La pin-up et ses filles: histoire d'un archétype érotique( Télécharger le fichier original )par Camille Favre Université Toulouse Le Mirail - Master 2 Histoire des civilisations modernes et contemporaines 2007 |
1.3 La pin-up photographique par Bernard of Hollywood.Il est important tout d'abord de préciser que la plupart des photographies de pin-up sont des photographies noir et blanc. Les photographies couleurs de pin-up datent quant à elles des années soixante. Le noir et blanc a certes l'avantage de pouvoir être reproduit à moindre frais mais permet surtout à l'artiste des jeux de lumière, de rendre la texture de la peau particulièrement veloutée et crée une atmosphère plus intime. Le noir et blanc autorise ces images à s'apparenter à un art noble, la photographie artistique, leur conférant ainsi des valeurs esthétiques. Quant à la manière de travailler de Bernard of Hollywood ou ses techniques photographiques, elles lui sont propres : « je n'ai jamais retouché aucune de mes photos. J'ai cherché à captiver l'essence humaine de mes sujets et à la transférer sur l'émulsion sensible de la pellicule. Pour moi, un portrait photographique digne de ce nom est une biographie physique et psychologique du modèle et, parallèlement, une autobiographie du photographe116(*) ».
1.3.1 Les canons de beauté de beautés « canons ».Le modèle de la pin-up photographique est une jeune femme occidentale désirable correspondant aux canons de beauté et à l'idéal érotique de l'époque déjà évoqués. Tout comme nos pin-up dessinées, la pin-up photographiée est souvent blonde, car comme le souligne la fille de Bernard of Hollywood : « pour mon père, les blondes étaient plus photogéniques. Elles étaient attirées vers son objectif comme des papillons de nuits117(*) ». Il est fort probable que cette blondeur permettait au photographe de nombreux jeux de lumières. Sa tenue est assez simple et ne varie guère : la plupart du temps elle porte un maillot de bain (Ill. 119), un déshabillé (Ill. 125), un pull long sur des collants (Ill. 120). Sa tenue doit avant tout mettre en avant ses formes avantageuses (Ill. 121, 122). Il arrive parfois que la pin-up garde son costume de scène pour la photographie notamment lorsque celle-ci est issue du monde du spectacle (Ill. 123, 124). Un certain nombre de beautés photographiées par Bernard of Hollywood sont des strip-teaseuses notamment pour une série de photographies réalisées entre 1955 et 1967. Une autre série de photographie dont les tenues de pin-up diffèrent légèrement est la série de photographie d'actrices déjà reconnues comme Jayne Mansfield, Marilyn Monroe... Dans cette série, les actrices portent généralement leurs robes de soirée ou des tenues plus originales mais tout aussi sexy. Par ces tenues glamour les actrices s'éloignent légèrement du genre photographique pin-up. Les modèles photographiées sont aussi sophistiquées et soignées que leurs homologues dessinées : yeux de biches ourlés de mascara, lèvres pulpeuses et brillantes, sourcils arqués, ongles vernis, peau de pêche, bijoux. Et sont elles aussi, présentées avec toute une panoplie d'accessoires de séduction. On remarquera encore l'utilisation quasi systématique des chaussures à talons déclinées à l'infini : escarpins, talons aiguilles, chaussures à boucles, talons compensés... Lorsque le décor n'autorise pas la présence de chaussures à talons, la pin-up pose alors sur la pointe des pieds, histoire d'allonger la jambe, de fuseler le mollet et de galber les fesses (Ill. 126). On retrouve aussi une forte proportion d'images dont les modèles portent des collants simples, de couleurs, résilles ou des bas (Ill. 127). Il arrive aussi que les jambes du modèle soient nues quant le décor le permet, jambes nues certes mais parfaitement lisses. En effet l'accent dans la photographie de pin-up est bel et bien mis sur les jambes du modèle. La mise en valeur de cette zone du corps féminin engendre une atmosphère érotique. Les pin-up photographiées ont des jambes interminables un peu comme les pin-up de Vargas. Tout comme les dessinateurs, le photographe emploie de nombreux « trucages » afin « d'allonger » les jambes de ses modèles : cadrage, jeux de lumière, pose des modèles, vêtements courts permettant d'affiner la silhouette (Ill. 129, 130)... Cette volonté de mettre l'accent sur les jambes résulte d'un érotisme conventionnel et non « immoral ». En effet, dans les années quarante et cinquante, dévoiler les jambes féminines n'est plus obscène. Mais il révèle aussi d'un goût particulier de l'artiste pour cette partie du corps féminin : « j'avais du flair pour dénicher des pin-up. On m'a toujours qualifié "d'homme à jambes". Pour moi la jambe était la plus belle partie du corps d'une femme, la plus séduisante, la plus érotique. Ils m'appelaient "le Vargas de la photographie". Même M. Vargas me l'a dit. Nous avions la même démarche dans notre quête de la femme idéale. Je sais que, même si ses dessins une fois achevés avaient un côté exotique, pour lui, le modèle idéal était l'Américaine type, naturelle, débordante de santé118(*) ». L'autre partie du corps féminin mise en avant dans ses photos est évidemment la poitrine, et plus particulièrement à partir des années cinquante. Ici aussi l'artiste utilise de nombreuses « astuces » afin de renforcer l'attrait sexuel que suscite cette particularité anatomique bien féminine. Les modèles se cambrent, les décolletés sont plongeants, les bretelles glissent sur les épaules, les voiles des déshabillés soulignent le galbe d'un sein. Il arrive aussi que le modèle pose seins nus. En effet, une forte proportion des « lecteurs » semble se désintéresser des jambes pour se tourner vers le « confort maternel » du sein. A partir de 1955, la plupart des magazines pour hommes présente des modèles topless. En 1957, Fling est le premier magazine en vente libre à s'adresser exclusivement aux amateurs de grosses poitrines. La concurrence sur ce terrain se fait vite sentir : Gem (1967), The Swinger (1968), The gent (1963), Juggs (1979). * 116 Idem, p.26. * 117 Idem, p.30. * 118 Idem, p.29. |
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