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Décentralisation et coopération décentralisée au Bénin: Vers la légitimation des espaceds publics locaux pour le developpement des collectivités locales

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par cassius jean SOSSOU BIADJA
Université de Genève Institut Universitaire d'Etudes en Développement - DEA 2004
  

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I- Démocratie et décentralisation: atouts pour les collectivités locales

Avec la concrétisation de la décentralisation au Bénin, certaines compétences vitales justifiant l'autonomie des collectivités décentralisées, sont transférées du centre vers la base.

Ainsi de nouvelles compétences et de nouveaux moyens adéquats sont mis à disposition des populations, qui les exerceront par le biais des structures de décisions qu'elles ont mises sur pied. De ce fait l'administration se sentira beaucoup plus rapprochée de l'administré. Celui-ci lui fera confiance et participera avec elle à l'identification et à la résolution des problèmes de développement.

Il est bien évidemment claire dans l'esprit de tout politologue que «La décentralisation n'apportera de solutions durables aux défis actuels que si elle se situe dans un contexte démocratique et si les communautés locales sont en mesure de s'exprimer et de s'affirmer9(*)

Cette affirmation de Henri Philippe CART vice-directeur de la DDC, résume en elle tous les atouts que représente la décentralisation pour le développement des futures collectivités locales décentralisées au Bénin.

Ces atouts, loin d'être la panacée qui sortirait le pays de ses difficultés, constituent, à ne point en douter, des avantages non moins importants qui offriraient aux populations les moyens nécessaires à leur propre épanouissement. Ces atouts peuvent s'analyser en terme de transfère de compétences et de renforcement des capacités locales.

A- Le transfère de compétence

Les réformes décentralisatrices au Bénin prévoient plusieurs domaines de transfère de compétence. Nous les regrouperons en deux grandes catégories.

A.1- Développement économique et local, aménagement habitat et urbanisme, 10(*)

° Sur le plan du développement économique la loi stipule que "sous réserve des droits et charges de l'État, et en vue de favoriser le développement à la base, la commune, la collectivité décentralisée, jouit de la personnalité juridique et de l'autonomie financière.
La jouissance de la personnalité juridique et de l'autonomie financière est soumise aux conditions déterminées par la loi et au contrôle de l'autorité de tutelle"11(*)
Il va s'en dire que les nouvelles collectivités locales béninoises sont juridiquement autonomes et disposent dès lors d'un budget propre de fonctionnement. L'article 2 de la même loi le précise en ces termes : Pour la mise en oeuvre de son autonomie financière et l'accomplissement de sa mission de développement, la commune est dotée d'un budget propre.

Cependant, si la décentralisation s'entend du transfert par l'État des compétences et des moyens adéquats aux collectivités locales en vue de la prise en charge de leur propre développement, se pose alors la fondamentale question des ressources financières de ces dernières, ressources en terme de recettes budgétaires des nouvelles entités territoriales. Cette question revêt une si grande importance pour la viabilité du processus qu'au point où, si elle n'est pas examinée avec précision, le développement local durable et la démocratie locale participative qui sont les principaux enjeux de cette décentralisation risquent d'être un voeu pieux. Dès lors on peut se poser la question de savoir ce que représente l'autonomie d'une commune dépourvue de ressources financières suffisantes. Les expériences passées en matière de décentralisation sur la question des ressources financières des communes nous en disent long à cet effet.

Tout comme le budget national qui est essentiellement basé sur les recettes fiscales, les ressources financières des communes au Bénin le sont aussi, ce qui laisse entrevoir la faiblesse des ressources budgétaires de ces nouvelles communes. Afin de combler ce déficit, il a été prévu des mécanismes tels que la Taxe de Développement Local (TDL, article 10-a de la loi n° 98-007 du 15 janvier 1999). Cette taxe a une assiette qui repose sur les activités socio-économiques locales (produits agricoles, pêche, élevage, artisanat, activités de commerce ou de service). L'espoir fondé sur l'instauration de cette nouvelle source ne doit cependant pas occulter la faiblesse du tissu économique des actuelles collectivités territoriales et par conséquent de son rendement.

Á travers la bonne résolution des problèmes liés au transfère des compétences économiques et financières, dépendent en grande partie la réussite du transfère des autres compétences dévolues aux nouvelles collectivités territoriales béninoises D'où l'importance de la promotion des mécanismes de coopération sous toutes leurs formes.

°Sur le plan du développement local, de l'aménagement de l'habitat et de l'urbanisme, c'est la loi n° loi n° 97- 029 du 15 janvier 1999 en son chapitre III et en ses articles 84 à 86 qui confère aux nouvelles communes des compétences propres en la matière. Elle stipule que la commune:

- élabore et adopte son schéma directeur d'aménagement; sur ce plan en élaborant les documents de planification nécessaires, elle délivre les permis d'habiter et les permis de construire et elle assure le contrôle permanent de la conformité des réalisations et des constructions avec la réglementation en vigueur.

La commune assure également la promotion de l'habitat social et est consultée dans le cadre de l'élaboration du plan national de développement. Elle a compétence en matière d'habitat pour créer les conditions pouvant favoriser la promotion immobilière publique et privée.

- élabore son plan local de développement économique et social.

La question à ce niveau se pose de savoir si les collectivités territoriales béninoises ont aujourd'hui les moyens d'asseoir une bonne politique d'aménagement de l'habitat et d'assainissement de l'environnement tout en ne perdant pas l'objectif principal qu'est le développement local? La réponse à cette question est bien évidemment négative dans la mesure ou on sait le poids que représente pour les pays africains en général et le Bénin en particulier les problèmes liés à l'aménagement de l'habitat et à l'assainissement de l'environnement. Avec la coopération décentralisée et son volet d'appui à la gestion municipale, de nouvelles perspectives s'ouvriront aux nouvelles communes béninoises.

A.2- Infrastructures, équipements et transports; environnement, hygiène et salubrité.12(*)

°Le cahier de charges des nouvelles communes dans ce domaine est lourd. Sur ce plan il est évident que tout est à refaire dans la mesure où le manque et/ou la vétusté des infrastructures de communication, des équipements et des moyens de transport est pour les nouvelles communes la pointe d'épine qui entrave leur marche vers le développement. La coopération décentralisée saura y apporter sa modeste contribution.

°Ici aussi, tout comme dans les autres domaines il revient aux nouvelles collectivités territoriales d'assurer la coordination entre les exigences du développement local et la sauvegarde de l'environnement. Sur ce plan, les grands centres urbains du pays comme Cotonou, Porto-novo, Parakou etc. sauront tirer partie de leur autonomie de gestion pour améliorer leur technique de gestion urbaine et bénéficier de leur partenaire des appuis logistiques, techniques, financiers etc.

Certaines communes reçoivent en plus de ces compétences énumérées d'autres, notamment en matière d'enseignement et de formation professionnelle, de transport et de circulation, de sécurité et de communication.

B- Le renforcement des capacités locales

°Il s'exprime en terme de soutien de l'État et/ou de tout autre organisme de coopération (collectivités territoriales partenaires, organismes d'aide et de coopération) pour accompagner le processus de transfère de compétence.

De la part de l'État, le renforcement des capacités locales se fera par la mise à disposition des collectivités locales:

- des ressources humaines qualifiées et compétentes. En effet, la loi sur le statut de la fonction publique territoriale prévoit divers projets et programmes de formation et de remises à niveau des personnes appelées à travailler pour le compte des collectivités décentralisées,

- de moyens financiers et logistiques permettant aux nouvelles collectivités locales d'exercer leurs nouvelles compétences,

- de l'assistance technique aux nouvelles collectivités dans leur phase de démarrage.

Cependant, il serait illusoire de penser que l'État béninois accomplirait diligemment et bien sa mission de renforcement des capacités locales ci-dessus décrite, dans la mesure où, les ressources budgétaires des États africains sont notoirement connus comme étant limitées. C'est surtout ici qu'intervient l'importance du rôle de la coopération dans l'appui aux collectivités décentralisées, la coopération décentralisée trouve tout son sens dans ce contexte.

°De la part des organismes de coopération, il se fera par les différents programmes d'appui dans le sens du renforcement des capacités institutionnelles de ces nouvelles entités ou de l'appui aux programmes de développement communal ou municipal, leur offrant ainsi les perspectives pour un réel développement.

Á la lumière de ces exemples d'atouts cités, l'on est en droit de se poser la question de savoir quel lien peut-on établir entre la coopération décentralisée et la décentralisation?

B.1- Liens entre la coopération décentralisée et la décentralisation au Bénin

Après l'indépendance toute la stratégie de développement du Bénin a été attribuée à l'État qui jouait un rôle directeur dans la gestion des questions du développement, souvent au détriment des acteurs les plus importants de la société. Le secteur public étatique s'est ainsi vu se développer bien au-delà de ses possibilités financières et ses possibilités de gestion. Mais très tôt les faiblesses de cette stratégie se sont révélées et ont permis de mettre en évidence la nécessité d'accorder aux acteurs locaux plus de pouvoirs de décision et de gestion. Cette mainmise de l'État, c'est-à-dire le monopole du pouvoir dont disposait l'État sur le développement, a été remis en cause grâce à la décentralisation. L'État béninois autrefois unique bénéficiaire et partenaire de l'aide internationale, perd à la faveur de la décentralisation son statut d'organe le plus favorisé. Les changements ainsi nés vont permettre aux autres acteurs du développement d'occuper la place ainsi libérée et contribueront à la cession aux entités territoriales des compétences vitales à leur émancipation. Une nouvelle orthodoxie du développement naîtra ainsi du processus de décentralisation: celle qui veut que les collectivités territoriales soient directement en contact avec les partenaires au développement, c'est-à-dire que l'aide au développement se passe du canal de l'État central pour atteindre directement les populations bénéficiaires.

En effet, tandis que le paysage institutionnel se diversifie et s'intensifie actuellement au Bénin avec la mise en oeuvre de la décentralisation, la coopération au développement en général et l'appui à la décentralisation en particulier deviennent de plus en plus complexes et politiques. Dans ce nouveau cercle, qu'est celui de la relation entre la coopération décentralisée et la décentralisation, il existe une unanimité, un consensus entre les bailleurs de fonds européens (bilatéraux et multilatéraux) et leurs partenaires africains sur le fait que la décentralisation démocratique modifie de manière fondamentale le cadre politique et institutionnel pour la coopération au développement dans les pays partenaires. La décentralisation démocratique participe pour ainsi dire au changement du cadre de la coopération au développement d'une manière fondamentale pour l'ensemble des bailleurs de fonds et les acteurs locaux du développement que sont les collectivités locales. Il en résulte le fait que les collectivités locales, les groupements de citoyens, les coopératives et les associations professionnelles (pour ne nommer que ceux-là ) revendiquent tous, un rôle de plus en plus politique en matière de développement, aux côtés des dirigeants traditionnels et du gouvernement central.

Pour la coopération décentralisée, tous ces  acteurs  constituent des partenaires ou des  voies d'accès  pour des mesures particulières d'appui à la décentralisation démocratique (par exemple: la formation des conseillers municipaux, l'éducation civique des groupements de citoyens, et le renforcement des capacités des entrepreneurs locaux pour répondre aux appels d'offre des collectivités locales) et de nouvelles possibilités dans la poursuite des objectifs de réduction de la pauvreté et de développement local.

Pour ce faire, la coopération décentralisée qu'elle soit bilatérale ou multilatérale oeuvre pour la mise en place de nouveaux instruments, des stratégies et modalités de coopération, susceptibles de faciliter le changement institutionnel et d'optimiser les possibilités de promouvoir les objectifs de développement stratégique, tels que la réduction de la pauvreté ou le développement économique local.

* 9 Henri-philippe Cart vice-directeur de la DDC in Décentralisation et développement, écrits sur le développement N° 2, DDC, janv. 1999

* 10 Loi n° 98-007 du 15 janvier 1999 portant régime financier des Communes en République du Bénin

http://www.cenabenin.org/Loi98007.htm

* 11 (Art 1 de la loi N° 98-007 du 15 janvier1999).

* 12 Ibidem art 87 à 92 et art 93 à 96

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius