L'INDEPENDANCE DE LA BANQUE CENTRALE : AUCUNE RELATION
AVEC LA CROISSANCE ECONOMIQUE
INTRODUCTION :
Les deux
chapitres précédents ont été riches de la
littérature économique sans qu'il y avait des études
empiriques pertinents.
Les principaux
travaux de Bade & Parkin (1982), Alesina (1988), Grilli, Masciandaro
et Tabellini (1991) ; Cukierman (1992), Cukierman & Webb & Neyapti
(1992), Eijffinger & Schaling (1993) ont analysé les relations
empiriques entre l'indépendance de la banque centrale et la croissance
économiques. On part généralement de la construction d'un
indice de l'indépendance et on teste ensuite l'existence d'une
corrélation statistique entre cet indice et la croissance
économique.
L'objet de ce
chapitre est de présenter dans la première section les mesures du
degré d'indépendance de la banque centrale. Dans la
deuxième section, on va analyser la corrélation entre ces indices
et la croissance économique.
SECTION 1 : mesure des indices de l'indépendance de la banque centrale
selon Cukierman (1992)
En essayant de
comparer les situations L'indépendance entre les banques centrales des
différents pays, on constate que parfois les textes de loi
adoptés par les législateurs sont identiques ; alors on
s'attend à ce que le degré d'indépendance de la banque
centrale soit proche. Mais en réalité, ce degré varie
entre les pays.
Dans cette section
nous allons évaluer l'indépendance des banques centrales à
travers l'indicateur d'indépendance légale de Cukierman, Webb et
Neyapti. La critique de la non concordance entre les textes organiques et les
faits pratiques a poussé Cukierman, Webb et Neyapti (1992) à
prolonger les travaux. Ils ont élargi l'échantillon aux pays en
développement et ont fourni un indice agrégé
d'indépendance légale.
L'indice de
l'indépendance légale de Cukierman, Webb et Neyapti
synthétise en lui-même plusieurs informations. Les auteurs ont
d'abord mis au point 16 variables légales notées chacune de 0
à 1, c'est-à-dire du niveau le plus bas au niveau le plus haut
d'autonomie de la banque centrale. Cukierman, Webb et Neyapti affirment, en ce
sens, que la notation a été choisie de façon à ce
qu'une valeur plus élevée indique ce qui, selon eux, correspond
à "un mandat plus fort et une autonomie plus large de la banque
centrale dans sa poursuite de la stabilité des prix "
L'indice
d'indépendance légale comporte trois sortes d'indicateurs pouvant
être regroupés en deux types :
- Indices relatifs au
cadre légal de l'indépendance : codification de la
législation (tableaux 1)
- Indices relatifs
à l'indépendance réelle : codification des questionnaires
et des entretiens avec les banquiers centraux (Turnover). (tableau2)
Tableau
1 : les variables de l'indépendance légale selon Cukierman,
Webb et Neyapti
Codage
numérique
|
pondération
|
Description de la
variable
|
N°de la
variable
|
1.00
0.75
0.50
0.25
0.00
1.00
0.75
0.50
0.25
0.00
1.00
0.83
0.67
0.50
0.33
0.17
0.00
1.00
0.50
0.00
|
0.2
|
Le dirigeant de la banque
centrale
a-la durée du
mandat
- plus de 8
ans
-entre 6 et 8
ans
-5 ans
-4 ans
-Moins de 4 ans
ou à la discrétion de l'autorité de
nomination
b-qui désigne
le dirigeant de la banque centrale ?
-Le conseil de
la banque centrale
- Un
comité rassemblant le conseil de la banque
centrale, l'autorité exécutive et
L'autorité législative
- Le
législatif
-
L'exécutif de manière collective
- Un ou deux
membres du pouvoir exécutif
c-la
révocation
-aucune
provision pour la révocation
- uniquement
pour des raisons non liés à la politique
menée
-a la
discrétion du conseil de la banque
centrale
- a la
discrétion du pouvoir législatif
- la
révocation inconditionnelle est possible pour le
législatif
- a la
discrétion de l'exécutif
- la
révocation inconditionnelle est possible pour
l'exécutif
d-le dirigeant de
la banque centrale peut-il avoir d'autres fonctions au
gouvernement ?
- non
- uniquement
avec la permission de l'exécutif
- aucune
règle n'existe en la matière
|
1
|
1.00
0.67
0.33
0.00
1.00
0.80
0.60
0.40
0.20
0.00
1.00
0.00
|
|
La formulation de la
politique monétaire
a-qui formule la
politique monétaire ?
- la banque
centrale seule
- la banque
participe, mais a une influence faible
-la banque
conseille le gouvernement uniquement
- la banque n'a
aucun mot à dire
b-a qui appartient
la décision finale dans la résolution d'un
conflit ?
- la banque, sur
les questions clairement définies dans la loi comme ses
objectifs
- le
gouvernement, sur les questions non définies dans
la loi comme des objectifs de la banque ou en cas de conflit
interne à l'institution monétaire
- un conseil
regroupant la banque centrale, l'exécutif et le
législatif
- le
législatif sur les questions de politiques
économique
-l'exécutif sur les questions de politique
économique, mais en suivant une démarche
précise et avec une possibilité de recours pour la
banque
-
l'exécutif a la priorité de façon inconditionnelle
c-le rôle de
la banque centrale dans le processus
budgétaire
- La banque a
un rôle actif
-La banque n'a aucune
influence
|
2
|
1.00
0.80
0.60
0.40
0.20
0.00
|
0.15
|
Les objectifs
- La
stabilité des prix est l'objectif prioritaire ou unique du
statut et la banque détient la décision finale en cas
de conflit avec les autres objectifs gouvernementaux
- La
stabilité des prix est l'objectif unique
-La stabilité
des prix fait partie d'un ensemble d'objectifs compatibles les un
avec les autres
-La stabilité
des prix fait partie d'un ensemble d'objectifs
potentiellement conflictuels
-Aucun objectif
n'est spécifié dans le statut -Les objectifs
spécifiques n'incluent pas la stabilité des
prix
|
3
|
1.00
0.67
0.33
0.00
1.00
0.67
0.33
0.00
1.00
0.67
0.33
0.00
1.00
0.67
0.33
0.00
1.00
0.67
0.33
0.00
1.00
0.67
0.33
0.00
1.00
0.75
0.50
0.25
0.00
1.00
0.00
|
0.15
0.10
0.10
0.05
0.025
0.025
0.025
0.025
|
Les limitations sur les
prêts au gouvernement :
a- Les avances
à l'Etat :
- Les avances ne
sont pas autorisées
-Les avances sont
autorisées, mais avec des limites strictes
-Les avances sont
autorisées, avec des limites inconsidérées
-Pas de limitations
légales à l'emprunt gouvernemental
b- acquisition de
titres gouvernementaux :
-non autorisée
-autorisée,
mais avec des limites strictes
-autorisée,
avec des limites légales peu contraignantes
-Pas de limitations
à l'emprunt gouvernemental
c- Les termes du
prêt (maturité, taux d'intérêt, montant)
-Contrôlés par la banque
-Spécifiés par le statut légal
-Convenu entre
l'exécutif et la banque centrale -Décidés par
l'exécutif uniquement
d- Les emprunteurs
potentiels de la banque centrale.
-Uniquement
l'Etat centrale
-Tous les niveaux
de gouvernement
-Les
mentionnés plus haut et les entreprises publiques
-Les secteurs
publics et privés
e- Les limitations
à l'emprunt sont exprimées en
-montant
monétaires
-Part du capital ou
du passif de la banque centrale -Part des rentrées de l'Etat
-Part des
dépenses de l'Etat
f- La maturité
des prêts
-Moins de 6 mois
-Moins de 1 an
-Plus d'un an
-Aucune mention sur
la maturité des prêts
g- Les taux
d'intérêt sur les prêts doivent être :
-Au dessus des taux
minimums
-Au taux du
marché
-En dessous des
taux maximums
-Les taux
d'intérêt ne sont pas mentionnés
-Le gouvernement ne
paie aucun intérêt sur les emprunts
h- La banque centrale
est interdite d'acquérir ou de vendre les titres de l'Etat sur le
marché primaire
-Oui
-Non
|
4
|
Source :
A.Cukierman, S.Webb & B.Neyapti «Measuring the independence of
central banks and its effect on policy outcomes». The world bank economic
review, vol 6 no 3 (1992)
Tableau
2 : Les variables du questionnaire de Cukierman, Miller et Neyapti
(1992)
Source :
A.Cukierman, S.Webb & B.Neyapti «Measuring the independence of
central banks and its effect on policy outcomes». The world bank economic
review, vol 6 no 3 (1992)
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