UNIVERSITY OF YAOUNDE
II-SOA
FACULTY OF JURIDICAL AND
POLITICAL SCIENCES
DEPARTMENT OF POLITICAL SCIENCE
UNIVERSITE DE YAOUNDE II-SOA
FACULTE DES SCIENCES
JURIDIQUES ET POLITIQUES
DEPARTEMENT DE SCIENCE POLITIQUE
LE PROCESSUS DE FORMATION DE LA CULTURE STRATEGIQUE
CAMEROUNAISE :
ANALYSE DU ROLE DES ECOLES MILITAIRES
Mémoire présenté et soutenu en vue
de l'obtention partielle du Master II en Science Politique
par :
Aïcha PEMBOURA
Maîtrise es Science Politique
Avec la participation de
Alain FOGUE TEDOM
Docteur en Science Politique
Assistant à l'Université de
Yaoundé II
Sous la direction de :
Luc SINDJOUN
Agrégé de Science Politique
Professeur des Universités
Année académique 2005-2006
DEDICACE
Je dédie ce Mémoire à mes
parents qui me sont particulièrement chers : Monsieur
Njifotié Issa, Madame Ndassah Adija, Madame Loumngam Alima. Puissent-ils
trouver en ce modeste travail, le début de ma récompense à
leurs multiples sacrifices.
REMERCIEMENTS
Un certain nombre de personnes trouveront ici l'expression de
mes remerciements les plus sincères.
Il s'agit : de mon directeur, le Professeur Luc Sindjoun
dont la disponibilité, la patience et le suivi ont été
capitaux pour l'aboutissement de nos efforts. Du Docteur Alain Fogué
Tedom pour ses précieux conseils et sa disponibilité.
De tous les enseignants du département de science
politique de l'Université de Yaoundé II pour cette année
durant laquelle ils ont dispensé des cours, conseils, critiques et
autres orientations.
De ma famille toute entière, mes frères et
soeurs en particulier pour leur soutien moral et affectif.
Du Général Ngambou Esaie
Du Colonel Tetmoun André ;
Du Lieutenant-colonel Beyegué Guy pour sa
collaboration
Du Capitaine de frégate J.George. Njofang ;
Du Commandant Christian Mabaly ;
Du Commandant Nzameyo Richard ;
Du Commandant Mekouabouth Mesmir ;
Du Lieutenant Pierre Célestin Yigi ;
Du Lieutenant Mevono ;
Du Lieutenant Ndzeng Mbida ;
Du Lieutenant Bateng Houba Liliane ;
De Monsieur Mpégna ; à tous, j'adresse ma
profonde gratitude, pour leur disponibilité et leur aide.
De Monsieur Oyono Jean Bosco pour ses conseils
De Monsieur Mama Chandini pour son soutien constant.
De tous mes amis, plus particulièrement ceux qui m'ont
aidé et soutenu au cours de l'élaboration de ce travail.
Des remerciements particuliers à mon Papa qui n'a
cessé de m'encourager.
SIGLES ET
ABREVIATIONS
BEMS : Brevet d'Etudes Militaires
Supérieures
BSFIFC : Bureau du Suivi de la
Formation Initiale et de la Formation Continue
CCF : Centre Culturel
Français
CEEAC : communauté Economique
des Etats de l'Afrique Centrale
CEM : Certificat d'Etat-Major
CIJ : Cour Internationale de
Justice
COMECII : Commandement des Ecoles et
Centres d'Instruction Interarmées
CSID : Cours Supérieur
Interarmées de Défense
DCMD : Direction de la
Coopération Militaire et de Défense
DEM : Diplôme d'Etat-Major
DEUG : Diplôme d'Etude Universitaire
Générale
DOT : Défense
Opérationnelle du Territoire
DPI : Division de la Programmation
Initiale
DRH : Direction des Ressources
Humaines
EEM : Ecole d'Etat-Major
EGRI : Etude Générale et
Relations Internationales
EMIA : Ecole Militaire
Interarmées
EMIAC : Ecole Militaire
Interarmées du Cameroun
ENSPP : Ecole Nationale
Supérieure Polytechnique de Paris
ENVR : Ecole Nationale à
Vocation Régionale
FAC : Forces Armées Camerounaises
FCFA : Franc de la Communauté
Financière Africaine
GCA : Général de Corps
d'Armée
MINDEF : Ministère de la
Défense
ONU : Organisation des Nations
Unies
OUA : Organisation de l'Unité
Africaine
RECAMP : Renforcement des
Capacités Africaines de Maintien de la Paix
SOPECAM : Société de
Presse et d'Edition du Cameroun
UPC : Union des Populations du
Cameroun
TABLE DES
MATIERES
DEDICACE
i
REMERCIEMENTS
iii
SIGLES ET ABREVIATIONS
iv
TABLE DES MATIERES
v
RESUME
Erreur ! Signet non
défini.
INTRODUCTION
GENERALE.............................................................................................1
I-CONTEXTE DE L'ETUDE
1
II- QUELQUES ECLAIRCISSEMENTS CONCEPTUELS
2
III-REVUE DE LA LITTERATURE
10
IV-PROBLEMATIQUE
12
V-HYPOTHESE
12
VI-LA METHODE
12
VII-TECHNIQUES DE RECHERCHE
14
CHAPITRE 1: LA DIALECTIQUE DE L'EXTRAVERSION ET DE
L'INTROVERSION DANS LA FORMATION DES OFFICIERS
CAMEROUNAIS.......................................................................................16
SECTION I : LA FRANCE ET LA
CHINE , PRINCIPAUX PARTENAIRES DU CAMEROUN DANS LA FORMATION DES
OFFICIERS
17
PARAGRAPHE 1 : LA DIMENSION VERTICALE DES
RANGS ET DU COMMANDEMENT , LA PREDOMINANCE D'UNE FORMATION
CAMEROUNAISE
18
A-GENDARMERIE NATIONALE ET ARMEE DE TERRE ,LE
PRIMAT DE LA FORMATION INITIALE LOCALE
19
B-L'ARMEE DE L'AIR ET LA MARINE , LE PRECIEUX
CONCOURS DE LA COOPERATION
22
PARAGRAPHE 2 : LA DIMENSION HORIZONTALE DE LA
SPECIALISATION PAR ARMEE ET LA DIMENSION SPATIALE, LA PREPONDERANCE D'UNE
FORMATION FRANÇAISE.
25
A-LA DIMENSION HORIZONTALE DE LA SPECIALISATION PAR
ARMEE , LA RELATIVE HEGEMONIE DE LA FRANCE
25
B-LA DIMENSION SPATIALE , LA NECESSITE D'UNE
FORMATION POINTUE
26
SECTION II: L'ILLUSTRATION PAR DES OFFICIERS DE LA
PREEMINENCE ET DE LA DIVERSITE DES FILIERES DE
FORMATION.........................................................................................27
PARAGRAPHE 1 : LA VARIETE ET LA PRIMAUTE DES
FILIERES DE FORMATION DES OFFICIERS CAMEROUNAIS
28
A-LA PREEMINENCE DE L'EMIAC DANS LA FORMATION
INITIALE DES OFFICIERS CAMEROUNAIS
28
B-LA FORMATION DE BASE DES OFFICIERS CAMEROUNAIS A
L'ETRANGER , LA PREPONDERANCE DE L'ECOLE FRANÇAISE
29
PARAGRAPHE 2 : LE RAPPORT ENTRE LA FORMATION
ET LA CARRIERE DU MILITAIRE AU CAMEROUN.
31
A-LES OFFICIERS FORMES AU CAMEROUN ET LEURS VIES
MILITAIRES : L'IMPACT DE L'UNE SUR L'AUTRE
31
B-LA TRAJECTOIRE D'UN OFFICIER FORME A
L'ETRANGER.....................32
CHAPITRE 2: LA SOCIALISATION PLURALISTE DES OFFICIERS PAR
LES ECOLES DE
FORMATION.........................................................................34
SECTION I : LA FORMATION
INITIALE , UNE ETAPE DETERMINANTE DE LA FORMATION DU MILITAIRE
35
PARAGRAPHE1 : L'EMIAC ,LA PRINCIPALE
ECOLE DE FORMATION INITIALE DES OFICIERS CAMEROUNAIS
35
A-UN ENSEIGNEMENT MILITAIRE NATIONALISTE, PACIFIQUE
ET DEFENSIF
37
B- UN PROGRAMME D'ENSEIGNEMENT REFLETANT UNE
CULTURE MILITAIRE BASEE SUR LES SPEFICITES NATIONALES
38
PARAGRAPHE 2 : LES ECOLES DE FORMATION
INITIALES ETRANGERES, UN COMPLEMENT INDISPENSABLE POUR UNE FORMATION DE POINTE
DES OFFICIERS CAMEROUNAIS
42
A-DES ENSEIGNEMENTS AU CONTENU QUASI-IDENTIQUE,
MAIS DIVERSITE DANS LES MISSIONS ASSIGNEES AUX OFFICIERS
43
B- DES PROGRAMMES D'ENSEIGNEMENT MILITAIRE
MODERNE : VECTEURS DE TRANSMISSION DES MODELES CULTURELLES
AUTRES.
45
SECTION II : L'ENSEIGNEMENT MILITAIRE
SUPERIEUR , UN ATOUT INDISPENSABLE A LA CULTURE MILITAIRE CAMEROUNAISE
48
PARAGRAPHE I : LES ECOLES D'ENSEIGNEMENT
MILITAIRE SUPERIEUR AU CAMEROUN , DES ECOLES DE METHODE, DE PROCEDURE ET
DE TECHNIQUES
48
A-L'ECOLE D'ETAT-MAJOR DU CAMEROUN , LA GRANDE
ECOLE DE COMMANDEMENT
49
B-LE COURS SUPERIEUR INTERARMEES DE DEFENSE, UNE
ECOLE DE STRATEGIE AU SERVICE DE LA PAIX
51
PARAGRAPHE II : LES ECOLES D'ENSEIGNEMENT
MILITAIRE SUPERIEUR A L'ETRANGER , LIEUX DE FORMATION MILITAIRE DE HAUT
NIVEAU
54
A : LE COLLEGE INTERARMEES DE DEFENSE DE
FRANCE ET LA DEFENSE AND STRATEGY INSTITUTE DE CHINE
54
B : LE REFLET DES CULTURES MILITAIRES
FRANÇAISE ET CHINOISE DANS LES PROGRAMMES D'ENSEIGNEMENT
55
CHAPITRE 3: LA POROSITE DE LA CULTURE MILITAIRE
CAMEROUNAISE..57
SECTION I : L'APPORT EXTERIEUR DES
CULTURES MILITAIRES DISTINCTES
58
PARAGRAPHE I : LA COOPERATION MILITAIRE
FRANCO-CAMEROUNAISE , UN PARTENARIAT AU SERVICE DES DEUX ETATS
59
A-UNE FORMATION D'ELITES ET D'EXPERTS "A LA
FRANCAISE"...............59
B-UNE FORMATION MILITAIRE POINTUE BASEE SUR
L'AMELIORATION DES CAPACITES OPERATIONNELLES DES FORCES DE DEFENSE DU CAMEROUN
ET DE SON RAYONNEMENT DANS LE MONDE
61
PARAGRAPHE II : LES COOPERATIONS AVEC LE
MAROC, LA GRECE ET LA CHINE : DES PARTENARIATS POUR UNE DIVERSIFICATION DE
LA COOPERATION EN MATIERE MILITAIRE
63
A-LA CHINE ET LE MAROC , PARTENAIRES DU
CAMEROUN EN MATIERE DE COOPERATION MILITAIRE
64
B-LE PARTENARIAT GRECO-CAMEROUNAIS : UN
PARTENARIAT AUX BENEFICES MUTUELS
64
SECTION II : LA CULTURE MILITAIRE
CAMEROUNAISE , UNE CULTURE MILITAIRE POREUSE
65
PARAGRAPHE I : l'INOPERATIONNALITE RELATIVE DE
LA TERRITORIALISATION DE LA CULTURE MILITAIRE AU CAMEROUN
65
A-LA FLUIDITE DE LA DEMARCATION ENTRE L'INTERNE ET
L'EXTERNE EN MATIERE MILITAIRE
65
B-LA CULTURE MILITAIRE CAMEROUNAISE , UNE
CULTURE OUVERTE A L'EVOLUTION DU MONDE
66
PARAGRAPHE II : UNE CULTURE MILITAIRE
CAMEROUNAISE COMME PRODUIT DES INTERACTIONS SOCIALES
67
A-L'ENVIRONNEMENT SOCIAL COMME FACTEUR STRUCTURANT
DE LA CULTURE MILITAIRE DU CAMEROUN
67
B-LA CONSTRUCTION SOCIALE DE LA CULTURE MILITAIRE
CAMEROUNAISE COMME CONSEQUENCE DE SA POROSITE
68
CONCLUSION GENERALE
69
REFERENCES :
71
PROTOCOLE DE
RECHERCHE........................................................................................76
ANNEXES:...............................................................................................78
RESUME
Ce mémoire est fondé sur la
problématique de l'existence au Cameroun d'une culture
stratégique. L'existence de ladite culture dans une
société donnée est déterminée par un certain
nombre d'éléments au rang desquels la culture militaire. Dans ce
contexte, notre travail est bâti autour de l'hypothèse selon
laquelle la porosité de la culture militaire camerounaise
prédispose à la formation d'une culture stratégique
hybride. Le constructivisme structuraliste dans cette perspective permet de
démontrer que l'identité de l'Etat camerounais sur la
scène internationale émerge des interactions avec
différents environnements sociaux. Dès lors que le processus de
socialisation scolaire des officiers camerounais est marqué par une
pluralité d'écoles ne partageant pas la même culture
militaire, il en découle une porosité de la culture militaire au
Cameroun.
ABSTRACT
This memory is founded on the problematic of the existence
of a strategic culture in Cameroon. The existence of the aforesaid culture in a
given society is determined by a certain number of elements among which is the
military culture. In this context, our work is built around the hypothesis
according to which the porosity of the Cameroonian military culture predisposes
to the formation of a hybride strategic culture. The structuralist
constructivism in this perspective permits to demonstrate that the identity of
the Cameroonian state on the international stage emerges some interactions with
different social environments. From the moment that the process of scholary
socialization of the Cameroonian officers is marked by a plurality of schools
not sharing the same military culture, it ensures a porosity of the military
culture in Cameroon.
INTRODUCTION GENERALE
I-CONTEXTE DE L'ETUDE
La politique sur la scène internationale, aussi bien
en diplomatie qu'en matière de défense, ne peut être
cohérente sans stratégie. Cette dernière qui selon Beaufre
vise à conférer un caractère conscient et calculé
aux décisions par lesquelles on veut faire prévaloir une
politique (Beaufre, 1985) a par conséquent des liens inaltérables
avec la politique dont elle sous-tend le projet. Le mot stratégie
connaît aujourd'hui un succès sans précédent. Sorti
du champ de la bataille il occupe désormais presque tous les domaines de
l'activité humaine ; chacun revendique « sa »
stratégie. Ceci pour le plaisir d'utiliser un terme prestigieux encore
empreint de résonances guerrières (Reysset et Widemann,
1997 :3). On assiste à ce que J. Paul Charnay qualifie de
dérive sémantique et qui risque de vider le concept de sa
spécificité, ou encore de le dévaluer ou de le banaliser
(De la Maisonneuve 1998). Malgré son origine guerrière, la
stratégie vise un but et n'a point pour objectif d'infliger des
souffrances ou de gagner des batailles. Ces derniers ne constituent en fait que
des moyens plus ou moins nécessaires1(*). Elle peut très bien s'affranchir du conflit,
de l'action militaire proprement dite pour se cantonner à la menace.
Bien plus, la meilleure des stratégies est celle qui n'est pas
appliquée dans son ultime aboutissement qu'est le choc des forces
antagonistes. L'on peut pour ainsi dire atteindre un résultat politique
en appliquant une stratégie préétablie sans combat
inutile.
Dans cette logique, l'objectif de toute stratégie ne
se réalisant que dans la pratique, cette dernière ne peut
être efficace sans réflexion préalable sur ses
déterminations, le poids des expériences historiques et des
préférences enracinées dans l'histoire. Dès lors,
l'on parle de culture stratégique. Elle peut donc s'entendre comme le
produit de la « transmission sociale persistante, d'idées,
d'attitudes, de traditions, d'habitudes d'esprit et de méthodes
préférées d'opérations qui sont plus ou moins
spécifiques à une communauté de sécurité
géographiquement située qui possède une expérience
historique unique » (Massie, 2006 :2). Elle peut aussi
être comprise comme un ensemble d'idées, de croyances, de
préjugés et de perceptions qui déterminent la
réponse d'une armée aux taches que lui assigne l'autorité
politique (De Montbrial et Klein, 2000 :150). De ce fait pour que l'on
puisse parler de culture stratégique, il est essentiel que les objectifs
politiques cadrent avec les missions militaires.
Le concept de culture stratégique, depuis sa
consécration en 1980, par la théorie des Relations
Internationales et des études stratégiques (De Montbrial et
Klein, 2000 :150) a déjà fait l'objet dans divers pays
d'études assez poussées. C'est ainsi qu'aux Etats-Unis, en France
ou encore au Canada, des auteurs comme Colson Bruno ou encore Justin Massie ont
présenté dans certains de leurs travaux les
caractéristiques d'une culture stratégique, et les
spécificités des cultures stratégiques américaines,
françaises et canadiennes (Colson,1993 ; Massie, 2006). Ces travaux
aujourd'hui, accompagnent l'élaboration des choix stratégiques.
C'est dans ce sens qu'il nous est opportun dans le contexte camerounais
d'étudier le concept de culture stratégique. Ainsi, existe-t-il
une culture stratégique camerounaise ? En l'état actuel des
études stratégiques au Cameroun, il n'existe pas de documents
où l'on parle d'une culture stratégique propre au Cameroun. Nous
avons donc pour ambition dans le cadre de notre étude de jeter les bases
d'une culture stratégique camerounaise. Cette étude doit à
terme permettre de saisir l'apport de la culture dans la prise des
décisions stratégiques au Cameroun.
Six éléments
déterminent dans un pays l'existence d'une culture stratégique.
Il s'agit de : l'assise géopolitique ; l'idéologie et
la culture politique ; les relations internationales ; la culture
militaire ; les relations entre civils et militaires ; l'armement et
la technologie militaire (Colson : 2006). La culture militaire en tant que
l'un de ces éléments, est le point qui retiendra notre attention
dans le cadre de ce travail. En effet, représentant un ensemble de
valeurs partagées par une armée, la culture militaire influence
la réponse de cette dernière aux missions à elle
confiées par le politique. Les officiers camerounais, lors de leur
formation, font l'objet d'une socialisation à de multiples cultures
militaires dans les différentes écoles militaires
fréquentées. Ce qui entraîne la porosité de la
culture militaire camerounaise, prédisposant ce pays à
l'acquisition d'une culture stratégique hybride.
II- QUELQUES
ECLAIRCISSEMENTS CONCEPTUELS
1-LA CULTURE
A la base de la notion de culture, l'on doit tenir compte d'un
présupposé fondamental selon lequel, la culture est acquise. Elle
s'oppose à la nature. Les anthropologues américains Alfred
Kroeber et Clyde Kluckhonh cités par Nicolas Journet, nomment de ce fait
culture : « la totalité des connaissances, des
croyances, des arts, des valeurs, lois, coutumes et toutes les autres
capacités et habitudes acquises par l'homme en tant que membre de la
société » (Journet, 2002 :1). La culture est donc
le propre de l'homme et se transmet par l'apprentissage. La culture peut
être comprise sous deux angles. Elle peut être entendue comme la
maîtrise d'un ensemble de connaissances : le savoir (Michaud, 2001).
C'est cette acception qui est véhiculée par l'expression
« être cultivé » (Journet, 2002 :6).
Pourtant, si toute culture comporte une part de savoir, c'est surtout parce que
ce savoir est l'objet d'une croyance plus ou moins consciente qu'il accomplit
son rôle de « culture » et détermine l'action.
Ainsi, le rapport entre un homme et sa culture comporte alors une part
d'évaluation, de vécu, d'attitudes vis-à-vis des
composantes de cette culture. De ce fait, pour autant qu'on y adhère,
une culture a une influence sur la manière dont nous pensons, dont nous
agissons. Elle se vérifie de ce fait dans ses manifestations pratiques.
L'acquisition d'une culture se fait à travers une double dimension
immatérielle ou mentale qui renvoie à l'acception, la croyance
à certaines normes. Tandis que matériellement, cette acception et
cette croyance influencent inconsciemment ou pas nos attitudes et nos actions.
C'est dans cette logique que l'éducation apparaît
comme le vecteur essentiel (parmi le patrimoine et d'autres vecteurs) de la
transmission culturelle. L'enseignement sous toutes ses formes, est une
entreprise de socialisation des jeunes. Jean Pierre Warnier estime dans ce
sens que sous couvert d'enseignement, il s'agit d'une politique culturelle
forte soumise à un projet national (Warnier, 1999 :66). Les Etats
du monde, les uns après les autres, s'emparent de l'école, au
travers de laquelle ils visent des objectifs multiples : faire faire
à tous les enfants les apprentissages fondamentaux qui feront d'eux des
citoyens et des travailleurs compétents. Les socialiser dans un projet
national plus ou moins imposé par une minorité et part
conséquent unifier le pays autour de la culture véhiculée
par l'école. C'est un projet à la fois politique,
économique et culturel. Pour les pays pauvres, c'est la condition du
développement. De même, Selim Abou soutient qu'une culture vivante
est sans cesse en changement, mais elle change à partir de son
patrimoine assumé et réinterprété et garde donc un
profil qui lui est particulier. Un exemple global est celui du Japon. Pour
avoir adopté, à un rythme accéléré, toutes
les exigences de la civilisation technologique, ce pays n'a pas pour autant
perdu son âme. Sa culture est sans doute en plein changement, mais elle
ne se confondra jamais avec une autre. Cela montre assez que l'identité
culturelle ne se réfère pas à un dépôt
culturel (Selim Abou,1981).
2-LA STRATEGIE
Le terme « stratégie » vient du grec
stratêgos, de stratos, armée, et agein, conduire. Mais si la
stratégie est née du champ de bataille, elle est aujourd'hui
irréductible à l'art de la guerre. En fait, la stratégie
militaire, n'est qu'un des moyens parmi d'autres dont dispose la politique.
Ainsi, la stratégie militaire n'est qu'une composante de la
« grande stratégie ». Jusqu'aux années 50 en
effet, la stratégie faisait partie de la guerre. Depuis, la guerre fait
partie de la stratégie. La stratégie étant au coeur de la
praxéologie ou science de l'action, l'on distingue les
stratégistes des stratèges. Les premiers sont les
théoriciens et les seconds les praticiens de la stratégie. Le
stratège participe à la définition des objectifs de
l'unité active dans laquelle il s'incarne, et réciproquement
l'autorité politique ne saurait se désintéresser de la
manière d'atteindre ces objectifs. Sur le plan opérationnel, le
Comte de Guibert cité par François Géré estime que
la tactique, cette « science des généraux »
embrasse toutes les grandes parties de la guerre : mouvement
d'armées, ordres de marche, ordres de bataille. « Elle est
plutôt en un mot, l'art de faire agir les troupes »
(Géré, 1999 :253).
En fait, de façon hiérarchique, la politique
énonce les finalités, désigne l'adversaire. En fonction de
ces données, la stratégie formule les objectifs, agence
dans l'espace et dans le temps les moyens de les atteindre. La tactique
gère l'affrontement sur le terrain (Reysset, et Widemann,
1997 :4).
De même Clausewitz énonce clairement que
« la stratégie est la théorie relative à l'usage
des combats (Gefecht) ». Par opposition, la tactique est «
la théorie qui porte sur l'usage des forces armées dans
l'engagement » (Montbrial et Klein, 2000). La stratégie
s'identifie donc, à la conception de la conduite générale
des opérations de guerre.
Les armements et les tactiques destinés aux
opérations , devraient être logiquement déterminés
en fonction de la stratégie alors qu'en pratique on observe souvent au
moins partiellement, une causalité inverse en raison entre autres des
contraintes humaines, financières ou techniques. Bien que l'objet
premier de la stratégie soit la guerre, il est important de souligner
avec Edward Luttwack que la stratégie est autant au centre de la
réflexion et de la conduite de la guerre qu'elle structure la
réflexion sur la recherche voire le maintien de la paix (Luttwack, 2002)
. C'est également dans ce même souci de sortir la stratégie
de cette perception essentiellement opérationnelle que Thierry de
Montbrial et Jean Klein remplacent dans leur définition le mot ennemi
par celui d'obstacle en affirmant que la stratégie est « la
science ou l'art de l'action humaine finalisée (tendue vers des
objectifs ou des buts identifiés avec précision), volontaire et
difficile2(*) »
(De Montbrial et Klein, 2000 :527).
La stratégie doit servir des fins politiques. Dans
cette perspective, elle convertit l'action propre de la force en instrument au
service de la politique. Lorsqu'on affirme que le but poursuivi par la
stratégie est la victoire, la soumission de l'ennemi, il convient de
compléter cette affirmation en soulignant que la victoire n'est en
réalité que l'étape intermédiaire avant le but
ultime qui est politique. En effet c'est la politique qui fixe les buts de
guerre. Il existe donc une intime liaison entre le politique et le militaire.
C'est ce qu'exprime la formule célèbre de Clausewitz :
« la guerre est la simple continuation de la politique, mais, par
d'autres moyens » (Géré, 1999 :45). Il faut
néanmoins préciser qu'une fois ordonnée, à tort ou
à raison, la guerre doit être conduite au mieux possible par les
militaires. C'est ce qui a fait dire au général Friedrich Von
Bernhardi que « quand la guerre est résolue, le but militaire
se substitue aux fins politiques » (Von Bernhadi ,1913 : 194).
La politique fixe les buts de guerre alors que la stratégie
définit et met en oeuvre les moyens de la gagner.
3-LA CULTURE STRATEGIQUE
La culture stratégique est l'ensemble
des pratiques traditionnelles et des habitudes de pensée qui, dans une
société géographiquement définie, gouverne
l'organisation et l'emploi de la force militaire au service d'objectifs
politiques (Carnes, 1985). Elle témoigne de la difficulté qui
existe à dissocier la stratégie de la société et de
la culture où elle est élaborée. La culture
stratégique comme toute culture est acquise. L'éducation
apparaît dans ce contexte comme un vecteur essentiel de transmission de
cette culture particulière. De ce fait, la culture conformément
au principe d'ubiquité qui la caractérise, peut se retrouver
partout où il y a relation sociale. Le processus de socialisation
à une culture stratégique se fait à travers une double
dimension immatérielle et matérielle. Ainsi dans une
société donnée, un ensemble de valeurs, d'attitudes, de
pratiques traditionnelles formatent l`individu, et s'érigent pour lui en
principes et postulats fondamentaux dictés par la politique.
Intériorisés, ces principes et postulats régissent et
gouvernent naturellement l'organisation et la constitution de la force
militaire, ainsi que les buts que cette force est censée servir. Aussi,
l'étude d'une culture stratégique dans une société
donnée, doit-elle tenir compte des expériences spécifiques
de cette dernière. Cependant, comme le disait Clausewitz, il ne faut pas
que la grammaire de la guerre impose une logique qui ne soit pas celle de la
politique. C'est dans ce sens que Yitzhah Klein, cité par T. de
Montbrial et J. Klein définit la culture stratégique comme
l'ensemble des attitudes et croyances professées au sein d'un appareil
militaire à propos de l'objectif politique de la guerre et de la
méthode stratégique et opérationnelle la plus efficace
pour l'atteindre (De Montbrial et Klein, 2000 :152). Les militaires ont
à ce moment besoin d'un schéma intellectuel cohérent qui
leur indique la conduite à suivre. Ce schéma, c'est la culture
stratégique. Néanmoins cette définition de Yitzhah Klein a
le double défaut de limiter la culture stratégique à un
appareil militaire et de la réduire au temps de
« guerre » (Colson, 2006).
L'analyse de six facteurs déterminant d'une culture
stratégique, permet de déterminer non seulement une culture
stratégique dans un pays, mais aussi de cerner les
spécificités nationales. Ces facteurs sont : l'assise
géopolitique ; les relations internationales : qui sont les
alliés ? Les ennemis ?comment fonctionne le système
international? L'idéologie et la culture politique ; la culture
militaire ; les relations entre civils et militaires ; l'armement et
la technologie militaire (Colson, 2006). Alaistair Johnston cité
par T. De Montbrial et J. Klein préconise que la culture
stratégique soit également perçue en fonction d'un
paradigme central qui met en exergue de façon générale,
deux options stratégiques dans une politique de défense :
une stratégie offensive qui privilégie l'efficacité
présumée de l'usage de la force. Et, une stratégie
défensive dans laquelle la guerre est jugée plus ou moins
inévitable ou aberrante (De Montbrial et Klein, 2000 :154).
En ce qui concerne la place de la technologie et des
équipements militaires dans une culture stratégique, Joseph
Henrotin estime que les équipements possèdent une charge
culturelle forte. Ainsi aux Etats-Unis, l'architecture de l'A-12 est-elle
certes orientée vers sa mission, mais aussi vers sa survivabilité
et celle de son équipage, prioritaire pour les armes aériennes
américaines depuis le Vietnam, et en partie pour des raisons techno
stratégiques. L'utilisation de PGM, techniquement
déterminée par la furtivité ressort aussi d'une vision
culturellement enracinée et cherchant à contrôler
l'application de la force. Plusieurs études ayant pour thèmes des
équipements majeurs (Chars et navires) viennent appuyer la thèse
des traits culturels marquant un matériel (Henrotin, 2006 :3-4).
L'on peut au bout de l'étude d'une culture
stratégique, valablement déterminer quelle est l'option
stratégique choisie par un pays. L'on distinguera selon les
préférences une conception idéaliste, libérale et
défensive de la guerre d'une part (Massie 2006 :2) et d'autre part
une conception réaliste, qui met l'accent sur l'utilité de la
guerre, sur la menace que représente l'adversaire et sur
l'efficacité de l'usage de la force (De Montbrial et Klein,
2000 :154).
4-LA CULTURE MILITAIRE
Au début des années 1990, Applegate et Moore
développent une approche plus restrictive de la culture
stratégique qu'est la « culture militaire ». Elle
se définit comme un ensemble d'idées, de croyances, de
préjugés et de perception qui déterminent la
réponse d'une armée aux tâches que lui assigne
l'autorité politique (De Montbrial et Klein, 2000 :152). La
culture, décrite comme « la base de l'efficacité
militaire » peut contribuer à expliquer les
« motivations, aspirations, normes et règles de
conduite », ce que l'on pourrait appeler l'essence de l'armée
(English ,2004). La doctrine officielle constitue une partie du
caractère d'une armée. Dans ce sens, Applegate et Moore
cités par Thierry De Montbrial et Jean Klein distinguent deux types de
culture militaire : la culture d'attrition et la culture de
mobilité. Dans la première, la défensive est perçue
comme la forme la plus forte de la guerre. On croit que la victoire ne peut
être obtenu qu'en attaquant la force principale de l'ennemi,
c'est-à-dire sa puissance de combat et ses unités tactiques. La
supériorité matérielle et numérique est donc
essentielle. Dans la culture de mobilité, l'offensive est vue comme la
seule façon d'obtenir la décision. On attaque l'ennemi là
où il est physiquement ou psychologiquement le plus faible (De
Montbrial et Klein, 2000 :152).
La culture militaire constitue un des fondements de la
compétence de l'officier et lui permet d'optimiser ses actions à
finalité opérationnelle et sa crédibilité dans un
environnement militaire, civil et administratif concurrentiel. Elle est
nécessaire à tous les cadres d'une armée
professionnelle : les engagements opérationnels placent le chef
militaire quel que soit son niveau, dans une situation où, souvent
isolé, il doit pouvoir faire preuve dans l'urgence de discernement et
d'intelligence face à une situation. Elle est de surcroît un
pré requis indispensable pour tous les officiers appelés à
tenir des postes d'influence au niveau politico-militaire, ou des postes de
conception en Etat-major (« Directive initiale ; culture
militaire », 2006).
La culture militaire a pour objet d'aider le militaire
à comprendre la guerre et la violence, afin de pouvoir replacer son
action dans les contextes toujours nouveaux et complexes, tout en lui
permettant de saisir les enjeux et les interactions au sein de la
société et du système international, ainsi que les forces
qui en constituent le ressort. A cet effet, l'appropriation d'une culture
militaire a lieu dès la formation initiale et tout au long du cursus de
formation (« Directive initiale ; culture militaire »,
2006).
5- LA DEFENSE NATIONALE
A partir du besoin de sécurité, l'idée
de défense s'est forgée à travers les siècles pour
aboutir à la notion de défense nationale. Selon la loi
N°67/LF/9 du 12 Juin 1967 portant organisation générale de
la défense au Cameroun, et d'après le préambule du
décret N°75-700 du 6 Novembre 1975 portant règlement de
discipline générale dans les forces armées, la
défense est « le moyen d'assurer en tout temps, en toute
circonstance et contre toutes les formes d'agression, la sécurité
de l'Etat et l'intégrité territoriale dans le cadre de la
souveraineté nationale ». Bien que la défense s'appuie
sur bien d'autres réalités (historiques, démographiques,
économiques, sociales), elle se manifeste essentiellement par
l'existence des forces armées. Conformément à l'article 8
de la constitution du 18 Janvier 1996, et aux textes en vigueur, le
Président de la République est le chef des forces armées.
Il veille à la sécurité intérieure et
extérieure de la République. Au Cameroun « le
Ministère de la Défense est placée sous l'autorité
d'un Ministre délégué à la Présidence de la
République » (Article 1er du décret
N°2001/177 du 25 Juillet 2001 portant organisation du Ministère de
la Défense). L'article 2 de ce même décret précise
que : « les forces de défense du Ministère de la
Défense comprennent : les forces de la Gendarmerie Nationale, les
forces de l'Armée de terre ; les forces de l'Armée de
l'air ; les forces de la Marine nationale ».
Les types d'agression peuvent être multiples. La
défense revêt des formes différentes selon les domaines
menacés ainsi que précise l'ordonnance française du 7
janvier 1959 : « loin de constituer un domaine isolé, la
défense doit embrasser l'ensemble des activités du
pays ». C'est pourquoi à coté du volet militaire de la
défense, l'on peut distinguer trois volets non militaire :
diplomatique, civil et économique.
La « défense diplomatique » est
assurée par le ministère des Relations Extérieures. La
diplomatie vise à résoudre les rivalités et les conflits
entre nations sans avoir recours aux armes. L'économie est un facteur
essentiel de la défense. Car la puissance économique conditionne
la capacité de défense Nationale. Le Ministère de
l'intérieur est responsable de la défense civile .Une liaison
très étroite est prévue entre le Ministère de la
défense et le Ministère de l'intérieur pour deux raisons
essentielles : d'une part ces deux forces de défense se
conditionnent et se renforcent mutuellement. D'autre part, l'autorité
militaire peut être appelée à fournir des moyens à
l'autorité administrative et surtout à recevoir la
responsabilité du maintien de l'ordre et de la coordination des mesures
de défense civile avec les autres opérations militaires dans une
zone déterminée sur décision du gouvernement. La
défense civile répond donc à trois objectifs : le
maintien de l'ordre, la sécurité civile et la protection du moral
de la population et de sa volonté de résister. Au final, ces
trois volets non militaires de la défense se caractérisent par
leur caractère paisible et pacifique, tandis que la défense
militaire fait surtout appel aux forces armées et tend vers l'action
militaire. Les missions de défense confiées aux forces
armées commandent les capacités opérationnelles que doit
posséder l'appareil militaire à savoir la dissuasion, la
prévention, la protection du territoire national et la projection hors
des frontières nationales.
6-LA FORMATION MILITAIRE
Selon l'article premier du titre 1 du décret du 6
Novembre 1975 portant règlement de discipline générale
dans les forces armées : « l'armée doit
être opérationnelle pour faire face aux périls qui peuvent
assaillir la nation. Elle doit l'être professionnellement, mais aussi et
surtout moralement. La formation militaire développe les qualités
morales :sens de l'honneur, amour de la patrie,respect et défense
de ses lois, sens du service, adhésion à une discipline sans
faille, conscience des devoirs et des responsabilités des chefs et des
subordonnés et volonté de les assurer .Les rapports personnels
qui s'établissent ainsi dans l'exécution du service lui
confère toute sa valeur ;il se développe dans les
activités quotidiennes et dans les manifestations collectives
préparant les unités à l'action »
(Préambule du décret de 1975). Axée sur le combat en vertu
des missions fixées par le chef de l'Etat, exigeant une totale
abnégation, la formation des personnels militaires doit leur permettre
d'acquérir les qualités morales, physiques et professionnelles
nécessaires à l'accomplissement du devoir, aux difficultés
du service et aux dangers des combats. Quand nous parlons de personnels
militaires, il s'agit des officiers, des sous officiers et des militaires de
rang. Notre travail portera donc sur les personnels officiers d'active des
forces de défense camerounaises et non sur les personnes militaires non
officiers et les militaires de rang. Ceci parce qu'un important écart
de statut entre les officiers et le reste des personnels est une
caractéristique importante de la hiérarchie militaire. Elle
trouve selon Caplow et Venesson, en partie son origine dans la distinction du
XVIIIe siècle entre les nobles et le peuple (Caplow et
Venesson, 2006 :16). Et aussi parce que les officiers constituent la
classe la plus proche du politique et auprès de qui le politique
requiert des avis lors de la prise de décisions stratégiques.
La formation se réalise en effet dans les centres de
formation académiques et écoles militaires de formation. Le
premier impératif d'une armée étant de recruter, le
décret N°2001/187 du 25 juillet 2001 fixant les conditions de
recrutement et d'admission dans les écoles militaires de formation des
officiers détermine le profil des hommes et des femmes qui sont retenus
dans ces écoles. L'article 2 définit les quatre filières
de recrutement que sont : le tronc «A », le tronc
« B », le tronc « C » et le tronc
« D ». « Dans le cadre de la coopération
militaire entre le Cameroun et plusieurs pays à travers le monde, le
Cameroun bénéficie de la formation de ses militaires dans
pratiquement tous les domaines des armes. » (Entretien, Colonel
Tetmoun (chef de renseignement militaire), novembre 2006). C'est dans ce
contexte que l'article 7 du décret sus-cité définit les
conditions qui doivent être remplies par les Camerounais désirant
être formés dans ces écoles militaires
étrangères. En effet, cet article dispose
que : « les élèves officiers formés
avec l'accord du gouvernement dans les mêmes conditions que ceux du
tronc « A » dans les écoles militaires
étrangères figurant sur une liste arrêtée par le
Président de la République , suivent le régime du
tronc « A » .
Dans toutes les écoles militaires du monde, la
formation peut être initiale .C'est-à-dire suivie par des
personnes qui accèdent à l'école en tant que civile, et y
suivent une formation d'officier. Elle peut aussi être continue dans
le sens où elle est un stage de perfectionnement dans les écoles
de perfectionnement ou dans les écoles d'enseignement militaire
supérieurs (entretien, Commandant Mabaly (chef bureau du suivi de la
formation initiale et de la formation continue : BSFIFC), octobre2006).
Les programmes d'enseignements dispensés dans les
écoles militaires de formation camerounaise ,sont arrêtés
par le Ministre chargé de la défense après avoir
été préparés par le commandant de l'école et
approuvé en conseil de direction ( article 6 du décret
N°2004/180 du 1 juillet 2004 portant réorganisation de
l'école militaire interarmées) .Par contre, les programmes
d'enseignement dispensés dans les écoles nationales à
vocation régionale (ENVR) situées au Cameroun, associent la
France à la définition des programmes de formation ;le
respect de ce critère est garantie par la présence
systématique d'un directeur des études (ou fonction
équivalente) et de coopérant militaire français au sein de
chaque ENVR (Frères d'armes, 2006 :12).
III-REVUE DE LA
LITTERATURE
Le concept de culture stratégique a déjà
retenu l'attention de plusieurs auteurs tant occidentaux qu'africains.
Colson Bruno dans « la culture stratégique
américaine », FEDN, Economica ,1993 présente à
la lumière de la culture stratégique américaine, ce qu'est
une culture stratégique. Il ressort d'une part de cette étude
que, la culture stratégique, dans une société
donnée, doit obéir à un certain nombre d'exigences propres
au concept. D'autre part, il apparaît après étude de la
culture stratégique américaine que cette dernière vise la
victoire militaire rapide et favorise l'offensive à outrance. La
stratégie américaine est lente à se mette en action, mais
est implacable, dès la décision de s'engager. Les
américains n'aiment guère les conflits prolongés
(Vietnam), les conflits de « basse intensité »
(engagement en Afrique ou en Amérique latine) ou les guerres de
« type limité ». Le soutien populaire joue par
ailleurs un rôle important dans la réussite des armées.
De même, dans « la culture stratégique
française »
www.stratisc.org (2006) Colson
Bruno pose quelques jalons d'un approfondissement du concept de culture
stratégique. Il ressort de cette étude que, la culture
stratégique française est défensive, terrienne et
tournée plus vers l'exécution que vers la conception. Elle
privilégie le combat plutôt que le soutien. Cette posture
confère aux soldats français un savoir-faire unanimement
reconnu.
Justin Massie dans son article intitulé :
« une culture stratégique idéaliste, libérale et
défensive ? Analyse de l'énoncé de politique
internationale du Canada »
http://cdfai.org (8 décembre 2006)
fait une analyse du contenu de l'énoncé de politique
internationale du Canada, au regard du concept de culture stratégique.
En fait, dans son analyse, il se pose la question de savoir si
l'énoncé de politique internationale du Canada, témoigne
d'une culture stratégique, d'une vision stratégique
cohérente, capable de donner un sens clair aux comportements du Canada
sur la scène internationale. Au terme de son étude, il conclu que
la politique étrangère canadienne, fait preuve
d'« idéal politique », ce qui détermine, les
perceptions canadiennes de la menace et des moyens adéquats pour les
contrer.
Sur un tout autre plan en Afrique, Niagalé
Bagayoko-Penone dans l'article intitulé « culture du maintien
de la paix et formation militaire des armées Ouest
africaines » in Revue Internationale de sociologie (Niagalé,
2006) a eu recours au concept de culture stratégique dans ses travaux
sur le maintien de la paix en Afrique de l'Ouest. Ceci dans le but de saisir la
nature des normes et valeurs du maintien de la paix dans les cursus de
formation militaire en Afrique et transmise à la fois par les acteurs
traditionnels que sont les coopérants militaires mais aussi les acteurs
nouveaux que sont les ONG.
Au Cameroun, il n'existe pas d'ouvrages qui traitent de la
culture stratégique camerounaise.
IV-PROBLEMATIQUE
La politique dans un Etat, est avant tout projet. Le passage
de la politique au stratégique, est le passage du dire au faire. La
politique énonce les finalités, désigne l'adversaire. En
fonction des ces données, la stratégie formule ses objectifs,
agence dans le temps et dans l'espace les moyens de les atteindre (Raysset et
Widemann, 1997 :4). La culture stratégique quant à elle
permet une réflexion préalable sur les déterminations de
ces objectifs, le poids des expériences historiques et des
préférences enracinées dans l'histoire. Pourtant au
Cameroun, aucun chercheur n'a encore traité de la problématique
de l'existence d'une culture stratégique camerounaise. C'est dans ce
contexte que s'inscrit notre travail sur la culture militaire qui est un
facteur structurant de la culture stratégique, prédisposant
à la formation d'une culture stratégique camerounaise. Ceci
étant, comment s'acquiert la culture militaire au Cameroun ?
Comment se transmet-elle ? L'académie militaire étant
perçue comme vecteur de transmission de cette culture, comment se
structure la culture militaire spécifiquement Camerounaise à
partir d'un foisonnement de différentes cultures militaires
étrangères ?
V-HYPOTHESE
Par rapport
à la problématique de l'existence d'une culture
stratégique Camerounaise et à notre choix de privilégier
la variable militaire, notre hypothèse est la suivante : les
officiers Camerounais font l'objet d'une socialisation à des cultures
militaires particulières dans les différentes écoles
militaires fréquentées. Dès lors que le processus de
socialisation scolaire est marqué par une pluralité
d'écoles ne partageant pas la même culture militaire, il en
découle une porosité de la culture militaire camerounaise,
prédisposant à la formation d'une culture stratégique
hybride.
VI-LA METHODE
-LE
CONSTRUCTIVISME
Pour parvenir à l'explication du caractère
poreux de la culture militaire Camerounaise, qui s'enrichit par le biais des
écoles de formation militaire à travers le monde, nous nous
appuierons sur la méthode constructiviste.
Le constructivisme social est une approche théorique
dans laquelle, la réalité sociale tend à être
appréhendée comme construite, et non comme
« naturelle » ou « donnée »
une fois pour toute (De Singly (dir.),1999 :6). L'approche constructiviste
dont il est question dans le cadre de ce travail, est celle
développée par Pierre Bourdieu, en l'occurrence le
constructivisme structuraliste. Deux notions clés structurent cette
approche. Il s'agit des notions de « champs » et
d' « habitus ». Les structures sociales que Bourdieu
appelle champs renvoient à des structures objectives,
indépendantes de la conscience et de la volonté des agents qui
sont capables d'orienter ou de contraindre leurs pratiques ou leurs
représentation. Le concept d'habitus quant à lui, est à
l'origine un mot latin issu du grec et utilisé par Aristote pour
désigner les dispositions acquises (Grawitz, 2001 :151). Cela
représente pour Bourdieu « un ensemble de systèmes de
dispositions durables et transposables » (Bourdieu, 1984 :88).
Le constructivisme sur le plan international, insiste également sur le
caractère « socialement construit » des relations
internationales. L'habitus en fait, s'impose comme une faculté
médiatrice, dépassant les oppositions entre les alternatives
classiques : objectivisme et subjectivisme, individu et
société, inconscient et conscient.
Ainsi, pour bien percevoir dans le cadre de notre
étude, la place de l'individu, du militaire, dans une école de
formation fréquentée (ou la place d'un pays dans le
système international) nous prendrons l'exemple d'un groupe. Il faut
comprendre qu'en passant d'un groupe social à un autre, les pratiques
sociales subissent des modifications sensibles. Ce qui signifie qu'en passant
d'une école à l'autre les pratiques du militaire subissent les
mêmes modifications. L'analyse laisse ainsi apparaître
l'«habitus » et l'«ethos »3(*)des différents groupes en
question c'est-à-dire « l'intériorisation des
régularités objectives et communes » (Bourdieu et al
,1965 :24). Car le groupe subordonne la pratique à la règle
collective en sorte que la culture propre qui caractérise un individu
est influencée par un système de schèmes de perception, de
pensée et d'appréciation commun à tout un groupe.
Ainsi, nous verrons qu'une fois de retour au pays, les
militaires Camerounais stagiaires dans les pays étrangers adressent des
rapports au Commandement des Ecoles et Centre d'Instruction Interarmées
(COMECII) dans lesquels ils font non seulement le bilan de leur formation,
mais aussi des propositions pour un enrichissement de la défense
nationale, à la lumière de leurs expériences
étrangères (service du COMECII). La décision prise par la
haute sphère de l'Etat (Président de la République sous
le conseil de ses collaborateurs en matière de défense), peut
s'articuler sur deux points : premièrement, l'intérêt
propre du groupe qui est ici la communauté internationale, peut
correspondre à l'intérêt propre d'un pays. Le Cameroun,
pays ayant une spécificité nationale en matière de
défense, produit de son histoire, adhère naturellement dans ce
contexte à l'intérêt du groupe. Deuxièmement,
l'intérêt de la communauté internationale peut ne pas
correspondre directement avec l'intérêt du pays, mais le
gouvernement camerounais décide tout de même d'y adhérer
pour ne pas être à la marge de l'environnement
international.
Dans cette perspective, l'habitus se présente comme
cette faculté médiatrice représentant une capacité
de « reproduction » (recueil du passé et production
d'un avenir conforme) et une capacité
d'« invention ». Ainsi, ce dernier point qu'est
l'« invention » nous permet de comprendre que
l'intérêt des acteurs, même en matière de
défense est aussi déterminé par le contexte international
dans lequel ils évoluent. C'est dans ce sens qu'Alexander Wendt
précise en ce qui concerne le constructivisme dans les relations
internationales que : les structures de l'association humaine sont
déterminées principalement par des idées partagées
plutôt que par la quête des forces matérielles ; les
identités et les intérêts des acteurs sont construits par
ces idées partagées, ils ne sont pas donnés (Wendt, 1987).
La méthode constructiviste constituera donc l'axe
principal de notre raisonnement mais, celle-ci ne peut reposer que sur des
recherches empiriques.
VII-TECHNIQUES DE
RECHERCHE
Nous avons eu recours à la base de ce travail,
à la technique classique de recherche, qu'est l'enquête
documentaire. Cette enquête nous a porté simultanément dans
les bibliothèques centrales des Universités de Yaoundé I
et II, à la Fondation Paul Ango Ela de Géopolitique en Afrique
Centrale, au Centre Culturel Français (CCF) de Yaoundé, à
la bibliothèque de l'Ecole Militaire Interarmées du Cameroun
(EMIAC) destinée aux élèves militaires de l'EMIAC et
à ceux de l'école de l'Etat-major (EEM).4(*) Nous avons également
mené une enquête de terrain, qui nous a porté au
Ministère de la Défense, à l'EMIAC, à l'Ecole
D'Etat-major, au Cours Supérieur Interarmées de Défense
(CSID), à la Gendarmerie Nationale, au Quartier Général
des Forces Armées Camerounaises (FAC). Nous avons pu obtenir des
informations qui sont cependant limitées ; car marquées du
sceau du « secret défense » par certains militaires
qui personnellement estiment que certaines informations que nous recherchons
sont et doivent rester « secret défense ».
Nous verrons dans le cadre de ce travail que la dialectique de
l'extraversion et de l'introversion dans la formation des officiers
camerounais, est marquée par une prédominance camerounaise
puisqu'une bonne partie des officiers camerounais sont formés sur
place ; une relative prédominance de la France, suivie par d'autres
pays à l'instar du Maroc, de la Grèce et de la Chine (chapitre
1). L'on constate de ce fait que la socialisation pluraliste des officiers par
les écoles militaires, a lieu grâce aux enseignements qui y sont
dispensés (chapite2). Le résultat se présente donc sous la
forme d'une culture militaire Camerounaise poreuse (chapitre3).
CHAPITRE 1 : LA DIALECTIQUE DE L'INTROVERSION ET DE
L'EXTRAVERSION DANS LA FORMATION DES OFFICIERS CAMEROUNAIS
Le 11 Novembre 1959, l'armée
camerounaise est créée par l'Ordonnance N° 59/57 portant
organisation générale de la défense. Par le terme
« armée », le législateur entendait
l'armée de terre. L'énorme structure interarmées actuelle
ne date que de 19675(*). En
1972, le Cameroun devient une République Unie. Cette unification
clôt le processus de fusion des éléments de l'armée
camerounaise francophone et de l'armée camerounaise anglophone (Bolo
Bolo, 2006). La défense nationale, depuis 1959, se manifeste
essentiellement par l'existence de forces armées. Les forces
armées ou forces de défense du Ministère de la
Défense comprennent selon l'Article 2 du décret N° 2001/177
du 25 juillet 2001 les forces de la gendarmerie nationale, les forces de
l'armée de l'air et les forces de la marine nationale. Puisqu'une
culture stratégique émerge d'un vaste ensemble de pratiques
internationales : militaires, diplomatiques et économiques
impliquant une communauté étatique sur la scène
internationale (Colson, 2006), pour comprendre une guerre ; une politique
de défense ou tout simplement une culture militaire, l'on doit
s'interroger sur les logiques propres aux organisations militaires, les
compétences des personnels et l'influence des généraux. Il
s'agit pour nous, dans cette partie, au-delà de cette tentative de
familiarisation avec le monde militaire, de montrer comment la diversité
nationale des filières de formation des officiers camerounais peut
contribuer à l'élévation du niveau de compétence
des personnels de l'armée nationale.
Dans cette perspective, nous constatons que le
développement des forces armées modernes est marqué par
une différenciation croissante dans trois dimensions : la dimension
verticale des rangs et du commandement, la dimension horizontale de la
spécialisation fonctionnelle et la dimension spatiale de la zone qui
renvoie ici aux terrains d'opérations (Caplow et Venesson,
2000 :16). C'est dans ce contexte que l'on remarque la relative
prédominance de la France et de la Chine dans le processus de formation
des officiers camerounais à l'étranger (Section 1). Nous verrons
par la suite l'impact de cette formation dans l'évolution de la
carrière du militaire au Cameroun (section2).
SECTION 1 : LA FRANCE
ET LA CHINE, PRINCIPAUX PARTENAIRES DU CAMEROUN DANS LA FORMATION DES
OFFICIERS
Les officiers camerounais sont pour la
plupart formés au Cameroun (entretien, capitaine de frégate
Njofang (Directeur des études et des programmes à l'EMIA), mars
2007). En ce qui concerne la formation à l'étranger, l'on
constate une relative prédominance de la France et de la Chine dans
certaines armées à l'instar de l'Armée de l'air et de la
Marine Nationale. Le Cameroun ne dispose pas encore de moyens techniques et
d'infrastructures appropriées pour assurer une formation
actualisée des officiers camerounais dans ces domaines. Cependant, il
est à noter que les efforts sont faits dans ce sens au Cameroun, puisque
l'Ecole Militaire Interarmées du Cameroun, forme tout de même un
certain nombre d'officiers de l'Armée de l'air et de la Marine
Nationale. Il sera question pour nous d'analyser la dialectique de
l'extraversion et de l'introversion dans la formation des officiers camerounais
par le truchement des dimensions verticale des rangs et du commandement par
armée (paragraphe 1), horizontale de la spécialisation par arme
et spatiale des théâtres d'opérations (paragraphe 2).
PARAGRAPHE 1 : LA DIMENSION
VERTICALE DES RANGS ET DU COMMANDEMENT, LA PREDOMINANCE D'UNE
FORMATION CAMEROUNAISE
Conformément à l'article 36 du
décret du 6 Novembre 1975 portant règlement de discipline
générale dans les forces Armées, les armées
relèvent principalement du Président de la République
qui est leur chef suprême. Celui-ci assure l'unité de l'Etat et
veille à la sécurité intérieure et
extérieure de la Nation. Le Ministre de la Défense est quant
à lui, responsable de la mise en oeuvre de la politique de
défense du gouvernement (article premier du décret
N°2001/182 du 25 juillet 2001). Le Secrétaire d'Etat à la
défense chargé de la Gendarmerie, le chef d'Etat-major des
Armées et les chefs d'Etat-major des différentes armées
sont placés sous l'autorité directe du Ministre chargé de
la Défense. L'Article 2 de ce même décret précise
que le Chef d'Etat-major des Armées assiste le Ministre chargé de
la Défense dans ses attributions relatives à l'emploi des forces
et à leur organisation générale. Il est consulté
sur l'orientation à donner aux travaux de planification et de
programmation. Il peut être chargé par le Ministre de toute
étude intéressant les armées.
Le chef d'Etat-major des Armées a autorité sur
les chefs d'Etat-major de l'Armée de Terre, de l'Armée de l'Air
et de la Marine lorsque des fonctions opérationnelles lui sont
confiées ainsi que lors de la coordination des travaux relatifs soit
à ses propres attributions soit aux actions interarmées de
préparation des forces. L'article 3 souligne quant à lui qu'en
temps de crise ou de guerre, sur décision du Président de la
République, le chef d'Etat-major des armées peut par
décret être nommé chef d'Etat-major Général
des Armées.
Après avoir précisé ces dispositions
générales qui réglementent la hiérarchie des rangs
au plus haut niveau de l'armée camerounaise, soulignons à
présent que les forces armées sont stratifiées en
plusieurs dimensions. La plus importante et aussi la plus explicite est celle
des grades. Chaque membre des forces armées a un rang qui est à
la fois un rôle et un statut. Le grade spécifie les acteurs
auxquels il doit déférence et obéissance et ceux qu'il
peut commander ; mais il comporte un ensemble complexe de droits, de
devoirs et d'attentes. A la différence des statuts assignés dans
de nombreuses organisations civiles, le système de grades militaires
possède certaines propriétés presque
mathématiques : au niveau des individus, il est ordonné et
transitif. Une pyramide des grades est ordonnée, il est toujours
possible de déterminer lequel des deux membres est le supérieur
de l'autre. Ce n'est pas le cas de tous les employés d'une banque par
exemple. Dans les armées, deux individus peuvent toujours être
classés selon leur grade. Par exemple, les capitaines de l'armée
de Terre ont tous une ancienneté dans le grade (liée de
manière complexe au moment où ils ont été promus
lieutenant). L'officier qui a passé beaucoup de temps dans
l'armée est le supérieur en grade. Si ces deux critères ne
permettent pas de résoudre le problème, l'officier le plus
âgé est le supérieur. Les grades sont aussi
transitif : si A est le supérieur de B et si B est le
supérieur de C, alors A est nécessairement le supérieur de
C (Caplow et Venesson, 2000 :28).
Nous étudierons dans cette partie non seulement la
hiérarchie des rangs et du commandement par armée, mais aussi les
filières de formation prépondérante des différentes
forces armées camerounaises que sont : la Gendarmerie Nationale et
l'Armée de Terre (A), l'Armée de l'Air et la Marine Nationale
(B).
A-GENDARMERIE NATIONALE ET ARMEE
DE TERRE, LE PRIMAT DE LA FORMATION INITIALE LOCALE
· GENDARMERIE NATIONALE
Selon l'article premier du décret N°2001/181 du
25 juillet 2001 portant organisation de la Gendarmerie Nationale, cette
dernière est une composante des forces de défense. Son action
s'exerce sur toute l'étendue du territoire national et plus
particulièrement dans les zones rurales et sur les voies de
communication. Placée sous l'autorité du Ministère
chargé de la Défense, la Gendarmerie Nationale est une force
à caractère militaire, assurant également des missions
civiles. L'article 2 qui souligne les missions générales de la
Gendarmerie Nationale précise que « sous l'autorité du
Ministère chargé de la Défense, la gendarmerie remplit des
missions au profit du Ministre de l'Administration Territoriale et du Ministre
de la Justice. Elle se tient également à la disposition des
autres chefs de départements ministériels dans le cadre des
missions qui lui sont dévolues conformément à la
réglementation. La Gendarmerie Nationale exécute les missions de
police administrative et de police judiciaire, dans les conditions
fixées par les textes en vigueur ». Ses missions
particulières selon l'Article 3 portent sur : la défense
nationale, le maintien de la Sûreté intérieure de l'Etat et
les missions de police militaire et de police judiciaire.
C'est également dans ce sens que Monsieur Meloupou
Jean-Pierre souligne que la Gendarmerie camerounaise reste essentiellement une
force de police judiciaire et militaire. « Le décret 60-280 du
31 Décembre 1960 qui l'institue précise que la Gendarmerie
nationale est une force militaire chargée, sous la direction des
autorités administratives et judiciaires de veiller à la
Sûreté publique, d'assurer le maintien de l'ordre et
l'exécution des lois » (Meloupou, 1991). Il n'est pas vain de
faire intervenir à ce niveau la distinction faite par Monsieur Meloupou,
entre « l'acte de défense Nationale » de celui
« du maintien de l'ordre public ». En effet, il
précise que dans le concept de défense nationale, on peut relever
qu'il y a un patrimoine, au moins un territoire et des valeurs collectives
communs à défendre. C'est ce patrimoine qui fait
l'adhésion de l'ensemble de la collectivité à l'effort de
défense. C'est ici qu'intervient la démarcation entre la
défense nationale et le maintien de l'ordre. L'ingérence
étrangère directe ou indirecte sépare la défense
Nationale des moyens policiers et pénaux répressifs dans un pays
pour faire régner l'ordre et la paix sociale menacée de
l'intérieur (Meloupou, 1991). Dans cette mesure, les officiers de la
Gendarmerie Nationale sont donc appelés : «
officiers de police judiciaire militaire » (entretien, lieutenant
pierre Yigi (instructeur en police judiciaire), janvier 2007).
Dans la Gendarmerie Nationale comme dans toute autre
armée, la hiérarchie définit l'ordre des grades. Le grade
consacre l'aptitude à exercer certaines fonctions. Il confère une
appellation, des prérogatives et comporte des obligations. A
égalité d'ancienneté dans le grade, l'ordre
hiérarchique résulte de l'ancienneté dans le grade
inférieur, lorsqu'il s'agit des militaires d'une même
armée. L'ordre hiérarchique est déterminé par
l'ordre d'inscription sur le texte de nomination (article 37 Décret du 6
Novembre 1975 portant règlement de discipline dans les forces
armées et article 11 du Décret du 25 Juillet 2001, portant statut
particulier du corps des officiers d'Active des forces de Défense). De
même, l'article 46 du décret de 1975, définit le
commandement comme « l'exercice de
l'autorité ». La subordination est « l'état
d'obéissance dans lequel se trouve le personnel soumis à
l'autorité du chef ». Le commandement et la subordination
résultent du grade et des fonctions réciproquement remplies, ce
qui implique que, dans l'exercice de leurs fonctions, les militaires sont
subordonnés les uns aux autres selon l'ordre hiérarchique. Cette
règle peut comporter des exceptions lorsque des militaires
reçoivent délégation d'autorité pour exercer des
fonctions particulières.
Aussi, la hiérarchie des grades des officiers de la
Gendarmerie est-elle précisée par l'Article 38 du Décret
de 1975. Nous procéderons par un classement des officiers
généraux aux officiers subalternes. Ainsi les différents
grades des officiers généraux du plus haut niveau au plus bas
sont : Général de Division, Général de
Brigade. Tandis que les officiers Supérieurs comptent de façon
décroissante les grades de colonel, lieutenant-colonel et chef
d'escadron. Les officiers subalternes, dans une hiérarchie
décroissante ont comme grades, ceux de capitaine, lieutenant et
sous-lieutenant.
Les officiers de la Gendarmerie Nationale sont à la
base de leur formation d'officier d'armée des officiers d'infanterie de
l'armée de terre. C'est ensuite qu'ils suivent une année
d'application à l'école de Gendarmerie. La formation au
métier de Gendarme se fait tant au Cameroun qu'à
l'étranger. Le Cameroun forme le plus grand nombre de gendarmes. Les
officiers de la gendarmerie nationale formés à l'étranger
dans le cadre de la coopération militaire entre le Cameroun et les pays
amis ont pu bénéficier d'une formation polyvalente, leur
permettant de s'adapter aux évolutions techniques, sociales et
internationales.
· ARMEE DE
TERRE
Conformément à l'article 1er
du décret N°2001/183 du 25 Juillet 2001 portant
réorganisation des formations de combat de l'Armée de Terre,
« les formations de combat de l'Armée de Terre sont des
unités professionnelles qui participent avec les autres forces de
Défense à la défense des intérêts vitaux de
la Nation. Elles sont réparties sur l'ensemble du territoire national.
Leur organisation et leur soutien sont assurés sous la
responsabilité du chef d'Etat-major de l'Armée de
terre ». Le décret sus-cité, parle de
« formation de combat de l'Armée de Terre » car la
défense du territoire, en temps normal, est assurée par des
moyens de police, de gendarmerie et de sécurité civile. En
situation de crise, la participation des armées est requise par les
préfets ou les gouverneurs qui gardent la direction des
opérations. En situation de crise majeure ou d'agression, le
gouvernement met en oeuvre la défense opérationnelle du
territoire ( D.O.T) qui comporte la participation des forces armées aux
actions de défense prévu par des plans de défense et la
conduite des opérations par le commandement militaire. La D.O.T est
assurée par l'ensemble des forces employées dans une manoeuvre
aéroterrestre d'ensemble. Ces forces proviennent essentiellement de
l'armée de terre. Selon le magazine français
« Armée de Terre », pour jouer un rôle
significatif dans le règlement des conflits tout en préservant
les conditions de l'autonomie stratégique nationale, l'armée de
terre doit offrir la gamme complète des moyens nécessaires pour
conduire un combat au sol ou près du sol (Armée de terre XXIe
siècle 2002 :3).
Les règles sus-citées à propos du grade
et du commandement dans la gendarmerie Nationale, valent également pour
l'armée de terre, ainsi que pour toutes les autres forces de
défense d'ailleurs. Il s'agit en l'occurrence des articles 37, et 46 du
Décret N° 75-700 du 6 Novembre 1975 portant règlement de
Discipline Générale dans les forces armées. De même
l'article 38 de ce même Décret souligne la hiérarchie des
grades des officiers généraux de l'armée de Terre. Il
s'agit des grades de Général de Division, de
Général de brigade comme à la gendarmerie Nationale. Les
officiers supérieurs comptent par contre, les grades de Colonel,
lieutenant-colonel et chef de bataillon. Les officiers subalternes ont comme
grade les suivants : capitaine, lieutenant, sous lieutenant.
Les officiers de l'Armée de Terre sont formés
pour la plupart au Cameroun depuis la création de l'armée
camerounaise en 1959. Ceci d'autant plus que l'on sait qu'à sa
création, l'armée camerounaise ne comptait que les forces
terrestres (Bolo Bolo, 2006). Les officiers de l'armée de terre, en
l'occurrence ceux qui ne sont pas formés à la base au Cameroun,
le sont en France et au Maroc ainsi que dans plusieurs autres pays. C'est ainsi
que sur une période de trois ans, la France forme en moyenne 16
officiers Camerounais dans le cadre de l'armée de terre. Tandis que le
Maroc qui ne forme les camerounais que depuis 1980 forme sur une période
de trois ans à peu près une trentaine d'officiers camerounais. La
Chine quand à elle accueille les officiers camerounais depuis
l'année 2000. En ce qui concerne le domaine de l'armée de terre,
elle forme en moyenne 66 officiers camerounais sur une période de trois
ans. Précisons que ce nombre d'officiers camerounais formés par
la Chine augmente au fil des années (BSFIFC : Ministère de
la Défense (MINDEF).
B-L'ARMEE DE L'AIR ET LA MARINE,
LE PRECIEUX CONCOURS DE LA COOPERATION
· L'ARMEE DE
L'AIR
L'article premier du Décret N° 2002/037 du 04
Février 2002 portant création et organisation des forces de
l'armée de l'air dispose que les forces de l'armée de l'air sont
une composante des forces de défense dont l'emploi requiert
principalement l'utilisation de l'espace aérien. Ce sont des
unités professionnelles qui participent avec les autres forces de
défense à la défense des intérêts vitaux de
la nation. Les formations de combat de l'Armée de l'Air sont
regroupées sur l'ensemble du territoire national dans les bases
aériennes. Elles relèvent de l'autorité du commandant de
la Base Aérienne qui assure leur soutien. L'alinéa 2 de ce
même article précise que l'entraînement et le soutien des
forces de l'Armée de l'Air sont assurés par le chef d'Etat-major
de l'armée de l'Air. Elles sont placées pour emploi auprès
du chef d'Etat-major des Armées. L'exécution de leurs missions
est soumise à l'accord préalable du Président de la
République. Les forces de l'armée de l'Air qui comprennent les
forces aériennes ; les forces terrestres ; les
éléments de soutien et de formation (article 3 décret 2002
sus-cité) ont pour mission selon l'article 2, d'assurer : la
surveillance, la protection et la défense de l'espace
aérien ; le soutien et l'appui aux autres forces de
défense ; la surveillance et la protection des installations
aéroportuaires en liaison avec le Ministère des Transports.
L'article 38 du décret de 1975 présente
également la hiérarchie des grades des officiers de
l'armée de l'Air. De ce fait, les grades des officiers
Généraux de cette armée sont : Général
de Division aérienne ; les grades des officiers supérieurs
sont : colonel, lieutenant-colonel et commandant ; tandis que les
grades des officiers subalternes sont : capitaine, lieutenant,
sous-lieutenant.
Les officiers de l'Armée de l'Air formés au
Cameroun reçoivent à la base de leur formation d'officier, une
formation d'officier d'Infanterie de l'armée de Terre, à l'Ecole
Militaire Interarmées (EMIA) du cameroun. Après leur formation
d'officier d'infanterie, la plu part ont la possibilité depuis quelques
années de suivre un stage d'application qui leur sert de
spécialisation toujours à l'EMIA. Mais, certains suivent
également ce stage à l'étranger. Cependant, le Cameroun
dispose de moyens limités en matière de formation des officiers
de l'Armée de l'air. C'est pour cette raison qu'il a recours à
plusieurs grandes écoles d'officiers de l'Armée de l'air des pays
amis tels : la France, la Grèce, le Maroc et la Chine. Ceci dit,
sur une période de trois ans, 40 officiers camerounais sont
formés en moyenne en France dans le cadre de l'Armée de l'air, 21
au Maroc, 2 en Grèce et 28 en Chine (BSFIFC/MINDEF).
· LA MARINE NATIONALE
L'article premier du décret
N°2002/036 du 04 Février 2002, portant création et
organisation des Forces de la Marine Nationale, détermine la perception
qui doit être faite des forces de la Marine Nationale. En effet, les
forces de la Marine Nationale, sont une composante des forces de défense
dont l'emploi requiert principalement l'utilisation des espaces maritimes,
côtiers, lacustres et fluviaux. Ce sont des unités
professionnelles qui participent avec les autres forces de
défense : à l'action de l'Etat en mer. Elles sont
implantées le long de la Côte, des voies navigables
intérieures et au bord des lacs. L'entraînement et le soutien des
forces de la Marine Nationale sont assurés par le chef d'Etat-major de
la Marine Nationale. Elles sont placées pour emploi auprès du
chef d'Etat-Major des Armées. L'exécution de leurs missions est
soumise à l'accord préalable du Président de la
République. Selon l'article 3 du même décret, les forces de
la Marine Nationale comprennent : les forces de surface, composées
de Bâtiments et d'Embarcations ; les Forces de Fusiliers Marins et
de palmeurs de combat ; les éléments de soutien, notamment
des bases, des organismes spécialisés, des écoles et
centres d'instruction. L'article 2 quant à lui fixe les missions des
Forces de la Marine Nationale qui sont les suivantes : la surveillance, la
protection et la défense des espaces maritimes nationaux, fluviaux et
lacustres ; la surveillance, la protection et la défense des
installations essentielles à la vie de la Nation placées à
proximité immédiate du Littoral ; la conduite de l'action de
l'Etat en mer en liaison avec les autres forces de défense.
Comme dans les forces armées
précédentes, la hiérarchie des grades des officiers de la
Marine Nationale est soulignée par l'article 38 du décret de
1975. Ainsi, les officiers Généraux dans la marine Nationale
sont : le vice-Amiral et le contre-amiral ; les officiers
supérieurs sont : capitaine de vaisseau (l'équivalent du
grade de colonel), Capitaine de frégate (l'équivalent du grade de
Lieutenant-colonel) et capitaine de Corvette (l'équivalent du grade de
commandant : armée de l'Air ; chef de bataillon :
armée de terre ; et chef d'escadron : Gendarmerie nationale).
Et les officiers subalternes comptent dans leurs différentes grades,
hiérarchiquement : Lieutenant de vaisseau (l'équivalent du
grade de Capitaine dans le autres corps de l'armée) ; Enseigne de
vaisseau de première classe (l'équivalent du grade de
Lieutenant) ; Enseigne de vaisseau de 2ème classe
(l'équivalent du grade de sous-Lieutenant)
Les officiers de la marine nationale sont d'abord
formés pour la plupart au Cameroun, au titre de la formation initiale
avant d'aller à l'étranger pour leur application dans la marine.
(BSFIFC : MINDEF). Depuis 1961, il existe des officiers de la Marine au
Cameroun, mais le Cameroun ne disposant pas encore d'écoles de formation
des officiers spécialistes, les écoles des pays
étrangers6(*),
assurent pour l'essentiel la formation des officiers camerounais dans ce
domaine. L'on peut à titre illustratif, évaluer le nombre
d'officiers formés dans quelques pays sur une période de trois
ans. Ainsi, 6 officiers sont formés en France sur une période de
3 ans ; 13 sont formés au Maroc ; 4 officiers sont
formés en Grèce (BSFIFC).
Après avoir étudié la hiérarchie
des rangs et du commandement par armée ainsi que les filières de
formation diverses, nous allons dans une même perspective, faire une
étude horizontale de la spécialisation par arme et celle de la
dimension spatiale ou la distinction entre les bases internes et les
théâtres d'opération.
PARAGRAPHE 2 : LA DIMENSION
HORIZONTALE DE LA SPECIALISATION PAR ARMEE ET LA DIMENSION SPATIALE, LA
PREPONDERANCE D'UNE FORMATION FRANÇAISE.
La différenciation horizontale concerne la
spécialisation par armée et par spécialité (Caplow
et Venesson, 2000 :18). Nous étudierons dans une première
partie non seulement la dimension horizontale de la spécialisation par
armée (A), mais aussi les filières de formation
prépondérantes des différentes Forces Armées
Camerounaises. Dans une seconde partie, nous ferons une analyse de la dimension
spatiale (B).
A-LA DIMENSION HORIZONTALE DE LA
SPECIALISATION PAR ARMEE, LA RELATIVE HEGEMONIE DE LA FRANCE
En ce qui concerne l'Armée de Terre, elle avait au
moins l'équivalent de cinq armes différentes dans les
légions romaines : infanterie, cavalerie, artillerie (les
catapultes), génie (les machines de sièges), intendance et
Etat-major. Les formations terrestres actuelles comportent des unités
spécialisées dans la communication radio, le transport, le
renseignement, l'intendance, la santé, la justice, la construction et la
démolition, les relations publiques et de nombreuses autres fonctions
spécialisées. Cependant, la division entre l'infanterie et la
cavalerie (aujourd'hui, arme blindée cavalerie) est toujours
fondamentale. Au sein de l'armée de terre en France, on distingue les
armes de mêlée (Infanterie, arme blindée cavalerie), les
armes d'appui (artillerie, génie, aviation légère de
l'armée de Terre) et les armes de soutien (matériel, train,
transmission) (Caplow et Venesson, 200 :18). C'est dans le même sens
que le Magazine de l'Armée de terre énumère les
différentes spécialités apprises dans les écoles
d'application françaises : l'infanterie, l'arme blindée ,
cavalerie, l'artillerie sol-sol et sol-air, le génie, les transmissions,
le matériel, le commissariat de l'Armée de Terre
(« Armée de terre »,2002). La plupart de ces
spécialités sont également apprises à
l'école Militaire Interarmées du Cameroun qui, en matière
de spécialisation, forme la plus part des officiers camerounais.
Plusieurs officiers camerounais font également leur application à
l'étranger : France, Maroc, Grèce, Chine et bien d'autres
pays dans le monde (France 60 ; Maroc : 17et Grèce : 9 et
Chine : 25 officiers, tous sur une période de cinq ans
BSFIFC : MINDEF)7(*).
Les officiers de la Gendarmerie Nationale au Cameroun suivent
une année d'application à la Gendarmerie Nationale, après
avoir passé trois années de formation initiale à l'EMIA du
cameroun. Ainsi, après ces trois années, ils peuvent
décider de faire carrière dans la Gendarmerie Nationale. Dans ce
contexte, ils se forment à l'école de gendarmerie du Cameroun.
Ils choisissent une des spécialités en gendarmerie qui se
trouvent être pour la plupart les mêmes que dans l'armée de
terre. Certaines promotions d'élèves officiers de gendarmerie
bénéficient souvent de places dans les écoles de formation
étrangères, en l'occurrence française. L'entrée
dans ces écoles de gendarmerie se fait sur concours, toute
spécialité confondue.
L'armée de l'air forme la plupart de ses officiers
à l'étranger (France, Grèce...) toute
spécialité confondue. Ces spécialités sont en
l'occurrence celles de pilote, mécaniciens et basier.
La marine nationale camerounaise forme également la
plupart des officiers à l'étranger. C'est ainsi que les
élèves officiers camerounais, désirant suivre les
spécialités de navigateur et mécanicien le font en
Grèce, au Maroc (ainsi qu'aux Etats-Unis). La spécialité
commissariat se fait essentiellement en France tandis que l'EMIA du Cameroun
forme uniquement les fusiliers de la marine.
B-LA DIMENSION SPATIALE, LA
NECESSITE D'UNE FORMATION POINTUE
La référence à la position dans la
bataille est fondamentale en temps de guerre et tend à plus ou moins
disparaître en temps de paix. Dans sa forme la plus simple, elle se
décompose ainsi : territoire ennemi, arrière, lignes
d'approvisionnement, territoire ami. Outre ces zones planes, il existe une
importante différenciation verticale entre le terrain
élevé qui permet le contrôle d'un espace et le terrain bas,
parfois creusé dans la terre pour la protection et la dissimulation. Les
forteresses peuvent combiner ces caractéristiques, comme Gibraltar et
Iwo Jima. Tout espace qui fournit un poste d'observation et de tir sur un autre
dispose d'une valeur tactique évidente. Au cours de la première
Guerre mondiale, la fameuse « colline 60 » qui fournissait
de tels avantages sur le champ de bataille d'Ypres a fait l'objet d'une lutte
sans merci entre les forces britanniques et allemandes de 1915 à 1918.
Des tunnels furent creusés et remplis d'explosifs. Le gaz chlorine fut
utilisé pour réduire les tranchées. Au bout du compte, le
minage et le bombardement réduisirent la hauteur de la colline de 60
mètres, qui lui donnaient son nom, à 42 mètres. En une
seule opération, les britanniques perdirent 100 officiers et 3000 hommes
pour prendre et conserver un terrain de la taille de la partie centrale de
Trafalgar Square (Caplow et Venesson, 200 :18).
Aussi, le prestige des armes et des spécialités
de chaque armée varie-t-il en général avec leur
proximité avec la mission et leur conformité aux valeurs
militaires traditionnelles. Au sommet de l'armée de terre
américaine, par exemple, figurent les unités de combat
d'élite telles que les bataillons de rangers, les groupes des forces
spéciales, les régiments de cavalerie et les divisions
aéroportées comme la 82ème et la
101ème. Immédiatement en dessous sont les
unités de combat de l'Infanterie, des blindés et de l'artillerie
viennent ensuite ceux qui soutiennent directement les unités
combattantes comme les unités amphibies du génie. Toutes les
unités de combat-communication, intendance, unités
médicales, juridiques et financières entre autres, sont
dénigrés par les combattants. La déficience
supposée des unités de soutien provient de la distance par
rapport au danger, ce qui fait qu'elles ressemblent à des civils. Bien
entendu, la guerre moderne a étendu la zone du danger presque
indéfiniment et cela pourrait commencer à avoir des effets sur la
stratification du prestige fondée sur le risque. Toutefois, il y a
d'autres valeurs militaires fondamentales qui soutiennent un ordre du statut,
comme la masculinité, la force et la propension à la violence
(Caplow et Venesson , 2000 :30).
SECTION 2 : L'ILLUSTRATION PAR DES OFFICIERS, DE
LA PREEMINANCE ET DE LA DIVERSITE DES FILIERES DE FORMATION
L'année 1966 a été marquée au
Cameroun par la [camerounisation] des effectifs de la Gendarmerie, ce qui
supposait le départ de la France (Honneur et Fidélité
2005 :13). Ce processus de camerounisation des effectifs, ne se limitera
pas qu'à la gendarmerie. Il s'étendra à d'autres corps
d'armées. C'est ainsi que dès 1970, l'on constate que le
Cameroun n'a plus un partenaire unique qu'était la France en
matière de formation. Il diversifie les filières de formation de
ses officiers. Dès cette année, la formation des officiers se
fait notamment aux Etats-Unis, en Grèce, en Angleterre, en Espagne, en
Belgique. Les années 1980 seront marquées par la création
de nouvelles filières telles l'Allemagne, l'Israël, le Maroc. Les
pays africains en général n'interviendront dans la formation des
officiers camerounais que dans les années 1990. Précisons qu'en
Afrique, seul l'Algérie forme les camerounais essentiellement dans le
cadre de la coopération militaire camerouno-algérienne.
C'est-à-dire que les pays comme le Sénégal, le Togo, le
Mali forment les officiers camerounais dans le cadre des écoles
nationales à vocation régionale (ENVR) mise en place par la
coopération militaire française pour le compte des partenaires
africains de Paris. Le Maroc, quant à lui, forme les officiers
camerounais dans le cadre de la coopération militaire
camerouno-marocaine, mais il accueille également ces officiers dans les
ENVR implantées par la France dans ce pays (BSFIFC, DRH : Direction
des Ressources Humaines/MINDEF). Malgré les origines nombreuses et
variées des officiers camerounais, on note que la filière
française reste dominante dans la formation des cadres de l'armée
camerounaise (paragraphe 1). Le brassage de cultures militaires diverses
contribue à la constitution d'une culture militaire propre au Cameroun,
notamment à travers l'action de ses officiers (paragraphe2).
PARAGRAPHE 1 : LA VARIETE
ET LA PRIMAUTE DES FILIERES DE FORMATION DES OFFICIERS CAMEROUNAIS
Depuis 1959, les officiers généraux camerounais
ont reçu une formation initiale pour la plupart à l'EMIAC, mais
aussi en France. Par contre, si dans l'ensemble les officiers supérieurs
reçoivent une formation de base locale, en revanche, pour leur
spécialisation, ils bénéficient de multiples stages
à l'étranger, principalement en France. Il sera ici question de
la primauté de l'EMIAC dans la formation initiale des officiers
camerounais (A) et de la prééminence de l'école
française dans la formation de ces derniers à l'étranger
(B).
A-LA PREEMINENCE DE L'EMIAC
DANS LA FORMATION INITIALE DES OFFICIERS CAMEROUNAIS
Selon les services du Commandement des Ecoles et des
Centres d'Instruction Interarmées du Cameroun (COMECII), qui a à
sa tête le général de division Mpay Philippe :
stagiaire Saint cyrien (France), 85% d'officiers camerounais sont formés
au cameroun. Cependant, précisons que ces officiers pour la plupart font
de multiples stages à l'étranger (dans divers pays). Ces stages
durent quelques mois pour la plupart, mais peuvent aussi durer des
années (stages de médecine militaires) (BSFIFC, DRH :
MINDEF). Ainsi, l'on peut compter parmi les officiers généraux
ayant suivi leur formation au Cameroun, le général de corps
d'armée Oumaroudjam Yaya en service au secrétariat à la
défense ; le général de division Mambou Deffo Roland
qui a entre autres fonctions, celle de Directeur général de la
coordination de la formation à la Gendarmerie Nationale ; le chef
d'Etat-major de l'armée de Terre : le général de
division Nkoa Atenga Camille ; le commandant du cours supérieur
inter- armées de Défense du Cameroun : le
général de Brigarde Ngambou Esaie8(*).
Parmi les officiers supérieurs et les officiers
subalternes, l'on compte dans la Gendarmerie : le colonel Kalkaba Malboum,
le colonel Mindzié Elisabeth aujourd'hui, provinciale à la
Direction Générale de la Recherche extérieure à
Ebolowa. Cette dernière fait partie de la première promotion de
femmes admises à l'EMIAC en 1984. A l'armée de terre, l'on peut
citer le colonel Tetmoun André : chef du Renseignement militaire,
qui a également suivi une formation initiale à l'EMIAC ; le
colonel Ze Eyaan Jean de l'armée de l'air, le capitaine de Vaisseau Ebau
Bob et le capitaine de frégate Jean Georges Njofang de la Marine. Nous
devons signaler ici que la liste de ces officiers formés au Cameroun et
à l'étranger, est loin d'être exhaustive. En bref, l'on
peut dire que le gros des officiers de la Gendarmerie et de l'armée de
terre sont issus de l'EMIAC. Les officiers de l'armée de l'air et de la
marine quand à eux bénéficient de plus en plus d'une
formation locale.
B-LA FORMATION DE BASE DES
OFFICIERS CAMEROUNAIS A L'ETRANGER, LA PREPONDERANCE DE L'ECOLE
FRANÇAISE
Selon les statistiques données par le Commandement des
Ecoles et Centres d'Instruction Interarmées (COMECII), seul 15% des
officiers camerounais sont formés à l'étranger. Ceci
à la fois dans le cadre de la formation initiale et de la formation
continue. Selon le Bureau du Suivie de la Formation Initiale et de la Formation
Continue (BSFIFC) du Ministère de la Défense sur une
période de 5 ans, l'on compte 60 stagiaires camerounais au total tant
sur le territoire français que dans les multiples écoles
nationales à vocation régionales (ENVR) situées en
Afrique. Ces écoles sont l'expression de la volonté de la France
de délocaliser la formation des officiers étrangers, et notamment
des officiers africains au plus près de leurs réalités. La
France offre au Cameroun des places tant en matière de formation
initiale ou de base que dans le domaine de la formation continue. Ceci
contrairement à la Chine qui ne forme les camerounais que dans le cadre
de la formation continue 9(*)(BSFIFC : MINDEF).
Ainsi, l'on va choisir parmi les officiers formés en
France, quelques uns, illustratifs de la prépondérance de cette
filière de formation en ce qui concerne la formation de base. L'on
compte dans l'armée camerounaise des anciens ressortissants de la
prestigieuse école militaire de Saint Cyr qui a, à titre
d'exemple, formé le jeune officier De Gaulle devenu plus tard
Général et président de la République
française (Institut Charles de Gaulle (dir.) 1983 :84). Il s'agit
du Général d'armée Semengue Pierre : ancien chef
d'Etat-major des Armées du Cameroun, aujourd'hui contrôleur
général des Armées ; des Généraux de
Division Meka René Claude : actuel chef d'Etat-major des
Armées du Cameroun ; Youmba Jean René ; Mpay
Philippe : commandant des écoles et centres d'instruction (COMECII)
et du Général de brigade Tchemo Hector Marie.
Parmi les officiers issus de la jeune
génération de Saint-Cyriens, l'on peut citer : le capitaine
Ella ; le capitaine Zock ; le Lieutenant Yigi Pierre :
instructeur en police judiciaire ; le Lieutenant Mevono
Dieudonné : commandant d'instruction des transmissions ; le
Lieutenant Ndzeng Mbida : commandant du 111ème escadron
blindé de reconnaissance.
Autres écoles : l'Ecole Nationale
Supérieure polytechnique de Paris (ENSPP) a compté parmi ses
élèves officiers le général de corps d'armée
Nganso Sunji Jean aujourd'hui inspecteur général des
Armées. L'école militaire de l'Air en France a eu comme stagiaire
le Général de Brigade Yakana Guebama Paul10(*), le major
-Général de l'armée de l'Air, le colonel Mouaha Bell
Victor, a fréquenté le cours spécial de l'école de
l'Air de France. Aujourd'hui, globalement l'école militaire de l'Air de
Salon de Provence, détient la palme d'or en ce qui concerne la formation
dans l'Armée de l'Air des officiers camerounais à
l'étranger. Depuis la création de l'Armée de l'Air en
1961, 96 officiers camerounais y ont été formés.
L'hellenic Air Force Academy de Grèce ne suit qu'avec 27 officiers
camerounais formés (service Etat-major de l'Armée de l'Air).
Aussi, précisons que les femmes officiers de l'Armée de l'Air ne
sont aujourd'hui qu'au nombre de trois, parmi lesquelles le Lieutenant Bateng
Liliane (formée à Salon de Provence). Elles ont toutes
été formées en France. Dans la Marine Nationale, le
vice-Amiral (équivalent de Général de Division dans les
autres armées) Ngouah Ngally chef d'Etat-Major de la Marine, a
également été formé en France.
PARAGRAPHE 2 : LE RAPPORT
ENTRE LA FORMATION ET LA CARRIERE DU MILITAIRE AU CAMEROUN.
Dans le but d'illustrer, l'influence que la formation peut
avoir dans la vie du militaire au Cameroun, nous avons choisi des militaires
formés à la base au Cameroun (A) et ceux formés à
l'étranger, en France en particulier (B).
A-LES OFFICIERS FORMES AU
CAMEROUN ET LEURS VIES MILITAIRES : L'IMPACT DE L'UNE SUR L'AUTRE
· LE GENERAL DE CORPS D'ARMEE (GCA) OUMAROUDJAM
YAYA
Né le 01er janvier 1939,
originaire du Nord Cameroun, le Général Oumaroudjam Yaya est issu
de la première promotion de l'EMIAC de 1960,
baptisé « promotion indépendance ».
Après avoir suivi sa formation initiale à l'EMIAC, il part suivre
un stage d'application de Gendarmerie à Melun11(*). Pendant ce stage à
Melun, il suit une formation académique à
l'université (faculté de droit). Il sortira de cette
faculté avec le diplôme de « graduation en
criminologie » qui correspond aujourd'hui dans l'enseignement
Supérieur général au diplôme d'Etude Universitaire
Général (DEUG) (entretien avec le général
Oumaroudjam Yaya, mars 2007). Tout au long de sa vie militaire, ce
général a commis 3 ouvrages : le premier intitulé
l'ordre public : mission principale de la Gendarmerie
Nationale, 1998,paris, édition karthala,, est un constat fait par
le général tout au long de sa carrière de l'effritement de
la mentalité de gendarme. C'est le constat de la
légèreté de l'intérêt porté par le
gendarme aujourd'hui à sa mission principale qu'est l'ordre public. Il
remarque également le difficile rapprochement entre la Gendarmerie et la
société. L'incompréhension de l'un par l'autre
étant à l'origine du problème. Le second ouvrage
intitulé : le guide de la Gendarmerie de
proximité 29 mai 2002,Yaoundé12(*) a pour objectif de
présenter les moyens auxquels doivent avoir recours les gendarmes pour
assurer leur mission de protection des personnes et des biens tout en ayant un
bon rapport avec la population. Le troisième ouvrage est
intitulé : le Nid National : Quelques brindilles
pour l'édification, 2003, Yaoundé, édition SHERPA,
cameroun. Ce document a pour objectif de rappeler aux camerounais la
nécessité du sens patriotique, même dans une situation
difficile ou de précarité. L'on constate que l'un des produits de
l'EMIAC qu'est le Général Oumaroudjam Yaya n'a pas manqué
dans sa carrière de proposer au public en général et aux
gendarmes en particulier, des solutions aux problèmes que ces derniers
rencontrent dans l'exercice de leur profession.
· LE GENERAL DE BRIGADE NGAMBOU ESAIE
Né le 30 Mars 1948 à Foumban, le
Général Ngambou Esaie décroche après son
baccalauréat, le concours d'entrée à l'Ecole Militaire
interarmées de Yaoundé en 1968. Major du concours d'entrée
à l'école, il le sera également au sortir de cette
dernière trois années plus tard en 1971. Il suivra ensuite une
application de deux ans, à l'école d'Artillerie en France. En
1982, il effectue dans le même pays, un stage d'un an au cours de
capitaine d'Artillerie. En 1983, de retour au Cameroun, il suivra les deux
stages de l'école d'Etat-major que sont le stage de Certificat
d'Etat-major (CEM) et le Diplôme d'Etat-major (DEM). En 1992, il suit un
stage d'un an à l'école supérieure de Guerre
interarmées de France. Nommé Général de brigade par
le chef de l'Etat le 26 Septembre 2001, il sera commandant du cours
supérieure interarmées de Défense (CSID) du Cameroun
quatre ans plus tard (Entretien avec le Général Ngambou Essaie,
mars 2007). L'on peut donc comprendre qu'étant donné sa formation
globale, il est outillé pour la mission qui lui est confié par le
président de la République.
B-LA TRAJECTOIRE D'UN OFFICIER FORME À
L'ETRANGER
· LE GENERAL D'ARMEE PIERRE SEMENGUE
Le général Pierre Semengue est né le 28
Juillet 1935 à Bikota. Après son Baccalauréat obtenu au
lycée Leclerc de Yaoundé, il se présente au concours
d'entrée à l'école militaire de Saint-Cyr en France. Il
sera reçu en Octobre 1957 « 256e » sur
mille candidats dont 365 définitivement admis. Il en sortira officier
français. Au moment de la création de l'Armée camerounaise
le 11 Novembre 1959, il n'y avait aucun officier camerounais. Le gouvernement
dut nommer quelques officiers parmi les sous- officiers qui servaient dans
l'Armée Française. Il fut ainsi nommé capitaine pour
compter du 1er Octobre 1960 ; c'est dire qu'il n'a pas
porté le grade de lieutenant dans l'armée camerounaise. Il a
occupé le poste de chef d'Etat-major de l'Armée camerounaise
pendant des années. Il a vécu des épisodes douloureux tels
celui de la lutte contre la rébellion au Cameroun. Lutte qu'il
mènera avec le Général Nganso Sunji (DooBell ,2007).
Saint-cyrien de formation, le Général Semengue tout au long de sa
carrière, a mis son expérience au service de l'armée
camerounaise.
CONCLUSION
Au terme de ce chapitre, il apparaît que l'extraversion
du Cameroun en matière de formation militaire contribue à
l'enrichissement de sa culture militaire de base. Ainsi , la
nécessité qu'il y a pour ce pays de se tourner vers
l'extérieur lui confère en définitive de précieuses
qualités en matière de formation militaire. Dès lors,
comment se déroule le processus de socialisation des officiers
camerounais à des cultures militaires différentes.
CHAPITRE 2 : LA SOCIALISATION PLURALISTE DES
OFFICIERS PAR LES ECOLES DE FORMATION
La stratégie au Cameroun est
définie, dictée par le politique, tandis que le militaire lui se
charge de mener à bien les missions définies par
le politique. En effet, la hiérarchie stratégique compte
trois grands axes principaux que sont : le Premier Niveau qui est le
niveau stratégique dans lequel le politique élabore un programme
ou une politique de défense. Le deuxième Niveau qu'est le niveau
opérationnel consiste pour les Etats-majors, avec à leur
tête le chef d'Etat-major des armées de réfléchir au
meilleur moyen d'opérationnaliser le programme politique en action
militaire. En troisième lieu, cette orientation pratique
arrêtée, le niveau tactique entre en scène avec la mise en
action des forces armées de défense. Au niveau de l'Etat-major,
le militaire joue le rôle de conseil ou consultant et donne si le
politique le sollicite, un avis pour la prise de décisions
stratégiques. La formation diversifiée des officiers camerounais
entraîne dans l'armée nationale une multitude de perceptions du
métier des armes. Les fondamentaux de l'art militaire se transmettent au
cours de la formation initiale (section 1). 85 % des officiers reçoivent
leur formation initiale au Cameroun. Cette réalité laisse
penser que l'essentiel des officiers camerounais ont un fond culturel militaire
en commun. Cependant, s'il est vrai que la formation initiale structure la
pratique professionnelle du militaire, il faut aussi reconnaître que dans
le cadre de la formation continue, l'enseignement supérieur militaire en
tant que cadre de transmission de savoir, de valeurs, contribue à fixer
chez les officiers un savoir-faire et un certain nombre de comportements et de
pratiques (section 2).
SECTION 1 : LA
FORMATION INITIALE, UNE ETAPE DETERMINANTE DE LA FORMATION DU MILITAIRE
Depuis 1959, année de la création des Forces
Armées Camerounaises (FAC), les officiers camerounais proviennent de
l'EMIAC (paragraphe 1) et de structures de formation étrangère
(paragraphe 2). Dans les lignes suivantes, il s'agira de mettre en exergue la
diversité culturelle, fruit des formations plurielles des officiers
camerounais.
PARAGRAPHE 1 : L'EMIAC, LA
PRINCIPALE ECOLE DE FORMATION INITIALE DES OFFICIERS CAMEROUNAIS
Créée à l'aube de
l'indépendance L'EMIA du Cameroun, existe depuis plus d'une quarantaine
d'années. C'est une école Militaire de formation des officiers.
En effet, le décret N° 2001/87 du 25 Juillet 2001 fixe les
conditions de recrutement et d'admission dans les écoles militaires de
formation des officiers. Selon l'Article 2, l'on peut citer le tronc
« A » du recrutement direct ; le
tronc « B » du recrutement Interarmées et de la
promotion issue du Rang ; le tronc « C » du
recrutement des officiers de réserve et des diplômés de
l'enseignement supérieur ; le tronc « D »
du recrutement des officiers des services de santé. En ce qui concerne
la formation de jeunes citoyens camerounais issus du civil, au métier
des armes, les filières de recrutement sont celles du tronc
« A » et « C ». En effet, selon
l'article 2 le tronc « A » est ouvert aux camerounais des
deux sexes âgés de 23 ans, au plus au 31 Décembre et de 18
ans au moins, au 1er janvier de l'année du concours. Outre le
critère d'âge, les candidats doivent être titulaires du
Baccalauréat de l'enseignement secondaire, du GCEAL ou d'un
diplôme équivalent et avoir accompli avec succès une
année d'études supérieures. Le tronc
« C » est la filière qui recrute non seulement les
officiers de réserves mais elle est également
réservée aux jeunes gens diplômés de l'enseignement
supérieur dans une spécialité utile aux forces
armées. Ils doivent être âgés de 26 ans au plus au 31
décembre de l'année du concours.
L'article 3 du décret N° 2001/87 du 25 juillet
2001 souligne à son alinéa 1er que : l'admission
dans les écoles militaires de formation d'officiers se fait sur concours
commun. L'alinéa 3 de ce même article, précise que le
nombre de places offertes pour chaque Ecole Militaire de formation est
fixé par arrêté du Ministre chargé de la
Défense. La durée des études militaires à l'Ecole
Militaire Interarmées des élèves officiers est fonction de
la filière suivie : ainsi, la formation dans les tronc A et C
durent 36 mois contre 6 mois et 24 mois pour les autres filières.
La formation initiale a pour but de rendre les
élèves officiers aptes à commander une section
d'infanterie ou à tenir un emploi subalterne au sein d'une unité
ou d'une structure technique de l'Armée de terre ou de la gendarmerie
nationale ; faire acquérir aux élèves officiers les
éléments de base nécessaires à l'exercice du
métier et les connaissances indispensables de culture
générale (article 3 décret N°2004/180 du 01 juillet
2004, portant réorganisation de l'école militaire
interarmées). Précisons que les officiers après leur
formation initiale, doivent ensuite compléter leur formation d'officier
par un stage d'application dans une école ou une formation
spécialisée dans l'arme ou le service de leur choix. Ces
spécialités portent de façon générale
sur : la gendarmerie ; l'infanterie ; l'arme blindée et
cavalerie ; le génie ; l'artillerie sol-sol et sol-air ;
le train ; les transmissions ; le corps national des sapeurs
pompiers ; la santé ; le commissariat ; la justice ;
le matériel ; les essences. Les officiers issus des tronc
« B1 » et « B2 »13(*) restent dans la
spécialité qui était la leur avant la nomination à
un grade d'officiers.
L'analyse du contenu des programmes de formation des jeunes
officiers sortis de l'EMIAC (A) démontre l'existence
d'éléments structurants pour l'émergence d'une culture
militaire commune de base. Cette culture militaire, à côté
d'autres facteurs concourt à l'édification d'une culture
stratégique. La culture militaire qu'acquiert le jeune officier sorti de
l'EMIAC accroît son sentiment patriotique et nationaliste, elle lui
enseigne une politique de défense essentiellement pacifique et par
conséquent adossé sur une stratégie défensive
(B).
A-UN ENSEIGNEMENT MILITAIRE
NATIONALISTE, PACIFIQUE ET DEFENSIF
Selon le directeur des études et des
programmes de la formation Initiale de l'EMIAC, le Capitaine de frégate
Georges Njofang, dès la création de cette école militaire,
le programme de formation était fondamentalement militaire car le pays
avait urgemment besoin de militaires sur le terrain pour lutter contre la
guérilla. Le capitaine Onana Mfegue précise dans le Magazine des
FAC « Honneur et fidélité »
(« Honneur et fidélité, 2005 :12)
que : « la formation d'une entité militaire
camerounaise loin d'être le résultat de l'improvisation, a
été définie dans ce que l'on a communément
appelé « plan Raisonnable ».
Élaboré par les autorités françaises en 1959 pour
faire face à la rébellion de l'UPC (Union des Populations du
Cameroun). Le plan raisonnable prescrivait des mesures d'urgences devant par la
suite servir de canevas à la mise sur pied d'une armée nationale.
Ce plan raisonnable s'étendit jusqu'à la signature, le 13
novembre 1960 des accords de coopération militaire
franco-camerounais ». Progressivement pourtant, le programme
d'enseignement va s'élargir pour s'arrimer aux impératifs des
temps modernes en alliant non seulement l'exigence des qualités
techniques et professionnelles, mais aussi en élargissant l'enseignement
à la culture générale et parfaire les connaissances
militaires dans tous les domaines (Ahidjo, 1980:1874).
La division formation initiale de l'EMIA, dans la
continuité des années 1960-1970, forme des élèves
officiers, qui réunissent les qualités d'un chef militaire et
bénéficient de l'ouverture d'esprit par la culture
socio-politique contemporaine. L'enseignement durant ces 3 années de
formation couvre à la fois l'instruction théorique faite à
Yaoundé et l'instruction pratique, qui est dispensée au cours des
sorties de terrain de Manowar Bay , koutaba , Ngaoundéré ou
ailleurs. L'instruction théorique quant à elle porte sur des
matières d'enseignement militaire tels des cours de formation tactique,
formation technique, formation au commandement, formation militaire
générale etc. Les cours de culture générale
concernent tant la défense nationale, le droit pénal, la
géographie, la géopolitique, l'histoire militaire, les relations
internationales ou encore l'informatique. Le programme de formation est
arrêté par le Ministre Délégué à la
présidence chargé de la défense. Ainsi, à l'issue
de la formation, l'élève devenu officier devra être en
mesure de répondre aux attentes suivantes : sur le plan
interne : garantir l'intégrité du territoire national et la
sûreté de l'Etat, faire face à une menace classique et
lutter efficacement contre le phénomène de coupeurs de route et
le grand banditisme ; au plan régional et au plan
international : participer aux opérations humanitaires, aux
opérations de maintien de la paix et de règlement de conflits
armés sous l'égide des organisations internationales.
La culture militaire a pour objet d'aider l'officier à
comprendre la guerre et la violence, afin de pouvoir replacer son action dans
les contextes toujours nouveaux et complexes, en lui permettant de saisir les
enjeux et les interactions au sein de la société nationale et
internationale, ainsi que les forces qui en constituent le ressort
(« directives initiales ; culture
militaire »,2007).C'est dans ce contexte que nous analyserons les
programmes d'enseignement.
B- UN PROGRAMME D'ENSEIGNEMENT
REFLETANT UNE CULTURE MILITAIRE BASEE SUR LES SPEFICITES NATIONALES
La culture militaire est comprise comme la capacité
à raisonner et à se situer à partir de connaissances.
C'est dans cet esprit que le Général De Gaulle estimait la
culture générale comme l'école du commandement dans la
mesure où, en garantissant la compréhension de son action et de
son environnement, elle permet au militaire d'agir en homme de réflexion
et de réfléchir en homme d'action (Directive Initiale ;
culture militaire, 2007). Ainsi, dans le but de connaître les questions
sur lesquelles se porte la réflexion des militaires dans les
écoles de formation, nous procéderons par une étude de
quelques disciplines dans le programme de formation. Nous avons dans cette
perspective vu que ce programme de formation porte sur la défense
nationale, la géopolitique, l'histoire militaire, les relations
internationales.
La réflexion sur la défense nationale suppose
que l'on ait à l'esprit sa contingence et sa logique. Au Cameroun, il
existe des textes qui peuvent y aider. Politiques, stratégiques,
juridiques, ils représentent l'expression d'une volonté de
défense nationale.
La constitution du 18 janvier 1996 organise la
répartition des pouvoirs et des responsabilités entre les grands
acteurs de la politique de défense : le Président de la
République, chef des forces armées ; le gouvernement ;
le Premier Ministre.
L'ordonnance N°59/57 porte création le 11
novembre1959 de l'armée camerounaise et organisation
générale de la défense14(*). En réalité, seule l'armée de
Terre voit le jour. Elle comprend alors deux compagnies de combat
formées d'éléments autochtones en service dans
l'armée française et les 300 recrues du premier contingent
(Novembre 1959), (Honneur et Fidélité, 2005 :12). Quelques
mois plus tard, la gendarmerie prend corps à la faveur de la fusion des
auxiliaires français et de la garde indigène. L'ordonnance
N°60/20 du 22 février 1960 organise et réglemente ce corps
orienté vers le maintien de l'ordre public et la police judiciaire.
Cette orientation est confirmée par décret N° 60/280 du 31
décembre 1960.
Le premier organigramme du Ministère des Forces
Armées date du 27 octobre 1960 (décret présidentiel
N°60/198). Ce premier organigramme est modifié quelques semaines
plu- tard, par décret N°60-248 du 30 décembre 1960 qui
allège la structure. Le Ministère est articulé autour de
la direction du cabinet, la direction des services centraux, un organisme de
liaison opérationnelle comprend un commandement de l'Armée et un
commandement de la gendarmerie nationale. Le commandement de l'Armée a
sous son autorité les unités de forces terrestres et
aériennes. Quatre secteurs comprenant chacun des quartiers militaires
sont crées par décret N°60-267 du 31 décembre 1960.
La naissance de la Marine remonte au 9 décembre1960 par la
création au sein de la gendarmerie nationale du détachement marin
de la gendarmerie relevant de la légion de Douala. Ce détachement
est érigé en Marine fédérale en 1961.
L'armée de l'air naît la même année, sous
l'appellation d'escadrille comprenant des aéronefs offerts par la France
(à l'instar des broussards). 1966 est une année charnière
pour la gendarmerie qui est [camerounisée] et érigée en
délégation générale (Décret N° 66/DF/54
du 7 février 1966). Le commandant supérieur, jusque là
officier français, est remplacé par un haut fonctionnaire
camerounais ayant le titre de délégué
général. C'est le début de la camerounisation des
structures de l'armée camerounaise. Le commandement de l'Armée de
l'Air est organisé par décret N°66/DF/282 du 18 juin 1966.
Le commandement de la Marine Nationale est aussi organisé par
décret N°66/DF/281 du 18 juin 1966. Le commandement de
l'armée de terre est organisé par le décret
N°66/DF/280.
Après cette première période,
marquée par la création d'une armée camerounaise avec pour
vocation initiale le maintien de l'ordre, s'amorce une deuxième phase,
marquée par une longue période de consolidation non seulement de
l'Etat camerounais, mais aussi de son armée. Cette période est
marquée par une nouvelle donne : l'unification du Cameroun en 1972.
De ce fait la loi N° 67/LF/9 du 12 juin 1967 portant organisation
générale de la défense et l'Instruction
présidentielle N°16/CAB.PRU du 01er septembre 1972 sur
la conduite des efforts de défense définissent les
responsabilités des départements ministériels. Les
attributions de la défense relèvent du Ministère de la
défense et sont précisées dans le décret N°
540 du 5 Novembre 1983 portant organisation du Ministère des Forces
Armées et du commandement. L'Etat-major des armées,
créé la même année, succède au centre de
coordination interarmées. Le 5 Avril 1986, l'Armée se voit doter
d'un corps national des sapeurs pompiers (décret N°86/286).
La troisième phase de l'évolution de
l'armée camerounaise porte sur l'importante rénovation que
connaît cette armée depuis 2001. Ainsi, dans le but d'arrimer
l'armée camerounaise à une nécessaire adaptation aux
grandes évolutions, « les maîtres mots de cette
importante rénovation sont la cohérence, l'efficacité et
la professionnalisation. Cohérence c'est-à-dire adaptation de nos
forces armées à l'organisation territoriale de notre pays dans un
souci d'efficacité accrue pour garantir notre liberté, notre
souveraineté et notre indépendance, participer à la
stabilité régionale, participer au développement national,
respecter nos engagements internationaux » (Fame Ndongo, 2001).
-Les acteurs de la défense
nationale
Les grands acteurs de la défense nationale sont au
niveau suprême et à l'échelon gouvernemental.
Le chef de l'Etat est le chef constitutionnel des forces
armées nationales. A ce titre, le chapitre 1er (article 8
alinéa 2) de la constitution15(*) camerounaise du 18 janvier 1996 dispose
que le
président de la République est « le chef des
forces armées ». L'alinéa 3 du même article
précise que le Président de la République
« veille à la sécurité intérieure et
extérieure de la République » ; l'alinéa10,
quant à lui, précise qu'il « nomme aux emplois civils
et militaires de l'Etat ». L'article 9 du même chapitre
énonce que « le Président de la République peut,
lorsque les circonstances l'exigent, proclamer par décret, l'état
d'urgence qui lui confèrent des pouvoirs spéciaux dans des
conditions fixées par la loi » (alinéa 1). Par
ailleurs, « le Président de la République peut, en cas
de péril grave menaçant l'intégrité du territoire,
la vie, l'indépendance ou les institutions de la République,
proclamer par décret, l'état d'exception et prendre toutes
mesures qu'il juge nécessaires. Il en informe la nation par voie de
message » (alinéa2).
De même la loi N°67/LF/9 du 12 Juin 1967, portant
organisation générale de la défense dispose en son article
6 que « le président de la république veille
à la sécurité intérieure et extérieure de
l'Etat. Il définit la politique de défense et pourvoit à
sa mise en oeuvre ».
Le chef de l'Etat dispose également d'un Etat-major
particulier placé sous son autorité.16(*) Celui-ci est chargé de
« tenir le président au courant de toutes les affaires
militaires » (article 3).
Ces différentes dispositions juridiques
confèrent au Président de la République l'ensemble des
pouvoirs en matière de défense nationale et
particulièrement en matière de défense militaire. Cette
situation est à mettre en relation étroite avec la nature
constitutionnelle du régime camerounais qui est présidentiel (
Ela Ela, 2001 :160).
Si en France le Premier Ministre « dispose de la
force armée » (article 20, constitution française de
1958), et « est responsable de la défense
nationale » (article 21), au Cameroun, il n'a aucune
prérogative en matière de défense militaire. Le Ministre
de la Défense de son gouvernement est
« Délégué à la
présidence » donc ne relève pas de son autorité
directe.
De même, en France l'article 33 de la constitution
française de 1958 dispose que « la déclaration de
guerre est autorisée par le parlement », ce qui laisse penser
que le parlement français a un droit de regard en matière de
défense militaire. Au Cameroun, par contre, aucune disposition de ce
type n'est dévolue à l'Assemblée Nationale ; il
revient au chef de l'Etat de « (...) décréter pour tout
ou partie du territoire national, (...) la mobilisation » (article 2
in fine de la loi du 12 juin 1967). L'Assemblée nationale n'intervient
en matière de défense militaire que lors du vote du budget du
ministère de la défense et des lois sur la défense
nationale (article 26, alinéa 4 de la constitution du 18 janvier 1996).
Au Cameroun, ce monopole présidentiel sur les questions de
défense militaire peut se traduire par le fait que, élu au
suffrage universel direct, le Président de la République tire la
légitimité de la décision d'engager le pays dans une
action coercitive intérieure ou extérieure directement de
l'ensemble du peuple national (Ela Ela, 2001 :160).
- La géographie et la
géopolitique
Le Cameroun fait la politique de sa
géographie en matière d'autoprotection. Sun tzi indique à
ce propos que le choix du terrain pour l'affrontement et le cheminement des
troupes résulte de la connaissance « avec exactitude et dans
le plus infime détail de tout ce qui vous environne, les couverts
(forêt ou bois), les obstacles (fleuves, rivières, ruisseaux,
marécage), les hauteurs (montagnes, collines, buttes), les espaces
libres (plaines, vallées à faibles pentes), c'est-à-dire
tout ce qui peut servir ou nuire à vos troupes » (Encel,
2000 :26). Le Cameroun, territoire de forme triangulaire, se situe presque
au coeur de l'Afrique et se présente comme une transition entre ses
régions équatoriales, forestières et ses régions
sahéliennes, désertiques. Le relief est extraordinairement
varié. A une plaine côtière succèdent de grands
ensembles montagneux à l'ouest et au sud-ouest (le mont Cameroun culmine
4070m). Le réseau fluvial est très dense ; c'est un
avantage, dans la mesure où montagnes et fleuves sont souvent des
barrières naturelles. On ajoutera à cela le fait que le Cameroun
a un débouché sur l'océan Atlantique, avec une
façade maritime d'environ 365 kilomètres, ce qui peut lui
permettre de développer une stratégie de défense navale.
Pour ce qui est des handicaps, ils sont relatifs à la
multiplicité des frontières terrestres, Six au total (Kombi,
1996 :63).
Le Cameroun partage en effet, 3418 kilomètres de
frontières terrestres avec le Nigeria à l'Ouest, le Tchad et la
Centrafrique à l'Est, le Congo, le Gabon et la Guinée Equatoriale
au sud ; et 504 kilomètres de frontière maritime avec le
Nigeria et la Guinée Equatoriale au Sud-Ouest. La situation interne de
certains de ces pays est caractérisée par l'instabilité.
Les frontières tant septentrionales que méridionales, faites d'un
découpage généralement artificiel, se caractérisent
également par une certaine perméabilité naturelle. Du
reste, le Cameroun a connu quelques contentieux frontaliers avec certains de
ses voisins dont surtout le Nigeria. La Cour Internationale de Justice de la
Haye dans son verdict a tranché en faveur du Cameroun dans le litige
l'opposant au Nigeria sur la presqu'île de Bakassi. Il se trouve donc que
le Cameroun, bénéficiant de l'arrêt de la haute cour de
justice qui lui confère la souveraineté sur la presqu'île
de Bakassi et d'une vaste ouverture vers le golfe de Guinée, est
considéré aujourd'hui comme un pays stratégique en Afrique
centrale et dans le golfe de Guinée.
PARAGRAPHE 2 : LES ECOLES
DE FORMATION INITIALES ETRANGERES, UN COMPLEMENT INDISPENSABLE POUR UNE
FORMATION DE POINTE DES OFFICIERS CAMEROUNAIS
L'article 8 du décret N°2001/187 du 25 juillet
2001 fixant les conditions de recrutement et d'admission dans les Ecoles
Militaires de formation des officiers dispose que « les
élèves officiers formés avec l'accord du gouvernement dans
les mêmes conditions que ceux du tronc « A » dans les
écoles militaires étrangères, figurant sur une liste
arrêtée par le Président de la République, suivent
le régime du tronc « A ». Les officiers camerounais
sont formés dans plus d'une dizaine de pays étrangers, parmi
lesquels : les Etats-Unis, la Grande Bretagne, la Russie, l'Allemagne et
L'Israël (Mouelle, 1996 :64) bien que le plus grand nombre soit
formé au Cameroun. Les écoles militaires de formation, qu'elles
soient au Cameroun ou à l'étranger, se présentent comme
des vecteurs de socialisation et de transmission de cultures militaires
différentes. Dans cette perspective, la culture militaire se
transmettant par les enseignements et les stages pratiques reçus dans
les centres de formation, nous nous arrêterons sur les programmes de
l'école militaire interarmées de Saint Cyr en France ; de
l'académie Royale de Meknès au Maroc et de l'académie
hellénique de l'Air de Grèce (A). Nous analyserons par la suite
les disciplines qui caractérisent la culture militaire dans ces
programmes (B).
A-DES ENSEIGNEMENTS AU CONTENU
QUASI-IDENTIQUE, MAIS DIVERSITE DANS LES MISSIONS ASSIGNEES AUX OFFICIERS
v l'école Militaire Interarmées de Saint
Cyr (coëtquidan).
Cette école est située dans la ville de
coëtquidan, non loin de la Bretagne en France. En fait, l'école
militaire interarmées est l'une des trois écoles militaires qui
coexistent sur le site renommé de coëtquidan17(*). Les deux autres écoles
sont l'école militaire spéciale de Saint cyr
(l'aîné des trois) et l'école militaire du corps technique
administratif. L'académie militaire de Saint cyr, a vu le jour à
Fontainebleau en 1803 avec la création de l'école spéciale
militaire 18(*)qui a par
la suite été transféré à Saint cyr en 1808,
pour s'établir enfin à coëtquidan depuis 1945
(« coëtquidan : la formation initiale »,
2007).
L'école militaire interarmées de Saint cyr que
nous avons choisi pour étude, forme les futurs officiers de
l'armée de terre, qui acquièrent des connaissances dans le
domaine militaire et dans le domaine académique
(« coëtquidan : la formation initiale »,2007).
Les officiers camerounais issus du recrutement direct et formés dans
cette école militaire, y ont accès, conformément à
l'article 7 du décret N°2001/187 du 25 juin 2001. La durée
de leur formation est de 24 mois. Les cours portent tant sur la tactique
(enseignement militaire) que sur la politique de défense, l'organisation
générale de la défense, la sociologie militaire, ou encore
le nucléaire (entretien avec le commandant du 111e escadron
Blindé de Reconnaissance : Lieutenant Ndzeng Mbida, ancien
élève officier de l'école militaire interarmées de
Saint cyr, février 2007). Ainsi, cette école a vocation à
former des officiers qui occuperont des fonctions des hautes
responsabilités. Car l'école militaire interarmées en
particulier et l'académie de Saint cyr en général se veut
une grande école du commandement, « former des chefs
exemplaires fondant leurs actions sur l'excellence professionnelle, tel est
l'objectif autour duquel s'articule son projet pédagogique
globale : instruction, enseignement et éducation. Chef militaire,
l'officier est à la fois un serviteur de l'Etat et un homme d'action
nourrit d'une réflexion puisant ses fondements dans une culture
étendue et entretenue. Il se doit d'être un décideur et un
meneur d'homme maîtrisant l'art du commandement et sachant
fédérer les énergies. »
(« Coëtquidan : la formation
initiale » :2007). Il doit de ce fait au terme de sa formation
être détenteur des capacités demandées par le
politique aux forces armées françaises en général
et aux forces de l'armée de terre en particulier qui relèvent de
la défense du territoire, de la manoeuvre en Europe et de l'action hors
d'Europe (David, 1989 :51).
v L'ACADEMIE ROYALE DE MEKNES AU MAROC
Située à Meknès, l'académie
royale accueille des militaires camerounais issus du recrutement direct et qui
y accède conformément à l'article 7 du décret
précité. La durée de la formation dans cette école
est de trois ans. La première année, est consacrée
à une formation commune de base, essentiellement militaire. Les deux
dernières années sont constituées d'une formation à
la fois académique et militaire. Les cours comme en France portent tant
sur la tactique (enseignement militaire) que sur ceux d'enseignements
généraux tels défense nationale ou encore histoire
militaire. La spécificité marocaine en matière de
défense nationale porte sur sa devise, qui
est : « Dieu, La Devise et le Roi ». Soulignons
dans cette perspective que les programmes de formation marocaine sont
conçus dans le respect de la Devise qui en soit définit
l'orientation à donner aux programmes de formation. Les marocains
mettent un point d'honneur à enseigner aux militaires des techniques de
combat sur le sable, car le Maroc est situé dans une zone
sahélienne et fait face depuis des années au conflit avec la
République Démocratique Arabe Unie, soutenue par l'Algérie
et la Mauritanie. (Entretien avec le capitaine Ateba : ancien
élève officier de l'académie royale de Meknès,
février 2007). La mission de l'armée marocaine depuis sa
création en 1956 est d'assurer la défense de l'empire : elle
peut aussi participer dans les conditions déterminées par le roi
au maintien de l'ordre public (« le véritable pouvoir de
l'armée au Maroc», 2007).
v L'HELLENIC AIR FORCE ACADEMY DE
GRÈCE
C'est la principale école militaire grecque qui forme
des officiers camerounais dans le cadre de la coopération militaire
entre la Grèce et le Cameroun. Les camerounais qui y accèdent
sont issus du recrutement direct, conformément à l'article 7 du
décret sus-cité. La durée de la formation dans cette
Académie est de quatre ans. La première année est
consacrée à l'apprentissage de la langue ; les trois autres
années portent tant sur la formation militaire que sur la formation
académique. La formation militaire comme partout dans le monde, porte
fondamentalement sur la tactique et les techniques militaires, tandis que la
formation académique couvre essentiellement ici les théories
liées à la spécialisation (ingénieurs en
aéronautique, mécaniciens, basiers). Cependant l'on retrouve
aussi dans les programmes des cours sur l'histoire militaire, la
géopolitique, les grands penseurs philosophes etc (Entretien avec le
commandant Mekouabouth Mesmir ; ancien élève officier de
l'hellenic Air Force Academy de Grèce). A la fin de leur formation, les
officiers de l'armée grecque en général et de
l'armée de l'air en particulier, doivent remplir des missions
fixées par le politique.
B- DES PROGRAMMES
D'ENSEIGNEMENT MILITAIRE MODERNE, VECTEURS DE TRANSMISSION DES MODELES
CULTURELLES AUTRES.
Le constat est clair pour tous les officiers camerounais
formés à l'étranger que nous avons rencontré. Ils
bénéficient dans la plupart des écoles militaires
étrangères fréquentées d'une technologie de pointe
par rapport à leurs camarades camerounais formés sur place. L'on
peut également considérer comme bénéfique pour le
Cameroun, la socialisation des élèves à des cultures
militaire variées. Nous recenserons donc rapidement, quelques
éléments de culture militaire, dans les programmes.
La culture militaire française vue à
travers le programme d'enseignement de l'école militaire
interarmées de Saint Cyr.
La culture militaire française permet à
l'officier français de raisonner et de se situer dans le monde à
partir de ses connaissances. Dans cette perspective, la politique de
défense française enseignée dans les écoles
militaires, est le produit de l'histoire de la France.
Ainsi, de tous les problèmes si nombreux que De Gaulle
a eu à résoudre au lendemain de la libération, celui de la
sécurité du pays était particulièrement important
et difficile. Aussi, pour assurer l'avenir de la France, s'agissait-il de
réaliser cette puissance nucléaire (Institut Charles De Gaulle
(dir.) 1983). Selon Dominique David, le système de défense
français, est en réalité en France, comme à
l'étranger, une production historique, qui doit tout à la
manière dont la France perçoit le monde, sa place parmi les
autres, ses moyens d'y parler (Dominique David.1989 :26).
L'indépendance, le rang et le leadership européen de la France
sont assurés par une stratégie militaire de dissuasion dont la
spécificité est bien connue : postulat du pouvoir
égalisateur de l'atome, dissuasion du faible au fort, suffisance et
proportionnalité à l'enjeu, stratégie de dissuasion totale
et globale, fondée sur la volonté du décideur et le
consensus national. L'instrument nucléaire de la France est pour elle
une garantie suprême, « objective » au sens où
il ne dépend pas de l'évolution des menaces adverses. La
spécificité de la dissuasion française doit être
perçue non comme menace, mais comme signe du prix que la France attache
à elle-même (Colson, 2006). L'essentiel de la doctrine
française de défense est contenu dans le livre blanc sur la
défense nationale publié en 1972 et modifié en 1994. Le
projet politique français consiste donc à garantir à la
démocratie française les moyens de se déterminer
librement. Cette stratégie générale de défense qui
consiste à dissuader tout adversaire potentiel susceptible de porter
atteinte à cette liberté où que ce soit, a
évolué dès 1994 vers la prévention et la limitation
des crises à travers le monde.
Cette défense comporte donc un volet militaire
essentiel, dont le noyau dur est formé par la puissance
nucléaire, autour de quoi s'organisent tous les autres moyens (David,
1989 :44). Ces autres moyens sont ici en l'occurrence les capacités
opérationnelles des forces armées françaises qui doivent
nécessairement avoir une cohérence avec la politique
défendue. Car les objectifs de cette politique de défense se
situent à trois niveaux :
- la nécessité d'assurer la
sécurité du territoire national et de ses habitants ;
- l'utilité d'une participation à la
sécurité en Europe et autour de l'Europe, particulièrement
en Méditerranée ;
- la nécessité pour la France de protéger
les territoires lointains qui de par le monde manifestent leur appartenance
à la souveraineté française. La France se doit ainsi de
faire face aux engagements qu'elle a prise à l'égard des Etats de
l'Afrique francophone ou de Madagascar, Etats forgés par la culture
française et ses lois (David, 1989 :44).
La politique extérieure faisant partie d'une
conception générale dont fait aussi partie l'organisation de la
défense, précisons que les trois éléments
principaux de la politique étrangère de la France sont : le
refus des blocs c'est-à-dire le non alignement sur les grandes
puissances ;la définition précise et donc limitée des
engagements français et un effort diversifié de
coopération internationale en vue de favoriser de bons rapports entre
les peuples (Colson, 2006).
En clair, la crainte de la remontée de la puissance
allemande et la conscience des faiblesses économiques et
démographiques de la France produisit un Etat d'esprit nettement
défensif qui se refléta dans sa stratégie militaire. L'on
comprend de ce fait que la culture stratégique française soit
défensive (Colson, 2006).
Les éléments de culture militaire
marocaine vus sous le prisme du programme d'enseignement de l'académie
royale de Meknès.
Dans le programme d'enseignements dispensé à
l'académie royale de Meknès, le cours de défense
nationale, est illustratif du désir du gouvernement marocain d'assurer
à ses militaires, la compréhension de leur action et de leur
environnement. Au Maroc comme dans plusieurs pays, la défense nationale
a subi un processus évolutif vers la modernité. Ainsi, les forces
armées royales ont été créées à la
veille de l'indépendance du Maroc en 1956 par le roi Mohammed V, le
grand père du roi Mohammed VI, roi actuel du Maroc. La décision
de créer en 1956 un ministère de la défense nationale a
été suivie le 25 juin de cette même année, par
l'institution d'une armée royale marocaine. Elle est placée sous
l'autorité directe du roi et porte désormais le nom de
« Forces Armées de l'Empire » et peuvent participer
dans les conditions que le roi déterminera au maintien de l'ordre
public. Quelques mois après sont édictés les textes de
base relative à la justice militaire, à la gendarmerie royale et
à un haut comité de défense militaire. En 1972, à
la suite d'une tentative de coup d'état faite au Roi, il y'a eu
suppression de la défense nationale, des fonctions de major
général et institution de l'administration de la défense
nationale rattachée au chef de l'Etat (« le véritable
pouvoir de l'armée au Maroc», 2007).
Le 14 mai 2000, le souverain Le Roi Mohamed VI, a
souligné que « la modernité est devenue une
exigence majeure, particulièrement dans le domaine militaire »
(« le véritable pouvoir de l'armée au
Maroc », 2007). Il a insisté sur l'amélioration des
méthodes de formation militaire, en modernisant ses outils et en
rehaussant le niveau intellectuel et scientifique des militaires. Un programme
qui reste pourtant à définir et à mettre en oeuvre pour
pouvoir faire face aux défis techniques, technologiques du monde
actuel.
Les éléments de culture militaire,
à partir du programme d'enseignement de l'académie
hellénique de l'air de Grèce
D'après l'histoire militaire
grecque, la Grèce ancienne : mère de la culture occidentale,
est une grande civilisation qui a été essentiellement
guerrière. Sur le plan géographique, la Grèce est dix fois
plus petite que la France.
La mer Egée et la mer Ionienne, permettent de courtes
traversées. Aussi, les grecs furent-ils naturellement des marins et des
commerçants, bien que pendant longtemps, ils aient
préféré la guerre sur terre. Mais par la suite, la
Grèce qui était essentiellement une nation de fantassins, mettra
sur pied une marine très forte. Dans l'histoire de ce pays, l'on
constate qu'il a toujours été jaloux de son indépendance
et de ses particularités (histoire universelle des armées,
1966 :54).
Ainsi, bien qu'il apparaisse que, la formation initiale en
tant que base de la formation du militaire joue un rôle dans la
socialisation des officiers à des cultures militaires
particulières, il n'en demeure pas moins que l'enseignement militaire
supérieur, soit à ce jour un pôle de formation par
excellence. Dans ce dernier, les étudiants sont plus outillés en
tant que militaires qui devront assumer d'importantes responsabilités en
Etat-major pour comprendre le processus stratégique, qui va du projet
politique à la stratégie militaire opérationnelle.
SECTION II :
L'ENSEIGNEMENT MILITAIRE SUPERIEUR, UN ATOUT INDISPENSABLE A LA CULTURE
MILITAIRE CAMEROUNAISE
A l'étranger comme au Cameroun, l'enseignement
militaire supérieur confère aux officiers une formation
concrète, s'appuyant sur des cas réels vécus dans de
grandes administrations, ainsi que dans les différents Etat-majors
centraux ou interarmées tant nationaux qu'internationaux. Il s'agit dans
les lignes suivantes d'étudier la culture militaire à la
lumière des programmes d'enseignement dispensés dans les
écoles d'enseignement militaire supérieur tant au Cameroun
(paragraphe I) qu'à l'étranger, en France et en Chine en
particulier (paragraphe II).
PARAGRAPHE I : LES ECOLES
D'ENSEIGNEMENT MILITAIRE SUPERIEUR AU CAMEROUN, DES ECOLES DE METHODE, DE
PROCEDURE ET DE TECHNIQUES
Au Cameroun, c'est le décret N° 2005/014 du 13
janvier 2005, qui porte organisation de l'enseignement militaire
supérieur. En effet, selon l'article 3 de ce décret,
l'enseignement militaire supérieur comporte trois niveaux de
formation : l'enseignement militaire supérieur
préparatoire ; l'enseignement militaire supérieur de premier
degré et l'enseignement militaire supérieur de second
degré. Le Décret N°2005/015 du 13 janvier 2005 portant
création et organisation du centre de l'enseignement militaire
supérieur, quant à lui, précise que le centre de
l'enseignement militaire supérieur assure les trois enseignements
pré-cités. Ce centre relève du commandement des
écoles et centres d'instruction Interarmées (COMECII) (article 2
al 1et 2). L'Ecole d'Etat-major (EEM) est chargée de l'enseignement
militaire préparatoire et de l'enseignement supérieur de
1er degré (article 9)(A), tandis que l'article 16 souligne
que l'enseignement militaire du second degré est assuré par
l'école nationale d'enseignement militaire supérieur
dénommée « Cours Supérieur
Interarmées de Défense » (CSID)(B).
A-L'ECOLE D'ETAT-MAJOR DU
CAMEROUN, LA GRANDE ECOLE DE COMMANDEMENT
Avant l'entrée en vigueur des décrets de 2005
sus-cités, l'EEM ne représentait qu'une division de l'EMIAC.
Cette école depuis peu est une Ecole Nationale à Vocation
Régionale (ENVR). Créée dans le but de réduire le
nombre de stagiaires étrangers, dans les écoles militaires
françaises, le concept d'Ecole Nationale à Vocation
Régionale permet : d'adapter la formation des stagiaires
étrangers aux réalités locales et régionales tout
en assurant à terme leur appropriation par les Etats dans lesquels elle
sont implantées, d'ouvrir l'accès des pays de la zone de
coopération de défense à une formation d'élites et
d'experts « à la française » (« la
formation en France », 2007). L'Ecole d'Etat-major assure
l'élaboration des programmes de formation (article 9 du décret
N°2005/015 du 13 janvier 2005). Cependant, étant une ENVR,la France
est associée à la définition des programmes de formation,
le respect de ce critère est assuré par la présence
systématique d'un directeur des études( ou fonction
équivalente) et de coopérant militaire français au sein de
chaque ENVR (Frère d'Armes N° 205,2006 :12). Ainsi,
l'admission à l'Ecole d'Etat-major se fait sur concours organisé
par l'école (article 9 du décret N°2005/015 du 13 janvier
2005). La réussite aux épreuves du cycle de formation
préparatoire, donne accès au diplôme d'Etat-major
(« la formation en France », 2007). Pour chaque formation
dispensée, des quotas de place sont réservés aux pays
hôtes et aux pays tiers ; cette répartition théorique
varie selon les types de formations proposées au sein des ENVR. Ainsi,
les places réservées aux pays hôtes varient de 25 à
50 % (Frères d'armes N° 205, 2006 :12). La formation
dispensée dans cette école concerne tant l'enseignement
général, les techniques d'Etat-major que l'enseignement
opérationnel. Ce dernier présente des connaissances sur les
armées, tant camerounaises que françaises, ainsi que les
techniques opérationnelles. Les techniques d'Etat-major portent sur des
généralités sur les Etats-majors, les travaux d'Etat-major
et les rédactions de documents d'Etat-major. L'enseignement
général quant à lui intègre les cours de relations
internationales ; de politique de défense du Cameroun, de
société défense ; de géopolitique et de
stratégie ; le droit des conflits armés ; l'anglais
opérationnel...
Aussi, constate-t-on que les officiers camerounais,
étudiant dans cette école approfondissent-ils non seulement leurs
connaissances sur l'armée camerounaise, la politique de défense
du Cameroun, la stratégie en générale, mais aussi
s'enrichissent-ils de l'expérience française en matière de
défense.
-La politique de défense du
Cameroun
La politique de défense camerounaise est basée
sur la « défense populaire ».le concept de
« défense populaire renvoie à l'énonciation d'un
principe, et se traduit par un choix stratégique » (Ela Ela,
2001 :151).
Le principe est celui de la république en armes,
c'est-à-dire que toutes les forces vives, ressources et énergie
sont engagées dans la défense. Ainsi, la défense populaire
est l'expression de la « capacité de la nation à
mobiliser toutes les énergies susceptibles d'assurer la
sécurité du pays et la sauvegarde de nos conquêtes dans la
voie du progrès » (Biya, 1983 :177-178). Elle est la
combinaison des efforts des actions menées concurremment par les forces
régulières et la population, armée ou non. Plus
prosaïquement, et de manière schématique, la défense
populaire est la réaction du paysan, de l'ingénieur, de
l'instituteur, du commerçant, du marabout ou du pasteur qui, sans trop
maugréer, donne sa vie ou celle de ses enfants pour défendre son
champ, son laboratoire, son école, son négoce, son minaret...
C'est la réaction du citoyen qui, en mettant toute son ardeur, est
prêt à se faire tuer pour défendre, contre un agresseur ou
un envahisseur sa patrie en danger.
En ce qui concerne le choix stratégique, la
défense populaire, pour être en accord avec l'idée
démocratique, doit être défensive et dissuasive (Ela Ela,
201 :152). Aussi, la recherche de la paix passe-t-elle par la
maîtrise des potentialités militaires dissuasives d'agression
extérieure (Mouelle, 1996 :65). De ce fait, privilégiant la
prévention et la dissuasion conventionnelle, la politique de
défense du Cameroun se fonde sur la recherche permanente
d'équilibre interne stable, sans volonté belliqueuse ou
expansionniste (Fame Ndongo, 2001). Une politique de paix impose d'avoir un
appareil défensif si efficace que toute pensée d'agression soit
découragée chez les plus insolents et les plus rapaces. En effet,
la stratégie défensive a pour but de décourager un
adversaire de prendre ou de poursuivre l'offensive (Reysset et Widemann,
1997 :62). L'armée ici joue un rôle d'avant-garde, encadrant
les masses populaires contre l'ennemi. Dans ce sens, Mao Zédong
cité par Philippe Moreau Defarges déclare « :
quelle est la muraille vraiment indestructible ? Ce sont les masses, les
milliers et les millions d'hommes, qui, de tout leur coeur, de toute leur
pensée soutiennent la révolution » (Moreau
Defarges, 1922 :46).
Les moyens militaires de ce jeune Etat qu'est le Cameroun
sont essentiellement affectés à la préservation de la
sécurité et de l'intégrité du territoire national.
L'effectif des forces armées camerounaises est relativement
modeste,comparé à ceux d'Etats comme l'Egypte,l'Afrique du sud,
le Nigeria, le Maroc...( De Lestapis et Viaud,1987 :138). On peut
s'interroger sur la capacité de ces forces à repousser, à
elle seules, toute agression extérieure ou à mener une longue
guerre d'usure. Aussi le Cameroun s'est-il placé sous la protection de
la France. Avec ce pays, un accord de soutien logistique a été
conclu le 14 février 1974. Cet accord n'a jamais été
publié et ses clauses demeurent secrètes. Les dispositions de
l'accord de coopération militaire franco-camerounaise sont quant
à elles connues (Mouelle, 1996 :64). Selon Viaud et De
Lestapis, « le Cameroun apparaît comme l'un des pays de
l'Afrique ayant le plus investi dans l'effort de défense » (De
Lestapis et Viaud, 1987 :140). L'on peut relever que le ministère
de la défense dispose généralement d'une des enveloppes
les plus substantielles du budget de l'Etat, bien loin devant le
Ministère des Relations Extérieures. En 1986/1987 par exemple,
sur une enveloppe globale de 800 milliards, le budget de la défense
s'élevait à 51,61 milliards de FCFA (franc de la
communauté financière africaine) et venait en deuxième
position après celui de l'éducation nationale : 70,79
milliards et bien loin devant celui des relations extérieures :
6,73 milliards. Les principaux pourvoyeurs en moyens de défense et
fournisseurs d'armement sont les Etats-Unis, la France, la Grande Bretagne,
l'Allemagne Fédérale, le Canada, la Suède, l'Israël
et la Chine (Mouelle, 1996 :65).
B-LE COURS SUPERIEUR
INTERARMEES DE DEFENSE, UNE ECOLE DE STRATEGIE AU SERVICE DE LA PAIX
Le Cameroun est depuis 2005, l'un des premiers pays africains
à délivrer un enseignement militaire supérieur du
deuxième degré (Frères d'armes N° 249,2006 :4).
En effet, le 19 décembre 2005 le CISD, Ecole militaire camerounaise
implantée à Yaoundé, a ouvert ses portes à la
première promotion formée de dix officiers stagiaires des Forces
de Défense Camerounaises. La deuxième promotion qui est
actuellement en cours de formation compte trois stagiaires étrangers
originaires du Burkina Faso, du Gabon et du Niger en plus des dix stagiaires
camerounais des trois armées et de la gendarmerie. Le recrutement dans
cette école se fait sur concours ouvert à l'intention des
diplômés d'Etat-major, officiers d'armées et de la
gendarmerie (Honneur et fidélité, 2005 :10).
Ce cycle de formation d'une durée de dix mois est
sanctionné par l'attribution du Brevet d'Etudes Militaire
Supérieur (B.E.M.S) (article 9 du décret N° 2005/014 du 13
janvier 2005). Conformément au décret N°2005/015 du 13
janvier 2005, le CSID est placé sous l'autorité d'un commandant,
assisté d'un commandant en second, exerçant les fonctions de
Directeur de l'enseignement, officier nommé par décret du
Président de la République. Placée sous l'autorité
d'un Directeur,officier nommé par décret du Président de
la République,la direction des études et programmes assure :
la préparation, la programmation et l'organisation de
l'enseignement ;les études relatives à l'évolution
des programmes et du contenu des enseignements (article 18).L'enseignement
général de défense dispensé au CSID intègre
la stratégie, la géopolitique, le droit, les relations
internationales, le management, la communication, l'économie...cet
enseignement vise à enrichir la culture générale des
officiers stagiaires, à approfondir leur réflexion sur la
défense et l'institution militaire,à développer
l'ouverture vers des instances extérieures, civiles et militaires,
nationales et internationales. L'enseignement opérationnel, quant
à lui, a pour objectif de donner aux stagiaires les connaissances
indispensables à la planification et à la conduite des
opérations interarmées nationales ou multinationales. A cet
effet, l'enseignement dispensé porte sur : les études
opérationnelles communes ; les études opérationnelles
spécifiques à chaque armée (Direction de l'enseignement du
CSID, mars 2007).
Le module portant sur l'enseignement général,
est illustratif du désir de l'Etat camerounais d'enrichir entre autres
la culture générale des officiers stagiaires ; de
développer leur ouverture vers des instances extérieures.
- la politique étrangère
Le Cameroun se doit de participer à la
sécurité en Afrique et partout où le mène sa
politique étrangère. Sa diplomatie depuis l'indépendance
est basée sur une politique de paix, de non alignement et
d'indépendance avec une place de choix qui est faite à la
coopération bilatérale interafricaine et internationale (Ahidjo,
1980 :2110). Dans cette perspective, la volonté camerounaise selon
le Président Ahidjo est « de faire en sorte que les forces
armées par la formation de ses cadres et son équipement, soient
toujours à la hauteur de leurs missions fondamentales ne traduit de
notre part, ni ambition expansionniste, ni besoin d'hégémonie.
Elle traduit tout simplement notre volonté d'être nous même,
d'assurer notre propre sécurité dans la paix et la justice. Le
Cameroun est et sera toujours un pays profondément pacifique,
résolument attaché aux idéaux de l'OUA et des Nations
Unies...les forces armées concourent à l'affirmation de la
personnalité nationale dans le monde et au progrès
général de la nation dans l'unité et la
solidarité » (Ahidjo,1980 :2008).
C'est dans cette même continuité que le 6
novembre 1982, lors de sa prestation de serment comme nouveau Président
de la République du Cameroun , Monsieur Paul Biya avait tenu à
rappeler les options de la politique extérieure de son pays :
« elles sont en Afrique, la non-ingérence dans les affaires
intérieures des Etats, le respect de leur souveraineté et de
l'intégrité territoriale, l'unité et la solidarité
africaine, la lutte résolue et irréversible contre les
dernières bastions du colonialisme et les méfaits de l'apartheid
en Afrique australe, le développement du continent. Elles sont sur le
plan international, la paix entre les nations, le non-alignement et la
coopération » (Mouelle, 1996 : 46).
En fait, pour le Président Paul Biya, le
non-alignement est une école de liberté, de réalisme et de
pragmatisme. Il ne signifie « ni le rejet de tout partenaire, ni le
refus de toute alliance...il consiste à sauvegarder en permanence la
possibilité et la liberté de négocier de nouvelles
alliances ou de dénoncer les anciennes » (Biya,
1987 :147-148).
Quant à l'unité africaine, elle apparaît
avant tout comme un objectif à atteindre. C'est dans cette perspective
que le Général de division René Claude Meka souligne que
« dans l'esprit de la promotion des relations de bon voisinage, de
fraternité, le Président de la République invite
régulièrement des hautes autorités militaires et des
détachements des armées de la sous-région à
participer aux cérémonies de la fête nationale du 20 mai.
Cette marque d'amitié s'inscrit dans le cadre de la politique
d'intégration régionale chère au Cameroun. En
matière de coopération de défense sous-régionale,
les chefs d'Etat des Etats membres de la Communauté Economique des Etats
de l'Afrique Centrale (CEEAC) ont décidé il y'a quelques
années, de l'organisation des manoeuvres multinationales tous les deux
ans dans l'un des pays de la communauté » (Honneur et
fidélité, 2006 :9). Un peu plus loin, à propos de
l'engagement de plus en plus remarquable des forces de défense du
Cameroun sur les théâtres d'opération extérieurs
concernant le maintien de la paix, le chef d'Etat-major des armées
précise que, le thème retenu par le chef de l'Etat pour le 20 mai
2006 : « forces de défense au service de la paix en
Afrique et dans le monde » est assez illustratif de l'option faite
par le Cameroun depuis plusieurs années. Dans cette perspective, le CSID
ayant pour devise : « la stratégie au service de la
paix », il confirme bien de ce fait la tradition pacifiste du
Cameroun. Ceci d'autant plus que les stagiaires de la première promotion
du CSID on participé aux dernières manoeuvres du RECAMP V
« exercice Sawa 2006 » tenues à Douala au
Cameroun.
PARAGRAPHE II : LES ECOLES
D'ENSEIGNEMENT MILITAIRE SUPERIEUR A L'ETRANGER, LIEUX DE FORMATION
MILITAIRE DE HAUT NIVEAU
Certains pays étrangers à l'instar de la France
et de la Chine, jouissent d'une longue expérience en matière
d'enseignement militaire supérieur. L'enseignement militaire de second
degré par exemple est assuré en France par le Collège
Interarmées de Défense et en Chine par plusieurs
établissements militaires, à l'instar de la National Defense
University ou encore la Defense and Strategy Institute sur laquelle portera
notre étude (A). Les programmes d'enseignement de ces écoles,
nous permettront de mieux percevoir les cultures militaires française et
chinoise (B).
A : LE COLLEGE INTERARMEES
DE DEFENSE DE FRANCE ET LA DEFENSE AND STRATEGY INSTITUTE DE CHINE
v Le Collège Interarmées de
Défense de France
Issu de l'Ecole de guerre, le Collège
Interarmées de Défense de France est une référence
en matière d'enseignement supérieur militaire. L'accès
à cette école est ouvert sur concours aux officiers titulaires du
diplôme d'Etat-major qui constitue le premier degré de
l'enseignement militaire supérieur. Le cycle de formation, d'une
durée d'un an, donne accès au brevet d'étude militaire
supérieur (BEMS). La formation qui porte sur l'enseignement
général et sur l'enseignement académique, couvre
globalement : la stratégie, la géopolitique, le droit, la
politique de défense, les travaux d'Etat-major, les études
opérationnelles spécifiques à chaque armée et les
études opérationnelles communes.
v La Defense and Strategy Institute de
Chine
Implantée à Pékin, la Defense and
Strategy Institute est l'une des nombreuses écoles de guerre que compte
la Chine et qui accueillent les officiers supérieurs camerounais. Les
militaires camerounais, diplômés d'Etat-major y accèdent
sur concours. Le BEMS sanctionne la fin du cycle de formation d'une
durée d'un an. Les enseignements qui y sont dispensés
intègrent entre autres la tactique, la stratégie, l'étude
de la langue chinoise, l'histoire militaire de la chine, la pensée
militaire chinoise, les techniques d'arts martiaux, etc.
B : LE REFLET DES CULTURES
MILITAIRES FRANÇAISE ET CHINOISE DANS LES PROGRAMMES D'ENSEIGNEMENT
La culture militaire française vue à
travers le programme d'enseignement du Collège Interarmées de
Défense.
Comme nous l'avons vu, la doctrine d'emploi de la force de la
France est contenue dans le livre blanc publiée en 1972 et qui a connu
des modifications en 1994. Ainsi, la nouvelle politique de défense qui
n'est plus essentiellement basée sur le nucléaire comme
stratégie dissuasive de défense promeut aujourd'hui la
prévention, la limitation par la force si nécessaire des crises.
D'où l'engagement international de la France dans les opérations
internationales de maintien de la paix. Elle travaille dans ce sens avec les
alliés comme le veut sa traditionnelle politique étrangère
qui encourage la culture interarmées et interalliées.
Contrairement à son passé marqué par une stratégie
de dissuasion nucléaire, depuis 1994 elle encourage l'emploi des forces
conventionnelles. Cette politique est le résultat de son adaptation
à l'environnement international.
La culture militaire chinoise vue sous le prisme du
programme d'enseignement de la Defense and Strategy Institute
La conception asiatique de la guerre
conserve une spécificité. Autour d'un noyau chinois central,
sorte de « paradigme du monde asiatique » d'où
rayonnent des concepts fondamentaux, il existe véritablement une culture
asiatique de la guerre qui a fondé en Asie extrême-orientale une
pratique relativement constante que l'on peut retrouver jusqu'à
l'époque contemporaine. La Chine constitue le point centrale et originel
de cette culture asiatique de la guerre, source d'un riche corpus qui a ensuite
inspiré une manière de « penser la guerre »
commune à l'ensemble du monde dit « sinisé »
(Corée, Japon, Vietnam), par l'intermédiaire de la diffusion des
écrits portés par une langue chinoise constitutive d'un domaine
culturel commun.
Ainsi, selon la conception chinoise classique, la
pensée stratégique proprement militaire n'est qu'une branche de
la stratégie politique qui découle elle-même d'une
réflexion philosophique. La conceptualisation de la pratique de la
guerre à été à la fois la plus ancienne et la plus
poussée avant de se propager d'abord dans le reste de l'Asie, ensuite
dans le monde occidental. En Chine, l'objectif de la guerre ou de la bataille
reste subordonné à son coût. Lorsque le monde occidental se
bat « contre » un ennemi, avec toutes les notions de
bravour, de duel, d'honneur qui confèrent au combat lui-même une
importance particulière, le monde asiatique se bat, selon les principes
énoncés par Sun Zi et ses disciples dans leurs traités
militaires, « pour »un avantage. Le combat ou la bataille
n'occupant en conséquence qu'une place très secondaire dans un
« art de la guerre » conçu d'une manière
beaucoup plus globale( De Montbrial et Klein, 2000 : 129).
CONCLUSION
En somme, l'on peut dire que de la formation initiale
à la formation continue la plus élevée, les officiers
camerounais se socialisent à de multiples cultures militaires dans les
diverses académies militaires fréquentées à travers
le monde. Ce processus de socialisation a lieu grâce aux enseignements
qui y sont dispensés. Dès lors, comment peut-on expliquer cette
tendance à l'extraversion de la culture militaire au Cameroun?
CHAPITRE III : LA POROSITE DE LA CULTURE MILITAIRE
CAMEROUNAISE
Comme nous l'avons dit au début de notre travail, la
culture stratégique du Cameroun n'existe à ce jour dans aucun
document publié. Mais La culture militaire, décrite comme la
« base de l'efficacité militaire », peut contribuer
à expliquer les « motivations, aspirations, normes et
règles de conduite », ce que l'on pourrait appeler l'essence
d'une armée dans une société donnée (Wakelam,
2007). Dans cette perspective, la culture militaire, l'un des
éléments déterminant de la culture stratégique,
prédispose dans le contexte camerounais, à la formation d'une
culture stratégique. La culture militaire au Cameroun est poreuse, dans
la mesure où elle ne représente pas un monolithe fermé au
monde extérieur. Elle est un système vivant, dynamique, ouverte
au monde. Cet état de chose prédispose la culture
stratégique au Cameroun à être une culture
stratégique hybride. Ces caractères de la culture militaire au
Cameroun sont non seulement le produit de ses spécificités
nationales mais aussi de l'évolution de l'environnement international
auquel elle s'adapte. C'est ainsi qu'au lendemain de l'indépendance, le
Cameroun va signer avec la France au départ, mais aussi avec d'autres
pays étrangers par la suite, des accords de coopération dans tous
les domaines et dans le domaine militaire en particulier. Ceci avec la
volonté de l'élite politique de bénéficier de
l'expérience et de l'évolution technologique
étrangère, mais aussi de ne pas évoluer en matière
de défense dans un vase clos. Aujourd'hui, plus de quatre
décennies après les indépendances, quel bilan pouvons nous
faire de la coopération entre le Cameroun et les pays amis en
matière de coopération militaire en général et dans
le domaine de la formation des officiers en particulier ? Le constat que
l'on peut faire en tout état de cause est que, les officiers
camerounais, tout au long de leur formation dans différents pays, se
retrouvent socialisés à des cultures militaire distinctes
(section I). Cette réalité n'est possible que parce que la
culture militaire camerounaise est poreuse (section II).
SECTION I : L'APPORT
EXTERIEUR DES CULTURES MILITAIRES DISTINCTES
Depuis son indépendance en 1960, le Cameroun
mène une diplomatie qui s'articule autour de quelques notions phares,
à savoir la présence active, la participation effective, le
rayonnement et la solidarité mondiale (voici le Cameroun,
1996 :38). Parmi les principes directeurs de ces notions, l'on compte en
troisième position la coopération internationale, après
l'indépendance nationale et le non- alignement. Le troisième
pilier qu'est la coopération internationale est un complément
nécessaire de sa politique de développement axé sur le
libéralisme communautaire (voici le Cameroun, 1996 :38). La
coopération est dans cette perspective un volet essentiel des forces de
défense camerounaises. Elle caractérise la capacité de
l'institution militaire à échanger avec l'extérieure
(honneur et fidélité, 2006 : 32). Dès lors, la
coopération ayant comme objectif l'instauration d'un climat
d'échange réciproquement bénéfique entre les
différentes parties, l'on peut se demander quels sont les enjeux de la
coopération entre le Cameroun et ses pays amis en matière
militaire, particulièrement en ce qui concerne la formation des
officiers camerounais. Cette coopération peut être perçue
comme un partenariat au service non seulement de l'amélioration de la
présence française, de son influence au Cameroun, mais aussi de
l'amélioration de la formation de l'élite militaire camerounaise
(paragraphe I). Aussi, la coopération militaire entre le Cameroun et ses
partenaires marocain, grec et chinois se présente-t-elle comme des
partenariats bénéfiques pour une diversification de la
coopération camerounaise en matière militaire (paragraphe II).
PARAGRAPHE I : LA
COOPERATION MILITAIRE FRANCO-CAMEROUNAISE, UN PARTENARIAT AU SERVICE DES
DEUX ETATS
La coopération militaire
franco-camerounaise, comme toute coopération, est un partenariat
bilatéral aux avantages partagés. Ainsi, la formation des
stagiaires camerounais par la France qui est l'une des formes de soutien
apporté par ce pays au Cameroun en matière de défense a
comme enjeu : une formation d'élites et d'experts
« à la française ». Ce point est positif
pour l'amélioration de la présence et de l'influence de la France
dans le pays (A). Cela permet au Cameroun de bénéficier d'une
formation militaire pointue avec pour objectif le perfectionnement des
capacités opérationnelles des forces de défenses
camerounaises (B).
A-UNE FORMATION D'ELITES ET D'EXPERTS « A LA
FRANÇAISE »
Les Etats ne veulent pas être forts juste pour
décourager l'adversaire et jouir de la paix ; ils veulent davantage
être craints, respectés et admirés. C'est dans cette
optique que Raymond Aron estime que les Etats veulent être puissants,
« c'est-à-dire, être capables d'imposer leur vouloir aux
voisins et aux rivaux, d'influer sur le sort de l'humanité, sur le
devenir de la civilisation » (Aron, 1962 :83). Ainsi, le
désir de puissance qui représente la toute première
ambition internationale d'un Etat, confère à ce dernier en dehors
de certaines qualités sur le plan sécuritaire
(l'inviolabilité, la non agression, etc.) et économique (la
facilité d'influencer les grands marchés internationaux, etc.),
la capacité sur le plan diplomatique de négociation et
d'obtention de ce que l'on désir ; la faculté de peser d'un
certain poids dans la politique mondiale, la facilité de soumettre les
autres Etats ou entités à sa manière de voir. L'exemple
ici est donné par la France vis-à-vis des pays africains (
Mbogning, 1998 :21).
La deuxième ambition des Etats sur le plan
international est l'accroissement de leur prestige dans le système
international ; il est vrai que ceci contribue toujours à rendre
l'Etat puissant : on peut même dire qu'un Etat puissant est
relativement prestigieux (Etats-Unis), même si le contraire n'est pas
toujours vrai (la France a en effet beaucoup de prestige, mais elle n'est pas
aussi puissante qu'elle veut le faire croire) (Mbogning, 1998: 22).
Précisons que dans la recherche de la puissance et du rayonnement, les
Etats forts ont souvent recours soit à des moyens physiques (guerre,
injonction, intimidation, démonstration de force,
interventionnisme...) ; soit à des méthodes douces qui sont
la culture, l'expansion de l'idéologie, l'aide internationale, la
publicité faite autour des connaissances scientifiques et techniques du
pays, la projection des potentialités industrielles, le
cérémonial diplomatique.
La France propose à ses stagiaires à travers le
monde, des enseignements qui correspondent à des domaines d'expertise
largement reconnus par la communauté internationale. L'un des objectifs
de la formation en France19(*) est de fournir aux forces de défense, les
personnels compétents dont elles ont besoin, polyvalent et capables de
s'adapter aux évolutions (technique, sociale et internationale).
Cependant, la Direction de la Coopération Militaire et de Défense
française (DCMD) souligne l'enjeu de la formation. Ceci dit la France
concourt-elle à l'instruction technique d'officiers étrangers
pour l'amélioration de la présence française et de son
influence sur la scène internationale, ceci en ouvrant l'accès
des pays de la zone de coopération de défense à une
formation d'élites et d'experts « à la
française » (« la formation en France »,
2007). Ainsi, l'officier camerounais exposé à un contexte
culturel et institutionnel particulier, verra ses décisions
déterminées en partie par ce contexte, résultat d'un
processus de socialisation. De même, à l'échelle d'un pays,
les décisions prises pourront dans une certaine mesure être
influencées en dehors de la culture propre du pays, par un contexte
culturel et institutionnel différent. C'est ce qu'exprime Peter
Katzenstein lorsqu'il soutient qu'en ce qui concerne la politique de
sécurité nationale, l'intérêt d'un Etat est
défini par des acteurs qui réagissent par rapport à un
contexte culturel et institutionnel qui détermine leur action, et non
pas nécessairement la quête du pouvoir matériel
(Katzenstein, 1996 :4).
B-UNE FORMATION MILITAIRE
POINTUE BASEE SUR L'AMELIORATION DES CAPACITES OPERATIONNELLES DES FORCES DE
DEFENSE DU CAMEROUN ET DE SON RAYONNEMENT DANS LE MONDE
La coopération militaire entre le Cameroun et la
France s'inscrit dans le cadre de l'accord de 1974. Elle a une double vocation
intérieure (Etat de droit et maintien de l'ordre) avec l'existence des
écoles nationales à vocation régionale
(« coopération culturelle, scientifique et
technique »,2007). Elle est regroupée au sein d'une mission de
coopération militaire et de défense, elle s'exerce à
travers des projets menés en partenariat avec les forces armées
camerounaises. Cette coopération se traduit par : la mise à
disposition du Cameroun des coopérants militaires techniques des trois
armées et de la gendarmerie repartis dans les villes de Yaoundé,
Douala et Garoua ; par la fourniture d'équipements et par l'envoi
de stagiaires en France et dans les écoles africaines nationale et
à vocation régionale (« Rapport d'information du groupe
d'amitié France-Cameroun »,2007).
De ce fait, l'on sait qu'en relations internationales, la
priorité pour un Etat est le souci de survie, c'est-à-dire
l'impératif du maintien de l'intégrité territoriale et de
la paix à l'intérieur de ses frontières ; autrement
dit, la recherche de la sécurité. Raymond Aron souligne à
ce propos que suivant le chemin des relations internationales, les
unités politiques, fières de leur indépendance, jalouses
de leur capacité de prendre seules leurs décisions, sont rivales
par le fait même qu'elles sont autonomes. Chacune ne peut, en
dernière analyse, compter que sur elle-même. Dans ces conditions,
conclut-il, le premier objectif que l'unité politique peut logiquement
viser est l'aspiration à la survie, l'assurance de sa
sécurité, la défense du territoire national. Ceci nous
permet de comprendre le désir de force des Etats érigé en
ambition immédiate (Aron, 1962 :82). Le Cameroun, bien que n'ayant
pas officiellement une volonté de puissance internationale ou
expansionniste (Fame NDongo, 2001), bénéficie tout de même
des aspects positifs du désir de puissance de la France . Il s'agit en
fait des connaissances scientifiques et techniques, de l'expérience
française en matière militaire, de la projection de ses
potentialités industrielles et de son aide internationale. Cette
coopération lui permet également d'évoluer au rythme du
monde sans être à la marge de l'environnement international.
Dans cette optique, la direction de la coopération
militaire et de défense (DCMD ) propose un éventail de
formation à haute valeur ajoutée, le plus exhaustif possible, de
façon à couvrir l'ensemble des savoir- faire nécessaire au
fonctionnement d'une armée. Aussi les enseignements proposés
correspondent-ils le plus souvent à des domaines d'expertise largement
reconnus par la communauté internationale (« la formation en
France », 2006). Dans cette perspective, le Cameroun a tout
intérêt à entretenir de bonnes relations avec la France en
matière de formation. De ce fait, le Cameroun en améliorant ses
capacités opérationnelles, enrichit sa culture militaire
défensive et pacifique.
Le 10 mars 1978, Pierre Mendès France déclarait
que « la paix dans le monde, est le premier objectif qui prime sur
tous les autres. Car aucun objectif ne sera jamais approché si la paix
n'est pas d'abord assurée » (Bertrand, 1996 :8).
Ainsi, la promotion de la paix par le Cameroun cadre avec
cette ligne éditoriale et est caractérisée par le
triptyque suivant : la sécurité à l'intérieur
des frontières camerounaises en se préservant des guerres civiles
et d'éventuelles agressions ; l'intangibilité des
frontières africaines (charte de l'OUA, article 3 alinéa
3) ; et de manière générale , la conduite des
relations extérieurs conformément au droit international .Il
en est ainsi de la proscription du recours à la force,de l'agression
dans les relations internationales. Dans ce sens, l'on peut se
référer à l'arrêt de la Cour Internationale de
Justice (CIJ) du 27 juin 1986 sur l' « affaire des
activités militaires et paramilitaire du Nicaragua et contre
celui-ci » (Ela Ela, 2001).
Le Cameroun entend faire du non recours à la force un
précepte fondamental de sa diplomatie. Du reste, il y'a lieu de rappeler
que ce pays n'a jamais été en guerre contre une puissance
étrangère ; tout au plus a-t-il connu quelques
différends sans grande ampleur avec quelques uns de ses voisins. Nous
pensons spécialement aux incidents frontaliers qui se sont produits avec
son voisin nigérian. De même, le Cameroun « n'a pas
eu recours à l'usage offensif ou préventif des armes contre
l'intégrité territoriale ou l'indépendance d'un autre
pays. En outre, il met un point d'honneur à s'abstenir de toute action
de subversion armée ou d'assistance militaire des forces rebelles contre
le gouvernement légal d'un autre Etat (cas de la sécession
biafraise). Le gouvernement camerounais s'est chaque fois joint au reste de la
communauté internationale pour condamner les violations patentes du
principe de prohibition du recours à la force dans le relations
internationales » (Ela Ela, 2001 :147).
Dans le même ordre d'idées, le 30 novembre 1990,
le Président Paul Biya affirmait, lors de la cérémonie de
la 25ème promotion des élèves officiers de
l'école militaire interarmées à Yaoundé qu'il
faisait confiance à l'armée et à ses chefs pour que le
pays « reste et demeure un Etat de paix. Un Etat
libre » (Afrique Défense, 1991 :15). Aussi, l'implication
du Cameroun dans les opérations de maintien de la paix en Afrique
témoigne-t-elle de sa fidélité à ses principes.
La politique de défense du Cameroun qui se veut
« populaire » est notamment
« défensive » et « dissuasive »
(Ela Ela, 2001 :62). La stratégie défensive a pour but de
décourager un adversaire de prendre ou de poursuivre l'offensive (
Reysset et Widemann,1997 :62). L'on peut opposer à l'agresseur une
résistance armée effective en cas d'attaque, mais l'on peut
également prévenir toute agression éventuelle : c'est
la dissuasion.
La dissuasion n'est pas une invention moderne liée
à l'existence des armes nucléaires. En témoigne l'adage
romain : « si tu veux la paix, prépare la
guerre ». Mais la dissuasion à
l'« ancienne » qui s'appui sur les forces armées
conventionnelles diffère néanmoins de la dissuasion
nucléaire (Reysset et Widemann, 1997 :62). La première
réponse est basée sur la perspective d'un échec d'une
entreprise d'agression. Cette perspective n'est jamais absolue. On peut
toujours essayer, s'arrêter et négocier si les choses se passent
mal. La dissuasion classique autorise un calcul entre le risque et l'enjeu. Au
contraire, la dissuasion nucléaire prétend paralyser l'adversaire
par la certitude d'un coup intolérable. Aucun enjeu n'est à la
hauteur du risque encouru dans la réflexion qui organise la dissuasion
nucléaire.
On peut, au vu de ce qui précède, dire que la
culture militaire camerounaise, bien qu'ayant sa spécificité,
évolue pourtant avec l'environnement international.
PARAGRAPHE II : LES
COOPERATIONS AVEC LE MAROC, LA GRECE ET LA CHINE : DES PARTENARIATS POUR
UNE DIVERSIFICATION DE LA COOPERATION EN MATIERE MILITAIRE
La coopération militaire entre le Cameroun et la
France en ce qui concerne la formation est une coopération
intéressante mais limitée car n'offrant que des places
très réduites au Cameroun. Alors ce dernier, face à la
nécessité de former ses officiers, a entamé des relations
avec d'autres pays amis disposés à lui fournir des places
supplémentaires en matière de formation à l'instar du
Maroc,de la Grèce et de la chine. Ce triple partenariat que le Cameroun
entretient avec ces trois pays présente des avantages partagés
pour les différentes parties. La coopération entre le Cameroun et
le Maroc d'une part, le Cameroun et la Chine d'autre part en matière de
formation permet au Cameroun d'enrichir sa propre culture militaire. La Chine
et le Maroc quant à eux accroîssent leur prestige sur la
scène internationale (Mbogning, 1998 :21) (A). Aussi, la
coopération camerouno-grècque présente-t-elle des
avantages similaires pour les deux parties (B).
A-LA CHINE ET LE MAROC :
PARTENAIRES DU CAMEROUN EN MATIERE DE COOPERATION MILITAIRE
En ce qui concerne les ambitions des Etats dans les relations
internationales, l'on compte comme première ambition, le désir de
puissance et en deuxième lieu la recherche ou la croissance du prestige
de l'Etat dans le système international. La coopération militaire
camerouno-marocaine et sino-camerounaise en matière de formation ne date
respectivement que des années 1980 et 2000 (BSFIFC, MINDEF). Le Maroc
est un pays africain mais allant dans le sens de la théorie
réaliste des relations internationales, le Maroc comme tout pays a pour
ambition d'étendre son prestige sur le plan international. La Chine
quand à elle est aussi un puissant pays du tiers monde. Mais, se
développant à une vitesse fulgurante, elle est de l'avis des
observateurs la future première puissance mondiale. Elle aussi tend donc
à étendre son prestige à travers le monde.
Le Cameroun, quant à lui, bénéficie de
la formation de ses officiers, dans plusieurs secteurs de la défense
militaire. Il profite aussi des avancées du Maroc et de la Chine en
matière militaire. Il peut également s'enrichir de certaines
spécificités marocaines et chinoise en matière de
défense, compatibles avec la culture militaire camerounaise, à
l'instar de la culture de l'éthique et de la morale dans
l'accomplissement de leur fonction de militaire (entretien avec un ancien
stagiaire de l'Académie royale de Meknès) ainsi que les
techniques guerrières et les arts martiaux chinois.
B-LE PARTENARIAT
GRECO-CAMEROUNAIS : UN PARTENARIAT AUX BENEFICES MUTUELS
La coopération militaire
entre le Cameroun et la Grèce, particulièrement en matière
de formation date des années 1980 (BSFIFC, MINDEF). La Grèce est
un pays qui peut apporter au Cameroun son immense expérience en
matière militaire et sa perception particulière du concept
d' « humanisme ». En effet, le pays d'Alexandre Le
Grand a derrière lui une grande expérience guerrière.
Mère de la culture occidentale, la Grèce a répandu
l'Hellénisme le mode de vie et la culture de la Grèce au
gré de ses conquêtes. L'Hellénisme peut être
défini comme une approche de la vie qui se concentre totalement sur
l'être humain. De ce fait, lors de leurs conquêtes, les guerriers
grecs ont introduit dans la conscience humaine une idée qui constituera
plus tard l'un des plus puissants leviers intellectuels de l'histoire
moderne : l'humanisme. L'être humain est au centre de toute chose.
L'esprit humain, avec son aptitude à observer et à comprendre les
choses rationnellement, constitue l'alpha et l'oméga de l'univers. C'est
là une idée qui vient des grecs, et qui permet aux militaires de
percevoir la violence, la guerre avec plus d'humanisme (« l'Empire
Grec »,2007). Voilà où se situe l'un des
intérêts du Cameroun à entretenir des relations militaires
avec le berceau de la civilisation occidentale. La Grèce, à
l'instar de plusieurs pays du système international, recherche la
puissance et le prestige.
SECTION II : LA
CULTURE MILITAIRE CAMEROUNAISE, UNE CULTURE MILITAIRE POREUSE
La porosité de la culture militaire camerounaise
découle de sa capacité à s'adapter à
différents contextes, culturels. Elle ne représente pas un bloc
fermé, rebelle à toute évolution, tout apport
extérieur. Dans ce contexte, cette culture dans son désir
d'évoluer avec son environnement, ne peut de ce fait être l'objet
d'une territorialisation (paragraphe I). Cette ouverture au monde, la
transforme donc au gré des interactions sociales (paragraphe II).
PARAGRAPHE I :
l'INOPERATIONNALITE RELATIVE DE LA TERRITORIALISATION DE LA CULTURE
MILITAIRE AU CAMEROUN
La culture militaire constitue un des fondements de la
compétence de l'officier et lui permet d'optimiser ses actions à
finalité opérationnelle, et sa crédibilité dans un
environnement militaire, civil, et administratif concurrentiel
(« Directive initiale ; culture militaire », 2006).
Dans ce sens, la fluidité de la démarcation entre l'interne et
l'externe en matière militaire (A), fait de la culture militaire
camerounaise, une culture militaire ouverte au monde (B).
A-LA FLUIDITE DE LA DEMARCATION
ENTRE L'INTERNE ET L'EXTERNE EN MATIERE MILITAIRE
En France, les
scolarités des écoles de Saint Cyr Coëtquidan et de
l'enseignement militaire supérieur sont deux points essentiels
garantissant l'approfondissement d'une culture militaire (« Directive
initiale ; culture militaire », 2006). Cette
réalité est également vérifiable au Cameroun,
puisque les objectifs assignés aux élèves officiers de
l'EMIAC durant leur formation de base est entre autres : la maîtrise
des savoir-faire militaires ; l'ouverture d'esprit de l'officier par la
culture générale et la compréhension des enjeux
socio-politiques contemporains (Division Programmation Initiale (DPI) de
l'EMIAC) ; ceci permet à l'officier d'entamer sur de bonnes bases
sa familiarisation avec la culture militaire. Ce qui le prépare mieux
à une meilleure assimilation des enseignements ultérieurs.
C'est dans cette perspective que
l'enseignement militaire supérieur répond au souci du chef de
l'Etat de compléter la formation locale du personnel militaire, en
disposant sur place au Cameroun des écoles d'enseignement militaire
supérieur à l'instar du CSID créé en 2005. Cet
enseignement permet ainsi à l'officier camerounais de parfaire sa
culture militaire. Nous voulons ici souligner que le dispositif d'appropriation
d'une culture militaire mis en place dans un pays comme le Cameroun n'est pas
une initiative qui lui est propre. C'est pour cela que dans un contexte
international marqué par la fluidité de la démarcation
entre l'interne et l'externe (Sindjoun, 2000 :10), il n'est pas admis au
Cameroun d'enfermer l'armée dans un vase clos tel que celui de la
tradition. Car, « les forces armées camerounaises, doivent
également épouser leur temps, celui de la modernité,
c'est-à-dire s'adapter au changement aussi bien sur le plan technique et
technologique que sur celui de la doctrine et de la
stratégie » ( Biya,2000). Ainsi, la tradition militaire
camerounaise est -elle pour ce pays un noyau dur en matière militaire.
Mais, le Cameroun étant le terrain de rencontre de diverses cultures
militaires, il ne peut dans cette mesure que s'ouvrir au monde.
B-LA CULTURE MILITAIRE
CAMEROUNAISE : UNE CULTURE OUVERTE A L'EVOLUTION DU MONDE
La culture
militaire comme l'un des fondements de la compétence de l'officier dans
un pays ne peut être repliée sur elle-même. Ceci parce que
l'évolution du monde entraîne la mutation incessante des
savoir-faire, qui exigent la mise en oeuvre des techniques et des moyens
militaires toujours plus sophistiqués. Dans cette perspective, le
gouvernement camerounais s'efforce dans la mesure de ses possibilités,
de dégager des moyens de nature à permettre à
l'armée camerounaise d'acquérir des matériels et des
équipements modernes, à maintenir ceux qui sont en dotation,
à construire et réhabiliter les infrastructures militaires dans
le pays (Biya, 2000).
Le Colonel Yakovleff fait une
distinction entre « culture du militaire » et
« culture militaire » quand il insiste à propos du
militaire sur l'ardente obligation qu'il a de développer sa culture
(Yakovleff, 2007). En tout état de cause, la culture du militaire est un
élément indispensable à la culture militaire, dans le
contexte culturel et institutionnel actuel. Ce contexte est marqué par
l'émergence de nouvelles menaces (terrorisme) et l'implication de
l'armée dans les missions de préservation et de maintien de la
paix à travers le monde. Dans cette mesure, les formateurs et les
officiers en général doivent être particulièrement
vigilants, et garder un équilibre entre les savoir-faire d'une part
(techniques et tactiques) et le savoir -être d'autre part. ceci dit, en
favorisant le discernement, l'intelligence face à une situation et le
travail intellectuel, la culture militaire participe à renforcer le
poids du savoir-être (« Directive initiale ; culture
militaire, 2006). C'est dans ce sens que les épreuves de culture
générale dans toutes les écoles militaires ont pour objet
entre autres, de vérifier les qualités de compréhension et
d'analyse d'un thème, de synthèse et d'expression d'une
pensée personnelle, de force de conviction et d'objectivité du
militaire, tout en repérant le niveau de culture du candidat et son
intérêt pour les problèmes du monde.
PARAGRAPHE II : UNE
CULTURE MILITAIRE CAMEROUNAISE COMME PRODUIT DES INTERACTIONS SOCIALES
A l'analyse, l'on constate qu'une
culture militaire proprement camerounaise, se construit à partir d'un
foisonnement de cultures militaires étrangères. Ces
dernières constituent un environnement social externe au pays, mais
déterminant pour la formation de sa culture militaire (A). Cette
construction sociale de la culture militaire camerounaise n' est possible que
parce que cette dernière est poreuse (B).
A-L'ENVIRONNEMENT SOCIAL COMME
FACTEUR STRUCTURANT DE LA CULTURE MILITAIRE DU CAMEROUN
Selon
J.Katzenstein, l'identité des Etats sur la scène internationale
émerge des interactions avec divers environnements sociaux
(Katzenstein, 1996 :23). Car l'Etat en tant qu'acteur social est
influencé par son environnement. La recherche de la paix tous azimuts
est un pôle de la politique camerounaise nationale et internationale.
Dans cette mesure, malgré le désir sans cesse renouvelé
d'adaptation de l'armée camerounaise aux réalités
nouvelles, le président Paul Biya précise que se battre pour son
pays peut se faire pacifiquement (Biya, 1989). L'armée camerounaise n'a
rien de comparable à une machine de guerre avide de combat et aveugle
dans ses interventions. Elle est un instrument de paix tant à
l'extérieur qu'à l'intérieur du Cameroun. Son rôle
essentiel est de prévenir toute atteinte à la
souveraineté, à l'intégrité et à la
stabilité du pays. Le Cameroun est un Etat fondamentalement pacifique.
Son seul combat : oeuvrer en Afrique et dans le monde en faveur de la
paix, des relations de bon voisinage et de la coopération entre les
peuples.
Cette position défendue
par l'Etat camerounais, va dans le sens de celle préconisée par
la communauté internationale en matière de
sécurité. Ceci simplement parce que le Cameroun adhère
à la compréhension des évènements, aux
préoccupations en matière de sécurité de la
communauté internationale. Ainsi, leur rapport aux défis de
sécurité se reflète dans les normes, règles et
institutions qui existent depuis la fin de la deuxième guerre mondiale
(ONU) et qui continue d'évoluer. C'est dans ce sens que Peter
Katzenstein, prenant le cas canadien, pense que l'identité canadienne,
en ce qui a trait aux questions de sécurité, est plus
définie en terme de maintien de la paix que de défense de la
souveraineté nationale (Roussel et Robichaud, 2004). De même, pour
David Dewitt, les canadiens sont ainsi des universalistes et se
définissent comme des « citoyens du monde » lorsque
vient le temps de parler de défense et de sécurité
(Roussel et Robichaud, 2004).
Aussi, l'on peut donc comprendre
que l'effort de formation et d'équipement des FAC correspond-t-elle
à la constante volonté du Cameroun d'assurer par elle-même
sa propre sécurité. Cette volonté ne signifie nullement
selon le Président Ahmadou Ahidjo un repli sur soi. Bien au contraire,
elle laisse dans le respect de notre politique de paix, d'indépendance
une place de choix à la coopération bilatérale,
interafricaine et internationale (Ahidjo, 1980 : 2110). Aujourd'hui plus
que jamais, cette coopération est rendue nécessaire par la
complexité des problèmes économiques et de
sécurité auxquels les Etats, quels qu'ils soient sont
confrontés. C'est ainsi que le Cameroun adhère à la
nouvelle donne internationale en intervenant activement dans les
opérations de maintien de la paix en Afrique et dans le monde.
B-LA CONSTRUCTION SOCIALE DE LA
CULTURE MILITAIRE CAMEROUNAISE COMME CONSEQUENCE DE SA POROSITE
La culture
militaire camerounaise s'adapte sans difficulté aux
réalités nouvelles. Elle se laisse pénétrer par des
réalités sociales autres. Tous ces apports extérieurs
concourent ainsi la construction d'une culture militaire camerounaise
spécifique formée à la base des éléments de
son environnement. Ainsi, ramenant à notre contexte la position d'Arjun
Appadurai sur les nationalismes modernes comme produit de l'imagination
collective et non comme fait naturel, nous dirons que la culture militaire au
Cameroun s'établit moins sur des faits naturels que sur le projet
culturel quintessenciel , produit de l'imagination collective ( Appadurai,
2001).
CONCLUSION GENERALE
La culture stratégique modèle l'approche des
questions de défense au sein d'une nation et elle engendre
« un style national » dans la politique de
sécurité et dans la conduite de la guerre. Elle résulte
d'une histoire nationale spécifique vécue dans un contexte
géographique plus ou moins unique, bien que parfois mouvant (Gray,
1980). Pour que l'on puisse parler de culture stratégique dans un pays
donné, il faut que les objectifs politiques soient effectivement
traduits dans la pratique en buts militaires. Aujourd'hui au Cameroun se pose
une problématique nouvelle : celle de l'existence d'une culture
stratégique camerounaise. Ainsi donc, dans le cadre de notre travail sur
la culture stratégique camerounaise, nous avons choisi de
privilégier la variable militaire, en l'occurrence : la culture
militaire. Cette dernière se présente comme un ensemble
d'idées, de croyances, de préjugés et de perceptions qui
déterminent la réponse d'une armée aux tâches que
lui assigne l'autorité politique (De Montbrial et Klein,
2000 :152). Elle est une variable pertinente de notre étude. Ceci
dans la mesure où, la culture militaire est l'un des six facteurs
structurant d'une culture stratégique selon Lord Carnes (Colson, 2006).
La culture militaire se transmet par l'enseignement, voire
par l'habitus professionnel. Elle s'acquiert dans les écoles de
formation militaire lors des stages. En se formant dans les écoles
étrangères dans le cadre des différents accords de
coopération, les officiers camerounais sont dépositaires de
cultures militaires diverses. Le Cameroun étant dans ce contexte le
terrain de multiples cultures militaires, la culture militaire proprement
camerounaise se présente comme étant poreuse, prédisposant
de ce fait à la formation d'une culture stratégique hybride au
Cameroun.
La méthode constructiviste nous a permis tout au long
de notre étude de comprendre que les réalités sociales ne
sont pas données, elles sont plutôt construites (Bourdieu, 1987).
Sur le plan international, le constructivisme insiste également sur le
caractère socialement construit des relations internationales. Dans
cette perspective, selon Peter J.Katzenstein (Katzenstein, 1996 :23)
l'identité des Etats sur la scène internationale émerge
des interactions avec différents environnements sociaux. Ainsi, la
culture militaire camerounaise se construit au contact des cultures militaires
diverses ; d'où son caractère poreux. Dans cette mesure,
cette dernière s'adapte sans difficulté aux
réalités nouvelles. Le gouvernement, dans son désir
d'adapter l'armée camerounaise au contexte culturel et institutionnel
international, tient à améliorer les performances
professionnelles des militaires camerounais en acquérant des
matériels et des équipements modernes dans la mesure de ses
possibilités.
En définitive les difficultés que rencontre le
chercheur camerounais désireux de présenter comme ailleurs
(France, Etats-Unis...) une culture stratégique proprement camerounaise
tiennent de certaines raisons liées, d'abord à la
présentation globale de la politique de défense du Cameroun,
ensuite au manque relatif de visibilité de l'opérationnalisation
dans une démarche purement camerounaise de cette politique de
défense en objectifs militaires. En effet, les documents qui
présentent une certaine clarté et font preuve de
précisons, de concisions en ce qui concerne la doctrine et le
système de défense camerounais sont rares au point où,
l'on en vient à se demander s'il existe, en dehors de la doctrine
d'emploi des forces camerounaises éditée en 1980 et
classée « secret défense »,20(*) des documents qui
définissent clairement le système de défense camerounais
et la doctrine mise en place par le pays pour une opérationnalisation
efficace et efficiente de ce système. Néanmoins, l'on doit avoir
à l'esprit que, cette doctrine ne peut être efficace que dans la
mesure où la politique de défense vise au final la
concrétisation en forces et moyens des options de la stratégie
nationale (David, 1984 :170).
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OUVRAGES
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culturelle. Paris. Anthropos.
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TEXTES ET LOIS
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Constitution française de 1958
Décret N°2001/177 du 25 juillet 2000 portant
organisation du Ministère de la défense
Décret N°2001/181 du 25 juillet 2001 Portant
organisation de la Gendarmerie Nationale
Décret N°2001/182 du 25 juillet 2001 fixant les
attributions des chefs d'Etat-Major
Décret N°2001/183 du 25 juillet 2001 portant
réorganisation des formations de combat de l'armée de terre
Décret N°2001/187 du 25 juillet 2001 fixant les
conditions de recrutement et d'admission dans les écoles militaires de
formation des officiers
Décret N° 2001/188 du 25 juillet 2001, portant
statut particulier du corps des officiers d'active des forces de
défense
Décret N°2002 portant création et
organisation des forces de défense
Décret N°2002/ 036 du 04 février 2002
portant création et organisation des forces de la marine nationale
Décret N°2002/037 du 04 février 2002,
portant création et organisation des forces de l'armée de
l'Air
Décret N°2004/180 du 1er juillet 2004
portant réorganisation de l'école militaire interarmées
Décret N°2005/ 014 du 13 janvier 2005 portant
organisation de l'enseignement militaire supérieur
Décret N°2005/015 du 13 janvier 2005 portant
création et organisation du centre de l'enseignement militaire
supérieur.
Décret N°540 du 05 novembre 1983 portant
organisation du ministère des forces armées et du
commandement
Décret N°66 /DF282 du 18 juin 1966 portant
organisation du commandement de l'armée de terre
Décret N°75-700 du 06 Novembre 1975 portant
règlement de discipline générale dans les forces
armées
Décret N°83/539 du 05 novembre 1983 portant
création d'un Etat-Major particulier du Président de la
République
Décret N°86/286 du 05 avril 1986 portant
création d'un corps national des sapeurs pompiers
Instruction présidentielle N°16 / CAB.PRE du
1er septembre 1972 portant conduite des efforts de
défense
Décret présidentiel N°60/198 de 1960
portant organigramme du Ministère des forces armées
Loi N°67/LF/9 DU 12 juin 1967 portant organisation
générale de la défense au Cameroun
Ordonnance française du 07 janvier 1959
Ordonnance N°59 /57 du 11 novembre 1959 portant
création de l'armée camerounaise et
Organisation
générale de la défense
Ordonnance N°59 /57 portant organisation
générale de la défense
Ordonnance N°60 /20 du 22 février 1960 portant
organisation et réglementation de la gendarmerie
PROTOCOLE DE RECHERCHE
Le thème de ce mémoire s'intitule : Le
processus de formation de la culture stratégique
camerounaise : analyse du rôle des écoles militaires. Le
caractère relativement nouveau de ce thème, a suscité de
nombreuses difficultés, au nombre desquelles l'accès à
l'information. En effet, la réticence de certaines personnes
interrogées à répondre à nos questions, ainsi que
la rareté des documents portant sur la question, ont été
nos principales difficultés.
Les personnes avec lesquelles nous avons eu des entretiens
officiels au cours de ces recherches se situent notamment au niveau des forces
armées et de la Gendarmerie Nationale. Il s'agit :
1-du Général de corps d'armée
OumarouDjam Yaya (Gendarmerie Nationale)
2-du Général de brigade Ngambou Esaie
(Commandant du CSID)
3-du Colonel Mouaha Bell (Major Général de
l'Etat-Major de l'armée de l'air)
4-du Colonel Tetmoun André (chef des renseignements
militaires)
5-du Colonel Mahamat (chef du secrétariat
militaire)
6-du Capitaine de vaisseau Jean Pierre Meloupou (Chef
Division africaine; MINDEF)
7-Capitaine de vaisseau Tchouatat Joseph (Commandant de
l'Ecole d'Etat-Major)
8-du Colonel Mentz CSID)
9-du Capitaine de frégate J.Georges Njofang (Directeur
des études et programmes à l'EMIAC)
10-du Commandant Nzameyo Richard (Chef Division programmation
initiale de l'EMIAC)
11-du commandant Mabaly Christian (Chef BSFIFC)
12-du Commandant Mekouabouth Mesmir (Etat-Major de
l'armée de l'air)
13-du commandant Adé(Etude Générale et
Relations Internationales (EGRI /MINDEF)
14-du Capitaine Ateba (Gendarmerie Nationale)
15-du capitaine Onana Mfegue (MINDEF)
16-du Lieutenant Yigi (instructeur en police
judiciaire : Gendarmerie Nationale)
17-du Lieutenant Bateng Liliane (Etat-Major de l'armée
de l'air)
18-du Lieutenant Mevono Dieudonné (Commandant
d'instruction des transmissions : Gendarmerie Nationale)
19-du Lieutenant Ndzeng Mbida (Commandant du 111e
escadron blindé de reconnaissance au Quartier Général)
20-de M. Mpégna (Documentariste BSFIFC/MINDEF)
Nous avons eu avec ces autorités des entretiens. Nos
préoccupations variaient selon les écoles visitées. Les
militaires interrogés se distinguaient par la diversité de leurs
filières de formation ainsi que par la variété des
écoles militaires fréquentées. Globalement, nos questions
portaient sur :
-Le nombre d'officiers formés à
l'étranger, sur la période la plus longue possible et selon la
disponibilité des informations : par armée et par pays
choisis ;
-Les noms des écoles fréquentées, les
programmes d'enseignement qui y sont dispensés ;
-Les conditions d'admission ;
-Les programmes d'enseignement de certaines écoles
camerounaises d'officiers ;
-Les conditions d'admission.
ANNEXES
Source : Ahidjo. A. 1980. Anthologie des discours,
1957-1979. Les Nouvelles Editions Africaines. Tome III. Pp 1243-1247
ANNEXE 1
DISCOURS DU PRESIDENT AHMADOU AHIDJO SUR LES MISSIONS
DE L'OFFICIER DANS L'ARMEE CAMEROUNAISE
Source : Ahidjo. A. 1980. Anthologie des discours,
1957-1979. Les Nouvelles Editions Africaines. Tome IV. Pp 2004-2008
ANNEXE 2
DISCOURS DU PRESIDENT AHMADOU AHIDJO SUR LES CAPACITES
DE L'ARMEE CAMEROUNAISE A S'ADAPTER A SON ENVIRONNEMENT
ANNEXE 3
DISCOURS DU PRESIDENT AHMADOU AHIDJO SUR LA NECESSITE
D'ALLIER VOLONTE DE PAIX ET CAPACITES OPERATIONELLES AU CAMEROUN
ALLOCUTION DE S.E. AHMADOU AHIDJO : « LE
CAMEROUN EST UN PAYS PACIFIQUE QUI CROIT AUX VERTUS DU DIALOGUE PLUS QU'A
L'EXERCICE DE LA FORCE » DECLARE LE CHEF DE L'ETAT
Yaoundé, 29 juillet 1978
Officiers,
Sous-officiers,
Gradés et soldats,
C'est avec grand plaisir vous le saviez, que je préside
encore aujourd'hui, la traditionnelle cérémonie de remise des
épaulettes à la nouvelle promotion d'Officiers frais
émoulus de l'EMIA notre grande école de formation militaire.
Il n'y a pas de doute que ma présence à cette
cérémonie qui constitue un grand événement pour la
grande famille des Forces Armées revêt comme je cesse de
l'affirmer une grande signification : elle témoigne à la
fois de la sollicitude et de l'intérêt permanent que le peuple
Camerounais, le Gouvernement et moi-même accordons aux Forces
Armées et aux problèmes de défense.
Cette sollicitude et cet intérêt sont une
exigence de la paix, de la souveraineté, de la sécurité et
de l'intérêt national.
Cette exigence se manifeste d'une manière
particulièrement impérieuse, voir impérative, aujourd'hui
où notre continent est plus que jamais exposé aux
ingérences extérieures et aux effets de domination des
puissance, des intérêts et des idéologies qui menacent et
la stabilité des états africains et leur volonté de
progrès.
Cette situation à la fois inédite et dangereuse
contribue sans aucun doute à donner un relief particulier au rôle
des Forces Armées dans la Nation qui faut-il le rappeler ont la
responsabilité de protéger en toutes circonstances
l'unité, l'intégrité territoriale et la
souveraineté de la Nation.
Il est évident que les Forces Armées ne peuvent
assumer efficacement cette lourde responsabilité c'est-à-dire
être à la hauteur de leur importante et difficile mission dans la
Nation que si elles sont animées d'un patriotisme ardent et à
toute épreuve.
Ce patriotisme est certes demandé aux Forces dans leur
ensemble. Il est plus spécialement exigé de ses cadres et doit,
chez eux se traduire par une foi incompressible dans les hautes
destinées de la Patrie et un dévouement sans limite à
toutes les causes nationales.
VOLONTE DE PAIX
C'est pourquoi dans le contexte de l'Afrique contemporaine tel
qu'il est la promotion d'Officiers que nous fêtons aujourd'hui a
reçu Foi et Dévouement comme nom de baptême. Ce faisant,
nous avons voulu tout en réaffirmant notre constante volonté de
paix exprimer sans équivoque notre détermination, la ferme
détermination du peuple camerounais, de défendre sans
défaillance en toutes circonstances et par tous les moyens à sa
disposition l'indépendance nationale contre toutes les menées
subversives et toutes les entreprises de domination et de
déstabilisation d'où qu'elles viennent.
Il faut cependant le dire aussi : pour être a la
hauteur de leur mission si importante pour l'avenir de la Nation, les Forces
Armées doivent en leur sein combattre énergiquement tout
relâchement de la discipline tant il est vrai comme on l'a dit que la
discipline fait la force des Armées. Il doit par conséquent
être dans cette perspective que la discipline doit être
respectée à tous les niveaux et que tout manquement à son
application doit être fermement sanctionné.
Jeunes officiers,
Voici donc venu ce moment tant attendu de votre accession
à l'état d'officier. Ce jour mémorable pour chacun de vous
marque votre entrée dans l'exaltante aventure de la vie active et le
début d'une carrière que je vous souhaite longue et brillante.
C'est le couronnement de trois années d'efforts ininterrompus à
l'Ecole Militaire Inter-Armées et dans les centres d'Instruction.
En cette circonstance solennelle, il me plait en ma double
qualité de Chef de l'Etat et de Chef Suprême des Forces
Armées de vous en féliciter et de féliciter vos
professeurs civils, vos instructeurs militaires et les cadres de l'école
qui n'ont pas ménagé leurs efforts pour faire de vous
aujourd'hui des soldats accomplis.
J'adresse en particulier mes chaleureuses félicitations
aux officiers Voltaïque de cette promotion dont la présence ici
témoigne bien une fois de plus de la vocation inter-africaine de l'Ecole
Militaire Inter-Armées ainsi que des excellentes relations
d'amitié et de coopération fraternelle et confiante qui existe
entre la République Unie du Cameroun et la République de
Haute-Volta.
EXECUTANT MODELE
Jeunes officiers,
Je lis à juste titre sur vos jeunes visages votre joie
et votre fierté de porter aujourd'hui ces épaulettes garantes de
votre état d'officier. Elles vous comblent d'honneurs autant qu'elles
vous confèrent de l'autorité sur vos subordonnés. Mais il
convient aussi de rappeler qu'elles sont le symbole de l'homme d'action de
l'homme soldat c'est-à-dire d'un homme revêtu de
responsabilités particulières dans la Nation et qui doit faire
preuve de nombreuses qualités.
En effet, l'officier, c'est tout d'abord un exécutant
modèle. Cet état suppose une parfaite maîtrise du
métier grâce aux connaissances professionnelles que vous avez
acquises au cours de votre formation.
L'officier est ensuite un meneur d'hommes. A ce titre, il doit
inspirer confiance. Cela demande des valeurs physiques et morales, des
qualités de jugement et de caractère, des valeurs humaines.
L'officier est enfin un homme de culture. Cela demande de la
persévérance dans l'effort d'adaptation aux progrès du
monde moderne. En effet, l'officier doit avoir à coeur d'entretenir et
d'améliorer sans cesse le capital de connaissances militaires et
générales que l'école s'est attachée à lui
donner. Il doit, en un mot, vivre au rythme de l'évolution des
idées et des techniques de son époque.
C'est au prix de cet effort d'adaptation constante que vous
serez aptes à jouer le rôle qui est le votre : celui de
commander des hommes dans le cadre de notre commune volonté constante de
consolider et de préserver l'unité, l'intégrité, la
souveraineté et l'indépendance de la Nation Camerounaise. A cet
égard, le nom de votre promotion foi et dévouement, ne manque pas
de signification. Il vise, comme je l'ai déjà souligné
tout à l'heure à renforcer votre confiance en l'avenir ainsi que
votre détermination à servir la Patrie.
FOI ET DEVOUEMENT
En effet, plus que n'importe quelle autre entreprise humaine,
le métier des armes nécessite foi et dévouement sans
lesquels l'action militaire ne serait qu'une simple aventure sans lendemain.
C'est dire que la vocation qui vous anime et vous a conduit a
choisir de faire partie de la grande famille des Forces Armées doit
être l'expression de cette foi et de ce dévouement, source des
plus grandes vertus militaires parce que synonymes de patriotisme et de
loyalisme.
Dois-je rappeler la place de l'officier dans la nation ?
Il est, avant tout citoyen soldat. De ce fait, il symbolise la loyauté,
la discipline, l'abnégation, la rigueur morale, le courage et la
fidélité. Toutes ces valeurs reposent, vous vous en doutez sur
la foi patriotique de l'officier.
S'agissant du dévouement, l'officier, en plus de ces
qualités foncières, doit, en particulier, se distinguer par sa
disponibilité permanente, son sens des responsabilités, le
respect qu'il voue aux moyens humains et matériels de l'Etat dont il a
la charge et, enfin, par l'esprit de sacrifice qu'il manifeste dans la
défense des causes nationale.
Jeunes officiers,
Comme vous le constatez, l'état d'officier comporte, en
définitive, plus d'obligations que de droits.
En effet, si l'épaulette vous apporte beaucoup de
satisfaction, elle vous impose aussi de nombreuses contraintes auxquelles vous
ne devez pas soustraire tout au long de votre carrière à la fois
difficile et exaltante et qui découlent, vous vous en doutez du
rôle des Forces Armées dans la Nation. C'est
précisément, une claire perception de celui-ci qui doit,
généralement, guider votre action notamment sur les hommes qui
vous jugeront selon la manière dont vous les encadrerez et les
commanderez.
Il me plait d'abord de répéter, comme je l'ai
souvent fait de cette tribune, que le Cameroun est un pays pacifique qui croit
aux vertus du dialogue plus qu'à l'exercice de la force et est fermement
attaché aux règlement pacifique des différends et au
respect de l'intégrité territoriale, de la souveraineté
et de la libre détermination des Etats.
Malheureusement cependant, de nos jours, ces bonnes
dispositions ne suffisent pas à garantir la paix. Il suffit d'observer
les événements d'actualité pour s'en convaincre.
Le réalisme nous commande, par conséquent de
demeurer vigilants et de faire en sorte que le Cameroun soit toujours en mesure
de conjurer tous les périls qui peuvent le menacer grâce à
la disponibilité de ses Forces Armées.
Dans cette perspective, le rôle de celles-ci est tout
d'abord de se préparer et d'être aptes à remplir leurs
missions traditionnelles de maintien de l'ordre et de défense nationale.
Cela nécessite, bien entendu, une mobilisation permanente et le
maintien à niveau suffisant de leurs capacités
opérationnelles.
Elles doivent ensuite, dans le cadre de l'exercice de leurs
activités quotidiennes, apporter leur contribution à la
consolidation de l'Unité National qui demeure l'une des
préoccupations majeurs du gouvernement et de notre Grand Parti National,
l'Union Nationale Camerounaise.
Elles doivent enfin, sans diminuer leur valeur combative,
participer aux actions de développement économique et social de
la Nation.
Pour ce faire, l'Etat déploie chaque année, en
dépit d'une conjoncture souvent défavorable, les efforts
nécessaires pour rendre nos Forces Armées toujours plus
opérationnelles et plus aptes à remplir leurs missions.
C'est dans cette perspective qu'il convient de situer les
récentes manoeuvres nationales qui ont permis de tirer des enseignements
précieux. Elles ont en particulier, montré la prise de conscience
des Autorités Administratives et politiques des problèmes de
défense. De même, elles ont contribué à
l'éveil de l'esprit de sécurité collective parmi les
populations en même temps qu'elles ont servi de facteur de rapprochement
entre celles-ci et les Forces Armées. Nous ne pouvons que nous en
réjouir et encourager les différents acteurs à
persévérer dans cette voie.
PATRIOTISME ET LOYALISME
Jeunes officiers, C'est à l'ensemble
de ces missions difficiles certes mais combien passionnantes que vous
êtes conviés.
Au demeurant, votre rôle qui ira croissant au fur et
à mesure que vous gravirez les échelons de la hiérarchie,
sera déterminant dans l'accomplissement de ces missions puisqu'il s'agit
à la fois tout en contribuant à la consolidation de la
capacité opérationnelle des Forces Armées, de former des
combattants et de façonner des citoyens.
D'abord former des combattants. Cela implique de votre part
des qualités humaines et pédagogiques ainsi que technique et
professionnelles.
Assurément votre formation à l'EMIA vous a
doté de ces qualités et de ces connaissances. Il vous revient
maintenant de savoir transmettre l'ensemble de ces valeurs aux hommes dont vous
avez la charge.
Ensuite simultanément, façonner des citoyens.
Comme vous le savez dans le cadre de notre démocratie gouvernante le bon
citoyen n'est pas celui qui suit seulement revendiquer ses droits, mais surtout
celui qui sait également remplir ses devoirs.
Dans votre cas comme dans celui des hommes que vous êtes
appelés à former et à rendre davantage conscients de leur
responsabilités, la Nation exige patriotisme et loyalisme, respect pour
les matériels et biens publics mis à votre disposition et
participation active aux grands événements nationaux. C'est dire
que votre rôle dans ce contexte est de compléter et de prolonger
chez les hommes placés sous votre commandement, l'Education
déjà entreprise
Dans la vie civile, notamment par notre Grand Parti National
dont l'ambition est de renforcer toujours davantage l'unité nationale
et de mobiliser toutes les énergies nationales pour le
développement.
ROLE ESSENTIEL
Officiers, sous-officiers,
Gradés et soldats,
Chers compatriote,
L'effort de formation et d'équipement de nos Forces
Armées correspond à notre constante volonté d'assurer par
nous-mêmes d'abord notre propre sécurité. Cette
volonté ne signifie nullement un repli sur soi ; bien au contraire,
elle laisse dans le respect de notre politique de paix, de non alignement et
d'indépendance, une place de choix à la coopération
bilatérale inter-africaine et internationale. Aujourd'hui plus que
jamais, cette coopération est rendue nécessaire par la
complexité des problèmes économiques et de
sécurités auxquels les Etats quels qu'ils soient sont
confrontés.
En accordant une attention toujours plus vigilante aux
problèmes de défense dans le monde agité qui est le
nôtre, la République unie de Cameroun ne fait rien moins que
prendre les mesures nécessaires à sa survie et se préparer
à honorer ses engagements dans le cadre bilatéral comme dans
celui multilatéral de l'OUA et de l'ONU ;
Dans cette perspective, le rôle des Forces Armées
apparaît essentiel. En effet, de leur disponibilité et leur
capacité d'action dépend la crédibilité militaire
de notre pays. Je ne doute pas un seul instant que no Forces Armées,
soutenues par la Nation Camerounaise tout entière sauront se montrer
à la hauteur de ce rôle auquel jeunes officiers, je suis sûr
que vous apporterez votre dynamisme, votre compétence et votre
générosité.
Vive les Forces Armées nationales,
Vive la République unie du
Cameroun.
Source : Société de
presse et d'édition du Cameroun (SOPECAM)
ANNEXE 4
DISCOURS DU PRESIDENT PAUL BIYA SUR LA POLITIQUE DE
DEFENSE DU CAMEROUN
DISCOURS A L'OCCASION DU TRIOMPHE DE LA PROMOTION
« VIGILANCE » DE L'EMIA
Yaoundé, le 30 juillet 1983
Officiers
Sous- Officiers,
Gradés et Soldat,
C'est avec un grand plaisir, vous vous en doutez, que je
préside aujourd'hui la cérémonie de remise des
épaulettes aux jeunes officiers frais émoulus de l'Ecole
Militaire Interarmées.
Bien que cette cérémonie soit désormais
une cérémonie traditionnelle dans notre pays, elle revêt
cependant à mes yeux une importance toute particulière. Elle me
donne, en effet, l'occasion, depuis mon accession à la magistrature
suprême, de prendre, en ma qualité de Président de la
République, Chef du Gouvernement et Chef suprême des forces
Armées, mon premier contact direct avec ce grand corps de l'Etat q'est
la grande famille des forces Armées nationales.
Ma présence ici, soyez-en assuré, se veut le
témoignage éloquent et significatif de la sollicitude et de
l'intérêt tout particulier que la Nation et moi-même portons
à tout ce qui touche aux forces Armées en général
et singulièrement aux problèmes de la défense nationale.
Il m'est particulièrement agréable d'adresser mes vives et
chaleureuses félicitations aux cadres civils et militaires et aux
professeurs vacataires dont le dévouement et la compétence
garantissent la haute qualité des enseignements dispensés
à l'Ecole Militaire Interarmées.
J'adresse également aux élèves officiers
dont la formation vient de s'achever, qui accèdent à
l'épaulette et se préparent à entrer dans la vie active,
mes félicitations non moins vives et non moins chaleureuses pour les
efforts louables qu'ils ont déployés tout au long de leur
formation dont je connais par ailleurs les exigences.
A ces félicitations, je joins de tout coeur mes
souhaits ardents de plein succès dans la carrière qu'ils ont
choisie, une carrière à la fois difficile et exaltante, une
carrière qui ne manque ni de rigueur ni de servitude.
Je me réjouis enfin de la présence, au sein de
la promotion à l'honneur aujourd'hui comme dans les
précédentes, des jeunes officiers de la République de
Haute Volta. Cette présence dont je me félicite et qui honore
notre pays, illustre la vocation africaine de l'école militaire
interarmées du Cameroun et témoigne de la volonté de
coopération, de solidarité et d'unité des états
africains. La République Unie du Cameroun, par ma voix, exprime à
la république Soeur de Haute Volta sa sincère gratitude pour la
confiance qu'elle ne cesse de lui témoigner d'année en
année.
Officiers,
Sous-officiers,
Gradés et soldats,
Selon une tradition déjà bien établie, la
promotion des jeunes officiers qui accède à l'épaulette
reçoit un nom de Baptême qui sert de devise à ses membres
et inspire lueur carrières. La promotion que nous fêtons
aujourd'hui portera celui de « vigilance »
qui, cela va sans dire, n'est pas sans signification et impose des devoirs tant
sur le plan national que sur le plan international. Le monde qui est le
nôtre, Jeunes officiers de la promotion
« vigilance » est un monde où s'affrontent les
intérêts et les volontés de puissance. Cet affrontement met
en péril non seulement la paix internationale, mais aussi la
stabilité, la souveraineté voire l'indépendance des Etats,
notamment dans le tiers monde, comme on peut s'en rendre compte au moyen
Orient, en Asie, en Amérique Centrale et plus près de nous, sur
le continent africain exposé aux influences et aux convoitises de toutes
sortes.
Or, la stabilité, la souveraineté et
l'indépendance sont des conditions essentielles du succès de la
lutte difficile que nos pays mènent pour le progrès et la
dignité de leurs peuples défavorisés par l'histoire. Il
importe, par conséquent, d'être vigilent pour les préserver
si nous voulons gagner le pari du développement. A cet égard, les
forces armées sont, incontestablement, le premier et le meilleur
instrument de cette vigilance. Faut-il en effet rappeler que le principal
devoir de forces armées est, en toutes circonstance, de défendre
l'intégrité territoriale du pays et l'indépendance
nationale ?
C'est dire qu'en baptisant votre promotion du nom de
« vigilance », on a entendu réaffirmer une mission
traditionnelle de forces armées à la quelle la conjoncture
internationale confère cependant un caractère plus que jamais
impérieux.
Mais, jeunes officiers, que doit signifier pour vous
être vigilant dans le contexte actuel du monde ? Cela signifie
d'abord être toujours prêts, à tout moment, à mettre
votre dévouement et votre compétence au service de la Nation,
prêts, à tout moment, à défendre celle-ci au
péril de votre vie. C'est-à-dire, en un mot, faire preuve d'un
patriotisme à toute épreuve et toujours en éveil.
Cela signifie aussi la rigueur dans la discipline ; car,
on l'a dit avec raison, la discipline fait la force des armées. Il
s'agit ici à la fois du respect de l'autorité hiérarchique
et d'un encadrement efficace des personnes qui sont, bien souvent, les secrets
du succès dans les forces armées et sans lesquelles celles-ci
peuvent difficilement assumer leurs hautes missions.
Cela signifie encore l'impérieuse
nécessité d'entretenir et de maintenir en permanence en bon
état le matériel coûteux mis à votre disposition,
afin d'en conserver intacte la capacité opérationnelle optimale
en toute circonstance. C'est une évidence de dire qu'il n'y a pas
d'armées sans équipements adéquats.
Cela signifie également demeurer ouvert aux techniques
modernes. Les progrès technologiques font qu'aux moyens traditionnels,
s'ajoutent constamment des moyens nouveaux qui bouleversent, parfois de
façon radicale, l'ensemble des problèmes stratégiques. Les
forces armées doivent donc élever sans cesse leur niveau
technologique pour accroître la capacité de résistance de
la nation.
Cela signifie, enfin, organiser et encadrer les populations
dans l'esprit de la défense populaire qui doit viser la
préparation, la mobilisation et la mise en état de défense
de la nation entière, en cas de conflit, permettre une rapide conversion
de toutes les énergies humaines et matérielles ainsi que leur
meilleure utilisation et leur protection efficace.
La vigilance doit, en outre et concomitamment, jeunes
officiers, s'exercer sur le plan national où, des forces de divisions ou
des particularismes de toutes sortes, qui grèvent nos pays en voie
d'intégration nationale, peuvent menacer les précieux acquis de
notre construction nationale.
A une telle situation, les forces armées sont
appelées à apporter au chef de l'Etat leur concours
engagé, loyal et déterminé pour lui permettre d'assumer
efficacement ses responsabilités de gardien de la constitution et de
garant de la légalité républicaine.
Vigilance ici signifie, par conséquent, respect de la
légalité, attachement aux institutions que le peuple camerounais
s'est librement données, fidélité et loyalisme.
C'est, en effet, en respectant scrupuleusement ses principes
que les forces armées seront véritablement le bouclier contre
lequel viendront se briser toutes les tentatives de déstabilisation, de
division ou de subversion. Je suis heureux de constater que les forces
armées camerounaises ont toujours été attachées
à ces principes. Cet attachement leur vaut la confiance du gouvernement
et le respect de la nation.
Comment ne pas le noter avec satisfaction au lendemain du
changement intervenu à la tête de l'Etat ? C'est grâce
à cet attachement et à la maturité du peuple camerounais
tout entier que ce changement s'est opéré dans l'ordre et la
dignité, portant ainsi témoignage de la solidité de nos
institutions et de la confiance du peuple camerounais en l'avenir du
Cameroun.
Officiers de la promotion «
vigilance »,
Après trois années d'un dur labeur, voici venu
enfin le moment solennel et mémorable du couronnement de tant d'efforts
méritoires, le moment d'accession à l'épaulette qui vous
ouvre la carrière des armes.
En choisissant cette carrière, vous avez choisi un
métier où l'exigence du dépassement de soi en tout est de
règle. En effet, le corps des officiers, auquel vous appartenez
désormais, exige, non seulement une parfaite santé physique et
morale, mais encore des qualités humaines et intellectuelles soutenues
par une ferme volonté de travail et un grand attachement à
l'idéal national.
Ainsi, portés par la pureté et la force de
cette exigence et par le souci d'enrichir les Forces Armées par les
apports nouveaux de votre compétence et de votre patrimoine, vous
devenez alors des exemples entraînants et rayonnants de rectitude et
d'abnégation ainsi que de foi dans l'effort et l'audace dans la
combativité.
Dépassement, courage, sacrifice, victoire sur
soi-même, voilà autant de vertus qui doivent marquer la vie de
tout soldat et plus particulièrement la vôtre. Faute de ces vertus
cardinales, qui font la vitalité des hommes en armes, la protection et
la défense des acquis de la Nation dans les domaines de
l'indépendance, de la souveraineté, de l'unité et du
développement risquent d'être illusoires.
Il importe par conséquent de cultiver ces vertus avec
un soin particulier et dans l'esprit de la recherche d'une rigueur toujours
plus grande dans la gestion des personnels et des matériels et dans
l'accomplissement des missions qui sont celles des Forces Armées
nationales.
Comme je ne cesse de le dire, un comportement digne de
l'intérêt collectif exige le sens de la rigueur, de
l'intégrité, de l'engagement et de la responsabilité. Il
doit sous-tendre les actes de tout citoyen camerounais, où qu'il se
trouve et quelque soit ses activités. Il est impératif pour vous.
Comment peut-on, en effet, dans un corps comme le vôtre, atteindre des
résultats positifs si l'on n'est pas ferme et rigoureux dans les
principes et les actes ? L'efficacité, ici peut être plus
qu'ailleurs, passe par cette voie.
La nation a foi et confiance dans ses forces armées, en
leurs capacités de défendre son intégrité, son
indépendance et tous les acquis de la construction nationale. J'ai bon
espoir que la promotion « vigilance », consciente des
lourdes responsabilités qui incombent aux Forces armées de la
Nation, ne négligera aucun effort pour accroître toujours
davantage, par son efficacité et son comportement, cette
nécessaire capacité.
Dans le monde d'aujourd'hui cependant, jeunes officiers, la
défense nationale ne saurait plus être l'affaire des seules Forces
Armées bien que celles-ci, cela va sans dire, continuent d'en être
le principal responsable de l'événement déterminant. Elle
postule désormais en raison même de la notre des problèmes
qu'elle pose une symbiose permanente entre les forces armées et la
Nation. Par delà les opérations spécialisées qui
ont pour but essentiel d'assurer et garantir la sécurité
nationale, chaque citoyen doit pour sa part, se sentir concerné par
cette dernière et y apporter sa contribution en donnant preuve de sa
vigilance. L'organisation de la défense nationale doit être
permanente, c'est-à-dire, en mesure d'assurer la sécurité
du pays et de sauver les acquis de la construction nationale en tout temps et
en toutes circonstance, contre toute agression. Elle doit, comme je l'ai
déjà dit, viser la préparation,la mobilisation et la mise
en état de défense de la Nation en cas de conflit.
De la symbiose entre les Forces Armées et la nation, on
doit légitimement escompter une augmentation de la résistance
morale et civique de la nation, qui est aussi un élément
essentiel de la défense. En un mot, la notion de défense
nationale doit exprimer la capacité de la nation à mobiliser
toutes les énergies susceptibles d'assurer la sécurité du
pays et la sauvegarde de nos conquêtes dans la voie du progrès.
La défense nationale devant être populaire,
globale, intégrée et permanente, elle doit opérer la
structuration rationnelle et judicieuse de toutes les forces populaires. Ainsi,
les paysans, les travailleurs, les jeunes constituent un réservoir
immense d'énergie et de vertu combattantes. La contribution effective de
ces forces vives de la nation à la défense nationale sera
fonction du niveau de conscience qu'elles pourront acquérir grâce
à une politique d'éducation, de formation idéologique et
d'encadrement. Une telle préparation sera assumée par nos forces
armées, dont vous constituez désormais, Jeunes officiers,
l'élément d'élite.
En définitive, sous le signe de la vigilance, la
défense est devenue à la fois totale et permanente. Les forces
armées n'en représentent plus qu'un aspect. Leur mission, ce
n'est plus seulement d'être l'élément armé dans la
nation, mais d'armer moralement, psychologiquement, civiquement la nation, de
manifester sa volonté d'indépendance, de participer aux jeux des
institutions démocratiques qu'elles ne peuvent garantir qu'en respectant
les règles.
Jeunes officiers de la promotion
« vigilance » quelle tâche exaltante
vous attend au sein des forces armées nationales ! Formés
comme vous l'êtes, animés d'un idéal patriotique
élevé, je ne doute pas que vous serez à la hauteur de
l'attente de la nation.
Vous le serez sans aucun doute si vous savez rester
fidèle à nos options fondamentales, notamment à celle de
la consolidation continue de l'unité nationale dans le respect de nos
diversités qui sont une richesse, mais aussi dans l'équilibre et
la justice.
En effet, par excellence, forces vives de la nation, les
forces armées sont un reflet caractéristique de l'unité
nationale ; venues de toutes les provinces et appartenant à
diverses ethnies, religions ou croyances, et militaires de tous grades,
voués à défendre une cause commune, c'est-à-dire,
la patrie camerounaise, doivent être solidaire. Vous devez être un
exemple d'unité et de solidarité ; car, comme j'ai eu
l'occasion de le dire : « l'unité nationale ne se
résume pas au sentiment trop souvent limité et passif
d'appartenir ou de vouloir appartenir à une même
communauté ; elle est surtout une volonté commune, une
volonté unanime de vivre, d'entreprendre et de construire ensemble, une
volonté unanime de rechercher et de partager fraternellement les
mêmes idéaux solidaires et les mêmes
espérances ». C'est cette volonté que la nation attend
de vous.
Officiers,
Sous-officiers,
Gradés et soldats,
Il ne me semble pas superflu de rappeler que c'est à
notre politique d'unité, de développement
équilibré et de justice sociale, patiemment menée et
inlassablement poursuivie, que nous devons la stabilité et la
prospérité qui valent de votre pays, en Afrique et dans le monde,
l'estime et la considération.
Mais, îlot de paix dans un monde de perpétuelle
turbulence, le Cameroun attend préserver ses acquis de défendre
farouchement son intégrité territorial. A cet égard, tout
en modernisant les forces armées et en entretenant l'esprit de la
défense populaire, il n'en développe pas moins la voix du
dialogue et le règlement des différends par la
négociation.
Toujours épris de paix, sans ambition de puissance,
mais jaloux de sa souveraineté, il reste fidèle à ses
options, c'est-à-dire l'indépendance nationale, la non
ingérence dans les affaires intérieures des états , le
respect de leurs souverainetés, de leur intégrité
territoriale, le non alignement et la recherche de la paix entre les nations,
la coopération sans frontière, l'unité et la
solidarité africaine, la lutte pour la libération totale de
l'Afrique des derniers bastions du colonialisme et de l'apartheid et le
développement du continent.
Le Cameroun aspire à avoir les relations amicales avec
tous les pays du monde et à vivre en paix à l'intérieur de
ses frontières. Il n'a pas d'autres ambitions que de poursuivre dans la
paix et la dignité sa marche vers le progrès. Nos forces
armées et les sacrifices que la nation consent pour les équiper
n'ont pas d'autres buts que de garantir les meilleures conditions de
réalisation de cette légitime ambition.
Tout en renouvelant : mes sincères encouragements
aux nouveaux lauréats, je tiens à exprimer ma satisfaction
à l'ensemble des Forces Armées et les exhorte à
persévérer dans la voie d'une contribution toujours plus efficace
à la sécurité et au développement de la partie
camerounaise.
Dans cette perspective, je vous invite tous à plus de
cohésion, de solidarité, de dévouement, de discipline et
de rigueur, afin de préserver nos acquis et poursuivre, ensemble, avec
bonheur l'édification d'une nation toujours plus forte, plus unie et
plus prospère dans la paix et la concorde.
Vive les Forces Armées !
Vive le Cameroun !
Source : SOPECAM
ANNEXE 5
DISCOURS DU PRESIDENT PAUL BIYA SUR LA MISSION DE
PRESERVATION DE LA PAIX PAR LES FORCES ARMEES
DISCOURS A L'OCCASION DU TRIOMPHE DE LA PROMOTION
« UNITE ET SOLIDARITE » DE L'EMIA
Yaoundé, le 1er décembre 1990
Jeunes Officiers de la promotion
« Unité et Solidarité »,
Je suis venu aujourd'hui saluer votre triomphe et conforter
votre engagement.
Au terme de trois années d'une formation très
exigeante et très rigoureuse, vous voici devenus officiers de
l'Armée du Cameroun.
Je vous félicite très sincèrement et vous
souhaite la bienvenue au service de votre pays.
Etre officier au Cameroun, c'est avant tout faire preuve d'un
sens élevé des responsabilités :
-responsabilité de chacune de vos
décisions ;
- responsabilité vis-à-vis des
hommes que vous commanderez ;
- responsabilité vis-à-vis de
votre pays.
Etre officier au Cameroun, c'est s'engager :
- à servir son pays en toutes
circonstances ;
- à y maintenir la paix et la stabilité.
Etre officier au Cameroun, c'est s'engager :
- à défendre les institutions et
l'intégrité de notre territoire ;
- à respecter l'indépendance des autres
Etats.
Dans la carrière que vous avez choisie, vous devrez
faire preuve de solides qualités morales.
C'est à votre droiture, à votre patriotisme et
à votre courage, que les Camerounais jugeront les soldats que vous
êtes.
C'est par votre sens du devoir, votre respect de la
hiérarchie et de la discipline que l'armée du Cameroun sera une
armée efficace.
C'est par l'exemple que vous imposerez le respect à vos
hommes : le respect ne se décrète pas, il se
mérite.
Vous intégrez l'armée à un moment
où de profonds changements ont lieu dans le monde.
Au plan Est-Ouest, la période de la guerre froide est
terminée et un nouvel ordre du monde est en train de voir le jour.
On parle désormais de désarmement, de
consolidation de la paix et d'efforts de développement.
Mais en Afrique, hélas, des nombreux conflits
subsistent encore, sanglants et meurtriers, attisés par la haine,
l'envie et des volontés hégémoniques.
Le Cameroun, pour sa part, ne nourrit aucune ambition de
puissance, le Cameroun est un Etat libre dont le développement n'est
possible que dans la paix et la stabilité.
La mission principale des forces armées est de
préserver cette paix, dans le cadre de nos options
fondamentales :
· l'indépendance nationale ;
· la non-ingérence dans les affaires
intérieures des Etats ;
· le respect de leur souveraineté et de leur
intégrité territoriale ;
· le non-alignement et la recherche de la paix entre les
Nations ;
· la coopération sans frontière ;
· l'unité et la solidarité africaine.
Outre cette mission fondamentale, l'armée doit
également participer au combat quotidien contre la crise
économique.
Elle doit donner l'exemple de la rigueur et de
l'économie.
Jeunes officiers,
Vous devez valoriser et consolider les rapports de confiance
mutuelle qui doivent exister entre l'armée et les citoyens.
Notre armée doit être au service de la Nation, au
service du peuple.
Je vous fais confiance pour mener à bien les hautes
missions qui vous sont confiées.
J'affirme et je renouvelle mon entière confiance en
l'armée du Cameroun et en ses chefs pour le maintien de la paix et de la
stabilité de notre pays, et pour son aide dans la poursuite des
objectifs du Renouveau.
Le Cameroun est un pays libre, indépendant et en
paix.
Je fais confiance en l'armée du Cameroun pour qu'il le
reste !
Vive les Forces Armées du
Cameroun !
Vive le Cameroun !
Source : SOPECAM
ANNEXE 6 :
DISCOURS DU PRESIDENT PAUL BIYA SUR LES CAPACITES DE
L'ARMEE CAMEROUNAISE A EPOUSER LES NOUVELLES EXIGENCES DE L'ENVIRONNEMENT
INTERNATIONAL.
DISCOURS AU QUARANTIEME ANNIVERSAIRE DES FORCES ARMEES
CAMEROUNAISES
Ngaoundéré, le 31 mars 2000
Officiers,
Sous-Officiers,
Officiers Mariniers, Sapeurs,
Gendarmes, Gradés, Soldats et Marins des Forces
Armées nationales,
Il y a dix ans, j'étais avec vous à Koutaba,
pour fêter le trentième anniversaire de notre armée.
Je suis heureux aujourd'hui de me trouver avec vous à
Ngaoundéré à l'occasion des 40 ans de nos forces
armées.
Ngaoundéré est, en effet, avec Koutaba un des
lieux mythiques où notre armée a été bâtie et
où au fil des années, elle s'est adaptée à ses
nouvelles tâches.
Quel officier, Sous-officier ou homme de rang n'est pas
passé, jusqu'à il y a quelques années par
Ngaoundéré pour y subir sa formation commune de base au Centre
d'Instruction de l'Armée de Terre (CIAT) devenu ensuite Centre
d'Instruction des Forces Armées Nationales (CIFAN), ou à Koutaba
pour y passer son Brevet de Parachutiste et parfaire sa formation de
sous-officier, prélude à celle d'Officier à l'Ecole
Militaire Interarmées ?
Service avec « Honneur et
Fidélité », telle est la devise de nos Forces
Armées.
Devise qui ne s'est jamais démentie tout au long des 40
ans qui viennent de s'écouler.
« Tradition et Modernité » telle
peut être la devise de ce quarantième anniversaire, qui
coïncide heureusement avec notre entrée dans le
21ième siècle.
Tradition en effet parce qu'aucune armée n'est digne de
ce nom si elle n'a pas un passé dont elle peut se réclamer et
dont elle peut être fière.
Le choix de Ngaoundéré, la présence parmi
nous à l'occasion de cette cérémonie des anciens ministres
des Forces Armées et de la Défense et d'une
délégation des Officiers retraités des Forces
Armées originaires de nos dix provinces, la relance du bulletin de
liaison «Honneur et Fidélité », l'exposition photo
retraçant les 40 ans de notre Armée, symbolisent à nos
yeux cette tradition.
Mais les Forces Armées camerounaises, doivent
également épouser leur temps, celui de la modernité,
c'est-à-dire s'adapter aux changements aussi bien sur le plan technique
et technologique que sur celui de la doctrine et de la stratégie.
La situation internationale a également depuis 10 ans,
profondément changé. Et il nous faut, bien entendu, en
tenir compte.
A un monde bipolaire où s'affrontaient deux blocs
antagonistes a succédé un monde où la menace d'une
conflagration mondiale s'est estompée. En revanche, les conflits
régionaux et les conflits internes aux Etats particulièrement en
Afrique se sont multipliés.
Au plan du droit international, de nouvelles idées ont
fait surface, avec l'apparition du « droit d'ingérence
humanitaire », encore mal défini et dont l'apparition risque
de s'avérer difficile.
Au cours des dernières décennies,
l'évolution des idées politiques a également permis
à la démocratie de gagner du terrain sur l'ensemble de la
planète. Ce phénomène irréversible, dont il faut se
féliciter, a parfois été mal maîtrisé et a
donné lieu à des désordres dont certains Etats ne se sont
pas encore relevés.
Nous devons donc veiller à ce qu'une dérive du
processus démocratique auquel, je le répète, nous sommes
profondément attachés, ne vienne compromettre ni la
stabilité de nos institutions ni notre développement
économique et social, ni bien entendu notre sécurité.
Officiers,
Sous-Officiers,
Officiers Mariniers,
Militaires de Rang des Forces Armées
camerounaises,
Notre Armée a toujours su faire face à toutes
les situations.
Elle s'est montrée apte, depuis dix ans, comme par le
passé, à remplir les missions qui lui étaient
confiées :
· en 1991 - 1992, pendant la période de transition
vers le multipartisme, en contribuant au maintien de l'ordre public ;
· depuis 1994, en s'opposant aux tentatives d'atteinte
à notre souveraineté et à l'intégrité de
notre territoire ;
· et en ce moment même, en participant aux
côtés des autres forces de l'ordre à la lutte contre la
criminalité urbaine et rurale.
En effet, notre Armée, véritable ciment de notre
unité nationale, a toujours été, est et demeure le rempart
de nos institutions et de notre souveraineté. Je suis certain qu'elle
relèvera victorieusement ce dernier défi.
Demain également dans le cadre des organes de
préservation de la paix régionale comme le Conseil de paix et de
sécurité en Afrique Centrale (COPAX), notre Armée aura
à contribuer au maintien de la sécurité collective dans
notre sous- région. Je ne doute pas un seul instant qu'elle saura se
montrer digne de la confiance ainsi placée en elle.
Pour que vous puissiez accomplir vos missions dans les
meilleures conditions, le Gouvernement s'efforce dans la mesure de ses
possibilités, de dégager des moyens de nature à vous
permettre d'acquérir des matériels et des équipements
modernes, à maintenir ceux qui sont en dotation, à construire et
à réhabiliter vos infrastructures. Ces efforts seront
poursuivis.
En retour, la Nation s'attend légitimement à ce
que vous demeuriez un corps d'élite, discipliné,
pénétré de sa haute mission, conscient de la valeur des
matériels qui lui sont confiés et attaché aux valeurs
civiques et morales de la République.
Dans cet esprit, j'ai décidé la remise de
certaines peines et sanctions à l'occasion de ce quarantième
anniversaire.
Enfin, dans le cadre de la modernisation du cadre juridique de
nos Forces armées, j'ai instruit le ministre d'Etat
délégué à la Présidence chargé de la
Défense, de convoquer le Comité de Coordination
InterArmées, en vue d'actualiser les différents projets de textes
législatifs et réglementaires actuellement en vigueur.
Je voudrais en terminant, saluer la mémoire des membres
des Forces Armées qui sont tombés pour la défense et la
sécurité de notre patrie en diverses circonstances. Ils ont
sacrifié leur vie pour nous. Nous devons leur en être
éternellement reconnaissant.
Que leur sacrifice soit pour nous un exemple
d'abnégation et de dévouement.
Vive les Forces Armées
nationales !
Vive le Cameroun !
Source : SOPECAM
ANNEXE 7
CARTE GEOPOLITIQUE DE LA SOUS-REGION AFRIQUE
CENTRALE
Source : Atlas de la République Unie
du Cameroun, 1979, Paris, Edition J.A
ANNEXE 8 : CARTE GEOGRAPHIQUE DU CAMEMEROUN :
LA VEGETATION
* 1 Cette position est
défendue par des stratèges tels Clausewitz et Sun zi.
Clausewitz (Carl Von) : Général et
écrivain militaire prussien. Auteur de Von Kriege ( De la guerre) . Il
est théoricien de la stratégie militaire occidentale à
l'aube du XIXème siècle(Géré, 1999 :44)
Sun zi : stratégiste chinois (5ème
siècle avant J.C ?). Il n'existe rien de certain concernant la vie
de Sun zi. Il démeure néanmoins un texte, le Sun zi Bingya,
« L'art de la guerre de Sun zi », qui constitue le plus
ancien traité de stratégie connu (Géré,
1999 :257).
* 2 C'est-à-dire que la
réalisation de ces objectifs demande des efforts substantiels et donc
prolongés pour surmonter des obstacles comprenant
généralement des adversaires pourvus de stratégies
antagonistes, obstacles assez élevés pour entretenir
l'incertitude, au moins pendant un certain temps sur l'issu de l'épreuve
( De Montbrial et Klein, 2000 : 527)
* 3 On parle
d'«ethos » et d' « ethos de classe », terme
emprunté à weber pour signifier une dimension particulière
de l'habitus ou système des dispositions, à savoir
l'intériorisation des valeurs du groupe.
* 4 En attendant la mise en
place de cette école, les enseignements qui y sont dispensés sont
assurés au sein de l'Ecole Militaire Interarmées (Décret
de 2005 portant création et organisation du centre de l'enseignement
militaire supérieur, article 31).
* 5 La loi N°67-L7-9 du 12
Juin 1967 portant organisation de la défense et des forces armées
camerounaises.
* 6 France, Maroc, Grèce,
Etats-Unis, Chine...
* 7 L'on peut ainsi de
façon décroissante, classer quelques uns des pays formant les
officiers camerounais : la France forme 60 stagiaires camerounais en
moyenne sur une période de cinq ans ; la Chine : 25
officiers ; le Maroc : 17 ; la Grèce : 9 ; les
Etats-Unis :7 ; l'Allemagne :2 ; la Belgique :2 ;
l'Angleterre ; l'Israël ; l'Italie ; l'Espagne viennent
tous en dernière position avec 1 stagiaire chacun sur une période
de 5 ans.
* 8 Notons pour mémoire
que le feu chef d'Etat Major particulier du Président de la
République, le Général de Brigade, BENAE MPEKE Blaise
avait également été formé à l' EMIAC.
* 9 D'autres pays comme
l'Israël et l'Italie n'offrent également des places au Cameroun
qu'en matière de formation continue.
* 10 Chef d'Etat-major de
l'Armée de l'Air aujourd'hui décédé.
* 11 C'est la principale
école d'officiers de gendarmerie en France. C'est elle qui reçoit
également la majorité d'officiers camerounais, se
spécialisant dans la gendarmerie à l'étranger.
* 12 Cet ouvrage n'a pas
été publié à l'intention du public, mais est
destiné à l'usage de l'armée camerounaise.
* 13 Le tronc
« B » se subdivise en deux branches :
-Le tronc « B 1 » du recrutement
interarmées est la filière des sous-officiers titulaires du
baccalauréat , GCEAL ou d'un diplôme équivalent
âgé de 30 ans au maximum au 31 décembre de l'année
du concours et totalisant au minimum 5 ans de service effectif sous les
drapeaux.
-Le tronc « B2 » de la promotion issue du
rang. Elle concerne les militaires issus du rang qui accèdent au corps
des officiers par le jeu normal de l'avancement (article 2 , décret
N°2001/87 du 25 juillet 2001).
* 14Ce document précise
dans son article 20 qu'en attendant un texte spécial régissant
l'armée camerounaise en gestation , les textes français sont
appliqués en ce qui concerne l'administration et la discipline.
* 15 Loi N096/06 du 18 janvier
1996 portant révision de la constitution du 02 juin 1972
* 16 Décret
N°83/539 du 5 novembre 1983 portant création d'un Etat major
particulier du Président de la République.
* 17 Notre choix s'est
porté sur cette école car c'est la seule des trois où nous
avons pu recueillir un certain nombre d'informations
* 18 Aujourd'hui école
militaire spéciale de Saint cyr.
* 19 Parmi les autres objectifs
que sont : la volonté des écoles de développer la
capacité des stagiaires à faire face aux nouvelles menaces
(déliquescence économique et financière, nouvelle
technologie...) ; l'adaptation de la taille de l'outil de formation pour
une armée professionnelle (« La formation en
France »,2007).
* 20 Cette doctrine d'emploi
des forces, énonce des idées directrices qui doivent permettre la
conduite de l'action militaire en cas de conflit opposant le Cameroun à
un autre pays (source anonyme). Précisons qu'en matière de
défense les informations sont classifiées selon leur nature et
leur accès est limité aux personnes ayant fait l'objet d'une
habilitation particulière. On distingue quatre niveaux de protection des
informations en matière de défense classée par ordre
croissant : diffusion restreinte(il s'agit des
informations qui peuvent être connue de tous les militaires mais en
respect des règles de discrétion professionnelle) ;
confidentiel défense ( il s'agit des
informations qui, réunies ou exploitées peuvent conduire à
divulguer un secret défense) ; secret
défense ( ce sont les informations dont la divulgation
peut nuire à la défense) ; très
secret ( ce sont les informations qui concernent les
priorités gouvernementales de défense).
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