités du fait de la construction européenne. En ce sens, le
budget européen est l'élément de base de la politique des
fonds structurels, politique loin d'être uniforme. Il faut donc tout
d'abord analyser l'importance des fonds dans le budget communautaire (A), avant
d'appréhender les difficultés théoriques que peuvent
engendrer ces fonds structurels (B).
A- L'importance des fonds dans le budget communautaire
Il faut bien sûr rappeler que les fonds structurels ne sont
pas dotés de la personnalité juridique mais sont des chapitres
inscrits dans le budget communautaire. Il est nécessaire
d'étudier l'insertion des fonds structurels dans celui-ci, car cela
amène à s'interroger plus globalement sur la capacité de
l'Union à mener une politique économique, ainsi que sur les
manières de la mettre en oeuvre. Autrement dit, l'aide communautaire est
avant tout une action communautaire, constituant de fait une intégration
communautaire. L'Europe, son budget, ne découle pas d'une logique
purement économique, mais bien politique, faite de discussions
permanentes. Par ailleurs, les règlements généraux sur les
fonds structurels ne sont pas à proprement parler des règlements
financiers, puisqu'ils sont pris dans le cadre de la mise en oeuvre des
politiques communes, où les fonds structurels ont une place
prépondérante. Mais leur portée financière dans
l'Union est notable. L'élaboration du budget découle de l'article
272 du traité CE. En raison de cette importance financière, et
après l'adoption des perspectives financières, la
réglementation communautaire en ce qui concerne les fonds fait toujours
l'objet d'une réévaluation. Peut s'appliquer en ce sens la
théorie de Richard Musgrave, apparue en 1959 dans The theory of
public finance, quant aux trois fonctions économiques que doit
remplir un Etat. Celui-ci a tout d'abord une fonction d'allocation,
c'est-à-dire, si l'on applique cette fonction à l'Union, de
transférer des ressources lorsque la régulation d'un
marché est estimée défaillante. Juridiquement, cela se
traduit par des subventions, comme avec la PAC par exemple, et par des
règlementations dans différents secteurs. Cette fonction
d'allocation intègre la notion de régulation. Une autre fonction
est une fonction de stabilisation, en l'occurrence de la croissance, qui peut
s'exprimer par la politique monétaire, par le marché commun, mais
aussi politique et juridique, par le biais des traités successifs et le
rôle des institutions communautaires. Dernière fonction, une
fonction de redistribution. Celle-ci nous intéresse
particulièrement car son objectif est la correction des
inégalités de richesses. Les fonds structurels expriment en ce
sens cette fonction pour l'Union, pour les raisons évoquées
précédemment. On peut parler de redistribution
interrégionale. Le caractère supra national de l'Union pose
cependant question. Car, nécessairement, ces fonctions sont
assurés soit par l'Union, soit par les Etats eux-mêmes. La
fonction de redistribution a une portée largement Etatique, et demeure
d'ailleurs de son fait. Seule la redistribution entre les nations et les
régions par le biais des fonds structurels est du ressort de l'UE, et
est conditionnée à l'action des Etats et des collectivités
locales. Ainsi, les fonds structurels ont aussi une fonction d'allocation, par
le biais de ses règlements, puisque fixant des objectifs et des moyens
de les mettre en oeuvre qui s'imposent aux Etats membres ; et une fonction
de stabilisation, car les fonds intègrent un certain objectif de
croissance et sont dès l'origine liés à la construction
communautaire. D'où la difficulté, certes conceptuelle,
d'appréhender ce que sera le futur des fonds structurels, et vers quelle
fonction ils vont tendre. Il faut préciser en ce sens que le budget de
l'Union est avant tout un budget d'intervention, puisqu'il ne comporte que peu
de dépenses administratives.
L'Union européenne se distingue des organisations
internationales car elle peut elle-même gérer ses dépenses
d'ordre opérationnel. Ces dépenses, en termes structurels, sont
le fait des différents fonds. Ces sont des mécanismes
communautaires qui échappent aux Etats membres.
Pour les fonds structurels, la question de la répartition
des charges de financement entre les Etats membres est primordiale. Les Etats
membres sont divisés sur la question des fonds structurels. La
Grèce, l'Espagne, le Portugal, voient leurs crédits
européens s'amoindrir, du fait de l'élargissement. Ils
souhaiteraient ainsi une hausse de la politique de cohésion
communautaire, puisque cette augmentation leur bénéficierait
alors pour partie. Un Etat peut devenir soit contributeur, soit
bénéficiaire, au fur et à mesure des programmations. La
théorie dite du juste retour, c'est-à-dire ce type de calcul, a
des conséquences financières, puisque des financements
supplémentaires qui ne prennent pas en compte les critères de
répartition des fonds peuvent être engagés, comme le montre
l'annexe II du règlement n°1083/2006 pour environ 5 milliards
d'euros, notamment pour l'Espagne et l'Italie. Il y à là
l'idée d'un « réajustement » politique de la
répartition des fonds aux Etats. Cela est d'ailleurs critiquable. Par
ailleurs, si les crédits sont engagés pour une période,
ils peuvent être eux-mêmes réajustés durant la
programmation. A chaque vote par le Conseil d'un nouveau règlement, les
débats quant à la contribution de chaque Etat refont de ce fait
surface, a fortiori avec l'élargissement. Par exemple, la phrase
lancée en 1979 par Margaret Thatcher à propos de la PAC,
« I want my money back ». La France est en 2005 le second
contributeur de l'Union, avec 16,42%, derrière l'Allemagne, avec 21,11%.
Ces deux pays, à eux seuls, contribuent donc pour plus d'un tiers du
budget communautaire total. Tandis que le solde net
contribution/bénéfices est négatif pour ces deux Etats,
ainsi que pour le Royaume Uni ou encore l'Italie, il est positif pour des Etats
comme le Portugal, l'Espagne, la Grèce ou l'Irlande. Ces
déséquilibres sont donc voulus, témoignant de l'effort
d'intégration et de cohésion communautaire. La majorité
des Etats membres ne sont pas, c'est un euphémisme, pour une hausse du
budget européen, dans un contexte où la convergence est aussi
promue par le pacte de stabilité et de croissance. A ne pas
négliger, dès lors, l'hypothèse d'un
prélèvement autonome, très difficile à mettre en
oeuvre mais qui aurait pour conséquence d'éviter les arbitrages
au début de chaque programmation pluriannuelle, et d'éviter le
sempiternel débat entre les Etats contributeurs et les Etats
bénéficiaires.
En proportion, le budget européen demeure relativement
faible, puisqu'il est en 2006 de l'ordre de 1,08% du revenu national brut de
l'UE, moins de 1% du PIB total. Les règlements adoptés dans le
cadre des fonds structurels sont avant tout des règlements financiers.
La politique agricole et les fonds structurels concernent environ 80% du budget
en 2006, dont 37% pour les seules « actions
structurelles ». Les fonds structurels constituent ainsi le
deuxième poste budgétaire de l'Union, soit un peu plus du tiers
du budget. Concrètement, pour la période 2007-2013, les fonds
structurels représentent environ 308 milliards d'euros en prix constant,
sur la base 2004. Par rapport à la période 2000-2006, la part
consacrée aux fonds structurels a augmenté de près d'un
tiers. Mais le budget de l'Union augmente mécaniquement lorsque le
nombre de ses membres augmente lui-même. Du reste, les fonds structurels
connurent une hausse forte et continue depuis l'établissement d'une
politique de cohésion. Economiquement, ces nouveaux crédits
d'engagement équivalent à 0,37% de l'investissement national brut
de l'Union à 27.
B- Le manque de clarté entre cohésion,
compétitivité et solidarité
La Commission a donné le nom de structurels aux fonds, en
affichant la volonté que l'intégration communautaire passe par
une action dont les effets seraient visibles à long, voire à
moyen terme, par le biais du financement de projets d'infrastructures et de
production. La Commission, dans le deuxième considérant du
règlement n°1828/2006, estime que « l'expérience a
montré que les citoyens de l'Union européenne n'étaient
pas suffisamment conscients du rôle joué par la Communauté
dans le financement de programmes visant à accroître la
compétitivité économique, à créer des
emplois et à renforcer la cohésion interne ». Du reste,
la description des objectifs assignés aux fonds structurels laisse
grande aux priorités de Lisbonne, que reflète ce
considérant. Dans un avis sur le 4ème rapport sur la
cohésion économique et sociale, publié par la Commission
fin 2007, le Comité économique et social européen propose
donc, tout en demandant que les fonds structurels soient plus associés
à une stratégie de développement durable qu'aux objectifs
de Lisbonne, que le PIB, critère macroéconomique par excellence,
ne soit plus le seul critère d'éligibilité des
régions aux fonds structurels. Celui-ci a cependant l'avantage de la
commodité. Le Comité propose de prendre en compte le taux
d'emploi, le taux de chômage, un indicateur traduisant
« l'efficacité de la protection sociale », de
même qu'un indicateur sur les inégalités de revenus, ou
encore un indicateur sur les émissions de gaz à effet de serre.
Autrement dit, des critères moins « purement »
économiques que le PIB, et plus adaptés aux critères
d'éligibilité aux fonds. Cet exemple montre que, si les
fondements juridiques d'une intervention communautaire restent les mêmes,
il existe une multitudes de moyens permettant d'y répondre, et de
manière plus ou moins efficaces. L'efficacité elle-même
d'une mesure est un résultat très relatif, puisqu'elle demande un
rendement immédiat des fonds structurels, ce qui peut apparaître
comme contradictoire avec le moyen et le long terme, censés être
les durées attendues de leur efficacité. Un rapport
d'évaluation sur la réalisation de la stratégie de
Lisbonne a été rendu en 2004 sous la présidence de M. Wim
Kok, selon lequel malgré la conjoncture économique tendue,
« il est clair que l'Union européenne et ses Etats membres ont
ralenti, eux aussi, le mouvement (...). Ces résultats décevants
s'expliquent par un agenda surchargé, une coordination médiocre
et des priorités inconciliables. Il n'en reste pas moins que l'absence
d'action politique résolue a posé un problème
majeur ». Laisser le marché au sens (très) large le
soin de réaliser à court terme des investissements qualitatifs
tels que définis par les objectifs assignés aux fonds structurels
est très délicat. Il ne faut pas négliger les
inégalités économiques
« structurelles » entre les Etats, et qui ne peuvent
être compensées simplement par la réalisation des projets
financés par les fonds structurels, ni par un simple consensus sur les
dotations allouées à ces fonds. Mais ceux-là ont le
mérite d'exister, ce que ne contrediront pas les exemples Espagnols,
Portugais, Irlandais, ou même les Länder Allemands. L'exemple du
Mezzogiorno Italien, qui a connu une croissance de l'ordre de 2% au cours de la
programmation 1994-1999 et qui restait inférieure au reste du pays,
montre cependant les limites des fonds structurels, dont les effets sont
corrélés aux cycles de croissance économique et de
ralentissement de la croissance.
La programmation pluriannuelle des fonds structurels qui
découle, comme montré précédemment, de la
programmation du budget, montre que l'effort d'adaptation dont font preuve les
institutions communautaires est constant. Ainsi, sont mis en place des
critères d'éligibilité, d'attribution, qui peuvent
être critiqués, en raison de leur caractère statique. C'est
à chaque programmation que sont redéfinis, d'une certaine
manière, l'emploi des fonds structurels. Lisbonne est une manière
de mettre en avant des investissements qualitatifs, ce qui était moins
le cas auparavant. Dès lors, et très simplement, le manque de
clarté énoncé dans le titre est un manque de clarté
volontaire. Les institutions communautaires elles mêmes ne savent pas
réellement quel est le moyen le plus efficace pour réduire les
inégalités et les disparités régionales. Voire le
plus efficient.
Ces institutions reconnaissent le phénomène de
concentration des activités. Des externalités négatives,
c'est-à-dire des conséquences non prévues et non prises en
compte par le marché des activités marchandes, peuvent
apparaître avec cette concentration, comme une hausse de la pollution, du
prix de l'immobilier, voire des distorsions de concurrence et, in fine, des
disparités régionales plus grandes. Mais, dans le même
temps, cette concentration permet le regroupement des activités,
stimulant la recherche, les investissements locaux, et créant, de facto,
des externalités positives et des économies d'échelles. Il
ne faut pas négliger aussi les effets sur les Etats voisins. La
suppression du zonage pour l'objectif de compétitivité peut
permettre d'expliquer toute la complexité de la politique de
cohésion communautaire. Le zonage est par nature inégalitaire, et
peut conduire à des anomalies pour les zones transfrontalières.
Par exemple, le Hainaut Belge a bénéficié, lors de la
période de programmation 2006-2006, de l'aide communautaire. Le Hainaut
français, lui, n'a pu en bénéficier en étant
intégré au Nord Pas De Calais, dont le calcul du PIB au titre de
l'objectif 1 était supérieur au seuil plafond. Il a en
bénéficié en raison du fait que le Hainaut belge a en
bénéficié. Le zonage peut ainsi conduire à des
situations de négociations au début de périodes de
programmations qui par bien des égards deviennent absurdes. D'où
la grande perplexité, pour les institutions communautaires, de conserver
un critère de zonage pour un objectif, la compétitivité,
qui devient un objectif à visée plus économique que
véritablement solidaire, encore que cela peut être
contesté. Cet exemple du zonage révèle par là
même le caractère au moins autant incitatif qu'interventionniste
que l'Union souhaite faire de l'usage des fonds structurels. Ce sera aux Etats
d'aider « plus ou moins » les zones les « plus ou
moins » défavorisées, ou créer à
l'inverse des zones à plus grande valeur ajoutée que d'autres,
avec par exemple des bassins d'emploi déterminés pour des
activités spécifiques. Or, l'article 3 du Traité de
Lisbonne promeut l'idée de cohésion territoriale, en plus de la
cohésion économique et sociale, et « la
solidarité entre les Etats membres ». Une politique de
cohésion communautaire soutenue par les priorités de Lisbonne
peut y aller à l'encontre.
L'appréciation de l'égalité quant à
la répartition des crédits européens, et dans l'absolu le
respect de l'exigence de cohésion territoriale mise à mal par
Lisbonne, est ainsi dévolue à l'Etat membre. Même si le
choix n'est jamais aussi manichéen, les Etats auront le choix entre une
redistribution « économique », ciblé sur les
activités économiques et le fléchage de Lisbonne, et une
redistribution « solidaire » basée sur la
réduction des inégalités territoriales. Mais, clairement,
la réduction des disparités économiques n'est pas synonyme
de réduction des disparités régionales. Les institutions
communautaires le prouvent, notamment la Commission dans le
4ème rapport sur la cohésion, où celle-ci
rappelle en introduction que « combler ces disparités
demandera inévitablement du temps ; voilà pourquoi la politique
de cohésion accorde la priorité absolue aux régions les
moins développées. Cependant, pratiquement toutes les
régions doivent se restructurer, se moderniser et encourager une
innovation continue et fondée sur la connaissance pour relever le
défi de la mondialisation ». La politique des fonds
structurels demeure une politique de redistribution, qui fonctionne par des
arbitrages constants entre des objectifs différents. Elle vise plus
à réduire les inégalités entre les Etats membres,
au risque d'aggraver les disparités au sein de ces Etats. La
construction européenne a pour fondement le marché unique, la
monnaie unique, la libre circulation des facteurs de production. Dans cette
optique, c'est par le marché, par la concurrence, dans une conception
Smithienne de la croissance, que les inégalités entre Etats
peuvent se résorber. Les fonds structurels sont désormais
considérés comme des déclencheurs à faible valeur
ajoutée immédiate, mais permettant des effets de leviers pour une
efficacité économique future. En fin de compte, l'idée est
qu'il ne peut y avoir de croissance marchande forte sans quelque chose qui
échappe, socialement, au marché, et qui est lié à
l'amélioration de la qualité de la concurrence. La redistribution
par les fonds structurels est donc une manière d'accompagner la
croissance, tout en lui laissant la primauté au sein de l'Union.
II- Les principes généraux d'intervention des
fonds structurels
L'intégration européenne par le biais des fonds
structurels est un phénomène reconnu. Cette intégration
repose sur le principe de subsidiarité (A), sur le principe de
partenariat (B), ainsi que sur le principe d'additionnalité (C).
A- La subsidiarité
Transparaît des objectifs décrits
précédemment, et leurs priorités quant à l'usage
des fonds, que, notamment dans le domaine des transports, de l'environnement,
voire de l'employabilité, les institutions communautaires
considèrent qu'une approche communautaire, intégrée, est
plus efficace qu'une approche nationale. Michel Delebarre, président du
Comité des régions, indique le 29 mai 2006 que « les
collectivités territoriales sont confrontées, tous les jours,
à des problèmes d'exclusion sociale, de migration, de
vieillissement, d'organisation des service collectifs qui échappent
totalement aux systèmes nationaux ». A l'inverse, le cadre
national est le cadre général d'intervention des fonds
structurels dans leur mise en oeuvre. En se sens, la politique des fonds
structurels est fondée sur le schéma de développement de
l'espace communautaire, tel qu'adopté en 1999, et véritable
« bible » de l'approche territoriale communautaire. Le
traité d'Amsterdam identifie « la promotion d'un
développement équilibré et durable comme l'un des
principes fondamentaux de la communauté européenne. De ce fait,
suivant le SDEC la tâche de promouvoir la cohésion sociale et
territoriale incombe à la communauté comme aux États
membres, selon leurs attributions respectives ».
La subsidiarité est le principe premier, nécessaire
à appréhender pour comprendre tous les autres principes.
Prévu à l'article 5, alinéa 2 du traité sur l'UE,
« la Communauté n'intervient, conformément au principe
de subsidiarité, que si et dans la mesure où les objectifs de
l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés de
manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en
raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, être
mieux réalisés au niveau communautaire ».
L'intégration par la politique de cohésion économique et
sociale, par la politique régionale, et donc par les fonds structurels,
ne traduit pas un simple complément financier à des projets
nationaux. C'est un substrat qui oriente ces projets nationaux vers la prise en
compte des problématiques communautaires. Ce qui peut poser question.
Car les orientations de Lisbonne, basée sur l'économie de la
connaissance, l'environnement, la compétitivité et, pour
résumer, sur la croissance endogène, sont potentiellement en
contradiction avec la politique de cohésion communautaire basée
sur la réduction des disparités régionales. En effet, cela
peut être un moyen de resserrer le champ d'intervention des fonds
structurels, puisque par exemple tous les projets ne seront pas en
adéquation avec une exigence d'environnement ou de développement
durable, ni ne sont immédiatement compétitifs, quand bien
même cela permettrait la réalisation des objectifs de Lisbonne au
niveau le plus proche des citoyens européens.
L'application du principe de subsidiarité aux fonds
structurels réside aussi dans le fait que l'Union n'a pas
d'administration territoriale. Le nombre d'agents publics est trop peu
élevé pour cela. Or, les aides communautaires sont
accordés à des projets provenant d'Etats membres. Ces derniers
doivent donc distribuer les aides engagées au niveau communautaire. S'il
apparaît que la Commission européenne assume l'essentiel de
l'exécution du budget européen, plus de 80 % des dépenses
du budget européen sont directement effectuées sur le territoire
et par l'intermédiaire des Etats membres. D'où l'apparition d'une
véritable administration mixte. Seuls les prêts que peut accorder
la banque européenne d'investissement sont directement distribués
pour les fonds structurels. C'est donc par des règlements
édictés par les institutions communautaires que l'aide
communautaire se « transforme » en une aide nationale.
L'article 4-2 du nouveau traité de Lisbonne dispose que «l'Union
respecte l'égalité des Etats membres devant les traités
ainsi que leur identité nationale, inhérente à leurs
structures fondamentales politiques et constitutionnelles, y compris en ce qui
concerne l'autonomie locale et régionale». Cela signifie que
l'Union reconnaît les différents modes d'organisations
administratives des Etats qui la composent, et non qu'elle cherche, d'une
certaine manière, à entrer dans ces types d'organisation. Du
reste, comme le rappelle Michel Barnier, alors commissaire responsable de la
politique régionale, à Bruxelles le 26 mai 2003, « la
subsidiarité est essentielle, mais elle ne doit pas conduire à la
renationalisation ni à l'absence de règles pour l'utilisation des
fonds communautaires ». C'est un signe que la politique
régionale européenne peut être considérée
plus comme consacrée aux Etats les plus démunis, qu'à
proprement parler aux régions. L'Allemagne avait ainsi, au cours des
négociations sur l'actuelle programmation, proposé de
« renationaliser » le principe de subsidiarité.
D'où une possible adéquation de plus en plus difficile entre
l'intégration inter-Etatique et l'intégration intra-Etatique, les
deux phénomènes étant des mises en oeuvre possibles du
principe de subsidiarité, destiné à mettre en avant le
processus d'intégration des Etats membres par les respect des
équilibres entre les niveaux plus ou moins proches des citoyens, et
émanant du principe de partenariat. La subsidiarité, avant toute
chose, ne doit pas être une manière de se substituer aux
stratégies de l'Union Européenne dans la mise en oeuvre des fonds
structurels, et ce quelles qu'elles soient. Selon Elie Cohen en 1996 toutefois,
« le mouvement d'intégration peut être
interprété comme une stratégie des administrations
nationales et des gouvernements pour atteindre leurs objectifs par le biais des
choix communautaires ». En vertu de la subsidiarité, les Etats
membres vont orienter les stratégies communautaires vers la prise en
compte de leurs propres stratégies. Le principe du partenariat le
montre.
B- Le partenariat
La notion de partenariat est avant tout une notion fonctionnelle
qui vise à répondre par la consultation, par l'échange
d'informations et la coopération, à des problèmes
complexes.
La subsidiarité entraîne nécessairement le
principe du partenariat, puisqu'elle implique la proximité avec les
citoyens, et donc l'entrée en jeu de différents niveaux
d'administration. Le partenariat se décompose en deux types de
partenariat : les relations entre les Etats membres et les institutions
communautaires, prévu à l'article 10 du Traité dans le
sens que « les États membres prennent toutes mesures
générales ou particulières propres à assurer
l'exécution des obligations découlant du présent
traité ou résultant des actes des institutions de la
Communauté», ainsi que les relations entre les Etats membres et les
autorités locales. En ce sens, le partenariat découle du livre
blanc sur la gouvernance de 2001, l'objectif étant de « parvenir
jusqu'au citoyen par la démocratie locale et régionale ».
Cela a élargi à l'ensemble des politiques communautaires le
principe du partage des décisions avec les différents niveaux
institutionnels. Selon l'article 4 du Traité sur le fonctionnement de
l'Union européenne, « les compétences partagées
entre l'Union et les Etats membres s'appliquent aux principaux domaines
suivants : (...) c) la cohésion économique, sociale et
territoriale ». L'article 11 du règlement cadre de 2006 traite
de la notion de partenariat : « les objectifs des fonds sont
poursuivis dans le cadre d'une coopération étroite entre la
Commission et chaque Etat membre ». Le partenariat suppose donc une
confrontation de visions, de volontés, entre les différents
acteurs internes et communautaires. Les fonds structurels appellent à
une logique d'actions concertées. L'article précise que
« chaque Etat membre organise (...) un partenariat avec les
autorités et les organismes tels que : a) les autorités
régionales, locales, urbaines et autres autorités publiques
compétentes ; b) les partenaires économiques et
sociaux ; c) tout autre organisme approprié représentant la
société civile, des partenaires environnementaux, des
organisations non gouvernementales et les organismes chargés de la
promotion de l'égalité entre les hommes et les
femmes ». L'Etat doit désigner les partenaires les plus
représentatifs en ce sens. Le partenariat porte « sur
l'élaboration, la mise en oeuvre, le suivi et l'évaluation des
programmes opérationnels ». En tout état de cause, il y
a là la marque d'un leadership de l'échelon étatique pour
l'élaboration et le contrôle de la mise en oeuvre des fonds
structurels. Cette définition communautaire a été
amorcée dans les règlements de 1988. Ont étés
inclus tout d'abord les partenaires régionaux et locaux, puis les
partenaires socio-économiques avec la programmation de 1993, puis des
partenaires de la société civile pour la programmation de 1999.
Malgré son caractère décentralisé, la gestion des
fonds structurels fait user d'un pouvoir discrétionnaire de la part des
autorités déconcentrées. La Commission consulte
annuellement les partenaires économiques et sociaux au niveau
européen sur l'intervention des fonds. Le partenariat est la
manifestation normative de la solidarité entre les Etats membres. Il
faut noter que la Banque européenne d'investissement peut intervenir
pour le cadre de référence stratégique, les programmes
opérationnels, selon l'article 36. De même que le fonds
européen d'investissement. Il s'agit de faciliter la coordination du
financement des projets par les fonds structurels et par d'autres moyens
financiers. La BEI peut entrer en jeu également pour
« l'élaboration des projets, en particulier des grands
projets, au montage financier et aux partenariats
public-privé ». La BEI peut en effet être amenée
à participer à des projets financés par les fonds
structurels, selon l'article 159 du Traité. Sa participation dans le
cadre du partenariat est donc logique, notamment, elle réalise une
assistance technique aux acteurs locaux, notamment, qui en ont besoin. 0,25% de
la dotation annuelle à chaque fonds peut être dévolu
à cette assistance technique.
Le partenariat s'adapte aussi aux finalités des fonds
structurels. Par exemple, le FSE met en oeuvre un certain nombre
d'autorités nationales, régionales et locales. Mais il va aussi
concerner des établissements d'enseignement et de formation, des
organisations non gouvernementales (ONG) et le secteur associatif ainsi que les
partenaires sociaux, par exemple des syndicats et des comités
d'entreprise, des associations sectorielles et professionnelles ainsi que des
entreprises. Mais il ne faut pas, a contrario, que le principe de partenariat
ne fasse oublier l'exigence d'efficacité assignée aux fonds
structurels. Ainsi, il apparaît que, par exemple avec le programme
national de réforme, reflétant le partenariat dans le cadre de la
stratégie de Lisbonne et qui doit répondre à cette
exigence d'efficacité, il existe des asymétries d'informations
qui font que les acteurs locaux sont moins tenus au courant des
stratégies actuelles et à venir dans leurs zones que les
institutions communautaires. Parfois, même, ils ignorent l'existence de
tels documents, qui pourraient leur permettre d'améliorer
l'échange d'informations et la coordination d'ensemble. Mais, dans tous
les cas, la principale critique des fonds structurels était que,
très souvent, les fonds n'étaient pas engagés suffisamment
à temps, obligeant parfois les collectivités à rembourser
ce qu'elles avaient perçus. On note qu'en ce sens des
collectivités ont pu se doter d'une fonction de chargé de mission
en Europe par zone, qui est plus un intermédiaire pour obtenir des
aides. Il s'agit du Comité des Régions depuis Maastricht., organe
consultatif quant à l'utilisation des fonds structurels. Il est
composé de représentants des collectivités territoriales
des Etats membres, et est consulté chaque fois que le traité le
prévoît. Selon l'article 265 du Traité, « Le
Comité des régions est consulté par le Conseil ou par la
Commission dans les cas prévus au présent traité et dans
tous les autres cas, en particulier lorsqu'ils ont trait à la
coopération transfrontière, où l'une de ces deux
institutions le juge opportun ».
C- L'additionnalité
L'additionnalité s'exprime à partir des programmes
opérationnels et des axes prioritaires qui en découlent. Selon
l'article 15 du règlement cadre, « la contribution des fonds
structurels ne se substitue pas aux dépenses structurelles publiques ou
assimilables d'un Etat membre ». Là règle est ici le
cofinancement, afin d'éviter la tentation du désengagement des
Etats, voire une logique de compensation budgétaire, puisqu'il n'est pas
toujours certains que les autorités déconcentrées ou
décentralisées aient toujours les moyens d'investir. Pour
l'objectif de convergence, « le niveau des dépenses (...) est
au moins égal au montant des dépenses moyennes annuelles en terme
réels atteint au cours de la période de programmation
précédente ». Du reste, ce niveau de dépense est
déterminé par le cadre de référence
stratégique national. Il prend en compte « les conditions
macroéconomiques générales dans lesquelles s'effectue le
financement et en tenant compte de certaines situations économiques
spécifiques ou exceptionnelles, telles que les privatisations ou un
niveau extraordinaire de dépenses structurelles publiques ou
assimilables de l'État membre durant la période de programmation
précédente ». Il faut noter que l'objectif de
convergence est le plus encadré en terme d'additionnalité. La
Commission exerce un contrôle à mi-parcours de la
conformité au principe. Elle « peut, en consultation avec
l'État membre, décider de modifier le niveau de dépenses
structurelles requis si la situation économique dans l'État
membre concerné a changé de manière significative par
rapport à celle qui existait au moment de la fixation du niveau des
dépenses structurelles publiques ou assimilables ». En fin de
compte, la Commission exerce trois types de contrôles, un contrôle
ex ante, à mi parcours et ex post.
Le calcul des aides communautaires par la Commission tient compte
de critères pouvant les moduler, article 52. Les plafonds de
cofinancement sont différents selon les objectifs. Ce cofinancement
s'évalue par rapport aux dépenses publiques, et non des
dépenses totales, qui peuvent prendre en compte des dépenses
privées. D'ores et déjà et sans, pour le moment, analyser
plus en détail les programmes opérationnels, la contribution des
fonds se réalise par rapport à ces programmes
opérationnels, selon l'article 53. Pour l'objectif de coopération
territoriale, deux cas sont possibles. Soit un des Etats membres participant
avait lors de la période précédente un PIB
inférieur à 85% de la moyenne communautaire, auquel cas le
plafond de contribution du FEDER ne peut dépasser 85% des
dépenses éligibles. Soit ce n'est pas le cas, et le plafond se
situe alors à 75%. Pour les deux autres objectifs, l'application du taux
plafond est beaucoup plus complexe, faisant appel à de multiples
critères prévus à l'annexe III du règlement cadre,
ou plus exactement au règlement 1989/2006 du 21 décembre 2006,
qui modifie l'annexe pour intégrer la Bulgarie et la Roumanie. Pour
simplifier, le premier critère est le même que celui de l'objectif
de coopération territoriale. S'applique alors le même taux plafond
de 85% pour les deux objectifs, et que ce soit le FEDER ou le FSE qui soit
utilisés. L'Espagne bénéficie d'un régime
transitoire du fonds de cohésion, qui soumet le plafond à 80%
pour les régions éligibles aux deux objectifs, et à 50%
pour les autres régions éligibles à l'objectif de
compétitivité régionale et d'emploi. Pour les Etats
où ne s'applique pas le premier critère, le plafond est de 75%
pour l'objectif de convergence, et de 50% pour la compétitivité
régionale et l'emploi. Pour les régions
ultrapériphériques, déterminés à l'article
299 du traité UE, dont les DOM pour la France, le plafond est de 50%.
Cela concerne les régions qui bénéficient d'un financement
supplémentaire de la part du FEDER de 35 euros par habitant et par an.
S'il n'y a pas de financement supplémentaire, alors le plafond de
cofinancement est de 85% au titre des objectifs de convergence et de
compétitivité régionale et d'emploi. Cette limite du
plafond de cofinancement est la marque que le principe d'additionnalité
a pour vocation de favoriser un effet de levier pour le projet, et non de se
substituer aux financements nationaux. Du reste, cette réglementation
est pour grande part imputable aux régimes nationaux des aides d'Etat et
à l'approche communautaire de la concurrence.
Partie 2- La concrétisation par les fonds
structurels de l'action communautaire
Il convient maintenant d'analyser le mécanisme
d'intervention en région des fonds structurels (Section 1), avant de
l'étudier de manière plus concrète, par le biais du cas
français (Section 2).
Section 1 - Le mécanisme d'intervention des
fonds structurels
« Les objectifs des fonds sont poursuivis dans le cadre
d'une programmation pluriannuelle effectuée en plusieurs étapes,
portant sur l'identification des priorités, le financement et le
système de gestion et de contrôle », selon l'article 10
du règlement cadre du 11 juillet 2006. Se dégage de cet article
deux grandes phases de mise en oeuvre des fonds structurels qui, d'ailleurs, ne
se succèdent pas, puisque étant interdépendantes. La
première est de manière globale le principe de programmation et
sa détermination (I). La seconde concerne sa mise en oeuvre (II).
I- La détermination du principe de programmation
Le principe de programmation est le principe majeur quant
à la concrétisation, par les fonds structurels, de l'action
communautaire. Pour l'appréhender, il faut traiter tout d'abord du
principe de complémentarité (A), puis analyser la programmation
proprement dite (B), avant de dégager le principe de
proportionnalité (C).
A- La complémentarité
L'article 9 du règlement cadre n° 1083/2006
énonce que « Les Fonds interviennent en complément des
actions nationales, y compris les actions au niveau régional et local,
en y intégrant les priorités de la Communauté ».
Complémentarité signifie par là même une initiative
prise au niveau national d'aider un projet. Une aide communautaire ne peut se
substituer à une aide nationale, ni exister sans que celle-ci n'existe
également. L'aide communautaire doit y apporter un plus, une valeur
ajoutée, c'est-à-dire les priorités de la
Communauté. Cette complémentarité est anticipée par
les élus qui élaborent les projets en tenant compte de la
possibilité ou non de bénéficier d'une aide
communautaire.
Application du principe de subsidiarité
évoqué précédemment, « la Commission et
les
États membres, dans le respect de leurs compétences
respectives, veillent à ce que 60 % des dépenses pour l'objectif
convergence et 75 % des dépenses pour l'objectif
compétitivité régionale et emploi (...) soient
dévolus aux priorités visées ci-dessus ». Cela
concerne les pays de l'Europe des 15 et non de l'élargissement,
ceux-là ayant un régime de faveur puisqu'ils ne sont soumis
à aucun pourcentage. La notion
d' « earmarking », c'est-à-dire
« l'écoute du marché », a été
défendue par la Commission. Il s'agit de l'obligation pour les
régions de réserver une part importante des fonds structurels
à des investissements servant la stratégie de Lisbonne. Au moins
20% doit être utilisé pour l'investissement dans la recherche et
développement et l'innovation en ce sens. Toutes les priorités
sont celles énumérées pour chaque fonds et chaque
objectif. Elles sont rassemblées dans une annexe IV du règlement
cadre et intègrent, donc, les priorités de Lisbonne. Selon le
même article, « cette cohérence et cette
complémentarité apparaissent notamment dans les orientations
stratégiques de la Communauté pour la cohésion, dans le
cadre de référence stratégique national et dans les
programmes opérationnels ». La complémentarité
conduit à la recherche d'une simultanéité entre un cadre
communautaire, national et régional, dans la mise en oeuvre en
région des fonds structurels. Les orientations stratégiques et le
cadre de référence stratégique national sont une
manifestation de la complémentarité, mais pas les seules. Il
existe aussi d'autres interactions que nous analyserons plus tard.
Les orientations stratégiques sont inscrites aux articles
25 et 26 du règlement. C'est au Conseil qu'il revient de les
négocier, « définissant un cadre indicatif pour
l'intervention des fonds ». C'est en effet à cette institution
qu'il revient de coordonner les politiques économiques des Etats
membres, et d'en dégager un intérêt communautaire commun.
Ce sera ensuite à la Commission d'édicter dans un document
administratif les orientations, publié au journal officiel de l'Union.
Ce document est adopté selon la procédure de l'article 161 du
traité. Le Conseil statue à l'unanimité après un
avis conforme du Parlement, et après une consultation du Comité
des régions et du Conseil économique et social. Des
révisions à mi-parcours sont possibles si la Communauté
décide de réorienter ses priorités, mais cela «
n'entraîne aucune obligation pour les États membres de
réviser soit les programmes opérationnels, soit leur cadre de
référence stratégique national ». Les
orientations stratégiques ont étés adoptés en 2006,
dans la décision du Conseil 2006/702/CE « relative aux
orientations stratégiques communautaires en matière de
cohésion ». Cette décision relève trois grandes
priorités, à savoir « améliorer l'attrait des
États membres, des régions et des villes en améliorant
l'accessibilité, en garantissant une qualité et un niveau de
services adéquats, et en préservant
l'environnement » ; « encourager l'innovation,
l'esprit d'entreprise et la croissance de l'économie de la connaissance
en favorisant la recherche et l'innovation, y compris les nouvelles
technologies de l'information et de la communication », et enfin
« créer des emplois plus nombreux et de meilleure
qualité en attirant un plus grand nombre de personnes sur le
marché du travail ou vers la création d'entreprises, en
améliorant la capacité d'adaptation des travailleurs et des
entreprises, et en augmentant l'investissement dans le capital
humain ». La réglementation communautaire définit le
cadre juridique, pendant que les orientations stratégiques
définissent les priorités politiques sur les investissements
à réaliser.
Le cadre de référence stratégique national
se substitue aux cadres communautaires d'appui des programmations
précédentes. Il est cependant un peu différent, moins
ancré dans la gestion des fonds, plus dans la détermination des
priorités communautaires. Il est prévu aux articles 27 et 28 du
règlement. Il s'agit d'«un instrument de référence
pour préparer la programmation des fonds ». Il s'applique sur
les objectifs de convergence et de compétitivité, mais un Etat
membre peut décider de l'adjoindre à l'objectif de
coopération territoriale. Ce document, créé par l'Etat,
fait application dans son élaboration du principe de partenariat. Il est
établi, article 28, en collaboration avec la Commission,
« afin d'assurer une approche commune ». Il doit être
transmis à la Commission dans les cinq mois qui suivent la
décision qui détermine les orientations stratégiques.
L'institution communautaire va ensuite faire des observations ou non. Le
contenu du document est déterminé à l'article 27. Il
contient notamment une analyse des disparités et du potentiel de
développement des territoires, la stratégie retenue et
divisé en priorités thématiques et territoriales pour
répondre à cette analyse, la liste des programmes
opérationnels, l'adéquation des dépenses avec la
stratégie de Lisbonne, l'allocation annuelle de chaque fond à
chaque programme. En outre, pour l'objectif de convergence, la coordination
avec le Feader (fonds européen agricole pour le développement
rural, rattaché à la PAC) et avec le Fep (fonds européen
pour la pêche, rattaché à la politique communautaire de la
pêche) ; ainsi que les moyens d'exercer le contrôle ex ante du
principe d'additionnalité, de même que les actions prévues
pour renforcer l'efficacité administrative. A partir de ce document,
l'action administrative communautaire par le biais des fonds structurels peut
se mettre en place, tout en respectant le principe d'additionnalité.
B- La programmation proprement dite
Il s'agit ici d'analyser plus en détail les programmes
opérationnels. Leur mise en oeuvre relève d'ailleurs de la
responsabilité de l'Etat. Le programme opérationnel doit assurer
la compatibilité du droit communautaire avec le droit interne, et
notamment les règles de la concurrence, de la mise en concurrence comme
pour les marchés publics. Le programme n'est pas une simple
transposition des priorités du droit communautaire. C'est d'ailleurs une
nouveauté de la programmation de 2006, qui vise à simplifier
l'ensemble de la programmation, puisque c'est un document désormais
unique. Selon l'article 32, un programme opérationnel ne peut concerner
qu'un des trois objectifs, et couvre l'entière période de
programmation. Le principe est qu'un fond finance un programme. Ils sont
spécialisés dans leur mise en oeuvre. Toutefois, l'article 34
précise que « pour autant qu'elles soient nécessaires
au bon déroulement de l'opération et qu'elles aient un lien
direct avec celle-ci », le FEDER ou le FSE peuvent financer à
hauteur de 10% les actions d'un autre axe prioritaire d'un programme
opérationnel. Selon l'article 2 du même règlement, et qui
définie l'axe prioritaire, celui-ci est «une des priorités
de la stratégie retenue dans un programme opérationnel consistant
en un groupe d'opérations liées entre elles et ayant des
objectifs spécifiques mesurables». Du reste, selon l'article 54,
« La contribution des Fonds pour chaque axe prioritaire ne peut
être inférieure à 20 % des dépenses publiques
éligibles ».
Par le cadre de référence stratégique
national, le programme opérationnel est transmis à la Commission,
qui va étudier sa conformité avec les orientations
stratégiques et les objectifs assignés aux fonds structurels. Si
ce n'est pas le cas, il est renvoyé à l'Etat membre dans les deux
mois après sa réception, qui doit soit préciser les
informations qui y sont contenus, soit modifier le programme. C'est à la
Commission qu'il revient d'adopter les programmes opérationnels, dans
les quatre mois après sa transmission par l'Etat membre. En tout et pour
tout, le programme peut donc être adopté près d'un an
après la mise en place des orientations stratégiques. Le
programme peut être révisé par la Commission, à
l'initiative de celle-ci ou de l'Etat, notamment après des changements
économiques importants, un changement des priorités ou encore
après des difficultés de mise en oeuvre. Dès lors, cela
signifie que la Commission ne se contente pas d'adopter le programme, elle peut
aussi en modifier le contenu en cours d'exécution, même s'il faut
alors l'accord de l'Etat. A ce sujet, la CJCE, dans un arrêt du
1er décembre 2005, Italie contre Commission, déclare
irrecevable un recours formé contre un acte de la Commission, qui avait
envoyé des notes sur les compléments de programmation lors d'une
procédure de modification de cette programmation. La Cour précise
que la Commission a alors un simple rôle consultatif, qui ne
créé pas des actes contraignant juridiquement, sauf si les
modifications portent sur les éléments contenus dans la
décision de participation des fonds structurels.
Les programmes opérationnels voient leur contenu
précisé par l'article 37. Pour les objectifs de convergence et de
compétitivité, huit types d'informations doivent y être
inclus : une analyse de la situation de la zone, une justification des
priorités retenues, des informations sur les axes prioritaires et leurs
objectifs spécifiques qui prennent en compte le principe de
proportionnalité, une ventilation indicative quant à
l'utilisation des fonds, ainsi qu'un plan de financement à la fois
annuel et global, pour le programme opérationnel et les axes
prioritaires. De même, le programme doit comporter les compléments
du Feader et du Fep le cas échéant, ainsi que la liste des grands
projets, dont le coût est supérieur à 25 millions d'euros
pour l'environnement et 50 millions pour les autres. Enfin, et peut être
le plus important, le programme opérationnel doit définir
« les dispositions de mise en oeuvre du programme
opérationnel ». Au sein de cette mise en oeuvre, le
règlement rappelle les principes de transparence financière et de
publicité que doivent respecter les Etats. L'article 69 précise
que « cette information est destinée aux citoyens de l'Union
européenne et aux bénéficiaires dans le but de mettre en
valeur le rôle de la Communauté et d'assurer la transparence quant
à l'intervention des Fonds ». Transparence qui est
nécessaire, puisque la Cour des Comptes européenne, dans son
rapport annuel de 2006, relève un taux d'erreur de 12% dans
l'exécution des fonds structurels. Il faut éviter que les
bénéficiaires puissent surestimer les fonds dont ils ont besoin.
Cette transparence se retrouve pour les bénéficiaires des aides,
mais aussi pour les citoyens, puisque les bénéficiaires doivent
montrer s'ils sont concernés par les aides communautaires. A ce sujet,
le règlement de la Commission n°1828/2006 montre que l'exigence de
publicité est loin d'être négligée par les
institutions communautaires, l'article 9 allant jusqu'à inclure dans
« toutes les actions d'information et de publicité à
destination des bénéficiaires, des bénéficiaires
potentiels et du public (...) une mention, choisie par l'autorité de
gestion, soulignant la valeur ajoutée apportée par l'intervention
de la Communauté, et de préférence: "Investit dans votre
avenir" »...
Pour chaque programme opérationnel, l'Etat va
désigner une autorité de gestion, de certification et d'audit.
Nous analyserons plus en détail ces autorités dans la partie
suivante. D'ores et déjà, c'est une certaine manifestation d'une
liberté de choix accordée aux Etats membres de la part des
institutions communautaires. Toutefois, cette liberté de choix est un
tant soit peu contrariée par une contrainte géographique
imposée par le règlement général, à
l'article 35. Pour l'objectif de convergence, il faut que les programmes soient
établis au moins au niveau NUTS2, à un « niveau
approprié ». Notons que c'est, in fine, la Commission qui va
trancher quant à savoir ce que le caractère
« approprié » signifie. Si le fonds de
cohésion entre en jeu, le niveau est alors obligatoirement national.
Pour l'objectif de compétitivité, le niveau est national pour le
FEDER et « approprié » pour le FSE. Toute la
question est de savoir si ce niveau « approprié »
est, en France du moins, le niveau régional ou départemental.
Tout laisse penser que ce dernier en est exclu. En réalité, il
s'agit un peu d' « un marché de dupes »,
puisque la Commission ne l'interdit pas, mais ne l'encourage pas non plus. Un
programme peut regrouper plusieurs régions, ou ne concerner qu'une
seule.
Pour l'objectif de coopération territoriale, le contenu du
programme opérationnel est déterminé par le
règlement du FEDER, à l'article 12. En plus des critères
des deux autres objectifs, il faut faire figurer la liste des zones
éligibles, y compris pour des zones dites de flexibilité,
où le FEDER associé à un programme peut financer une
partie d'un projet d'une zone jouxtant la zone du programme. Il faut cependant
un lien partenarial. La contrainte géographique est « par
frontière ou par groupe de frontières dans un groupement
approprié
au niveau NUTS 3, y compris les zones
enclavées ».
C- La proportionnalité
Prévu au même article que la subsidiarité, le
principe de proportionnalité est inscrit dans l'article 5, alinéa
3 du traité. Selon celui-ci, « L'action de la
Communauté n'excède pas ce qui est nécessaire pour
atteindre les objectifs du présent traité ». Le
règlement général de 2006 cherche à trouver
application de ce principe, en ce qui concerne les fonds structurels.
Jusqu'à présent, ce n'était pas le cas. Selon ce principe,
nouvellement introduit, les obligations qui incombent à un Etat membre
doivent être proportionnées en fonction du programme
opérationnel, et des dépenses qu'il induit. Il s'agit, dès
lors, d'une application biaisée du principe de subsidiarité. Car
moins d'obligations pour les Etats membres peuvent conduire à ce qu'il y
en ait plus pour les institutions communautaires dans la mise en oeuvre des
fonds. Ce nouveau principe est introduit à l'article 13 du
règlement cadre. L'évaluation des Programmes opérationnels
est financée dans le cadre de l'assistance technique et dans un souci de
proportionnalité. Le financement intègre l'évaluation au
titre des subventions globales.
La proportionnalité se retrouve à tous les stades
de la mise en oeuvre des fonds structurels. Elle concerne les programmes
opérationnels relatifs aux objectifs de convergence et de
compétitivité régionale et d'emploi, pour la
détermination des axes prioritaires. L'Etat doit les quantifier
« à l'aide d'un nombre limité d'indicateurs de
réalisation et de résultats ». Ainsi, l'Etat doit, dans
son programme opérationnel, définir strictement les
crédits communautaires dont le projet a besoin. Pèse sur lui un
critère d'efficacité, qui se retrouve dans les articles 47 et 48.
Il faut, par des évaluations systématiques,
« améliorer la qualité, l'efficacité et la
cohérence de l'intervention des fonds ». Les Etats doivent
mettre en oeuvre une évaluation ex ante de l'utilisation des fonds.
Egalement, dans les systèmes de gestion et de contrôle, sur la
communication des informations et sur l'audit du fonctionnement des
systèmes. Ainsi que dans l'établissement des rapports annuels que
remettent les autorités de gestion à la Commission. La
proportionnalité se retrouve donc de manière verticale,
c'est-à-dire dans la distribution des responsabilités, mais aussi
horizontale.
Pour cette dernière, et concrètement, les Etats
membres, sous leur responsabilité, doivent établir un rapport
annuel, qui se nomme rapport annuel sur la mise en oeuvre du programme national
de réforme. Puis la Commission va rendre un rapport annuel
elle-même au Conseil, qui est en réalité une
synthèse des différents rapports annuels des Etats membres.
Celui-ci évolue en parallèle des programmes des fonds
structurels, et concerne la mise en oeuvre de la stratégie de Lisbonne.
Il y a donc une articulation, une proportionnalité, entre les deux types
de programmations. Ce circuit d'information doit refléter ce principe de
proportionnalité. Car celle-ci se retrouve également dans
l'article 74. L'Etat a moins d'obligations dans le contrôle à
réaliser si le programme n'excède pas 750 millions d'euros et si
la contribution communautaire ne dépasse pas 40% des dépenses
publiques totales. Le rapport d'audit, réalisé par
l'autorité d'audit, n'a pas à être communiqué
à la Commission. La procédure est donc relativement moins lourde,
et les Etats membres peuvent appliquer leurs propres règles de gestion,
de contrôle, lorsque le taux de cofinancement national est
prépondérant. De fait, existe aussi une proportionnalité
verticale, qui intègre le principe de subsidiarité et qui est
relative à la mise en oeuvre des fonds structurels. Quant à la
proportionnalité horizontale, le ciblage de Lisbonne
énoncé précédemment est en réalité
contournable par rapport aux fonds, le FSE ayant tendance à y être
plus facilement conforme que le FEDER. Ainsi, en France, le FEDER n'est
concerné qu'à 68% pour la compétitivité et
qu'à 49% pour la convergence.
II- La mise en oeuvre du principe de programmation
Selon l'article 70, l'Etat est responsable dans deux cas, sur les
systèmes de gestion et de contrôle des programmes
opérationnel (A), ainsi que sur les paiements des aides communautaires
(B).
A- Les systèmes de gestion et de contrôle
autorisés des fonds structurels
Pour chaque programme opérationnel, doivent être
désignés par l'Etat, article 59, une autorité de gestion,
qui va être chargée de l'exécution du programme, ainsi que
de son efficacité et de sa régularité. Il s'agit de toute
autorité publique ou de tout organisme public ou privé national,
régional ou local. De même, l'Etat doit désigner un
autorité de certification, qui auparavant était nommée
autorité de paiement. Son rôle consiste à verser les
crédits européens, à en attester la bonne utilisation,
à tenir une comptabilité permettant par exemple le recouvrement
dans le budget européen des sommes indûment perçues.
L'autorité de certification est donc en relation directe avec la
Commission. L'Etat doit, enfin, désigner une autorité d'audit.
Celle-ci effectue les contrôles. Elle présente en ce sens le
rapport annuel à la Commission. Il faut noter, a fortiori, que le suivi
de chaque programme est assuré par un comité associant des
représentants de l'Etat, des collectivités, de la
société civile, et si elle le souhaite, de la Commission
européenne. De fait, le droit communautaire laisse aux Etats membres la
possibilité d'organiser eux-mêmes la mise en oeuvre des fonds
structurels. Les autorités sont liées entre elles par un
système d'information qui les oblige à transmettre les
éléments de preuve. Par exemple, l'autorité de gestion
doit pouvoir à l'autorité d'audit d'exercer ses
compétences. La mise en oeuvre peut donc être
déconcentrée ou décentralisée. La plus grande
partie des Etats choisissent la gestion déconcentrée, comme la
France. C'est une manière pour le droit communautaire de respecter les
constitutions nationales, qui peuvent ne pas autoriser la
décentralisation.
Le règlement de la Commission n°1828/2006 du 8
décembre 2006 est le règlement d'application du règlement
général. L'article 22 énonce que l'Etat doit transmettre
à la Commission, concernant « l'autorité de gestion,
l'autorité de certification et chaque organisme
intermédiaire », une description des tâches qui leur
sont confiées, leur organigramme, les procédures choisies pour
l'exécution des programmes, les règles
d'éligibilité à un programme, ainsi que le système
de conservation des pièces comptables. L'autorité de gestion,
précise l'article 60 du règlement cadre, « est
chargée de la gestion et de la mise en oeuvre du programme
opérationnel conformément au principe de bonne gestion
financière ». Outre ses fonctions de gestion et de
contrôle du programme, l'autorité doit, en relation avec le
Comité de suivi, présenter le rapport annuel d'exécution
à la Commission, ainsi que le rapport final. La mise en oeuvre des
mesures et des projets est donc supervisée par les Comités de
Suivi, constitués de représentants des régions, de l'Etat
membre, de la Commission et des différents organismes concernés.
Les Comités supervisent de manière régulière
l'avancement des programmes et réorientent au besoin l'action
administrative. L'autorité de gestion va aussi avoir un rôle de
publicité et d'information, non seulement à l'égard des
autres institutions, qu'elles soient nationales, locales ou communautaires,
mais aussi à l'égard des bénéficiaires des aides.
L'autorité de certification, elle, doit tenir compte des
résultats obtenus par l'autorité d'audit, qui doit
présenter dans les neuf mois après l'adoption du programme
opérationnel une stratégie d'audit à la Commission. Cette
autorité présente également à cette
dernière un rapport annuel, doit prononcer en ce sens un avis sur
l'exécution du programme, ainsi qu'une déclaration de
clôture évaluant la légalité et la
régularité des dépenses. Puis la Commission va transmettre
ses observations sur la stratégie d'audit dans les trois mois. Si elle
ne se prononce pas au cours de ce délai, il s'agit d'une décision
implicite d'acceptation. La Commission coopère véritablement avec
les autorités d'audit.
Il est temps de détailler le mécanisme des
subventions globales qui, dans la mise en oeuvre des fonds structurels, sont
loin d'être négligeables. Il s'agit d'un procédé de
délégation, où « l'Etat membre ou
l'autorité de gestion peut confier la gestion et la mise en oeuvre d'une
partie d'un programme opérationnel à un ou plusieurs organismes
intermédiaires, désignés par l'État membre ou
l'autorité de gestion, y compris des autorités locales, des
organismes de développement régional ou des organisations non
gouvernementales », selon l'article 42. Le principe est la
délégation par contrat. Toutefois, cela ne dégage pas cet
organisme de toute responsabilité, puisque la convention doit notamment
préciser le taux d'intervention des fonds structurels, et le suivi,
l'évaluation et le contrôle financier. La responsabilité ne
se réalise pas devant la Commission mais devant le
« cocontractant », c'est-à-dire l'Etat ou
l'autorité de gestion. De fait, au titre des objectifs de convergence et
de compétitivité, il peut être intéressant de
déléguer à un niveau inférieur à la
région, notamment pour la revitalisation des villes qui serait
confiée à des autorités urbaines. C'est une manière
d'insérer un peu de décentralisation tout en restant strictement
dans la déconcentration, si l'Etat use de celle-ci dans la mise en
oeuvre des fonds structurels. Le problème des subventions globales
survient lorsque cela devient le mode de mise en oeuvre « de droit
commun » des fonds structurels. Son principal inconvénient
concerne la lisibilité de cette mise en oeuvre, puisque ce
mécanisme permet de contourner à la fois le principe d'une
autorité de gestion unique par programme, et de respecter son champ
géographique tel que le prévu par le règlement
communautaire. De plus, en terme de libre administration des
collectivités territoriales, ce lien, qui ne s'apparente toutefois pas
à une tutelle, peut poser question.
Enfin, il existe aussi le mécanisme de l'ingénierie
financière, prévu à l'article 44, où «dans le
cadre d'un programme opérationnel, les fonds structurels peuvent
financer des dépenses pour une opération comprenant des
contributions visant à soutenir des instruments relevant de
l'ingénierie financière au profit des entreprises ».
L'objectif est de soutenir la théorie du capital-risque,
c'est-à-dire permettre un effet de levier purement financier dans
l'utilisation des fonds, en intégrant des partenaires privés. Ce
mécanisme intervient dans le cadre d'un programme opérationnel,
et vise à améliorer l'accès des PME et des très
petites entreprises aux financements, subventionnées par un fonds de
participation qui peut être le Fonds européen d'investissement, la
BEI ou encore la Caisse des dépôts et consignations, qui vont
accorder des prêts et des garanties à des intermédiaires
financiers qui peuvent être des organismes ad hoc, et qui vont eux
prêter les fonds aux entreprises. Il s'agit, en quelque sorte, de
favoriser le micro crédit dans des projets éligibles aux fonds
structurels. Est aussi concerné l'investissement durable dans les zones
urbaines, avec par exemple les logements sociaux. L'ingénierie
financière prend compte des conditions juridiques posées par les
marchés publics et par les partenariats publics-privés, selon les
projets. C'est une manière de dégager des fonds
supplémentaires dans des projets éligibles aux fonds structurels,
en accord cependant avec l'autorité de gestion. Ce mécanisme se
décline en trois instruments : Jaspers (Joint Assistance in
Supporting Projects in European Regions) pour l'assistance conjointe à
la réalisation de projets dans des régions d'Europe. Sont ainsi
prévus des mesures d'assistance technique à l'initiative de
l'Etat ou de la Commission, et qui sont financés par un pourcentage sur
la dotation des fonds structurels au programme opérationnel. Egalement,
Jeremie (Joint European Resources for Micro to Medium Enterprises) pour
améliorer l'accès au financement des microentreprises et des PME,
et Jessica (Joint European Support for Sustainable Investment in
City Areas) destiné à promouvoir les investissements durables
dans les zones urbaines.
B- Les engagements et les paiements
La problématique du paiement et des engagements
mérite d'être traitée. Car, tout comme pour les
autorités de gestion et de contrôle, les Etats membres sont
responsables des irrégularités dans les sommes payées,
selon l'article 70 du règlement cadre. D'ailleurs, dans le droit
interne, l'Etat est seul responsable devant le droit communautaire. A
l'inverse, la Commission est responsable de l'exécution du budget
communautaire. Du reste, la gestion du budget relève de ce qu'on peut
appeler la gestion partagée, au sens de l'article 14, et du
règlement financier n°1605/2002. La Commission peut ainsi
interrompre ou suspendre les paiements en cas d'insuffisance, et appliquer des
corrections financières, le cas échéant.
Les engagements budgétaires sont déterminés
par la Commission annuellement durant la période de programmation, pour
chaque fonds et chaque objectif, avant le 30 avril de l'année
précédente. A ce sujet, il existé un mécanisme de
réserve nationale qui permet à l'Etat de réserver une
partie des fonds, à savoir 1% annuel de l'objectif convergence et 3% de
la compétitivité, « pour faire face aux crises
sectorielles ou locales qui surviennent de manière
inopinée », selon l'article 51. Un autre mécanisme de
réserve nationale entre en jeu, à hauteur de 3% des deux
objectifs, constituant « une réserve nationale de
performance ». C'est une initiative de réserver une partie des
fonds aux programmes les plus performants. Si les paiements découlant de
ces engagements budgétaires ne sont pas effectués, alors l'Etat
peut demander à la Commission de « puiser » dans ces
réserves-là et les affecter à un ou plusieurs programmes
opérationnels. Concrètement, les paiements peuvent consister en
un préfinancement, qui est en réalité un paiement unique
établi selon les différents critères de l'article 82 et
qui est payé après l'approbation par la Commission du programme
opérationnel. Il peut être remboursé par l'organisme
désigné par l'Etat à la Commission si aucun paiement n'a
ensuite été réalisé. Les deux autres types de
financement sont un paiement du solde final ou à un paiement
intermédiaire. Ces derniers sont effectués par la Commission pour
rembourser les dépenses effectivement payées et certifiées
par l'État membre. Ils doivent être demandés par celui-ci.
Ces paiements sont calculés sur la base du principe de
l'additionnalité, expliqué précédemment. Cela doit
permettre de pouvoir respecter l'article 87 du traité sur les
régimes d'aides autorisés ou non. En effet, l'aide d'Etat doit
être payée par l'autorité chargée de verser l'aide
communautaire. L'état des dépenses permet de vérifier cela
et, par les vérifications de la Commission, le principe
d'additionnalité. Selon l'article 80, « il n'est
procédé à aucune déduction ou retenue, ni à
aucun autre prélèvement spécifique ou autre à effet
équivalent qui réduirait ces montants pour les
bénéficiaires ».
A partir de là, il y a cinq mécanismes de la
Commission pouvant interférer sur ces paiements. Tout d'abord,
l'interruption pour une durée maximale de six mois, si l'audit
réalisé montre « une insuffisance importante dans le
fonctionnement des systèmes de gestion et de contrôle »,
ou si « l'ordonnateur délégué doit
procéder à des vérifications supplémentaires (...)
liées à une irrégularité grave qui n'a pas
été corrigée »., selon l'article 91. L'article
92, quant à lui, traite de la suspension des paiements. Ce
mécanisme peut entrer en jeu si le système de gestion et de
contrôle présente une insuffisance grave, si l'état des
dépenses présente une grave irrégularité, ou en cas
de violation grave par l'Etat membre de sa responsabilité
évoquée précédemment. Si l'Etat membre, dans le
cadre de la suspension, n'a pas pris les mesures nécessaires, alors la
Commission peut annuler les paiements.
Le troisième mécanisme est celui du
dégagement d'office. Il s'applique en fait aux crédits mis
à disposition des Etats membres n'ayant pas été
consommés à la fin de la deuxième année suivant
celle de leur mise à disposition, ou de la troisième pour les
Etats membres dont le PIB est inférieur à 85% de la moyenne
européenne. Il existe des dérogations visées à
l'article 96 La Commission informa au préalable les Etats et les
autorités concernées du risque d'engager cette procédure.
L'Etat a alors deux mois pour donner son accord et donner ses observations. La
Commission a ensuite neuf mois pour procéder ou non au dégagement
d'office, qui réduit la participation du fond au programme
opérationnel. Au plus 2 mois après la procédure, l'Etat
doit envoyer à la Commission un nouveau plan de financement du
programme, qui doit tenir compte de ce dégagement d'office. Cette
règle, qui entre dans le cadre de l'efficacité des fonds et de la
bonne gestion financière, permet de rationaliser les paiements au titre
des fonds structurels. Et donc influence directement le fait de retenir des
projets « prévisibles » au niveau des
dépenses. Là aussi, la question des objectifs de Lisbonne peut
revenir, car il est délicat, par exemple, de calculer le coût de
l'innovation.
Le dernier mécanisme est celui des corrections
financières, qui se scinde entre les corrections de la part des Etats
membres et de la part de la Commission. La correction financière permet
d'annuler tout ou partie de la participation communautaire à un
programme opérationnel. Il s'agit d'une procédure de
recouvrement. A ce sujet, dans un arrêt de la CJCE du 4 avril 1974,
Mertens, la Cour estime que c'est aux services nationaux d'agir en justice, le
cas échéant, contre les particuliers pour réclamer les
ressource communautaires ou récupérer les sommes payées
indûment. De fait, d'après l'article 70, « lorsque
des montants indûment payés à un bénéficiaire
ne peuvent pas être recouvrés, l'État membre est
responsable du remboursement des montants perdus au budget
général de l'Union européenne, lorsqu'il est établi
que la perte résulte de sa propre faute ou
négligence ». Le recouvrement est une compétence
Etatique et non communautaire. Pour les Etats membres, la correction
financière intervient en cas de « changement important
affectant la nature ou les conditions de mise en oeuvre ou de contrôle
des opérations ou des programmes opérationnels », selon
l'article 98, et « les irrégularités individuelles ou
systémiques détectées dans les opérations ou les
programmes opérationnels ». Pour les corrections
financières exécutées par la Commission, prévues
à l'article 99, elles entrent en ligne de compte lorsque « il
existe une grave insuffisance du système de gestion ou de contrôle
du programme qui a mis en péril la participation communautaire
déjà versée au programme », lors d'un
état de dépenses irrégulier mais non corrigé par
l'Etat membre, et lorsque l'Etat n'a pas fait elle-même la correction
financière. S'engage alors une procédure de concertation
où l'Etat peut ne pas être d'accord avec la Commission. Si c'est
le cas, la Commission statue dans les six mois. S'il y a accord, l'Etat peut
réutiliser les fonds communautaires, pour le programme
opérationnel concerné.
Le rôle de l'Etat, dans le cadre de son régime de
responsabilité quant au fonds structurels, résulte de
l'obligation de diligence générale qui résulte de
l'article 10 du traité. Il faut donc, dans cette optique, chercher
à réduire les délais, comme le montre l'arrêt de la
CJCE de 1998 Hamburg AG und Firma Schmidt Söhne GmbH. Les régimes
de coresponsabilité dans l'application des fonds structurels repose
nécessairement sur le principe de confiance légitime. Le principe
du recouvrement au niveau national en est un exemple. Il y a là, peut
être une différence avec le régime des aides d'Etat,
puisque dans cet arrêt, la Cour estime que les aides communautaires, il
s'agissait alors de la PAC, ne procurent pas d'avantages concurrentiels,
contrairement aux aides Etatiques. Du reste, l'article 87 fait « des
aides destinées à favoriser le développement
économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est
anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave
sous-emploi » des aides compatibles avec le marché commun.
Peut être que le rapprochement entre aides Etatiques et nationales, s'il
existe, se réalise à ce niveau là. La prise en compte
d'objectifs différents, notamment par ceux de Lisbonne, est sans doute
la marque du développement d'un rôle fondamentalement
différent des fonds structurels. Ceux-là permettent ainsi au
droit communautaire de trouver sa propre légitimité
interventionniste.
Section 2 - L'administration des fonds structurels par
les Etats membres, l'exemple français
La France, pour la période de programmation actuelle,
s'est vue attribuée environ 4% de la dotation communautaire, soit une
baisse d'environ un quart par rapport à la période de
programmation précédente. L'objectif de convergence concerne les
DOM à hauteur de 2,8 milliards d'euros, l'objectif de
compétitivité est doté de 9,1 milliards et le
troisième objectif de 750 millions d'euros, la dotation nationale la
plus importante des Etats membres. Il est nécessaire, afin de
détailler le fonctionnement des fonds structurels, d'analyser avec plus
de précision l'administration de ces fonds, qui fonctionne grâce
aux autorités déconcentrés (I), avant d'étudier la
mise en oeuvre financière des fonds structurels (II).
I- La prédominance d'une gestion
déconcentrée des fonds structurels
Les fonds structurels laissent à l'Etat un rôle
majeur dans leur mise en oeuvre. Cela relève de choix
réalisés en terme de programmation (A). Se pose cependant la
question de la décentralisation de cette mise en oeuvre (B).
A- Les choix réalisés en terme de
programmation
La gestion des fonds structurels suit le système
institutionnel de l'Etat membre. Dans les systèmes
fédéraux tels qu'en Allemagne ou en Belgique, les
autorités régionales ont un rôle exclusif dans
l'utilisation des fonds structurels. Dans des systèmes où
prédominent la décentralisation, comme au Royaume-Uni, l'Espagne
ou l'Italie, il y a un partage entre les autorités nationales et les
autorités régionales. Dans les systèmes
centralisés, avec par exemple la Grèce, le Portugal ou l'Irlande,
c'est l'Etat qui concentre les compétences quant à cette
utilisation. D'autres, comme la Suède et la France, laissent une grande
part des compétences à l'Etat central, mais ont des
systèmes plus hybrides, entre un Etat central fort mais la
volonté d'une plus grande décentralisation, sans pour autant se
situer dans le fédéralisme. La France a fait le choix, mis
à part pour la coopération territoriale, de gérer les
crédits de la cohésion communautaire par le biais de l'Etat
central, depuis la loi ATR du 6 février 1992, et son article 5, faisant
du préfet de région à la fois l'autorité de gestion
et l'autorité de paiement. Les préfets sont assistés du
secrétariat général pour les affaires régionales,
dans lequel est inclus un département Europe. Le préfet est
assisté de services instructeurs. En effet, les principes de
subsidiarité et de partenariat excluent une gestion pleinement
centralisée des fonds structurels. L'Etat est censé garantir une
certaine neutralité et une cohésion dans l'aménagement du
territoire, mais doit être au plus près des citoyens. Du reste,
cela lui a permit de bénéficier d'un phénomène de
centralisation, permettant d'accroître son rôle au niveau
déconcentré. Le Conseil d'Etat, dans l'arrêt Région
du Limousin du 19 mai 1999, est soumis à un contrôle de
conformité des règlements communautaires à la
décision du gouvernement de répartir les dotations pour les zones
rurales. Le Conseil rappelle que l'Etat doit respecter le principe de
concentration des aides au profit des zones présentant les
problèmes de développement les plus graves, ce qui est le cas en
l'espèce. L'élaboration de la programmation est le fruit du
travail du CIACT (Comité interministériel d'aménagement et
de compétitivité des territoires) qui a rendu son travail de
programmation le 6 mars 2006, et qui concerne le FEDER et le FSE, puisque la
France n'est pas éligible au fonds de cohésion. Le FEDER fait
l'objet d'un programme régional pour chacune des régions de
l'Etat, soit 26. Quant au FSE, pour l'objectif de convergence le niveau du
programme est régional pour les DOM, et les autorités de gestion
seront les préfets de région. Le programme est unique, pour le
FSE, pour l'ensemble des régions en ce qui concerne l'objectif de
compétitivité régionale et d'emploi. Il s'agit là
d'une « renationalisation » d'une partie du FSE. Le
ministère de l'emploi est l'autorité de gestion, pendant que les
préfets de région sont désignés autorités de
gestion déléguée. Mais existe la politique de l'emploi.
Dès lors il sera déconcentré au niveau des régions,
mis à part pour le dialogue social et le programme national de
réforme, gérés au niveau national.
Ce sont les préfets de région qui peuvent
désigner les autorités de gestion déléguées
au titre des subventions globales. Celles-ci sont apparues en France en raison
de la mauvaise gestion des crédits européens, qui avait tendance
à engendrer des phénomènes de sous consommation des
crédits. C'est ainsi que le 31 juillet 2002 est mis en place ce
système de gestion déléguée, confié
notamment à des collectivités territoriales, mais aussi à
des groupements d'intérêt public, à des
établissements publics de coopération intercommunale tels que les
agglomérations. Pour le FEDER, ce sont les préfets de
région qui sont les autorités de gestion, pour les deux objectifs
de convergence et de compétitivité, mis à part pour
l'Alsace dans le cadre de l'expérimentation que nous détaillerons
plus tard. Les subventions globales peuvent être attribuées par
les préfets dans la limite de 50% du total du FEDER, et 60% du FSE, dans
la limite de 40% pour les conseils généraux et régionaux.
Il faut noter que pour l'objectif de coopération territoriale, ce sont
les collectivités territoriales qui restent autorités de gestion.
Il s'agit d'une continuité par rapport à l'initiative
communautaire Interreg, qui a été assimilée par cet
objectif. L'autorité d'audit, pour tous les fonds et les objectifs, est
la Commission interministérielle de coordination des contrôles.
Elle a été crée par le décret du 26 avril 2002,
Pour l'objectif de coopération territoriale, il ne peut y avoir qu'une
seule autorité de gestion, soit un conseil régional soit le GECT.
Elle est désignée par une convention avec l'Etat, qui ne
gère donc pas les fonds au niveau central. Si elle n'est pas
située en France, alors le préfet coordinateur va désigner
une autorité nationale, soit une collectivité territoriale et
alors il y aura une convention avec l'Etat, soit le préfet de
région. Mais, située en France, l'autorité de gestion est
aussi l'autorité nationale. L'autorité d'audit sera
l'autorité nationale si l'autorité de gestion, par
conséquent, est située hors de France. Elle sera instruite par la
Commission de coordination et devra assurer une fonction de séparation
des deux fonctions. L'autorité de certification est
désignée par l'autorité de gestion, quelle qu'elle soit,
et est soumise à un rapport conventionnel.
L'autorité déconcentrée de gestion
prépondérante est donc le préfet de région. A ce
sujet, un arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 12 octobre
2004, société André Vernay Teintures, montre que la
décision d'attribution d'une aide communautaire par l'autorité
administrative « se rattache à la mise en oeuvre d'une
politique communautaire en matière de développement
économique et social et d'aménagement du territoire ; qu'à
défaut d'une disposition législative contraire ou d'une exception
prévue par décret en Conseil d'Etat, le préfet de
région est seul compétent pour décider de l'attribution
d'une telle aide ». Or, le décret du 1er juillet
2002 faisait de la circonscription départementale un échelon
territorial de mise en oeuvre des politiques nationales et communautaires. Mais
l'article 3 attribue la compétence de l'échelon régional
pour le développement économique et social et
d'aménagement du territoire, conformément à la loi du 5
juillet 1972 portant création et organisation des régions.
Toutefois, la loi d'orientation pour l'aménagement et le
développement du territoire du 4 février 1995, qui a par ailleurs
désigné l'échelon régional, a aussi
désigné l'échelon départemental pour la mise en
oeuvre des politiques structurelles communautaires. La Cour semble donc aller
dans le sens de la Commission et des institutions communautaires dont les
règlements sont d'applicabilité directe, et dans le sens du
« marché de dupes » énoncé
précédemment, c'est à dire du refus d'une autorité
de gestion infra régionale. Il apparaît, pour conclure sur cette
question, que les contentieux qui s'y rapportent sont quasiment inexistants.
On note que, comme le budget européen, le budget
régional est principalement un budget d'intervention. Les fonds
structurels ne s'y inscrivent que dans le cadre des subventions globales. A ce
titre, selon Henri Oberdorff, « on peut considérer les
préfets comme des « administrateurs » du droit
communautaire sur le territoire français et des
« acteurs » de la mise en oeuvre des politiques
communautaires ».
B- Vers une décentralisation des fonds
structurels ?
La décentralisation des fonds structurels suppose que les
fonds ne transitent plus par l'Etat. Par exemple, la coopération
territoriale est confiée aux régions, voir au Groupement
européen de coopération territoriale. Appréhender cette
problématique par le biais du cas français est
intéressant. Tout d'abord, il faut relever que cette
décentralisation ne nécessite pas le recours à la loi,
puisque les règlements communautaires prévoient ce cas de figure.
Mais la compétence des préfets de région repose sur une
base légale. Il y a donc là le respect d'un certain
parallélisme des formes, en quelque sorte. La loi du 13 août 2004
permet la mise en oeuvre des expérimentations, pour une durée de
5 ans en ce domaine, selon le principe d'une région coordinatrice et
chef de file des autres institutions locales. Les expérimentations sont
apparues comme une solution, puisque répondant au souhait des
collectivités d'être plus impliqués dans la gestion des
fonds, tout en « préservant » l'Etat central. Les
expérimentations s'inscrivent dans la recherche d'une plus grande
rationalité dans les circuits administratifs que connaissent les fonds
structurels. Mais cela ne peut être imposé par à l'Etat,
qui garde un pouvoir d'initiative en la matière. L'article 1 de la loi
prévoit que les régions peuvent elles mêmes élaborer
un schéma de développement économique, qui une fois
adopté permettra à la région de se voir
délégué la gestion des aides qui sont attribués,
normalement, par l'Etat aux projets. Nous traiterons de ce schéma dans
la toute dernière partie. L'article 44 de la même loi
réalisa également des expérimentations en matière
de fonds structurels, c'est-à-dire dans la désignation des
autorités de gestion et de paiement pour la période de
programmation 2000-2006, sur le fondement de l'article 37-1 de la constitution.
L'Etat peut alors désigner les collectivités territoriales et
leurs groupements, ou des groupements d'intérêt public, qui vont
exercer ces fonctions. La loi a en réalité donné une base
légale à des expérimentations qui eurent
déjà lieu en Alsace à partir de 2003, ce qui avait
été approuvé par la Commission. C'est une prorogation des
expérimentations, pour ainsi dire. Cette expérimentation
concernait alors la gestion des crédits dévolus à
l'objectif 2, sur la reconversion des zones en difficultés, faisant de
la région à la fois une autorité de gestion et une
autorité de paiement. Il faut noter qu'avec la nouvelle programmation,
l'Alsace ne détient plus que la gestion du FEDER, en raison du principe
d'un fonds par programme. Puis ce fut au tour de l'Auvergne de devenir
autorité de gestion pour ce même objectif, mais cette fois-ci dans
le cadre des subventions globales. L'article 44 donne une priorité aux
régions dans cette décentralisation, de même qu'à la
Corse, qui a un statut constitutionnellement particulier ; mais ce peut
être aussi confié aux départements dans le cadre du FSE.
Dans le budget territorial, les fonds structurels deviennent alors une
dépense obligatoire, dans le cadre du régime des paiements
évoqué précédemment, qui comprend les
procédures de sanction, ou encore les corrections financières. La
collectivité assume seule sa responsabilité financière, en
dehors de l'Etat. Cependant, la Caisse des dépôts et consignations
par exemple, qui a encore une certaine portée Etatique, est devenue
l'autorité de paiement et de certification de la région Alsace,
afin de raccourcir notamment les délais de paiement sur la base d'une
convention. Les principes de l'expérimentation sont alors
déterminés par une circulaire du 15 juillet 2002, à savoir
une gestion séparée des crédits communautaires et
régionaux, et un contrôle indépendant. Le principal
avantage de la décentralisation est le guichet unique, plus proche des
citoyens en raison de l'expertise des élus locaux, de services
directement affectés à la gestion des projets, permettant un
contrôle et une affectation des fonds plus aisé. La question de la
décentralisation au niveau départemental du FSE s'est souvent
posée, car le département, plus riche que le niveau de gestion
déconcentré qu'est la région, est plus à même
de gérer efficacement les fonds communautaires en matière de
compétitivité régionale et d'emploi et d'élaborer
des programmes opérationnels en ce sens. Dans le même temps, cela
aurait pour conséquence un morcellement d'enveloppes réduites
pour les départements, tandis que la région aurait une enveloppe
supérieure. D'où de possibles conflits de compétences. A
fortiori si cela conduit l'Etat à être mis à l'écart
de sa propre politique de l'emploi ... d'où les critiques qui ont pu
émailler la gestion du FSE par l'Alsace au cours des
expérimentations. La décentralisation pose également la
question de l'additionnalité, principe général des fonds
structurels, car décentraliser leur gestion équivaut à
pouvoir se passer du financement national. Il faut se demander si les
collectivités auront assez de ressources financières pour cela.
Cela pose, enfin, la question de l'égalité et de la
cohérence interrégionale dans l'administration des fonds
structurels. Cette décentralisation est cependant amorcée, de
manière spécifique, dans un mouvement même où
l'élargissement de l'Union pourrait encore réduire le montant des
fonds à destination de la France si elle ne prouve pas qu'elle en a
besoin et qu'elle est consomme rationnellement. Le CIACT en 2006 relève
que « dans la mesure où il a été décidé
de maintenir les préfets de région comme autorités de
gestion et de certification pour les programmes régionaux et les volets
déconcentrés des programmes nationaux, l'organisation actuelle ne
devrait pas être sensiblement modifiée ». La subvention
globale est un mécanisme qui apparaît en ce sens comme une
alternative, notamment pour les agglomérations, la question urbaine;
ainsi que pour la gestion du FSE.
Un arrêt de la CJCE du 2 mai 2006, Regione Siciliana contre
Commission, montre que la Cour estime que la qualité pour agir devant la
juridiction communautaire n'est pas reconnue à la région. Cela
concernait une construction d'autoroute qui bénéficiait d'une
subvention au titre du FEDER. Une décision de la Commission avait
porté clôture de ce financement. Le Comité des
régions souhaitait faire de la région un requérant
privilégié, au titre de l'article 230 du traité CE. La
CJCE estime que la région n'a pas été
désignée autorité compétente par la Commission mais
par le gouvernement Italien. L'Etat fait écran entre la région et
la Commission, car elle pouvait elle-même dégager des fonds pour
compenser la perte de la subvention. Si les aides ne transitent plus par l'Etat
et que les régions en bénéficient directement, alors ce
sont elles qui en assument la responsabilité financière devant la
Commission, et non l'Etat. Reste à savoir si elles seront alors
considérées comme des requérants privilégiés
pour les fonds structurels. Par ailleurs, l'arrêt de la CJCE du 4 juillet
2000, Haïm II, montre qu'un arrêt en manquement contre l'Etat peut
aussi concerner les collectivités territoriales, puisque la
Cour estime que « le droit communautaire ne s'oppose pas à ce que
la responsabilité qui incombe à un organisme de droit public de
réparer les dommages causés aux particuliers par des mesures
qu'il a prises en violation du droit communautaire puisse être
engagée en plus de celle de l'Etat membre lui-même ».
II- La mise en oeuvre financière des fonds
structurels
Cette mise en oeuvre résulte d'un véritable circuit
financier (A). Et, de fait, il existe des interactions avec les autres
régimes d'aides existants (B).
A- Le circuit financier des fonds structurels
Il s'agit ici d'analyser relativement plus en détail la
gestion et les contrôles des fonds structurels. La bonne gestion
financière est en effet mise en avant par le droit communautaire. Et
plus il y a d'intermédiaires, plus la procédure risque de manquer
de transparence. D'où, d'ailleurs, le renforcement des dispositifs de
contrôle et de suivi de l'efficacité des fonds par les
institutions communautaires. Concrètement, la dépense
communautaire, pour la gestion déconcentrée, est effectuée
par la Commission et est reçue par le Trésor et par la Banque de
France. Si la gestion est décentralisée, les fonds iront
directement vers les collectivités territoriales. Sinon, ce sera donc
l'agent comptable du Trésor qui sera la première autorité
de certification. Il convertit les fonds structurels européens en fonds
structurels nationaux, par la voie des fonds de concours, ventilés en
fonction des ministères et des destinations des fonds, qui sont une
dérogation au principe de non affectation des recettes aux
dépenses. La dépense est inscrite au budget national sous un
objet pré-déterminé, puis l'Etat en région
gère les fonds à travers les préfectures et leurs
services. Par ailleurs, les fonds provenant de l'ingénierie
financière ne sont pas inscrits au budget national, et sont directement
distribués aux organismes chargés de les gérer pour les
redistribuer aux projets éligibles aux fonds structurels. Pour le
FEDER, il s'agit du SGAR, secrétariat général aux affaires
régionales. Pour le FSE, la DRTEFP, direction régionale du
travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. Ces services doivent
assurer la conformité des projets aux critères
d'éligibilité des fonds. Le préfet doit assurer le
partenariat, tout au long du processus. Une circulaire du 14 mai 2007 indique
d'ailleurs que désormais certains des fonds seront gérés
hors du budget de l'Etat sur un compte de tiers, pour bien pouvoir les
distinguer et délimiter leur importance. Seront gérés
notamment dans le budget « les crédits cofinançant des
projets « sous maîtrise d'ouvrage de l'État »
(l'État étant alors porteur de projet, «
bénéficiaire » au sens de la réglementation
communautaire) ainsi que les crédits cofinançant des
dépenses directes d'assistance technique initiées par
l'État : marchés publics, locations, frais de mission,
rémunérations des personnels recrutés par
l'État ». Les crédits hors budgets concernent notamment
les subventions globales, sur le FEDER et le FSE. C'est l'inspection
générale des finances, qui peut être reliée en ce
sens avec la Commission, qui coordonne les services du ministère de
l'économie, des finances et du budget. Le suivi des fonds est
réalisé au travers d'un système informatique nommé
Presage, qu'utilisent toutes les autorités de gestion, quelles qu'elles
soient.
Le rôle de l'inspection générale des finances
est primordial quant au contrôle des fonds. La circulaire du 14 mai 2007
précise le mécanisme budgétaire de gestion des fonds.
L'autorité de gestion va envoyer ses demandes de paiement à la
Commission, laquelle va mettre à disposition les fonds trois jours avant
qu'ils soient versés au contrôleur budgétaire et comptable
ministériel. L'autorité de gestion va envoyer un état de
répartition au contrôleur budgétaire et comptable
ministériel, qui va reverser les crédits dans les comptes de
tiers des comptables concernés, ce qui constitue les crédits de
paiement des autorités de gestion. A partir de 50 000 euros, le
trésorier payeur général de la région va
émettre un avis préalable à l'obtention du crédit
européen par l'autorité de gestion. C'est d'une certaine
manière une forme de contrôle. Dès lors, il y a trois types
de contrôles. Un contrôle dit de premier niveau est
réalisé par le service déconcentré de l'Etat, qui
est compétent pour le programme considéré.
C'est-à-dire soit le SGAR, soit le DRTEFP. Le suivi est
réalisé par le préfet et ses services
déconcentrés, à savoir les deux mêmes organismes.
C'est le service fait. Un contrôle de second niveau est ensuite
réalisé par le préfet et le trésorier payeur
général, auprès des services instructeurs puis
auprès des maîtres d'ouvrage. Le rôle de l'autorité
d'audit est celui dévolu au regard du règlement
général communautaire. La commission interministérielle
est en relation avec les autorités d'audit
« locales », c'est-à-dire qu'elle reçoit les
contrôles réalisés par les inspections
générales et par les services déconcentrés. Puis
c'est elle qui présente le rapport de synthèse à la
Commission. Dans tous les cas de figure, les chambres régionales des
comptes sont toujours une manière de contrôler les budgets des
collectivités territoriales pour l'Etat et ses autorités
déconcentrées. De même que la Cour des comptes, et de
manière plus large la Cour des Comptes Européennes. Ce qui ne va
pas sans conflits de compétences. Depuis le traité d'Amsterdam,
l'article 248 indique que « la Cour des comptes et les institutions
de contrôle nationales des États membres pratiquent une
coopération empreinte de confiance et respectueuse de leur
indépendance ». A ce niveau-là, le contrôle
financier des fonds structurels pose encore question, quant à savoir
s'il s'agit véritablement d'une coopération ou plus d'un
échange d'informations.
B- Les
interactions des aides communautaires avec les autres régimes d'aides
existants
La région est véritablement la collectivité
spécialisée dans l'action administrative à
caractère économique, ne serait-ce qu'en raison du fait que
l'article 72 de la Constitution dispose que "les collectivités
territoriales ont vocation à prendre les décisions pour
l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en
oeuvre à leur échelon". Des articles L1511-1 à 5 et
R1511-1 à 5 du Code général des collectivités
territoriales, elle détient une compétence générale
en la matière, voire un leadership. L'article L. 1115-1 dispose que
« les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent,
dans le respect des engagements internationaux de la France, conclure des
conventions avec des autorités locales étrangères pour
mener des actions de coopération ou d'aide au
développement ». Les aides communautaires sont juridiquement
des aides publiques, comme le montre l'article R1511-1, qui dispose que
« les subventions de l'Etat et de ses établissements public,
les aides de la Communauté Européenne et des organisations
internationales, et les subventions des collectivités territoriales et
de leurs groupements constituent des aides publiques ». D'où
une confusion normative possible entre aides communautaires et aides d'Etat. En
ce sens, les aides communautaires sont aussi des aides à
finalités régionales (AFR). La carte des AFR a été
adoptée le 7 mars 2007, et a été approuvée par la
Commission. Sont concernés la prime à l'aménagement du
territoire pour les projets, les aides à l'immobilier d'entreprises, les
exonérations de taxe professionnelle, les aides au tourisme, les aides
à l'investissement des PME, les aides des collectivités à
l'investissement productif des grandes entreprises. La primauté
régionale est reconnue législativement, concomitamment au
régime des aides pouvant être accordés aux entreprises,
comme le montre le schéma de développement économique
qu'elles peuvent édicter. Or, la Commission cherche à restreindre
le champ du zonage AFR, et donc des aides aux entreprises, tout en assurant une
coordination avec le régime des aides tel qu'il est
déterminé au niveau communautaire. Cela n'est pas nouveau,
puisque la Commission, dès 1971, adopte une décision qui
distingue les régions centrales des régions
périphériques, distinguant de fait les possibilités
d'aides entre ces régions. En 1998, elle adopte une nouvelle
décision pour les AFR qui vaut pour la période de programmation
2000-2006. Cette décision est basée sur un principe de
réduction de ces AFR, afin d'assurer une coordination entre les pays
plus pauvres, ceux bénéficiant de la cohésion
communautaire, et les régions plus prospères. Cette
décision repose aussi sur le principe de cohérence entre les
cartes des AFR et les dotations provenant des fonds structurels. Enfin, les
aides favorisées par le droit communautaires sont celles
génératrices d'emploi, et qui sont considérées
comme des investissements au sens qualitatif du terme. C'est la raison
d'être, du reste, de la notification préalable de la Commission,
chargée d'étudier le régime des aides au dessus du seuil
de minimis. On note que certains Etats comme l'Espagne, l'Allemagne ou encore
l'Italie pourront « compenser » une restriction des
régimes d'aides car les territoires éligibles à ce zonage
le sont également aux fonds structurels. Mais la France est relativement
moins éligible aux aides communautaires, d'où l'importance des
interactions normatives entre les aides d'Etat et les aides communautaires, et
des négociations lors d'une nouvelle période de programmation.
Ainsi, l'évolution du régime des aides d'Etat est imputable, du
moins pour partie, à la politique de cohésion communautaires,
à l'évolution des fonds structurels et, de manière plus
générale, à la construction européenne. En France,
le régime des aides locales reflète aussi cette influence qui
n'est pas seulement indirecte.
Sont recherchées des synergies avec les contrats de plan
Etats-régions. Il s'agit là de la déclinaison du principe
de complémentarité. Les fonds interviennent en appui des CPER. Le
CIACT de 2006 a permit de continuer à aligner la durée des
contrats avec celle de la programmation des fonds structurels. Les CPER, qui en
sont actuellement à leur cinquième génération,
devront se conformer aux priorités de Lisbonne, notamment la
compétitivité et l'attractivité des territoires, le
développement durable et la cohésion sociale et territoriale. Ils
concerneront surtout des investissements nationaux importants, pourront
concerner aussi des projets urbains ou ruraux. L'évaluation de la
réalisation de ces priorités sera pilotée au niveau
national par une instance d'évaluation commune aux programmes
opérationnels et aux CPER. Pour les CPER, c'est le GESPER, Groupe
d'étude et de suivi des contrats de Projets Etat-régions, et
institué pas une circulaire du 15 avril 2007 qui en assure
l'évaluation. Elle sera aussi le fait des services
déconcentrés et de la DIACT pour les programmes
opérationnels, ainsi que par un Comité régional de
l'évaluation, pour le niveau régional, donc,
coprésidé par l'Etat et le Conseil régional et commune aux
CPER et aux programmes opérationnels. Les évaluations des CPER
sont donc calibrées sur celles des fonds structurels. Pour la
période de programmation actuelle, les CPER sont renommés
contrats de projets Etats-régions. Cette démarche vise à
assurer une plus grande cohérence administrative à l'ensemble,
afin de respecter l'additionnalité, où des difficultés
quant au zonage des fonds structurels peuvent apparaître, puisque les
CPER ne le sont eux-mêmes que partiellement. Cet alignement est aussi une
manière de redonner un poids symbolique aux contrats de plan,
décriés pour leur valeur juridique plus ou moins contestable, en
leur conférant une ligne stratégique plus claire. Sur la question
de la valeur juridique de ces plans, un arrêt du Conseil d'État du
8 janvier 1988 Ministre chargé du plan et de l'aménagement du
territoire contre Communauté Urbaine de Strasbourg montre que ce sont de
véritables contrats administratifs. Mais l'arrêt Estuaire Ecologie
de 1996 du Conseil d'Etat montre que cela n'emporte aucune conséquence
directe quant à la réalisation effective des actions ou
opérations qu'ils prévoient. Ils ont étés
introduits par la loi du 29 juillet 1982, et sont réputés ne
contenir que des clauses contractuelles. L'article 12 précise que
« la résiliation par l'État du contrat de plan ne peut
être effectuée que dans les formes et conditions qu'il stipule
expressément ». Toutefois, l'encadrement Etatique des
collectivités par l'Etat est bien réel, ce qui pose, une fois de
plus, question quant à la libre administration des collectivités
territoriales et quant à la péréquation financière
entre les régions, puisque c'est une manière pour l'Etat d'y
déroger. Et, à l'inverse, cela peut être une manière
pour l'Etat de faire financer des plans politiques nationaux par les fonds
structurels au niveau régional, comme par exemple le plan de
cohésion sociale et ses pôles de compétitivité, peut
être au détriment des priorités purement territoriales.
En ce qui concerne, par ailleurs, l'article 1 de la loi du 13
août 2004, il permet aux régions, comme dit
précédemment, d'élaborer un schéma de
développement régional. Le Conseil constitutionnel a posé
une réserve d'interprétation dans sa décision du 12
août 2004, en estimant que "toutes les régions pourront
décider d'élaborer un schéma régional de
développement économique". Ce schéma devra respecter les
conditions légales de la loi, c'est-à-dire le principe de la
convention avec l'Etat qui permet la détermination des aides
concernées, leur montant, leur mise en oeuvre, sans que ce ne soit un
transfert de compétence définitif. Il s'agit, comme le souligne
l'actuel Comité des Régions Luc Van Den Brande, de faire des
régions des acteurs « pleinement associées au processus
de prise de décision, de mise en oeuvre et de suivi » des
fonds. Le schéma expérimental est précisé dans la
circulaire ministérielle du 25 mars 2005. Il doit comprendre notamment
les orientations stratégiques de la région, et
« poursuivre les objectifs de promotion d'un développement
économique équilibré de la région, de
développement de l'attractivité de son territoire et de
prévention des risques d'atteinte à l'équilibre
économique de tout ou partie de la région ». Cela ne
doit pas aller à l'encontre des orientations de l'Etat, et être
réalisé dans le respect des règles communautaires. De
plus, cela doit être réalisé en concertation avec les
autres collectivités territoriales et leurs groupements. Ces
interactions sont le reflet de la politique incitative que les institutions
communautaires souhaitent réaliser par l'intermédiaire des fonds
structurels.
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