La loi spéciale de lutte contre le terrorisme du 2 novembre 2001( Télécharger le fichier original )par Huynh To Uyen Julie Nguyen INALCO - Maitrise LLCE de Japonais 2004 |
III ) La position de l'opinion publique japonaiseHabituellement sur les questions de défense et de sécurité, l'opinion publique japonaise, qui est traditionnellement pacifiste, représente un élément d'influence très important. Pourtant, au lendemain des attentats du 11 septembre, elle a semblé être relayée au second plan. En trois mois, de septembre à novembre, l'Asahi shinbun n'a effectué que deux sondages sur les événements et le premier n'a été publié que le 16 octobre, soit plus d'un mois après les attentats. Le reste du temps, l'essentiel de l'information était monopolisé par les positions, opinions, déclarations et propositions des hommes politiques, des partis, du gouvernement et du Premier ministre. Deux raisons peuvent être avancées pour expliquer le peu d'importance accordée à l'opinion publique : d'une part, la soudaineté des événements et le caractère urgent de la réponse à définir pressaient le gouvernement et le Premier ministre à prendre des mesures sans nécessairement attendre le consentement du peuple ; d'autre part, les sentiments de condamnation des attentats et du terrorisme et la forte empathie pour les victimes ont eu pour effet de faire consentir implicitement les Japonais à toute proposition des politiques pour répondre à ces actes atroces. Cependant, la position de l'opinion publique ne pouvait être négligée. Les résultats des sondages ont en effet mis en lumière des avis contrastés, à la fois approbateurs mais aussi sceptiques. Cette ambivalence peut s'expliquer par une condamnation traditionnellement moins forte du terrorisme que dans d'autres pays, et par un certain sentiment anti-américain. A) Une opinion contrastée : entre approbation ...Le phénomène terroriste, de la même façon que toute forme de violence, provoque un profond sentiment d'empathie vis-à-vis des victimes, se manifestant par une réaction de compassion et de condamnation et l'apparition d'un fort consensus contre cette violence, mais également un profond sentiment d'insécurité. C'est du moins ainsi que fonctionnent les mécanismes qui régissent les opinions publiques lorsqu'elles sont confrontées à ce genre de phénomène d'ultra violence comme le terrorisme, mais également les guerres, la torture ou encore la dictature. Dans le cas présent aussi, l'opinion publique japonaise, relayée et amplifiée par les médias, n'est pas restée insensible et s'est même sentie profondément concernée par les événements. Elle a d'ailleurs toujours été très sensible aux questions de défense et de sécurité. Certains éléments d'analyse sont révélés par l'extrait du sondage qui suit 16(*) :
La tendance principale qui se dégage de ces données est que l'opinion publique japonaise était majoritairement favorable au gouvernement Koizumi (70 % en septembre, 71 % en octobre) et à la collaboration du Japon aux mesures de lutte contre le terrorisme prises par les Etats-Unis (62 % en septembre, 71 % en octobre). Ce taux de 71 % peut cependant être interprété de deux façons différentes. Soit, d'une part, l'opinion publique japonaise, au diapason de l'opinion publique internationale, a ressenti le même sentiment de profonde empathie pour le peuple américain et se révoltait contre ce genre de crime aveugle et atroce que pouvaient engendrer des actes terroristes. A ce titre, il était donc du devoir du Japon en tant qu'allié des Etats-Unis d'être solidaire et donc de collaborer aux mesures de représailles pour punir les coupables de ces actes barbares. Soit, d'autre part, elle estimait que la lutte contre le terrorisme devait faire partie des priorités d'une grande puissance internationale défendant les valeurs de la démocratie, de la liberté et de la paix. A ce titre, les attentats du 11 septembre ne représentaient qu'un triste exemple d'une menace grandissante contre la paix dans le monde. Il était de ce fait du devoir du Japon en tant que grande puissance mondiale de collaborer à la lutte contre le terrorisme. * 16 Asahi shinbun, 16 octobre 2001 - Extrait du sondage réalisé par téléphone les 13 et 14 octobre 2001 sur 2000 personnes. Les données entre parenthèses ont été recueillies les 28 et 29 septembre 2001. Cependant, ce sondage posant également des questions concernant spécifiquement la loi spéciale de lutte contre le terrorisme, nous y reviendrons plus tard (Voir 2ème Partie, chapitre 3, II), B) |
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